EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Votre commission est saisie d'une proposition de loi relative à l'autorité parentale, adoptée par l'Assemblée nationale le 14 juin 2001.

Le principe d'une réforme d'ensemble du droit de la famille, annoncée depuis 1997 et préparée par des rapports, tel, en 1998, celui de Mme Irène Théry et, en 1999, celui du groupe de travail présidé par Mme Dekeuwer-Défossez 1 ( * ) , a fait long feu. Faute d'un projet de loi global, le Parlement est malheureusement contraint de se prononcer sur des propositions de loi parcellaires ne permettant pas d'avoir une vision d'ensemble, au risque de porter atteinte à la cohérence du code civil.

La proposition de loi relative à la prestation compensatoire votée par le Sénat en février 1998 était pourtant restée deux ans en attente d'examen par l'Assemblée nationale dans la perspective d'une réforme globale. Après la proposition de loi relative aux droits du conjoint survivant et avant celle portant réforme du divorce adoptée par l'Assemblée nationale le 10 octobre dernier, le Sénat est appelé à examiner la présente proposition de loi, présentée à l'Assemblée nationale par M. Jean-Marc Ayrault et adoptée sur le rapport de M. Marc Dolez.

Le Sénat est saisi également d'une proposition de loi présentée par Mme Nelly Olin et plusieurs de ses collègues portant réforme de diverses dispositions relatives à l'autorité parentale 2 ( * ) .

Votre commission a souhaité recueillir l'avis de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes 3 ( * )

L'autorité parentale est une fonction définie comme un ensemble de droits et de devoirs appartenant aux père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation des enfants pour assurer leur protection et leur éducation.

Introduite dans le code civil par la loi du 4 juin 1970 en remplacement de la puissance paternelle, elle a été réformée par les lois du 22 juillet 1987 et du 8 janvier 1993 dans le sens d'une plus grande égalité entre les enfants, quel que soit le statut des parents, et dans celui d'une meilleure coparentalité . Ce mouvement a ainsi conduit, d'une part, à accorder plus largement aux pères et mères d'enfants naturels l'exercice commun de l'autorité parentale, qui est la règle dans la famille légitime, et, d'autre part, à affirmer la persistance de cet exercice en commun après la séparation des parents.

Accompagnant l'évolution des modes de vie familiaux, la présente proposition de loi prolonge ce mouvement. Elle traduit en outre les aspirations nouvelles de reconnaissance et d'affirmation des droits de l'enfant, directement issues de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, ainsi que le souhait d'une plus grande liberté d'organisation de la vie des familles par les intéressés eux-mêmes.

I. UN CONTEXTE EN ÉVOLUTION

Accompagnant la transformation des modes de vie familiaux, la proposition de loi poursuit une évolution juridique engagée en 1970 qui, en pratique, n'a pas encore trouvé toute son effectivité.

A. LA TRANSFORMATION DES MODES DE VIE FAMILIAUX

Le modèle de l'autorité parentale conçue pour la famille légitime et unie cède le pas devant une triple évolution des modes de vie familiaux.

1. La multiplication des naissances hors mariage

Quatre enfants sur dix, soit environ 300 000 enfants, naissent chaque année hors mariage. Cette proportion s'élève à un enfant sur deux pour les premières naissances. En 1967, on ne dénombrait que 6  % d'enfants nés hors mariage.

Plus du tiers des enfants nés hors mariage en 1994 ont été reconnus par leurs deux parents avant la naissance et 85  % avant l'âge de un an. 92  % des enfants sont en définitive reconnus par leur père.

2. L'accroissement du nombre des divorces et des séparations

On compte actuellement près de 120 000 divorces pour 300 000 mariages.

Deux tiers de ces procédures impliquent des enfants.

En 1999, 50 000 demandes en justice ont été en outre introduites par des parents d'enfants naturels afin de régler les modalités d'exercice de l'autorité parentale.

D'après les données de l'INED, 2 millions d'enfants ne vivaient pas en 1994, avec leurs deux parents, soit 17,2  %. Parmi ceux-ci, plus de 1 708 000 vivaient avec leur mère et 172 000 avec leur père.

Les enfants de divorcés ne représentent que la moitié des enfants vivant séparés de leurs parents.

3. Une part significative d'enfants vivant dans des familles recomposées

Une étude de l'INED datant de 1994 sur les familles recomposées fait ressortir qu'en 1990, un enfant de moins de 25 ans sur deux dont les parents étaient séparés, soit 950 000 enfants, vivait avec au moins un beau parent . 1 million et demi d'enfants vivaient dans 660 000 familles recomposées .

* 1 Respectivement : Couple, filiation et parenté aujourd'hui, remis en mai 1998 à la ministre de l'emploi et de la solidarité et au garde des Sceaux ; Rénover le droit de la famille, remis en septembre 1999 au garde des Sceaux.

* 2 N° 172 (2000-2001)

* 3 Voir rapport de Mme Janine Rozier, n° 66 (2001-2002).

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