II. DE CERTAINES QUESTIONS RELATIVES A LA DÉFINITION DES MISSIONS

Il est probablement un peu caricatural de présenter l'histoire du ministère de l'économie et des finances comme celle d'une administration dont l' impérium sur les autres administrations se serait diffusé à de nombreux secteurs de la société civile.

Mais, il serait également très caricatural de présenter ce ministère, comme un " colosse désarmé ".

Comme toujours, la réalité est plus nuancée. La perte de situations de monopole ou les difficultés insurmontables de réalisation de certaines missions ont provoqué des " aggiornamenti ". Il n'en reste pas moins que le ministère continue de disposer de positions exceptionnelles.

Votre rapporteur spécial en tire deux conclusions quant à la définition des missions du ministère.

Elle doit, selon lui, obéir à deux principes.

Sans renoncer à ses missions essentielles de service public, le calibrage des tâches doit d'abord obéir à un principe de réalisme.

Il doit également, mieux qu'aujourd'hui, poursuivre un objectif de plus grande utilité collective.

A. FAIRE PRÉVALOIR UN PRINCIPE DE RÉALISME

Votre rapporteur spécial souhaite évoquer quelques unes des évolutions en cours de ce point de vue.

1. Le plan de charge de la DGCP

Certaines concernent le Trésor public. Il est, après la direction générale des impôts, le service du ministère réunissant à la fois les plus nombreux effectifs et les dotations budgétaires les plus importantes.

Les moyens ont progressé de plus de 25 % entre 1993 et 2000 et les recherches d'économies ont été centrées sur la baisse des effectifs. Ceux-ci ont diminué de 896 unités entre 1996 et 2000, soit une réduction de 1,6 %.

La direction est engagée dans un effort d'évaluation du coût de ses missions qui mérite d'être soigneusement suivi à l'heure où la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 impliquerait une comptabilité analytique sans faille.

L'évaluation des coûts menée par la Direction de la comptabilité publique

Il n'existe pas encore de comptabilité analytique complète des services extérieurs du Trésor.

Mais, la direction de la comptabilité publique met en oeuvre deux types de démarches pour évaluer le coût de fonctionnement des services déconcentrés du Trésor : une approche des coûts par mission et pour certains secteurs, une comptabilité analytique.

La mesure des coûts par mission est rendue difficile du fait des caractéristiques du réseau du Trésor public qui est marqué par une forte densité de structures polyvalentes. Avec près de 4.000 postes comptables, répartis sur l'ensemble du territoire, les services déconcentrés de la direction de la comptabilité publique comprennent un nombre élevé de petites structures (996 ont une charge équivalente à moins de 3 agents). La quasi-totalité des postes comptables exerce l'ensemble des missions du Trésor public, une faible part se consacrant exclusivement à un seul secteur d'activité.

Outre leur émiettement, la polyvalence des structures du Trésor public constitue une contrainte importante pour une mesure directe des coûts où prédominent les dépenses de personnel.

Une approche fondée sur la mesure de l'activité réelle de chaque agent et des coûts de structures inhérents est donc très difficile à mettre en oeuvre. Un tel dispositif supposerait l'organisation d'un suivi individualisé de l'activité des personnels avec la définition d'unités d'oeuvre spécifiques.

La problématique se révèle peu différente pour les dépenses de structures. Leur mesure directe se heurte à la difficulté de déterminer des clefs de répartition suffisamment fiables, en raison des disparités dans l'organisation des tâches dans chaque poste comptable, notamment les trésoreries générales.

Dans ce contexte, la direction de la comptabilité publique a développé une approche des coûts à partir de standards nationaux, assortie d'un suivi spécifique pour certaines catégories de dépenses.

La mesure des coûts de personnels par mission qui représentent près de 75 % de l'ensemble des coûts des services est réalisée par exploitation des résultats du recensement de l'activité de chaque poste comptable, les travaux inventoriés étant valorisés en équivalent-agent à partir de la mesure du temps moyen nécessaire à leur exécution.

Cette méthode, mise en oeuvre tous les cinq ans pour établir le classement des postes comptables, permet de valoriser leur activité, et de disposer au plan national d'un outil de répartition des moyens par mission.

Le recensement des opérations repose sur l'inventaire exhaustif des travaux réalisés durant une année, qui groupe 514 types d'opérations dans les postes non centraliseurs et 694 dans les postes centralisateurs. La durée moyenne nécessaire à l'exécution d'une chaîne de travail est pondérée en fonction de sa fréquence par rapport à l'élément recensé.

Par ailleurs, les éléments de répartition fournis par le barème peuvent être appliqués à certains coûts de structures, qui ne peuvent être répartis au moyen d'une approche directe.

Une telle approche n'est en revanche pas justifiée pour les dépenses d'affranchissement ou les dépenses informatiques, dont la répartition est très marquée par les spécificités de telle ou telle mission.

Une clé de répartition spécifique, découlant des flux d'envoi postaux générés par chacune des missions, a donc été bâtie, qui reste cependant à affiner compte tenu d'une part, du manque de recul (l'ancien système de franchise postale, qui n'a cessé qu'en 1996, faisait obstacle à un suivi opérationnel en ce domaine) et, d'autre part, des évolutions inhérentes au nouveau système de paiement réel (perspectives de rationalisation des envois différentes selon les missions).

S'agissant des dépenses informatiques, c'est le poids relatif des coûts des différentes applications du réseau du Trésor public qui constitue la base de la clé de répartition des coûts par missions.

Les éléments d'analyse à la disposition de la direction de la comptabilité publique marquent le point d'entrée dans la mise en place d'une comptabilité analytique qui n'a, jusqu'à présent, été développée que pour les départements informatiques du Trésor public et le service de la redevance.

Cette évaluation a fait le lit de modifications des conditions d'affectation des personnels dans les Trésoreries et d'un projet de révision de la carte des implantations des recettes des finances.

On rappelle qu'en ce qui concerne le premier dispositif, il s'agit de confier la gestion de deux Trésoreries de petite taille à un même chef de poste. Les objectifs poursuivies et les modalités du dispositif sont décrits ainsi qu'il suit par le ministère :

"Les emplois de catégorie A dégagés par ces mesures seront réaffectés pour partie dans les départements et pour le reste au profit du réseau, dans l'objectif de renforcer l'exercice des missions en matière d'expertise économique et financière et de conseil aux collectivités locales. Ces emplois seront également redéployés dans le domaine des contrôles sur place et dans les trésoreries situées en zone urbaine.

Ce schéma d'organisation devrait concerner à moyen terme près de 300 trésoreries.

En ce qui concerne la réforme des recettes des finances , ses modalités seraient les suivantes :

" Par ailleurs, la direction a engagé une réforme des Recettes des finances fondée sur la rénovation des missions et sur la révision de la carte de leur implantation.

Des tâches actuellement assurées par la Recette des Finances seront recentrées sur la Trésorerie Générale et les postes comptables de la ville-siège.

C'est le cas de la fonction de centralisation comptable et de tenue de la comptabilité qui sera désormais assurée directement par la seule Trésorerie Générale, compte tenu de l'évolution des techniques et pour accélérer la remontée de l'information comptable.

Le recouvrement des impôts de la ville-résidence de la Recette des Finances, sera confié à un autre poste en résidence.

En contrepartie, l'activité des Recettes des Finances sera recentrée sur le rôle majeur d'animation, d'assistance et de soutien de proximité des postes comptables "

Une révision de la carte des implantations est par ailleurs en oeuvre.

Ces réformes sont nécessaires. Elles doivent s'inscrire dans le cadre du maintien de la préoccupation d'assurer les missions essentielles du réseau dont le tableau ci-dessous rappelle la nature et la répartition des moyens consacrés à chacune d'entre elles.

Répartition des moyens du Trésor public par mission

56078 emplois budgétaires

en pourcentage

Recouvrement

29,92

Dépense de l'Etat

9,36

Comptabilité

3,49

Collectivités et établissements publics locaux (EPL)

43,68

Trésorerie

7,15

Divers

5,78

Action économique

0,62

L'on pouvait, en particulier, s'interroger sur la pertinence d'allouer tant de moyens aux activités financières du réseau qui mobilisent des encours somme toute modestes.

Situation au 31 décembre 1997 et 1998

(en milliards de francs)

1997

1998

Variations 1998/1997

COMPTES DE DEPOTS

Nombre de comptes-chèques

863 439

800 599

- 7,28 %

Encours

17,70

18,92

6,89 %

Nombre de comptes à terme

83 515

59 562

- 28,68 %

Encours

4,18

3,72

- 11 %

CODEVI

Nombre de livrets

122 084

125 794

3,04 %

Encours

1,62

1,74

7,41 %

LIVRETS-JEUNES

Nombre de livrets

8 200

8 970

9,39 %

Encours

0,05

0,05

-

BONS DU TRESOR

Placement brut

6,53

2,94

- 54,98

OPCVM

Actif géré

52,11

51,65

- 0,88 %

EMPRUNTS ET ASSIMILES

Placement brut

4,45

2,65

- 40,45 %

Dont emprunts d'Etat

3,79

2,24

- 40,9 %

PRIVATISATIONS

0,158

0,152

- 3,8 %

PEA

Nombre de plans

13 967

17 991

28,81 %

Encours

1,91

2,44

27,75 %

CNP

Placement (chiffre d'affaires)

6,8

6,0

- 11,76 %

Des réformes sont en cours. Elles s'inscrivent dans une réflexion sur le sens des missions du réseau de la Comptabilité publique et dans le contexte de réaménagements législatifs et réglementaires.

Le premier d'entre eux concerne les fonds des notaires dont le monopole de la collecte devrait être confié au Trésor public, ce qui suppose des aménagements. Le second provient de la nécessité de s'adapter aux règles européennes et nationales de la concurrence au terme desquelles l'activité de collecte des fonds particuliers par le Trésor public pourrait être considérée comme irrégulière.

Au-delà de ce débat juridique, force est de reconnaître que l'activité de collecte des fonds particuliers qui n'est pas conduite dans le cadre d'une mission de service public clairement identifiée devait être repensée.

Il faut cependant mieux réfléchir aux modalités de l'activité de conseil aux collectivités locales qu'il entre dans les intentions du ministère de développer et d'améliorer. Elles ne doivent pas être considérées comme une simple " porte de sortie " destinée à combler un vide. Et les difficultés qu'elle suppose en termes de responsabilités juridiques, de concurrence, voire de faisabilité, méritent un examen complet.

2. Le plan de charge de la DGCCRF

Les missions de la DGCCRF apparaissent tellement diversifiées et tellement exigeantes que ses services semblent n'y pas suffir.

Le contrôle des marchés publics absorberait à lui seul la totalité des agents s'il devait être exhaustif. Et, les contrôles par sondage ne peuvent être efficaces qu'à condition d'être suffisamment nombreux, ce qui n'est pas le cas.

La réforme du code des marchés publics sera sans doute l'occasion d'ajustements sur ce point mais il reste à en apprécier les effets sur le couple " moyens-efficacité " de la police des marchés assurée par la DGCCRF.

Sachant que plusieurs des missions de la direction sont partagées avec d'autres administrations, votre rapporteur spécial souhaite explorer les rationalisations qu'on pourrait envisager.

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