EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Il y a déjà dix ans, la loi du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques créait la nouvelle profession d'avocat en fusionnant celles d'avocat et de conseil.

Le Sénat est saisi en premier lieu du projet de loi réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires et des conseils en propriété industrielle, dont l'objet est de conforter cette importante réforme en lui apportant les retouches nécessaires pour en assurer la pérennité.

Ce projet de loi comporte deux axes distincts.

Le premier, consacré aux avocats, se présente sous la forme d'un triptyque qui vise, d'une part, à transposer la directive 98/5 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 afin d'ouvrir aux avocats communautaires le droit de s'établir en France sous leur titre d'origine, d'autre part, à réformer en profondeur l'organisation de la formation initiale, enfin, à mettre en conformité la procédure disciplinaire avec les exigences d'un « procès équitable » au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

Le second axe concerne l'amélioration du statut d'autres professions telles que les greffiers des tribunaux de commerce ou encore les conseils en propriété industrielle. Il tend également à proposer une importante réforme relative aux experts judiciaires en vue de garantir la qualité de leur recrutement et d'apporter des aménagements à la procédure disciplinaire.

Chaque volet du présent projet de loi est le fruit d'une démarche concertée entre le ministère de la justice et les professionnels concernés qui ont largement fait part à votre rapporteur de leur satisfaction à l'égard de l'ensemble des avancées proposées.

Le Sénat a toutes les raisons de se féliciter que, dans le prolongement du chantier de modernisation de la justice engagé l'été dernier, le statut des professions judiciaires et juridiques constitue une priorité pour le Gouvernement.

Votre commission des Lois a toujours été particulièrement attentive au devenir de ces différentes professions, comme l'ont d'ailleurs illustré en juillet dernier les travaux de la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice désignée en son sein 1 ( * ) , qui a consacré d'importants développements aux principaux acteurs de la communauté judiciaire. Elle se réjouit d'ailleurs de ce qu'un grand nombre de recommandations formulées dans ce rapport soit concrétisé par le présent projet de loi.

Elle souscrit pleinement, sous réserve de modifications et de compléments, aux dispositions du présent projet de loi qui permettent, d'une part, d'adapter la réglementation de la profession d'avocat face à l'émergence d'exigences nouvelles et, d'autre part, de renforcer le statut des experts judiciaires et d'autres professions juridiques et judiciaires.

I. UNE ADAPTATION DE LA RÉGLEMENTATION DE LA PROFESSION D'AVOCAT RENDUE NÉCESSAIRE PAR DES IMPÉRATIFS NOUVEAUX

Si la réglementation de la profession d'avocat née au XIVe siècle 2 ( * ) revêt un caractère technique, les principes qui l'inspirent reflètent une certaine vision de sa place dans la société. L'avocat, tout autant que le juge, se présente comme un artisan incontournable de l'Etat de droit.

Ce professionnel est un précieux auxiliaire de la justice investi d'une triple mission : prodiguer ses conseils, représenter ses clients et plaider devant les juridictions. Son rôle s'enrichit continuellement de missions nouvelles, comme l'a mis en lumière la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice 3 ( * ) .

En dépit de son ancienneté multiséculaire, la profession d'avocat n'a jamais cessé d'évoluer pour s'adapter aux mutations affectant la société. Deux réformes importantes intervenues en 1971 et en 1990 ont modifié ses contours en vue de lui permettre d'affronter la concurrence nationale et internationale 4 ( * ) .

Aujourd'hui, la construction européenne et les besoins croissants et divers des usagers du droit imposent une modernisation de la réglementation de cette profession, en particulier en qui concerne les règles de recrutement, l'organisation de la formation professionnelle et la procédure disciplinaire, autant de domaines qui appellent sans attendre de nécessaires adaptations.

A. UNE OUVERTURE DES RÈGLES D'ACCÈS À LA PROFESSION INSUFFISANTE AU REGARD DE L'OBJECTIF COMMUNAUTAIRE DU LIBRE ÉTABLISSEMENT DES AVOCATS EN EUROPE

En France, si la nationalité française n'est plus aujourd'hui une condition obligatoire d'inscription à un barreau, l'obtention du titre français d'avocat et la pratique de ce métier demeurent régis par une réglementation fondée sur une logique nationale .

En parallèle, la Communauté européenne s'est efforcée de favoriser la mise en place d'un cadre d'exercice commun à tous les Etats membres en vue de faire face à l'internationalisation croissante des normes juridiques et à la concurrence internationale sur le marché du droit.

Avant même d'évoquer les tentatives d'ouverture aux ressortissants communautaires de la profession d'avocat en France, il convient de rappeler brièvement les conditions générales d'inscription auprès d'un barreau définies par la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

CONDITIONS GÉNÉRALES D'ACCÈS À LA PROFESSION D'AVOCAT

? L'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 précitée définit trois critères relatifs à la nationalité, à la qualification juridique et à la moralité, préalables à l'accès à la profession d'avocat en France :

- la nationalité française est requise mais certains ressortissants ( communautaires , d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou d'un autre Etat sous réserve de réciprocité), ainsi que les personnes reconnues en qualité de réfugié ou d'apatride sont assimilés aux nationaux ;

- le candidat doit être titulaire d'une maîtrise en droit ou d'un titre équivalent et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA) ;

- le candidat doit présenter des garanties de probité et de désintéressement impliquant de ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation pénale pour agissements contraires à l'honneur, à la probité et aux bonnes moeurs, ni d'une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, révocation ou radiation pour des faits de même nature et de n'avoir pas été frappé de faillite personnelle ou d'autres sanctions prévues dans le cadre d'une procédure collective.

? Le contrôle de ces conditions est effectué par le conseil de l'ordre dont la décision est susceptible d'appel.

? L'intégration définitive dans la profession est enfin subordonnée à l'accomplissement d'un stage d'une durée de deux ans 5 ( * ) .

Actuellement, tout ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne peut donc exercer sous le titre d'avocat français, sous réserve de remplir les conditions fixées à l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971.

Ce cadre français a été complété par la législation communautaire qui a institué, pour tous les avocats communautaires ayant obtenu leur titre dans un des Etats membres de la Communauté européenne 6 ( * ) , des voies d'accès nouvelles à la profession d'avocat dans les autres pays d'accueil dérogeant aux règles de droit commun en vigueur dans ces Etats.

La suppression des obstacles à la libre circulation des personnes et des services constitue une condition essentielle du développement du marché intérieur commun aux Etats membres mis en place par le traité instituant la Communauté européenne (traité CE).

Au terme d'un long processus de maturation, la Communauté européenne en étroite concertation avec les professionnels concernés s'est efforcée de promouvoir la mobilité professionnelle des avocats .

En pratique, l'objectif est d'assurer une égalité de traitement avec les nationaux , c'est-à-dire de garantir au ressortissant communautaire que son exercice professionnel s'effectuera dans un autre pays membre de la Communauté européenne dans des conditions identiques à celles imposées aux ressortissants de ce même Etat. Il appartient aujourd'hui à chaque pays membre, en particulier à la France, de traduire concrètement cette exigence en faisant évoluer sa législation nationale.

Selon les statistiques du Conseil des barreaux de l'Union européenne, on dénombre environ 705 000 avocats ressortissants communautaires exerçant dans l'Union européenne dont 156.500 au Royaume Uni, 140.000 en Italie, 138.500 en Espagne, 116.500 en Allemagne, 39.500 en France, 15.500 en Belgique et 4.320 au Danemark. Trois modèles différents d'organisation de la profession d'avocat existent au sein de la Communauté européenne.

TROIS MODÈLES D'ORGANISATION DE LA PROFESSION D'AVOCAT EN EUROPE

? Un premier modèle rassemble des Etats tels que le Danemark , la Finlande , et la Suède dont le système repose sur l'unicité de la profession juridique , la profession d'avocat détenant le monopole du domaine juridique et disposant d'un champ d'action très large .

? Les Etats de « common law » tels que l'Irlande et le Royaume-Uni représentent le deuxième modèle dans lequel prévaut la dualité des professions de « barrister » (ou advocate en Ecosse), qui plaide devant les plus hautes juridictions et qui a peu de contacts avec les justiciables, et de « solicitor » , qui est un généraliste du droit détenant des compétences très variées et qui cumule notamment les activités pratiquées par les notaires français.

? Dans le troisième groupe figurent les autres Etats (France, Allemagne, Espagne, Italie, Grèce...) qui séparent les professions d'avocat et de notaire tout en s'accommodant de sensibles variations (en Allemagne par exemple, la profession d'avocat est compatible dans la majorité du territoire avec celle de notaire).

Source : les avocats en Europe - Jacques Pertek - mars 2000 - LGDJ

1. Des progrès en faveur du libre exercice professionnel encore trop timides

Deux mécanismes différents ont été mis en place par la Communauté européenne en vue de faciliter aux avocats ressortissants communautaires l'accès à la profession d'avocat dans un autre Etat que celui dans lequel ils ont obtenu leur titre d'origine.

a) L'accès à la libre prestation de services, une première étape d'ampleur modeste

Le principe de la libre prestation de services consacré aux articles 59 à 66 du traité CE (devenus les articles 49 à 55 aux termes du traité d'Amsterdam) constitue une première déclinaison du libre exercice de la profession d'avocat par les ressortissants communautaires . Il ouvre la possibilité à un ressortissant communautaire installé dans un Etat membre de la Communauté d'exercer son activité dans un autre Etat membre pour y fournir de manière épisodique une prestation d'une durée limitée .

Dès 1974, la Cour de justice des Communautés européennes dans un arrêt Van Binsbergen (3 décembre 1974) a reconnu aux justiciables la possibilité d'invoquer directement le bénéfice de cette règle.

La Communauté européenne a adopté une directive 77/249 du Conseil du 22 mars 1977 en vue de faciliter l'usage de cette liberté aux avocats 7 ( * ) . Elle a ainsi posé le principe de la reconnaissance mutuelle des autorisations d'exercer .

Tout en étant soumis à l'obligation de porter le titre professionnel détenu dans l'Etat d'origine et de respecter à la fois les règles déontologiques de l'Etat d'accueil et celles de l'Etat d'origine, les avocats se sont vu reconnaître la faculté de fournir une prestation juridique dans tout Etat membre de la Communauté sans obligation de résidence ni d'inscription au barreau.

Pour certaines activités, la directive a néanmoins réservé aux Etats membres la faculté d'imposer au prestataire un régime particulier . Ainsi l'Etat d'accueil peut-il décider de subordonner la représentation et la défense d'un client en justice par un ressortissant communautaire à l'obligation, d'une part, d'agir de concert avec soit un avocat soit un avoué « local », et d'autre part, d'être introduit auprès du président de la juridiction et, le cas échéant, auprès du bâtonnier.

Si cette initiative a marqué un premier pas en avant, ce texte, limité dans sa portée, s'est révélé complexe dans son application .

En effet, le régime de la libre prestation confère des droits plus restrictifs que ceux susceptibles de résulter du libre établissement : le prestataire n'est pas assimilé à un avocat local . Il ne porte pas le titre de l'Etat d'accueil. Il présente donc une moindre garantie pour ses clients. Comme l'ont relevé d'éminents représentants de la profession d'avocat : « la situation classique de l'avocat prestataire de services sera celle d'un professionnel se déplaçant occasionnellement dans différents Etats membres de l'Union européenne à partir d'un établissement pivot fixé dans un autre Etat membre dont il portera le titre » 8 ( * ) .

De plus, dans certains Etats tels que la Grande-Bretagne, la libre prestation juridique était déjà autorisée et couramment pratiquée. La directive n'a fait à cet égard qu'aligner le droit sur les usages.

En outre, la distinction entre la prestation de services et l'établissement est apparue difficile à établir en pratique , certaines situations pouvant être ambiguës et susceptibles de donner lieu à des abus. De plus, la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes n'a pas contribué à clarifier la ligne de partage entre ces deux régimes. Dans un arrêt Gebhard contre conseil de l'ordre des avocats de Milan du 30 novembre 1995, elle a en effet accepté qu'un prestataire de services puisse se doter d'une infrastructure (par exemple un bureau ou une étude) dans l'Etat membre d'accueil « aux fins de l'accomplissement de la prestation en cause », neutralisant ainsi un indice utile et pertinent pour qualifier la situation du professionnel concerné.

Enfin, la portée de « l'obligation d'agir de concert avec un avocat local » a soulevé des difficultés d'interprétation .

La Cour de justice des Communautés européennes a prononcé un arrêt en manquement contre l'Allemagne (25 février 1988) en raison des contraintes trop sévères imposées aux avocats prestataires par les mesures de transposition de la directive de 1977. Elle a jugé excessif de leur interdire d'agir seuls devant la juridiction concernée lorsque la représentation par le ministère d'avocat était facultative. Elle a précisé que l'action de concert ne pouvait avoir pour effet d'appliquer au prestataire le principe de la territorialité de la postulation 9 ( * ) auquel sont soumis les avocats allemands devant certaines juridictions civiles, le prestataire, par nature professionnel « occasionnel », devant pouvoir postuler et plaider devant toutes les juridictions.

La transposition par la France de cette directive par un décret n° 79-233 du 22 mars 1979 a également donné lieu à un arrêt en manquement (10 juillet 1991 Commission contre France) pour des raisons analogues.

La France a donc modifié son dispositif de transposition (articles 200 à 204 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat) afin de respecter le principe réitéré par la Cour de justice des Communautés européennes selon lequel l'action de concert ne pouvait être imposée au prestataire lorsque la représentation par avocat n'était pas obligatoire. On relèvera qu'elle a imposé aux ressortissants communautaires une condition « d'élection de domicile auprès d'un avocat établi près le tribunal saisi », qui constitue une simple déclinaison de l'action de concert admise par la jurisprudence communautaire.

Force est donc de constater que la libre prestation de services n'a eu qu'un impact modeste sur la libre circulation des avocats en Europe.

b) Le libre établissement, une réalité encore lointaine

Les articles 52 à 58 du traité CE (devenus les articles 43 à 48 aux termes du traité d'Amsterdam) posent le principe de la liberté d'établissement des ressortissants communautaires exerçant une activité indépendante, consacrant ainsi l'égalité de traitement en matière professionnelle entre les professionnels d'un Etat membre et leurs homologues qui exercent dans un autre Etat membre. Elle constitue la seconde modalité du libre exercice professionnel en Europe.

La Cour de justice des Communautés européennes a considéré que cette règle était directement applicable aux avocats (arrêt Reyners contre Belgique du 21 juin 1974) 10 ( * ) , même en l'absence de directive (arrêt Klopp contre France du 12 juillet 1984). Dans ce même arrêt, la jurisprudence a d'ailleurs reconnu le principe général selon lequel « le droit d'établissement comporte la faculté de créer et de maintenir, dans le respect des règles professionnelles, plus d'un centre d'activité sur le territoire de la Communauté ».

La reconnaissance mutuelle des diplômes figurant à l'article 57 du traité CE est apparue comme un utile moyen de favoriser la mobilité professionnelle des ressortissants communautaires. Confrontés à de réelles difficultés pour accéder à une profession dans un Etat membre différent de leur Etat d'origine, ces derniers étaient bien souvent pénalisés par les conditions d'obtention des diplômes exigés par l'Etat d'accueil, définies selon des critères strictement nationaux (maîtrise de la langue nationale, contrôle de connaissances).

Après avoir limité son action à quelques professions ciblées 11 ( * ) , la Communauté européenne décida d'adopter une directive 89/48 du Conseil du 21 décembre 1988 relative à la reconnaissance des diplômes 12 ( * ) , ayant vocation à s'appliquer à l'ensemble des professions réglementées et donc aux avocats et dont la mise en oeuvre devait être assurée au plus tard avant janvier 1991.

Cette directive ouvre aux ressortissants communautaires pleinement qualifiés pour exercer un de ces métiers dans leur Etat d'origine la possibilité de s'établir dans un autre Etat membre . Lorsque l'Etat d'accueil constate des différences substantielles entre son système de formation et celui de l'Etat d'origine, il a la faculté de mettre en oeuvre des mesures correctrices destinées à vérifier les compétences du migrant. Le pays d'accueil peut ainsi exiger soit l'accomplissement d'un stage d'adaptation , soit la réussite à un test d'aptitude ou encore la preuve d'une expérience professionnelle d'une durée suffisante dans l'Etat d'origine .

L'avocat migrant est alors assimilé à un avocat de l'Etat d'accueil et intègre cette profession : il exerce sous le titre professionnel de cet Etat et doit se soumettre aux règles déontologiques et aux pratiques professionnelles en vigueur.

Ce dispositif, qui repose selon les termes de la Commission des Communautés européennes sur le principe de la « confiance mutuelle » entre les Etats membres, ne semble pas avoir produit les effets escomptés sur le libre établissement en Europe.

En effet, la France, comme la plupart des Etats membres à l'exception du Danemark, a choisi d'instaurer un test d'aptitude (un contrôle de connaissances) plutôt qu'un stage d'adaptation.

Les articles 11 (2°) et 12 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 renvoient au pouvoir réglementaire le soin de transposer la directive 89/48 du 21 décembre 1988.

L'article 99 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat a ouvert la possibilité de bénéficier d'une équivalence de diplôme, sous réserve de justifier de diplômes ou de titres permettant l'exercice de la profession dans un autre Etat membre ou de l'exercice à plein temps de la profession pendant deux ans au moins au cours des dix dernières années .

L'inscription au barreau n'est pas systématique puisqu'un examen d'aptitude est prévu lorsque la formation du candidat se révèle trop différente de celle dispensée en France. Selon le profil des candidats, le contenu de cet examen est susceptible de varier. Au vu de leur formation initiale, le Conseil national des barreaux dispose d'un pouvoir d'appréciation sur le nombre et la nature des matières sur lesquelles le test portera. Il lui appartient également d'arrêter la liste des candidats autorisés à se présenter à cet examen. Une fois admis, les intéressés sont alors dispensés de la condition de réussite au certificat d'aptitude à la profession d'avocat et du stage de deux ans. Ils sont directement inscrits au tableau de l'ordre.

De 1992 à décembre 1999, 386 dossiers ont été déposés par des ressortissants communautaires auprès de la commission d'admission du Conseil national des barreaux, 23 décisions de dispense ont été prononcées, 319 candidats ont passé le test d'aptitude et 16 dossiers ont été soit annulés soit rejetés 13 ( * ) .

Si, en transposant la directive, la France en a globalement respecté l'esprit, d'autres pays de l'Union européenne en ont fait une application plus discutable en utilisant le test d'aptitude comme une mesure de protectionnisme destinée surtout à décourager les candidats . En février 1996, dans son rapport sur l'application de la directive au sein de la Communauté européenne, la Commission a regretté les disparités trop fortes dans la mise en oeuvre des épreuves d'aptitude entre les Etats membres, allant même jusqu'à qualifier la procédure de reconnaissance d'« expérience frustrante et décourageante pour le migrant » 14 ( * ) .

En outre, il semble que l'institution du test d'aptitude ait constitué un obstacle psychologique au libre établissement comme l'a également mis en lumière la Commission  dans son rapport précité : « il est probable que l'épreuve d'aptitude imposée dans la plupart des cas aux avocats migrants a également joué un rôle dissuasif ».

De plus, la portée de la directive 89/48 s'est avérée modeste en raison de son objet même . Limitée à la reconnaissance des diplômes, elle ne prend pas en compte l'exercice professionnel en tant que tel mais se situe en amont puisqu'elle concerne surtout des jeunes diplômés et n'a pas pour objet de valoriser l'expérience professionnelle.

La jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes a joué un rôle moteur pour faire avancer la libre circulation des avocats en Europe en aiguillant les Etats quant à l'interprétation des textes communautaires et quant aux mesures nationales de transposition à mettre en oeuvre. Ainsi, bien après l'entrée en vigueur de la directive 89/48 du 21 décembre 1988, la Cour de justice a tenu à réaffirmer l'obligation pour les Etats membres de prendre en compte l'équivalence des diplômes (arrêt Gebhard précité). En dépit de ces efforts, ce texte communautaire n'a bénéficié qu'à un faible nombre d'avocats .

Ce constat a conduit les institutions communautaires à rechercher des moyens plus efficaces pour accélérer le mouvement du libre établissement des avocats en Europe.

En France, près de 1 090 avocats d'origine étrangère étaient inscrits à un barreau français (soit 3 % des avocats en exercice) au 1 er janvier 2002. Le barreau de Paris totalise à lui seul près de 80 % d'entre eux, celui de Nanterre occupant la seconde place. Parmi eux, 488 sont originaires d'un pays de l'Union européenne principalement du Royaume-Uni et d'Allemagne 15 ( * ) .

c) La nécessité de compléter le cadre communautaire d'exercice des avocats

(1) Les justifications de la directive 98/5 du 16 février 1998

Au-delà des résultats décevants des initiatives communautaires antérieures, quatre justifications expliquent la démarche conjointe des représentants de la profession d'avocat et des instances communautaires tendant à proposer une avancée nouvelle.

Les besoins des usagers du droit « lesquels, en raison des flux d'affaires croissants résultant notamment du marché intérieur, recherchent des conseils lors de transactions transfrontalières dans lesquelles sont souvent imbriqués le droit international, le droit communautaire et les droits nationaux » 16 ( * ) ont rendu nécessaire une action nouvelle en faveur de la libre circulation.

Le souci de mettre fin à une diversité de situations au sein de la Communauté européenne qui « se traduit par des inégalités et des distorsions de concurrence » entre les avocats communautaires mis en exergue par le sixième considérant de la directive, constitue une deuxième justification . En effet, « seuls quelques Etats membres permettent déjà, sur leur territoire, l'exercice d'activités d'avocat, autrement que sous forme de prestations de services, par des avocats venant d'autres Etats membres et exerçant sous leur titre professionnel d'origine ».

De plus, comme l'indique l'exposé des motifs du présent projet de loi : « cette directive a marqué une étape importante dans l'édification d'une Europe du droit. Elle correspond à la volonté, affirmée par les signataires du traité d'Amsterdam et renouvelée par les participants du sommet de Tampere, de renforcer la coopération judiciaire entre les Etats européens ». Des dispositifs institutionnels, tels que la création de magistrats de liaison 17 ( * ) ou encore d'Eurojust 18 ( * ) , se sont mis en place en vue de favoriser cette entraide. Les autorités judiciaires ont été les principales concernées. Il est apparu évident qu'une coopération judiciaire renforcée ne pouvait être effective sans l'association étroite des avocats communautaires.

Enfin, l'ouverture est devenue un impératif dépassant le cadre communautaire. Les services juridiques font l'objet du nouveau cycle de négociations sur les services dans le cadre de l'Accord général sur le commerce des services (GATS) qui s'est ouvert à Doha en novembre 2001 et devrait s'achever en janvier 2005 . La possibilité pour les avocats ressortissants d'un Etat membre de l'Organisation mondiale du commerce d'exercer dans un autre Etat membre est donc actuellement en cours de discussion. Il paraît donc urgent d'harmoniser les pratiques au sein même de la Communauté européenne afin de permettre à la Commission de définir une stratégie concurrentielle efficace à l'égard de ses partenaires .

Fruit d'une longue concertation entre la Commission et les organisations professionnelles concernées, la directive 98/5 du Parlement européen et du Conseil visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat a été adoptée par le Conseil de l'Union européenne et le Parlement européen le 16 février 1998 . Ce texte trouve son origine dans les travaux du Conseil des barreaux de l'Union européenne (CCBE) qui ont servi de base à une première proposition de la Commission présentée en 1995 et modifiée en septembre 1996 afin de prendre en compte les amendements proposés par le Parlement européen 19 ( * ) .

Le Grand Duché de Luxembourg a introduit un recours afin d'obtenir l'annulation de cette directive, faisant notamment valoir que ce dispositif n'assurait pas au consommateur une protection satisfaisante et que les instances communautaires n'avaient pas apporté de justifications suffisantes quant aux modalités retenues. Dans un arrêt du 7 novembre 2000, la Cour de Justice des communautés européennes a rejeté cette demande.

(2) La transposition de la directive par les Etats membres de l'Union européenne

Plus des deux tiers des Etats membres ont à ce jour transposé la directive 98/5 dans leur droit interne, comme le montre le tableau ci-après.

ETAT DE LA TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE ETABLISSEMENT 98-5
DU 16 FÉVRIER 1998 PAR LES PAYS MEMBRES DE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE

(au 1 er janvier 2002)

PAYS

DATES
D'ADOPTION

DATES D'ENTRÉE
EN VIGUEUR

RÉFÉRENCES

1

ALLEMAGNE

9 mars 2000

14 mars 2000

Europäisches Rechtsanwaltsgesetz

2

AUTRICHE

23 mai 2000

23 mai 2000

Freier Dienstleistungsverkehr und Niederlassung von europäischen Rechtsanwälten in Österreich sowie Änderung der Rechtsanwaltsordnung

3

BELGIQUE

22 novembre 2001

22 novembre 2001

Loi visant à faciliter l'exercice de la profession d'avocat ainsi que l'établissement en Belgique d'avocats ressortissants d'un autre Etat membre de l'Union européenne

4

DANEMARK

30 mars 2000

7 avril 2000

- Loi n° 231 du 4 avril 2000 modifiant le Code civil

- Règlement n° 276 du 14 avril 2000 du département de la Justice concernant l'établissement des avocats européens au Danemark

5

ESPAGNE

3 août 2001

5 août 2001

Real Decreto 936/2001 du 3.8.2001

6

FINLANDE

23 décembre 1999

1 er janvier 2000

Paragraphes 5 b, 3, 8,9 de l'Acte des avocats

7

GRÈCE

23 mai 2000

23 mai 2000

Décret présidentiel n° 152/2000 du 23 mai 2000

8

ITALIE

21 décembre 1999

18 janvier 2000

- Art. 19 de la loi n° 526.

- Décret du 2 février 2001

9

NORVÈGE

30 juin 2000

30 juin 2000

Réglementation administrative norvégienne du 30 juin 2000

10

PORTUGAL

20 juillet 2001

- Loi 80/2001 du 20 juillet 2001

11

ROYAUME-UNI

- Angleterre/
Pays de Galles


- Irlande du Nord



- Ecosse

10 avril 1999


-





28 avril 2000

22 mai 2000


22 novembre 2000




28 avril 2000

- Section V, n° 29 des Régle-mentations 2000 des Communautés européennes (exercice des avocats)

- Réglementations 2000 des Communautés européennes, Law Society d'Irlande du Nord (exercice des avocats) ("Law "Society of Northern
- Réglementations 2000 des Communautés européennes (exercice des avocats)

12

SUÈDE

1 er janvier 2000

1 er janvier 2000

Chapitre 8, paragraphe 1 et suivants du Code de procédure Suédois

(Source : Conseil des barreaux de l'Union européenne)

La France n'a pas encore transposé cette directive et n'a donc pas respecté le délai de transposition fixé au 15 mars 2000 20 ( * ) . La Commission des Communautés européennes a veillé à lui rappeler l'échéance de ce délai en lui adressant une lettre de mise en demeure le 8 août 2000. En réponse, la représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne dès le mois de novembre 2000 a fait valoir qu'un avant-projet de loi en vue d'une transposition était en cours d'élaboration. Le 24 janvier 2001, la Commission, en l'absence de texte et de calendrier précis, a adressé un avis motivé à la France .

Le Gouvernement de M. Lionel Jospin a déposé un projet de loi de transposition de cette directive (n° 264, Sénat, 2001-2002) sur le bureau du Sénat en mars 2002 qui n'a pu être examiné, les travaux parlementaires ayant été interrompus fin février en raison des campagnes présidentielle et législative. Plutôt que de reprendre ce texte, limité dans son objet, M. Dominique Perben, garde des sceaux, a préféré faire figurer son contenu au sein d'un projet de loi proposant une réforme plus ambitieuse des règles relatives à la profession d'avocat, étendue à la formation et à la discipline.

Faute d'avoir transposé la directive 98/5 du 16 février 1998 dans les délais impartis, la Cour de justice des Communautés européennes a récemment prononcé un arrêt en manquement à l'encontre de la France (26 septembre 2002). Une nouvelle condamnation par cette cour pourrait s'avérer coûteuse pour les contribuables . En effet, depuis un arrêt Francovich contre Italie du 19 novembre 1991, la Cour de justice des Communautés européennes a reconnu à tout citoyen de l'Union européenne subissant un préjudice en raison de la non transposition d'une directive dans les délais, la possibilité de demander à l'Etat défaillant le versement de dommages et intérêts.

La cour d'appel de Pau a rendu une importante décision (Fourgeau contre conseil de l'ordre des avocats de Bayonne du 21 mai 2001) précisant que cette directive avait créé des obligations claires, précises et inconditionnelles depuis l'expiration du délai de transposition de la directive (15 mars 2000) et que le conseil de l'ordre n'était pas fondé à refuser l'inscription à un barreau français d'un avocat installé dans un autre Etat membre. Deux autres arrêts dans le même sens ont été rendus 21 ( * ) .

Dès lors, certains barreaux ont commencé à appliquer la directive. Depuis le 15 mars 2002, on dénombre une vingtaine d'avocats titulaires d'un titre professionnel acquis dans un autre Etat membre de la Communauté inscrits sous leur titre professionnel d'origine auprès de l'un des 181 barreaux français, notamment celui de Paris 22 ( * ) .

(3) L'objet, le champ et les grandes lignes de la directive

Les 18 articles de la directive 98/5 tendent à instituer une nouvelle voie d'accès à la profession d'avocat en France s'ajoutant aux deux passerelles, temporaire pour l'une aux termes de la directive 77/249, définitive pour l'autre en vertu de la directive 89/48.

Le bénéfice de la directive s'étend aux ressortissants communautaires détenant un titre équivalent à celui d'avocat en France (article premier de la directive). Elle s'adresse donc essentiellement à des professionnels expérimentés, pour lesquels un test d'aptitude peut constituer un obstacle difficile à contourner.

Tout en posant des impératifs aux Etats membres de la Communauté, la directive leur laisse une certaine latitude dans certains domaines sensibles .

Parmi les dispositions obligatoires figurent, d'une part, le droit d'exercer la profession d'avocat sous le titre d'origine à titre permanent (articles 2 à 7), sous réserve de certaines conditions, et d'autre part, celui d'être intégré au sein de la profession d'avocat de l'Etat d'accueil, à l'issue d'une période d'acclimatation de trois ans (article 10). Elle impose également de soumettre l'avocat migrant aux règles professionnelles et déontologiques du pays d'accueil (article 6). Elle prévoit l'étroite collaboration des Etats membres qui doivent se porter une assistance mutuelle (article 13).

En vue de respecter les spécificités de la législation de chaque Etat, certains volets de la directive , plus techniques, tels que la soumission de l'avocat au principe de l'assurance obligatoire (article 6), la possibilité d'imposer à l'avocat migrant « d'agir de concert avec un avocat local » (article 5), la faculté d'exclure du champ d'application les avocats exerçant devant les plus hautes juridictions (article 5), certaines modalités relatives à la mention du titre d'origine (article 3), sont en revanche facultatifs .

Les dispositions relatives à l'exercice en groupe des avocats exerçant sous un titre d'origine (articles 11 et 12) relèvent d'une catégorie plus incertaine , voire plus ambiguë .

D'une part, la directive prévoit des règles d'application à géométrie variable pour tenir compte de la diversité des législations des Etats membres qui reconnaissent des formes plus ou moins avancées d'exercice en commun de la profession d'avocat (article 11) 23 ( * ) . Ainsi, elle n'impose pas aux Etats qui interdisent l'exercice en groupe de transposer les dispositions prévues en ce domaine.

Soucieuse cependant de donner aux avocats européens les moyens de faire face à la concurrence des grandes structures internationales régies par des législations étrangères à la Communauté européenne et d'inciter les Etats membres à favoriser la création par l'avocat migrant de succursales ou d'agences issues de sociétés régies par le droit d'un autre Etat membre de la Communauté, elle définit des règles minimales obligatoires s'imposant aux Etats qui admettent l'exercice en commun de la profession d'avocat.

Parallèlement à cette obligation, elle leur offre néanmoins la faculté de prévoir des mesures restrictives relatives aux caractéristiques des sociétés régies par le droit d'un autre Etat membre au nom desquelles l'avocat migrant serait autorisé à exercer, notamment eu égard aux personnes qui en détiennent le contrôle. Ces dispositions particulières visent à préserver la spécificité de la réglementation des Etats membres , tels que la France par exemple, qui interdisent les structures d'exercice interdisciplinaires , par définition, susceptibles d'être contrôlées par des personnes extérieures à la profession d'avocat ou d'avoir pour objet l'exercice en commun de plusieurs professions et non de la seule profession d'avocat.

D'autre part, comme pour contrebalancer toutes ces précautions, la directive consacre le droit pour l'avocat exerçant sous son titre d'origine de faire mention de la dénomination de la société dans laquelle il exerce dans son pays d'origine, y compris lorsqu'il lui serait interdit d'exercer sous cette forme dans le pays d'accueil et pose en parallèle l'interdiction aux Etats de s'y opposer (article 12). Ainsi reprend-elle la liberté accordée par ailleurs aux Etats membres en permettant à l'avocat migrant de donner l'apparence qu'il exerce sous cette forme dans le pays d'accueil et de faire jouer la réputation et la notoriété du groupement étranger aux yeux de sa clientèle dans le pays d'accueil.

Enfin, la directive impose à la Commission de transmettre au Parlement européen, dix ans après son entrée en vigueur , un rapport dressant le bilan de son application en vue de proposer des améliorations susceptibles d'être apportées au dispositif (article 15).

2. Le projet de loi : une transposition fidèle de la directive soucieuse d'assurer une stricte égalité entre les avocats exerçant sous un titre français et les avocats communautaires exerçant sous leur titre d'origine

Le présent projet de loi vise à mettre en oeuvre la directive 98/5 du 16 février 1998, avec près de trois ans de retard . Il traduit ainsi le souci du Gouvernement de respecter les objectifs affichés en mars 2002 lors du Conseil européen de Barcelone de réduire la part des directives non transposées à moins de 1,5 % et de rendre applicables les directives dont la transposition aurait dû intervenir depuis plus de deux ans.

Comme l'a précédemment déploré votre commission des Lois 24 ( * ) et plus récemment Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes 25 ( * ) , la France connaît en matière de transposition de directives communautaires un inquiétant retard (plus de 3 % des directives non transposées). Comme l'a indiqué le Gouvernement en réponse à une question écrite : « le déficit de transposition des directives dans l'Union européenne est passé de plus de 6 % en 1997 à 2,1 % dans le dernier tableau de la Commission, publié en novembre dernier. La France fait toutefois exception puisqu'elle figure depuis le printemps 2002, au dernier rang des pays de l'Union européenne avec 56 directives relatives au marché intérieur non transposées, ce qui correspond à 3,8 % du nombre total des directives » 26 ( * ) .

Le présent texte propose une transposition de la directive 98/5 assurant un équilibre entre le respect des obligations communautaires et le souci d'assurer une stricte égalité entre les avocats exerçant sous un titre français et les avocats communautaires exerçant sous le titre d'origine .

a) Une transposition fidèle aux principes posés par la directive

A titre liminaire, il convient de noter que le projet de loi met en oeuvre la faculté laissée par la directive d' exclure du bénéfice des mesures de transposition les avocats spécialisés auprès des plus hautes juridictions . Le champ du présent projet de loi se limite donc à ouvrir aux ressortissants communautaires l'accès à la seule profession d'avocat à l'exclusion de celles d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ainsi que d'avoué près la cour d'appel.

(1) La consécration d'un droit d'exercice permanent sous le titre d'origine

Le chapitre premier du titre premier du projet de loi consacre un droit d'exercice permanent sous le titre d'origine au bénéfice des ressortissants communautaires ayant obtenu leur titre d'avocat dans un des quatorze autres Etats membres de la Communauté européenne 27 ( * ) .

Conformément à l'article 3 de la directive, le projet de loi précise les modalités permettant de faire usage de ce droit ( article 2 ). Il impose aux avocats communautaires l'obligation de s'inscrire auprès du barreau de leur choix. Subordonnée à la simple production d'une attestation de leur inscription auprès de l'autorité compétente de son Etat d'origine, l'inscription en France serait dès lors automatique ( article 2 ).

Le projet de loi précise les modalités d'utilisation du titre d'origine ( article 3 ), qui doit être exprimé dans la langue officielle du pays d'origine et suivi de la double mention de l'autorité dont le migrant relève dans l'Etat d'origine et du barreau français auprès duquel il est inscrit.

Le projet de loi investit le conseil de l'ordre de missions nouvelles en le chargeant d' inscrire les avocats communautaires exerçant sous leur titre d'origine ( article 2 ), d'informer, de collaborer étroitement avec les autorités de l'Etat membre d'origine et de leur apporter son assistance ( articles 6 et 11 ).

Le projet de loi précise, conformément à la règle du traitement national, que les avocats migrants sont soumis aux mêmes règles déontologiques et professionnelles que celles qui s'imposent aux avocats exerçant sous un titre français ( article premier ), sous réserve des dérogations destinées à tenir compte de leur double appartenance.

En matière disciplinaire par exemple, les règles françaises s'imposeraient à eux, sous réserve de deux exceptions particulières liées à leur origine : le retrait (temporaire ou définitif) du droit d'exercer dans le pays d'origine emporterait automatiquement le même effet en France ( article 3 ), l'autorité compétente dans l'Etat d'origine serait informée par le conseil de l'ordre préalablement à l'engagement de poursuites disciplinaires à leur encontre ( article 6 ).

Le projet de loi ne prévoit aucune restriction du champ des activités pratiquées par les avocats exerçant sous le titre d'origine dotés d'une capacité d'action identique à celle des avocats exerçant sous un titre français . Ainsi, n'est pas mise en oeuvre la faculté laissée par la directive d'imposer aux avocats exerçant sous le titre d'origine d'agir de concert avec un avocat installé en France, ce qui traduit une volonté d'ouverture à l'égard des ressortissants communautaires . En revanche, le texte prévoit l'impossibilité pour l'avocat exerçant sous son titre d'origine, y compris dans le cas où celui-ci serait intégré à la profession d'avocat en France, de participer à une activité juridictionnelle, même à titre occasionnel ( article 10 ).

(2) La consécration du droit d'être intégré comme avocat exerçant sous un titre français, la création d'une voie d'accès nouvelle à la profession d'avocat

Le chapitre II du titre premier du projet de loi crée une voie nouvelle d'accès à la profession d'avocat en France ( article 8 ). Ce droit à « l'assimilation » offert aux avocats communautaires ne serait qu'une simple faculté , conformément aux dispositions de la directive.

Le présent texte subordonne la mise en oeuvre de ce droit nouveau à une condition d'activité effective et régulière en France en droit français et en droit communautaire d'une durée de trois ans , transposant les dispositions de la directive un peu moins claires qui font référence à une pratique dans « le droit national de l'Etat d'accueil, y compris le droit communautaire ».

Le projet de loi définit les modalités d'accès à la profession d'avocat en France (article 8 ). Il prévoit que si l'avocat remplit les conditions posées, il en justifie auprès du conseil de l'ordre qui, dans ce cas, se limite à une simple vérification au vu des éléments apportés par le candidat. Si à l'issue d'une période minimale de trois ans d'activité en France, l'expérience de l'avocat été d'une durée moindre dans le droit national ou dans le droit communautaire, le régime applicable lui serait moins favorable, le conseil de l'ordre devant se livrer à une vérification plus approfondie portant non seulement sur l'activité pratiquée en France mais également sur son aptitude à poursuivre celle-ci.

Le texte soumet les avocats communautaires, candidats à la profession d'avocat en France, aux mêmes conditions de moralité que celles imposées aux avocats exerçant sous un titre français et prévoit la possibilité pour le conseil de l'ordre de leur opposer un refus d'inscription alors même qu'ils rempliraient les exigences liées à la durée d'activité ( article 9 ).

b) Une transposition soucieuse d'assurer une stricte égalité entre les avocats exerçant sous un titre français et les avocats communautaires

En vue d'assurer une stricte égalité entre la réglementation applicable aux avocats communautaires exerçant sous le titre d'origine et le régime auquel sont soumis les avocats exerçant sous un titre français, le projet de loi met en oeuvre certaines des dispositions facultatives prévues par la directive.

? Par symétrie avec l'obligation d'assurance imposée par la loi du 31 décembre 1971 28 ( * ) aux avocats exerçant en France, le projet de loi prévoit une règle analogue pour les avocats exerçant sous leur titre d'origine, tenus de s'assurer pour les mêmes risques professionnels et selon les mêmes modalités qu'eux ( article 4 ). Le projet de loi, fidèle à la directive ouvre néanmoins aux avocats migrants la possibilité de bénéficier d'une équivalence dans l'hypothèse où une assurance aurait déjà été souscrite dans leur Etat d'origine. Le conseil de l'ordre serait chargé d'apprécier cette équivalence et, le cas échéant, d'imposer à l'avocat migrant de souscrire une assurance complémentaire.

Le texte traduit ainsi le souci d'aligner la situation des avocats exerçant sous leur titre d'origine sur celle des avocats exerçant sous le titre français en les soumettant aux mêmes contraintes. Ces dispositions se fondent également sur le souci d'assurer la sécurité des clients en cas de sinistre.

? La législation française autorisant la constitution de sociétés d'exercice en commun de la profession d'avocat sous certaines conditions depuis plus de trente ans, le projet de loi met en oeuvre l'obligation posée par la directive de faciliter aux avocats migrants cette modalité d'exercice particulière ( article 5 ). En parallèle, soucieux de préserver les spécificités du droit français, le présent texte transpose la faculté laissée aux Etats de prévoir des mesures restrictives relatives à la création sur le territoire de l'Etat d'accueil d'agences ou de succursales d'un groupement régi par le droit d'un autre Etat membre .

Respectant la directive, le projet de loi ouvre aux migrants la faculté de pratiquer leurs activités sous les mêmes formes que les avocats exerçant sous un titre français notamment au sein de sociétés régies par les règles françaises (sociétés civiles professionnelles, sociétés d'exercice libéral). A cet égard, il introduit une innovation en permettant l'exercice en commun entre des avocats communautaires et des avocats français au sein d'une même structure.

Le projet de loi prévoit également une autre nouveauté en autorisant les avocats communautaires à pratiquer leur activité en France au nom d'un groupement régi par le droit d'un autre Etat membre de la Communauté européenne , sous l'importante réserve que les caractéristiques de cette structure soient semblables à celles des sociétés d'exercice en commun constituées sous l'empire des règles du droit français ( article 5 ). Le texte énonce à cet égard quatre critères précis calqués sur les règles régissant les sociétés d'exercice libéral d'avocats définies par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 29 ( * ) et fondées sur le souci de préserver leur caractère « monoprofessionnel » et d'interdire une détention majoritaire du capital par des personnes extérieures à la profession 30 ( * ) .

Le projet de loi traduit donc la volonté de ne pas pénaliser les avocats exerçant sous un titre français soumis à une réglementation très stricte en matière d'exercice en groupe, en imposant des contraintes analogues aux avocats migrants exerçant sous leur titre d'origine.

Toutefois, fidèle au texte communautaire, le présent texte 31 ( * ) reprend l'obligation imposée aux Etats membres d'autoriser l'avocat exerçant sous son titre d'origine à faire mention du groupement au sein duquel il exerce, y compris lorsqu'il lui serait interdit d'exercer sous cette forme en France, reproduisant ainsi strictement l'ambiguïté originelle de la directive.

3. La position de votre commission des Lois : approuver le dispositif sous réserve d'améliorations

a) Approuver la démarche du Gouvernement

Votre commission des Lois approuve pleinement la volonté du Gouvernement de favoriser le mouvement d'unification de la profession d'avocat en Europe .

Cette ambition donnera peut-être l'occasion aux avocats exerçant sous un titre français de mettre un terme au paradoxe de leur situation actuelle .

Alors même qu'ils jouissent d'une excellente réputation et qu'un grand nombre de cabinets américains et anglo-saxons s'assurent leurs services (798 avocats français inscrits à la fois auprès d'un barreau français et d'un barreau d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, soit près de 2 % des avocats exerçant sous un titre français au 1 er janvier 2002) 32 ( * ) , ils éprouvent des difficultés à promouvoir le droit français . Comme le relève à cet égard le Conseil d'Etat dans un rapport de juin 2001, la bannière sous laquelle ils exercent « n'est pas de leur aveu même sans conséquence sur leur pratique professionnelle quotidienne et donc sur le type de droit, assez éloigné de leur culture personnelle, qu'ils véhiculent » 33 ( * ) .

La directive 98/5 du 16 février 1998, en reconnaissant aux avocats français la possibilité d'établir des cabinets à l'étranger et d'y nouer des liens avec des correspondants leur donne ainsi l'opportunité de contrebalancer l'influence croissante du droit anglo-saxon . Il convient donc qu'aucun Etat membre de la Communauté européenne et notamment la France n'en retarde davantage son application.

En 1995 déjà, votre commission des Lois, sur le rapport de notre excellent collègue M. Lucien Lanier, avait adopté une résolution ayant largement approuvé une proposition d'acte communautaire relative à la directive 98/5 34 ( * ) .

Votre rapporteur, à l'instar de l'ensemble des représentants de la profession d'avocat entendus au cours des auditions, se réjouit également de l'initiative du Gouvernement de transposer une directive dont le délai de transposition a expiré depuis trois ans déjà .

Il paraît essentiel de soutenir toutes les actions destinées à mettre le droit français en conformité avec les exigences communautaires et d'éviter des condamnations de l'Etat incompréhensibles et difficilement admissibles pour les justiciables et susceptibles d'être coûteuses pour les contribuables .

b) Souligner les interrogations soulevées par la directive et le projet de loi

Tout en étant favorable à la démarche du Gouvernement, votre commission des Lois tient néanmoins à faire part de certaines interrogations soulevées par les mesures de transposition de la directive 98/5 proposées par le présent projet de loi.

Compte tenu, d'une part, de la diversité des conditions d'accès à la profession d'avocat en Europe quant au profil et à la qualification exigés, d'autre part, des différences eu égard au champ des activités pratiquées par ces professionnels dans chaque Etat membre , votre rapporteur pressent que le présent projet de loi pourrait engendrer un bouleversement des contours actuels de la profession d'avocat en France, voire à plus long terme une possible redéfinition de son périmètre d'intervention .

En Allemagne par exemple, la qualification de « Volljurist » (juriste complet), commune au recrutement des juges, des notaires ou encore des hauts fonctionnaires, est exigée pour l'accès à la profession d'avocat. Ainsi, à la lumière des innovations proposées par le projet de loi, il est permis de se demander si certains débats franco-français liés à l'intégration ou non de certaines catégories de professionnels tels que les juristes d'entreprise auront encore un sens dans les années à venir 35 ( * ) .

L'absence d'harmonisation des systèmes de formation souvent disparates dans leurs deux composantes, universitaire et professionnelle, apparaît comme une source de difficulté réelle pour concrétiser le libre établissement des avocats en Europe, les comparaisons entre pays étant souvent délicates à établir .

Il existe en effet des différences notables dans la préparation des jeunes juristes entre les Etats membres de la Communauté européenne. Dans certains, la durée de la formation initiale s'élève à sept ans au moins au total (France, Belgique, Suède, Allemagne), dans d'autres, elle se situe entre cinq et sept ans (Royaume-Uni, Italie) tandis qu'en Espagne, elle oscille entre quatre et cinq ans.

Il paraît important d'éviter de trop fortes disparités de niveau entre professionnels qui pourraient favoriser un éclatement de la profession d'avocat. Aussi votre commission souhaite-t-elle inviter le ministère de la justice, en concertation avec les professionnels concernés, à promouvoir un nécessaire rapprochement des systèmes de formation des avocats au niveau communautaire .

Les changements étant toujours particulièrement longs en ce domaine, il semble important d'engager cette démarche le plus tôt possible. Le Conseil des barreaux de l'Union européenne a d'ailleurs adopté une résolution en ce sens (25 novembre 2000) mettant en exergue que si « le cadre législatif était une condition indispensable de la mobilité, il reste une autre condition qu'aucun texte ne peut décréter : la confiance dans la qualité de l'avocat qui vient d'un autre Etat membre ».

Votre commission tient également à souligner les insuffisances des dispositions de la directive relatives à l'assurance obligatoire .

L'obligation d'assurance constitue dans certains Etats membres un obstacle invisible mais réel au libre établissement des avocats en Europe, en particulier à l'installation des avocats français au Royaume-Uni . Refusant d'appliquer le système d'équivalence communautaire et donc de prendre en compte les assurances déjà souscrites dans le pays membre d'origine, les autorités britanniques compétentes, en particulier la Law society 36 ( * ) , imposent aux avocats communautaires migrants la souscription de polices d'assurance britanniques d'un montant très élevé en raison du périmètre d'activité très large des solicitors (qui peuvent exercer les activités de notaire et d'agent immobilier).

Aujourd'hui, compte tenu de l'attitude protectionniste de ces autorités qui se fondent sur une interprétation restrictive de la directive , il est presque impossible en pratique pour un avocat français de s'établir au Royaume-Uni.

Telle est la raison pour laquelle votre commission des Lois souhaite attirer l'attention du ministère de la justice afin qu'il puisse saisir les instances communautaires de ce problème concret . Il paraît nécessaire d'harmoniser les règles en la matière en vue de favoriser l'effectivité du dispositif d'équivalence et de définir un socle de règles minimales en concertation avec les compagnies d'assurance européennes concernées.

Enfin, votre commission des Lois s'est interrogée sur l'approche a minima retenue par le projet de loi s'agissant des structures d'exercice en groupe .

Le texte de transposition se borne à mettre en oeuvre la directive dans le cadre actuel de la réglementation française, sans aborder le chantier plus ambitieux de la nécessaire réforme des règles relatives à l'exercice en commun de la profession d'avocat aujourd'hui largement considérées comme inadaptées . Un représentant du Conseil des barreaux de l'Union européenne entendu par votre rapporteur a d'ailleurs qualifié cette réforme d' « occasion manquée ».

Comme l'a précédemment relevé la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice en juillet dernier 37 ( * ) , les rigidités statutaires caractérisant les sociétés d'avocats, la complexité de la législation en la matière et les contraintes fiscales imposées à ces structures d'exercice constituent autant d'obstacles à la modernisation de la profession.

Sur les quelque 39 500 avocats inscrits à un barreau français, 20 % environ constituent le barreau d'affaires 38 ( * ) . S'ils représentent une minorité, leur poids économique est primordial puisqu'ils réalisent un chiffre d'affaires important et emploient un nombre élevé de collaborateurs. Or, atomisés dans des structures étroites allant de l'exercice à titre individuel au cabinet de taille moyenne, ces derniers sont défavorisés par rapport à la concurrence des grands réseaux internationaux de conseil aux entreprises fédérant l'audit comptable, le conseil juridique et le conseil en organisation, management 39 ( * ) et les grands cabinets anglo-saxons, capables de rayonner dans le monde entier grâce à des structures d'exercice ayant déjà atteint une taille critique et dotées d'un statut plus souple que les sociétés d'avocats françaises.

Votre rapporteur tient à souligner la nécessité de dépasser la vision traditionnelle de ce métier , le plus souvent limitée à la pratique judiciaire (en matière pénale ou familiale notamment). Plutôt que de résister à l'idée selon laquelle cette profession comporte une dimension économique, il convient de lui assurer les conditions de son développement.

A cet égard la question de l'exercice en commun entre plusieurs professions juridiques (« interprofessionnalité ») mérite d'être définitivement tranchée en vue de définir des règles claires, adaptées et consenties par les professionnels concernés. De tels regroupements pourraient en effet utilement favoriser des synergies entre des spécialistes issus d'horizons variés, une mutualisation des compétences et la mise en commun des savoirs.

En permettant la constitution de sociétés entre avocats communautaires et avocats exerçant sous un titre français, le projet de loi propose une avancée modeste .

Cette solution présente cependant l'avantage de ne pas différer plus longtemps l'adoption des mesures de transposition de la directive . La démarche pragmatique du projet de loi mérite donc d'être approuvée.

c) Proposer des améliorations au présent projet de loi

Outre quelques amendements de clarification, tendant à supprimer des mentions inutiles ou à corriger des erreurs, votre commission des Lois propose plusieurs améliorations au projet de loi :

- inscrire les règles de transposition de la directive 98/5 prévues par le projet de loi (articles premier à 11) dans la loi n° 71-1170 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ;

- compléter le dispositif prévu à l'article 3 du projet de loi relatif à l'effet automatique d'une interdiction définitive ou temporaire d'exercer prononcée par l'autorité compétente de l'Etat d'origine sur le droit d'exercer en France, en vue de confier au conseil de l'ordre le soin de prendre cette décision ;

- assouplir les conditions permettant aux avocats ayant exercé sous un titre d'origine à l'issue de trois années d'activité effective en France d'obtenir le titre d'avocat français en vue d'assurer une transposition fidèle de l'esprit de la directive (article 8). Tout en admettant qu'une expérience en droit communautaire puisse être prise en compte, votre commission n'a pas souhaité écarter du bénéfice des dispositions de la directive des avocats communautaires ayant pratiqué des activités dans le seul droit français. Il convient donc de supprimer toute référence à une activité dans « le droit communautaire » posée comme une condition obligatoire par le projet de loi initial, étant entendu que cette branche du droit doit être considérée comme une partie intégrante de notre droit national.

* 1 « Quels métiers pour quelle justice ? » - Rapport n° 345 (Sénat, 2001-2002) de M. Christian Cointat au nom de la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice présidée par M. Jean-Jacques Hyest.

* 2 Une ordonnance de Philippe de Valois de 1327 a institué le premier tableau des avocats.

* 3 « Quels métiers pour quelle justice ? » - Rapport n° 345 (Sénat, 2001-2002) précité - Elle a notamment mis en exergue son rôle prépondérant dans la mise en place de la justice de proximité - pp. 191 à 194.

* 4 La loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, entrée en vigueur le 16 septembre 1972, a fusionné les anciennes professions d'avocat, d'avoué de première instance et d'agréé près le tribunal de commerce. Cette loi a été profondément modifiée par la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 précitée qui a poursuivi cette évolution en opérant la grande fusion de la profession d'avocat et de celle de conseil.

* 5 Le titre II du projet de loi propose une réforme en profondeur de la formation initiale des élèves avocats et notamment la suppression de l'obligation d'accomplir un stage de deux ans.

* 6 Les avocats communautaires ayant obtenu leur titre professionnel dans un Etat n'appartenant pas à la Communauté européenne ou à l'Espace économique européen n'entrent pas dans le champ du droit communautaire. Ils relèvent d'un régime différent (ils peuvent être dispensés du CAPA, sous réserve d'avoir réussi un contrôle de connaissances en droit français).

* 7 Directive tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats.

* 8 Article de Mes Jean-René Farthouat, ancien bâtonnier du barreau de Paris et ancien président du Conseil national des barreaux et Frédéric Puel, ancien directeur de la Délégation des Barreaux de France, paru dans la Gazette du palais des 5 et 6 janvier 1996 - pp. 12 et suivantes.

* 9 En Allemagne, comme en France, selon des modalités différentes, l'avocat est soumis à la règle de l'exclusivité territoriale. En France, par exemple,  il est autorisé à accomplir les actes ordinaires de la procédure au nom d'un plaideur (c'est-à-dire à « postuler ») seulement devant le tribunal de grande instance près lequel leur barreau est institué.

* 10 La Cour de justice des Communautés européennes a précisé que l'exception prévue à l'article 55 du traité CE excluant du bénéfice du libre exercice professionnel « les activités participant (...), même à titre occasionnel, à l'exercice de l'autorité publique », n'avait pas vocation à s'appliquer aux avocats dont les activités ne donnaient pas lieu à l' « appréciation de l'autorité judiciaire et [au] libre exercice du pouvoir juridictionnel ».

* 11 Notamment les professionnels de santé : les médecins en 1975, les infirmiers en 1977, les dentistes en 1978-1979, les pharmaciens en 1985.

* 12 Relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans au sein de la Communauté européenne.

* 13 Il s'agit principalement de ressortissants allemands, belges, espagnols, britanniques et italiens.

* 14 Rapport au Parlement européen et au Conseil sur l'état d'application du système général de reconnaissance des diplômes de l'enseignement supérieur (établi en application de l'article 13 de la directive) - COM (96) 46 final - p. 32.

* 15 Dont 128 avocats britanniques, 122 avocats allemands, 67 avocats belges, 47 avocats italiens et 27 avocats espagnols.

* 16 Comme l'indique le cinquième considérant de la directive.

* 17 Leur existence a été entérinée en avril 1996 par le Conseil de l'Union européenne.

* 18 Instituée provisoirement en mars 2001, et devenue définitive en février 2002, cette unité a vocation à coordonner l'action des autorités judiciaires dans certains domaines (criminalité organisée, terrorisme, blanchiment ou produits du crime).

* 19 Voir Rapport de Mme Nicole Fontaine, rapporteur de la commission juridique et des droits des citoyens du Parlement européen - déposé le 30 avril 1996 - COM (94) 0572.

* 20 Articles 14 et 16 de la directive.

* 21 Un arrêt de la cour d'appel de Toulouse du 14 juin 2001 (conseil de l'ordre des avocats de Toulouse) et un autre arrêt de la cour d'appel de Metz du 26 septembre 2001 (conseil de l'ordre des avocats au barreau de Sarreguemines).

* 22 Journal Officiel du 20 février 2003 - Questions écrites - Sénat - Question de M. René Trégouêt - p. 637.

* 23 Par exemple, l'exercice en groupe est interdit pour certaines catégories de professions telles que les « barristers » irlandais ou encore les « advocates » écossais.

* 24 Rapport n° 30 (Sénat, 2000-2001) de M. Daniel Hoeffel - pp. 9 à 16.

* 25 Communication en Conseil des ministres du 6 novembre 2002 sur la transposition des directives communautaires en droit français.

* 26 Journal Officiel du 3 février 2003 - Questions écrites - Assemblée nationale -- Réponses à deux questions déposées respectivement par M. Armand Jung et Mme Marcelle Ramone - pp. 702 et 703.

* 27 Vingt-quatre titres professionnels seraient concernés.

* 28 Article 27 de cette loi.

* 29 Relative à l'exercice sous forme de sociétés de professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé par la loi et aux sociétés de participations financières de professions libérales.

* 30 Ce qui signifie que l'objet de la société se limite à l'exercice en commun de la seule profession d'avocat, contrairement au caractère interprofessionnel de certaines sociétés étrangères qui admettent que l'objet de la société s'étende à l'exercice en commun de plusieurs professions libérales (réglementées ou non).

* 31 Toujours à l'article 5 du projet de loi.

* 32 Entre 2001 et 2002, ce nombre a progressé de près de 5 %.

* 33 Rapport du Conseil d'Etat sur l'influence internationale du droit français de M. Olivier Dutheillet de Lamothe et Mme Marie-Aimée Latournerie - juin 2001 - p. 77.

* 34 Conformément à l'article 88-4 de la Constitution, le Gouvernement a transmis au Parlement une proposition d'acte communautaire résultant de la proposition de directive visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans un Etat membre autre que celui où la qualification a été acquise (E-405), distribuée le 26 avril en 1995. Voir rapport n° 420 (Sénat, 1995-1996) de M. Lucien Lanier.

* 35 En l'absence de réglementation professionnelle précise, la jurisprudence a permis à certains juristes d'entreprise d'accéder à la profession en leur accordant d'être dispensés de la formation initiale et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, mais des réticences subsistent au sein de la profession.

* 36 Qui est l'autorité compétente à l'égard des solicitors britanniques.

* 37 Rapport n° 345 (Sénat, 2001-2002) précité. pp. 116 et 117.

* 38 On peut citer parmi les trente premiers cabinets d'avocats d'affaires franco-français (en 2002) , les cabinets : Fidal, bureau Francis lefebvre, Gide Loyrette Nouel, Jeantet et Associés.

* 39 Il s'agit des « big four » : Deloitte et Touche, Ernst &Young, KPMG et PricewaterhouseCoopers.

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