II. LES VERSEMENTS DU BUDGET EUROPÉEN EN FRANCE

Votre rapporteur tient à rappeler au préalable qu'il ne cautionne pas la problématique du « taux de retour », et n'adhère pas aux discours et débats tendant à réduire la participation budgétaire de chaque Etat membre au simple constat d'un bénéfice ou d'un coût net. Il considère en effet que cette logique comptable tend à exacerber les aspirations individualistes de chaque Etat et ne fait que nuire à la perception de la communauté d'intérêts que sous-tend bien l'Union européenne.

La focalisation sur le thème du « retour net » peut en réalité s'apparenter à un véritable « dilemme du prisonnier »,
configuration fréquemment utilisée en sociologie et en théorie des jeux : alors que les Etats membres sont bien conscients de l'intérêt de leur coopération (et in fine des sacrifices individuels mieux répartis qu'elle impliquerait) en vue de parvenir à un optimum collectif à l'échelle de l'Union européenne, ils tendent à privilégier la maximisation de leur situation budgétaire individuelle, et ce faisant courent le risque de créer des obstacles à l'édification d'un système de prélèvement plus rentable et équitable. Plus schématiquement, l'alternative « coopérer ou résister » se résout plutôt par un individualisme sous-optimal.

La mise en exergue de la contribution nette de la France au budget communautaire est conforme aux obligations légales et à l'esprit d'une analyse budgétaire stricte, mais votre rapporteur estime qu'il conviendrait à cet égard de réformer la présentation budgétaire communautaire, afin qu'elle mette davantage l'accent sur les bénéfices communs plutôt que sur les gains nationaux.

A. LA FRANCE EST UN DES PRINCIPAUX PAYS BÉNÉFICIAIRES DE L'UNION

1. Des taux de retour élevés

La France bénéficie largement des politiques communautaires puisqu'elle a reçu en 2001 11 360,3 millions d'euros (en baisse de 6,8 % par rapport à 2000), ce qui en fait le second pays bénéficiaire avec 16,5 % de l'ensemble des versements de la Communauté aux Etats (16,7 % en 2000), derrière l'Espagne qui a reçu 19,8 % des paiements . L'essentiel des paiements reçus résulte de la PAC puisqu'en 2001 81,2 % de ces versements provenaient du FEOGA-Garantie (73,9 % en 2000), et 13 % des fonds structurels (20,7 % en 2000).


Dépenses communautaires en France au titre des principales politiques communes

(millions d'euros courants)

1998

1999

2000

2001

Evolution 1998/2001

Part de chaque poste en 2001

AGRICULTURE

9 014,4

9 445,9

9 005,9

9 230,1

2,4%

81,2%

Part du total communautaire*

23,2%

23,8%

22,2%

22,2%

Aides directes

6 420,1

6 351,5

6 049,5

6 805,5

6,0%

59,9%

Restitutions à l'exportation

1 157,3

1 480,4

1 340,4

656,1

-43,3%

5,8%

Stockage

N.D.

N.D.

370,8

300,0

Développement rural

-

-

474,1

609,5

5,4%

Autres (reports compris)

1 437,0

1 614,0

1 141,9

859,1

-40,2%

7,6%

ACTIONS STRUCTURELLES

2 240,0

2 864,2

2 520,7

1 475,9

-34,1%

13,0%

Part du total communautaire *

7,9%

10,7%

9,1%

6,6%

Objectif n°1

-

-

457,4

315,2

2,8%

Objectif n°2

-

-

952,7

618,4

5,4%

Objectif n°3

-

-

767,2

309,2

2,7%

Autres actions structurelles

-

-

71,2

0,2

0,0%

Initiatives communautaires

-

-

256,9

226,9

2,0%

Actions innovatrices et assistance technique

-

-

15,3

5,7

0,1%

Fonds de cohésion

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0%

POLITIQUES INTERNES

604,9

544,7

661,2

654,3

8,2%

5,8%

Part du total communautaire *

13%

12,7%

13,1%

13,7%

Formation, jeunesse, culture, audiovisuel, information et autres actions sociales

76,5

95,2

104,1

90,6

18,4%

0,8%

Energie et contrôle de sécurité sanitaire d'Euratom

6,0

6,8

7,1

7,5

25,0%

0,1%

Environnement et autres

12,0

10,0

9,5

13,0

8,3%

0,1%

Protection des consommateurs, marché intérieur, industrie

28,8

36,9

24,8

37,0

28,5%

0,3%

Réseaux transeuropéens

38,2

44,6

58,4

110,1

188,2%

1,0%

R&D technologique

425,9

338,0

446,6

384,3

-9,8%

3,4%

Autres politiques internes

17,5

13,2

10,7

11,8

-32,6%

0,1%

Total

11 859,3

12 854,7

12 187,8

11 360,3

-4,2%

Part du total communautaire *

16,5%

18,2%

16,7%

16,5%

* La part des dépenses communautaires versées à la France est plus communément appelée taux de retour.

Source : Commission européenne, rapports sur la répartition des dépenses opérationnelles de l'UE.

2. L'apport déterminant au titre de la politique agricole commune

La structure des dépenses effectuées par la Communauté en France est singulière, s'agissant d'un des pays les plus développés de l'Union. Notre vocation agricole nous fait bénéficier largement des crédits du FEOGA-Garantie et, à moindre titre, du FEOGA-Orientation (ce dernier constituant un fonds structurel). Ainsi la France a bénéficié en 2001 d'un taux de retour sur la PAC de 22 %, après 22,2 % en 2000 (léger recul notamment imputable au retard dans la mise en oeuvre de la restructuration du vignoble), et loin devant l'Espagne (14,7 %), l'Allemagne (14 %) et l'Italie (12,7 %). La part de la France dans les dépenses du FEOGA-Garantie en 2001, premier exercice de mise en oeuvre de la réforme de la PAC de 1999, est particulièrement élevée dans les secteurs de la viande porcine, des oeufs et volailles, des cultures arables, du lait et des produits laitiers, de la viande bovine, de la pêche et du sucre, comme en témoignent les données suivantes :

Part de la France dans les postes de dépenses du FEOGA-Garantie en 2001

(millions d'euros)

Ensemble

France

% en 2001

Rappel % en 2000

Cultures arables

17 466,2

5 181,0

29,7%

30,7%

Sucre

1 497,1

356,9

23,8%

28,9%

Huile d'olive

2 523,8

4,9

0,2%

0,2%

Fourrage séché et légumes secs

374,8

82,8

22,1%

21,7%

Plantes textiles et vers à soie

826,3

42,2

5,1%

4,1%

Fruits et légumes

1 558,0

294,3

18,9%

15,3%

Secteur viti-vinicole

1 196,7

221,8

18,5%

26,3%

Tabac

973,4

77,0

7,9%

8,1%

Autres secteurs végétaux

297,3

26,4

8,9%

8,9%

Total secteur végétal

26 713,6

6 287,3

23,5%

24,6%

Lait et produits laitiers

1 906,6

499,6

26,2%

28,4%

Viande bovine

6 054,0

1 467,6

24,2%

23,5%

Viandes ovine et caprine

1 447,3

144,3

10,0%

9,8%

Viande porcine, oeufs, volaille et autres

137,1

52,0

37,9%

27,0%

Pêche

13,4

3,3

24,6%

41,5%

Total secteur animal

9 558,4

2 166,8

22,7%

22,5%

Dépenses annexes

1 447,6

184,4

12,7%

5,7%

Total dépenses de marché (sous-plafond 1a)

37 779,5

8 638,8

22,9%

23,5%

Zones défavorisées

 

198,3

21,6%

31,5%

Mesures agro-environnementales

 

212,6

10,4%

7,2%

Sylviculture

 

42,8

21,1%

2,7%

Autres

 

155,8

12,9%

12%

Développement rural (sous-plafond 1b)

4 363,8

609,5

14,0%

11,4%

Total général FEOGA-Garantie

42 083,3

9 248,0

22,0%

22,2%

Source : Commission, rapport financier du FEOGA-Garantie pour 2001

 

Le volume global du soutien communautaire à la France a augmenté de 2,5% (+ 242 millions d'euros) entre 2000 et 2001, ce qui traduit l'augmentation des aides directes dans le cadre de la réforme de la PAC. Le taux de retour sur le premier pilier (dépenses de marché) a quelque diminué, mais celui sur le second pilier (développement rural) a fortement progressé . La France reste néanmoins en dessous de son taux potentiel de retour moyen.

Les aides de la PAC sont versées par les Etats membres et remboursées par le budget communautaire avec un décalage de deux mois. Du fait de leur concentration dans les deux derniers mois de l'année, les aides sont préfinancées par le Trésor, soit 5,35 milliards d'euros en 2001. Cette avance du Trésor à l'ACOFA (Agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole) s'est substituée en 2001 à la procédure antérieure de l'emprunt bancaire afin d'alléger les frais financiers à la charge de l'Etat, qui se sont élevés à 25,17 millions d'euros.

3. La diminution des retours au titre des fonds structurels

A contrario, le nouvel effort de concentration des fonds structurels sur les régions les plus en difficulté, né de la réforme Agenda 2000 14( * ) , se traduit par une diminution du taux de retour de la France, qui s'établit à un peu plus de 8 % 15( * ) sur la période 2000-2006 (hors Fonds de cohésion auquel la France n'est pas éligible), et à 6,6 % en 2001, après 9,1 % en 2000. En volume, les versements s'inscrivent en forte baisse de 41,5 % par rapport à 2000 . Il convient toutefois de rappeler que les variations annuelles des paiements au titre des fonds structurels peuvent être plus ou moins importantes selon les Etats membres, notamment du fait de la présentation plus ou moins tardive des demandes de financement au cours de l'exercice budgétaire, ou de taux d'exécution inégaux.


Part de la France dans les dépenses au titre des fonds structurels

 

1997

1998

1999

2000

2001

(millions d'euros)

millions d'euros

% du total

millions d'euros

% du total

millions d'euros

% du total

millions d'euros

% du total

millions d'euros

% du total

FEOGA-Orientation+IFOP

617,3

15,2%

660,8

16,8%

711,5

16,4%

311,3

7,6%

137,7

FEDER

1 111,5

9,6%

505,3

4,3%

1 006,8

9,0%

1 148,3

8,3%

854,4

N. D.

FSE

559,3

9,1%

829,8

10,9%

932,2

12,9%

1 061,1

13,2%

483,7

Autres

172,2

8,7%

244,1

9,4%

213,6

9,6%

 

TOTAL

2 460,3

9,4%

2 240,0

7,9%

2 864,1

10,7%

2 520,7

9,1%

1 475,8

6,6%

Source : Commission européenne, rapports sur la répartition des dépenses opérationnelles de l'UE.

 
 

Les retours de la France au titre de la politique structurelle se réduisent au fil des programmations : 10,2 % pour la période 1989-1993 et 9,8 % (hors Fonds de cohésion) en 1994-1999, programmation au cours de laquelle le maintien d'une part relativement importante sur les objectifs agricoles et la hausse de la part concernant les régions en reconversion industrielle et la lutte contre le chômage ont en partie compensé la réorientation globale en faveur des régions en retard de développement.

Près de 42 % des paiements effectués en 2001 (24,7 % en 2000) l'ont été au titre de l'objectif 2 (régions en reconversion économique), en particulier dans le cadre du FEDER, 21,4 % au titre de l'objectif 1 16( * ) , 21 % au titre de l'objectif 3 et 15,4 % pour les initiatives communautaires.

4. Les retours au titre des politiques internes

Les retours dont bénéficie la France au titre des politiques internes sont également inférieurs à son taux moyen de contribution au budget communautaire, et sont passés de 15,8 % en 1994 à 13,7 % en 2001 (13,1 % en 2000). Contrairement aux dispositifs prévus pour la PAC et les fonds structurels, les paiements ne transitent pas tous par le budget de l'Etat, mais sont également attribués à d'autres personnes morales.

Les taux de retour les plus importants en 2001 concernaient les réseaux transeuropéens (23,5 %, avec un quasi doublement des versements communautaires entre 2000 et 2001) - qui expliquent l'essentiel de la hausse du taux de retour global - la culture, l'audiovisuel et d'autres actions sociales (13,5 %), et l'énergie et le contrôle de sécurité nucléaire d'Euratom (16,3 %).

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