2. Les voies de contamination

Ces deux sources d'exposition contribuent à une pollution environnementale et une intoxication des populations locales par deux voies distinctes : l'inhalation de vapeurs et la contamination des poissons.

- L'inhalation de vapeurs est directement liée à l'orpaillage.

L'utilisation du mercure, et plus encore, le chauffage de l'amalgame libère des vapeurs de mercure. Le premier public contaminé est donc l'orpailleur, ainsi que sa famille. Cette étape est en effet très spectaculaire et très attendue, et il arrive fréquemment que l'entourage familial y assiste, dans des lieux fermés. Les vapeurs de mercure sont à la fois directement inhalées et imprègnent les cheveux, les vêtements, le logement... Il existe bien des équipements pour récupérer les vapeurs de mercure, mais l'activité d'orpaillage est un secteur très hétérogène, où les pratiques semi-industrialisées côtoient les pratiques artisanales plus ou moins clandestines, souvent parfaitement connues, et même parfaitement localisées, mais en réalité plus ou moins institutionnalisées, les orpailleurs guyanais utilisant -exploitant ?- la main d'oeuvre clandestine brésilienne ou surinamienne. Il va sans dire que, dans ces conditions, les techniques de protection et de récupération des vapeurs ne sont pas utilisées.

Le mercure inhalé est un mercure minéral ou inorganique. Le mercure inhalé est absorbé par les voies respiratoires à plus de 80 %, le reste est soit exhalé, soit absorbé par les voies intestinales. Le mercure absorbé est oxydé par des catalases et se transforme en mercure ionisé. Le mercure ionisé est principalement distribué dans le rein, et, dans une moindre mesure, dans le cerveau.

Sauf cas d'inhalation aiguë, se traduisant par une irritation intense suivie de troubles hémorragiques des voies respiratoires, l'intoxication de vapeurs de mercure, consécutive au chauffage du mercure métallique, se traduit par une intoxication chronique. Les troubles cliniques sont cependant peu spécifiques : irritabilité, troubles du sommeil, troubles rénaux, détérioration intellectuelle...

La meilleure indication biologique de l'exposition au mercure inorganique est la concentration urinaire. La concentration de mercure dans le sang pour mesurer les intoxications aux vapeurs mercurielles est moins fiable, car il y a risque de confusion entre intoxication par les vapeurs et intoxication au mercure organique par absorption de poisson.

- La contamination de la faune et la flore

Le mercure inorganique est rejeté dans l'environnement tant par l'activité industrielle que par l'activité humaine qui mobilise les sources naturelles. Le mercure est drainé dans l'eau des rivières, des marécages. Il se dépose dans les sédiments, puis est transformé en mercure organique (méthylmercure) par l'action des bactéries (surtout dans les eaux stagnantes des marais avec décomposition des végétaux et peu de lumière). Le méthylmercure peut alors entrer dans la chaîne alimentaire. Il est d'abord absorbé par les espèces végétales, ce qui constitue le premier maillon du processus de bioamplification dans la chaîne alimentaire aquatique. Les poissons herbivores consomment les productions primaires (végétaux) et sont eux-mêmes la proie de poissons carnivores qui servent à l'alimentation des populations locales. Au cours de ces étapes, le méthylmercure suit un processus de bioamplification, par transfert cumulatif. Les concentrations de mercure chez les poissons prédateurs peuvent être plusieurs millions de fois supérieures à celles mesurées dans l'eau.

Pour la population locale, les apports de mercure sont liés à la consommation de poisson et la concentration de méthylmercure dans ces derniers.

Le méthylmercure est absorbé par voie respiratoire et digestive. Il se concentre dans le cerveau. Les indicateurs de l'exposition au méthylmercure sont les concentrations sanguines et capillaires.

Le cheveu est un excellent indicateur des niveaux d'exposition au mercure organique. Les concentrations dans les cheveux sont deux cent cinquante fois plus importantes que dans le sang et sont donc beaucoup plus facilement mesurables (200 ug de mercure par litre de sang correspond à des niveaux 250 fois plus élevés dans les cheveux, soit 50 ug/g de cheveux).

La pousse des cheveux est d'environ 1 cm par mois, ce qui permet de suivre l'absorption de mercure sur plusieurs mois (il faut cependant exclure les pointes qui peuvent être contaminées par les apports extérieurs).

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