TITRE II
STATUTS DES REPRÉSENTANTS ÉLUS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
ET DE LEURS GROUPEMENTS AU SEIN
DU CONSEIL D'ADMINISTRATION OU DE SURVEILLANCE
DES SOCIÉTÉS D'ÉCONOMIE MIXTE LOCALES

Article 3
(art. L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales)
Statut des élus mandataires des collectivités territoriales

Cet article tend à clarifier la situation des élus mandataires des collectivités territoriales au sein des conseils d'administration ou de surveillance des sociétés d'économie mixte locales.

1° A (nouveau). Limite d'âge

Introduit à l'initiative de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, le Gouvernement s'en remettant à la sagesse, le 1° A de cet article instaure une limite d'âge pour les mandataires des collectivités territoriales.

Au moment de leur désignation , les personnes qui assurent la représentation d'une collectivité territoriale ou d'un groupement au sein du conseil d'administration ou de surveillance d'une société d'économie mixte devront respecter la limite d'âge prévue par le code de commerce 27 ( * ) , selon lequel :

- les statuts doivent prévoir, pour l'exercice des fonctions d'administrateur, une limite d'âge s'appliquant soit à l'ensemble des administrateurs, soit à un pourcentage déterminé d'entre eux ;

- à défaut de disposition expresse dans les statuts, le nombre des administrateurs ayant dépassé l'âge de 70 ans ne peut être supérieur au tiers des administrateurs en fonctions ;

- les mêmes restrictions s'appliquent aux membres du conseil de surveillance.

De plus, lorsque ces personnes assumeront les fonctions de président du conseil d'administration , elles devront également, au moment de leur désignation, respecter la limite d'âge prévue à l'article L. 225-48 du code de commerce :

- les statuts doivent prévoir pour l'exercice des fonctions de président du conseil d'administration une limite d'âge qui, à défaut d'une disposition expresse, est fixée à 65 ans ;

- toute nomination intervenue en violation de ces dispositions est nulle.

La limite d'âge n'interrompt pas le mandat : les personnes précitées ne pourront être déclarées démissionnaires d'office si, postérieurement à leur nomination, elles dépassent la limite d'âge statutaire ou légale.

Enfin, les élus n'entreront pas dans le décompte du nombre des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance qui pourront demeurer en fonction au-delà de la limite d'âge.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter cette disposition sans modification.

1°. Inéligibilité et incompatibilité liées à la qualité d'entrepreneurs de services locaux

Le 1° de cet article, dans la version adoptée en première lecture par le Sénat, tend à prévoir que les élus locaux agissant en tant que mandataires de leur collectivité comme président ou membre du conseil d'administration ou de surveillance d'une société d'économie mixte, à condition qu'ils n'exercent pas d'autres fonctions dans la société, ne sont pas des « entrepreneurs de services locaux » au sens des articles L. 207, L. 231 et L. 343 du code électoral, et ne sont donc pas soumis à ce titre aux inéligibilités et incompatibilités prévues par le droit électoral.

A l'initiative de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a apporté une précision supplémentaire, tendant à faire bénéficier de ce dispositif le président assurant les fonctions de directeur général d'une société d'économie mixte locale. Il s'agit de tenir compte de l'entrée en vigueur de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, qui distingue les fonctions de président du conseil d'administration de celles de directeur général d'une société anonyme. Ces fonctions peuvent être assumées par une seule personne ou distinguées 28 ( * ) , ce choix étant effectué par le conseil d'administration dans les conditions définies par les statuts.

Votre commission des Lois vous propose d'accueillir favorablement cette précision utile.

2°. Prise illégale d'intérêt

Le premier alinéa du 2° du texte adopté par le Sénat tend à éviter que les élus locaux puissent être poursuivis pour le délit de prise illégale d'intérêt, du seul fait de la détention d'un mandat de représentation d'une collectivité au sein du conseil d'administration ou de surveillance d'une société d'économie mixte locale.

Lors de la séance publique du 21 novembre 2000 au Sénat, le Gouvernement avait souhaité la suppression de cette disposition, au motif qu'elle serait « dénuée d'effet » sur le plan juridique, n'assurerait « aucune protection supplémentaire aux élus, puisque l'exercice des fonctions de mandataire n'est pas en lui-même constitutif de ce délit », et risquerait d'être « mal comprise par l'opinion publique ».

Sur proposition de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a supprimé cet alinéa, estimant que le fait de siéger au conseil d'administration ou de surveillance d'une société d'économie mixte ne peut être constitutif du délit de prise illégale d'intérêt : d'une part, « le mandataire, et à travers lui, la collectivité locale, n'est pas investi, de par la loi, d'une mission d'administration ou de surveillance de la sociétés d'économie mixte » 29 ( * ) ; d'autre part, la rémunération des mandataires des sociétés d'économie mixte est clairement inscrite dans la loi.

Dès lors qu'il est établi qu'il n'y a pas dans ce cas prise illégale d'intérêt , votre commission des Lois vous propose de maintenir cette suppression.

2°. Participation des mandataires aux décisions des organes délibérants

En l'état actuel du droit, sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres de l'assemblée délibérante intéressés à l'affaire, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires 30 ( * ) .

Les deux derniers alinéas du 2° de cet article, dans la rédaction du Sénat, tendent à énumérer clairement les cas dans lesquels les présidents (à l'exclusion des simples membres) de conseil d'administration ou de surveillance de sociétés d'économie mixte, mandataires de leur collectivité, ne doivent pas participer à certains actes mettant en relation la collectivité et la société. Sont prohibés :

- la participation aux commissions d'appel d'offres quand la société est candidate à un marché public ou à une délégation de service public de la collectivité locale ;

- le vote des délibérations de l'assemblée délibérante portant sur les relations entre la collectivité et la société d'économie mixte. Toutefois, la simple participation à cette délibération n'est pas interdite.

Il s'agit d'éviter le risque de conflits d'intérêt. En séance publique au Sénat, le Gouvernement avait proposé la suppression de l'interdiction faite au président d'une société d'économie mixte de participer aux commissions d'appel d'offres pour l'attribution des marchés publics auxquels la société est candidate, au motif qu'une telle disposition serait de nature réglementaire.

Sur proposition de sa commission des Lois, le Gouvernement s'en remettant à la sagesse , l'Assemblée nationale a entièrement réécrit ces deux alinéas : les élus locaux agissant en tant que mandataires des collectivités territoriales ou de leurs groupements au sein du conseil d'administration ou de surveillance des sociétés d'économie mixte locales et exerçant des fonctions de membre ou de président du conseil d'administration, de président-directeur général ou de membre ou président du conseil de surveillance, ne seront pas considérés comme « intéressés à l'affaire », lorsque la collectivité ou le groupement délibèrera sur ses relations avec la société.

En revanche, l'Assemblée nationale a confirmé qu'ils ne pourront participer aux commissions d'appel d'offres ou aux commissions d'attribution de délégations de service public de la collectivité territoriale ou du groupement lorsque la société d'économie mixte sera candidate à l'attribution du marché ou de la délégation en question. Cette rédaction revient à inverser la logique actuelle , en passant d'une interdiction de principe à la présomption que les élus mandataires ne seront pas intéressés à l'affaire lorsqu'ils délibéreront sur les relations entre la société d'économie mixte et la collectivité.

Votre commission des Lois vous propose d'accepter cette logique.

1°bis (nouveau) et 3°. Rémunération des mandataires

Le 3° de cet article, adopté par le Sénat, tend à confirmer que les présidents et membres du conseil d'administration et de surveillance mandataires de leur collectivité peuvent percevoir une rémunération ou des avantages particuliers, à condition d'y être autorisés par une délibération expresse de l'assemblée délibérante qui les a désignés. Cette délibération fixe le plafond de la rémunération ou des avantages et la nature des fonctions qui les justifient . Il convient de souligner que cette rémunération est prise en compte dans le calcul du plafond des indemnités de fonction versées aux élus locaux 31 ( * ) .

En revanche, à l'initiative de notre collègue Michel Caldaguès, le Sénat a estimé que les « moyens de travail » alloués aux élus et définis par le conseil d'administration de la société d'économie mixte n'avaient pas à être approuvés par l'assemblée délibérante de la collectivité. Le Gouvernement s'en est remis à la sagesse du Sénat, au motif qu'il serait difficile de déterminer ce que sont les moyens de fonctionnement ou les outils de travail usuels.

L'Assemblée nationale a transféré dans un paragraphe 1° bis nouveau les dispositions de ce 3°, en y apportant deux modifications de fond, adoptées à l'initiative de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement :

Exclusion de certains exécutifs locaux

Tout en confirmant que les représentants des collectivités territoriales au sein du conseil d'administration ou de surveillance d'une société d'économie mixte locale peuvent percevoir une rémunération ou des avantages particuliers, à condition d'y être autorisés par une délibération expresse de l'assemblée, l'Assemblée nationale a exclu du bénéfice de cette disposition les maires et adjoints au maire des communes de 20.000 habitants au moins, les présidents de conseil général ou de conseil régional et vice-présidents de ces conseils ayant reçu délégation, enfin les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale et vice-présidents de ces établissements ayant reçu délégation.

Le rapporteur a remarqué que les chambres régionales des comptes avaient relevé certains abus. De plus, il a souligné que la désignation d'un élu auprès d'une école ou d'un centre communal d'action sociale ne donnait pas lieu à rémunération. Enfin, il a souhaité que cette disposition incite les élus locaux à engager une redistribution des responsabilités au sein des organes délibérants des collectivités locales.

Suppression de la distinction entre « moyens de travail » et rémunération

L'Assemblée nationale a supprimé la disposition permettant de ne pas soumettre à l'approbation de l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale les moyens de travail définis par le conseil d'administration de la société d'économie mixte. Le rapporteur a estimé qu'une telle distinction ne pourrait que susciter la suspicion, et que l'objectif de transparence exigeait que l'information de la collectivité locale soit la plus claire et la plus complète possible.

Sur ces deux modifications de fond, votre commission des Lois ne peut se ranger aux arguments de l'Assemblée nationale. En conséquence, elle vous propose, par deux amendements , de revenir à la rédaction adoptée par le Sénat en première lecture.

4° (nouveau). Prorogation du mandat

Sur proposition de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a souhaité faciliter le fonctionnement des sociétés d'économie mixte au moment du renouvellement des mandats des conseillers municipaux, en prévoyant que le mandataire reste en fonction au sein du conseil d'administration ou de surveillance de la société d'économie mixte, jusqu'à la désignation de son successeur par la nouvelle assemblée. Dans ce cas, ses pouvoirs se limitent à la gestion des affaires courantes.

Votre commission des Lois vous propose d'approuver ce dispositif.

4° (nouveau). Rapport sur les modifications des statuts

En l'état actuel du droit 32 ( * ) , les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires se prononcent sur le rapport écrit qui leur est soumis, au moins une fois par an, par leurs représentants au conseil d'administration ou au conseil de surveillance des sociétés d'économie mixte locales.

A l'initiative de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a expressément prévu que le mandataire de la collectivité rende compte dans son mandat des décisions de modification des statuts de la société d'économie mixte.

Cette modification s'inscrit dans le cadre des propositions tendant à restreindre les cas dans lesquels la collectivité doit délibérer pour autoriser la modification des statuts (voir infra , article 6 bis de la proposition de loi). Selon l'Assemblée nationale, certaines modifications statutaires sont bénignes (par exemple la transformation du capital de francs en euros) et ne nécessitent pas une délibération de l'assemblée délibérante ; il convient donc de dresser une liste limitative des modifications des statuts nécessitant une délibération de la collectivité ; en revanche, il est normal que le mandataire rende compte dans son mandat des décisions de modification des statuts.

Votre commission des Lois vous propose d'accepter cette disposition et d'adopter l'article 3 ainsi modifié .

Article 4
(art. 432-14 du code pénal)
Prise illégale d'intérêt

Par cet article, le Sénat a souhaité transposer dans le code pénal les dispositions insérées dans le code général des collectivités territoriales par le premier alinéa du 2° de l'article 3 de la présente proposition de loi, tendant à éviter aux élus locaux une poursuite pour délit de prise illégale d'intérêt, du seul fait de leur qualité de mandataire d'une collectivité au sein du conseil d'administration ou de surveillance d'une société d'économie mixte. Par coordination avec sa position sur l'article 3, le Gouvernement avait émis un avis défavorable à l'adoption de cet article.

En première lecture, sur proposition de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a supprimé cet article, par coordination avec la suppression du premier alinéa du 2° de l'article 3 de la présente proposition de loi.

Afin de faciliter le rapprochement entre les positions des deux assemblées, votre commission des Lois vous propose de maintenir la suppression de l'article 4 .

* 27 Premier alinéa des articles L. 225-19 et L. 225-70 du code de commerce (rédaction issue de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques).

* 28 Article L. 225-51-1 du code de commerce.

* 29 Rapport n° 3137 (AN, XIème législature) de M. Jacky Darne au nom de la commission des Lois.

* 30 Article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales.

* 31 Articles L. 2123-20, L. 3123-18 et L. 4135-18 du code général des collectivités territoriales.

* 32 Septième alinéa de l'article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales.

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