II. LE PROTOCOLE SUR LA VENTE D'ENFANTS, LA PROSTITUTION DES ENFANTS ET LA PORNOGRAPHIE METTANT EN SCÈNE DES ENFANTS

Le protocole du 25 mai 2000 est un texte à vocation répressive , destiné à uniformiser et à généraliser au plan international les incriminations pénales portant sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

A la suite d'une initiative latino-américaine en faveur d'une convention destinée à lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants, soutenue par la France, la Commission des droits de l'homme a créé, en 1994, un groupe de travail ad hoc « chargé d'élaborer les grandes lignes d'un éventuel protocole facultatif » concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants (articles 34 et 35 de la convention).

Le soutien de la France à la création d'un nouveau protocole était motivé par la nécessité d'harmoniser au sein des États parties à la convention les définitions des infractions en matière d'exploitation sexuelle et de trafic d'enfants et d'améliorer également leur coopération pour lutter contre ce phénomène.

Ce protocole s'avérait d'autant plus nécessaire qu'il n'existait aucun instrument à portée universelle abordant précisément ces thèmes.

Cependant, dès le départ, les négociations se sont avérées difficiles en raison de l'opposition entre les délégations quant au champ d'application du protocole. Certains pays souhaitaient en effet limiter le protocole à la lutte contre la vente d'enfants aux fins d'exploitation sexuelle (la majorité des pays occidentaux) tandis que d'autres souhaitaient englober également la vente d'organes, l'adoption illégale, le travail forcé (notamment les pays d'Amérique latine et des Caraïbes).

Un consensus a pu finalement être trouvé lors de la sixième session. Ainsi, si une définition relativement large de la notion de « vente d'enfants » a été adoptée, seuls certains comportements précisément définis doivent être érigés en infractions pénales.

A. LES INCRIMINATIONS PRÉVUES PAR LE PROTOCOLE

Ce protocole est un texte à vocation répressive, qui tend à inciter les États parties à incriminer certains comportements liés à la vente d'enfants, la prostitution enfantine et la pornographie impliquant les enfants.

Il est, à ce jour, le seul instrument universel dont l'objet est d'incriminer de telles atteintes et d'en favoriser les poursuites . En effet, contrairement à la convention contre la criminalité transnationale organisée et à son protocole visant à lutter contre la traite des êtres humains, adoptés le 15 novembre 2000, lesquels supposent, pour être applicables, l'existence d'un groupe criminel, le présent protocole s'applique même si l'infraction est commise par un seul individu.

. La vente d'enfants

La vente d'enfants est définie (article 2) comme « tout acte ou toute transaction en vertu desquels un enfant est remis par toute personne ou tout groupe de personnes à une autre personne ou groupe de personnes contre rémunération ou tout autre avantage ». Les parties se sont inspirées de la définition relative aux institutions et pratiques analogues à l'esclavage de la convention relative à l'abolition de l'esclavage du 7 septembre 1956. Cependant, dans le cadre de la vente d'enfant ainsi définie, seuls certains comportements doivent être érigés en infractions pénale, tels que « le fait d'offrir, de remettre ou d'accepter un enfant, quel que soit le moyen utilisé, aux fins d'exploitation sexuelle de l'enfant, de transfert d'organe de l'enfant à titre onéreux, de soumettre l'enfant au travail forcé » (article 3).

Par ailleurs, est également incriminé dans le cadre de la vente d'enfant, le fait d' obtenir indûment, en tant qu'intermédiaire, le consentement à l'adoption d'un enfant , en violation des instruments juridiques internationaux relatifs à l'adoption.

Cette disposition est destinée à inciter les États parties à la convention à définir sur le plan de la loi pénale une incrimination spécifique relative aux conditions d'obtention par un intermédiaire du consentement à l'adoption par les parents biologiques de l'enfant et, dans la plupart des cas, celui de la mère lorsque la filiation n'est établie qu'à son égard.

Le paragraphe 2 de l'article 3 prévoit l'incrimination de la tentative et de la complicité de l'infraction. Le paragraphe 4 engage les États à rechercher la responsabilité pénale, civile ou administrative des personnes morales ayant commis l'infraction.

Cette disposition vise ainsi l'ensemble des pratiques mercantiles et frauduleuses qui peuvent déterminer, en amont d'une adoption internationale, la remise d'enfant par des parents presque toujours défavorisés, parfois soumis à des pressions ou des menaces. Deux rapports des Nations unies et de l'UNICEF, publiés en 2000, ont clairement mis en évidence l'importance de telles pratiques au Guatemala.

Une forte opposition existait entre, d'une part, les États souhaitant limiter l'incrimination aux seuls intermédiaires et privilégier, en ce qui concerne les parents, tant adoptifs que biologiques, l'application de la convention de La Haye de 1993 sur l'adoption internationale, et d'autre part, ceux qui souhaitant au contraire viser expressément les parents comme responsables potentiels d'une vente d'enfant.

Si les parents biologiques comme les parents adoptifs ont finalement été exclus de l'incrimination, un paragraphe, distinct des incriminations, a été inséré à l'article 3, aux termes duquel « les États parties prennent toutes les mesures juridiques et administratives appropriées pour s'assurer que toutes les personnes intervenant dans l'adoption d'un enfant agissent conformément aux dispositions des instruments juridiques internationaux applicables ». Cette disposition renvoie implicitement à la convention de La Haye dont le système préventif concernant les trafics et ventes d'enfants est basé sur la coopération des États dans le cadre de la procédure qu'elle définit et sur un ensemble de mesures laissées à l'appréciation de chaque État (articles 8, 32 et 33 de la convention).

. La prostitution et la pornographie

La prostitution des enfants est définie par « le fait d'utiliser un enfant aux fins d'activités sexuelles contre rémunération ou toute autre forme d'avantage » (article 2). Le « fait d'offrir, d'obtenir, de procurer ou de fournir un enfant à des fins de prostitution » doit faire l'objet d'une incrimination pénale en application de l'article 3 du protocole.

La pornographie mettant en scène des enfants est définie à l'article 2 comme « toute représentation, par quelque moyen que ce soit, d'un enfant s'adonnant à des activités sexuelles explicites, réelles ou simulées, ou toute représentation des organes sexuels d'un enfant à des fins principalement sexuelles ». Le « fait de produire, de distribuer, de diffuser, d'importer, d'exporter, d'offrir, de vendre ou de détenir » des matériels pornographiques mettant en scène des enfants, doit également être incriminé. L'Union européenne a formulé une déclaration selon laquelle le terme « représentation » se réfère à une représentation visuelle.

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