Annexe 80 - L'ÉLIMINATION DES MICROPOLLUANTS DANS LES STATIONS D'EPURATION

Rédaction : M. Jean-Luc VASEL, membre du Comité de pilotage

Jusqu'à présent, la pollution organique (carbonée) et son élimination sont suivies au moyen de mesures globales telles que la DCO (Demande Chimique en Oxygène) et la DBO (Demande Biochimique en Oxygène). Ces deux paramètres globaux sont des Demandes en Oxygène, c'est-à-dire que l'on mesure la quantité d'oxygène qui est nécessaire pour dégrader la pollution, soit par la voie chimique (DCO) soit par voie biologique (DBO). Ce sont cependant des paramètres importants dans la mesure où, dans les stations d'épuration, il faut apporter artificiellement l'oxygène nécessaire au traitement et que le coût de l'opération sera proportionnel aux valeurs mesurées des demandes en oxygène (DBO, DCO).

Par contre, une eau usée domestique ou industrielle contient de très nombreux polluants différents et les mesures de la DBO (ou de la DCO) ne donnent aucune indication sur la teneur de ces composés individuels. Or, tous ces produits ne sont pas dégradés avec la même efficacité lors de leur passage dans les stations d'épuration.

Ainsi, en sortie de station d'épuration, on trouvera, en concentration faible certes, des produits non dégradés, des produits partiellement dégradés et des résidus de transformation. En effet, il est une idée bien ancrée dans l'esprit de nos concitoyens et pourtant fausse quant aux possibilités de dégradation des bactéries vis-à-vis des substances organiques. On imagine que, si on leur en donne le temps, les micro-organismes finiront toujours par dégrader totalement les substances avec lesquelles ils sont en contact.

Or ceci n'est certainement pas vrai, du moins à l'échelle de temps de quelques mois ou de quelques années.

Il suffit de songer aux substances naturelles telles que les acides humiques présents dans les sols forestiers. Ces substances, pourtant naturelles, sont très peu dégradées par les micro-organismes, sinon elles seraient oxydées en CO 2 et ne s'accumuleraient pas dans les sols.

Il est vrai que de très nombreuses substances d'origine naturelle sont biodégradables, c'est-à-dire peuvent être décomposées par les micro-organismes.

Cette propriété n'est pas aussi fréquente pour les produits organiques de synthèse. Ainsi d'assez nombreuses molécules organiques fabriquées par synthèse chimique sont en fait peu ou pas biodégradables. Elles peuvent alors passer à travers les stations d'épuration sans subir de transformations importantes, pour aboutir finalement dans les milieux récepteurs. Au fur et à mesure que la qualité des cours d'eau se restaure suite à la politique d'assainissement menée depuis plusieurs décennies et aux progrès faits dans les techniques de mesures, on peut à présent détecter ces polluants présents à l'état de traces.

Auparavant ces pollutions étaient masquées par les pollutions primaires, secondaires ou tertiaires ; ces dernières ayant fait l'objet des efforts d'épuration, on s'intéresse dorénavant de façon plus attentive aux micropolluants, que certains auteurs classifient aussi sous le vocable de « pollution quaternaire ».

Ainsi on s'intéresse à leur présence dans les milieux récepteurs, à leur taux de réduction dans les stations d'épuration conventionnelles, voire aux types de traitements « quaternaires » qu'il faudra mettre en place pour poursuivre plus avant leur dégradation.

Parmi ces substances, on mentionnera les substances reprises dans la liste des substances toxiques bien entendu, les pesticides, les médicaments ou leurs métabolites, les oestrogènes ainsi que les micropolluants à effets modulateurs endocriniens, les stéroïdes, les métabolites de détergents, mais aussi des produits tels que les parfums, etc...

Bien qu'elles soient, pour la plupart d'entre elles, utilisées depuis quelques dizaines d'années à présent, on considère qu'elles sont potentiellement perturbatrices des écosystèmes, non pas seulement par des effets de toxicité directe qui auraient le plus souvent conduit à bannir leur usage, mais aussi parce qu'elles seraient susceptibles de réduire la fertilité de certaines espèces (poissons, crustacés, mollusques ...). On se pose à présent la question du risque .potentiel pour la santé humaine.

Cette nouvelle question environnementale fait l'objet d'études approfondies pour mesurer les taux de contamination des milieux aquatiques, quantifier les abattements obtenus dans les différentes filières d'épuration, mieux identifier les flux de ces matières dans les stations : ces polluants se retrouvent-ils majoritairement dans l'eau traitée, dans les boues, dans les produits gras (graisses), et, finalement, mieux cerner les risques associés à leur présence, éventuellement de façon simultanée, dans ces écosystèmes.

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