II. LES TRAVAUX DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE : LA CRÉATION D'UN DÉLIT DE MANIPULATION MENTALE

L'Assemblée nationale a examiné le 22 juin 2000 la proposition de loi adoptée par le Sénat. Elle a saisi cette occasion pour examiner en même temps dix propositions de loi déposées par des députés, en particulier Mme Catherine Picard, M. Eric Doligé, M. Jean Tiberi, M. Jean-Pierre Brard et M. Pierre Albertini.

A l'initiative de sa rapporteure, Mme Catherine Picard, l'Assemblée nationale a modifié la proposition de loi tout en y insérant des dispositions nouvelles.

A. LE CHOIX D'UNE DISSOLUTION JUDICIAIRE

L'Assemblée nationale a accepté la proposition du Sénat tendant à prévoir une possibilité de dissoudre certains groupements condamnés à plusieurs reprises ou dont les dirigeants ont été condamnés à plusieurs reprises pour certaines infractions.

Elle a cependant refusé d'insérer cette procédure dans la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées, s'opposant ainsi à ce que la dissolution soit prononcée par le Président de la République sous le contrôle du Conseil d'Etat.

Dans son rapport, Mme Catherine Picard a en effet estimé que " les décisions prises sur la base de cette loi ont un caractère éminemment politique et face aux sectes, qui soulèvent des questions nouvelles en termes de libertés publiques, les principes des droits de la défense et du débat contradictoire demeurent essentiels : le risque d'un usage sélectif et non impartial de cette procédure apparaît ici excessif. Sans doute, un tel décret de dissolution peut faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'Etat, mais cette voie d'action ne satisfait pas les exigences des droits précités de la défense et du débat contradictoire, dès lors que la sanction du juge ne peut intervenir qu'a posteriori " 1 ( * ) .

L'Assemblée nationale a donc prévu une possibilité de dissolution judiciaire des personnes morales qui poursuivent des activités ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter la dépendance psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, lorsque ces personnes ou leurs dirigeants ont été condamnés à plusieurs reprises pour certaines infractions.

La liste établie par l'Assemblée nationale des infractions commises permettant de demander une dissolution est assez proche de celle qu'avait proposée le Sénat. La fraude fiscale n'y figure cependant plus, la rapporteure de la commission des lois de l'Assemblée nationale ayant estimé qu'une réflexion complémentaire était nécessaire.

Selon le texte adopté par l'Assemblée nationale, la demande de dissolution serait instruite et jugée selon la procédure à jour fixe , qui permet qu'une décision définitive, sous réserve d'appel, soit prononcée dans un délai assez court. L'article 788 du code de procédure civile, relatif à la procédure à jour fixe, prévoit en effet qu'en cas d'urgence, le président du tribunal peut autoriser le demandeur, sur sa requête, à assigner le défendeur à jour fixe. La requête doit exposer les motifs de l'urgence. Le jour de l'audience, le président s'assure qu'il s'est écoulé un temps suffisant depuis l'assignation pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense.

* 1 Rapport AN n°2472, p. 28.

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