N° 69

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 13 novembre 2001

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur la proposition de loi, MODIFIÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relative à la création d' établissements publics de coopération culturelle ,

Par M. Ivan RENAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Xavier Darcos, Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; MM. Jean Arthuis, François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernard Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean François-Poncet, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, Jean-Marie Vanlerenberghe, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Sénat : Première lecture : 288 (1998-1999), 357 et T.A. 106 (2000-2001)

Deuxième lecture : 20 (2001-2002)

Assemblée nationale ( 11 e législ.) : 3149 , 3265 et T.A. 714

Établissements publics .


EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

L'Assemblée nationale a examiné le 11 octobre dernier la proposition de loi relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle que le Sénat avait adoptée à l'unanimité le 14 juin 2001.

A l'issue de cette première lecture il est clair, et votre rapporteur s'en félicite, qu'un très large accord existe, entre les deux assemblées et au sein de chacune d'elles, sur le principe de la création d'une nouvelle catégorie d'établissements publics permettant d'individualiser les services publics culturels, de respecter leur spécificité et de donner, comme l'a très bien exprimé le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, M. Marcel Rogemont, « une structure juridique fiable » aux partenariats entre l'Etat et les collectivités territoriales, ou entre les collectivités territoriales.

Bon nombre des dispositions du texte adopté par le Sénat l'ont été dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale.

Votre rapporteur et votre commission ont abordé l'examen des quelques divergences qu'ont fait apparaître les positions prises par l'Assemblée nationale avec la volonté que le dialogue engagé entre les deux assemblées puisse rapidement aboutir.

• Les points de convergence sont nombreux et importants

Ils portent en effet sur la plupart des caractéristiques qui doivent fonder l'originalité des EPCC, et leur adaptation à la gestion de services culturels :

- le caractère entièrement « optionnel » du recours à l'EPCC, qui sera une faculté, mais jamais une obligation ;

- la possibilité de constituer les EPCC sous forme d'établissements publics à caractère administratif ou à caractère industriel et commercial, cette dernière formule pouvant offrir toute la souplesse nécessaire, en particulier en termes de gestion des personnels, à des EPCC gérant des entreprises de spectacle vivant ;

- la composition du conseil d'administration, où siégeront bien sûr en majorité des représentants des collectivités publiques partenaires, mais qui sera élargie à des personnalités qualifiées, à des représentants des personnels et, pour les établissements d'enseignement supérieur, à des représentants des étudiants ;

- les modalités du choix du président du conseil d'administration, qui sera élu en son sein, mais pas obligatoirement parmi les représentants des collectivités publiques ;

- les conditions de la nomination du directeur, qui devra résulter d'une concertation entre les personnes publiques fondatrices, ce qui ne pourra que renforcer sa liberté d'action vis-à-vis des divers « financeurs » de l'établissement : l'Assemblée nationale a souhaité, à juste titre, préciser qu'il incomberait au directeur d'assumer la direction de l'établissement, afin de mettre l'accent sur la responsabilité qui sera la sienne ;

- les conditions du contrôle de légalité et du contrôle financier, alignées sur celles des syndicats mixtes, qui assureront la transparence et la rigueur de la gestion de l'EPCC et mettent en évidence le fait qu'il ne saurait être rattaché à aucune collectivité territoriale particulière ;

- la définition des ressources des EPCC, qui, à la suite de l'amendement du gouvernement adopté par le Sénat, pourront comprendre, y compris pour les EPCC à caractère industriel et commercial, des subventions d'équilibre des communes et des départements ;

- la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements de créer des EPCC pour individualiser un service culturel relevant de leur compétence ;

- les règles transitoires permettant aux salariés de services publics culturels exploités par une personne privée de conserver le bénéfice de leurs contrats à durée indéterminée en cas de transfert de la gestion de ces services à un EPCC à caractère administratif.

L'Assemblée nationale a opportunément complété ces dernières dispositions, qui figurent à l'article 3 de la proposition de loi, en prévoyant que les agents contractuels employés au sein d'un service culturel exploité en régie directe « transformé » en EPCC pourraient à leur demande conserver leur emploi, du moins jusqu'au terme prévu de leur contrat.

• Les points de divergence , dont votre commission considère qu'ils ne devraient pas être insurmontables, concernent, d'une part, la procédure de création des EPCC et, d'autre part, la possibilité pour les EPCC à caractère administratif de recruter des agents contractuels sur des contrats à durée indéterminée .

* Sur le premier point, votre rapporteur vous proposera de retenir les propositions de l'Assemblée nationale lorsqu'elles permettent de simplifier et de clarifier la procédure de création des EPCC, en la rapprochant d'ailleurs de celle prévue par le CGCT pour d'autres structures de coopération, en particulier le syndicat mixte.

Ainsi paraît-il possible de se rallier à la proposition de l'Assemblée prévoyant que les statuts de l'établissement seront annexés à l'arrêté de création.

En première lecture, suivant les propositions de votre commission, le Sénat avait préféré à cette solution « classique » une procédure originale, inspirée de celle applicable aux universités : les règles de composition et de répartition des sièges au sein du conseil d'administration auraient été arrêtées par les partenaires lors de la création de l'établissement, permettant au conseil d'administration d'être constitué avant d'adopter formellement les statuts.

Ces statuts, bien entendu, auraient auparavant été élaborés d'un commun accord entre les personnes publiques partenaires. Il est clair en effet que la création d'un EPCC, dont la constitution ne peut procéder que d'un accord unanime des collectivités partenaires, n'interviendra que postérieurement à la réalisation d'un « consensus » sur le périmètre de l'établissement et ses modalités d'organisation et de fonctionnement, dans toute la mesure, pour ces dernières, où elles ne seront pas déjà prévues par les dispositions législatives et réglementaires applicables à la « catégorie » des EPCC.

Cette procédure présentait l'avantage d'associer tous les membres du conseil d'administration à un acte « fondateur » et symbolique.

Elle n'avait pas pour autant emporté l'adhésion du secrétariat d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle, et elle n'a pas non plus séduit l'Assemblée nationale.

Votre commission vous proposera, dans un souci de conciliation, de suivre sur ce point l'Assemblée nationale, et de la suivre également lorsqu'elle propose que le représentant de l'Etat compétent pour prendre l'arrêté de création de l'EPCC soit, comme dans le cas du syndicat mixte, le préfet du département siège de l'établissement.

En revanche, votre commission estime inutile, dans le cas où l'Etat participera à la constitution de l'EPCC, qu'une « décision concordante » du préfet exprime l'accord de l'Etat avant l'intervention de l'arrêté de création de l'établissement.

D'une part parce que, dans les faits, l'Etat aura naturellement été associé à l'élaboration du projet d'EPCC préalablement aux délibérations des collectivités ou des groupements demandant la création de l'EPCC. D'autre part parce que, en droit, le représentant de l'Etat disposera d'un pouvoir d'appréciation sur la constitution de l'établissement public : l'arrêté de création suffira donc à officialiser l'accord de l'Etat.

* Le second point de désaccord apparaît plus fondamental, dans la mesure où il pourrait remettre en cause la capacité de certaines grandes institutions patrimoniales en région d'atteindre les objectifs mêmes que poursuit la création des EPCC, c'est-à-dire d'affirmer leur identité, d'étendre leur rayonnement, de conquérir de nouveaux publics, en disposant à cette fin de moyens comparables, sinon équivalents, à ceux dont peuvent bénéficier les principaux établissements publics nationaux.

On ne peut que constater, en effet, que les cadres d'emploi de la fonction publique territoriale -non plus d'ailleurs que les corps de la fonction publique d'Etat- ne permettent pas de recruter des personnels formés pour faire fonctionner les services de communication, d'édition, d'organisation de manifestations exceptionnelles, ou les services « quasi-commerciaux » (restauration, boutiques, conception et commercialisation de « produits dérivés ») sur lesquels doivent aujourd'hui s'appuyer les grands musées ou les grandes bibliothèques pour remplir leurs missions culturelles et élargir l'accès à la connaissance du patrimoine.

Le problème est résolu, pour les établissements nationaux, par l'application des dispositions de l'article 3 (2°) de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui permettent à « certains établissements publics » de déroger à la règle selon laquelle les emplois permanents doivent être occupés par des fonctionnaires « en raison du caractère particulier de leurs missions ».

Cette faculté a notamment été ouverte au Centre Georges-Pompidou, à la Bibliothèque nationale de France, à la Réunion des musées nationaux, au musée d'Orsay, au musée du Louvre, à l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles, au musée Rodin...

Les dispositions adoptées par le Sénat n'allaient pas aussi loin. Elles tendaient simplement à permettre aux EPCC à caractère administratif, uniquement, en application de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, pour des emplois qui ne correspondent pas à un cadre d'emploi de la fonction publique territoriale, de recruter des contractuels sur des contrats à durée indéterminée, afin de pouvoir disposer de personnels spécifiques et de qualité, peu susceptibles d'être attirés par les contrats à durée déterminée que seuls permettent de leur proposer les textes en vigueur.

Cette faculté exceptionnelle ne pourrait guère concerner qu'un petit nombre de postes dans un petit nombre d'établissements. On peut penser en outre qu'en tout état de cause les responsables locaux, traditionnellement ménagers des deniers publics et soumis au demeurant à de sérieuses contraintes budgétaires, en feraient un usage modéré.

Elle ne semble donc pas devoir remettre en cause les principes de la fonction publique, tout en permettant un assouplissement indispensable pour donner à certains EPCC les même chances de succès et de rayonnement qu'aux institutions culturelles nationales.

Cependant, suivant sa commission, l'Assemblée nationale a supprimé la disposition permettant aux EPCC à caractère administratif d'offrir des contrats à durée indéterminée à certains agents non titulaires.

Votre commission ne souhaite pas en rester à cette fin de non-recevoir et juge indispensable de poursuivre le dialogue sur ce point.

Elle vous proposera donc de rétablir les dispositions supprimées, en leur donnant cependant, pour tenir compte des objections formulées par l'Assemblée nationale, une rédaction plus précise mais qui demeure inspirée de celle des dispositions de la loi sur l'innovation et la recherche permettant le recrutement sur des contrats à durée indéterminée des agents nécessaires au fonctionnement des services de valorisation de la recherche des universités ou instituts de recherche.

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