Rapport n° 441 (2002-2003) de M. François ZOCCHETTO , fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 septembre 2003

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N° 441

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2002-2003

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 24 juillet 2003

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 septembre 2003

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ,

Par M. François ZOCCHETTO,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. René Garrec, président ; M. Patrice Gélard, Mme Michèle André, MM. Pierre Fauchon, José Balarello, Robert Bret, Georges Othily, vice-présidents ; MM. Jean-Pierre Schosteck, Laurent Béteille, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Mme Nicole Borvo, MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Christian Cointat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Marcel Debarge, Michel Dreyfus-Schmidt, Gaston Flosse, Jean-Claude Frécon, Bernard Frimat, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Daniel Hoeffel, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Jacques Larché, Jean-René Lecerf, Gérard Longuet, Mme Josiane Mathon, MM. Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Josselin de Rohan, Bernard Saugey, Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich, Jean-Paul Virapoullé, François Zocchetto.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 784 , 856, 864 et T.A. 140

Sénat : 314 (2002-2003)

Droit pénal.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 24 septembre 2003, sous la présidence de M. René Garrec, président, puis de M. Patrice Gélard, vice-président, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. François Zocchetto, le projet de loi n°314 (2002-2003) adopté par l'Assemblée nationale portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité .

Le rapporteur a salué la création d'un cadre spécifique pour lutter contre la criminalité organisée, soulignant que cette criminalité complexe et transnationale ne pouvait être combattue de la même manière que les autres formes de criminalité et de délinquance.

La commission a adopté 236 amendements.

Elle a en particulier souhaité, sans attendre le dépôt d'un nouveau projet de loi, améliorer la législation relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles :

- en allongeant la durée de la mesure de suivi socio-judiciaire , qui pourrait désormais être illimitée à l'égard de condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité ;

- en créant un fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles géré par le casier judiciaire. Ce fichier accueillerait les condamnations pour des infractions sexuelles et mentionnerait l'adresse des condamnés ou leur dernière adresse connue ;

- enfin, en permettant un prélèvement forcé d'empreinte génétique sur les condamnés pour crimes .

En matière de criminalité organisée, la commission a adopté des amendements tendant à :

- rétablir l'interdiction, supprimée par l'Assemblée nationale, de condamner une personne sur le seul fondement de déclarations d'officiers de police judiciaire infiltrés sans révéler leur identité. La possibilité de condamner une personne sur le seul fondement de déclarations anonymes paraît en contradiction avec la Convention européenne des droits de l'Homme ;

- compléter les dispositions relatives aux « repentis » pour prévoir la création d'une commission spécialisée chargée de définir les mesures de protection et de réinsertion accordées aux « repentis ».

- simplifier les dispositions relatives à la garde à vue et rétablir la possibilité pour l'avocat d'intervenir après trente-six heures de garde à vue en ce qui concerne certaines infractions pour lesquelles l'Assemblée nationale avait repoussé cette première intervention après soixante-douze heures de garde à vue.

La commission a adopté plusieurs amendements renforçant l'autorité du procureur de la République sur la police judiciaire. Elle a notamment prévu :

- que le procureur de la République continuerait à être averti des placements en garde à vue « dès le début » de la mesure et non « dans les meilleurs délais » ;

- que la durée de l'enquête de flagrance ne pourrait être portée de huit à quinze jours que sur autorisation du procureur et non systématiquement.

La commission a décidé de modifier le dispositif relatif à la rémunération des indicateurs adopté par l'Assemblée nationale, qui prévoyait une répartition de 60 % des amendes par arrêté des ministres de l'économie, de la justice et de l'intérieur. Elle a décidé de consacrer dans la loi la possibilité de rémunérer les indicateurs tout en considérant que les modalités de cette rémunération relevaient de la loi de finances.

Dans un souci d'équilibre de la procédure pénale, la commission a décidé :

- de maintenir à six mois (contre quatre dans le projet de loi) le délai accordé aux parties pour invoquer les moyens pris de la nullité des actes d'instruction ;

- d'écarter la possibilité de faire remplacer le juge des libertés et de la détention par un magistrat moins expérimenté.

Afin de conforter les droits de la victime, la commission propose :

- d'obliger les procureurs de la République à aviser les victimes en cas de classement sans suite, que l'auteur des faits soit identifié ou non, et à motiver la décision ;

- de permettre aux victimes de traite des êtres humains de demander indemnisation devant les commissions d'indemnisation des victimes d'infractions.

Enfin, la commission a approuvé la création d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité . Elle a adopté des amendements permettant de proposer une peine allant jusqu'à un an d'emprisonnement (contre six mois dans le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale) et prévoyant la publicité de l'ordonnance d'homologation.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

« Je vous prie et vous supplie, Sénateurs : ouvrez les oreilles, ne permettez pas au crime de se répandre comme une contagion, comme une rage qui touche aussi les sains ».

Salluste 1 ( * )

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est appelé à examiner le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Au premier abord, l'examen par le Parlement d'une réforme de la procédure pénale ne peut - à juste titre - que susciter l'inquiétude, sinon la lassitude. Les réformes succèdent en effet aux réformes à un rythme de plus en plus rapide.

Ce premier constat mérite pourtant d'être dépassé, afin de mesurer le caractère profondément novateur du présent projet de loi.

Il n'était que temps de définir un cadre spécifique pour lutter contre la criminalité et la délinquance organisées. Jusqu'à présent en effet, la France ne s'est dotée en cette matière que de règles parcellaires, souvent pour répondre à une actualité immédiate. Ainsi, en 2001, le législateur a prévu, en réaction aux attentats du 11 septembre survenus aux Etats-Unis, l'introduction dans notre droit de quelques mesures destinées à renforcer la lutte contre le terrorisme.

Or, la criminalité organisée présente avec les formes traditionnelles de criminalité une différence qui n'est pas seulement de degré mais surtout de nature. Complexe et transnationale, elle ne peut être combattue avec les instruments procéduraux issus du code d'instruction criminelle.

Le mérite du présent projet de loi est de proposer un cadre global pour lutter contre une forme de criminalité particulièrement difficile à appréhender, mais qui porte gravement atteinte au fonctionnement des sociétés démocratiques.

Les moyens d'enquête créés ou étendus par le projet de loi existent déjà depuis bien longtemps chez nos partenaires européens ou dans d'autres démocraties.

Ce projet de loi marque également une prise de conscience de la nécessité du renforcement de la coopération judiciaire européenne et internationale pour faire face à une criminalité de plus en plus souvent transnationale. L'insertion dans notre droit de dispositions nécessaires au fonctionnement d'Eurojust et à la mise en oeuvre des équipes communes d'enquête est particulièrement bienvenue.

*

Votre commission ne peut que se féliciter de voir un grand nombre de propositions formulées par le Sénat au cours des dernières années enfin mises en oeuvre. Dès l'adoption de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, notre ancien collègue, M. Charles Jolibois, rapporteur de ce texte, avait souhaité que le renforcement des droits de la défense soit accompagné d'un renforcement des moyens d'investigation.

Le présent projet de loi ne remet en cause aucune des dispositions de la loi sur la présomption d'innocence issues des travaux du Sénat, qu'il s'agisse de l'appel en matière criminelle, de la juridictionnalisation des libérations conditionnelles, ou de l'extension du statut du témoin assisté.

Il convient en outre de noter qu'après l'adoption du projet de loi, l'ensemble des propositions formulées par notre excellent collègue, M. Hubert Haenel, dans sa proposition de loi visant à adapter les dispositions de la loi sur la présomption d'innocence, aura été mis en oeuvre.

*

Votre commission a souhaité préparer de manière particulièrement approfondie l'examen du présent projet de loi par le Sénat, compte tenu de l'importance des évolutions qu'il tend à mettre en oeuvre. Votre rapporteur a donc entendu un grand nombre de personnalités. Accompagné de plusieurs de ses collègues, il s'est rendu dans quatre juridictions de tailles très différentes pour recueillir les réactions des acteurs de la procédure pénale ainsi qu'à Rome et à Washington, afin d'étudier les dispositifs relatifs aux « repentis » et les procédures de plaider coupable mis en oeuvre par l'Italie et les Etats-Unis.

La commission des Finances du Sénat s'est également saisie pour avis du présent projet de loi.

Après avoir évoqué successivement les dispositions du projet de loi relatives aux nouvelles formes de criminalité et à la modernisation de la procédure pénale, votre rapporteur présentera les améliorations proposées par votre commission des Lois.

I. LA MISE EN oeUVRE DE RÉPONSES SPÉCIFIQUES AUX NOUVELLES FORMES DE DÉLINQUANCE ET DE CRIMINALITÉ

Le projet de loi tend à apporter des réponses novatrices aux nouvelles formes de criminalité et de délinquance.

A. LA CRIMINALITÉ ET LA DÉLINQUANCE ORGANISÉES

Face à la criminalité organisée, notre législation est à la fois incomplète et peu cohérente . Pour la première fois, un projet de loi tend à appréhender la criminalité organisée en tant que telle sans se focaliser sur l'une ou l'autre de ses manifestations.

Ainsi, le texte, dans son article premier , vise à cerner le champ de la criminalité organisée, en distinguant deux catégories d'infractions (article 706-73 du nouveau code de procédure pénale) :

- les formes les plus graves de criminalité et de délinquance organisées, qui sont pour l'essentiel des atteintes à la personne, telles que l'assassinat en bande organisée, les tortures et actes de barbarie en bande organisée, les trafics de stupéfiants, les enlèvements et séquestrations, le proxénétisme ou la traite des êtres humains, les actes de terrorisme, enfin les associations de malfaiteurs en vue de commettre ces infractions (article 706-73 nouveau du code de procédure pénale) ; l'Assemblée nationale a complété cette liste pour mentionner également le blanchiment et le recel ainsi que l'aide à l'entrée et au séjour irréguliers d'un étranger commise en bande organisée ;

- les infractions aggravées par la circonstance de bande organisée ainsi que les formes classiques d'associations de malfaiteurs (article 706-74 nouveau du code de procédure pénale).

La circonstance aggravante de bande organisée serait corrélativement étendue à de nouvelles infractions pour lesquelles elle n'est pas prévue aujourd'hui : assassinat, actes de torture et de barbarie, corruption de mineurs, diffusion d'images pornographiques de mineurs, évasion, délits en matière de trafic d'armes.

Pour répondre à la criminalité organisée ainsi définie, le projet de loi tend à mettre en oeuvre de nouveaux moyens d'investigation . Tandis que certains de ces instruments seraient réservés aux formes les plus graves de criminalité organisée, les autres seraient applicables à l'ensemble des infractions qui viennent d'être énumérées. Parmi ces instruments figurent en particulier :

- l'infiltration (articles 706-81 à 706-87 nouveaux du code de procédure pénale) : cantonnée aujourd'hui au trafic de stupéfiants, l'infiltration de réseaux criminels par des officiers ou agents de police judiciaire -dans des conditions strictement encadrées- serait désormais possible pour les formes les plus graves de criminalité organisée. Alors que le projet de loi initial prévoyait qu'aucune condamnation ne pouvait être prononcée sur le seul fondement de déclarations d'agents infiltrés conservant leur anonymat, l'Assemblée nationale a supprimé cette disposition ;

- un régime spécifique de garde à vue (article 706-88 nouveau du code de procédure pénale) : des prolongations de garde à vue, au delà des quarante-huit heures prévues par le droit commun, seraient désormais possibles en matière de criminalité organisée, la durée de la garde à vue pouvant alors atteindre quatre-vingt seize heures comme le prévoit déjà le droit en vigueur en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants. Dans un tel cas, la personne concernée pourrait en principe s'entretenir avec un avocat toutes les vingt-quatre heures. L'Assemblée nationale a cependant proposé de repousser à la soixante-douzième heure de garde à vue - comme en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants - la première intervention de l'avocat dans certaines matières où cette intervention est aujourd'hui prévue à la trente-sixième heure ;

- un régime spécifique de perquisitions (articles 706-89 à 706-95 nouveaux du code de procédure pénale), afin de faciliter les perquisitions de nuit et les perquisitions en enquête préliminaire pour les formes les plus graves de criminalité organisée ;

- la possibilité pour le juge des libertés et de la détention d'autoriser, pour des durées très courtes, des interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications au cours de l'enquête de flagrance ou de l'enquête préliminaire (article 706-96 nouveau du code de procédure pénale) ;

- l'installation de micros et de caméras dans certains véhicules ou locaux d'habitation , qui ne figurait pas dans le projet de loi initial mais y a été insérée par l'Assemblée nationale (articles 706-97 à 706-97-2 nouveaux du code de procédure pénale) ;

- l'extension à de nouvelles infractions des dispositions relatives aux « repentis » qui permettent à des personnes ayant commis ou tenté de commettre des infractions de bénéficier de réductions ou d'exemptions de peine si elles apportent leur concours à la justice ( article 3 ). Déjà prévu en matière de trafic de stupéfiants, d'actes de terrorisme, d'association de malfaiteurs et de fausse monnaie, ce dispositif s'appliquerait désormais également aux infractions d'empoisonnement, d'assassinat, de torture et acte de barbarie, de séquestration et enlèvement, de détournement d'avion, de traite des êtres humains, de proxénétisme, de vol en bande organisée, d'extorsion en bande organisée et de trafic d'armes.

L'Assemblée nationale a complété ces dispositions pour prévoir dans la loi, par affectation d'une partie des recettes tirées du produit des amendes et des confiscations prononcées par les juridictions pénales, la possibilité de rémunérer les indicateurs .

Le projet de loi prévoit enfin la création de juridictions interrégionales spécialisées en matière de criminalité et de délinquance organisées, devant bénéficier d'une compétence concurrente de celle des juridictions de droit commun (articles 706-75 à 706-79 nouveaux du code de procédure pénale).

B. L'ENTRAIDE JUDICIAIRE

L' article 6 du projet de loi a pour objet de réécrire entièrement le titre X du livre IV du code de procédure pénale, relatif à l' entraide judiciaire internationale , afin de :

- clarifier et simplifier les conditions de transmission et d'exécution des commissions rogatoires internationales (articles 694 à 694-9 du code de procédure pénale) ;

- introduire dans le code de procédure pénale les dispositions nécessaires à la mise en oeuvre de la convention du 29 mai 2000 relative à l' entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne (articles 695 à 695-3 du code de procédure pénale). Cette convention consacre le principe de transmission directe des demandes d'entraide entre les autorités judiciaires de l'espace européen, prévoit la possibilité de recourir à des moyens de télécommunications pour procéder à des auditions de témoins. Elle autorise la création d' équipes communes d'enquête réunissant des agents des services de police de plusieurs Etats membres de l'Union européenne ;

- consacrer dans le code de procédure pénale l'existence d' Eurojust , organe de coopération destiné à coordonner l'action des autorités des Etats membres de l'Union européenne chargées des enquêtes ou de l'engagement des poursuites, et définir les attributions du représentant français auprès d'Eurojust (articles 695-3 à 695-7 du code de procédure pénale).

C. LES INFRACTIONS EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE, DE SANTÉ PUBLIQUE ET DE POLLUTION MARITIME

Le projet de loi tend à améliorer les procédures prévues pour la poursuite et le jugement des infractions économiques et financières, de santé publique et de pollution maritime :

- la compétence des juridictions spécialisées par cour d'appel en matière économique et financière serait étendue à de nouvelles infractions. Des juridictions interrégionales seraient en outre créées pour connaître des infractions économiques d'une très grande complexité. Enfin, le statut des assistants spécialisés , chargés d'assister les magistrats au sein des juridictions spécialisées, serait précisé et leurs compétences étendues ( article 7 ) ;

- le fonctionnement des juridictions spécialisées en matière de santé publique serait aligné sur celui des juridictions spécialisées en matière économique et financière ( article 8 ) ;

- la compétence des juridictions spécialisées en matière de pollution maritime serait étendue à de nouvelles infractions. L'Assemblée nationale a en outre prévu une compétence du tribunal de grande instance de Paris pour certains accidents maritimes ainsi que pour les affaires d'une grande complexité. Le projet de loi prévoit enfin une aggravation des peines encourues par les personnes morales et les personnes physiques en cas de rejets polluants des navires ( articles 9 et 10 ).

D. LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS

Le projet de loi tend à procéder à des évolutions importantes pour faciliter la lutte contre les discriminations.

Il prévoit ainsi :

- une extension à de nouvelles infractions (menaces, vols, extorsions) de la circonstance aggravante de racisme , qui permet d'aggraver les peines encourues pour des infractions de droit commun lorsqu'elles présentent un caractère raciste, antisémite ou xénophobe ( articles 12 et 13 ) ;

- une aggravation des peines encourues pour les délits de discriminations et l'institution d'une circonstance aggravante lorsque la discrimination est commise à l'occasion de l'exploitation d'un lieu accueillant du public ( article 14 ) ;

- l'allongement de trois mois à un an du délai de prescription prévu par la loi de 1881 sur la liberté de la presse pour les délits de provocation à la haine, à la discrimination et à la violence raciale, de diffamation et d'injures raciales, enfin de négationnisme ( article 16 ).

II. LA MODERNISATION DE LA PROCÉDURE PÉNALE

Outre l'introduction de procédures spécifiques pour répondre aux nouvelles formes de criminalité, le projet de loi contient de nombreuses dispositions destinées à moderniser la procédure pénale.

A. LA COMPARUTION SUR RECONNAISSANCE PRÉALABLE DE CULPABILITÉ

L' article 61 tend à introduire dans le code de procédure pénale une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité permettant au procureur de la République de proposer une peine à une personne qui reconnaît les faits qui lui sont reprochés (articles 495-7 et 495-8 nouveaux du code de procédure pénale). En cas d'acceptation, aucun procès n'aurait lieu devant le tribunal correctionnel, mais la peine devrait faire l'objet d'une homologation par le président du tribunal (article 495-9 nouveau du code de procédure pénale).

Cette nouvelle procédure serait réservée aux délits punis d'un maximum de cinq ans d'emprisonnement . Le procureur de la République pourrait proposer à la personne une peine d'emprisonnement d'une durée n'excédant pas six mois et une peine d'amende n'excédant pas la moitié de l'amende encourue.

La mise en place de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité est entourée de plusieurs garanties :

- la personne concernée devrait donner son accord en présence de son avocat ;

- elle pourrait demander à bénéficier d'un délai de réflexion de dix jours, au cours duquel elle pourrait être placée sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire si ces mesures s'avèrent nécessaires (article 495-10 nouveau du code de procédure pénale) ;

- le procureur et la personne poursuivie pourraient faire appel de l'ordonnance d'homologation (article 495-11 nouveau du code de procédure pénale) ;

- en cas de refus par l'intéressé de la proposition du procureur ou de non homologation de la peine, les parties ne pourraient pas faire état de cette procédure devant la juridiction de jugement (article 495-14 nouveau du code de procédure pénale) ;

- les victimes seraient invitées à comparaître en même temps que l'auteur des faits lors de l'homologation par le président du tribunal, afin de pouvoir se constituer partie civile et demander réparation du préjudice subi. Si elles ne pouvaient exercer ce droit, elles pourraient bénéficier d'un procès sur les intérêts civils (article 495-13 nouveau du code de procédure pénale).

B. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACTION PUBLIQUE ET AUX ALTERNATIVES AUX POURSUITES

Le projet de loi prévoit plusieurs évolutions importantes des dispositions du code de procédure pénale relatives à l'action publique et aux mesures alternatives aux poursuites :

- les articles 17 à 19 tendent à définir plus clairement les relations entre le ministre de la justice, les procureurs généraux et les procureurs de la République. L'article 17 définit pour la première fois le rôle du garde des Sceaux en matière d'action publique en prévoyant qu'il veille à la cohérence de l'application de la loi pénale sur l'ensemble du territoire de la République ;

- l' article 21 a pour objet de préciser les conditions de mise en oeuvre du principe d'opportunité des poursuites par les procureurs de la République. Il prévoit l'obligation pour le procureur de la République d'aviser les victimes des poursuites ou des mesures alternatives aux poursuites engagées à la suite de leur plainte. Elles devraient également être avisées des classements sans suite en cas d'identification de l'auteur des faits ;

- l' article 23 tend à étendre le champ d'application de la procédure de composition pénale à l'ensemble des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée ne dépassant pas cinq ans et à diversifier les mesures pouvant être proposées par le procureur de la République dans le cadre de cette procédure.

C. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX ENQUÊTES

Le projet de loi contient de nombreuses dispositions destinées à renforcer l'efficacité des enquêtes. Il prévoit ainsi notamment :

- l'extension de huit à quinze jours de la durée des enquêtes de flagrance en matière de criminalité organisée ( article 26 ). L'Assemblée nationale a décidé de généraliser cette mesure à l'ensemble des crimes et délits pour lesquels les règles de l'enquête de flagrance sont applicables ;

- la mise en place d'un cadre général en matière de réquisitions judiciaires pour permettre aux officiers de police judiciaire de solliciter la remise de documents intéressant une enquête ( article 27 ) ;

- la création d'un mandat de recherche , destiné à se substituer au mandat d'amener du procureur de la République, et permettant le placement en garde à vue de la personne recherchée ( article 31 ).

D. LES DISPOSITIONS RELATIVES À L'INSTRUCTION

De très nombreuses mesures tendent à améliorer et à simplifier les règles de l'instruction.

Plusieurs dispositions concernent les victimes :

- la partie civile pourrait être assimilée aux témoins pour le paiement des indemnités ( article 33 ) ;

- l'intérêt des victimes devrait être pris en considération lors des décisions de remise en liberté des personnes placées en détention provisoire, en particulier en interdisant à ces personnes de rencontrer la victime ( article 34 ) ;

- l'obligation d'aviser tous les six mois la partie civile de l'état d'avancement de l'information serait limitée aux infractions les plus graves ( article 32 ).

Un grand nombre de dispositions sont destinées à simplifier les procédures :

- les articles 38 à 41 tendent à réécrire l'ensemble des règles relatives aux mandats pour en améliorer la cohérence.

Ils prévoient la possibilité de retenir vingt-quatre heures une personne arrêtée sur mandat d'amener ou mandat d'arrêt avant sa présentation devant un magistrat pour mettre fin à la procédure actuelle d'incarcération en maison d'arrêt ;

- l' article 42 tend notamment à permettre au juge d'instruction de se transporter pour diriger et contrôler l'exécution d'une commission rogatoire sans être assisté de son greffier ni devoir en dresser procès-verbal dès lors qu'il ne procède pas lui-même à des actes d'instruction ;

- l' article 53 vise à permettre le remplacement, en cas d'empêchement, du juge des libertés et de la détention (qui doit nécessairement avoir rang de vice-président) par un magistrat du siège désigné par le président du tribunal de grande instance ;

- l' article 54 a pour objet de réduire de six à quatre mois le délai accordé aux parties pour invoquer des moyens tirés de la nullité des actes accomplis au cours de la procédure.

E. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU JUGEMENT

Un chapitre du projet de loi est consacré au jugement des crimes et des délits.

Les articles 58 et 66 visent à modifier entièrement les règles relatives aux jugements prononcés en l'absence de la personne poursuivie . Dans le droit actuel, l'absence non justifiée d'un prévenu ou d'un accusé est sanctionnée par l'impossibilité pour son avocat d'intervenir devant la juridiction. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé à plusieurs reprises que cette règle était contraire aux stipulations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le projet de loi tend donc à prévoir l'obligation pour la juridiction de jugement d'entendre un avocat qui se présente pour représenter un prévenu ou un accusé absent.

Il prévoit en outre des évolutions plus profondes, puisqu'il tend à interdire le prononcé par défaut de peines d'emprisonnement. En matière criminelle, la procédure de contumace serait supprimée.

A titre exceptionnel, un tribunal correctionnel ou une cour d'assises pourraient prononcer des peines d'emprisonnement ou de réclusion si le procureur demandait au bâtonnier de l'ordre des avocats de désigner un membre du barreau pour défendre un accusé ou un prévenu absent et qui n'a pas lui-même désigné un avocat pour le représenter.

L'Assemblée nationale a apporté d'autres modifications aux dispositions du code de procédure pénale relatives aux jugements :

- elle a prévu la possibilité de juger par ordonnance pénale , c'est-à-dire sans audience, les personnes poursuivies pour des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée maximale de cinq ans ( article 60 ) ;

- elle a étendu le champ d'application de la procédure du juge unique ( articles 57 bis et 57 ter ) ;

- elle a prévu la possibilité pour la cour d'appel de statuer à juge unique en matière d'appel des contraventions de police ( article 62 ter ).

F. UN BOULEVERSEMENT DES RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DES PEINES

Le projet de loi initial, dans ses articles 69 à 73 , contenait quelques dispositions importantes en matière d'exécution des peines, prévoyant en particulier un renforcement des droits des victimes en cas de libération anticipée d'un condamné ( article 68 ), une simplification des règles relatives au recouvrement des amendes ( article 72 ), enfin le remplacement de la procédure de contrainte par corps par une procédure de contrainte judiciaire ( article 73 ).

L'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur M. Jean-Luc Warsmann 2 ( * ) , a considérablement enrichi cette partie du projet de loi, proposant des modifications fondamentales des règles relatives à l'application des peines.

Elle a ainsi prévu :

- de définir dans le code de procédure pénale les principes généraux de l'application des peines ( article 68 bis ) ;

- de permettre au juge de l'application des peines de révoquer un sursis avec mise à l'épreuve ou un sursis avec l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, de transformer une peine de travail d'intérêt général en peine de jours-amende ou en peine d'amende et de prononcer lui-même une dispense de peine ;

- d'insérer dans la loi et de renforcer substantiellement les dispositions permettant l' aménagement des courtes peines d'emprisonnement ( article 68 septdecies ) ;

- de transformer le système des réductions de peine en un crédit de réductions de peine , qui serait attribué dès l'entrée en prison et pourrait être remis en cause en cas de mauvais comportement du condamné ( article 69 quater ).

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : CONFORTER ET COMPLÉTER LE PROJET DE LOI

Le présent projet de loi mérite d'être approuvé. Les réponses qu'il apporte aux formes modernes de criminalité sont profondément novatrices et devraient permettre à notre législation de se rapprocher de celles de la plupart de nos partenaires européens. Votre commission vous propose cependant un grand nombre d'amendements destinés à compléter et à parfaire le projet de loi.

A. COMPLÉTER LE PROJET DE LOI

1. Améliorer la prévention et la répression des infractions sexuelles

Au cours des derniers mois, plusieurs affaires ont montré que notre législation en matière de prévention et de répression des infractions sexuelles demeurait insuffisante. Cinq ans après l'adoption de la loi relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles, qui a créé la mesure de suivi socio-judiciaire, des modifications méritent d'être apportées au cadre législatif en vigueur.

Le présent projet de loi, qui porte « adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité », est un cadre particulièrement approprié pour accueillir ces modifications et il n'apparaît donc pas souhaitable d'attendre le dépôt d'un nouveau projet de loi sur cette question.

Votre commission des lois propose donc :

- d'augmenter les durées pendant lesquelles le suivi socio-judiciaire peut être imposé à un condamné . Actuellement, la durée du suivi socio-judiciaire ne peut dépasser dix ans en matière délictuelle et vingt ans en matière criminelle. Ces durées peuvent être trop courtes dans certains cas. Il paraît raisonnable de prévoir une durée de trente ans pour les personnes condamnées à trente ans de réclusion criminelle et la possibilité de ne pas mettre de limite à la durée du suivi socio-judiciaire pour les personnes condamnées à la réclusion criminelle à perpétuité ;

- de créer un fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles . Plutôt que de créer un nouveau fichier entièrement autonome, ce nouvel instrument pourrait être placé sous la responsabilité du casier judiciaire. Il accueillerait les condamnations pour infractions sexuelles et mentionnerait l'adresse des condamnés ou leur dernière adresse connue. L'accès à ce fichier serait strictement réservé aux magistrats, aux officiers de police judiciaire pour les enquêtes concernant des infractions sexuelles et aux préfets pour certaines demandes d'agrément. Un décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) devrait préciser les conditions de fonctionnement de ce fichier ;

- de rendre plus efficaces les règles relatives aux prélèvements d'empreintes génétiques en autorisant les prélèvements sans le consentement de l'intéressé lorsqu'il s'agit d'une personne définitivement condamnée pour un crime sexuel, en permettant l'identification d'une empreinte à partir de matériel biologique qui s'est naturellement détaché du corps de la personne concernée.

2. Renforcer la coopération judiciaire européenne

Afin d'accélérer la mise en oeuvre par notre pays des instruments communautaires auxquels il a souscrit, votre commission vous propose de compléter les dispositions du projet de loi relatives à l'entraide judiciaire pour introduire dans notre droit les dispositions de la convention adoptée en 1995 dans le cadre de l'Union européenne et créant une procédure d'extradition simplifiée ( article 6 ).

Dans un souci de clarté et d'accessibilité des textes législatifs, elle vous propose également d'insérer la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition au sein des dispositions du code de procédure pénale sur l'entraide judiciaire internationale ( article 6 ).

Pour faciliter l'action d' Eurojust , votre commission a adopté plusieurs amendements renforçant les prérogatives du représentant français auprès de cet organe de coopération judiciaire ( article 6 ).

Elle rappelle par ailleurs que la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne relative au mandat d'arrêt européen doit être introduite dans notre droit avant le 31 décembre 2003.

3. Inscrire la notion de politique d'action publique dans le code de procédure pénale

Le projet de loi contient des dispositions importantes en matière d'action publique, puisqu'il tente pour la première fois de définir le rôle du garde des Sceaux , en prévoyant que celui-ci veille à la cohérence de l'application de la loi pénale sur l'ensemble du territoire de la République.

Votre commission vous propose de compléter ces dispositions pour prévoir, conformément à l'article 20 de la Constitution, que le ministre de la justice conduit la politique d'action publique déterminée par le Gouvernement.

Comme l'indiquait la commission de réflexion sur la justice en 1997, la politique d'action publique « pratiquement absente des codes, a pour objet d'inscrire le traitement individuel des contentieux (opportunité des poursuites) dans un cadre d'ensemble visant à une application cohérente de la loi, en fixant des priorités compte tenu des circonstances et en veillant au respect de l'égalité entre les citoyens ».

Votre commission propose également d'inscrire dans un même article du code de procédure pénale les moyens dont dispose le garde des Sceaux dans la conduite de l'action publique :

- instructions générales d'action publique ;

- instructions écrites et versées au dossier d'engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions qu'il juge opportunes.

B. CONFORTER LE PROJET DE LOI

Approuvant l'économie du projet de loi, votre commission vous propose néanmoins de lui apporter de nombreuses modifications, le plus souvent destinées à en faciliter la mise en oeuvre.

1. Renforcer le rôle du procureur de la République dans la direction de la police judiciaire

L'article 12 du code de procédure pénale dispose que la police judiciaire est exercée sous la direction du procureur de la République. Par plusieurs amendements, votre commission vous propose de conforter cette mission essentielle du procureur.

Elle propose ainsi :

- que les officiers de police judiciaire puissent étendre leur compétence sur l'ensemble du territoire national sur autorisation du procureur de la République donnée par tout moyen, et non seulement après en avoir informé le procureur de la République par tout moyen ( article premier ) ;

- qu'en cas d'achèvement d'une opération d'infiltration, le magistrat ayant autorisé l'opération fixe un délai à l'officier de police judiciaire pour mettre fin à son activité sans compromettre sa sécurité ( article premier ) ;

- que la durée de l'enquête de flagrance ne soit portée de huit à quinze jours que sur autorisation du procureur de la République et non systématiquement ( article 26 ) ;

- que le procureur de la République continue à être prévenu « dès le début » d'une garde à vue et non « dans les meilleurs délais, sauf circonstances insurmontables », comme l'a prévu l'Assemblée nationale ( article 29 bis ).

2. Améliorer les dispositions relatives à la criminalité organisée

Votre commission a adopté plusieurs amendements destinés à améliorer les dispositions du projet de loi relatives à la criminalité organisée.

Elle propose ainsi :

- de rétablir l'interdiction supprimée par l'Assemblée nationale de condamner une personne sur le seul fondement des déclarations d'officiers ou d'agents de police judiciaire infiltrés, tout en prévoyant que cette interdiction n'est pas applicable lorsque l'officier ou l'agent de police judiciaire dépose sous sa véritable identité ( article premier ).

La possibilité de condamner une personne sur le seul fondement de déclarations anonymes -même lorsqu'il s'agit de déclarations d'officiers de police judiciaire- paraît en contradiction directe avec les stipulations de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- de compléter les dispositions relatives aux « repentis » pour prévoir la mise en place d'un véritable régime de protection pour les personnes acceptant de coopérer avec la justice ( article 3 ). Votre commission propose qu'une commission spécialisée soit chargée, sur réquisitions du procureur de la République, de définir les mesures de protection et de réinsertion accordées à chaque personne concernée et qu'elle puisse les remettre en cause en cas de non-respect des obligations fixées au « repenti ».

Votre commission a en effet constaté, lors des missions qu'elle a effectuées en Italie et aux Etats-Unis, que le régime des « repentis » n'avait aucune chance d'être mis en oeuvre sans l'organisation d'un programme de protection ambitieux géré par une structure spécialisée ;

- de clarifier et de simplifier les règles relatives à la garde à vue , afin de limiter le nombre de régimes de garde à vue et de ne retarder l'entretien de la personne gardée à vue avec son avocat à la soixante-douzième heure de garde à vue qu'en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants comme actuellement ;

- de simplifier les règles relatives aux perquisitions en permettant des perquisitions en enquête préliminaire sans l'accord de l'intéressé pour les infractions punies d'au moins cinq ans d'emprisonnement, sur autorisation motivée du juge des libertés et de la détention ;

- enfin, de modifier substantiellement le dispositif sur la rémunération des indicateurs adopté par l'Assemblée nationale ( article premier ). Ce dispositif, qui ne mentionne pas la rémunération des indicateurs, mais prévoit simplement que 60 % des recettes provenant des amendes et confiscations prononcées par les juridictions pénales seront désormais réparties par arrêté conjoint des ministres de l'économie, de l'intérieur et de la justice, présente plusieurs inconvénients : il constitue une nouvelle dérogation au principe de non-affectation des recettes aux dépenses, il ne s'appliquerait pas à la gendarmerie, dès lors que le ministre de la défense n'est pas mentionné parmi les signataires de l'arrêté, enfin il porterait sur des sommes considérables et probablement excessives si le seul objectif est la rémunération des indicateurs.

Dans ces conditions, votre commission vous propose plutôt de prévoir explicitement dans la loi la possibilité pour les services de police, de gendarmerie et des douanes de rémunérer les indicateurs .

3. Faciliter l'action de la victime

Votre commission des Lois a souhaité renforcer les dispositions du projet de loi relatives aux victimes :

- en prévoyant une obligation pour le procureur de la République d' aviser les victimes en cas de classement sans suite -que l'auteur de l'infraction soit ou non identifié- et de motiver la décision en distinguant les motifs juridiques et d'opportunité ( article 21 ) ;

- en permettant aux victimes, en cas de médiation pénale ou de composition pénale, de recourir à la procédure d' injonction de payer pour le recouvrement des dommages et intérêts dans les conditions prévues par le nouveau code de procédure civile ( article additionnel avant l'article 22 et article 23 ) ;

- en étendant les possibilités pour la victime d'être assimilée au témoin en ce qui concerne le paiement des indemnités ( article 33 ) ;

- en étendant à la traite des êtres humains la liste des infractions permettant aux victimes de demander indemnisation devant les commissions d'indemnisation des victimes d'infractions ( article additionnel après l'article 68 ).

En revanche, votre commission a décidé de disjoindre l' article 24 A du projet de loi, inséré par l'Assemblée nationale, qui tend à porter à vingt ou trente ans à partir de la majorité de la victime la durée de la prescription en matière d'infractions sexuelles.

Votre commission considère qu'il n'est pas souhaitable de multiplier les exceptions aux règles de droit commun en matière de prescription. Il est possible que les dispositions du code de procédure pénale relatives à la prescription ne soient plus adaptées à l'état de la société, compte tenu des progrès scientifiques, de l'allongement de l'espérance de vie, de l'évolution des mentalités... Elles doivent alors être revues de manière globale et non en multipliant les dérogations à la règle générale .

4. Veiller à l'équilibre de la procédure pénale

Attachée à l'équilibre de la procédure pénale, votre commission a décidé :

- de préciser les éléments constitutifs de la nouvelle infraction sanctionnant la divulgation d'informations intéressant l'enquête ou l'instruction à des personnes susceptibles d'être impliquées dans la commission d'une infraction, afin d'éviter qu'elle ne remette en cause l'exercice des droits de la défense ( article 4 ) ;

- de maintenir à six mois le délai accordé aux parties pour invoquer les moyens pris de la nullité des actes d'instruction ( article 54 ) ;

- d'exclure les avocats des règles relatives aux réquisitions judiciaires, considérant que les dispositions relatives aux perquisitions dans les cabinets d'avocat sont suffisantes pour permettre au juge d'obtenir des documents indispensables à l'enquête ou à l'instruction ;

- d'écarter la possibilité de faire remplacer le juge des libertés et de la détention par un magistrat moins expérimenté ( article 53 ). La gravité de la décision de placement en détention provisoire, l'extension des prérogatives du juge des libertés et de la détention par le présent projet de loi justifient pleinement que ce juge ait au moins rang de vice-président.

5. Parfaire les dispositions relatives aux jugements

Si l'obligation faite au tribunal correctionnel ou à la cour d'assises d'entendre un avocat qui se présenterait pour représenter un prévenu ou un accusé absent mérite d'être approuvée, l'interdiction pure et simple de prononcer une peine d'emprisonnement par défaut lorsqu'aucun avocat ne se présente est plus contestable, donnant le sentiment qu'il y aurait une « prime à l'absent ». Le système exceptionnel proposé pour permettre, dans certaines hypothèses, le prononcé de peines d'emprisonnement, conduirait à la désignation par le bâtonnier d'un avocat qui ignorerait tout de son « client » et devrait choisir seul une stratégie de défense. Un tel système ne préserve que l'apparence d'un procès équitable et votre commission a estimé préférable de conserver en matière correctionnelle le système du jugement par défaut, le condamné pouvant faire opposition au jugement en cas d'arrestation. Elle a également décidé de remplacer la procédure de contumace en matière criminelle par une procédure de défaut criminel ( articles 58 et 66 ) ;

En ce qui concerne la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ( article 61 ), la commission a décidé de permettre au procureur de proposer une peine pouvant aller jusqu'à un an d'emprisonnement (contre six mois dans le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale) et de prévoir que l'audience d'homologation serait publique.

6. Parachever la réforme de l'application des peines

Votre commission tient à saluer l'important travail effectué par l'Assemblée nationale pour moderniser les dispositions du code de procédure pénale relatives à l'application des peines. Les évolutions proposées prolongent la réforme entreprise dans la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes .

Tout en approuvant les évolutions proposées, votre commission vous soumet des amendements destinés à :

- réorganiser l'ensemble des dispositions du titre du code de procédure pénale consacré à l'exécution des sentences pénales pour en améliorer la lisibilité ( article additionnel avant l'article 68 ) ;

- modifier quelque peu l'organisation des juridictions de l'application des peines : actuellement, les demandes de libération conditionnelle formulées par les condamnés à de longues peines sont examinées par une juridiction régionale de l'application des peines puis, en appel, par une juridiction nationale de la libération conditionnelle. Ce système interdit le pourvoi en cassation. Votre commission propose qu'un tribunal de l'application des peines, composé de trois juges de l'application des peines, soit chargé de statuer sur les demandes de libération conditionnelle, l'appel étant porté devant une chambre de l'application des peines de la cour d'appel ;

- prévoir que les décisions relatives aux réductions de peine feront désormais l'objet d'une ordonnance motivée, mais non d'un débat contradictoire. Votre commission estime matériellement impossible que l'ensemble des décisions relatives aux réductions de peine donne lieu à un débat contradictoire devant le juge de l'application des peines ;

- modifier les règles relatives aux suspensions de peine pour les détenus atteints d'une pathologie mettant en jeu le pronostic vital, afin d'exclure la suspension de peine en cas de risque grave de renouvellement de l'infraction ( article additionnel après l'article 69 ter ) ;

- permettre à la juridiction compétente, en cas de libération conditionnelle, de suspension de peine ou de sursis avec mise à l'épreuve d'interdire à un condamné pour certaines infractions graves de diffuser tout ouvrage ou toute oeuvre audiovisuelle qui porterait, en tout ou en partie, sur l'infraction pour laquelle il a été condamné et de s'exprimer publiquement sur cette infraction ( article additionnel après l'article 68 octies ).

*

* *

Au bénéfice de l'ensemble de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter le projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES À LA LUTTE
CONTRE LES FORMES NOUVELLES DE DÉLINQUANCE
ET DE CRIMINALITÉ

CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS CONCERNANT LA LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE ET LA CRIMINALITÉ ORGANISÉES

La notion de criminalité organisée semble être apparue dans les années 1920 aux Etats-Unis en pleine période de prohibition de l'alcool.

La définition et l'appréhension de cette forme de criminalité sont particulièrement délicates. Au cours des dernières décennies, de nombreux instruments internationaux et européens ont été adoptés pour lutter contre la criminalité organisée. Le droit français demeure cependant particulièrement lacunaire.

1. Une criminalité difficile à définir et à appréhender

La convention des Nations-Unies contre la criminalité transnationale organisée, adoptée à Palerme en décembre 2000 définit le « groupe criminel organisé » comme « un groupe structuré de trois personnes ou plus existant depuis un certain temps et agissant de concert dans le but de commettre une ou plusieurs infractions graves (...) pour en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel ».

De son côté, le groupe « drogue et criminalité organisée » de l'Union européenne énumère 3 ( * ) onze critères pour qu'un groupe relève de la criminalité organisée :

1. une collaboration entre plus de deux personnes ;

2. des tâches spécifiques attribuées à chacune d'elles ;

3. sur une période de temps assez longue ou indéterminée ;

4. avec une forme de discipline ou de contrôle ;

5. suspectées d'avoir commis des infractions pénales graves ;

6. agissant au niveau international ;

7. recourant à la violence ou à d'autres moyens d'intimidation ;

8. utilisant des structures commerciales ou de type commercial ;

9. se livrant au blanchiment de l'argent ;

10. exerçant une influence sur les milieux politiques, les médias, l'administration publique, le pouvoir judiciaire ou l'économie ;

11. agissant pour le profit ou le pouvoir.

Parmi ces onze critères, au moins six d'entre eux doivent être réunis pour que l'on puisse considérer être en présence d'une manifestation de criminalité organisée, dont au moins les critères 1, 5 et 11.

L'ampleur du phénomène de la criminalité organisée est particulièrement difficile à évaluer.

Au sein des statistiques du ministère de l'Intérieur relatives à l'évolution de la délinquance et de la criminalité, un agrégat rassemble la criminalité organisée et la délinquance spécialisée. Cet agrégat regroupe les homicides et tentatives d'homicide, les prises d'otages, les séquestrations, les vols à main armée, le proxénétisme, le trafic et la revente sans usage de stupéfiants, les attentats par explosifs, les faux documents d'identité et autres faux documents administratifs, la fausse monnaie, les infractions à l'exercice d'une profession réglementée, les fraudes fiscales et les vols de véhicules de transport avec fret.

Erreur ! Liaison incorrecte.

Parmi les infractions relevant de l'agrégat « criminalité organisée et délinquance spécialisée », certaines ont connu une progression spectaculaire entre 1993 et 2002 :

- les prises d'otages et séquestrations ont progressé de 67,45 % ;

- les vols de véhicules de transport avec fret ont progressé de 35,70 % ;

- les infractions de fausse monnaie ont progressé de 11,84 %.

En ce qui concerne les condamnations prononcées par les juridictions, elles peuvent difficilement être mises en relation avec les statistiques relatives aux infractions constatées, dès lors que la justice appréhende la criminalité organisée principalement par l'intermédiaire de la notion d'association de malfaiteurs et de la circonstances aggravante de bande organisée.

Si l'on retient le champ d'application proposé par le présent projet de loi pour la criminalité et la délinquance organisées, les condamnations prononcées pour ces infractions en 2001 se sont élevées à 17.000 environ. 486 condamnations ont été prononcées pour un crime ou un délit commis en bande organisée.

2. Une prise de conscience internationale et européenne

Depuis la fin des années 1980, les instruments internationaux relatifs à la lutte contre les activités criminelles se sont multipliés. Parmi les principaux figurent :

- la convention des Nations-Unies du 19 décembre 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes ;

- la convention du Conseil de l'Europe du 8 novembre 1990 relative au blanchement, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime ;

- la convention du Conseil de l'Europe du 27 janvier 1999 sur la corruption ;

- la convention du Conseil de l'Europe du 23 novembre 2001 sur la cybercriminalité.

A la différence de nombreux autres instruments internationaux, qui visent des activités criminelles spécifiques, la convention des Nations-Unies contre la criminalité transnationale organisée tente d'appréhender le crime organisé dans sa globalité. Son objectif essentiel est de faire en sorte que tous les Etats parties disposent dans leur droit pénal des moyens de réprimer certaines infractions : participation à un groupe criminel organisé, blanchiment de produit du crime, corruption active ou passive des agents publics nationaux, entrave au bon fonctionnement de la justice. La convention est assortie de deux protocoles, respectivement relatifs à la traite des êtres humains et au trafic illicite de migrants.

L'Union européenne a également entrepris de nombreuses actions destinées à renforcer la lutte contre la criminalité organisée, qui seront évoquées de manière détaillée lors de l'examen des dispositions du présent projet de loi relatives à l'entraide judiciaire.

La réunion du Conseil européen de Tampere en 1999 a constitué une étape importante dans la lente émergence d'une espace judiciaire européen. Lors de cette réunion, le conseil européen a notamment décidé de faciliter les procédures d'extradition, d'intensifier la coopération policière, notamment en mettant en place des équipes communes d'enquête. Il a également affirmé sa volonté d' « éradiquer le blanchiment d'argent partout où il existe ».

Plusieurs instruments importants ont été adoptés depuis lors, en particulier la décision-cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen. Le Conseil de l'Union européenne a également adopté plusieurs décisions-cadres destinées à harmoniser la législation pénale des Etats membres, en particulier la décision-cadre du 29 mai 2000 visant à renforcer par des actions pénales et autres la protection contre le faux monnayage en vue de la mise en circulation de l'euro et la décision-cadre du 26 juin 2001 concernant le blanchiment d'argent, l'identification, le dépistage, le gel à la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime.

3. Les insuffisances de notre droit

En France, la criminalité organisée est appréhendée sur le plan pénal par la circonstance aggravante de bande organisée et l'infraction d'association de malfaiteurs.

L'article 132-71 du code pénal définit la bande organisée comme un « groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'une ou plusieurs infractions ».

Cette circonstance aggravante, prévue pour le trafic de stupéfiants, la séquestration, le proxénétisme, le vol, l'extorsion, l'escroquerie, le recel, les destructions par explosifs et le trafic de fausse monnaie, se distingue de la réunion par l'existence d'autres éléments, tels que notamment la préméditation et une organisation de la préparation de l'infraction.

L'association de malfaiteurs possède une définition très proche de la bande organisée mais constitue une infraction réprimée en tant que telle. Aux termes de l'article 450-1 du code pénal, « constitue une association de malfaiteurs tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement. »

Si le droit pénal prend donc en considération le caractère organisé de certaines infractions, peu d'instruments procéduraux spécifiques ont été mis en oeuvre pour répondre à la criminalité organisée.

Dans quelques matières cependant -terrorisme, trafic de stupéfiants, proxénétisme- le législateur a mis en place des règles procédurales dérogatoires destinées à faciliter la recherche et la constatation de ces infractions.

Ainsi, l'infiltration des réseaux criminels n'est autorisée par le code de procédure pénale qu'en matière de trafic de stupéfiants.

Pour quelques infractions seulement, il est possible d'accorder des réductions de peine aux auteurs de crimes ou délits qui acceptent d'apporter leur concours à la justice.

Les règles de la garde à vue font l'objet de dispositions spécifiques en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants. Il en est de même des règles de perquisition en matière de terrorisme, de trafic de stupéfiants et de proxénétisme.

En définitive, la réponse de notre pays à la délinquance et à la criminalité organisées est parcellaire et peu cohérente. Le présent projet de loi vise pour la première fois à appréhender la criminalité organisée en tant que telle, en lui donnant un champ d'application clairement défini et en mettant en oeuvre des instruments procéduraux destinés à renforcer l'efficacité de la lutte contre cette forme de criminalité.

SECTION 1
Dispositions relatives à la procédure particulière
applicable à la délinquance et à la criminalité organisées
Article premier
(art. 706-73 à 706-101-1 nouveaux
du code de procédure pénale)
Règles applicables à la délinquance
et à la criminalité organisées

Le présent article tend, dans son paragraphe I, à définir le champ de la délinquance et de la criminalité organisées et à prévoir des règles de procédure spécifique pour la recherche et la constatation de ces infractions. Le paragraphe II, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, a pour objet de donner un fondement légal à la rémunération des indicateurs de police.

*

Le paragraphe I du présent article tend à insérer dans le livre IV du code de procédure pénale, consacré aux procédures particulières, un nouveau titre XXV relatif à la procédure particulière applicable à la délinquance et à la criminalité organisées et composé de vingt-neuf articles.

Article 706-73 du code de procédure pénale
Infractions relevant de la délinquance
et de la criminalité organisées

Le texte proposé pour l'article 706-73 vise à définir le champ de la criminalité et de la délinquance organisées. Comme on l'a vu précédemment, plusieurs définitions de la criminalité organisée ont été données par des organisations internationales ou européennes. Certains pays, comme l'Italie, ont créé des incriminations spécifiques destinées à appréhender l'« association mafieuse ».

Plus simplement, le présent projet de loi tend à déterminer, parmi les infractions existantes, celles qui relèvent de la criminalité organisée, afin de leur appliquer des règles procédurales spécifiques.

Le champ d'application des dispositions relevant de la criminalité organisée fait l'objet d'une définition en deux nouveaux articles. Le texte proposé pour l'article 706-73 concerne la criminalité organisée la plus grave. Comme l'indique l'étude d'impact du projet de loi, « il s'agit de retenir les formes de criminalité organisée qui, par nature, portent l'atteinte la plus grave aux intérêts sociaux les plus importants devant être préservés et qui justifient de recourir à l'ensemble des nouveaux moyens d'investigation ».

Le texte proposé pour l'article 706-74 concerne certaines infractions moins graves ainsi que les formes classiques d'association de malfaiteurs. Seuls certains des nouveaux moyens d'investigation définis par le projet de loi seraient applicables à ces infractions.

Les incriminations figurant dans les articles 706-73 et 706-74 nouveaux du code de procédure pénale comportent certains traits communs. Il s'agit en particulier d'infractions particulièrement graves, punies d'au moins dix ans d'emprisonnement (quelques infractions sont cependant punies de sept ans d'emprisonnement). Si le plus grand nombre de ces infractions sont des infractions contre les personnes, le champ proposé pour la criminalité organisée comporte également des infractions contre les biens commises en bande organisée ou dans le cadre d'une association de malfaiteurs.

Le texte proposé pour l'article 706-73 énumère la liste des infractions pour lesquelles le nouveau titre XXV du code de procédure pénale serait applicable.

Parmi ces infractions, figurent les atteintes aux personnes suivantes :

- crime de meurtre commis en bande organisée (article 221-4 du code pénal). Actuellement le meurtre n'est pas puni de peines aggravées lorsqu'il est commis en bande organisée, mais l'article 2 du présent projet de loi tend à prévoir cette aggravation. La peine encourue serait la réclusion criminelle à perpétuité. Votre commission vous soumet un amendement corrigeant une erreur matérielle ;

- crime de tortures et d'actes de barbarie commis en bande organisée (article 222-4 du code pénal). L'article 2 du projet de loi tend à introduire la circonstance aggravante de bande organisée dans l'article 222-4 du code pénal. La peine encourue serait de trente ans de réclusion criminelle.

- crimes et délits de trafic de stupéfiants (article 222-34 à 222-42 du code pénal). Les peines encourues pour ces infractions vont de dix ans d'emprisonnement à la réclusion criminelle à perpétuité. Votre commission vous soumet un amendement supprimant la référence aux articles 222-41 et 222-42, qui ne créent pas d'infraction mais définissent la notion de produits stupéfiants et prévoient la responsabilité pénale des personnes morales ;

- crimes et délits d'enlèvement et de séquestration (articles 224-1, premier et deuxième alinéas, 224-2 à 224-5 du code pénal). Les peines prévues par ces articles pour ces infractions vont de vingt ans de réclusion criminelle à la réclusion criminelle à perpétuité. Le seul cas d'enlèvement qui n'entrerait pas dans le champ de la criminalité organisée serait l'enlèvement suivi d'une libération volontaire avant le septième jour suivant le début de l'infraction ;

- crimes et délits aggravés de traite des êtres humains (articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal). Il s'agit de viser la traite des êtres humains lorsqu'elle s'accompagne de certaines circonstances aggravantes, notamment lorsqu'elle est commise à l'égard d'un mineur, d'une personne vulnérable, de plusieurs personnes, en bande organisée, avec tortures et actes de barbarie. Les peines encourues pour ces infractions vont de dix ans d'emprisonnement à la réclusion criminelle à perpétuité ;

- crimes et délits aggravés de proxénétisme (article 225-7 à 225-12 du code pénal). Il s'agit de viser le proxénétisme lorsqu'il s'accompagne de certaines circonstances aggravantes, notamment lorsqu'il est commis à l'égard d'un mineur, d'une personne vulnérable, de plusieurs personnes, en bande organisée, avec tortures et actes de barbarie ... Les peines encourues pour ces infractions vont de dix ans d'emprisonnement à la réclusion criminelle à perpétuité.

Parmi les infractions qui relèveraient de la criminalité organisée figurent également les atteintes aux biens suivantes :

- crime de vol commis en bande organisée (article 311-9 du code pénal). Cette infraction est punie de quinze ans de réclusion criminelle ;

- crimes aggravés d'extorsion (articles 312-6 et 312-7 du code pénal). Il s'agit de l'extorsion en bande organisée, accompagnée de violence sur autrui, commise avec usage ou menace d'une arme ou accompagnée soit de violences ayant entraîné la mort, soit de tortures ou d'actes de barbarie. Les peines encourues vont de vingt ans de réclusion criminelle à la réclusion criminelle à perpétuité ;

- crimes de destruction, dégradation et détérioration d'un bien commis en bande organisée (article 322-8 du code pénal). L'article 322-8 du code pénal a été inséré dans le champ de la criminalité organisée par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois. Il punit de vingt ans de réclusion criminelle la destruction, la dégradation ou la détérioration d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes lorsqu'elle est commise en bande organisée ou qu'elle a entraîné pour autrui une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours.

Le texte proposé pour l'article 706-73 inclut parmi les infractions relevant de la criminalité organisée les crimes et délits constituant des actes de terrorisme (articles 421-1 à 421-5 du code pénal).

Aux termes de l'article 421-1 du code pénal, constituent des actes terroristes les infractions commises « intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur ». Les infractions en cause peuvent être des atteintes aux personnes (atteintes volontaires à la vie, enlèvement et séquestration...) comme des atteintes aux biens (vols, extorsions, destructions...). Lorsqu'une infraction de droit commun est commise dans le cadre d'une entreprise terroriste, elle est punie de peines aggravées aux termes de l'article 421-3 du code pénal.

Par un amendement , votre commission vous propose d'inclure dans le champ de la criminalité organisée les crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code pénal. La contrefaçon ou la falsification de pièces de monnaie ou de billets de banque ayant cours légal en France est presque toujours commise dans le cadre de bandes organisées compte tenu des moyens qu'elle requiert. Punie de trente ans de réclusion criminelle, elle a toute sa place dans le champ de la criminalité organisée.

Le texte proposé pour l'article 706-73 mentionne également, dans le champ de la criminalité organisée, plusieurs délits en matière de fabrication ou de détention d'armes lorsqu'ils sont commis en bande organisée. La circonstance aggravante de bande organisée n'existe actuellement pas pour ces délits, mais l'article 2 du projet de loi tend à la créer. Les délits concernés sont :

- la fabrication ou la détention, sans motifs légitimes, de machines ou engins meurtriers ou incendiaires agissant par explosion ou autrement, réprimées par l'article 3 de la loi du 18 juin 1871 ;

- la fabrication, le commerce, le stockage, l'importation ou la tentative d'importation, sans autorisation régulière, des matériels de guerre prohibés prévus par les articles 24, 26 et 31 du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

- la vente, la production, l'exportation ou l'importation de poudres ou substances explosives, dont la liste est prévue par décret, réprimées par les dispositions de l'article 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et des substances explosives ;

- la mise au point, la fabrication, la détention, le stockage, la cession des agents microbiologiques et des toxines biologiques, en quantités non destinées à des fins prophylactiques, de protection ou à d'autres fins pacifiques, réprimés par les dispositions de l'article 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972 interdisant la mise au point d'armes biologiques.

A l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, l'Assemblée nationale a inséré dans le champ de la criminalité organisée le délit d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d'un étranger en France commis en bande organisée. Cette infraction, prévue par l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est punie de dix ans d'emprisonnement.

Egalement à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, l'Assemblée nationale a inclus dans le champ de la criminalité organisée le blanchiment et le recel du produit, des revenus, des choses provenant des autres infractions mentionnées dans le texte proposé pour l'article 706-73. Toutefois, l'Assemblée nationale n'a visé que le blanchiment et le recel simples et non le blanchiment et le recel aggravés. Par un amendement , votre commission vous propose de compléter en ce sens le dispositif proposé.

Enfin, le texte proposé mentionne parmi les infractions relevant de la criminalité organisée les délits d'association de malfaiteurs ayant pour objet la préparation d'une des infractions mentionnées dans le nouvel article 706-73. Rappelons que l'article 450-1 du code pénal punit l'association de malfaiteurs de dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende lorsque les infractions préparées sont des crimes ou des délits punis de dix ans d'emprisonnement et de cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende lorsque les infractions préparées sont des délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

Le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 706-73 du code de procédure pénale précise qu'en matière de trafic de stupéfiants, de proxénétisme et de terrorisme, les dispositions du nouveau titre du code de procédure pénale relatif à la criminalité organisée sont applicables, sans que soient cependant remises en cause les dispositions procédurales spécifiques relatives à ces catégories d'infractions. Néanmoins, la création d'un cadre procédural complet applicable en matière de criminalité organisée permettra de supprimer certaines dispositions spécifiques à la lutte contre le terrorisme ou au trafic de stupéfiants.

Article 706-74 du code de procédure pénale
Autres infractions relevant de la criminalité
et de la délinquance organisées

Le texte proposé pour l'article 706-74 tend à mentionner d'autres infractions parmi celles relevant de la criminalité et de la délinquance organisées. Alors que l'ensemble des nouveaux moyens de procédure créés par le projet de loi seraient applicables pour la recherche et la constatation des infractions mentionnées à l'article 706-73, seuls certains d'entre eux pourraient être utilisés pour la recherche et la constatation des infractions mentionnées à l'article 706-74.

Comme l'indique l'étude d'impact du projet de loi, « ce dispositif vise à assurer un juste équilibre entre l'impératif de renforcement de l'efficacité dans la répression de la criminalité organisée et la proportionnalité de l'atteinte aux droits et libertés constitutionnellement protégés ».

Ainsi, les règles sur l'infiltration, sur la garde à vue, sur les perquisitions spéciales et sur les écoutes téléphoniques, qui seront ultérieurement présentées, ne s'appliqueraient pas aux infractions mentionnées à l'article 706-74 nouveau du code de procédure pénale.

Les infractions mentionnées dans le texte proposé pour l'article 706-74 sont :

- les crimes et délits commis en bande organisée autres que ceux relevant de l'article 706-73 nouveau. L'article 2 du présent projet de loi tend à étendre substantiellement la liste des infractions pour lesquelles les peines encourues sont aggravées lorsqu'elles sont commises en bande organisée ;

- les délits d'association de malfaiteurs ayant pour objet de préparer un crime ou un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement et n'entrant pas dans le champ d'application de l'article 706-73 nouveau.

D'après les informations transmises à votre rapporteur par le ministère de la justice, plus de 17.000 condamnations ont été prononcées en 2001 sur le fondement des infractions qui relèveraient de la criminalité et de la délinquance organisées.

Condamnations prononcées sur le fondement
des infractions entrant dans le champ d'application
des articles 706-73 et 706-74 nouveaux du code de procédure pénale
(2001)

Meurtres et assassinats

514

Crimes de torture et actes de barbarie

13

Infractions à la législation sur les stupéfiants

15.376

Crimes d'enlèvement

64

Proxénétisme aggravé

125

Extorsion aggravée

130

Terrorisme

11

Délits en matière d'armes commis en bande organisée

55

Aide à l'entrée et au séjour irréguliers des étrangers

35

Blanchiment

9

Association de malfaiteurs

196

Bande organisée

486

Chapitre premier
Compétence des juridictions spécialisées

Pour répondre à la criminalité organisée, il apparaît nécessaire aujourd'hui de disposer de juridictions spécialisées, dotées de moyens renforcés et disposant d'un ressort de compétence plus étendu que celui de chacun des tribunaux de grande instance que compte notre pays. L'article premier du projet de loi article tend donc à prévoir, au sein du nouveau titre XXV du code de procédure pénale, la création de juridictions spécialisées compétentes pour connaître des infractions mentionnées aux articles 706-73 et 706-74 nouveaux du même code.

Les dispositions tendant à créer ces juridictions spécialisées seront brièvement présentées. Votre rapporteur évoquera en effet de manière plus détaillée la question de la spécialisation des juridictions en commentant les dispositions du présent projet de loi relatives aux juridictions spécialisées en matière économique et financière.

Article 706-75 du code de procédure pénale
Création de juridictions interrégionales

Le texte proposé pour l'article 706-75 du code de procédure pénale ouvre la possibilité d'étendre la compétence territoriale d'un tribunal de grande instance et d'une cour d'assises au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des crimes et délits entrant dans le champ d'application des articles 706-73 et 706-74, dans les affaires qui seraient ou apparaîtraient d'une grande complexité.

Rappelons que le code de procédure pénale prévoit déjà l'existence de juridictions spécialisées. Ainsi, un tribunal de grande instance par cour d'appel est spécialisé en matière économique et financière. Le présent projet de loi tend d'ailleurs à créer en outre des juridictions interrégionales également spécialisées en matière économique et financière.

Par ailleurs, le tribunal de grande instance de Paris dispose d'une compétence concurrente à celle des juridictions de droit commun en matière de terrorisme. Dans ces conditions, le texte proposé pour l'article 706-75 du code de procédure pénale exclut à juste titre le terrorisme de la liste des infractions relevant de la compétence des nouvelles juridictions spécialisées.

La compétence des juridictions interrégionales s'étendrait aux infractions connexes. Un décret devrait fixer la liste et le ressort de ces juridictions, qui comprendraient une section du parquet et des formations d'instruction et de jugement spécialisées pour connaître des infractions mentionnées aux articles 706-73 et 706-74.

D'après l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi, « le Gouvernement envisage (...) de diviser le territoire métropolitain en six ou sept zones comportant chacune une juridiction inter-régionale ».

Article 706-76 du code de procédure pénale
Compétence concurrente des juridictions spécialisées

Le texte proposé pour l'article 706-76 précise que le procureur de la République, le juge d'instruction, la formation correctionnelle spécialisée du tribunal de grande instance et la cour d'assises des juridictions spécialisées exercent sur toute l'étendue du ressort de ces juridictions une compétence concurrente à celle qui résulte des règles habituellement applicables pour déterminer la compétence d'une juridiction.

Le choix d'une compétence concurrente est logique, dès lors que le projet de loi ne prévoit la saisine des juridictions spécialisées que pour les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité. La compétence concurrente peut également éviter des nullités de procédure dans des cas où une juridiction de droit commun omettrait de renvoyer une affaire à la juridiction spécialisée.

Conformément aux règles déjà prévues par l'article 705 du code de procédure pénale pour les juridictions économiques et financières, le texte proposé pour l'article 706-76 du code de procédure pénale prévoit que la juridiction saisie demeure compétente, quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l'affaire. Une telle règle doit permettre d'éviter des « allers-retours » entre juridictions en cas de changement de qualification de l'infraction pendant le déroulement de la procédure.

Toutefois, si les faits constituaient une contravention, le juge d'instruction devrait prononcer le renvoi de l'affaire devant le tribunal de police compétent.

Article 706-77 du code de procédure pénale
Dessaisissement du juge d'instruction

Le texte proposé pour l'article 706-77 du code de procédure pénale a pour objet de définir les modalités de dessaisissement du juge d'instruction d'une juridiction de droit commun au profit d'une juridiction spécialisée. Ces modalités sont reprises de celles prévues par le code de procédure pénale en matière de terrorisme.

Le procureur de la République près un tribunal de grande instance non spécialisé pourrait requérir le juge d'instruction, pour les infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73 et 706-74, de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction spécialisée. Les parties seraient préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations. Par un amendement , votre commission propose de préciser clairement que les parties sont avisées par le juge d'instruction .

Le texte proposé dispose que l'ordonnance est rendue huit jours au plus tôt après l'avis donné aux parties. Singulièrement, aucun délai maximal n'est donné au juge d'instruction pour rendre l'ordonnance et l'hypothèse dans laquelle le juge d'instruction ne rendrait pas d'ordonnance n'est pas évoquée.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à prévoir que le juge d'instruction doit rendre son ordonnance dans un délai compris entre huit jours et un mois . Elle proposera en outre ultérieurement que le ministère public puisse, en l'absence d'ordonnance du juge d'instruction, saisir directement la chambre de l'instruction ou la chambre criminelle de la Cour de cassation.

Si le juge d'instruction décidait de se dessaisir, son ordonnance ne prendrait effet qu'à compter du délai de cinq jours prévu dans le texte proposé pour l'article 706-78 du code de procédure pénale pour former appel de l'ordonnance. En cas de recours, le juge d'instruction demeurerait saisi jusqu'à ce que soit porté à sa connaissance l'arrêt de la chambre de l'instruction passé en force de chose jugée ou celui de la chambre criminelle de la Cour de cassation.

Le texte proposé pour l'article 706-77 prévoit enfin que le procureur de la République adresse le dossier de la procédure au procureur de la République près le tribunal de grande instance spécialisé dès que l'ordonnance est passée en force de chose jugée.

Article 706-78 du code de procédure pénale
Recours contre l'ordonnance du juge d'instruction

Le texte proposé pour l'article 706-78 du code de procédure pénale dispose que l'ordonnance du juge d'instruction peut être déférée, à la requête du ministère public ou des parties, dans les cinq jours de sa notification, soit à la chambre de l'instruction si la juridiction au profit de laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel, soit à la chambre criminelle de la Cour de cassation. Par deux amendements , votre commission vous propose, d'une part, d'apporter une clarification rédactionnelle au texte proposé, d'autre part, de permettre au procureur de la République de saisir la chambre de l'instruction ou la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d'instruction ne rend pas d'ordonnance.

Une fois saisie, la chambre de l'instruction ou la chambre criminelle devrait désigner, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information. L'arrêt de la chambre de l'instruction ou de la chambre criminelle serait porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'à celle du ministère public et notifié aux parties.

Enfin, le texte proposé dispose que ses dispositions sont applicables à l'arrêt de la chambre de l'instruction, lorsque celle-ci est directement saisie d'une demande de dessaisissement. Il peut en effet arriver, au cours d'une instruction, que la chambre de l'instruction soit conduite à instruire elle-même un dossier. Dans ce cas, une éventuelle demande de dessaisissement devrait être portée devant elle.

Article 706-79 du code de procédure pénale
Rôle des assistants spécialisés

Le texte proposé pour l'article 706-79 du code de procédure pénale permet aux magistrats des juridictions spécialisées de demander à des assistants spécialisés de participer aux procédures concernant les crimes et délits entrant dans le champ d'application des articles 706-73 et 706-74.

Le recours à des assistants spécialisés est déjà prévu par le code de procédure pénale en matière économique et financière. Votre rapporteur présentera de manière détaillée le rôle et les modalités de désignation de ces collaborateurs des magistrats à l'article 7 du présent projet de loi. Il est tout à fait heureux que le champ de leur intervention soit désormais étendu aux juridictions spécialisées en matière de criminalité organisée.

Chapitre II
Procédure

Section 1
De la surveillance
Article 706-80 du code de procédure pénale

L'article 706-32 du code de procédure pénale prévoit qu'afin de constater certaines infractions en matière de stupéfiants, d'en identifier les auteurs et d'effectuer des saisies, les officiers et les agents de police judiciaire peuvent, après en avoir informé le procureur de la République, procéder à la surveillance de l'acheminement de stupéfiants ou de produits tirés de la commission desdites infractions.

Cette disposition résulte de la loi n° 91-1264 du 19 décembre 1991 relative au renforcement de la lutte contre le trafic de stupéfiants, qui a par ailleurs prévu la possibilité de procéder à des infiltrations au sein des réseaux de trafiquants de stupéfiants. Les mêmes possibilités avaient été ouvertes aux agents des douanes.

Dans son rapport présenté lors de l'élaboration de cette loi, notre ancien collègue M. Paul Masson écrivait à propos des livraisons surveillées : « (...) la simple surveillance de ces livraisons est normalement licite. L'article n'a donc pas pour objet de créer de nouvelles règles dans ce domaine. Il se limite à rappeler la faculté ainsi offerte aux officiers et agents de police judiciaire de procéder à cette surveillance » 4 ( * ) .

Le texte proposé pour l'article 706-80 du code de procédure pénale a pour objet d' étendre les dispositions relatives à la surveillance à l'ensemble des infractions relevant de la criminalité et de la délinquance organisées mentionnées aux articles 706-73 et 706-74 nouveaux du code de procédure pénale.

Toutefois, le dispositif proposé ne constitue pas un simple rappel de la possibilité pour des officiers de police judiciaire de surveiller des suspects ou l'acheminement de biens ou d'objets tirés de la commission d'infractions.

Il revêt une portée normative en ce qu'il prévoit que les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire, après en avoir informé le procureur de la République et sauf opposition de ce magistrat, peuvent étendre à l'ensemble du territoire national la surveillance de personnes suspectées d'avoir commis une infraction entrant dans le champ de la criminalité et de la délinquance organisées ou la surveillance de l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission de ces infractions ou servant à les commettre .

L'information préalable à l'extension de compétence devrait être donnée, par tout moyen , au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter ou au procureur de la République saisi en application des dispositions du nouvel article 706-76 du code de procédure pénale, relatif aux juridictions spécialisées en matière de criminalité organisée.

Le principal intérêt du dispositif proposé réside donc dans la possibilité offerte aux officiers de police judiciaire d'étendre leur compétence à l'ensemble du territoire national pour les besoins d'une opération de surveillance.

Les règles relatives à la compétence territoriale des officiers de police judiciaire figurent actuellement aux articles 15-1 et 18 du code de procédure pénale, qui a été récemment modifié par la loi n° 2002-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.

L'article 15-1 prévoit que la compétence des services ou unités dans lesquels les officiers et agents de police judiciaire exercent leurs fonctions habituelles s'exerce soit sur l'ensemble du territoire national, soit sur une ou plusieurs zones de défense, ou parties de celles-ci, soit sur l'ensemble d'un département.

L'article 18 prévoit notamment que les officiers de police judiciaire peuvent, sur commission rogatoire expresse du juge d'instruction ou sur réquisitions du procureur de la République prises au cours d'une enquête préliminaire ou d'une enquête de flagrance, procéder aux opérations prescrites par ces magistrats sur toute l'étendue du territoire national. Ils sont tenus d'être assistés d'un officier de police judiciaire territorialement compétent si le magistrat dont ils tiennent la commission ou la réquisition le décide. Le procureur de la République territorialement compétent en est informé par le magistrat ayant prescrit l'opération.

Il existe donc déjà une possibilité d'extension à l'ensemble du territoire national de la compétence des officiers de police judiciaire. Le texte proposé pour l'article 706-80 vise à prévoir une procédure moins formelle lorsqu'une opération de surveillance est en cours. De fait, la délivrance d'une commission rogatoire ou de réquisitions du procureur de la République paraît peu compatible avec les exigences d'une opération en train de se dérouler.

Néanmoins, le système proposé pourrait soulever quelques difficultés d'application dès lors qu'il prévoit une information du procureur de la République par tout moyen, l'extension de compétence étant valable « sauf opposition » du magistrat.

Votre commission rappelle qu'aux termes de l'article 12 du code de procédure pénale, la police judiciaire est exercée sous la direction du procureur de la République. Elle craint que le dispositif proposé ne rende très difficile le contrôle du procureur en matière d'extension de compétence. Elle est néanmoins consciente de la nécessité de disposer d'une procédure souple en matière d'extension de compétence, afin d'éviter l'interruption d'une opération en cours.

Dans ces conditions, votre commission vous soumet un amendement tendant à subordonner l'extension de compétence à tout le territoire national des officiers de police judiciaire pour les besoins d'une opération de surveillance à une autorisation du procureur de la République, qui pourrait être donnée par tout moyen . Ce dispositif, plus souple que celui de l'article 18 du code de procédure pénale, devrait permettre d'être sûr que le procureur de la République a eu personnellement connaissance de la demande d'extension. Il pourrait renforcer la sécurité juridique des opérations de surveillance. Il est déjà appliqué en matière de visites de véhicules.

Section 2
De l'infiltration
Articles 706-81 à 706-87 du code de procédure pénale

La section 2 du nouveau titre XXV que le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale a pour objet d'étendre les possibilités de recourir à l'infiltration de réseaux se livrant à des actes relevant de la criminalité et de la délinquance organisées. Actuellement, le code de procédure pénale n'autorise l'infiltration, depuis la loi n° 91-1264 du 19 décembre 1991, qu'en matière de trafic de stupéfiants.

L'article 706-32 du code de procédure pénale dispose en effet que les officiers et agents de police judiciaire ne sont pas pénalement responsables lorsque, aux fins de constater un trafic de stupéfiants et d'en identifier les auteurs, ils acquièrent, détiennent, transportent ou livrent des stupéfiants ou des produits tirés de la commission d'un trafic de stupéfiants, ou qu'ils mettent à la disposition des personnes se livrant au trafic des moyens de caractère juridique, ainsi que des moyens de transport, de dépôt, de stockage, de conservation et de communication.

Très peu d'éléments statistiques sont disponibles en ce qui concerne la fréquence du recours à l'infiltration. La plupart des opérations d'infiltration ne sont pas versées au dossier de la procédure. Elles visent davantage à mettre à jour un processus criminel et à fournir des orientations d'enquête qu'à obtenir des preuves tendant à rétablir la culpabilité des membres d'une organisation.

D'après les informations communiquées à votre rapporteur au cours de ses auditions, le nombre d'opérations d'infiltration demeure très limité. 122 opérations d'infiltration auraient été réalisées entre 1996 et 2002.

Plusieurs instruments internationaux invitent les Etats signataires à permettre des procédures d'infiltration en matière de criminalité organisée. Ainsi, la recommandation n° 2001-11 du 19 septembre 2001 du Conseil de l'Europe concernant les principes directeurs pour la lutte contre le crime organisé incite les Etats membres à adopter une législation permettant « les opérations d'infiltrations, les livraisons surveillées et les recours à des informateurs ».

Le présent projet de loi tend à prévoir explicitement la possibilité de recourir aux infiltrations lorsque l'enquête ou l'instruction concerne l'une des infractions mentionnées à l'article 706-73 nouveau du code de procédure pénale, tout en encadrant précisément les conditions du recours à cette technique d'enquête. Notons que l'article 11 du projet de loi tend à modifier le code des douanes pour autoriser les agents des douanes à recourir aux infiltrations afin de constater les infractions douanières d'importation, d'exportation ou de détention de produits stupéfiants ou de contrebande de tabacs manufacturés, d'alcool et spiritueux.

Le texte proposé pour l' article 706-81 du code de procédure pénale définit l'infiltration comme le fait, pour un officier ou un agent de police judiciaire spécialement habilité et agissant sous la responsabilité d'un officier de police judiciaire chargé de coordonner l'opération, de surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs .

Dans le cadre d'une opération d'infiltration, l'officier ou l'agent de police judiciaire serait autorisé à faire usage d'une identité d'emprunt. Il pourrait également commettre certains actes illégaux (énumérés dans le texte proposé pour l'article 706-82 du code de procédure pénale), à condition que ces actes ne constituent pas une incitation à commettre l'infraction.

Le texte proposé prévoit que l'opération d'infiltration doit être autorisée par le procureur de la République (au cours d'une enquête) ou, après avis de ce magistrat, par le juge d'instruction saisi. Ces magistrats seraient chargés de contrôler le déroulement de l'opération, ce qui constitue une novation par rapport à l'actuel article 706-32 du code de procédure pénale qui, en matière de trafic de stupéfiants, ne prévoit qu'une autorisation de l'opération par un magistrat.

Le projet de loi initial prévoyait que les opérations d'infiltration pourraient être autorisées « à titre exceptionnel », mais l'Assemblée nationale a supprimé à juste titre cette précision. Compte tenu des difficultés propres à la mise en oeuvre de telles opérations, il paraît évident qu'elles resteront cantonnées à un nombre limité d'affaires.

Le projet de loi initial disposait que l'infiltration devrait faire l'objet d'un rapport rédigé par l'officier de police judiciaire ayant coordonné l'opération. A l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, l'Assemblée nationale a complété le dispositif en prévoyant que le rapport ainsi prévu comprendrait les éléments strictement nécessaires à la constatation des infractions et ne mettent pas en danger la sécurité de l'agent infiltré et des personnes requises.

Le texte proposé pour l' article 706-82 du code de procédure pénale énumère les actes que peuvent accomplir les officiers et agents de police judiciaire dans le cadre d'une opération d'infiltration sans être pénalement responsables. De manière très similaire aux dispositions prévues par l'actuel article 706-32 du code de procédure pénale en matière de trafic de stupéfiants, les officiers ou agents de police judiciaire pourraient :

- acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions ou servant à la commission de ces infractions ;

- utiliser ou mettre à disposition des personnes se livrant à ces infractions, des moyens de caractère juridique ou financier ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation et de télécommunication.

Le texte proposé précise que l'exonération de responsabilité est également applicable aux personnes requises par les officiers ou agents de police judiciaire pour permettre de procéder à l'opération d'infiltration.

La rédaction de cette disposition est quelque peu ambiguë. Elle semble en effet viser des personnes qui contribueraient à l'opération d'infiltration en acceptant par exemple de fournir des moyens logistiques (un entrepôt susceptible de servir à stocker des marchandises...). Elle pourrait cependant également s'appliquer aux membres du réseau criminel qui faciliteraient l'infiltration d'un officier ou d'un agent de police judiciaire dans le réseau. Or, le fait de faciliter une opération d'infiltration ne saurait constituer pour un membre de réseau une cause d'exonération automatique de sa responsabilité pénale pour l'ensemble des actes illégaux qu'il aurait commis.

Dans un souci de rigueur juridique, votre commission vous soumet un amendement prévoyant que l'exonération de responsabilité pénale prévue pour les personnes requises pour permettre de procéder à l'opération d'infiltration ne vaut que pour les actes accomplis à seule fin de permettre la réalisation de l'opération d'infiltration .

Le texte proposé pour l' article 706-83 du code de procédure pénale énumère les conditions devant être respectées pour que l'opération d'infiltration soit valide :

- à peine de nullité, l'autorisation devrait être délivrée par écrit et spécialement motivée ;

- elle devrait mentionner la ou les infractions qui justifient le recours à cette procédure et l'identité de l'officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l'opération. Le projet de loi initial prévoyait également la mention de l'identité d'emprunt des agents effectuant l'opération, mais l'Assemblée nationale a supprimé cette disposition dans un souci de protection des agents infiltrés ;

- l'autorisation devrait fixer la durée de l'opération d'infiltration, qui ne pourrait excéder quatre mois. Notons que cette durée est la même que celle prévue par le code de procédure pénale en matière d'interception de correspondances émises par la voie des télécommunications. L'opération pourrait être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée. Le magistrat l'ayant autorisée pourrait, à tout moment, ordonner son interruption avant l'expiration de la durée fixée ;

- l'autorisation serait versée au dossier de la procédure après achèvement de l'opération d'infiltration. Il s'agit d'une précision très importante. Actuellement, en effet, l'article 706-32 du code de procédure pénale n'impose pas le versement au dossier de l'autorisation d'infiltration, de sorte que l'opération peut demeurer entièrement secrète.

La commission des Lois de l'Assemblée nationale, lors de l'examen du présent projet de loi, a adopté un amendement supprimant le versement systématique au dossier de l'autorisation d'infiltration. Le garde des Sceaux a cependant demandé et obtenu le retrait de l'amendement, en justifiant ainsi le recours exclusif à des opérations d'infiltration dites « ouvertes » : « L'option fondamentale qui a été retenue repose sur la transparence de l'opération d'infiltration, transparence qui est d'ailleurs consacrée dans la plupart des législations étrangères. L'exigence d'une procédure ouverte se justifie également au regard des impératifs de l'entraide pénale internationale.

« Accorder la possibilité de ne pas systématiquement recourir à une procédure d'infiltration ouverte serait susceptible d'aboutir à des incohérences préjudiciables dans le cadre de l'entraide, entraînant une occultation de la procédure réalisée sur le territoire national alors que celle-ci serait transparente pour l'Etat requérant ».

Votre commission approuve le choix consistant à imposer le versement au dossier de la procédure de l'autorisation d'infiltration dès lors que celle-ci ne permet pas la révélation de l'identité de l'agent infiltré 5 ( * ) .

Le texte proposé pour l' article 706-84 du code de procédure pénale dispose que l'identité réelle des officiers ou agents de police judiciaire ayant effectué l'infiltration sous une identité d'emprunt ne doit apparaître à aucun stade de la procédure et punit de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende la révélation de l'identité de ces officiers ou agents de police judiciaire.

A l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, l'Assemblée nationale a complété ces dispositions pour punir de peines aggravées la révélation de l'identité des officiers et agents de police judiciaire, d'une part, lorsqu'elle a causé des violences, coups et blessures à l'encontre de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs (sept ans d'emprisonnement et 100.000 euros d'amende), d'autre part lorsqu'elle a causé la mort de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs (dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende).

Le texte proposé pour l' article 706-85 du code de procédure pénale autorise l'agent infiltré, en cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'infiltration ou en l'absence de prolongation, à poursuivre ses activités sans être pénalement responsable, le temps strictement nécessaire pour lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité . Le magistrat ayant délivré l'autorisation devrait en être informé dans les meilleurs délais. Il devrait également être informé de l'achèvement de l'opération d'infiltration.

Le dispositif proposé paraît insuffisamment précis, en ce qu'il permet à un officier ou agent de police judiciaire de poursuivre des activités illicites « le temps strictement nécessaire pour lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité ».

L'imprécision de cette expression pourrait donner lieu à des contentieux concernant le respect de cette obligation. Par un amendement , votre commission propose que le magistrat chargé de contrôler l'opération fixe le délai à l'issue duquel l'officier ou l'agent de police judiciaire devra avoir cessé sa surveillance.

Certes, il peut paraître délicat pour le magistrat de fixer un délai pour la cessation de l'infiltration. Cependant, dès lors que ce magistrat est chargé de contrôler l'opération d'infiltration, il doit disposer d'éléments d'appréciation suffisants pour évaluer le délai nécessaire à l'officier ou à l'agent de police judiciaire pour mettre fin à la surveillance.

La solution proposée par votre commission devrait permettre d'éviter tout contentieux sur le respect par l'officier de police judiciaire de l'obligation de mettre fin à l'opération dans le délai strictement nécessaire pour permettre d'assurer sa sécurité. Elle assurera donc une meilleure protection juridique aux officiers et agents de police judiciaire participant à une opération d'infiltration.

Le texte proposé pour l' article 706-86 du code de procédure pénale dispose que l'officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l'opération d'infiltration peut seul être entendu en qualité de témoin sur l'opération. Cela signifie a contrario que les officiers ou agents de police judiciaire infiltrés ne peuvent être entendus en qualité de témoins.

Toutefois, la personne mise en examen ou comparaissant devant la juridiction de jugement pourrait demander à être confrontée à un agent ayant personnellement réalisé les opérations d'infiltration s'il ressortait du rapport établi à propos de l'opération d'infiltration que cette personne était directement mise en cause par des constatations effectuées par cet agent. Dans un tel cas, la confrontation devrait être faite en utilisant des moyens techniques empêchant d'identifier l'agent infiltré, conformément aux règles posées par l'article 706-61 du code de procédure pénale à propos des « témoins anonymes ».

A l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, l'Assemblée nationale a précisé que les questions posées à l'agent infiltré à l'occasion de cette confrontation ne devraient pas avoir pour objet ni pour effet de révéler, directement ou indirectement, sa véritable identité.

Les règles proposées paraissent tout à fait justifiées afin de préserver l'anonymat d'officiers et d'agents de police judiciaire dont la sécurité pourrait être menacée si leur identité était révélée.

Le texte proposé pour l' article 706-87 du code de procédure pénale prévoyait, dans le projet de loi initial, qu'aucune condamnation ne pouvait être prononcée sur le seul fondement des déclarations faites par les officiers ou agents de police judiciaire ayant procédé à une opération d'infiltration. L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé ce texte.

Le texte proposé avait pour objet de respecter la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Celle-ci stipule notamment que tout accusé a droit à interroger ou faire interroger les témoins à charge et à obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge.

Interprétant les dispositions de la Convention, la Cour européenne des droits de l'homme a formulé les observations suivantes : « La Convention n'empêche pas de s'appuyer, au stade de l'instruction préparatoire, sur des sources telles que des indicateurs occultes, mais l'emploi ultérieur de déclarations anonymes comme des preuves suffisantes pour justifier une condamnation soulève un problème différent . » La Cour a condamné les Pays-Bas à propos d'une affaire dans laquelle la condamnation du requérant se fondait « à un degré déterminant » sur des dépositions anonymes 6 ( * ) .

Dans un autre arrêt, la Cour a rappelé de manière très explicite qu' « une condamnation ne peut se fonder uniquement, ni dans une mesure déterminante, sur des déclarations anonymes » 7 ( * ) .

En 2001, le législateur a introduit la possibilité pour des témoins d'être entendus sans que leur identité figure au dossier de la procédure. Il a alors précisé explicitement qu'aucune condamnation ne pourrait être prononcée sur le seul fondement d'une déclaration recueillie dans ces conditions.

Le Gouvernement, lors de l'élaboration du présent projet de loi, a jugé nécessaire de prévoir la même réserve en cas de recours à une opération d'infiltration, dès lors que les officiers et agents de police judiciaire infiltrés sont appelés à conserver l'anonymat.

L'Assemblée nationale a supprimé cette disposition. Au cours du débat en séance publique, M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, a ainsi justifié cette décision : « Il est normal de prévoir qu'une condamnation ne peut être fondée sur les seule paroles d'un témoin anonyme ou d'un repenti. Mais là, il ne s'agit ni de l'un, ni de l'autre, mais d'un officier de police judiciaire dûment autorisé par un magistrat. L'adoption d'une telle disposition pourrait conduire à ne pas pouvoir poursuivre un acte très grave, un crime dont un officier de police judiciaire a connaissance, par exemple, dans le cas où on a jeté un corps à la mer qui n'a pu être retrouvé » 8 ( * ) .

S'il est certain qu'un officier ou un agent de police judiciaire ne peut être assimilé à un témoin anonyme et encore moins à un repenti, votre commission craint cependant que la possibilité de fonder une condamnation uniquement sur les déclarations d'un officier ou agent de police judiciaire infiltré dont l'identité serait inconnue de la personne mise en cause heurte de front la Convention européenne des droits de l'homme telle qu'interprétée par la Cour.

En pratique, la Cour européenne des droits de l'homme a déjà connu une situation similaire et a condamné les Pays-Bas après avoir constaté qu'une condamnation avait été fondée de manière déterminante sur les déclarations de policiers ayant conservé l'anonymat. Dans cet arrêt, la Cour a notamment apporté les précisions suivantes :

« La Cour estime que la mise en balance des intérêts de la défense et des arguments militant en faveur du maintien de l'anonymat des témoins pose des problèmes particuliers si les témoins en question appartiennent aux forces de police de l'Etat. Si les intérêts de ces derniers -comme évidemment ceux de leurs familles- méritent eux aussi la protection de la Convention, il faut reconnaître que leur situation diffère quelque peu de celle d'un témoin désintéressé ou d'une victime. Ils ont un devoir général d'obéissance envers les autorités exécutives de l'Etat, ainsi d'ordinaire que des liens avec le ministère public ; pour ces seules raisons déjà, il ne faut les utiliser comme témoins anonymes que dans des circonstances exceptionnelles. De surcroît, il est dans la nature des choses que parmi leurs devoirs figure, spécialement dans le cas de policiers investis de pouvoirs d'arrestation, celui de témoigner en audience publique.

« Par ailleurs, la Cour a reconnu en principe que, pourvu que les droits de la défense soient respectés, il peut être légitime pour des autorités de police de souhaiter préserver l'anonymat d'un agent employé à des activités secrètes, afin non seulement d'assurer sa protection et celle de sa famille, mais aussi de ne pas compromettre la possibilité de l'utiliser dans des opérations futures (...) .

« Eu égard à la place éminente qu'occupe le droit à une bonne administration de la justice dans une société démocratique, toute mesure restreignant les droits de la défense doit être absolument nécessaire. Dès lors qu'une mesure moins restrictive peut suffire, c'est elle qu'il faut appliquer (...).

« (...) le seul élément de preuve identifiant formellement les requérants comme les auteurs des infractions sur lequel se soit fondée la cour d'appel était constitué des déclarations des policiers anonymes. Dès lors, la condamnation des requérants repose « dans une mesure déterminante » sur ces dépositions anonymes.

« (...) Dans ces conditions, la Cour estime que la procédure considérée dans son ensemble n'a pas revêtu un caractère équitable (...) ». 9 ( * )

Votre commission n'estime donc pas possible de fonder une condamnation uniquement sur des déclarations anonymes, même si ces déclarations émanent d'officiers ou d'agents de police judiciaire. Rappelons que, désormais, lorsque la France est condamnée pour non-respect de la Convention européenne des droits de l'homme, une procédure de réexamen de l'affaire peut être entreprise. Espérant la pleine réussite du dispositif de l'infiltration, votre commission ne souhaite pas qu'il conduise à des condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l'homme.

Par un amendement , elle vous propose de rétablir le texte proposé pour l'article 706-87 du code de procédure pénale, tout en précisant explicitement que l'interdiction de condamner une personne sur le seul fondement de déclarations de policiers infiltrés n'est pas applicable lorsque ceux-ci acceptent de lever leur anonymat .

Cette précision permet de répondre à la préoccupation du rapporteur de l'Assemblée nationale, qui s'inquiétait qu'un crime constaté par un agent infiltré puisse rester impuni en cas de disparition du corps. Dans un cas aussi grave, il reviendra à l'agent infiltré de témoigner publiquement, en sorte que ses déclarations puissent, le cas échéant, constituer le seul fondement de la condamnation. L'Etat devra naturellement, dans une telle hypothèse, prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection de l'officier ou de l'agent de police judiciaire ayant ainsi accepté de mettre fin à son anonymat pour servir la justice.

Section 3
De la garde à vue
Article 706-88 du code de procédure pénale

Le texte proposé pour l'article 706-88 du code de procédure pénale a pour objet essentiel de permettre de placer en garde à vue pendant quatre-vingt seize heures, soit quatre jours, les personnes suspectées d'avoir commis une des infractions entrant dans le champ d'application du nouvel article 706-73 du code de procédure pénale.

1. Le droit actuel

Aux termes de l'article 63 du code de procédure pénale, qui concerne l'enquête de flagrance, l'officier de police judiciaire peut, pour les nécessités de l'enquête, placer en garde à vue toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction.

Les articles 77 et 154 du code de procédure pénale prévoient la même règle en enquête préliminaire et sur commission rogatoire. En ce qui concerne les modalités de la garde à vue et les droits ouverts aux personnes gardées à vue, trois régimes coexistent actuellement :

- Le régime de droit commun

En principe, la durée maximale d'une garde à vue est de vingt-quatre heures . Cette durée peut cependant être prolongée pour une nouvelle période de vingt-quatre heures , sur autorisation écrite du procureur de la République (au cours d'une enquête) ou du juge d'instruction (au cours d'une instruction). Le procureur de la République ou le juge d'instruction peut subordonner cette autorisation à la présentation préalable de la personne gardée à vue. Le procureur ou le juge d'instruction doit être avisé du placement en garde à vue d'une personne dès le début de la mesure.

Toute personne placée en garde à vue doit être immédiatement informée de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête, de son droit de faire prévenir un proche, d'être examinée par un médecin et de s'entretenir avec un avocat.

Dans un délai de trois heures après le placement en garde à vue, la personne peut, à sa demande, faire prévenir une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l'un de ses parents en ligne directe, l'un de ses frères et soeurs ou son employeur.

Dans le même délai, la personne peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois. En outre, à tout moment, le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut d'office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue. Enfin, en l'absence de demande de la personne gardée à vue, du procureur de la République ou de l'officier de police judiciaire, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande.

Dès le début de la garde à vue ainsi qu'à l'issue de la vingtième heure, la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat . Si elle n'est pas en mesure d'en désigner un ou si l'avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu'il lui en soit commis un d'office par le bâtonnier.

Lorsque la garde à vue fait l'objet d'une prolongation, la personne peut également demander à s'entretenir avec un avocat à l'issue de la douzième heure de cette prolongation .

- Le régime de l'article 63-4, septième alinéa

Le septième alinéa de l'article 63-4 du code de procédure pénale prévoit que l'entretien d'une personne gardée à vue avec un avocat ne peut intervenir qu' à l'issue d'un délai de trente-six heures lorsque l'enquête a pour objet l'une des infractions suivantes :

* participation à une association de malfaiteurs ;

* proxénétisme aggravé ;

* extorsion de fonds aggravée ;

* enlèvement et séquestration en bande organisée ;

* vol en bande organisée ;

* destruction, dégradation ou détérioration en bande organisée.

- Le régime applicable au terrorisme et au trafic de stupéfiants

En matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants, le régime de droit commun de la garde à vue est modifié sur deux points :

* d'une part, la garde à vue peut être prolongée au-delà de la durée maximale de quarante-huit heures pour une nouvelle période de quarante-huit heures . Cette prolongation est autorisée soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d'instruction. L'intéressé doit être présenté à l'autorité qui statue sur une prolongation préalablement à sa décision. En matière de trafic de stupéfiants, la personne doit être examinée par un médecin toutes les vingt-quatre heures. En matière de terrorisme, un examen médical est de droit lorsque la prolongation est décidée ;

* d'autre part, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir que lorsque s'est écoulé un délai de soixante-douze heures .

2. Le projet de loi initial

Le projet de loi présenté par le Gouvernement tendait à apporter plusieurs modifications au régime de la garde à vue :

- le texte proposé pour l'article 706-88 avait pour objet de prévoir que les gardes à vue relatives aux infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 nouveau du code de procédure pénale pouvaient, à titre exceptionnel, faire l'objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune après la première prolongation de vingt-quatre heures.

Le texte prévoyait que les prolongations étaient autorisées, par décision écrite et motivée, soit à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d'instruction saisi. Il précisait que la personne gardée à vue devait être présentée au magistrat statuant sur la prolongation préalablement à cette décision, mais que la seconde prolongation pouvait, à titre exceptionnel, être accordée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer. Le texte proposé pour l'article 706-88 disposait en outre que la personne pouvait demander à s'entretenir avec un avocat à l'issue de la quarante-huitième heure puis de la soixante-douzième heure de la mesure. Il était enfin précisé que ces dispositions ne remettaient pas en cause le régime spécifique de garde à vue prévu en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants ;

- l'article 29 du projet de loi a par ailleurs prévu de modifier le régime de droit commun de la garde à vue pour remplacer les interventions de l'avocat à la vingtième et à la trente-sixième heure de garde à vue par une intervention à l'issue de la vingt-quatrième heure , afin que celle-ci intervienne au moment de la décision de prolongation de la mesure.

Les régimes de garde à vue dans le projet de loi initial

Durée initiale

Durée de la prolongation

Intervention Avocat

Présentation aux fins de prolongations O bligatoire ou F acultative

Médecin O bligatoire ou F acultatif

1 ère

2 ème

3 ème

Droit commun


24 H

224 H

X

X

- 1 è heure
- 24 è heure

F

F

Infractions relevant de l'article 706-73

24 H

24 H

- 1 è heure
- 24 è heure
- 48 è heure
- 72 è heure

F - O - F

O

Infractions relevant à la fois de l'article 706-73 et de l'article 63-4, septième alinéa

24 H

24 H

- 36 è heure

- 48 è heure

- 72 è heure

F - O - F

O

Infractions relevant uniquement de l'article 63-4, septième alinéa

X

X

- 36 è heure

F

F

Terrorisme

et

Stupéfiants

48 H

X

- 72 è heure

Terrorisme F - O



S
tupéfiants F-F

F puis O à la 48 è heure

O dès le début et toutes les 24 H

3. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, a souhaité simplifier les régimes de garde à vue, qu'elle a jugé trop complexes. Elle a donc modifié sur plusieurs points importants les dispositions du projet de loi.

Elle a tout d'abord modifié le texte proposé pour l'article 706-88 du code de procédure pénale pour :

- prévoir la possibilité, comme en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants, de prolonger par une seule décision pour quarante-huit heures la garde à vue, à l'issue des premières quarante-huit heures, pour les infractions suivantes : crimes et délits aggravés de proxénétisme ; crimes aggravés d'extorsion ; crimes de destruction, dégradation et détérioration d'un bien commis en bande organisée ; délits d'association de malfaiteurs ayant pour objet la préparation de l'une des infractions de l'article 706-73 ; enlèvement et séquestration en bande organisée ;

- prévoir qu'en cas de prolongation de la garde à vue en matière de criminalité et de délinquance organisées, l'examen médical n'est de droit que si la personne gardée à vue le demande ;

- renvoyer à la soixante-douzième heure de garde à vue l'intervention de l'avocat pour toutes les infractions entrant dans le champ de l'article 63-4, septième alinéa, du code de procédure pénale.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a inséré dans le projet de loi un article 29 quinquies, qui tend à modifier le champ d'application du septième alinéa de l'article 63-4.

Dans un souci de simplicité, l'Assemblée nationale a prévu que cet alinéa, qui énumère des infractions pour lesquelles l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue est repoussée dans le temps, aurait un champ d'application identique à celui prévu par le nouvel article 706-88 et justifiant une prolongation unique de quarante-huit heures de la garde à vue à l'issue des premières quarante-huit heures : crimes et délits aggravés de proxénétisme ; crimes aggravés d'extorsion ; crimes de destruction, dégradation et détérioration d'un bien commis en bande organisée ; délits d'association de malfaiteurs ayant pour objet la préparation de l'une des infractions de l'article 706-73 ; enlèvement et séquestration en bande organisée.

Les régimes de garde à vue dans le projet de loi adopté
par l'Assemblée nationale

Durée initiale

Durée de la prolongation

Intervention Avocat

Présentation aux fins de prolongations O bligatoire ou
F acultative

Médecin O bligatoire ou
F acultatif

1 ère

2 ème

3 ème

Droit commun

2

24 H

2

24 H

X

X

X

X

- 1 è heure
- 24 è heure

F

F

Délinquance organisée

Certaines infractions du 706-73

24 H

24 H

- 1 è heure
- 24 è heure
- 48 è heure
- 72 è heure

F - O - F

F

Autres infractions du 706-73


48 H


X

- 72 è heure

F - O

F



Terrorisme


et


Stupéfiants

48 H

X

- 72 ème heure



Terrorisme
F-O


Stupéfiants
F-F



F
puis O à la 48 è heure


O dès le début et toutes les
24 H

La solution proposée par l'Assemblée nationale constitue une simplification par rapport aux propositions formulées par le Gouvernement. Elle modifie très substantiellement le régime des gardes à vue en étendant fortement la liste des infractions pouvant donner lieu à une prolongation unique de quarante-huit heures de la garde à vue. Jusqu'à présent, ce régime était strictement cantonné aux infractions de terrorisme et de trafic de stupéfiants.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale a également des conséquences importantes sur les règles relatives à l'entretien de la personne gardée à vue avec un avocat. Alors que, pour un nombre important d'infractions, l'entretien avec l'avocat intervient actuellement à la trente-sixième heure, il prendrait désormais place à la soixante-douzième heure, comme en matière de terrorisme ou de trafic de stupéfiants.

4. Les propositions de votre commission des Lois

Afin de concilier le mieux possible les nécessités de l'enquête, les droits de la défense et la lisibilité de notre procédure pénale, votre commission vous propose de modifier substantiellement les dispositions du projet de loi relatives à la garde à vue.

Votre commission propose, par un amendement , une nouvelle rédaction de l'article 706-88 nouveau du code de procédure pénale, prévoyant :

- la possibilité de prolonger deux fois, au-delà de la période normale de quarante-huit heures, pour vingt-quatre heures , la garde à vue des personnes suspectées d'avoir commis l'une des infractions entrant dans le champ de l'article 706-73 du code de procédure pénale ;

- l'obligation de présenter la personne au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation pourrait cependant être autorisée sans présentation préalable de la personne ;

- un examen médical obligatoire lors de la première prolongation ,

- la possibilité pour le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction de décider que la garde à vue fera l'objet d'une seule prolongation de quarante-huit heures si la durée prévisible des investigations restant à réaliser le justifie ;

- la possibilité pour la personne gardée à vue de s'entretenir avec un avocat à la quarante-huitième heure puis à la soixante-douzième heure de garde à vue (après des premiers entretiens à la première heure et à la vingt-quatrième heure). Toutefois, la personne continuerait à ne pouvoir s'entretenir avec un avocat qu'à la soixante-douzième heure en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants.

Votre commission vous proposera, par ailleurs, à l'article 5 du projet de loi, de modifier l'article 63-4, septième alinéa, du code de procédure pénale, afin de maintenir à la trente-sixième heure ( contre la soixante-douzième heure dans le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale ) l'intervention de l'avocat pour certaines infractions (crimes et délits aggravés de proxénétisme, crimes et délits aggravés d'extorsion ; crimes de destruction, dégradation et détérioration d'un bien commis en bande organisée; délits d'association de malfaiteurs ayant pour objet la préparation de l'une des infractions mentionnées à l'article 706-73 ; enlèvement et séquestration en bande organisée).

Le système proposé permettra de supprimer les articles 706-23 et 706-29 du code de procédure pénale instituant des régimes dérogatoires de garde à vue en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants tout en conservant à ces cas un régime particulier pour la seule présence de l'avocat.

Les régimes de garde à vue dans la proposition de votre commission

Durée initiale

Durée de prolongation

Intervention Avocat

Présentation aux fins de prolongations O bligatoire ou
F
acultative

Médecin O bligatoire ou
F
acultatif

1 ère

2 ème

3 ème

Droit commun

24 h

24 H

X

X

- 1 è heure
- 24 è heure

F

F

Délinquance organisée

Infractions visées par l'art. 706-73

Certaines infractions du 706-73

2

224 H

ou

48 H

24 H

si

2

22 è de 24 H

- 1 è heure
- 24 è heure
- 48 è heure
- 72 è heure

F - O - (F)

F
puis
O
à la 48 è heure

Autres infractions du 706-73

- 36 è heure
- 48 è heure
- 72 è heure

Terrorisme

Stupéfiants

- 72 ème heure

Section 4
Des perquisitions
Articles 706-89 à 706-95 nouveaux du code de procédure pénale

Le texte proposé par l'article premier du projet de loi pour les articles 706-89 à 706-95 du code de procédure pénale a pour objet d'assouplir les conditions dans lesquelles il peut être procédé à des perquisitions pour les nécessités d'une enquête ou d'une instruction portant sur des infractions relevant de la criminalité et de la délinquance organisées.

1. Le régime des perquisitions

Le régime actuel des perquisitions est au premier abord d'une grande simplicité :

- les perquisitions de jour sont possibles sans l'accord de la personne concernée en enquête de flagrance ou à l'instruction, avec l'accord de la personne en enquête préliminaire ;

- les perquisitions de nuit (entre vingt-et-une heures et six heures) sont interdites.

Néanmoins, ces principes généraux s'accompagnent de nombreuses dispositions dérogatoires :

- en enquête préliminaire, des perquisitions peuvent être conduites, sur décision du juge des libertés et de la détention, sans l'assentiment de la personne, en matière de terrorisme, de trafic de stupéfiants et d'infractions à la législation sur les armes (articles 76-1 et 706-24 du code de procédure pénale) ;

- en ce qui concerne les perquisitions de nuit, les règles en vigueur sont les suivantes :

* en enquête de flagrance, des perquisitions de nuit peuvent être conduites en matière de terrorisme (avec l'accord du juge des libertés et de la détention), de trafic de stupéfiants et de proxénétisme. En ce qui concerne le proxénétisme, les perquisitions ne sont possibles que dans des lieux de prostitution habituelle ouverts au public ou utilisés par le public. En ce qui concerne les stupéfiants, les perquisitions sont possibles dans les lieux où se commet un trafic. Si le lieu concerné est une habitation, une autorisation du juge des libertés et de la détention est nécessaire ;

* en enquête préliminaire, des perquisitions de nuit sont possibles, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants à condition que les perquisitions n'aient pas lieu dans des locaux d'habitation ;

* au cours d'une instruction, les perquisitions de nuit sont possibles, en matière de trafic de stupéfiants et de proxénétisme dans les mêmes conditions qu'au cours d'une enquête de flagrance. En matière de terrorisme, les perquisitions de nuit sont possibles, sur autorisation du juge d'instruction, en cas d'urgence lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit flagrant, qu'il existe un risque immédiat de disparition des preuves ou qu'il existe un risque de préparation de nouveaux actes de terrorisme.

Les règles relatives aux perquisitions sont donc relativement complexes.

2. Les dispositions du projet de loi

Afin d'améliorer les conditions de lutte contre la criminalité organisée, le projet de loi tend à étendre les possibilités de perquisitions pour les crimes et délits entrant dans le champ de l'article 706-73 nouveau du code de procédure pénale.

Le texte proposé pour l' article 706-89 du code de procédure pénale a pour objet de permettre, au cours de l'enquête de flagrance , sur autorisation du juge des libertés et de la détention, la conduite de perquisitions de nuit lorsque l'enquête concerne l'une des infractions mentionnées à l'article 706-73.

Le texte proposé pour l' article 706-90 du code de procédure pénale tend à permettre la conduite de perquisitions en enquête préliminaire sans l'assentiment de la personne concernée lorsque l'enquête concerne l'une des infractions mentionnées à l'article 706-73. Ces perquisitions pourraient se dérouler de nuit, à condition de ne pas concerner des locaux d'habitation.

Le texte proposé pour l' article 706-91 du code de procédure pénale a pour objet de permettre au juge d'instruction -donc dans le cadre d'une information judiciaire- d'autoriser des perquisitions de nuit , à condition qu'elles ne concernent pas des locaux d'habitation, lorsque l'instruction porte sur l'une des infractions mentionnées à l'article 706-73. En cas d'urgence, le juge d'instruction pourrait autoriser les officiers de police judiciaire à procéder à ces opérations dans des locaux d'habitation , à condition qu'il s'agisse d'un crime ou d'un délit flagrant ou qu'il existe un risque immédiat de disparition des preuves ou des indices matériels.

Le texte proposé pour l' article 706-92 du code de procédure pénale tend à définir les formes des décisions autorisant les perquisitions prévues par les nouveaux articles 706-89 à 706-91 du code de procédure pénale. A peine de nullité, les autorisations devraient être données pour des perquisitions déterminées et faire l'objet d'une ordonnance motivée, précisant la qualification de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être faites. L'ordonnance ne serait pas susceptible de recours et devrait être motivée par référence aux éléments de fait justifiant la nécessité des perquisitions.

En cas de perquisition de nuit autorisée dans des locaux d'habitation, l'ordonnance devrait comporter l'énoncé des conditions de droit et de fait constituant le fondement de cette décision par référence aux critères prévus pour justifier ce type de perquisitions.

Les conditions prévues sont semblables à celles mentionnées à l'article 76-1 du code de procédure pénale, qui prévoit la possibilité d'autoriser des perquisitions sans l'assentiment de la personne concernée lorsqu'une enquête préliminaire concerne certaines infractions à la législation sur les armes ou le trafic de stupéfiants. Toutefois, l'article 76-1 fait référence à une décision du juge des libertés et de la détention et non à une ordonnance motivée par référence aux éléments de fait justifiant la nécessité des opérations.

Le texte proposé pour l' article 706-93 du code de procédure pénale a pour objet de préciser explicitement que les perquisitions prévues par les articles 706-89 à 706-91 nouveaux du code de procédure pénale ne peuvent avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées dans la décision du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction.

En revanche, comme cela est déjà prévu par le code de procédure pénale, le fait que les perquisitions révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction ne constituerait pas une cause de nullité des procédures incidentes.

Le texte proposé pour l' article 706-94 du code de procédure pénale dispose que les règles relatives aux perquisitions posées par le présent projet de loi ne remettent pas en cause les dispositions spécifiques du code de procédure pénale concernant les perquisitions dans le cadre de la recherche et de la constatation d'actes de terrorisme ou de trafic de stupéfiants.

Enfin, dans un souci d'efficacité, le texte proposé pour l' article 706-95 du code de procédure pénale prévoit qu'au cours d'une enquête de flagrance ou d'une instruction portant sur une infraction mentionnée à l'article 706-73, la perquisition peut être faite, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction, en présence de deux témoins majeurs, lorsque la personne au domicile de laquelle est faite la perquisition est gardée à vue ou détenue dans un autre lieu et que son transport sur place paraît devoir être évité en raison des risques graves soit de troubles à l'ordre public ou d'évasion, soit de disparition des preuves pendant le temps nécessaire au transport.

La même règle serait applicable au cours de l'enquête préliminaire en cas de perquisition accomplie dans les conditions prévues à l'article 706-90 nouveau du code de procédure pénale. L'accord devrait alors être donné par le juge des libertés et de la détention.

3. Les propositions de votre commission

La mise en place d'un régime spécifique de perquisitions en matière de criminalité et de délinquance organisées apparaît tout à fait utile. Le législateur s'est déjà engagé dans cette voie en prévoyant des règles spécifiques de perquisitions pour certaines infractions telles que le terrorisme ou le trafic de stupéfiants.

Toutefois, les dispositions proposées, si elles étaient adoptées en l'état, auraient pour effet de rendre particulièrement complexes les règles applicables en matière de perquisitions. Certes, les nouveaux régimes dérogatoires proposés sont directement inspirés de ceux qui ont été précédemment mis en oeuvre pour quelques infractions. Ils ne sont cependant pas absolument identiques et viendraient se superposer aux autres régimes, de telle sorte que coexisteraient plus d'une dizaine d'hypothèses différentes en matière de perquisitions.

Votre commission vous propose, par sept amendements , présentés au présent article et à l'article 5 du projet de loi, de simplifier le dispositif proposé, afin d'éviter des confusions, qui pourraient être source d'erreurs de procédure.

A l'article 5, votre commission proposera de modifier le régime de droit commun des perquisitions en enquête préliminaire . Rappelons qu'actuellement, en principe, les perquisitions ne sont possibles au cours d'une enquête préliminaire qu'avec l'accord de l'intéressé. Dans ces conditions, il est fréquent qu'une instruction soit ouverte uniquement pour pouvoir opérer une perquisition sans le consentement de l'intéressé.

La loi n° 2001-1062 relative à la sécurité quotidienne a prévu la possibilité, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, de procéder à des perquisitions sans l'accord de l'intéressé au cours d'une enquête préliminaire lorsque celle-ci concerne le trafic de stupéfiants et les infractions à la législation sur les armes. La même possibilité avait déjà été ouverte auparavant par le législateur en matière de terrorisme.

Votre commission proposera de prévoir que, pour tous les délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement, une autorisation motivée du juge des libertés et de la détention saisi par requête motivée du procureur de la République pourra permettra de surmonter l'absence de consentement de la personne. Ainsi, les articles prévoyant la même possibilité en matière de terrorisme, de trafic de stupéfiants, d'infractions sur les armes ou de délinquance et de criminalité organisée n'auront plus de raison d'être .

Une telle proposition ne constitue en aucun cas un recul dans l'encadrement des perquisitions. Actuellement, le refus d'une personne de se soumettre à une perquisition est surmonté par l'ouverture d'une instruction. La solution proposée par votre commission, qui facilitera les perquisitions au cours des enquêtes préliminaires, offrira les mêmes garanties qu'au cours d'une instruction, une autorisation motivée du juge des libertés et de la détention étant nécessaire .

En ce qui concerne les perquisitions de nuit , votre commission propose de prévoir un régime unique pour l'ensemble des faits de criminalité et de délinquance organisées, y compris le terrorisme et le trafic de stupéfiants. Au cours de l'enquête de flagrance, les perquisitions de nuit seraient possibles dans tous les locaux, sur autorisation du juge des libertés et de la détention. Au cours de l'enquête préliminaire, les perquisitions de nuit ne seraient possibles, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, que dans les locaux ne servant pas à l'habitation.

Enfin, au cours de l'instruction, les perquisitions de nuit seraient possibles sur autorisation motivée du juge d'instruction :

- dans les locaux ne servant pas à l'habitation ;

- dans les locaux servant à l'habitation si on se trouve toujours dans le temps de la flagrance par rapport à la commission de l'infraction, qu'il y a un risque immédiat de disparition de preuves ou que des infractions similaires à celles dont le juge est saisi sont en train de se commettre dans les locaux.

Ces propositions rendent sans objet plusieurs dispositions du code de procédure pénale, qui peuvent ainsi être supprimées.

Les seules dispositions spécifiques à certaines infractions, appelées à subsister dans le système proposé par votre commission, sont le premier alinéa de l'article 706-28 du code de procédure pénale, qui permet des perquisitions dans des locaux où l'on use de stupéfiants ou où on se livre à un trafic de stupéfiants et l'article 706-35, qui prévoit, en matière de proxénétisme, la possibilité de procéder à des perquisitions dans certains lieux ouverts au public.

Section 5
Des interceptions de correspondances
émises par la voie des télécommunications
Article 706-96 du code de procédure pénale

Actuellement, les interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications ne sont possibles que dans le cadre d'une instruction , selon des modalités définies par les articles 100 à 100-7 du code de procédure pénale.

Les interceptions ne sont possibles, en matière criminelle et en matière correctionnelle, que si la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement. Elles sont ordonnées par le juge d'instruction et sont effectuées sous son autorité et son contrôle. La décision est prise pour une durée maximale de quatre mois. Elle ne peut être renouvelée que dans les mêmes conditions de forme et de durée.

Le texte proposé pour l'article 706-96 a pour objet de prévoir la possibilité de procéder à des interceptions de correspondances au cours de l'enquête . Il prévoit que, si les nécessités de l'enquête de flagrance ou de l'enquête préliminaire relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge des libertés et de la détention peut, à la requête du procureur de la République, autoriser l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications pour une durée maximale de quinze jours, renouvelable une fois dans les mêmes conditions de forme et de durée . Les opérations seraient faites sous le contrôle du juge des libertés et de la détention.

Un tel dispositif est particulièrement bienvenu. Dans certains cas, il peut apparaître nécessaire de procéder à des interceptions de correspondances sans qu'il soit cependant avéré que les faits sur lesquels porte l'enquête justifient l'ouverture d'une information. Le dispositif proposé, dont le champ d'application serait limité aux seules infractions relevant de l'article 706-73 du code de procédure pénale, c'est-à-dire aux infractions les plus graves parmi celles qui constituent la criminalité et la délinquance organisée, pourrait permettre de vérifier la pertinence de l'ouverture d'une information judiciaire. Au cours des déplacements et auditions, plusieurs interlocuteurs de votre rapporteur ont estimé que la durée proposée pour les interceptions était trop courte pour être utile.

Votre rapporteur estime au contraire que la durée proposée est particulièrement pertinente. Les interceptions de correspondances ne sont aujourd'hui possibles qu'au cours d'une instruction. Elles doivent, pour l'essentiel, demeurer l'apanage de l'instruction. La nouvelle procédure est précisément conçue pour éviter l'ouverture d'une information judiciaire qui s'avérerait inutile et en aucun cas pour concurrencer l'instruction.

Le texte proposé prévoit que l'autorisation d'interception, d'enregistrement et de transcription de correspondances devra être faite selon les modalités prévues par les articles 100-1 et 100-3 à 100-7 du code de procédure pénale, relatifs aux interceptions de correspondances au cours d'une instruction. Ces articles prévoient notamment que :

- la décision doit comporter tous les éléments d'identification de la liaison à intercepter, l'infraction qui motive le recours à l'interception ainsi que la durée de celle-ci ;

- le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui dresse procès-verbal de chacune des opérations d'interception et d'enregistrement ;

- le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui transcrit la correspondance utile à la manifestation de la vérité ; il en est dressé procès-verbal et la transcription est versée au dossier ;

- les enregistrements sont détruits à l'expiration du délai de prescription de l'action publique ;

- aucune interception ne peut avoir lieu sur la ligne d'un député ou d'un sénateur sans que le président de l'assemblée à laquelle il appartient en soit informé ;

- aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d'un avocat ou de son domicile sans que le bâtonnier en soit informé.

Le projet de loi initial renvoyait également, en ce qui concerne les modalités des interceptions de correspondances, à l'article 100 du code de procédure pénale, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé cette référence. Pourtant ce renvoi paraît tout à fait utile dès lors que l'article 100 énonce, dans son deuxième alinéa, que la décision d'interception est écrite, qu'elle n'a pas de caractère juridictionnel et qu'elle n'est susceptible d'aucun recours. Ces règles doivent pouvoir s'appliquer aux interceptions décidées au cours d'une enquête comme à celles prévues lors d'une instruction. Par un amendement , votre commission vous propose de rétablir le renvoi à l'article 100, tout en ne visant que le deuxième alinéa de cet article. Les dispositions du premier alinéa, qui prévoient notamment que les interceptions ne peuvent être faites que lorsque sont encourues des infractions punies de deux ans d'emprisonnement au moins ne sont pas pertinentes pour les interceptions prévues par le nouvel article 706-96. L'article 80-4 du code de procédure pénale, qui a prévu des interceptions dans le cadre de la recherche de personnes disparues, renvoie d'ailleurs au deuxième alinéa de l'article 100.

Le texte proposé pour l'article 706-96 prévoit logiquement que, pour l'application des dispositions des articles 100-3 à 100-5, les attributions confiées au juge d'instruction ou à l'officier de police judiciaire commis par lui sont exercées par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire requis par ce magistrat.

Le texte précise enfin que le juge des libertés et de la détention qui a autorisé l'interception est informé par le procureur de la République des actes accomplis par le procureur ou l'officier de police judiciaire. Le projet de loi initial prévoyait que l'information devait être donnée « sans délai », mais l'Assemblée nationale a prévu une information « dans les meilleurs délais ». Par un amendement , votre commission vous propose de rétablir la rédaction initiale, qui marque bien que le juge des libertés et de la détention chargé de contrôler le déroulement des interceptions, doit être informé aussitôt que possible. En tout état de cause, la formalité n'est pas prescrite à peine de nullité et une information tardive liée à des circonstances particulières ne saurait avoir pour conséquence l'annulation des opérations d'interception.

Section 6
Dispositions relatives à la sonorisation
de certains lieux ou véhicules
Articles 706-97 à 706-97-2 nouveaux du code de procédure pénale

Le projet de loi initial prévoyait, dans le texte proposé pour l'article 706-97 du code de procédure pénale, la possibilité de recourir à la vidéo-conférence pour les audiences ayant pour objet la prolongation des détentions provisoires ou l'examen de demandes de mise en liberté.

A l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, l'Assemblée nationale a supprimé ces dispositions - qu'elle a en partie reprises dans l'article 63 du projet de loi - pour les remplacer par une nouvelle section relative à la « sonorisation de certains lieux ou véhicules ».

Présentant ce dispositif lors des débats à l'Assemblée nationale, M. Jean-Luc Warsmann a notamment observé que « (...) la plupart des pays développés se sont dotés de ce type de moyens et que la France est régulièrement sollicitée par les services de pays voisins qui, par exemple, ont sonorisé des véhicules de trafiquants de drogue et se voient dans l'impossibilité de poursuivre l'enquête -ou alors de manière illégale- lorsque ces véhicules passent nos frontières » 10 ( * ) . Le texte adopté par l'Assemblée nationale dispose que lorsque les nécessités de l'instruction concernant l'une des infractions entrant dans le champ du nouvel article 706-73 l'exigent, le juge d'instruction peut prescrire la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, l'interception, l'enregistrement, y compris audiovisuel, et la transcription des paroles prononcées par eux-mêmes ou par plusieurs autres personnes à titre privé dans tout lieu ou véhicule public ou privé.

Le texte précise que les opérations sont effectuées sous l'autorité et le contrôle du juge d'instruction, que la décision d'interception est écrite et qu'elle n'est susceptible d'aucun recours. La décision serait prise pour une durée maximum de quatre mois et ne pourrait être renouvelée que dans les mêmes formes. Les opérations ne pourraient concerner les cabinets d'avocats, les locaux des entreprises de presse, le cabinet d'un médecin, d'un notaire, d'un avoué ou d'un huissier, le véhicule, le bureau ou le domicile d'un député ou d'un sénateur.

Ce dispositif peut susciter de légitimes interrogations. Ne risque-t-il pas de conduire à une atteinte à la vie privée disproportionnée par rapport aux besoins des informations judiciaires ? Dès lors cependant que ce type de dispositif est probablement déjà utilisé dans certaines circonstances, n'est-il pas préférable d'encadrer son utilisation ?

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, s'est ainsi exprimé sur cette question : « (...) l'Assemblée doit être bien consciente du caractère extrêmement intrusif de ce type de dispositif. Il s'agit de mettre en place dans des domiciles ou des bureaux, après s'y être introduit de manière subreptice, des moyens techniques dont l'existence n'est évidemment pas connue par les personnes. Nous discutons donc d'une mesure lourde de sens du point de vue des libertés publiques. En conséquence, je m'en remettrai dans l'immédiat à la sagesse de l'Assemblée, en espérant que notre réflexion se poursuivra au cours des navettes. Si le Gouvernement s'est volontairement abstenu de demander l'urgence sur ce texte, c'est précisément pour permettre une réflexion sereine sur des sujets aussi sensibles.

« (...) la plupart des grands pays démocratiques ont adopté -je le reconnais bien volontiers- ce type de dispositif. Je m'en suis entretenu avec mes collègues du G8 lors de la réunion qui a eu lieu il y a quelques jours à Paris. Effectivement, aussi bien la Grande-Bretagne que l'Allemagne ou les Etats-Unis ont mis en place de telles mesures dans leur législation. Cet argument va plutôt dans le sens de la proposition du rapporteur » 11 ( * ) .

Après réflexion, votre commission a estimé utile d'inscrire dans la loi et d'encadrer la pratique consistant à capter à leur insu l'image et la parole de personnes dans des lieux privés. Elle approuve les principes posés par l'Assemblée nationale, en particulier le cantonnement de cette technique à la procédure d'instruction. Cependant, le texte adopté par l'Assemblée nationale apparaît insuffisamment précis. En particulier, il n'évoque pas les conditions d'installation des dispositifs destinés à capter l'image et les paroles de personnes.

Par un amendement , votre commission vous propose une nouvelle rédaction pour la nouvelle section du chapitre du code de procédure pénale relatif à la criminalité et à la délinquance organisées. Cette section, qui s'intitulerait : « Des sonorisations et des fixations d'images de certains lieux ou véhicules » comporterait sept articles, énonçant les principes suivants :

- l'autorisation de sonorisation ou de captation d'images serait donnée par le juge d'instruction, par ordonnance motivée, après avis du procureur de la République ;

- en vue de mettre en place le dispositif technique, le juge d'instruction pourrait autoriser l'introduction dans un véhicule ou un lieu privé, y compris en dehors des heures pendant lesquelles peuvent se dérouler des perquisitions. Si la sonorisation ou la captation d'images concernait un lieu d'habitation et qu'il était nécessaire d'intervenir pendant la nuit, la décision serait prise par le juge des libertés et de la détention ;

- les personnes participant à ce type d'opération seraient tenues de respecter des obligations similaires à celles prévues en matière d'interceptions de correspondances par la voie des télécommunications : obligation de mentionner dans les décisions tous les éléments permettant d'identifier les véhicules ou les lieux visés, l'infraction qui motive le recours à ces mesures et la durée de celles-ci ; possibilité de requérir tout agent qualifié d'un service, d'une unité ou d'un organisme placé sous l'autorité ou la tutelle du ministre de l'intérieur ou du ministre de la défense ; établissement d'un procès-verbal des opérations de mise en place du dispositif technique et de captation d'images et de sons ; transcription ou description des images ou conversations enregistrées ; destruction des enregistrements à l'expiration du délai de prescription de l'action publique.

Il convient de noter que les enregistrements obtenus dans les conditions prévues par le présent projet de loi pourraient être utilisés pour l'administration de la preuve des infractions. En l'absence de toute base légale, une telle utilisation est aujourd'hui impossible.

Section 7
Des mesures conservatoires
Article 706-98 du code de procédure pénale

Bien souvent, dans les affaires de criminalité organisée, la durée des procédures permet aux personnes poursuivies d'organiser leur insolvabilité, de sorte que les condamnations pécuniaires sont difficilement exécutables.

Pour remédier à ce type de comportement, le législateur a déjà prévu la possibilité d'ordonner des mesures conservatoires sur les biens des personnes poursuivies. L'article 706-30 du code de procédure pénale prévoit ainsi la possibilité d'ordonner des mesures conservatoires sur les biens de la personne mise en examen en cas d'information ouverte pour trafic de stupéfiants. La loi n° 2003-299 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a prévu, à l'initiative du Sénat, la même possibilité en matière de proxénétisme (article 706-36-1 du code de procédure pénale).

Le texte proposé pour l'article 706-98 du code de procédure pénale a pour objet de permettre des mesures conservatoires pour l'ensemble des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73 et 706-74 nouveaux du code de procédure pénale.

En cas d'information ouverte pour l'une de ces infractions, afin de garantir le paiement des amendes encourues et, le cas échéant, l'exécution de la confiscation, le juge des libertés et de la détention, sur requête du procureur de la République, pourrait ordonner, aux frais avancés du Trésor et selon les modalités prévues par les procédures civiles d'exécution, des mesures conservatoires sur les biens meubles ou immeubles, divis ou indivis, de la personne mise en examen.

A l'initiative de M. Thierry Mariani, l'Assemblée nationale a prévu que les mesures conservatoires pourraient également garantir l'indemnisation des victimes.

Par ailleurs, le projet de loi initial précisait que les mesures conservatoires étaient prises « selon les modalités prévues par les articles 67 à 79 de la loi n° 91-150 du 3 juillet 1991 », mais l'Assemblée nationale a estimé préférable, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, de viser les procédures civiles d'exécution en général, afin d'éviter qu'une éventuelle modification de la loi de 1991 ne rende erronées les dispositions du nouvel article 706-98 du code de procédure pénale.

Conformément aux dispositions déjà prévues par le code de procédure pénale en matière de terrorisme, de trafic de stupéfiants et de proxénétisme, la condamnation vaudrait validation des saisies conservatoires et permettrait l'inscription définitive des sûretés. A l'inverse, la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement emporterait de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en serait de même en cas d'extinction de l'action publique et de l'action civile.

Le texte proposé précise in fine que, pour son application, le juge des libertés et de la détention est compétent sur l'ensemble du territoire national. Une telle solution est logique, dès lors que les biens des personnes mises en examen pour des infractions relevant de la criminalité ou de la délinquance organisées ne sont pas nécessairement localisés dans le ressort du tribunal saisi de l'affaire.

Section 8
Dispositions communes
Article 706-99 nouveau du code de procédure pénale
Changement de qualification d'une infraction

Le texte proposé pour l'article 706-99 du code de procédure pénale a pour objet de prévoir que le fait qu'à l'issue de l'enquête ou de l'information ou devant la juridiction de jugement la circonstance aggravante de bande organisée ne soit pas retenue ne constitue pas une cause de nullité des actes régulièrement accomplis en application des dispositions du code de procédure pénale créées par le présent projet de loi.

De fait, il n'est pas rare que des infractions fassent l'objet d'un changement de qualification au cours de la procédure, compte tenu de l'évolution des investigations. Il serait particulièrement préjudiciable à l'efficacité de la procédure pénale qu'un changement de qualification entraîne la nullité des actes régulièrement accomplis sur le fondement de la qualification erronée.

Il reste que les magistrats du parquet et les magistrats instructeurs devront être particulièrement vigilants dans le choix de retenir ou non la circonstance aggravante de bande organisée, compte tenu des conséquences très importantes qu'entraînera le choix de cette qualification en termes de procédure.

Article 706-100 du code de procédure pénale
Possibilité pour une personne placée en garde à vue d'interroger le procureur de la République sur les suites données à l'enquête

Le texte proposé pour l'article 706-100 a pour objet de renforcer les droits de la défense au cours des enquêtes portant sur des infractions entrant dans le champ de la criminalité ou de la délinquance organisées pour tenir compte de l'important renforcement des instruments d'investigation prévu par le présent projet de loi.

Le texte initial proposé pour l'article 706-100 disposait que lorsqu'il a été fait application des articles 706-80 à 706-96 nouveaux du code de procédure pénale, le procureur de la République, interrogé en application des articles 77-2 et 77-3 par une personne ayant été placée en garde à vue six mois auparavant doit, lorsqu'il est décidé de poursuivre l'enquête préliminaire et dans les deux mois suivant la réception de la demande, informer le demandeur de la décision.

Rappelons que l'article 77-2 du code de procédure pénale permet à toute personne placée en garde à vue au cours d'une enquête préliminaire ou de flagrance qui, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la fin de la garde à vue, n'a pas fait l'objet de poursuites, peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s'est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d'être donnée à la procédure.

L'article 77-3 prévoit, quant à lui, que lorsque l'enquête n'a pas été menée sous la direction du procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la garde à vue a été réalisée, celui-ci adresse sans délai la demande au procureur de la République qui dirige l'enquête.

Le texte initial proposé pour l'article 706-100 prévoyait également qu'en cas de poursuite de l'enquête préliminaire, la personne ayant été gardée à vue pourrait demander qu'un avocat désigné par elle ou commis d'office à sa demande par le bâtonnier puisse consulter le dossier de la procédure, celui-ci devant alors être mis à la disposition de l'avocat par le procureur de la République dans un délai de quinze jours à compter de la demande.

L'objectif de ce texte était donc de prévoir des garanties accrues pour les personnes en cas d'utilisation des moyens renforcés d'enquête créés par le projet de loi.

L'Assemblée nationale a profondément modifié le dispositif proposé. Le rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, s'est en effet interrogé sur l'opportunité de permettre à l'avocat d'une personne gardée à vue d'accéder au dossier de la procédure dès lors que le procureur décidait de poursuivre l'enquête préliminaire.

L'Assemblée nationale a donc décidé d'encadrer davantage le dispositif proposé. Elle a en conséquence :

- supprimé le renvoi aux articles 77-2 et 77-3 du code de procédure pénale pour prévoir un dispositif entièrement autonome ;

- prévu que la personne gardée à vue ne pourrait demander qu'un avocat ait accès au dossier de la procédure que dans l'hypothèse où le procureur déciderait la poursuite de l'enquête préliminaire et envisagerait en outre de procéder à une nouvelle audition de la personne au cours de cette enquête ;

- prévu que le procureur devrait informer la personne, dans les deux mois de sa demande, d'un éventuel classement de l'affaire ;

- prévu enfin que, dans les autres cas, en particulier en cas de poursuite de l'enquête préliminaire sans qu'une nouvelle audition de la personne soit envisagée, le procureur n'était pas tenu de répondre à la personne.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à prévoir que lorsque l'enquête n'a pas été menée sous la direction du procureur de la République du tribunal dans le ressort duquel s'est déroulée la garde à vue, celui-ci transmet sans délai la demande au procureur qui dirige l'enquête. Cette précision apparaît nécessaire dès lors que le dispositif proposé ne renvoie plus aux articles 77-2 et 77-3 du code de procédure pénale, contrairement au dispositif du projet de loi initial.

Votre commission vous soumet également un amendement de précision rédactionnelle.

Article 706-101 du code de procédure pénale
Droits de la défense en cas de recours à la
procédure de comparution immédiate

Dans la même logique que le texte proposé pour l'article 706-100, le texte proposé pour l'article 706-101 a pour objet de renforcer les droits de la défense lorsqu'une personne est déférée devant le procureur de la République après qu'il a été fait application des articles 706-80 à 706-96 nouveaux du code de procédure pénale.

Actuellement, en application de l'article 393 du code de procédure pénale, lorsqu'en matière correctionnelle une personne est déférée devant le procureur de la République à l'issue d'une garde à vue, celui-ci lui fait connaître les faits qui lui sont reprochés et, après avoir recueilli ses déclarations si elle en fait la demande, peut, s'il estime qu'une information n'est pas nécessaire, soit inviter la personne à comparaître dans un délai compris entre dix jours et deux mois, soit traduire le prévenu sur le champ devant le tribunal correctionnel (procédure de comparution immédiate).

Le procureur doit alors informer la personne qu'elle a droit à l'assistance d'un avocat de son choix ou commis d'office, lequel peut consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec le prévenu.

Le texte proposé pour l'article 706-101 prévoit que lorsqu'il a été fait application des articles 706-80 à 706-96 nouveaux du code de procédure pénale, la personne déférée devant le procureur a droit à la désignation d'un avocat avant sa comparution devant le procureur. L'avocat pourrait consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec la personne, qui comparaîtrait en présence de son avocat devant le procureur de la République. Ce dernier pourrait alors, après avoir entendu les déclarations de la personne et les observations de son avocat, soit requérir l'ouverture d'une information, soit convoquer la personne dans un délai de dix jours à deux mois, soit encore traduire sur-le-champ le prévenu devant le tribunal correctionnel.

Le texte proposé prévoit que si le procureur de la République saisit le tribunal correctionnel selon la procédure de comparution immédiate, les dispositions du code de procédure pénale permettant au prévenu de demander le renvoi de l'affaire à une audience devant avoir lieu dans un délai de deux à quatre mois sont applicables, quelle que soit la peine encourue.

Rappelons qu'en principe, aux termes de l'article 397-1 du code de procédure pénale, le prévenu ne peut demander le renvoi de l'affaire à une audience devant intervenir dans un délai compris entre deux et quatre mois que lorsque la peine encourue est supérieure à sept ans d'emprisonnement.

Le dispositif proposé paraît tout à fait justifié, même s'il devrait être rarement utilisé. Les dispositions des articles 706-80 à 706-96 nouveaux ont pour objet de renforcer la lutte contre la délinquance et la criminalité organisées. Compte tenu de la complexité des affaires en cause, le recours à la procédure de comparution immédiate devrait demeurer limité. Il paraît cependant bienvenu que, dans une telle hypothèse, la personne poursuivie puisse comparaître devant le procureur assistée de son avocat et bénéficier d'un délai conséquent pour préparer sa défense.

*

Le paragraphe II de l'article premier, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Thierry Mariani, tend à insérer un titre XXV dans le livre IV du code de procédure pénale, intitulé « Dispositions relatives à la répartition du produit des amendes et confiscations ». Ce nouveau titre comporterait un article unique numéroté 706-101-1.

Article 706-101-1 du code de procédure pénale
Rémunération des indicateurs

Le texte proposé pour l'article 706-101-1 du code de procédure pénale prévoit que la part attribuée au Trésor dans les produits d'amendes et de confiscations prononcées par les juridictions pénales est de 40 % du produit net des saisies. Il précise que les conditions dans lesquelles le surplus est réparti sont déterminées par arrêtés conjoints du ministre de la justice, du ministre chargé de l'intérieur et du ministre de l'économie et des finances. Ce dispositif très général a en fait pour objet de faciliter la rémunération des indicateurs de police, dont les informations sont absolument indispensables au déroulement de certaines enquêtes.

Présentant son amendement à l'Assemblée nationale, M. Thierry Mariani a notamment formulé les observations suivantes :

« En matière de lutte contre la délinquance et la criminalité organisée, le renseignement humain est indispensable et il serait hypocrite de continuer à le nier plus longtemps. (...) ».

« Dans la pratique, la rémunération des indicateurs a déjà lieu. En effet, il existe aujourd'hui, dans certains services de police, la possibilité de rémunérer les informations sur la base des fonds spéciaux. Toutefois, les montants versés, nous le savons tous, sont dérisoires -au mieux quelques centaines d'euros pour le démantèlement de trafics internationaux de stupéfiants ayant permis la saisie de plusieurs centaines de kilos de drogue et d'importantes sommes d'argent.

« C'est pour permettre aux différents services de police et de gendarmerie appelés à lutter quotidiennement contre le trafic de stupéfiants et les autres formes de criminalité organisée d'avoir des outils adaptés que je vous propose aujourd'hui cet amendement (...) ».

1. Le droit existant

Comme l'indiquait M. Thierry Mariani à l'Assemblée nationale, les services de police et de gendarmerie rémunèrent d'ores et déjà certaines personnes fournissant des informations utiles à l'enquête sans que cette pratique repose sur une quelconque base légale.

* La rémunération des « aviseurs » des douanes dispose en revanche d'une base légale. L'article 391 du code des douanes dispose en effet que la part attribuée au Trésor dans les produits d'amendes et de confiscations résultant d'affaires suivies à la requête de l'administration des douanes est de 40 % du produit net des saisies. Un arrêté du ministre des finances détermine les conditions dans lesquelles le surplus est réparti.

Un arrêté du 18 avril 1957 est venu préciser les conditions d'application de cet article.

Aux termes de cet arrêté, le produit brut des amendes et confiscations pour infractions aux lois douanières supporte d'abord les prélèvements liés aux droits et taxes d'entrée afférents aux marchandises étrangères saisies ainsi qu'aux frais non recouvrés sur les prévenus.

Une fois ces prélèvements effectués, toute personne ayant fourni des renseignements aux services des douanes reçoit une part du produit disponible, susceptible d'atteindre le tiers du produit disponible de l'affaire considérée dans le cas où ses renseignements ou avis ont amené directement la découverte de la fraude.

La rétribution de l'aviseur ne peut excéder 3.100 euros, sauf décision contraire du directeur général des douanes.

Une fois ce prélèvement effectué, le produit net de chaque saisie est affecté :

- au versement d'une part de 40 % au Trésor ;

- au paiement d'une part de 10 % à l'oeuvre des orphelins des douanes ;

- au paiement d'une part de 10 % aux sociétés de secours mutuels intéressant le personnel des douanes ;

- au paiement d'une part, qui peut atteindre 40 %, sous forme de primes au personnel des douanes ayant opéré la saisie et réalisé l'intervention.

* Un autre système est censé permettre de rémunérer les indicateurs dans le domaine spécifique du trafic de stupéfiants. En 1993, à la demande du ministère de l'Intérieur, le comité interministériel de lutte contre la drogue et la toxicomanie a décidé la création d'un fonds de concours destiné à recueillir le produit des biens confisqués aux trafiquants.

Le décret n° 95-322 du 17 mars 1995 a autorisé le rattachement par voie de fonds de concours du produit de cession des biens confisqués dans le cadre de la lutte contre les produits stupéfiants. Un arrêté du 23 août 1995 est venu fixer les modalités pratiques de ce rattachement.

En pratique, des sommes dérisoires ont été affectées à ce fond, sans rapport aucun avec le produit de cession des biens confisqués dans le cadre de la lutte contre les produits stupéfiants.

L'une des raisons de l'échec de ce fonds est l'impossibilité d'y affecter le produit de la vente des biens confisqués dans le cadre d'une infraction douanière liée au trafic de stupéfiants, ce produit étant réparti conformément aux dispositions de l'arrêté du 18 avril 1957.

Une circulaire du 15 février 2002 adressée par le Garde des Sceaux aux procureurs généraux a tenté de dynamiser le fonds de concours, notamment en formulant des recommandations destinées à « garantir la traçabilité des biens saisis ».

De fait, l'une des difficultés du système du fonds de concours est de parvenir à identifier certaines recettes spécifiques censées alimenter le fonds.

* Il convient enfin de signaler que le chapitre 34-41 du budget du ministère de l'Intérieur, qui recense l'ensemble des moyens affectés au fonctionnement de la police nationale, contient une ligne budgétaire consacrée aux « enquêtes et surveillances », dotée en loi de finances initiale pour 2003 de 10,61 millions d'euros. Rien n'interdirait la rémunération d'indicateurs de police sur la base de cette ligne budgétaire, même si les montants concernés paraissent aujourd'hui insuffisants.

2. Les propositions de votre commission

L'amendement adopté par l'Assemblée nationale s'inspire fortement des règles permettant aujourd'hui la rémunération des aviseurs des douanes. Il prévoit seulement que 60 % du produit des amendes et confiscations prononcées par les juridictions pénales feront l'objet d'une répartition par arrêté conjoint du ministre des finances, du ministre de la justice et du ministre de l'Intérieur. Aucune clé de répartition ne figure dans le texte de même qu'aucune référence aux indicateurs de police.

Si cet amendement a permis de mettre en évidence le caractère peu satisfaisant du droit actuel, qui ignore purement et simplement les indicateurs, alors même que ceux-ci font de fait l'objet de rémunérations, il présente néanmoins certains inconvénients sérieux :

- le système proposé constitue une entorse au principe de la non-affectation des recettes aux dépenses posé par l'article 18 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances. Sur ce point, votre commission sera particulièrement attentive aux observations formulées par la commission des finances du Sénat, qui s'est saisie pour avis du présent projet de loi ;

- les montants concernés par le texte de l'amendement paraissent particulièrement élevés s'ils doivent avoir pour seul objet de rémunérer les indicateurs de police. A titre d'indication, le produit des amendes recouvrées par les comptables du Trésor s'est élevé à 346,7 millions d'euros en 2002 ;

- le texte proposé ne s'appliquerait pas à la gendarmerie, dès lors que le ministre de la défense n'est pas mentionné parmi les signataires de l'arrêté.

Dans ces conditions, votre commission propose de retenir un système différent.

Elle propose de prévoir explicitement dans la loi la possibilité de rémunérer des personnes fournissant à la police, à la gendarmerie ou à la douane des renseignements permettant de découvrir des crimes et délits ou d'identifier les auteurs de tels crimes et délits.

En revanche, la création d'un support budgétaire pour la rémunération des indicateurs ne relève pas du présent projet de loi, mais d'une loi de finances. Votre commission considère que la commission des Finances de notre assemblée est la mieux à même d'apprécier s'il est souhaitable de prévoir une affectation de recettes ou si la création d'un chapitre budgétaire de droit commun paraît suffisante pour parvenir au résultat recherché.

Votre commission estime par ailleurs que la disposition relative à la rémunération des indicateurs n'a pas sa place dans l'article premier du projet de loi, relatif à la définition de la criminalité organisée et aux instruments procéduraux permettant de lutter contre cette criminalité, ni même dans le code de procédure pénale, mais bien plutôt dans la loi du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation pour la sécurité.

Par un amendement , elle vous propose la suppression du texte proposé pour l'article 706-101-1 du code de procédure pénale et en conséquence du paragraphe II du présent article. Le dispositif proposé sera repris dans un article additionnel après l'article premier.

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier ainsi modifié .

Article additionnel
Rémunération des indicateurs

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article premier pour prévoir dans la loi n°95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation pour la sécurité la possibilité de rémunérer les personnes fournissant des renseignements aux services de police, de gendarmerie ou des douanes conformément au dispositif qui a été présenté à l'article premier.

Article 1er bis
(art. 77-2 du code de procédure pénale)
Coordination

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a pour objet de compléter l'article 77-2 du code de procédure pénale pour prévoir que ses dispositions ne s'appliquent pas aux crimes et délits entrant dans le champ de l'article 706-73 nouveau du code de procédure pénale.

Rappelons que l'article 77-2 permet à une personne placée en garde à vue et qui n'a fait l'objet d'aucune poursuite ni d'un classement sans suite d'interroger le procureur de la République six mois après la garde à vue sur les suites données ou susceptibles d'être données à la procédure.

Dès lors que l'article premier du présent projet de loi prévoit un mécanisme spécifique d'interrogation du procureur de la République lorsqu'une personne a été placée en garde à vue dans le cadre d'une enquête au cours de laquelle ont été utilisés les nouveaux instruments de lutte contre la criminalité organisée, il est logique que le dispositif de droit commun ne s'applique pas.

Pour autant, l'intérêt du présent article est très limité, dans la mesure où l'article 77-2 ne prévoit aucune obligation pour le procureur de la République de répondre à la demande de la personne placée en garde à vue, contrairement au dispositif proposé à l'article premier du projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 1 er bis sans modification .

Article 1er ter
(art. 100-7 du code de procédure pénale)
Interceptions de correspondances sur la ligne d'un magistrat

Dans sa rédaction actuelle, l'article 100-7 du code de procédure pénale prévoit qu'aucune interception de correspondance ne peut avoir lieu sur la ligne d'un député ou d'un sénateur sans que le président de l'assemblée à laquelle il appartient en soit informé par le juge d'instruction.

De même, aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d'un avocat ou de son domicile sans que le bâtonnier en soit informé par le juge d'instruction.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Christian Estrosi a pour objet de compléter l'article 100-7 pour prévoit qu'aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d'un magistrat ou de son domicile sans que le premier président ou le procureur général de la juridiction où il réside en soit informé.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 1 er ter sans modification .

SECTION 2
Dispositions relatives à la répression de la délinquance
et de la criminalité organisées
Article 2
(art. 221-4, 221-5-1, 222-4, 222-49, 227-22, 227-23, 312-7-1 nouveau, 313-2, 421-5, 434-30, 442-1, 442-2, 450-5 nouveau du code pénal,
art. 3 de la loi du 19 juin 1871, art. 24, 26 et 31 du décret du 18 avril 1939,
art. 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970,
art. 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972,
art. 4 de la loi du 2 juin 1891,
art. 1er et 2 de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983)
Élargissement de la circonstance aggravante de bande organisée et de la peine complémentaire de confiscation des biens - renforcement de la répression du faux monnayage - dispositions diverses

Le présent article tend à modifier de nombreuses dispositions de droit pénal, afin notamment d'élargir le champ d'application de la circonstance aggravante de bande organisée et d'aggraver les peines encourues pour certaines infractions.

Le principal objet de l'article 2 est d'élargir la liste des infractions pour lesquelles la circonstance de bande organisée est prévue .

Comme votre rapporteur l'a indiqué à l'article 1 er , le projet de loi tend à faire de cette circonstance aggravante le critère essentiel de définition de la criminalité et de la délinquance organisées.

Le présent article tend à prévoir la circonstance aggravante de bande organisée pour les infractions suivantes prévues par le code pénal :

- meurtre ( paragraphe I du présent article, article 221-4 du code pénal). Votre commission vous soumet un amendement corrigeant une erreur matérielle ;

- tortures et actes de barbarie ( paragraphe III du présent article; article 222-3 du code pénal) ;

- corruption de mineurs ( paragraphe V du présent article; article 227-22 du code pénal) ;

- diffusion, enregistrement, transmission de l'image à caractère pornographique d'un mineur ( paragraphe VI du présent article; article 227-23 du code pénal) ;

- escroquerie ( paragraphe VII du présent article; article 313-2 du code pénal). En cette matière, la circonstance aggravante de bande organisée est déjà prévue, mais n'est punie que de sept ans d'emprisonnement. Le présent article tend à porter cette peine à dix ans d'emprisonnement.

Les paragraphe XIII à XVIII tendent à prévoir la circonstance de bande organisée et à la punir de peines très lourdes (dix ans d'emprisonnement et 500.000 euros d'amende) pour plusieurs infractions en matière d'armes et de substances dangereuses :

- la fabrication ou la détention, sans motifs légitimes, de machines ou engins meurtriers ou incendiaires agissant par explosion ou autrement, réprimées par l'article 3 de la loi du 18 juin 1871 ;

- la fabrication, le commerce, le stockage, l'importation ou la tentative d'importation, sans autorisation régulière, des matériels de guerre prohibés prévus par les articles 24, 26 et 31 du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

- la vente, la production, l'exportation ou l'importation de poudres ou substances explosives, dont la liste est prévue par décret, réprimées par les dispositions de l'article 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et des substances explosives ;

- la mise au point, la fabrication, la détention, le stockage, la cession des agents microbiologiques et des toxines biologiques, en quantités non destinées à des fins prophylactiques, de protection ou à d'autres fins pacifiques, réprimés par les dispositions de l'article 4 de la loi n°72-467 du 9 juin 1972 interdisant la mise au point d'armes biologiques.

Enfin, les paragraphes XIX à XXI , insérés dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tendent à prévoir la circonstance aggravante de bande organisée et la peine de sept ans d'emprisonnement et 100.000 euros d'amende pour plusieurs infractions au régime des jeux :

- le fait d'offrir de recevoir ou de recevoir des paris sur les courses de chevaux, soit directement, soit par intermédiaire, réprimé par l'article 4 de la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux ;

- le fait de participer, y compris en tant que banquier, à la tenue d'une maison de jeux de hasard où le public est librement admis, réprimé par l'article 1er de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard ;

- l'importation ou la fabrication de tout appareil dont le fonctionnement repose sur le hasard et qui permet de procurer, moyennant argent, un avantage direct ou indirect de quelque nature que ce soit, réprimée par l'article 2 de la même loi.

Par trois amendements , votre commission vous propose d'aggraver les peines encourues pour les infractions qui viennent d'être énumérées lorsqu'elles ne sont accompagnées d'aucune circonstance aggravante. Ces infractions, aujourd'hui punies de deux ans d'emprisonnement, seraient désormais punies de trois ans d'emprisonnement. Au cours de ses auditions et déplacements, votre rapporteur a constaté que les infractions à la réglementation sur les jeux semblaient prendre une importance grandissante dans notre pays. Les peines proposées permettront de recourir à la détention provisoire lorsque celle-ci s'avère indispensable.

Le paragraphe II tend à faire de l'actuel article 221-5-1 du code pénal, qui prévoit la responsabilité des personnes morales en matière d'atteintes volontaires à la vie, un article 221-5-2 et à incriminer, à l'article 221-5-1 le fait de faire à une personne des offres ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques afin qu'elle commette un assassinat ou un empoisonnement lorsque ce crime n'a été ni tenté ni commis. La nouvelle infraction serait punie de dix ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende. Notre droit réprime aujourd'hui la tentative de commettre un crime. Toutefois, le fait de passer un « contrat » pour faire assassiner une personne ne constitue pas une tentative au sens du code pénal, dès lors que la tentative doit être manifestée par un commencement d'exécution. Si la personne n'accomplit pas l'acte pour lequel elle est engagée, le commanditaire ne peut être poursuivi. Le présent paragraphe a pour objet de combler ce vide juridique.

Le paragraphe VI bis , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des lois, tend à insérer dans le code pénal un article 312-7-1 punissant de dix ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende le fait de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à leur train de vie tout en étant en relations habituelles avec des personnes ayant commis des extorsions aggravées ou le fait de faciliter la justification de ressources fictives pour ces mêmes personnes.

Le paragraphe VII tend à aggraver certaines peines en matière de terrorisme. Dans sa rédaction actuelle, l'article 421-5 du code pénal punit de dix ans d'emprisonnement et de 225.000 euros d'amende le fait de participer à un groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un acte de terrorisme. Le présent paragraphe tend à punir de la réclusion criminelle à perpétuité le fait de diriger un tel groupement ou une telle entente.

Les paragraphes IV et XII ont pour objet d'élargir le champ des infractions pour lesquelles la peine complémentaire de confiscation des biens peut être prononcée.

Cette peine pourrait désormais être appliquée aux personnes condamnées pour avoir été en relations habituelles avec des individus se livrant au trafic de stupéfiants sans être en mesure de justifier de ressources correspondant à leur train de vie (article 222-49 du code pénal).

La même peine pourrait être appliquée aux personnes physiques et morales condamnées soit pour association de malfaiteurs en vue de la préparation de crimes ou de délits punis de dix ans d'emprisonnement, soit pour avoir été en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes participant à une association de malfaiteurs sans être en mesure de justifier de ressources correspondant à leur train de vie (article 450-5 nouveau du code pénal).

Les paragraphes X et XI ont pour objet de transposer en droit interne l'article 4 de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 29 mai 2000 visant à renforcer par des sanctions pénales et autres la protection contre le faux monnayage en vue de la mise en circulation de l'euro. Cet article prévoit tout d'abord que chaque Etat membre doit prendre les mesures nécessaires pour s'assurer qu'est pénalement puni le fait de : fabriquer frauduleusement ou de mettre en circulation frauduleusement de la monnaie ; d'importer, d'exporter, de transporter ou de recevoir, ou de se procurer de la fausse monnaie ; de fabriquer, recevoir ou se procurer les instruments ou les programmes destinés à fabriquer de la fausse monnaie ou les hologrammes servant à protéger la monnaie contre la falsification. Il précise en outre que les Etats membres doivent également réprimer des agissements de cette nature « lorsqu'il s'agit des billets de banque ou des pièces de monnaie fabriqués en utilisant des installations ou du matériels légaux, en violation des droits ou des conditions en vertu desquels les autorités compétentes peuvent mettre de la monnaie en circulation, et sans l'accord de ces autorités. »

Dans ces conditions, le paragraphe X tend à compléter l'article 442-1 du code pénal, qui punit de trente ans de réclusion criminelle et de 450.000 euros d'amende la contrefaçon ou la falsification des pièces de monnaie ou des billets de banque ayant cours légal en France ou émis par les institutions étrangères ou internationales habilitées à cette fin, pour punir des mêmes peines la fabrication des pièces de monnaie et des billets de banque réalisée à l'aide d'installations ou de matériels autorisés destinés à cette fin, lorsqu'elle est effectuée en violation des conditions fixées par les institutions émettrices et sans leur accord.

Le paragraphe XI tend, pour sa part, à modifier l'article 442-2 du code pénal, qui incrimine le transport, la mise en circulation ou la détention en vue de la mise en circulation, des signes monétaires contrefaits ou falsifiés, pour sanctionner également ces faits lorsqu'ils concernent de la monnaie fabriquée à l'aide d'installation ou de matériels autorisés, en violation des conditions fixées par les institutions habilitées à émettre des signes monétaires et sans l'accord de ces institutions.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié .

Article 2 bis
(art. 322-6-1 nouveau du code de procédure pénale)
Diffusion de procédés permettant la fabrication d'engins de destruction

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois a pour objet d'insérer un article 322-6-1 dans le code pénal pour punir d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende le fait de diffuser par tout moyen, sauf à destination des professionnels, des procédés permettant la fabrication d'engins de destruction élaborés à partir de poudre ou de substances explosives, de matières nucléaires, biologiques ou chimiques, ou à partir de tout autre produit destiné à l'usage domestique, industriel ou agricole.

Les peines seraient portées à trois ans d'emprisonnement et à 45.000 euros d'amende en cas d'utilisation, pour la diffusion des procédés, d'un réseau de télécommunication à destination d'un public non déterminé.

De fait, il semble qu'il soit particulièrement aisé d'accéder sur Internet à des informations permettant la fabrication d'engins de destruction. Même s'il est souvent très difficile de parvenir à appréhender les personnes mettant en circulation ces informations, il paraît tout à fait nécessaire de sanctionner pénalement de tels comportements.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 bis sans modification .

Article 2 ter
(art. 421-2 du code pénal)
Acte de terrorisme consistant à introduire une substance toxique
dans les aliments ou la chaîne alimentaire

Dans sa rédaction actuelle, l'article 421-2 du code pénal dispose que constitue un acte de terrorisme, lorsqu'il est intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, le fait d'introduire dans l'atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance de nature à mettre en péril la santé de l'homme ou des animaux ou le milieu naturel.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter cet article, afin que constitue également un acte de terrorisme le fait d'introduire dans les aliments ou les composants alimentaires une substance toxique lorsque cet acte est en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ter sans modification .

Article 3
(art. 132-78, 221-5-3, 222-6-2 nouveaux, 222-43, 222-43-1 nouveau, 224-5-1, 224-8-1, 225-4-9, 225-11-1, 311-9-1, 312-6-1 nouveaux du code pénal,
art. 3-1 nouveau de la loi du 19 juin 1871, art. 35-1
nouveau du décret du 18 avril 1939,
art. 6-1 nouveau de la loi du 3 juillet 1970,
art. 4-1 nouveau de la loi du 9 juin 1972)
Exemptions ou réductions de peine pour les auteurs ou complices d'infractions apportant leur concours à la justice

« Certains tribunaux offrent l'impunité à celui qui a participé à un forfait, si grave soit-il, à condition qu'il dénonce ses complices. Semblable expédient a ses inconvénients et ses avantages. Le principal inconvénient est d'autoriser officiellement la trahison, détestable même entre les scélérats ; les crimes courageux sont moins funestes à une nation que les crimes lâches, parce que le courage n'est pas fréquent, et qu'il n'attend qu'une force bienfaisante qui le dirige et le fasse concourir au bien général, tandis que la lâcheté est beaucoup plus répandue et contagieuse et qu'elle puise sans cesse en elle-même de nouvelles forces. En outre, le tribunal, en prenant cette mesure, laisse voir ses propres incertitudes et la faiblesse de la loi, réduite à implorer l'aide de ceux qui l'ont violée. D'autre part, les avantages de ladite mesure sont d'abord d'empêcher des forfaits considérables et de rassurer le peuple qui s'inquiète devant les effets visibles de certains délits dont les auteurs restent inconnus. De plus, elle montre que celui qui ne respecte pas les conventions publiques que sont les lois ne respecte pas davantage les contrats privés. Il me semble qu'une loi générale promettant l'impunité au complice qui révèle un délit serait préférable à une décision spéciale prise dans un cas particulier, car on éviterait que les complices s'entendent entre eux, chacun craignant d'être seul exposé au danger. Enfin, le tribunal ne pousserait pas les scélérats à s'enhardir en voyant que dans certains cas on a besoin de leur concours. »

Cesare Beccaria

Des délits et des peines

(1764)

L'introduction dans notre droit des dispositions relatives aux « repentis » est l'une des évolutions les plus commentées du présent projet de loi. Le terme de « repentis » est à vrai dire impropre. Il est directement inspiré du terme italien employé pour évoquer les terroristes ayant renoncé à la violence. La législation italienne utilise cependant le terme de « collaborateurs de justice » pour désigner ceux qui, ayant commis des infractions, donnent des informations aux autorités judiciaires permettant d'identifier les autres auteurs ou complices.

Avant de présenter les dispositions du présent article, il convient de rappeler brièvement les caractéristiques principales des systèmes italien et américain, qui sont incontestablement les plus élaborés en cette matière 12 ( * ) . On trouvera en annexe au présent rapport une étude de législation comparée présentant les législations de plusieurs pays relatives aux collaborateurs de justice.

1. Le système italien

a) Champ d'application

Les premières mesures en faveur des repentis résultent d'un décret-loi de mars 1978, qui a modifié le code pénal pour prévoir des exemptions ou des réductions de peine en faveur des auteurs d'enlèvements acceptant de coopérer avec la justice. Un décret-loi de 1979 a offert d'importantes réductions de peine aux terroristes acceptant de fournir à la justice ou à la police des informations sur leur organisation. Progressivement, le champ d'application des dispositions permettant d'obtenir des réductions de peines a été étendu au trafic de stupéfiants puis à toutes les infractions relevant de l'association mafieuse.

b) Les avantages accordés aux « collaborateurs de justice »

En règle générale, la collaboration des accusés avec la justice ou la police entraîne une réduction de peine comprise entre le tiers et la moitié. Tel est notamment le cas en matière d'appartenance à une association mafieuse.

La réduction est comprise entre la moitié et les deux tiers en matière de trafic de stupéfiants.

Lorsque la peine applicable est la réclusion à perpétuité, elle est remplacée par une peine de durée limitée. Ainsi, dans le cadre de la criminalité de type mafieux, la réclusion à perpétuité est remplacée par la réclusion de douze à vingt ans.

L'impunité a été prévue dans certains cas, notamment pour les auteurs de crimes et délits contre l'Etat qui dissolvaient l'organisation, agissaient de façon à permettre sa dissolution, fournissaient des informations sur sa structure ou son organisation ou empêchaient la réalisation d'infractions constituant l'un de ses objectifs.

Les « collaborateurs de justice » peuvent bénéficier d'un aménagement du régime pénitentiaire. Ces dispositions sont réservées aux personnes condamnées pour terrorisme, association mafieuse, trafic de stupéfiants ou enlèvement crapuleux, dans la mesure où elles ont pleinement collaboré avec la justice, y compris après leur condamnation. Après avoir purgé au moins le quart de leur peine (ou dix ans si elles ont été condamnées à perpétuité), elles peuvent prétendre à des permissions, à un régime d'assignation à résidence, de libération conditionnelle ou de semi-liberté.

c) Les mesures de protection

Les mesures de protection des repentis ont été définies par un décret-loi du 15 janvier 1991, modifié par une loi de 2001, destinée à prendre en compte l'expérience acquise en cette matière.

La loi de 2001 a conduit à opérer une distinction entre les « collaborateurs de justice » et les témoins de justice, ces derniers dénonçant des faits auxquels ils n'ont pas participé. Pour les témoins, une véritable logique de compensation a été mise en oeuvre, pour permettre à toute personne contrainte de modifier son mode de vie pour délivrer des informations, puisse conserver le même niveau de vie.

Le bénéfice des mesures de protection est réservé aux seuls « collaborateurs de justice » qui remplissent les conditions suivantes :

- ils ont été accusés ou condamnés pour terrorisme, association mafieuse, trafic de stupéfiants ou enlèvements crapuleux ;

- leur collaboration les menace de façon grave et réelle, de sorte que les règles générales de protection applicables à tout accusé sont insuffisantes ;

- les déclarations ont un caractère de nouveauté, d'exhaustivité ou revêtent une importance exceptionnelle dans le cadre de la procédure pénale les concernant ou d'enquêtes sur des organisations mafieuses ou terroristes.

Parmi les mesures de protection pouvant être accordées figurent le transfèrement de la personne dans un autre lieu de résidence, la délivrance à l'intéressé et à ses proches de documents d'identité de couverture pouvant lui servir dans tous les aspects de sa vie sociale, des mesures de réinsertion telles que l'attribution d'un logement ou le remboursement des frais de déménagement, la possibilité de changer définitivement d'identité...

d) La gestion administrative du système

Les mesures de protection sont accordées, sur proposition du procureur de la République, par une commission placée auprès du ministre de l'Intérieur, composée de magistrats et de représentants des services de police et présidée par un sous-secrétaire d'Etat. Pour bénéficier des mesures, le collaborateur de justice doit prendre certains engagements. Ainsi, depuis 2001, il est exigé que la personne fournisse toutes les informations en sa possession susceptibles d'être utiles à la justice dans un délai de six mois suivant sa déclaration d'intention. Un contrat est signé entre la commission et le collaborateur de justice.

La commission peut révoquer ou modifier le programme de protection. La gestion pratique du système est confiée à un service central de protection.

Le président de la commission doit rendre compte régulièrement des activités de la commission devant la commission anti-mafia du Parlement italien.

Au 31 mai 2003, les personnes bénéficiant de mesures de protection se répartissaient de la manière suivante :

Erreur ! Liaison incorrecte.

Le coût de ce système de protection oscille entre cinquante et soixante millions d'euros par an.

*

De sa visite en Italie, votre rapporteur tire les conclusions suivantes :

- les autorités italiennes considèrent qu'elles n'auraient jamais pu obtenir de résultats significatifs dans la lutte contre la mafia sans le recours aux collaborateurs de justice ;

- le système ne peut fonctionner que lorsque les garanties offertes aux personnes concernées sont suffisantes. Dans un premier temps, l'Italie avait prévu des réductions de peine sans mesures de protection particulière. Il en est résulté de multiples assassinats de proches des collaborateurs de justice, et une raréfaction du nombre de ces derniers ;

- les déclarations des collaborateurs de justice doivent être appréciées avec la plus grande prudence et être soumises à de multiples vérifications, car le système engendre des tentatives de manipulation de la part de groupes criminels désireux d'éliminer leurs rivaux.

2. Le système américain

Le système pénal américain prévoit plusieurs dispositifs propres à encourager la coopération de témoins jugés importants.

Le procureur fédéral peut avoir recours à l'octroi d' immunités , qui permettent au témoin coopératif de livrer en justice toutes informations utiles sans crainte de voir ses déclarations pénalement qualifiées. Dans les affaires les plus graves, lorsque la personne dont le témoignage est souhaité est directement impliquée dans la commission de crimes, les procureurs fédéraux ont recours au plaider coupable avec coopération, qui permet de bénéficier de réductions de peines plus importantes que dans le cadre d'une procédure de plaider coupable sans coopération.

Les règles relatives à la protection des témoins sont déterminées par une loi de 1970 amendée par le « Comprehensive Crime Control Act » de 1984, qui donne compétence à l'Etat fédéral pour mettre en oeuvre des mesures adaptées aux risques encourus par des témoins de l'accusation. Ces dispositions peuvent bénéficier tant à des témoins menacés qu'à des personnes impliquées dans la commission d'infractions et dont le témoignage est souhaité.

Le code fédéral de procédure pénale confie à l'Attorney general des Etats-Unis la responsabilité de la mise en oeuvre de ces dispositions qui peuvent bénéficier aussi bien aux personnes appelées à témoigner devant des juridictions fédérales qu'à celles intéressant la justice des Etats fédérés.

Un témoin peut être reconnu éligible au programme spécifique de protection dès lors que son témoignage est considéré comme essentiel pour des affaires relevant notamment de la criminalité organisée, du trafic de stupéfiants ou de tout autre crime fédéral dès lors que le témoignage serait de nature à entraîner des menaces physiques sur l'intéressé.

Les moyens mis en oeuvre pour garantir la protection du témoin peuvent comprendre :

- la fourniture d'une nouvelle identité ;

- la mise à disposition d'un nouveau logement avec prise en charge des frais de déménagement et d'installation ;

- le versement de fonds devant permettre de faire face aux besoins de la vie courante ;

- l'aide pour trouver un emploi.

La protection s'applique non seulement au témoin lui-même mais également aux membres de sa famille.

La mise en oeuvre d'un programme de protection est subordonnée au respect de certaines règles par le témoin :

- l'accord de la personne pour témoigner et répondre aux demandes des enquêteurs ;

- l'engagement de la personne de ne pas commettre d'infraction pendant la durée du programme ;

- l'engagement de la personne de prendre toutes dispositions nécessaires pour ne pas révéler aux tiers les informations portant sur le programme de protection la concernant.

Les demandes visant à faire bénéficier une personne d'un programme de protection sont adressées à l' « Office of Enforcement Operation », division spéciale de la direction criminelle du département de la justice. Celle-ci est chargée d'instruire les demandes, notamment pour vérifier que la personne répond bien aux critères d'éligibilité au programme et déterminer les modalités pratiques de sa protection.

La mise en oeuvre de la protection relève du « US Marshals Service ». Créé en 1789, ce service avait à l'origine pour mission de servir d'auxiliaire au juge, notamment en remettant les convocations et en exécutant les mandats. Aujourd'hui, les Marshals sont chargés de la recherche et de l'appréhension des fugitifs, de la saisie et de la confiscation des avoirs ainsi que de leur conservation, de certaines opérations spéciales, enfin de la protection des témoins.

Lorsqu'un témoin bénéficie d'un programme de protection, les US Marshals sont chargés de sa sécurité. Ils prennent donc en charge la fourniture d'une nouvelle identité, la recherche d'un logement, les soins médicaux, la formation, la recherche d'emploi. Lors de l'instruction des demandes visant à accorder une protection à un témoin, ils doivent formuler une recommandation sur la faisabilité de l'opération.

Le budget consacré au programme de protection des témoins est d'environ trente millions de dollars par an. D'après les informations fournies à votre rapporteur par le « US Marshals Service », le taux moyen de condamnation a été de 89% dans les dossiers dans lesquels sont intervenus des personnes bénéficiant d'un programme de protection.

En août 2003, 16.998 personnes avaient bénéficié d'un programme de protection depuis la création de ce système (7.472 témoins et 9.526 membres de leurs familles. Entre octobre 2002 et août 2003, 99 nouveaux témoins ont bénéficié d'un programme de protection.

3. Le dispositif du projet de loi

Notre droit pénal prévoit déjà, dans certains cas très limités, des exemptions ou des réductions de peine pour les auteurs d'infractions apportant leur concours à la justice.

Ainsi, l'article 422-1 du code pénal exempte de peine l'auteur d'une tentative d'acte terroriste qui aura « permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables ». En outre, l'article 422-2 réduit la peine de moitié, ou ramène celle-ci à vingt ans de réclusion criminelle, si l'auteur ou le complice d'un acte de terrorisme, ayant informé les autorités, « a permis de faire cesser les agissements incriminés ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables ». S'agissant du trafic de stupéfiants, l'article 222-43 réduit la peine de moitié si les informations fournies par l'auteur ou le complice de ces infractions ont « permis de faire cesser les agissements incriminés et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables . » Par ailleurs, l'article 450-2 dispose que toute personne ayant participé à une association de malfaiteurs est exempte de peine si elle a « avant toute poursuite, révélé le groupement ou l'entente aux autorités compétentes et permis l'identification des autres participants . » D'autres dispositions portant exemption de peines existent en matière d'évasion (article 434-37) et de fausse monnaie (442-9).

Le présent article tend à étendre considérablement ces dispositifs.

Le paragraphe I tend à modifier l'intitulé de la section du code pénal relative aux circonstances entraînant l'aggravation des peines, afin que celle-ci puisse également accueillir des dispositions relatives aux circonstances entraînant la diminution ou l'exemption des peines.

Le paragraphe II tend à insérer dans le code pénal un article 132-78 destiné à définir la circonstance d'exemption ou de réduction de peine en cas de coopération avec la justice.

Le texte proposé pour l'article 132-78 du code pénal dispose tout d'abord que la personne qui a tenté de commettre un crime ou un délit est exemptée de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et, le cas échéant, d'identifier les autres auteurs ou complices.

Rappelons que la tentative est constituée, aux termes de l'article 121-5 du code pénal, lorsque « manifestée par un commencement d'exécution, elle n'a été suspendue ou n'a manqué son effet qu'en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ».

Le texte proposé par l'article 132-78 prévoit également que la durée de la peine privative de liberté encourue par une personne ayant commis un crime ou un délit est réduite si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis de faire cesser l'infraction, d'éviter que l'infraction ne produise un dommage ou d'identifier les autres auteurs ou complices. Le même dispositif serait applicable aux infractions connexes de même nature que le crime ou le délit pour lequel la personne est poursuivie.

Cette dernière disposition est particulièrement importante, compte tenu de l'existence de réseaux criminels développant de multiples activités illégales.

Le dispositif proposé n'a pas vocation à s'appliquer à l'ensemble des infractions, mais seulement « dans les cas prévus par la loi ».

En ce qui concerne la protection des personnes concernées, le texte précise seulement qu'elles peuvent bénéficier « en tant que de besoin » de la part des autorités d'une protection destinée à assurer leur sécurité. En cas de nécessité, ces personnes pourraient être autorisées, par ordonnance motivée, rendue par le président du tribunal de grande instance, à faire usage, après leur condamnation, d'une identité d'emprunt, en utilisant à cette fin les moyens mis à leur disposition par les autorités publiques. Les proches des personnes concernées pourraient également bénéficier de ces dispositions.

Le dispositif proposé pour assurer la protection des personnes acceptant de coopérer avec la justice paraît insuffisant et risque de rendre inopérantes les nouvelles dispositions. Certes, les voies et moyens de la protection ne relèvent pas nécessairement du domaine législatif, mais il paraît néanmoins nécessaire d'être plus précis si le législateur souhaite que les textes qu'il adopte soient appliqués.

L'Assemblée nationale a apporté une première précision au dispositif en prévoyant que les mesures de protection soient accordées « sur réquisition du procureur de la République ».

Par un amendement , votre commission propose d'insérer les dispositions relatives à la protection des personnes coopérant avec la justice dans le code de procédure pénale où elles ont davantage leur place et de prévoir la création d'une commission chargée d'accorder les mesures de protection et d'en assurer le suivi.

A l'initiative de l'Assemblée nationale, le texte proposé pour l'article 132-78 du code pénal prévoit que la révélation de l'identité d'emprunt d'une personne coopérant avec la justice est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende. En cas de mort des personnes concernées, les peines seraient portées à dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende. Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Enfin, le texte prévoit qu'aucune condamnation ne peut être prononcée sur le fondement de déclarations émanant de personnes ayant décidé de coopérer avec la justice dans le cadre du nouvel article 132-78 du code pénal. Un tel dispositif, déjà prévu par le code de procédure pénale en ce qui concerne les témoins anonymes, est particulièrement justifié dans le cas de personnes auteurs d'infractions qui coopèrent avec la justice dans l'espoir de voir leur peine réduite.

Les paragraphes III à XV tendent à modifier le code pénal, ainsi que plusieurs lois, afin de définir le champ d'application des mesures prévues par le présent article.

Les infractions pour lesquelles la personne tentant de les commettre serait exemptée de peine sont :

- l'assassinat et l'empoisonnement , en application de l'article 221-5-3 nouveau du code pénal ;

- les tentatives et actes de barbarie, en application de l'article 222-6-1 nouveau du code pénal ;

- le trafic de stupéfiants en application de l'article 222-43-1 nouveau du code pénal ;

- l'enlèvement et la séquestration , en application de l'article 224-5-1 nouveau du code pénal ;

- le détournement d'aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport , en application de l'article 224-8-1 nouveau du code pénal ;

- la traite des êtres humains , en application de l'article 225-4-9 nouveau du code pénal ;

- le proxénétisme , en application de l'article 225-11-1 nouveau du code pénal ;

- le vol et l'extorsion en bande organisée , en application des articles 311-9-1 et 312-6-1 nouveaux du code pénal.

Les infractions pour lesquelles un auteur pourrait bénéficier de réductions de peine sont :

- l'assassinat ou l'empoisonnement. Dans cette hypothèse, la peine du complice ou de l'auteur de ces faits serait ramenée à vingt ans de réclusion criminelle (2è alinéa de l'article 221-5-3 nouveau inséré par le paragraphe III) contre trente ans si ces infractions ne sont pas commises avec l'emploi de circonstances aggravantes, auquel cas la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité ;

- les tortures et actes de barbarie. La peine du « repenti », auteur ou complice, serait réduite de moitié et, lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci serait ramenée à vingt ans de réclusion criminelle (2è alinéa de l'article 222-6-2 nouveau, paragraphe IV) ;

- le trafic de stupéfiants. Ainsi qu'il a été indiqué plus haut, les auteurs ou complices des infractions de trafic de stupéfiants bénéficient d'ores et déjà d'un mécanisme d'atténuation de peines prévu par l'article 222-43. Ce dernier, qui réduit de moitié les peines encourues, intègre cependant dans son champ d'application les personnes dirigeant ou organisant un groupement ayant pour objet la production, la fabrication, l'importation, l'exportation, le transport, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi de produits stupéfiants et qui encourent la réclusion criminelle à perpétuité (article 222-34). Or, chacun comprend aisément l'incohérence d'une disposition tendant à réduire de moitié la réclusion à « perpétuité ». Le paragraphe V du présent article corrige cette imperfection en prévoyant que ces personnes « repenties » verront leur peine ramenée à vingt ans de réclusion criminelle ;

- l'enlèvement et la séquestration. La peine de l'auteur et du complice serait réduite de moitié lorsqu'ils ont permis, avant toute poursuite, de faire cesser l'infraction ou « d'éviter qu'elle n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente » et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables. Là aussi, lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci serait ramenée à vingt ans de réclusion (2è alinéa de l'article 224-8-1 nouveau, paragraphe VII) ;

- le détournement d'aéronef , de navire ou de tout autre moyen de transport. Là encore, la peine de l'auteur et du complice serait réduite de moitié lorsqu'ils ont permis, avant toute poursuite, de faire cesser l'infraction ou « d'éviter qu'elle n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente » et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables. De même, lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci serait ramenée à vingt ans de réclusion (2è alinéa de l'article 224-8-1 nouveau, paragraphe VIII) ;

- la traite des êtres humains et le proxénétisme. La peine de l'auteur et du complice serait également réduite de moitié lorsqu'ils ont permis, avant toute poursuite, de faire cesser l'infraction ou « d'éviter qu'elle n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente » et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci serait également ramenée à vingt ans de réclusion (respectivement 2è alinéa des articles 225-4-9 et 225-11-1 nouveaux, paragraphes IX et X) ;

- le vol et l'extorsion en bande organisée. L'auteur ou le complice de ces infractions verraient leur peine réduite de moitié si, avant tout acte de poursuite, ils ont permis de faire cesser l'infraction en cours ou d'éviter qu'elle n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier les coupables. S'agissant de la seule extorsion, que l'emploi de certaines circonstances aggravantes rend passible de la réclusion criminelle à perpétuité, par exemple lorsqu'elle a été commise avec usage ou menace d'une arme dont le port est prohibé (article 312-6), son auteur « repenti » verrait sa peine ramenée à vingt ans de réclusion criminelle (2è alinéa des articles 311-9-1 nouveaux, paragraphes XI et XII) ,

- la fabrication ou la détention illégales d'armes. Les paragraphes XIII à XVI prévoient de réduire « de moitié » la peine encourue par les auteurs ou les complices repentis en cette matière, dont les déclarations auront permis de faire cesser les agissements incriminés et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables. Les infractions concernées sont : la fabrication ou la détention, sans motifs légitimes, de machines ou engins meurtriers ou incendiaires agissant par explosion ou autrement réprimées par l'article 3 de la loi du 18 juin 1871 (article 3-1 nouveau de cette loi, paragraphe XIII) ; la fabrication, le commerce, le stockage, l'importation ou la tentative d'importation, sans autorisation régulière, des matériels de guerre prohibés prévus par les articles 24, 26 et 31 du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions (article 35-1 nouveau de cette loi, inséré par le paragraphe XIV) ; la vente, la production, l'exportation ou l'importation de poudres ou substances explosives, dont la liste est prévue par décret, réprimées par les dispositions de l'article 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et des substances explosives (article 6-1 nouveau de la loi précitée, paragraphe XV) ; la mise au point, la fabrication, la détention, le stockage, la cession des agents microbiologiques et des toxines biologiques, en quantités non destinées à des fins prophylactiques, de protection ou à d'autres fins pacifiques, réprimés par les dispositions de l'article 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972 interdisant la mise au point d'armes biologiques (article 4-1 nouveau de cette même loi, paragraphe XVI).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié.

Article 4
(art. 434-7-2 nouveau du code pénal)
Révélation d'informations de nature à entraver
le déroulement de la procédure pénale

Le présent article tend à insérer dans le chapitre du code pénal consacré aux actions de justice un article 434-7-2 pour punir de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende le fait, pour toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance, en application des dispositions du code de procédure pénale, d'informations issues d'une enquête ou d'une instruction en cours concernant un crime ou un délit, de révéler, directement ou indirectement, ces informations à des personnes susceptibles d'être impliquées, comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs, dans la commission de ces infractions, lorsque cette révélation est de nature à entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité.

Comme l'indique l'étude d'impact jointe au projet de loi, cette nouvelle incrimination doit permettre de lutter contre le comportement de personnes qui, ayant connaissance, du fait de leurs fonctions, d'informations relatives à une enquête ou à une instruction, révèlent ces informations afin d'entraver le déroulement de l'enquête, par exemple en prévenant un complice qu'il est recherché par la police, ce qui lui permettra de prendre la fuite ou de faire disparaître des preuves.

Actuellement, deux dispositifs sont censés permettre de préserver la confidentialité des informations issues d'enquêtes ou d'instructions :

- l'article 11 du code de procédure pénale prévoit que, sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète. Il dispose que les personnes concourant à la procédure sont tenues au secret professionnel ;

- l'article 226-13 du code pénal punit d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire.

La création d'une nouvelle incrimination est justifiée par l'insuffisance des dispositifs qui viennent d'être rappelés pour sanctionner des comportements beaucoup plus graves qu'une simple violation du secret professionnel. Le texte proposé vise en effet des personnes qui révèleraient des informations dans le but d'entraver le cours de la justice, ce qui va bien au-delà de la violation du secret.

Si elle approuve la création de cette infraction, votre commission souhaite néanmoins qu'elle ne puisse être interprétée d'une manière qui remettrait en cause les droits de la défense. A titre d'exemple, si un avocat découvrait dans le dossier de la procédure des actes concernant une personne qui lui est inconnue et interrogeait son client sur ses éventuelles relations avec cette personne, ne risquerait-il pas d'être poursuivi si son client alertait alors la personne en question de l'existence d'une enquête la concernant ?

Pour éviter toute ambiguïté, votre commission vous propose, par trois amendements , d'encadrer le dispositif du présent article. Elle propose tout d'abord de rappeler, comme le fait l'article 11 du code de procédure pénale, que la nouvelle incrimination s'applique sans préjudice des droits de la défense. Elle propose également de préciser que la révélation des informations, pour être pénalement punissable au titre de la nouvelle infraction doit avoir « pour objectif » d'entraver le déroulement des investigations et non seulement être « de nature » à entraver ces investigations. Enfin, elle propose de supprimer les termes « directement ou indirectement » qui sont source d'ambiguïté.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 ainsi modifié.

SECTION 3
Dispositions diverses
Article 5
(art. 63-4, 85, 706-26, 706-24-2, 706-30, 706-32
et 706-36-1 du code de procédure pénale)
Coordinations en matière de garde à vue,
de saisine des juridictions spécialisées, de saisies
conservatoires et d'infiltration

Le présent article tend à opérer des coordinations avec les dispositions relatives à la criminalité organisée dans d'autres parties du code de procédure pénale.

Le paragraphe I a pour objet de modifier l'article 63-4 du code de procédure pénale, relatif à l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit notamment que l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de soixante-douze heures lorsque la garde à vue est soumise à des règles particulières de prolongation.

Cette précision est destinée à prendre en compte les règles particulières de garde à vue prévues en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants, caractérisées d'une part par la possibilité de prolonger par une seule décision la garde à vue pour quarante-huit heures au-delà des quarante-huit heures initiales, d'autre part par l'impossibilité d'une intervention de l'avocat avant la soixante-douzième heure de garde à vue.

Le présent paragraphe tend à insérer, dans l'article 63-4, un renvoi aux articles 706-16 et 706-26 du code de procédure pénale, relatifs aux règles spécifiques applicables en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants. Le renvoi aux cas dans lesquels des « règles particulières de prolongation » sont prévues n'est en effet plus pertinent, dès lors que le présent projet de loi tend à étendre à de nouvelles infractions ces règles particulières de prolongation.

Compte tenu des modifications qu'elle a proposées à l'article premier à propos des règles de garde à vue en matière de criminalité et de délinquance organisées, votre commission vous soumet un amendement réécrivant les trois derniers alinéas de l'article 63-4 du code de procédure pénale. L'Assemblée nationale a proposé que, pour certaines infractions entrant dans le champ de l'article 706-73 du code de procédure pénale, la première intervention de l'avocat intervienne après soixante-douze heures de garde à vue. Votre commission vous propose de prévoir pour ces infractions une première intervention de l'avocat après trente-six heures de garde à vue, conformément à la règle déjà posée par l'article 63-4, septième alinéa.

Elle propose également de mentionner dans cet article la règle repoussant à la soixante-douzième heure la première intervention de l'avocat en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants.

Après le paragraphe I, votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un paragraphe additionnel, pour modifier l'article 76 du code de procédure pénale, relatif aux perquisitions réalisées au cours d'une enquête préliminaire. Dans sa rédaction actuelle, l'article 76 dispose que les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction ne peuvent être effectuées sans l'assentiment exprès de la personne chez laquelle l'opération a lieu.

La loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne a inséré un article 76-1 dans le code de procédure pénale, qui permet de procéder à des perquisitions en enquête préliminaire sans l'accord de la personne concernée lorsque l'enquête concerne certaines infractions en matière d'armes et d'explosifs ainsi que le trafic de stupéfiants. Par ailleurs, l'article 706-24 du code de procédure pénale permet de procéder à des perquisitions sans l'accord de la personne lorsque l'enquête porte sur une infraction terroriste.

Le présent projet de loi tend à prévoir la possibilité de procéder à des perquisitions sans l'accord de la personne pour toutes les infractions entrant dans le champ de l'article 706-73 nouveau du code de procédure pénale.

Votre commission a souhaité simplifier les règles applicables en matière de perquisitions. La multiplication de régimes dérogatoires figurant dans différentes parties du code de procédure pénale risque d'être à l'origine d'erreurs de procédure. Elle propose donc de supprimer l'ensemble des dispositions figurant dans le code et le projet de loi qui prévoient un régime dérogatoire en matière d'enquête préliminaire. En contrepartie, votre commission propose de prévoir, dans l'article 76 du code de procédure pénale, que des perquisitions peuvent avoir lieu au cours d'une enquête préliminaire, sans l'accord de la personne intéressée, dès lors que l'enquête porte sur une infraction punie d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

La modification proposée permettra de clarifier substantiellement les règles relatives aux perquisitions sans remettre en cause nos principes fondamentaux.

Actuellement, lorsqu'une personne refuse une perquisition au cours d'une enquête préliminaire, le procureur ouvre une information et le juge d'instruction ordonne alors la perquisition, qui se déroule sans le consentement de la personne. La modification proposée par votre commission permettra plus facilement de procéder à des perquisitions au cours des enquêtes préliminaires, mais le procureur de la République ne pourra les ordonner de sa propre initiative. Elles ne pourront être ordonnées que par le juge des libertés et de la détention, par décision écrite et motivée. Les perquisitions seront effectuées sous le contrôle du juge des libertés et de la détention, qui pourra se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 85 du code de procédure pénale qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit que toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d'instruction compétent. La modification proposée a pour objet de renvoyer, dans l'article 85, aux règles de compétence prévues par l'article 52 du code de procédure pénale pour les personnes physiques et par l'article 706-42 du même code pour les personnes morales. Il s'agit d'éviter que des plaintes avec constitution de partie civile soient adressées aux juridictions spécialisées.

Le paragraphe III a pour objet de modifier l'article 706-26 du code de procédure pénale, qui prévoit l'application de règles procédurales spécifiques pour certaines infractions de trafic de stupéfiants afin de mentionner la tentative de ces infractions dans la liste des comportements permettant l'application des règles procédurales spécifiques.

Après le paragraphe III, votre commission vous soumet un amendement de coordination, modifiant l'article 706-28 du code de procédure pénale, relatif aux perquisitions au cours d'enquêtes ou d'instructions concernant le trafic de stupéfiants, pour tenir compte des modifications apportées au régime de perquisitions proposé par l'article premier du présent projet de loi.

Enfin, le paragraphe IV tend à supprimer plusieurs articles du code de procédure pénale, devenus inutiles du fait de l'élaboration de règles procédurales applicables à l'ensemble des infractions relevant de la criminalité et de la délinquance organisées. Cette suppression concerne :

- l'article 706-24-2 (saisies conservatoires en matière de terrorisme) ;

- l'article 706-30 (saisies conservatoires en matière de trafic de stupéfiants) ;

- l'article 706-32 (infiltrations en matière de trafic de stupéfiants) ;

- l'article 706-36-1 (saisies conservatoires en matière de proxénétisme et de traite des êtres humains) ; la suppression de cet article, logique dès lors que le projet de loi tend à créer un régime de saisies conservatoires pour l'ensemble des infractions relevant de la criminalité organisée, résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois.

Par un amendement votre commission vous propose de supprimer d'autres articles du code, rendus inutiles par les amendements proposés par votre commission en matière de garde à vue et de perquisitions. Il s'agit de :

- l'article 76-1 (perquisitions au cours de l'enquête préliminaire) ;

- l'article 706-23 (règles de garde à vue applicables en matière de terrorisme) ;

- l'article 706-24 (perquisitions au cours d'une enquête préliminaire en matière de terrorisme) ;

- l'article 706-24-1 (perquisitions de nuit en matière de terrorisme) ;

- l'article 706-29 (règles de garde à vue applicables en matière de trafic de stupéfiants).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié .

Article 5 bis
(art. L. 10 B du livre des procédures fiscales)
Recherche et constatation de certaines infractions
par les agents de la direction générale des impôts

L'article L. 10 B du livre des procédures fiscales dispose que les agents de la direction générale des impôts concourent à la recherche de certaines infractions dans le cadre des enquêtes menées sur instructions du procureur de la République. Les infractions concernées sont le blanchiment de fonds provenant du trafic de stupéfiants (art. 222-38 du code pénal), l'impossibilité de justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à un trafic de stupéfiants (art. 222-39-1 du code pénal), le proxénétisme (art. 215-5 et 225-6 du code pénal), le recel (art. 321-1 du code pénal), l'impossibilité de justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en ayant autorité sur un mineur qui se livre habituellement à des crimes ou à des délits contre les biens d'autrui (art. 321-6 du code pénal).

Pour la mise en oeuvre de l'article L. 10 B, les agents de la direction générale des impôts procèdent à des recherches de nature fiscale permettant de contribuer à la preuve des infractions concernées. Ils doivent en porter le résultat à la connaissance du procureur de la République.

Une circulaire du 7 mai 2003 adressée aux procureurs est venue préciser les modalités d'application de l'article L. 10 B du livre des procédures fiscales.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Gérard Léonard, vise à étendre la liste des infractions pour la recherche desquelles le concours des agents de la direction générale des impôts pourrait être requis. Dorénavant, leur concours pourrait être également sollicité pour la recherche des infractions suivantes :

- impossibilité de justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en étant en relations habituelles avec des personnes se livrant à la traite des êtres humains (art. 225-4-8 du code pénal) ;

- impossibilité de justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en étant en relations habituelles avec des personnes participant à un groupement terroriste ou finançant une entreprise terroriste (art. 421-2-3 du code pénal) ;

- impossibilité de justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en étant en relations habituelles avec des personnes participant à une association de malfaiteurs (art. 450-2-1 du code pénal).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 bis sans modification .

CHAPITRE II
DISPOSITIONS CONCERNANT LA LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE ET LA CRIMINALITÉ INTERNATIONALES

Le chapitre II du titre premier du présent projet de loi, composé d' un article (article 6), tend vise à moderniser les règles d'entraide judiciaire internationale inscrites dans le code de procédure pénale, en vue de mettre le droit français en conformité avec les avancées accomplies en ce domaine par l'Union européenne .

Composé de trois volets respectivement relatifs au fonctionnement de l'entraide judiciaire internationale, aux équipes communes d'enquête et à Eurojust, il a pour objet de transposer plusieurs instruments européens adoptés récemment.

1. La multiplication des instruments européens de coopération judiciaire en matière pénale depuis les attentats terroristes du 11 septembre 2001 survenus aux Etats-Unis

a) La lente émergence de l'espace judiciaire européen

La réalisation de l'espace judiciaire européen s'est effectuée avec lenteur.

Les premières formes de coopération européenne apparues de manière informelle au milieu des années 1970 ont porté sur le domaine de la sécurité. En 1975, les ministres de l'intérieur ont en effet créé le groupe terrorisme, radicalisme, extrémisme et violence internationale (TREVI) qui réunissait les responsables de la police des Etats membres.

La coopération judiciaire s'est véritablement développée après la signature du traité de Maastricht , le 7 février 1992. En institutionnalisant les questions relatives à la justice et aux affaires intérieures regroupées sous le titre VI du traité sur l'Union européenne dénommé « troisième pilier » et en imposant que les décisions relatives à ce domaine soient prises à l'unanimité au sein du Conseil de l'Union européenne, ce texte a permis d'accomplir des progrès décisifs. Sur cette base, de nombreuses conventions, par exemple en matière d'extradition 13 ( * ) , ont pu être adoptées par le Conseil de l'Union européenne.

En complément de ces initiatives ont été menées des actions communes en vue de créer des organes spécifiquement dédiés à la coopération judiciaire .

Une action commune adoptée le 22 avril 1996 a facilité l'échange de magistrats de liaison ayant vocation à exercer des activités non juridictionnelles variées , telles que veiller au bon déroulement des procédures d'entraide judiciaire (suivi des commissions rogatoires internationales et des procédures d'extradition), rédiger des notes de droit comparé et participer à l'organisation des relations et des négociations entre les Etats dans le cadre de la préparation de futures conventions. Grâce à un contact personnel avec les autorités judiciaires compétentes des Etats auprès desquels ils sont détachés, ces magistrats jouent avant tout un rôle de médiateur 14 ( * ) . Le Conseil « justice et affaires intérieures » (JAI) a également créé le 29 juin 1998 un réseau judiciaire européen pour faciliter les contacts entre les autorités judiciaires exerçant des responsabilités dans le cadre de la coopération judiciaire internationale 15 ( * ) .

Le traité d'Amsterdam , signé en 1997 et entré en vigueur le 1 er mai 1999, a permis de franchir une nouvelle étape en transférant du troisième au premier pilier la coopération judiciaire en matière civile et la coopération administrative et en modifiant les règles d'adoption des textes en matière pénale. Tout en maintenant le vote à l'unanimité, il a ainsi prévu un droit d'initiative de la Commission européenne jusqu'alors exclu et donné compétence à la Cour de justice des Communautés européennes pour interpréter les textes adoptés dans le cadre du  « troisième pilier ». Deux instruments nouveaux (décision et décision-cadre) ont été créés 16 ( * ) , le traité d'Amsterdam ayant en outre assoupli les conditions d'entrée en vigueur des conventions en exigeant leur ratification par la moitié des Etats membres et non plus par tous les Etats membres.

Le Conseil européen des 15 et 16 octobre 1999 réuni à Tampere (Finlande) s'est assigné l'objectif de promouvoir « un espace de liberté, de sécurité et de justice en exploitant pleinement les possibilités offertes par le traité d'Amsterdam ».

A la suiteConformément au du programme de vingt-quatre mesures approuvé par le Conseil de l'Union  européenne au mois de novembre 2000 qui regroupait vingt-quatre mesures, différents projets d'instruments ayant notamment pour objet le renforcement des mécanismes de reconnaissance mutuelle des décisions de justice ont été adoptés .

La convention relative à l'entraide judiciaire internationale en matière pénale du 29 mai 2000 complétée par un protocole du 16 octobre 2001 consacré plus spécifiquement aux comptes bancaires 17 ( * ) a constitué la première étape d'une réforme d'envergure des règles d'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne.

Fruit de six années de discussion, ce texte ne se présente pas comme un instrument autonome mais complète d'autres conventions plus anciennes tels la convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, la convention du 17 mars 1978, la convention d'application de l'accord de Schengen conclue le 14 juin 1990 18 ( * ) , ou encore le traité Benelux d'extradition et d'entraide judiciaire en matière pénale du 27 juin 1968.

Etendu à la Norvège et à l'Islande 19 ( * ) , son champ d'application concerne les enquêtes pénales ainsi que les faits susceptibles de donner lieu à certaines sanctions administratives.

Comme l'indique le rapport explicatif concernant ce texte 20 ( * ) , plusieurs raisons ont justifié une rénovation des règles de coopération judiciaire en matière pénale :

- trop rigide et peu efficace , l'entraide judiciaire est demeurée plus théorique qu'effective ;

- la disparition des contrôles aux frontières entre les Etats membres, parties aux accords de Schengen , accentuée par « un accroissement considérable des mouvements de personnes, de biens et de capitaux au sein de l'Union européenne imposait que soient mises à la disposition des autorités policières et judiciaires des règles adaptées » ;

- il est apparu indispensable d'exploiter les nouveaux outils technologiques (vidéoconférence, téléconférence) mis à la disposition des Etats grâce aux progrès technologiques.

La convention du 29 mai 2000 comporte donc plusieurs innovations notables telles que la consécration du principe de transmission directe des demandes d'entraide entre les autorités judiciaires de l'espace européen , la légalisation de l'utilisation de moyens de communication modernes pour procéder à des auditions de témoins par vidéoconférence ou encore la mise en place de moyens d'investigation opérationnels spécialisés comme les livraisons surveillées particulièrement efficaces pour lutter contre les trafics internationaux et la mise en place d'équipes communes d'enquête.

L'entrée en vigueur de ce texte est fixée au quatre-vingt-dixième jour après la notification par l'Etat membre de l'Union européenne qui procède le huitième à sa ratification 21 ( * ) . Trois Etats (le Danemark, l'Espagne et le Portugal) seulement l'ayant ratifié à ce jour, il n'est donc toujours pas applicable.

En mai 2001, le rapport final sur le premier exercice d'évaluation consacré à l'entraide judiciaire en matière pénale soulignait une augmentation des flux d'entraide concernant tous les Etats membres de l'Union européenne. Il indiquait que « si l'entraide judiciaire pénale n'atteint pas le niveau de perfection et de fiabilité attendu par nombre de praticiens, elle ne fonctionne pas toujours aussi mal que certains l'affirment (...) dans le domaine de la drogue ou des infractions graves de droit commun, la majorité des praticiens rencontrés considèrent que les choses fonctionnent mieux qu'on le dit ».

b) L'apparition de nouveaux mécanismes d'entraide depuis les évènements événements du 11 septembre 2001

L'élaboration des textes européens s'est considérablement accélérée à la suite des évènements événements survenus aux Etats-Unis le 11 septembre 2001, les Etats membres de l'Union européenne, conscients de la nécessité de renforcer sans attendre les mécanismes de coopération judiciaire, ayant négocié et adopté en quelques mois plusieurs instruments parmi lesquels  :

? la décision-cadre du Conseil relative à l'exécution des décisions de gel des biens ou des éléments de preuve , élaborée à la suite d'une initiative conjointe de la France, de la Suède et de la Belgique, a fait l'objet d'un accord politique lors du Conseil JAI du 28 février 2002 .

Ce texte prévoit un mécanisme rapide et efficace mis à la disposition des Etats pour faire exécuter immédiatement une mesure conservatoire dans un autre Etat , afin d'empêcher la dissimulation d'avoirs ou la destruction d'éléments de preuve ;

? la décision-cadre du Conseil relative au mandat d'arrêt européen a été adoptée le 13 juin 2002. Elle vise à supprimer le mécanisme traditionnel de l'extradition au profit d'une procédure exclusivement judiciaire ayant vocation à être plus rapide et plus simple . Sa date limite de transposition a été fixée au 31 décembre 2003.

D'autres projets d'instruments destinés à améliorer la reconnaissance mutuelle des décisions en matière pénale devraient être adoptés prochainement. On peut citer notammentIl s'agit de la décision-cadre sur l'exécution des sanctions pécuniaires , qui a ayant fait l'objet d'un accord politique le 8 mai 2003 sans avoir été encore formellement entérinée et duou encore le projet déposé par la présidence danoise sur l'exécution des décisions de confiscation , en cours de négociation ;

? la décision du Conseil instituant Eurojust, adoptée le 28 février 2002 en vue de renforcer la lutte contre les formes les plus graves de criminalité organisée , s'inscrit dans le prolongement du traité de Nice qui avait consacré son existence à l'article 31 du traité sur l'Union européenne.

En mars 2002, cette structure de coopération intégrée a succédé à l'unité provisoire Pro-Eurojust précédemment instituée par une décision du 14 décembre 2000, qui fonctionnait depuis le 1 er mars 2001. Depuis décembre dernier, Eurojust est installée à la Haye.

Cet organe dont la création a été décidée en 1999 au Conseil européen de Tampere, et qui constitue l'aboutissement de longues négociations, vise à répondre à deux préoccupations principales, d'une part, « la nécessité d'améliorer davantage la coopération judiciaire entre les Etats membres, notamment dans la lutte contre les formes graves de criminalité qui sont souvent le fait d'organisations transnationales », d'autre part, la recherche d'une « amélioration effective de la coopération judiciaire entre les Etats membres (qui) requiert d'urgence l'adoption au niveau de l'Union de mesures structurelles destinées à faciliter la coordination optimale des actions d'enquête et de poursuites des Etats membres couvrant le territoire de plusieurs d'entre eux ».

Eurojust n'est pas compétente pour effectuer par elle-même des actes d'enquête. Elle ne constitue donc pas un parquet européen , mais plutôt un outil de coopération destiné à coordonner l'action des autorités nationales chargées des enquêtes ou de l'engagement des poursuites, lesquelles conservent la maîtrise de l'action publique et la possibilité de rejeter une demande adressée par cette unité.

Le champ de compétence d'Eurojust, étendu à toutes les affaires susceptibles de revêtir une dimension transnationale, se limite toutefois aux formes les plus graves de la criminalité organisée tels la criminalité informatique, la fraude, la corruption, le terrorisme, le trafic de stupéfiants, le blanchiment des produits du crime ou la criminalité portant atteinte à l'environnement (article 4 de la décision-cadre). Pour d'autres types d'infractions, cet organe peut également apporter son concours à des enquêtes ou à des poursuites à titre complémentaire, et sous réserve qu'un Etat membre le demande.

Cette unité effectue ses missions en relation étroite avec Europol, l'office européen de lutte anti-fraude (OLAF) et le réseau judiciaire européen.

Elle est composée d'un collège de 15 membres  nationaux (un membre détaché par Etat membre) dotés au sein de l'organe de prérogatives équivalentes qu'ils aient la qualité de procureur, de juge ou d'officier de police. Sa capacité d'action sur le territoire de l'Union européenne est double, elle peut intervenir :

- au quotidien, par l'intermédiaire des chaque représentant national agissant au nom d'Eurojust  vis à vis de son Etat d'origine ;

- de manière plus officielle, par l'intermédiaire d'un collège agissant pour le compte d'Eurojust.

Plusieurs Etats ont désigné des assistants chargés d'apporter leur concours aux membres nationaux. Six d'entre eux sont en poste à la Haye, auprès du membre national, les autres demeurant dans leur pays d'origine.

A la différence du réseau judiciaire européen ou des magistrats de liaison ou du réseau judiciaire européen, Eurojust est un organe autonome par rapport aux Etats membres , doté de la personnalité juridique et financé par le budget communautaire 22 ( * ) , les salaires et les émoluments des membres nationaux et de leurs assistants étant toutefois pris en charge par les Etats membres d'origine, contrairement aux six agents permanents et aux deux agents exerçant à titre temporaire, rémunérés par l'unité permanente.

La date limite de transposition de cette décision a été fixée au 6 septembre 2003 (article 42 de la décision), sept Etats membres s'étant engagés à adapter leur droit interne par anticipation ;

? la décision-cadre relative aux équipes communes d'enquête , issue d'un projet déposé par la France, le Royaume-Uni, l'Espagne et la Belgique, a été adoptée le 13 juin 2002. Ce texte se borne en fait pour l'essentiel à reproduire, moyennant quelques compléments, le contenu de l'article 13 de la convention d'entraide judiciaire du 29 mai 2000 ayant le même objet 23 ( * ) , sous réserve de quelques compléments, en vue d'en anticiper l'application de dispositions en attente de ratification.

La collaboration entre des agents des services de police de plusieurs Etats membres de l'Union européenne s'est révélée indispensable pour enquêter sur des infractions de dimension transfrontalière. L'article 30 du traité sur l'Union européenne a d'ailleurs consacré l'importance de la coopération opérationnelle entre les services de police. Complétant ce mouvement, la décision-cadre du 13 juin 2002 instaure un nouveau mode d'action commune et en fixe les modalités . Elle prévoit :

- de subordonner la création d'une équipe commune d'enquête à l'accord conjoint des autorités compétentes de deux pays membres au moins , la composition de l'équipe devant être arrêtée par un accord conjoint entre les pays concernés ;

- que ces équipes soient constituées au cas par cas pour une durée limitée en vue d'effectuer des enquêtes pénales dans un ou plusieurs des Etats membres participants (trafic de drogue, traite des êtres humains, terrorisme...). Elles ne sont donc pas des structures permanentes et se composent en majorité d'agents des services de police 24 ( * ) , de procureurs et de magistrats.

De plus, la décision-cadre définit des règles souples destinées à faciliter le circuit des échanges entre les équipes d'enquête et les Etats membres , les membres détachés 25 ( * ) ayant la possibilité de demander à leurs autorités nationales de prendre les mesures dont l'équipe a besoin sans exiger de demande d'entraide formelle de la part de l'Etat membre d'intervention (paragraphe 7 de l'article 13 de la convention du 29 mai 2000).

Aux termes de l'article 4 de la décision-cadre du 13 juin 2002, la date limite de transposition de ce texte par les Etats membres a été fixée au 1 er janvier 2003 .

Le 8 mai 2003 , le Conseil a adopté une recommandation relative à un modèle d'accord pour la création d'une équipe commune d'enquête en vue d'inciter les autorités compétentes des Etats membres à mettre rapidement en place cet outil. A ce jour, plusieurs pays membres tels le Royaume-Uni, la Finlande, l'Autriche, l'Allemagne, l'Espagne et la Suède ont transposé ce texte.

? Achevés en juillet dernier, les travaux de la Convention européenne , et notamment ceux du groupe de travail sur la justice et les affaires intérieures constitué en son sein 26 ( * ) , devraient donner un nouvel élan à la coopération judiciaire en matière pénale .

Le tableau ci-après retrace les propositions formulées par cette instance, susceptibles de servir de base aux futures discussions qui devraient avoir lieu dans le cadre de la conférence Conférence intergouvernementale prévue en à partir d'octobre prochain2003.


principaux points desPRINCIPALES RECOMMANDATIONS RELATIVES À LA coopération COOPÉRATION policière POLICIÈRE ET JUDICIAIRE (troisième TROISIÈME PILIER) FORMULéÉES

DANS LE CADRE DE LA CONVENTION européenneEUROPÉENNE


- La suppression des instruments juridiques spécifiques au troisième pilier au profit d'un alignement de la procédure législative sur la méthode communautaire avec certaines spécificités (en particulier un droit d'initiative partagé entre la Commission et les Etats membres) et d'un assouplissement du processus décisionnel avec le passage de l'unanimité à la majorité qualifiée au Conseil avec un pouvoir de codécision du Parlement européen ;

- la consécration par le traité constitutionnel du principe de reconnaissance mutuelle des décisions par le traité constitutionnel ;

- le rapprochement du droit pénal des Etats membres (par exemple dans des domaines ayant un caractère transfrontalier) par l'adoption de règles minimales sur les éléments constitutifs de certaines infractions pénales d'une gravité particulière et sur leurs sanctions ;

- une meilleure délimitation des compétences entre l'Union et les Etats membres ;

- un renforcement d'Eurojust et la possibilité d'instituer, à l'unanimité, un parquet européen à partir d'Eurojust de cette unité.

Source : Délégation pour l'Union européenne du Sénat.

2. La mise en oeuvre par la France des instruments européens de coopération judiciaire

? L'élaboration progressive récente d'un cadre juridique précis en matière d'entraide judiciaire

Jusqu'en 1999, le système français d'entraide judiciaire internationale était essentiellement régi par des conventions internationales , les échanges entre pays s'effectuant sur la base soit de la convention européenne du 20 avril 1959, soit de la convention d'application des accords de Schengen conclue le 14 juin 1990 ou encore sur le fondement de multiples conventions bilatérales (Australie, Brésil, Mexique, Monaco...).

Le code de procédure pénale ne comportait donc aucune disposition particulière relative à l'entraide judiciaire internationale , à l'exception de l'article 30 de la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers contenant quelques dispositions relatives à la transmission des demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères.

La loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale a innové en insérant dans le livre IV du code de procédure pénale consacré à « quelques procédures particulières » un titre X intitulé « de l'entraide judiciaire internationale » .

Outre des dispositions spécifiques relatives à l'entraide entre la France et les Etats adhérents à l'espace Schengen (articles 695, 696), des règles générales consacrées à l'exécution des demandes d'entraide (articles 694, 696-1 et 696-2) sont désormais définies.

Comme l'indique la circulaire du 29 décembre 1999 relative à l'entraide judiciaire internationale , après avoir longtemps été considérée comme un domaine ressortant relevant fondamentalement à de la souveraineté nationale de chaque Etat, « les diverses instances politiques ont récemment pris conscience que cette conception devait être dépassée, l'efficacité de la lutte contre les agissements de délinquance internationale, et notamment de la criminalité organisée, passant par une collaboration étroite et efficace, et la plus directe possible entre les différentes autorités judiciaires, notamment européennes . S'en dégage une nouvelle conception de l'entraide pénale, dans laquelle l'autonomie des instances judiciaires est renforcée ».

En octobre 2000, le rapport d'évaluation du Conseil de l'Union européenne  sur la situation de la France en matière d'entraide judiciaire et de demandes urgentes de dépistage et de saisie/gel des biens notait :

- le grand nombre de demandes d'entraide adressées à la France par la Belgique, observant que l'utilisation d'une langue commune en facilitait l'exécution ;

- les nombreuses demandes émanant du Royaume-Uni et l'exécutionlequel exécutait souvent tardivement des les commissions rogatoires internationales françaises formulées par la France ;

- une amélioration de la coopération avec les Pays-Bas ;

- d'importants retards avec l'Espagne et le Portugal, le retour des pièces d'exécution intervenant parfois après le jugement.

Il est difficile de fournir des statistiques précises relatives aux demandes d'entraide judiciaire internationale, une grande partie des commissions rogatoires internationales échangées entre les autorités judiciaires et leurs homologues européens ne transitant pas par le canal du ministère de la justice. En 2002 , le ministère de la justice a toutefois eu connaissance de 777 commissions rogatoires adressées aux autorités judiciaires françaises dont 303 provenant des Etats membres de l'Union européenne (notamment 8 provenant d'Allemagne, 30 de Belgique, 23 d'Espagne, 165 du Royaume-Uni et 16 d'Italie) et 474 des Etats tiers (dont 54 provenant des Etats-Unis, 30 du Maroc et 28 de Monaco). Les commissions rogatoires délivrées par les autorités judiciaires des Etats étrangers portées à la connaissance du ministère de la justice se sont élevées à 870 dont 380 émanant des Etats membres de l'Union européenne (notamment 16 issues d'Allemagne, 33 d'Autriche, 99 de Belgique, 66 d'Espagne, 21 des Pays-Bas et 108 du Royaume-Uni) et 490 émanant des autres Etats (dont 226 issues de Turquie, 48 de Pologne et 29 des Etats-Unis).

EN ATTENTE DE STAT DE LA CHANCELLERIE SUR LA SITUATION ACTUELLE (DEMANDES D'ENTRAIDE PASSIVES ET ACTIVES)

Le présent projet de loi vise à prolonger ce mouvement en complétanter un cadre légal de création récente pour en améliorer la cohérence et en faciliter le fonctionnement.

? Une participation au fonctionnement d'Eurojust d'ores et déjà effective

Le 29 mars 2001, le Sénat a adopté une résolution relative à Eurojust. Notre excellent collègue M. Pierre Fauchon, à l'époque, rapporteur de ce textela proposition de résolution, avait formulé le souhait que cet organe ait une réelle utilité et « ne soit pas un organe supplémentaire n'apportant aucune plus-value par rapport à l'action des magistrats de liaison ou du réseau judiciaire européen  (...) et soit doté de compétences opérationnelles les plus étendues possibles » 27 ( * ) .

Dès le 6 mars 2002, soit avant même la mise en place de l'organe définitif et sans que le statut du représentant national ait été défini, la France a désigné un magistrat français en qualité de membre national français de l'unité provisoire pro-Eurojust . Les quatorze autres Etats membres ont également désigné leur représentant national.

? Le mandat d'arrêt européen, en attente de transposition

En décembre 2001, le Sénat a adopté une résolution relative au mandat d'arrêt et à la lutte contre le terrorisme approuvant l'économie générale de la décision-cadre. Notre excellent collègue M. Pierre Fauchon, à l'époque rapporteur de ce textela proposition de résolution, avait fait valoir que « la création d'un mandat d'arrêt européen appelé à se substituer aux traditionnelles procédures  d'extradition pourrait considérablement améliorer l'efficacité de la répression de la criminalité et limiter à l'avenir une certaine forme de « protectionnisme judiciaire » qui n'a pas sa place au sein d'un ensemble tel que l'Union européenne » 28 ( * ) .

La loi constitutionnelle n° 2003-267 du 25 mars 2003 relative au mandat d'arrêt européen a été adoptée en vue de permettre la transposition de la décision-cadre relative au mandat d'arrêt européen, le Conseil d'Etat, dans un avis du 26 septembre 2002, ayant jugé nécessaire une révision constitutionnelle préalable à l'adoption d'une loi de transposition au motif que le texte européen ne prévoyait pas la possibilité de refuser l'exécution d'un mandat d'arrêt portant sur une infraction à caractère politique.

A l'occasion de l'examen de ce texte, le Sénat avait souhaité « qu'un projet de loi de transposition soit déposé dans les plus brefs délais après l'adoption définitive de la loi constitutionnelle afin que la France puisse mettre en oeuvre dès cette année le mandat d'arrêt européen » 29 ( * ) . Marquant le souci de respecter les exigences européennes, le 17 juin dernier lors de son audition devant votre commission des Lois, le garde des Sceaux avait annoncé le dépôt d'un texte de transposition dès l'automne prochain.

Article 6
(art. 694, art. 694-1 à 694-9 nouveaux, art. 695, art. 695-1 à 695-10 nouveaux et art. 706-71 du code de procédure pénale, art. 30 de la loi du 10 mars 1927)
Règles relatives à l'entraide judiciaire internationale

Le présent article comprend trois paragraphes d'importance inégale, le premier, très dense, ayant pour objet de proposer une nouvelle rédaction du titre X du livre IX IV du code de procédure pénale en vue d'une modernisation des règles d'entraide judiciaire, les deux paragraphes suivants se bornant à opérer des coordinations pour supprimer des dispositions devenues inutiles.

? Le paragraphe I propose une refonte complète du régime d'entraide judiciaire internationale .

Tout en conservant l'intitulé du titre X, cet article propose d'en réécrire le contenu en vue d'établir une distinction entre deux régimes d'entraide judiciaire internationale , déclinés en deux chapitres autonomes , le premier de portée générale relatif à l'entraide judiciaire entre la France et tout Etat étranger, le deuxième consacré à l'entraide entre la France et les autres Etats de l'Union européenne transposant des mécanismes d'entraide spécialisés ayant vocation à fonctionner à l'échelle européenne uniquement . Un troisième chapitre plus spécifiquement consacré à l'entraide entre la France et certains Etats (chapitre III) serait également ajouté en vue d'étendre à certains pays étrangers non membres de l'Union européenne le bénéfice de certaines dispositifs dispositions visées au chapitre II spécifiquement aménagés au profit des Etats membres de l'Union européenne à certains pays étrangers non membres.

Il convient néanmoins de noter que le projet de loi propose de transposer une partie des dispositions de la convention du 29 mai 2000 pour les faire figurer sous le chapitre premier du titre X du livre IV du code de procédure pénale applicable à tout Etat étranger, ce qui témoigne d'une volonté d'unifier les régimes d'entraide en appliquant les mêmes règles à tous les Etats et de faire bénéficier les pays étrangers non-membres de l'Union européenne des mécanismes très souples issus de la législation européennetrès.

Chapitre premier
Dispositions générales

L'article 6 du projet de loi propose de regrouper les règles d'entraide judiciaire sous un chapitre premier traitant de « dispositions générales », divisé en deux sections respectivement relatives aux modalités de transmission et d'exécution des demandes d'entraide (articles 694 à 694-4 du code de procédure pénale) et à des dispositions plus spécifiques applicables à certains types de demandes d'entraide (articles 694-5 à 694-9 du même code).

Section 1
Transmission et exécution des demandes d'entraide
Article Article 694 du code de procédure pénale
Modalités de transmission des demandes
d'entraide judiciaire internationale

Dans sa rédaction actuelle, l'article 694 du code de procédure pénale traite des modalités d'exécution des demandes d'entraide judiciaire adressées par les juridictions étrangères .

Le projet de loi propose de réécrire l'article 694, dont le contenu serait déplacé à l'aux articles 694-2 et 694-3, pour y regrouper les règles relatives à la transmission des demandes d'entraide judiciaire internationale . Le champ d'application de cet article concernerait toutes les demandes d'entraide, françaises et étrangères .

S'inspirant des dispositions figurant à l'article 30 de la loi du 10 mars 1927, l'article 694 réécrit par le projet de loi propose d'en moderniser le contenu et de les codifier . Par coordination, le paragraphe III du présent article propose l'abrogation des dispositions figurant dans la loi de 1927 (voir infra ).

Dans sa rédaction actuelle , l'article 30 de la loi du 10 mars 1927 concerne les seules demandes adressées par les autorités judiciaires étrangères et destinées à leurs homologues françaises . En outre, son champ d'application est limité aux commissions rogatoires internationales. Cet article définit un double régime de transmission des demandes d'entraide qui diffère selon le degré d'urgence de la situation :

- hors le cas d'urgence, le principe d'une transmission indirecte s'applique, la voie diplomatique devant être empruntée. Actuellement, il appartient donc au ministère français des affaires étrangères préalablement saisi par son homologue étranger de faire suivre au ministère de la justice une demande d'entraide ;

- en cas d'urgence , le circuit est plus rapide , les demandes pouvant faire l'objet de communications directes entre les autorités judiciaires de chaque Etat, sous réserve toutefois d'en aviser par voie diplomatique le ministère français des affaires étrangères. L'article 696-1 du code de procédure pénale, qui vise à la fois les demandes émanant des autorités judiciaires françaises et celles de leurs homologues étrangers, rappelle d'ailleurs les principes existants en cas d'urgence. Comme l'indique la circulaire du 29 décembre 1999 à titre d'exemple, « le juge d'instruction français désirant obtenir un acte urgent s'adressera aux autorités compétentes de l'Etat requis . ».

Conservant cette dualité de régime selon que l'urgence est ou non caractérisée, l'article le texte proposé pour l'article 694 réécrit par le projet de loi établit une distinction nouvelle en fonction de l'origine (française ou étrangère) de la demande d'entraide . En outre, même si la commission rogatoire internationale 30 ( * ) constitue le principal instrument de l'entraide judiciaire en matière pénale, le dispositif vise désormais de manière plus générale l'ensemble toutes dles demandes d'entraide.

Hors le cas d'urgence , le principe d'une transmission indirecte , décliné selon des modalités différentes liées à l'origine de la demande, demeure.

- Le premier alinéa (1°) du texte proposé pour l'article 694 prévoit, pour les demandes d'entraide formulées par les juridictions françaises une transmission par l'intermédiaire du ministère de la justice , le retour des pièces devant emprunter une voie identique.

Actuellement, en l'absence de convention ou lorsqu'une convention le prévoit expressément, la transmission s'effectue par la voie diplomatique . La demande formulée par la juridiction française est transmise au ministère de la justice, lequel saisit ensuite le ministère des affaires étrangères. Après exécution, la demande est renvoyée par les mêmes canaux.

La procédure serait donc simplifiée en vue d'une plus grande célérité mais un filtre serait conservé ;

- le deuxième alinéa (2°) du texte proposé pour l'article 694 concerne les demandes d'entraide formulées par les autorités judiciaires étrangères et se bornent à reprendre les règles énoncées à l'article 30 de la loi du 10 mars 1927 précitée. La voie diplomatique serait donc maintenue tant pour la transmission de la demande que pour le retour des pièces d'exécution.

En cas d'urgence , le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 694 se borne à reprendrereprend les règles en vigueur relatives à la transmission directe des demandes d'entraide entre les autorités judiciaires compétentes de chaque Etat. Pour la France, il s'agira selon le cas, du procureur de la République ou du juge d'instruction. Une règle analogue est posée pour le retour des pièces d'exécution. La formalité supplémentaire actuellement imposée aux demandes formulées par les autorités étrangères relatives à l'obligation d'aviser la France de sa leur démarche par la voie diplomatique serait conservée , sauf convention internationale en stipulant autrement.

Pour les demandes formulées par la France, Comme le relève paradoxalement la circulaire du 29 décembre 1999 relève paradoxalement, qu'iil n'est toutefois pas certain que dans la pratique ce système soit le plus « efficace » s'agissant des demandes formulées par la France, l'autorité judiciaire étrangère d'exécution directement saisie « devant parfois obtenir une approbation ou une autorisation d'une autre autorité (cour d'appel, ministère de la justice) avant de procéder à l'exécution de la mission ». Toutefois, le passage obligatoire par l'intermédiaire de ministères paraît susceptible de créer des délais incompressibles.

TABLEAU RÉCAPITULATIF LES DIFFÉRENTS CIRCUITS
DE DEMANDES D'ENTRAIDE JUDICIAIRE INTERNATIONALE
AUX TERMES DU PRÉSENT PROJET DE LOI

DEMANDES D'ENTRAIDE JUDICIAIRE INTERNATIONALE

DEMANDES D'ENTRAIDE JUDICIAIRE INTERNATIONALE URGENTES

DEMANDES D'ENTRAIDE FORMULÉES PAR LA FRANCE

Transmission indirecte de la demande par l'intermédiaire du ministère de la justice

Transmission directe des demandes entre les autorités judiciaires

DEMANDES D'ENTRAIDE FORMULÉES PAR UN ÉTAT ÉTRANGER

Transmission indirecte de la demande par la voie diplomatique (le ministère des affaires étrangères, préalablement saisi par son homologue faisant suivre la demande au ministère de la justice)

Transmission directe des demandes entre les autorités judiciaires, sous réserve que le Gouvernement étranger en ait avisé la France par la voie diplomatique.

Votre commission des Lois estime le maintien d'une dualité de régime selon le caractère urgent de la situation pleinement justifié . les autorités judiciaires devant être suffisamment armées pour disposer d'une capacité de réaction suffisamment grande et adaptée à la rapidité d'action des délinquants.

ElleVotre commission des Lois vous soumet un amendement rédactionnel tendant à améliorer la cohérence du dispositif proposé pour l'article 694 du code de procédure pénale.

Article Article 694-1 nouveau du code de procédure pénale
Modalités de transmission des demandes urgentes d'entraide judiciaire internationale adressées à la France
par les autorités judiciaires étrangères

L'article 694-1 inséré dans le code de procédure pénale par le présent projet de loi a pour objet de préciser les modalités pratiques de transmission des demandes urgentes d'entraide judiciaire formulées par les autorités judiciaires étrangères.

Ces dispositions, qui relèvent soit de conventions soit de la pratique, ne font actuellement l'objet d'aucun encadrement législatif.

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 694-1 désigne les autorités judiciaires françaises susceptibles d'être directement saisies par les autorités étrangères. Il s'agit du procureur de la République ou du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance compétent.

Cette disposition paraît tout à fait cohérente, ces autorités étant compétentes pour l'exécution des demandes d'entraide. Il est d'ailleurs renvoyé à l'article 694-2 inséré dans le code de procédure pénale par le présent projet de loi, qui distingue les cas dans lesquels chacun de ces magistrats est compétent en précisant que le juge d'instruction exécute les demandes lorsque les actes de procédure sont ordonnés dans le cadre d'une instruction préparatoire, tandis qu'il revient au procureur de la République de répondre aux autres demandes avec la possibilité pour ces magistrats de requérir les autorités policières pour cette exécution 31 ( * ) .

Afin d'éviter des retards de transmission des demandes d'entraide, le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 694-1 impose au procureur de la République auquel est adressée directement par erreur une demande relevant du juge d'instruction l'obligation de la lui transmettre , sauf si l'acte demandé est de nature à porter atteinte à l'ordre public ou aux intérêts essentiels de la Nation. Dans cette dernière hypothèse, il est renvoyé aux dispositions de l'article 694-4, créé par le projet de loi, relatif à la clause de sauvegarde 32 ( * ) . selon lequel le procureur de la République sollicité doit faire suivre la demande au procureur général qui peut, à son tour, saisir le ministère de la justice et en aviser le juge d'instruction.

Le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 694-1 concerne l'hypothèse d'une saisine directe du juge d'instruction et impose à ce dernier, avant d'exécuter la demande d'entraide, l'obligation de la communiquer immédiatement au procureur de la République pour recueillir son avis. Ainsi que le souligne l'étude d'impact jointe en annexe, ce dispositif vise à garantir l' information systématique du ministère public et à concilier « la volonté du Gouvernement de favoriser la transmission directe des demandes d'entraide et la nécessité d'assurer la sauvegarde des intérêts essentiels de la Nation et le respect de l'ordre public ».

Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel en vue, d'une part, d'harmoniser la terminologie retenue pour caractériser une situation d'urgence et, d'autre part, de supprimer la référence au « doyen des juges d'instruction » pour ne mentionner que le seul « juge d'instruction ».

Article Article 694-2 nouveau du code de procédure pénale
Modalités d'exécution des demandes d'entraide judiciaire adressées par les autorités judiciaires étrangères -
Désignation des autorités judiciaires françaises chargées d'exécuter ces demandes et définition de leurs compétences respectives

L'article 694-2 inséré dans le code de procédure pénale par le I de l'article 6 du projet de loi a pour objet de désigner les autorités judiciaires françaises chargées d'exécuter les demandes d'entraide judiciaire internationale adressées par leurs homologues étrangers et de préciser le champ de leurs compétences respectives.

Actuellement , ces règles figurent à l'article 694 du code de procédure pénale dont le premier alinéa dispose que les demandes d'entraide sont exécutées, selon les cas, dans les formes prévues par le code de procédure pénale pour l'enquête, l'instruction ou le jugement. Ainsi, il revient soit au procureur de la République, soit au juge d'instruction, ou encore au tribunal correctionnel statuant à juge unique ou au tribunal de police de répondre aux demandes.

Les deuxième et troisième alinéas de cet article se bornent à décliner ce principe général en traitant plus spécifiquement des attributions respectives du juge d'instruction, compétent pour exécuter les actes de procédure relevant de sa seule compétence et de la juridiction de jugement, chargée d'effectuer certains actes, tels ceux réalisés en audience publique ou les actes contradictoires.

Le texte proposé pour l'article 694-2 reprend les règles actuelles figurant à l'article 694 relatives aux compétences du procureur de la République et du juge d'instruction :

- son premier alinéa attribue au procureur de la République une compétence de principe pour l'exécution des demandes d'entraide . Par rapport aux règles actuelles est ajoutée une précision relative à la possibilité qu'il aura de déléguer cette tâche à des officiers ou des agents de police judiciaire requis à cette fin ; le droit est ainsi aligné sur la pratique ;

- son deuxième alinéa précise le cadre juridique d'intervention du juge d'instruction , limité aux actes de procédure susceptibles d'être ordonnés ou exécutés au cours d'une instruction préparatoire. Le dispositif mentionne en outre la possibilité pour ce magistrat de déléguer deconfiers l'exécution des demandes d'entraide à des officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire pour l'exécution des demandes d'entraide.

En revanche, est supprimée toute référence à la juridiction de jugement , cette modalité d'exécution des demandes d'entraide, étant jugée trop contraignante, ayant été supprimée. Dans le souci d'alléger et de simplifier la procédure, iIl appartiendrait désormais au juge d'instruction d'exécuter les demandes relevant actuellement de la juridiction de jugement, ce qui constitue une opportune mesure de simplification.

Article Article 694-3 nouveau du code de procédure pénale
Modalités d'exécution des demandes d'entraide judiciaire formulées par les autorités judiciaires étrangères -
Applicabilité du code de procédure pénale

L'article 694-3 inséré dans le code de procédure pénale par le I du présent article définit la procédure applicable pour l'exécution par les autorités judiciaires françaises des demandes d'entraide judiciaire formulées par les autorités judiciaires étrangères.

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 694-3 reprend le principe énoncé au premier alinéa de l'actuel article 694 du code de procédure pénale selon lequel les règles de droit français s'appliquent .

Le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 694-3 introduit une dérogation nouvelle à ce principe, relative à la possibilité pour l'autorité étrangère requérante d'obtenir l'exécution de la demandede préciser selon lles règles de procédure de son choix . L'exercice de cette faculté est soumis à la double condition que cette requête figure dans la demande d'entraide et que les règles applicables ne réduisent pas les droits des parties ou les garanties procédurales prévues par la loi française, cette dernière exigence s'imposant sous peine de nullité.

Cette innovation qui autorise l'application sur le sol français d'une procédure étrangère constitue une inversion de l'adage « locus regit actum » applicable en France jusqu'à présent. Elle se justifie par le double souci de mieux prendre en compte la législation de l'Etat requérant et de faciliter l'utilisation des informations recueillies grâce à l'entraide judiciaire .

Le dispositif vise à transposer les règles énoncées au paragraphe 1 de l'article 4 de la convention européenne du 29 mai 2000 précitée, qui impose à l'Etat membre requis de se conformer aux formalités et aux procédures souhaitées par l'Etat membre requérant, pour autant qu'elles ne soient pas contraires aux principes fondamentaux de son droit . Pourtant, Notons d'ailleurs il convient de noter que son champ d'application, plus large que l'espace communautaire, concerne tout Etat étranger . Le projet de loi fait donc le choix d'aligner le régime applicable aux Etats n'appartenant pas à l'Union européenne sur celui institué au profit des pays membres de l'Union européenne. Cette démarche témoigne d'une volonté d'ouverture en matière d'entraide judiciaire, ce que votre rapporteur ne manque pas dpeut qu''approuver.

Toutefois, il convient de noter une lacune du dispositif qui n'envisage pas l'hypothèse d'une demande qui ne pourrait être exécutée conformément aux formalités requises par l'Etat requérant. On notera que le paragraphe 3 de l'article 4 de la convention du 29 mai 2000 précitée prévoit cette hypothèse situation en à laquelle elle tente de remédier imposant à en imposant à l'Etat requis d'informer l'autorité de l'Etat requérant de sa décision dans les meilleurs délais 33 ( * ) .

Outre que l'information de l'Etat requérant constitue une obligation résultant de la convention du 29 mai 2000, elle s'avère souhaitable pour éviter des lenteurs dans la procédure. En effet, il paraît important que les autorités des deux Etats puissent se mettre en relation le plus vite possible afin de trouver un accord permettant de faire aboutir la demande d'entraide. Tel est l'objet d'un amendement que votre commission vous soumet.

Elle vous propose également d'adopter un amendement de précision en vue de faire référence « à l'autorité compétentes de l'Etat requérant » plutôt qu'aux « aux autorités étrangères ».

Le troisième et dernier alinéa du texte proposé pour l'article  694-3 tend à affirmer le principe selon lequel l'irrégularité de la transmission de la demande d'entraide ne constitue pas une cause de nullité des actes exécutés sur son fondement .

La chambre criminelle de la Cour de cassation a, dans un arrêt du 4 novembre 1997, consacré ce principe, après avoir considéré que la chambre d'accusation (devenue depuis chambre de l'instruction), compétente dans certaines conditions pour contrôler la régularité des actes d'instruction effectués sur le territoire français en vue d'exécuter une commission rogatoire internationale, « ne saurait, sans excéder ses pouvoirs,, porter une appréciation sur les modalités de délivrance et de transmission d'une telle délégation ».

Le projet de loi marque donc la volonté de confirmer cette interprétation en lui donnant une base légale incontestable .

Article Article 694-4 nouveau du code de procédure pénale
Clause de sauvegarde de l'ordre public
et des intérêts essentiels de la Nation

L'article 694-4 inséré dans le code de procédure pénale par le I de l'article 6 du projet de loi tend à reprendre, moyennant quelques précisions, l'exception relative à la clause de sauvegarde de l'ordre public et des intérêts essentiels de la Nation actuellement énoncée à l'article 696-2 dans sa rédaction actuelle.

Lorsque certaines demandes d'entraide étrangères sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité, à l'ordre public ou aux intérêts essentiels de la Nation, les autorités judiciaires sont actuellement soumises à l'obligation d'en informer les autorités compétentes, auxquelles il appartient lesquelles dée décidercident des suites à leur donner . La circulaire du 29 décembre 1999 apporte des précisions à cet égard, mentionnant que la saisine du ministère de la justice s'effectue « par le canal du ministère public ».

Cette clause de sauvegarde de l'ordre public et des intérêts de la Nation reproduit en droit interne une des exceptions énoncées à l'article 2 de la convention européenne d'entraide judiciaire du 20 avril 1959, qui permet d'opposer un refus à une demande d'entraide notamment de nature à porter atteinte à l'ordre public et aux intérêts essentiels de la Nation. Cette règle figure également dans de nombreuses conventions bilatérales.

Comme l'indique la circulaire du 29 décembre 1999 précitée, « cette disposition sera évidemment d'application très rare : en effet, l'action judiciaire n'est pas en soi de nature à porter atteinte aux intérêts essentiels d'un pays, et doit tout particulièrement entre les Etats de l'Union européenne se développer dans un climat de confiance ». Elle précise qu'il s'agit essentiellement de « demandes mettant en jeu des secrets dont la divulgation pourrait s'avérer dangereuse, notion qui concerne non seulement le domaine militaire, mais aussi notamment les domaines économique, écologique ou sociauxsocial ».

Le texte proposé pour l'article 694-4 reprend ce principe, sous réserve de quelques précisions et compléments.

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 694-4 dispose qu'il appartient au procureur de la République de transmettre une demande d'entraide dont l'exécution risque de porter atteinte à l'ordre public ou aux intérêts essentiels de la Nation au procureur général , auquel il revient de décider de saisir le ministre de la justice.

Ce dispositif concerne les demandes adressées directement au procureur de la République comme celles adressées au juge d'instruction , qui, comme il l'a été indiqué précédemment, doit obligatoirement aviser le procureur de la République de toutes les demandes qui lui sont adressées directement 34 ( * ) . Dans cette dernière hypothèse, le texte prévoit que le juge d'instruction est informé par le procureur général de la transmission de la demande d'entraide au ministère de la justice de la demande d'entraide.

La philosophie des règles actuelles n'est donc pas bouleversée par le projet de loi mais plutôt confortée, la saisine du ministère de la justice s'effectuant toujours par le canal du ministère public .

Soucieux d'améliorer la lisibilité du dispositif, votre rapporteur vous propose de le compléter par une précision. En effet, il n'est pas indiqué clairement qu'il revient au ministre de la justice d'apprécier des suitesde décider de la suite à réserver à à réserver à une demande d'entraide, même si cette règle se déduit implicitement de la lecture du premier alinéa. Il paraît opportun d'apporter cette précision par amendement .

Le second alinéa du texte proposé pour l'article 694-4 vise le cas d'un refus de poursuivre totalement ou partiellement l'exécution de la demande d'entraide. Il prévoit une obligation pour le ministre de la justice d'informer l'autorité de l'Etat membre requérant de sa décision . Le texte prévoit que cette décision, notifiée à l'autorité judiciaire saisie de la demande d'entraide (le procureur de la République ou le juge d'instruction), fait obstacle à l'exécution de la demande ou au retour des pièces d'exécution.

Cette obligation d'information de l'autorité de l'Etat requérant figure déjà dans la circulaire du 29 décembre 1999, sous des modalités différentes. En effet, elle prévoit qu'en cas de refus il revient à l'autorité judiciaire initialement saisie de la demande d'entraide, informée par le ministère de la justice, de notifier cette décision à l'autorité de l'Etat requérant.

Le dispositif proposé par le projet de loi propose un circuit plus simple et plus rapide en confiant directement au ministère de la justice directement le soin d'informer l'autorité de l'Etat requérant de sa décision, sans passer par l'intermédiaire de l'autorité chargée d'exécuter la demande.

Section 2
Dispositions applicables à certains types de demandes d'entraide
Article Article 694-5 nouveau du code de procédure pénale
Audition à distance

L'article 694-5 inséré dans le code de procédure pénale par le I de l'article 6 permet l'utilisation de l'audition à distance prévue par l'article 706--71 du code de procédure pénale dans le cadre des demandes d'entraide formulées par les autorités judiciaires françaises ou étrangères.

L'utilisation de techniques modernes de communication à distance a déjà été consacrée en 1998 pour la juridiction de Saint-Pierre-et-Miquelon par les articles L. 952-7 et L.  952-11 du code de l'organisation judiciaire. Préconisée par plusieurs instruments internationaux, elle présente un intérêt tout particulier en matière d'entraide judiciaire internationale, spécialement en matière de lutte contre le terrorisme.

Il est apparu indispensable au législateur d'autoriser l'utilisation de moyens de communication audiovisuelle (« vidéoconférence ») et téléphonique (« téléconférence ») garantissant la confidentialité de la transmission au cours de la procédure pénale et la sécurité de la procédure en vue d' interroger des personnes à distance et de surmonter les obstacles procéduraux ou matériels liés au déplacement de ces personnes ou des autorités susceptibles de les entendre.

La loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne a donc introduit dans le code de procédure pénale des dispositions en vue de donner une base légale à des pratiques innovantes définies à l'article 706-71 35 ( * ) . Ce dispositif permet l'audition, l'interrogatoire ou la confrontation de plusieurs personnes à distance . Applicable aux témoins, aux personnes gardées à vue et aux interprètes, il a été adopté à l'initiative du précédent Gouvernement, peu après les évènements événements survenus aux Etats-Unis le 11 septembre 2001, pour lutter plus efficacement contre le terrorisme. Ces règles transitoires avaient vocation à s'appliquer jusqu'au 31 décembre 2003. La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice les a pérennisées et confortées.

En parallèle, la législation européenne a défini un cadre légal destiné à promouvoir l'utilisation de moyens modernes de communication à distance particulièrement adaptés au cadre de l'Union européenne .

L'article 10 de la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale du 29 mai 2000 ouvre aux Etats membres de l'Union européenne la possibilité de présenter une demande d'audition d'un témoin ou d'un expert par vidéoconférence (paragraphe 1). Le paragraphe 9 de ce même article 10 permet l'audition par vidéoconférence d'une personne poursuivie pénalement , sous réserve de son consentement avant la tenue de l'audience.

Les formalités pratiques de cette procédure à distance sont précisées :

- l'Etat requérant doit justifier sa demande ;

- l'audition a lieu en présence d'une autorité judiciaire de l'Etat requis, au besoin assistée d'un interprète, la personne entendue peut pouvant également être assistée d'un interprète ;

- l'Etat requis peut, sous certaines conditions, obtenir un remboursement dedes charges liées à la procédure de la part de l'Etat requérant de charge liées à la procédure ;

- l'autorité de l'Etat membre requis doit établir un procès-verbal de l'audition à transmettre à l'autorité de l'Etat requérant.

Son paragraphe 5 (c) exige que l'audition soit effectuée directement par l'autorité judiciaire de l'Etat membre requérant ou sous son contrôle et conformément à son droit interne. En revanche, son paragraphe 8 prévoit qu'en cas de refus de témoigner ou de faux témoignage pendant l'audition, l'Etat membre requis applique ses propres règles nationales.

Plus succinct, l'article 11 de la convention européenne du 29 mai 2000 précitée concerne les auditions par téléconférence et diffère de l'article 9 10 en ce qu'il exige dans tous les cas le consentement de la personne entendue et ne s'applique pas aux personnes poursuivies pénalement.

Le texte proposé pour l'article 694-5 tend à actualiser les règles actuelles relatives aux auditions à distance dans le cadre de demandes d'entraide en vue d'assurer la transposition des articles 10 et 11 de la convention du 29 mai 2000 précitée et de mettre le droit français en conformité avec les exigences européennes . Comme l'article 694-3 créé par le projet de loi, le champ d'application de cet article s'étend à tout pays étranger , ce qui témoigne là encore d'une conception extensive du projet de loi et d'une démarche ambitieuseet non aux seuls pays de l'Union européenne.

Moyennant quelques modifications rédactionnelles, le premier alinéa du texte proposé pour l'article 694-5 se borne à reproduire, le troisième alinéa de l'actuel article 706-71 qui autorise les auditions à distance prévues par cet article pour l'exécution simultanée en France et à l'étranger, des demandes d'entraide émanant des autorités françaises ou étrangères. Afin d'éviter des redondances, le II du présent article propose, par coordination, d'abroger les dispositions devenues inutiles figurant à l'article 706-71.

Le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 694-5 concerne plus spécifiquement le cas de l'exécution d'une demande émanant des autorités judiciaires françaises. Transposant le c) du paragraphe 5 de l'article  10 de la convention, il prévoit l'application de la loi française aux interrogatoires, auditions ou confrontation réalisés à l'étranger. Le texte mentionne toutefois que cette règle s'applique à condition qu'une convention internationale ne prévoie pas de stipulations contraires. Notons que cette précision n'a de ce sens qu'à l'égard des Etats non membres de l'Union européenne, les Etats membres étant soumis aux règles de droit communautaire.

Transposant le paragraphe 9 de l'article 10 de la convention européenne du 29 mai 2000, le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 694-5 autorise l'interrogatoire ou la confrontation de la personne  pénalement poursuivie moyennant son consentement . L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté un amendement de précision terminologique destiné à remplacer le terme d'  « audition », insusceptible d'être employé pour une personne poursuivie pénalement, par les expressions juridiquement plus appropriées relatives à « l'interrogatoire ou la confrontation ».

Transposant le paragraphe 8 de l'article 10 de la convention précitée, le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 694-5 précise que les peines infligées aux témoins entendus dans le cadre d'une procédure française dans l'hypothèse d'une témoignage mensonger fait sous serment ou d'un refus de comparaître sont applicables aux témoins entendus sur le territoire français à la demande d'une autorité étrangère dans le cadre d'une audition à distance.

Il est donc renvoyé aux articles correspondants du code pénal : à l'article 434-13 qui punit le témoignage mensonger d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 75.000 euros d'amende et à l'article  434-15-1 qui sanctionne le fait de ne pas prêter serment ou de ne pas déposer, sans excuse ni justification, devant le juge d'instruction d'une amende de 3.750 euros.

Votre commission vous soumet un amendement de cohérence rédactionnelle.

Article Article 694-6 nouveau du code de procédure pénale
Extension des compétences de la police judiciaire pour les opérations de surveillance effectuées à l'étranger

L'article 694-6 du code de procédure pénale créé par le I de l'article 6 du projet de loi a pour objet d'autoriser la poursuite dans un Etat étranger des opérations de surveillance effectuées par les autorités de police françaises dans le cadre d'une affaire de criminalité organisée en application de l'article 706-80 créé par le projet de loi (voir supra ).

On rappellera brièvement que l'article 706-80 a vocation à s'appliquer à l'occasion de crimes ou de délits commis en entrant dans le champ d'application des articles 706-73 (meurtre en bande organisée, torture et actes de barbarie commis en bande organisée, trafic de stupéfiants, enlèvement et séquestration, traite des êtres humains) ou 706-74 (crimes aggravés contre les biens, vol en bande organisée, extorsion de fonds commise en bande organisée). Il tend à apporter une dérogation au principe mentionné à l'article 18 du code de procédure pénale selon lequel la compétence territoriale des officiers de police judiciaire se limite au lieu d'exercice de leurs fonctions habituelles .

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 694-6 précise les conditions dans lesquelles la compétence territoriale des officiers de police judiciaire, et des agents de police judiciaire placés sous leur autorité, peut être étendue, exigeant l'autorisation préalable du procureur de la République chargé de l'enquête , dans les conditions prévues par une convention internationale (premier alinéa). Ainsi, une telle procédure ne pourra s'effectuer sans base conventionnelle entre la France et l'Etat étranger sollicité.

A cet égard, il convient d'observer que l'article 706-80 créé par le projet de loi prévoit des modalités différentes, en n'accordant pas de droit de veto aule procureur de la République simplement informé par tout « moyen » par les autorités de police lequel ne dispose disposant d'aucune marge d'appréciation sur l'extension au territoire national de la leurs compétences des autorités de police mais est simplement informé par tout « moyen » par ces dernières.

Le second alinéa du texte proposé par cet article prévoit le versement au dossier des procès-verbaux d'exécution des opérations de surveillance, des rapports y afférents et de l'autorisation d'en poursuivre l'exécution.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté un amendement de précision pour faire référence aux « opérations de surveillance » plutôt qu'à « l'observation ».

Articlesicles 694-7 et 694-8 nouveaux du code de procédure pénale
Droit de poursuivre en France une opération d'infiltration effectuée par des agents de police étrangers dans le cadre d'une procédure étrangère - Droit accordé aux autorités françaises de recourir à des agents étrangers dans le cadre d'une procédure d'infiltration sur le territoire national

Transposant les articles 12 et 14 de la convention du 29 mai 2000 précitée, les articles 694-7 et 694-8 du code de procédure pénale créés par le I de l'article 6 du projet de loi ont pour objets respectifs d'autoriser les agents de police étrangers à poursuivre sur le territoire français des opérations d'infiltration étrangères pour des les affaires de criminalité organisée les plus graves et de permettre aux autorités françaises de recourir à des agents infiltrés étrangers pour des opérations analogues.

1. Les règles prévues par la convention du 29 mai 2000

L'article 12 de la convention du 29 mai 2000 impose aux Etats membres de l'Union européenne de prendre les mesures nécessaires pour garantir qu' à la demande d'un autre Etat membre, une livraison surveillée puisse être avoir lieu sur son territoire (paragraphe 1). Comme l'indique le rapport explicatif de la convention, cCe terme n'est pas précisément défini et « il convient de l'interpréter conformément à la loi et aux pratiques nationales » ;, ajoutant qu' il « s'agit d'une technique qui s'est révélée très efficace dans la lutte contre le trafic de drogue et d'autres formes graves de criminalité » 36 ( * ) . Europol a d'ailleurs élaboré un manuel de l'Union européenne sur ce type d'opération contenant d'utiles informations quant à son déroulement. Le champ d'application de ce dispositif s'étend aux opérations portant sur les seules infractions pénales susceptibles de donner lieu à une extradition 37 ( * ) .

Le paragraphe 2 de l'article 12 prévoit qu'il appartient à l'Etat membre requis de décider d'autoriser la prolongation d' opérations d'infiltration sur son territoire. En outre, par dérogation au principe prévu à l'article 4 de la convention (paragraphe 1) selon lequel l'exécution des demandes d'entraide doit respecter les formalités indiquées par l'Etat requérant, le paragraphe 3 de l'article 12 précise que les livraisons doivent se dérouler selon le droit de l'Etat requis.

L'article 14 de la convention du 29 mai 2000 précitée traite des enquêtes discrètes effectuées par des agents intervenant sous le couvert du secret ou sous une identité fictive dénommés « agents infiltrés ». Le champ d'application de cet article est plus large que celui de l'article 12 puisqu'il s'étend à toutes les infractions pénales .

Cet article définit un cadre souple , selon lequel les Etats membres requérant et requis doivent devant d'accorder s'accorder sur l'intervention d'un agent infiltré et décider dans chaque affaire d'une réponse adaptée. Il indique que lL'entraide peut donc être demandée au titre de la poursuite sur le territoire d'un autre Etat membre d'une opération menée par un agent infiltré ou au titre de la mise à disposition d'un agent infiltré par l'Etat membre requis pour mener une enquête discrète sur ce territoire.

Son paragraphe 2 encadre cette pratique en imposant aux Etats de fixer la durée des enquêtes, leurs modalités et le statut juridique des agents concernés.

Son paragraphe 3 précise que ces enquêtes se déroulent selon le droit et les procédures en vigueur dans l'Etat requis, par dérogation à l'article 4 de la convention précitée (paragraphe 1). En outre, il est indiqué que la préparation et la direction sont assurées par les deux Etats intéressés, appelés à coopérer étroitement.

L'article 14 ne s'impose pas impérativement aux Etats membres (paragraphe 4).

2. Une transposition fidèle de ces règles par le projet de loi

? L'article 694-7 du code de procédure pénale créé par le projet de loi a pour objet de définir les règles relatives à la poursuite sur le territoire français d'opérations d'infiltration décidées par des autorités étrangères et effectuées par des agents étrangers .

Son premier alinéa définit le régime de cette procédure nouvelle par référence au cadre légal national défini aux articles 706-81 à 706-86 du code de procédure pénale créés par l'article premier du présent projet de loi auxquels il est expressément renvoyé ( supra ). Ainsi, à l'instar des opérations d'infiltration décidées par les autorités françaises et menées sur le territoire national :

- le champ d'application des opérations d'infiltration étrangères se limite aux affaires entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 qui vise les cas de criminalité organisée les plus graves (article 706-81) ; ;

- ces enquêtes sont soumises à l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction après avis de ce dernierdu ministère public et se déroulent sous le contrôle du magistrat compétent (article 706-81) ;

- les actes exonérés de responsabilité pénale auxquels les officiers peuvent procéder sont limitativement énumérés (acquisition, transport, livraison de substances, biens, documents tirés de la commission d'infractions par exemple) (article 706-82) ;

- le délai de l'autorisation de l'opération d'infiltration ne peut excéder quatre mois renouvelables (article 706-83) ;

- la révélation de l'identité réelle des agents est sanctionnée (article 706-84) ;

- l'irresponsabilité pénale se prolonge en cas d'interruption de l'opération ou à l'issue d'un délai fixé par l'autorisation le temps strictement nécessaire pour cesser la surveillance dans des conditions assurant la sécurité de l'agent (article 706-85)  ;

- l'officier de police judiciaire responsable de la conduite de l'opération peut seul être entendu en qualité de témoin, avec la possibilité pour la personne mise en examen de lui être confrontée (article 706-86).

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté un amendement de coordination pour tirer les conséquences de la suppression de l'article 706-87 auquel le projet de loi faisait initialement référence 38 ( * ) .

En outre, le premier alinéa du texte proposé pour l'article 694-7 exige l'accord du ministère de la justice préalablement à la poursuite d'opérations d'infiltration étrangères, lequel peut assortir sa décision de conditions. Il est également précisé que les agents de police étrangers agissent sous la direction d'officiers de police judiciaire français.

Par coordination avec le rétablissement de l'article 706-87 du code de procédure pénale créé par l'article premier du projet de loi initial et supprimé par les députés qui vous a été précédemment proposé, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement de coordination tendant à rétablir la référence à cet article dans le texte proposé pour l'article 694-7.

En application des exigences prévues à l'article 706-81 créé par l'article premier du projet de loi, le texte soumet la poursuite de ces opérations à l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction spécialisé exerçant près le tribunal de grande instance de Paris . Il est indiqué que ces opérations ne peuvent être confiées qu'à des agents spécialement habilités à cet effet , exerçant des missions analogues à celles dévolues aux officiers ou agents de police judiciaire .

Cette innovation destinée à rendre le régime d'enquête plus souple a été unanimement saluée par les personnes auditionnées entendues par votre rapporteur. En effet, une telle souplesse est impossible actuellement, les officiers de police judiciaire devant prendre systématiquement le relais des agents de police étrangers une fois la frontière française franchit, ce qui alourdit considérablement la procédure et peut nuire à sa confidentialité.

- L'article 694-8 créé par le projet de loi ouvre aux autorités judiciaires françaises la faculté nouvelle de s'appuyer sur des agents de police étrangers pour mener une opération d'infiltration sur le territoire de la république République dans le cadre d'une procédure nationale .

A l'instar de l'article 694-7 précédemment commenté, il est renvoyé au cadre légal des opérations d'infiltration prévu aux articles 706-81 à 706--86. L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté un amendement de coordination pour tirer les conséquences de la suppression de l'article 706-87 créé par l'article premier du projet de loi, auquel le projet de loi initial faisaitil était initialement fait référence.

Le projet de loi subordonne le recours à des agents de police étrangers infiltrés à l'accord des autorités judiciaires étrangères , étant précisé qu'il s'agirait des mêmes agents que ceux visés par l'article 694-7, c'est-à-dire d'agents spécialement habilités à cette fin et « exerçant des missions similaires à celles des agents nationaux spécialement habilités ».

A la différence de l'article 694-7, l'autorisation du ministère de la justice ne serait pas requise, la décision de recourir à des agents de police étrangers incombant exclusivement aux magistrats compétents (procureur de la République ou juge d'instruction). En outre, il ne serait pas prévu un monopole exclusif au bénéfice du tribunal de grande instance de Paris. Les autres pôles de lutte contre la criminalité organisée pourraient donc également faire usage cette faculté nouvelle.

La transposition de la convention du 29 mai 2000 dépasse le seul cadre de l'Union européenne : les dispositions proposées par les articles 694-7 et 694-8 sont applicables à tout agent issu d'un Etat étranger quelle que soit son origine géographique.

Par coordination avec le rétablissement de l'article 706-87 du code de procédure pénale créé par l'article premier du projet de loi initial et supprimé par les députés qui vous a été précédemment proposé, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement de coordination tendant à rétablir la référence à cet article dans le texte proposé pour l'article 694-8.

Article 694-9 nouveau du code de procédure pénale
Modalités de communication d'informations issues d'une procédure pénale en cours aux autorités judiciaires étrangères

Transposant les articles 7 et 13 de la convention du 29 mai 2000, l'article 694-9 du code de procédure pénale créé par le projet de loi définit les modalités de communication spontanée d'informations issues d'une procédure pénale en cours aux autorités judiciaires étrangères.

1. Le cadre juridique des échanges d'informations entre les Etats membres défini par la convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale

L'article 7 de la convention du 29 mai 2000 précitée fixe un cadre juridique permettant « l'échange spontané d'informations » c'est-à-dire sans demande préalable. Son paragraphe 1 permet aux autorités compétentes des Etats membres d'échanger des informations sans présenter de demande d'entraide judiciaire formelle. Sont visés par ce dispositif les renseignements relatifs à des faits pénalement punissables ainsi qu'à certaines infractions administratives .

Ces dispositions sont facultatives , les Etats demeurant libres de procéder à des échanges dans les limites de leur droit national.

Le paragraphe 2 de l'article 7 de la convention prévoit la possibilité pour l'autorité judiciaire à l'origine de l'information de soumettre son utilisation à certaines conditions que l'autorité étrangère destinataire est tenue de les respecter.

L'article 13 de la convention du 29 mai 2000 précitée traite également des échanges d'informations spontanés entre Etats membres dans le cadre des équipes communes d'enquête 39 ( * ) . Son paragraphe 9 ouvre aux Etats la faculté, et non l'obligation, de prévoir la possibilité pour un membre détaché auprès de l'équipe commune, de fournir à l'équipe des informations disponibles dans l'Etat membre qui l'a détaché . Son paragraphe 10 soumet l'utilisation d'une information recueillie par un membre ou un membre détaché dans le cadre de sa participation à une équipe commune d'enquête pour poursuivre d'autres infractions pénales, à l'accord de l'Etat dans lequel elle a été obtenue, sauf s'il existe un risque de mettre en danger l'enquête pénale en cours sur le territoire de ce dernier.

Ces dispositions ne constituent pas une innovation, des mécanismes d'échanges d'informations entre les services de police des Etats membres existant déjà aux termes de la convention d'application de l'accord de Schengen conclue le 19 juin 1990.

2. Le dispositif proposé par le projet de loi

Le texte proposé pour l'article 695694-9 ouvre au procureur de la République ou au juge d'instruction la possibilité, lorsque des conventions internationales les y autorisent, de communiquer aux autorités judiciaires étrangères des informations issues d'une procédure pénale en cours.

Toutefois, il permet à ces derniers d'assortir l'utilisation des renseignements fournis de conditions qu'ils déterminent. Comme l'indique l'étude d'impact, ce dispositif laisse toutes latitude à ces magistrats  « de décider si l'information transmise peut ou non être versée à la procédure étrangère ».

Ces échanges d'informations s'effectuent directement entre autorités judiciaires sans intermédiaire, ce qui paraît conforme aux dispositions prévues par le paragraphe 1 de l'article 6 de la convention du 29 mai 2000 précitée. Ce mécanisme constitue une dérogation à la règle du secret de l'instruction consacrée à l'article 11 du code de procédure pénale. Toutefois, seul ces échanges ne peuvent être effectués qu'entreun magistrats disposant de la faculté de communiquer une information relative à une procédure pénale en cours.

Chapitre II
Dispositions propres à l'entraide
entre les Etats membres de l'Union européenne

L'article 6 du projet de loi propose d'insérer un chapitre II regroupant des « dispositions propres à l'entraide entre les Etats membres de l'Union européenne », lequel serait divisé en trois sections respectivement relatives aux modalités de transmission et d'exécution des demandes d'entraide (article 695-1), aux équipes communes d'enquête (articles 695-2 et 695-3) et à l'unité Eurojust (articles 695-4 à 695-9).

Par souci de précision, votre commission vous propose également par un amendement en vue de modifier le l'intitulé du chapitre II pour faire référence à des « dispositions relatives à l'entraide entre la France et les Etats membres de l'Union européenne ».

Les dispositions figurant sous ce chapitre remplacent les actuels articles 695 et 696-1 du code de procédure pénale relatifs aux demandes d'entraide entre la France et les Etats européens parties à la convention d'application des accords de Schengen conclue le 19 juin 1990, qui constituait la base juridique la plus récente des demandes d'entraide effectuées au sein de l'espace européen, désormais dépassées du fait de l'adoption le 29 mai 2000 de la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale précitée.

Article Article 695 du code de procédure pénale
Définition du champ d'application du chapitre II

L'article 695 créé par le projet a pour objet d'indiquer que le champ d'application du chapitre II concerne les demandes d'entraide entre la France et les autres Etats membres de l'Union européenne.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté un amendement rédactionnel supprimant la mention inutile selon laquelle il s'agit des demandes d'entraide présentées en application de la convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale.

Section 11
Transmission et exécution des demandes d'entraide
Article Article 695-1 nouveau du code de procédure pénale
Modalités de transmission et d'exécution des demandes d'entraide entre la France et les Etats membres de l'Union européenne

Transposant l'article 6 de la convention du 29 mai 2000, l'article  695-1 créé par le projet de loi a pour objet de poser le principe de la transmission directe des demandes d'entraide entre les autorités judiciaires compétentes, cette règle s'appliquant également au retour des pièces d'exécution.

Les modalités de transmission des demandes d'entraide entre les Etats de l'Union européenne ont évolué. La convention européenne d'entraide judiciaire du 20 avril 1959 prévoyait un mode de transmission centralisé entre chaque pays, la transmission directe étant toutefois prévue en cas d'urgence. Tout en autorisant la transmission directe, la convention d'application de l'accord de Schengen de 1990 n'a pas supprimé la faculté d'envoi par l'intermédiaire des ministères de tutelle, instaurant ainsi un système mixte.

L'article 6 de la convention du 29 mai 2000 consacre le principe de la transmission et de l'exécution directe des demandes d'entraide, le retour des pièces d'exécution devant suivre le même canal . Il constitue un progrès, l'article 53 de la convention d'application de l'accord (abrogé par l'article 2 de la convention du 29 mai 2000) n'ayant donné aux autorités judiciaires qu'une simple faculté de communiquer entre elles sans intermédiaire . La convention précitée précise que ces demandes peuvent être formulées par écrit mais également par tout moyen permettant d'en obtenir une trace écrite, ce qui autorise l'utilisation de la télécopie ou encore du courrier électronique.

Cet article prévoit toutefois des exceptions à ce principe en imposant que certaines demandes liées aux demandes de transfèrement temporaire ou de transit de détenus ainsi que les avis de condamnation soient transmis par des autorités centrales des Etats membres (paragraphe 8).

Actuellement , l'article 695 du code de procédure pénale relatif à la transmission des demandes d'entraide applicable entre la France et les Etats parties à l'accord de Schengen, en application de l'article 53 de la convention de Schengen précitée, donne compétence au procureur général du ressort de la cour d'appel pour transmettre les demandes d'entraide auprès des autorités judiciaires compétentes et assurer le retour des pièces. En pratique, bien que le passage obligatoire par le parquet général soit clairement affirmé, il n'est pas rare que les juges d'instruction reçoivent directement des demandes d'entraide. L'article 696 du code de procédure pénale confie au procureur général le soin d'assurer le retour des pièces dont l'exécution a été demandée en urgence sans qu'il soit nécessaire de passer par le ministère de la justice.

Force est de constater que ces dispositions paraissent désormais en décalage avec les exigences européennes relatives à la transmission directe des demandes d'entraide judiciaire.

Telle est la raison pour laquelle le projet de loi propose de modifier les règles en la matière en vue de mettre le droit français en conformité avec le cadre juridique défini par la convention du 29 mai 2000.

A la différence du dispositif prévu à l'article 694 du code de procédure pénale modifié par le projet de loi (voir supra ), il est proposé que le principe de la transmission et de l'exécution directes s'étende à toutes les demandes d'entraide sans que soit établie de distinction relative à leur degré d'urgence.

Il est prévu une dérogation relative à la clause de sauvegarde de l'ordre public et des intérêts essentiels de la Nation identique à celle énoncée pour les demandes d'entraide adressées par les Etats étrangers, le texte proposé pour l'article 695-1 renvoyant expressément aux dispositions de l'article 694-4 précédemment présentées.

Le projet de loi initial ne prévoyait pas d'autre dérogation particulière. Toutefois, rappelant opportunément que l'article 6 de la convention du 29 mai 2000 exigeait un passage obligatoire par l'intermédiaire des autorités centrales des transmissions d'avis de condamnation et de certaines demandes liées au transfèrement temporaire ou au transit des détenus , l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté un amendement en vue de préciser que ce principe s'applique,  « sauf si une convention internationale en dispose autrement ». Votre commission des Lois vous propose d'améliorer ce dispositif en adoptant un amendement rédactionnel.

Les modalités pratiques de transmission d'entraide ainsi que les conditions d'exécution des actes des demandes d'entraide seraient identiques à celles applicables à tout Etat étranger (définies aux articles 694-1 à 694-3 insérés par le projet de loi) auxquelles le dispositif renvoie expressément.

Section 2
Des équipes communes d'enquête
Articles Articles 695-2 et 695-3 nouveaux du code de procédure pénale
Missions et compétences des agents détachés auprès d'une équipe commune d'enquête appelée à intervenir en France

Transposant l'article 13 de la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale, les articles 695-2 et 695-3 créés par le projet de loi ont respectivement pour objet de définir le champ de compétence des agents étrangers détachés auprès d'une équipe commune d'enquête intervenant sur le territoire national et de préciser les modalités d'intervention des agents français détachés auprès d'une équipe commune d'enquête opérant dans un autre Etat membre.

L'article 13 de la convention du 29 mai 2000 précitée précise que les équipes communes d'enquête agissent sous la responsabilité d'un représentant de l'autorité compétente de l'Etat sur le territoire duquel l'opération se déroule, ajoutant que le droit de cet Etat régit les opérations d'enquête (paragraphe 3). Ainsi, la responsabilité de l'équipe changera si l'équipe effectue des enquêtes dans plusieurs Etats membres.

Lorsque les enquêtes ont lieu dans un Etat membre, la présence de membres d'une équipe détachés par un autre Etat membre est autorisée , sauf si le responsable de l'équipe en décide autrement « pour des raisons particulières » qui, selon le rapport explicatif de la convention, peuvent inclure des affaires relatives à des délits ou des crimes sexuels, notamment concernant les victimes mineures (paragraphe 5 de l'article 13). Les membres détachés peuvent accomplir des actes d'enquête dans l'Etat membre d'intervention conformément au droit national de ce dernier , sur instruction du responsable de l'équipe et sous réserve du consentement des autorités compétentes de l'Etat membre d'intervention et de celles de l'Etat membre à l'origine du détachement (paragraphe 6).

Ces règles ne font que prendre acte de la pratique, les premières équipes d'enquête ayant été mises en place dès janvier 2000 dans le cadre de la coopération franco-néerlandaise et franco-espagnole notamment dans la lutte contre le trafic de stupéfiants.

? Les cinq premiers alinéas du texte proposé pour l'article 695-2 définissent les pouvoirs des agents détachés auprès des équipes communes d'enquête appelés à intervenir sur le territoire français . Votre rapporteur vous propose un amendement de précision en vue d'indiquer clairement que le présent dispositif concerne les seuls agents étrangers . En effet, si la participation d'agents issus d'instances créées en vertu du traité sur l'Union européenne n'est pas à exclure, le dernier paragraphe de l'article 13 de la convention du 29 mai 2000 précitée précise que ces derniers auront essentiellement un rôle d'appui ou consultatif sans disposer des prérogatives des membres détachés auprès de l'équipe.

Ces agents étrangers seraient dotés de pouvoirs limitativement énumérés (premier alinéa de l'article 695-2) mais étendus à l'ensemble du territoire national.

Une partie de leurs attributions seraient identiques à celles des agents de police judiciaire énoncées à l'article 20 du code de procédure pénale dont le contenu est rigoureusement repris aux 1°, 2° et 3° du texte proposé pour l'article 695-2. Il s'agirait de :

- constater tous crimes, délits ou contraventions et d'en dresser procès-verbal, au besoin dans les formes prévues par le droit de leur Etat ;

- recevoir par procès-verbal les déclarations de toute personne susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête ; le dispositif, soucieux de faire prévaloir le droit de l'Etat étranger, prévoyant prévoit même la possibilité de recevoir ces déclarations dans les formes prévues par le droit de leur Etat ;

- seconder les officiers de police judiciaire français dans l'exercice de leurs fonctions.

A l'instar des officiers de police judiciaire français désormais compétents sur le territoire national pour effectuer des opérations de surveillance liées à la criminalité organisée aux termes de l'article 706-80 créé par l'article premier du projet de loi, les agents étrangers détachés seraient également autorisés à procéder à des opérations de surveillance sur le territoire national (4° du texte proposé pour l'article 695-2).

Ces derniers, sous réserve d'y avoir été spécialement habilités, pourraient également réaliser des infiltrations dans les conditions prévues aux articles 706-81 et suivants. Dans cette hypothèse, la procédure serait assouplie puisque par dérogation au principe posé par les articles 694-7 et 694-8 précédemment présentés, l'accord des autorités judiciaires concernées (étrangères ou françaises selon le cas) ne serait pas requis (4° du texte proposé pour l'article 695-2).

L'antepénultième alinéa du texte proposé pour l'article 695-2 précise que la décision de création d'une équipe commune d'enquête relève de « l'autorité judiciaire territorialement compétente » . Notons également qu'aux termes de l'article 695-5 insérés par le projet de loi dans le code de procédure (voir infra ), le procureur général serait également compétent pour ordonner la mise en place d'une équipe commune d'enquête à la demande d'Eurojust agissant soit en tant que collège, soit par l'intermédiaire d'un de ses représentants nationaux.

La direction de l'enquête commune serait également dévolue à cette même autorité judiciaire , chargée de définir les missions susceptibles d'être confiées aux membres détachés, dans les conditions fixées par la décision-cadre du 13 juin 2002.

Ce dispositif propose une transposition du texte européen prenant en compte la spécificité du système français énoncée à l'article 12 du code de procédure pénale selon lequel  « la police judiciaire est exercée, sous la direction du procureur de la République, par les officiers de police, fonctionnaires et agents (...) ».

Outre deux amendements rédactionnels, l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois, a adopté un amendement de forme en vue de substituer la référence à la décision-cadre du 13 juin 2002 relative aux équipes communes d'enquête à la mention relative à la convention européenne du 29 mai 2000 au motif que ce texte n'était pas encore applicable.

Si votre rapporteur approuve la philosophie du présent article, le dispositif proposé par le projet de loi paraît toutefois insuffisamment précis pour plusieurs raisons.

D'une part, il renvoie de manière trop générale « aux conditions fixées par la décision-cadre » sans en préciser la teneur. Telle est la raison pour laquelle votre commission vous soumet un amendement en vue de clarifier les règles applicables aux membres détachés auprès d'une équipe commune d'enquête appelée à intervenir sur le territoire et de simplifier la rédaction du texte proposé pour l'article 695-2.

Outre quelques améliorations rédactionnelles apportées aux cinq premiers alinéas, elle vous propose :

- d'indiquer plus clairement les modalités de création d'une équipe commune d'enquête appelée à intervenir en France. Tout en maintenant le principe selon lequel l'autorité judiciaire est compétente pour créer une équipe commune d'enquête, votre commission vous propose de prévoir que deux conditions s'imposent, respectivement relatives à l'accord préalable du ministère de la justice et au consentement des autres Etats membres concernés ;  cette dernière condition destinée à améliorer la lisibilité du dispositif viendrait se substituer à la référence aux conditions fixées par la décision-cadre du 13 juin 2002 ;

- de préciser les conditions dans lesquelles les autorités judiciaires sont compétentes pour créer une équipe commune d'enquête : lorsque l'affaire présent certaines spécificités (dans le cas d'enquêtes complexes ou nécessitant la mobilisation d'importants moyens concernant d'autres Etats membres ou encore lorsque ces enquêtes exigent une action coordonnée et concertée entre les Etats membres concernés) ;

- de préciser que les missions de police judiciaire sont exercées par les agents, sous la direction de l'autorité judiciaire compétente ;

- de distinguer les règles relatives à la création cette mention paraît conforme à la philosophie du code de procédure pénale, qui place la police judiciaire sous l'autorité du juge ;de celles relatives à la direction de ces équipes ;

- que le consentement de l'Etat membre ayant procédé au détachement auprès de l'équipe commune d'enquête de l'agent étranger est nécessaire pour lui permettre d'accomplir ses missions sur le territoire national, .

De plus, votre rapporteur vous propose dans ce même amendement de supprimer toute référence particulière aux textes européens relatifs aux équipes communes d'enquête. D'une part, comme l'a fort justement indiqué M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur du texte à l'Assemblée nationale, la référence à la convention du 29 mai 2000, ne paraît pas opportune, celle-ci n'étant pas encore applicable, ne paraît pas opportune. D'autre part, la mention relative à la décision-cadre du 13 juin 2002 précitée ne semble pas davantage appropriée, cette disposition étant appelée à deveniradoptée en vue d'anticiper caduque le jour de l'entrée en vigueur de la convention du 29 mai 2000 devant devenir caduque une fois cette convention entrée en application entrée en vigueur (article  5  de la décision-cadre), il ne paraît pas opportun d'y faire référence. De plusEnfin, le dispositif figurant sous un chapitre spécifiquement dédié à l'entraide entre les Etats membres de l'Union européenne , il paraît inutile, voire redondant, de se référer explicitement aux instruments européens dans le cadre desquels ils s'inscrivent.

L'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article 695-2 tend à encadrer l'intervention des agents détachés en leur imposant de se conformer strictement aux opérations auxquelles ils participent . Il est également prévu qu'ils ne peuvent se voir déléguer les pouvoirs propres de l'officier de police judiciaire français, responsable de l'équipe commune d'enquête. Aucun pouvoir coercitif ne serait donc confié aux agents détachés, dont l'action serait contrôlée par l'officier de police judiciaire, responsable de l'équipe, et les magistrats .

Cette précaution du projet de loi paraît nécessaire eu égard à la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui admet l'intervention d'agents étrangers sous réserve d'un strict encadrement.

Dans une décision n° 91-294 DC du 25 juillet 1991 relative à la loi autorisant l'approbation de la convention d'application de l'accord de Schengen, il n' a validé la procédure de poursuite transfrontalière qu'après avoir estimé qu'elle ne procédait pas à un « transfert de souveraineté » dans la mesure où les agents poursuivants ne disposaient pas d'un droit d'interpellation, non plus que de la possibilité d'entrer dans les domiciles et les lieux non accessibles au public.

Dans une décision n° 98-408 DC du 22 janvier 1999 relative au traité portant statut de la Cour pénale internationale, le juge constitutionnel a au surplus estimé que la possibilité pour le procureur de la Cour pénale internationale de procéder à certains actes d'enquête sur le territoire d'un autre Etat (tels l'inspection d'un site public ou tout autre lieu public ou le recueil de dépositions de témoins), sans la présence des autorités de l'Etat requis et sur le territoire de ce dernier, en dehors même du cas d'indisponibilité de l'appareil judiciaire national, était de « nature à porter atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté » et alors même que ces mesures étaient « exclusives de toute contrainte ».

Enfin, le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 695-2 impose l'obligation de verser à la procédure française un original des procès-verbaux établis par les membres détachés, rédigé ou traduit en langue française .

? Le texte proposé pour l'article 695-3 créé par le projet de loi constitue le pendant de l'article 695-2 pour les agents français détachés auprès d'une équipe commune d'enquête 40 ( * ) .

Son premier alinéa précise le champla liste des personnes susceptibles d'être détachées auprès d'une équipe commune d'enquête et mentionne les officiers et les agents de police judiciaire. A l'instar des agents détachés par d'autres Etats membres et par dérogation aux articles 18 et 21-1 du code de procédure pénale, une compétence large leur est reconnue, étendue à tout le territoire de l'Etat sur lequel ils interviennent. En outre, lors des opérations prescrites par le responsable de l'équipe commune, ceux-ci ne peuvent pas disposer de pouvoirs plus étendus que ceux reconnus par le code de procédure pénale.

Son deuxième alinéa précise qu'il appartient à l'autorité judiciaire compétente pour créer et diriger l'équipe commune d'enquête de définir les missions dévolues à ces agents.

Outre un amendement rédactionnel, l'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois, adopté un amendement tendant à remplacer la mention relative à la convention d'entraide du 29 mai 2000 non applicable par celle relative à la décision-cadre du 13 juin 2002.

Ce dispositif s'inspirant du dispositif proposé à l'article 695-2 ne paraît pas tenir compte de la diversité des situations au sein de l'Union européenne 41 ( * ) . Faisant référence à l'autorité judiciaire compétente pour créer et diriger une équipe commune d'enquête, il se contente de transposer la décision-cadre en fonction d'une logique française.

Il est apparu préférable de retenir une rédaction assez générale, pour s'adapter à la spécificité des différents régimes d'enquête au sein de l'Union européenne. Telle est la raison pour laquelle il vous est proposé de mentionner que les missions des agents français détachés sont définies par le représentant de l'autorité compétente de l'Etat membre d'intervention . Votre commission vous soumet donc un amendement en ce sens, inspiré des termes de la décision-cadre.

En effet, l'organisation française selon laquelle l'autorité judiciaire dirige l'enquête n'est pas forcément généralisable aux autres pays membres, de même que ceux-ci n'accorderont pas forcément la compétence de créer et de diriger les enquêtes à la même autorité.

En outre, comme précédemment et pour les mêmes raisons, votre commission vous soumet un amendement tendant à supprimer toute référence à la décision-cadre du 13 juin 2002 appelée à devenir caduque dès l'entrée en vigueur de la convention du 29 mai 2000 précitée. Plutôt que de viser un texte particulier susceptible de devenir obsolète ou caduc, il paraît préférable de faire référence au cadre juridique général de « l'équipe commune d'enquête » qui renvoie implicitement aux textes européens correspondants.

Section 3
De l'unité Eurojust
articles Articles 695-4 à 695-7 nouveaux du code de procédure pénale
Nature, mission et compétences de l'unité Eurojust

Transposant les articles de la décision du Conseil du 28 février 2002 instituant EUROJUST Eurojustdu 28 février 2002, les articles 695-4 à 695-7 insérés dans le code de procédure pénale par le I de cet article ont pour objet de définir la nature, les missions et les compétences dévolues à l'unité cette unitéEUROJUST.

Avant d'aborder l'analyse du dispositif proposé par le projet de loi, il paraît important de rappeler les activités exercées par EUROJUST Eurojust et les ses modalités d'intervention de cet organe.

LES ACTIVITÉS ACTIVITÉS EXERCÉES EXERCÉES PAR EUROJUST (extrait du premier rapport annuel du collège EUROJUST pour 2002 )

? Le traitement de cas
« Le traitement de cas est au coeur de l'activité d'd'Eurojust
(....). Les membres nationaux d'Eurojust et leurs assistants offrent aux autorités nationales chargées des enquêtes et des poursuites un service de résolution de problèmes « 24 heures sur 24 ». (...) La plupart des cas dont l'unité est saisie sont résolus par le biais de réunions entre les membres nationaux représentant les pays concernés. » (extrait du premier rapport annuel du collège Eurojust pour 2002).
Eurojust joue à cet égard un rôle double , opérationnel , en permettant aux autorités chargées des enquêtes et des poursuites d'échanger des informations concrètes sur des affaires en cours et stratégique , en engageant des actions en matière de criminalité internationale complexe nécessitant une coordination ou une expertise.

Selon le rapport annuel pour 2002, EUROJUST a Eurojust a traité 202 dossiers dont les trois quarts relèvent de cas bilatéraux. Entre janvier et juin 2003, 173 nouveaux dossiers lui ont été soumis à EUROJUST, ce qui témoignante ainsi d'e sa une montée en puissance progressive de cet organe.


Les catégories d'infractions soumises à Eurojust sont notamment :
- la fraude (30 %), qui recouvre la fraude fiscale, la fraude grave ou encore la fraude informatique, la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, l'atteinte aux intérêts financiers de la communauté ;
- le trafic de stupéfiants (16 %) ;
- le terrorisme (9 %) ;
- le trafic d'êtres humains et l'immigration clandestine (6 %) ;
- le blanchiment d'argent.


Parmi les exemples récents de cas traités, on peut notamment citer la pornographie enfantine, le blanchiment d'argent par la mafia russe, la contrebande d'alcool organisée.

? La création d'une base documentaire
Depuis 2002, Eurojust s'efforce de mettre en place une base de données automatisée munie d'un index sur les enquêtespersonnel.

? La résolution des problèmes en matière d'entraide judiciaire
Eurojust s'efforce de mettre en lumière les principaux problèmes en matière d'entraide pour formuler certaines améliorations possibles. Certains obstacles à l'entraide judiciaire ont été relevés, tels que les délais fréquents et excessifs dans l'exécution des commissions rogatoires, l'absence de coordination entre autorités compétentes pour les enquêtes et les poursuites, la lourdeur des procédures liées au traitement des commissions rogatoires internationales.

? Le texte proposé pour l'article 695-4 retranscrit dans le code de procédure pénale les dispositions de l'article premier et du paragraphe 1 de l'article 3 de la décision instituant Eurojust,EUROJUST respectivement relatifs d'une part, à la création et à la personnalité juridique et, d'autre part,et aux objectifs d'EUROJUSTd'Eurojust.

Se référant expressément à la décision du 28 février 2002, le dispositif proposé précise que l'unité EUROJUST Eurojust est un organe de l'Union européenne, doté de la personnalité juridique . Il en rappelle les modalités d'action en indiquant que cet organequ'elle agit par l'intermédiaire soit d'un collège soit d'un représentant national.

Il est également proposé de reproduire certains les principaux objectifs inscrits dans la décision-cadre assignés à cet organe par la décision-cadre relatifs à la promotion et à l'amélioration de la coordination et de la coopération entre les autorités compétentes des Etats membres de l'Union européenne dans toutes les enquêtes et poursuites relevant de sa compétence, c'est-à-dire celles concernant au moins deux Etats et portant sur les comportements criminels les plus graves.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté un amendement de précision du dispositif initial en vue de reproduire l'intégralité de l'intitulé de la décision du Conseil du 28 février 2002 ayant institué EUROJUSTEurojust.

L'inscription de ces dispositions dans le code de procédure pénale ne résulte pas d'une obligation juridique mais revêt une double dimension pédagogique et symbolique en vuedestinée à de marquer mettre en exergue toute l'importance de cet organe et sl'importanceon utilité de cet organe dans la lutte contre la grande criminalité. Considérant qu'il importe que les magistrats aient puissent facilement se reporter aux connaissance des textes qui régissdispositionsent cet organeles concernant, votre rapporteur souscrit pleinement à cette démarche.

Toutefois, il convient de noter que le projet de loi n'a repris que partiellement les missions d'EUROJUST visées par la décision du Conseil du 28 février 2002. Par souci de rigueur, votre rapporteur a jugé préférable de faire référence à tous les objectifs assignés à cet organe par le texte européen, en mentionnant la possibilité d'apporter son soutien à des enquêtes ou des poursuites concernant la France et un Etat tiers dans certains cas et la faculté dans certaines hypothèses d'apporter son soutien à des enquêtes ou des poursuites concernant le territoire national et la Communauté. Telle est la raison pour laquelle votre commission vous soumet un amendement en ce sens.

? Le texte proposé pour l'article 695-5 énumère les compétences d'EUROJUST d'Eurojust et mentionne en particulier la possibilité :

- de fournir au procureur général des informations relatives à des infractions dont elle a connaissance et de lui demander de diligenter une enquête ou de faire engager des poursuites (1°du texte proposé pour l'article 695-5) ;

- de demander au procureur général de dénoncer ou faire dénoncer des infractions aux autorités compétentes d'un autre Etat membre de l'Union européenne (2° du texte proposé pour l'article 695-5) ; il s'agit d'assurer l'information réciproque des autorités compétentes des Etats membres sur les affaires en cours en Francesur le territoire français ayant un lien dans d'autres pays membres ;

- de solliciter demander leau procureur général de mettre en placela mise en place d' une équipe commune d'enquête (3° du texte proposé pour l'article 695-5) ;

- de demander au procureur général ou au juge d'instruction de lui communiquer des informations indispensables à l'accomplissement de ses missions (4° du texte proposé pour l'article 695-5). La référence au procureur général ou au juge d'instruction résulte d'un amendement de l'Assemblée nationale présenté par le rapporteur de sa commission des Lois, ayant recueilliavec l'avis favorable du Gouvernement Gouvernement, qui qui a jugé préférable de viser avec précision les magistrats directement concernés plutôt que de faire référence aux autorités judiciaires. Par coordination avec cette modification, l'Assemblée nationale a supprimé le les dispositions devenues inutiles figurant au dernier alinéa du texte proposé pour l'article 695-5 relatif aux modalités d'exécution par les autorités judiciaires des demandes et des informations adressées par eEurojust devenu inutile.

Cette énumération reprend en substance le contenu des articles 6 et 7 de la décision du Conseil du 8 février 2002 respectivement relatifs aux compétences d'Eurojust exercées par l'intermédiaire des membres nationaux et à celles exercées en tant que collège.

La formulation retenue par le texte européen semble marquer une différence en fonction de l'organe intervenant pour le compte d'eEurojust, le collège agissant au nom et pour le compte de cette unité semble semblant détenir des pouvoirs plus étendus contraignants que ceux conférés au représentant national. Le projet de loi n'établit pas en revanche de distinction particulière selon qu'eEurojust agit en tant que collège ou par l'intermédiaire d'un de ses représentants nationaux.

? Le texte proposé pour l'article 695-6 concerne le cas d'un refus des autorités d'un Etat membre d'accomplir les actes demandés par l'intermédiaire du collège d'eEurojust .

Ainsi, le premier alinéa du texte proposé pour l'article 695-6 , transposant l'article 8 de la décision du Conseil, soumet le procureur général ou le juge d'instruction à l'obligation d' informer l'unité permanente de son refus de donner suite à ses demandes et de motiver sa décision (premier alinéa). Ce dispositif s'appliquerait à toutes les demandes susceptibles d'être formulées par eEurojust (entreprendre une enquête ou des poursuites, mettre en place une équipe commune d'enquête, communiquer des informations).

Le second alinéa du texte proposé pour l'article 695-6, fidèle au texte européen, prévoit toutefois une dérogation à cette obligation de motivation, applicable à toutes les demandes, à l'exception de celles relatives à la mise en place d'une équipe commune d'enquête, en cas d'atteinte à la sécurité de la Nation, au bon déroulement d'une enquête en cours ou à la sécurité d'une personne pour toutes les demandes à l'exception de celles relatives à la mise en place d'une équipe commune d'enquête.

Le projet de loi a ajouté une exigence supplémentaire par rapport à la décision du Conseil en imposant aux autorités françaises de remplirl'obligation d'informer ces obligations Eurojust dans les meilleurs délais , ce qui paraît souhaitable.

En outre, il convient de noter que le projet de loi laisse une grande marge d'appréciation aux autorités compétentes de l'Etat requis, qui sont libres de décider ou non de répondre une demande formulée par eEurojust en tant que collège. Toutefois, il est permis de penser que l'obligation de motiver un refus permettra d'écarter des décisions de refus dénuées desans motif légitimevalable.

Le projet de loi ne prévoit aucune obligation similaire s'agissant des demandes formulées par le membre national agissant, seul ou avec d'autres membres nationaux, au nom et pour le compte d'eEurojust. A cet égard, le texte n'impose aux autorités compétentes requises aucune obligation similaire pour les demandes formulées par l'intermédiaire de leurs représentants nationaux.

Une telle asymétrie entre les pouvoirs dévolus au collège EUROJUST Eurojust et ceux conférés au membre national mis à sa disposition ne paraît pas justifiée. Il paraît important de doter les membres nationaux agissant pour le compte d'EUROJUST d'Eurojust de prérogatives suffisantes pour leur permettre d'exercer leurs missions dans de bonnes conditions. En outre, la motivation du refus pourrait leur fournir d'utiles indications sur les raisons avancées parde l'Etat requis.

Comme l'indique une note de réflexion du 14 juin 2002 publiée par le secrétariat général du Conseil de l'Union européenne en vuepour d'assister les Etats membres en vue de la transposition en droit interne des dispositions relatives aux compétences des membres nationaux 42 ( * ) , « si la décision instituant eEurojust constitue un minimum auquel les Etats membres doivent donner un effet utile, rien n'empêche un Etat membre d'aller au-delà et de prévoir dans sa loi nationale de transposition que les demandes faites par EUROJUST pEurojust par l'intermédiaire de son membre national ont ont, en ce qui concerne ses autorités compétentes, un caractère plus contraignant ».

Telle est la raison pour laquelle votre commission, soucieuse d'harmoniser les règles applicables au collège et celles applicables aux représentants nationaux et de promouvoir une transposition ambitieuse d'EUROJUSTd'Eurojust, vous propose par un amendement de généraliser à toutes des les demandes formulées par el'unité permanenteurojust , quelle qu'en soit l'origine , y compris celles exprimées par l'intermédiaire du représentant national , l'obligation imposée aux autorités sollicitées de motivation motiver des leurs décisions de refus imposée aux autorités sollicitées.

? Transposant le paragraphe g de l'article 6 de la décision du Conseil du 28 février 2002, le texte proposé pour l'article 695-7 prévoit la possibilité pour eurojustEurojust , dans le cadre de sa mission de coordination entre les Etats membres, de transmettre aux autorités requises d'un autre Etat membre une demande d'entraide nécessitant son intervention en vue d'une exécution coordonnée dans plusieurs Etats membres. Il est précisé que cette transmission s'effectue par l'intermédiaire du représentant national de l'Etat concerné . Comme l'illustre l'étude d'impact jointe au projet de loi, un tel dispositif pourrait trouver à s'appliquer dans le cas de perquisitions menées simultanément dans plusieurs Etats membres.

Section 4
Du représentant national auprès d'Eurojust
articles Articles 695-8 et 695-9 nouveaux du code de procédure pénale
Statut et compétences du représentant national aauprès d'EUROJUSTuprès d'Eurojust

1. Le cadre juridique défini par la décision du Conseil du 28 f février 2002

Conformément aux articles 2 et 9 de la décision du Conseil du 28  février 2002, le statut des membres nationaux détachés auprès d'EUROJUST d'Eurojust relève du droit de chaque Etat membre. Il revient en effet à chaque Etat membre de définir la nature et l'étendue des pouvoirs judiciaires qui lui sont conférés sur son propre territoire ainsi que la durée de son mandat, sous réserve que cette duréecelle-ci soit « de nature à permettre un bon fonctionnement d'eEurojust » . Le Conseil de l'Union européenne a souligné la nécessité de doter les membres national nationaux d'un statut lui leur permettant de nouer « des rapports de confiances avec leurs collègues de l'Etat d'origine, quel que soit leur niveau hiérarchique » 43 ( * ) .

Comme l'indique la note de réflexion précitée du 14 juin 2002 destinée à fournir des indications aux Etats membres en vue de la transposition de la décision du Conseil du 28 février 2002, il convient de distinguer trois hypothèses différentes dans desquelles lesquelles un membre national est susceptible d'intervenir :

- le représentant national agissant, seul ou avec d'autres membres nationaux, au nom et pour le compte d'eEurojust ;

- le représentant agissant à travers le collège au nom et pour le compte dd'Eurojust'EUROJUST ;

- le représentant national agissant en son nom et pour le compte de son Etat membre.

Les dispositions figurant sous la section 4 du titre X du livre IV du code de procédure pénale s'inscrivent dans cette dernière hypothèse.

Tout en laissant une latitude à chaque pays membre, le textela décision du Conseil du 28 février 2002 précitée mentionne définit néanmoins un socle minimal de compétences communes susceptibles d'être dévolues à tous les membres nationaux. A cet égard, il prévoit :

- que les membres nationaux sont seuls compétents pour recevoir les informations échangées entre Eurojust EUROJUST et les Etats membres (paragraphe 2 de l'article 9) ;

- qu'ils ont accès à l'information contenue dans le casier judiciaire national ou dans tout autre registre de leur Etat d'origine auquel ont accès susceptible d'être consulté par les autorités judiciaires ou de police conformément au droit de chaque pays ;

- qu'ils peuvent entrer directement en contact avec les autorités compétentes de leur Etat membre.

Comme le met en exergue la note de réflexion du 14 juin 2002 précitée, « il s'ensuit qu'il pourrait y avoir une asymétrie assez forte entre les pouvoirs dont disposent les membres nationaux, qu'il n'est pas exclu que certains membres nationaux disposent individuellement de pouvoirs plus étendes étendus qu'EUROJUST qu'Eurojust en tant que telle ». Selon ce document, une triple option s'offre ainsiest ouverte aux Etats membres, lesquels ont qui ont le choix de doter leur membre national :

- soit de pouvoirs d'intensité faible ne revêtant aucun caractère contraignant tels que la possibilité de demander d'accomplir certains actes d'information ou d'instruction ou d'inviter plusieurs autorités à se coordonner ;

- soit de pouvoirs d'intensité moyenne avec une possibilité pour celui-cile membre national d'enjoindre aux autorités de son Etat d'accomplir certains actes d'information ou d'instruction, voire de les accomplir lui-même ;

- soit de pouvoirs accrus avec un droit d'exercer lui-même l'action publique et d'accomplir tous les actes nécessaires.

Selon les informations fournies à votre rapporteur, seuls l'Espagne et le Portugal s'apprêteraient à conférer à leur membre national détaché auprès d'eEurojust des pouvoirs analogues à ceux dévolus à un procureur national. Il semblerait qu'en revanche les autres pays membres de l'Union européenne s'orientent vers une transposition similaire à celle effectuée par la France, . Notons que qui est ula France nest toutefois le des premiers pays à mettre son droit en conformité avec els les exigences européennes.

2. Le dispositif de transposition proposé par le projet de loi

? Le texte proposé pour l'article 695-8 inséré dans le code de procédure pénale par le I de l'article 6 définit le statut du représentant national auprès d'eEurojust .

Son premier alinéa précise les conditions de nomination du représentant national auprès d'EUROJUST d'Eurojust, lequel est choisi parmi les magistrats hors hiérarchie . Seul un magistrat disposant d'une certaine ancienneté et ayant acquis une longue expérience pourrait donc accéder à ce poste. Tel est d'ailleurs le cas de M. Olivier de Baynast, représentant désigné pour la France. La durée de son mandat serait fixée à trois ans .

L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a précisé que ce magistrat était mis à la disposition d'eEurojust par arrêté du ministre de la justice et non pas « nommé par arrêté du ministre de la justice » comme le prévoyait le projet de loi initial.

Cette modification paraît pleinement justifiée. En effet, Ooutre qu'une nomination de magistrat résulte toujours d'un décret du Président de la République et non d'un arrêté du ministre de la justice, la position statutaire visée par le projet de loi ne pouvait être assimilée à une simple nomination au sein de l'institution judiciaire françaisedans une juridiction, mais relevait plutôt d'une mise à disposition au profit d'un autre organe .

Le régime de la mise à disposition constitue une modalité particulière de l'activité de magistrat et désigne la situation d'un fonctionnaire qui demeure dans son corps d'origine, en perçoit la rémunération correspondante (tout en étant réputé occuper son emploi) mais effectue son service dans une autre administration que la sienne ou auprès d'organisations internationales intergouvernementales ou d'organismes à caractère associatif assurant des missions d'intérêt général.

LLes règles prévues par le projet de loi paraissent conformes au cadre légal de la mise à disposition. L'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature se borne à renvoyer aux dispositions de la fonction publique de l'Etat, sous réserve qu'elles soient conformes au statut de la magistrature 44 ( * ) . Il y a donc lieu de se reporter aux articles 41 à 44 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, complétée par le décret du 16 septembre 1985.

On dénombre actuellement près d'une cinquantaine de magistrats placés dans cette position, exerçant des fonctions notamment auprès de cabinets ministériels ou dans le domaine international 45 ( * ) .

Le second alinéa du texte proposé pour l'article 695-8 soumet le représentant national à l'autorité hiérarchique du garde des Sceaux en renvoyant expressément aux dispositions de l'article 36 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 24 août 1993 46 ( * ) , qui permet au ministre de la justice de « dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre par instructions écrites et versées au dossier de la procédure, d'engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministre juge opportunes ». Cette disposition paraît opportune, la nature des affaires pénales entrant dans le champ d'Eurojust d'Eurojust pouvant justifier l'intervention du ministère de la justice en vue d'assurer un traitement efficace de ce type de délinquance sur le territoire national et de garantir une l'homogénéité de la politique pénale française, préalable indispensable à la coopération judiciaire au niveau européenà l'échelle européenne.

Votre commission vous soumet un amendement destiné à tenir compte de la renumérotation de l'article 36 du code de procédure pénale qui vous sera proposée ultérieurement, dont le contenu sera déplacé à l'article 30 du code de procédure pénale.

? Le texte proposé pour l'article 695-9 inséré dans le code de procédure pénale par le I de l'article 6 énumère les pouvoirs judiciaires dévolus au représentant national auprès d'EUROJUSTd'Eurojust .

Comme le relève d'ailleurs l'étude d'impact, le texte propose sur ce point une transposition minimale de la décision du Conseil, et se borneant à attribuer au représentant national détaché auprès d'EUROJUST d'Eurojust des pouvoirs judiciaires restreintsstrictement limités au territoire national. Il s'agit de : en lui ouvrant :

- la possibilité, dans le cadre de sa mission, d'accéder aux informations du casier judiciaire national et des fichiers de police judiciaire tels que le système d'information de Schengen ou le système de traitement des infractions constatées (STIC) (premier alinéa du texte proposé pour l'article 695-9) ;

- la faculté de demander aux magistrats des informations relatives à une procédure en cours nécessaires à l'accomplissement de sa mission et sans que le secret de l'instruction puisse lui être opposé. En vue de rendre ce pouvoir effectif, le projet de loi énumère limitativement les motifs susceptibles de justifier un refus de l'autorité judiciaire sollicitée de répondre à une demande. Il  mentionne le cas d'une affaire susceptible de porter atteinte à l'ordre public ou aux intérêts essentiels de la Nation. Le texte prévoit en outre une possibilité pour l'autorité judiciaire sollicitée de différer une communication de renseignements pour des motifs opérationnels afin de protéger les investigations en cours. Outre un amendement rédactionnel, votre commission vous propose un amendement tendant à préciser ce que recouvre cette dernière hypothèse en substituant à l'expression relative « aux investigations en cours » celle relative « au bon déroulement d'une enquête en cours ou à la sécurité d'une personne ».

On observera que le champ des demandes susceptibles d'être adressées par le membre national agissant en son nom propre, cantonné limité au domaine de l'information, s'avère donc limité, ne recouvrant e que très partiellement les compétences dévolues à Eurojusten tant qu'organe.

Au cours de son audition devant votre commission des Lois le 17 juin dernier, le garde des Sceaux a expliqué la modestie des pouvoirs dévolus au membre national détaché auprès d'EUROJUST d'Eurojust par le fait que cet organecette unité s'inscrivait avait vocation à s'inscrire dans le cadre d'une évolution progressive vers la création d'un parquet européen. Ainsi, une solution plus ambitieuse aurait pu être envisagée, consistant à assimiler le représentant national à un procureur général compétent sur tout le territoire national et disposant de véritables pouvoirs opérationnels tels que le la possibilité de recevoir et de transmettre les informations relatives aux enquêtes de l'office européen de lutte anti-fraude (OLAF)l'OLAF, d'assurer lui-même l'exécution d'une commission rogatoire, par exemple pour l'interception des télécommunications sur le territoire national, ou encore pour geler des avoirs dans certaines situations d'urgence. Tel n'a pas été le choix du projet de loi.

Soucieux de faciliter l'exercice des missions dévolues à EUROJUST Eurojust, et de conforter le rôle du membre national français auprès d'eEurojust et d'en élargir les compétences, votre rapporteur vous propose de compléter ce le projet de loi dispositif par innovations consistant à :

- créer une obligation d'information au profit du membre national à la charge du procureur général lorsque des affaires concernent au moins trois Etats membres et sont susceptibles d'entrer dans le champ de compétence d'Eurojust ; outre, qu'un tel ajout revêt une dimension pédagogique destinée à sensibiliser les magistrats français à l'importance de la coopération judiciaire, il paraît en effet important de rechercher les moyens les plus efficaces permettant d'assurer la fluidité des échanges entre les autorités judiciaires compétentes et EEurojust ; l'Italie a d'ailleurs prévu une disposition similaire dans le projet de loi de transposition déposé en conseil de ministres en juillet dernier ;

- donner compétence au membre national pour recevoir et transmettre des informations relatives aux enquêtes de l'office européen de lutte anti-fraudel'OLAF ; cette disposition est destinée à répondre à l'objectif inscrit au paragraphe 4 de l'article 26 de la décision du Conseil du 28 février 2002 selon lequel « les Etats membres veillent à ce que les membres nationaux d'Eurojustd'EUROJUST soient considérés comme des autorités compétentes des Etats membres » en ce domaine pour les enquêtes effectuées par l'OLAF. L'OLAF Cet organe constitue un service administratif d'enquête ayant compétence pour transmettre aux autorités judiciaires des Etats membres toute information relative à des faits susceptibles de donner lieu à une infraction pénale. A cet égard, le membre national apparaît comme une passerelle utile entre cet organe et les parquets compétents.

Votre commission vous soumet donc deux amendements ayant pour objet respectifs de proposer d'enrichir le projet de loi par ces différentes dispositionsen ce sens.

Chapitre III
Dispositions propres à l'entraide entre la France et certains Etats
Article 695-10 du code de procédure pénale
Extension de l'aApplication à d'autres Etats étrangers des règles relatives
à la transmission directe des demandes d'entraide
et à la création des équipes communes d'enquête

Le texte proposé pour l'article 695-10 inséré dans le code de procédure pénale par le I de cet article a pour objet d'appliquer à des pays non membres de l'Union européenne les règles relatives à la transmission directe des demandes d'entraide entre la France et les autres Etats membres de l'Union européenne et à la création des équipes communes d'enquête figurant respectivement sous les sections 1 et 2 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale, sous réserve que les Etats concernés soient partieaient conclu avec la France à une convention comportant des stipulations similaires à celles de la convention du 29 mai 2000 prelative à l'entraide judiciaire en matière pénalerécitée.

L'élargissement à d'autres pays non membres de l'Union européenne paraît opportune et permettrait ainsi aux Etats-Unis de participer aux équipes communes d'enquête ou encore à des pays tels que la Suisse, la Norvège ou l'Islande de bénéficier des formes techniques modernes d'entraide judiciaire instituées dans le cadre de l'Union européenne.

Par un amendement , votre commission vous propose de compléter le dispositif proposé pour le titre X du livre IV du code de procédure pénale, afin d'y insérer des dispositions relatives à l'extradition . Il lui a en effet paru opportun à l'occasion de l'examen du présent projet de loi :

- de mettre en place une procédure courte de l'extradition en cas de consentement de la personne réclamée à son extradition ;

- d'introduire dans notre droit les stipulations des conventions du 10 mars 1995 et du 27 septembre 1996 signées dans le cadre de l'Union européenne ;

- enfin, de codifier la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition ainsi modifiée au sein du code de procédure pénale.

? Le paragraphe II de l'article 6 du projet de loi opère une simple coordination en proposant de supprimer les dispositions relatives à l'utilisation de moyens de télécommunications au cours de la procédure pour l'exécution de demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères, appelées à figurer au premier alinéa de l'article 694-5 inséré dans le code de procédure pénale par leaux termes du projet de loi.

? Le paragraphe III de l'article 6 du projet de loi a pour objet d'abroger l'article 30 de la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition dont le contenu serait modernisé et repris à l'article 694 du code de procédure pénale réécrit par le projet de loi. Votre commission vous proposera dans un article additionnel après l'article 6 de supprimer la loi du 10 mars 1927. Par conséquent, elle vous propose par un amendement de supprimer le présent paragraphe.

Sous réserve des observations précédemment formulées et des amendements qu'elle vous a soumis, votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 6 ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 6
(Loi du 10 mars 1927)
Abrogation de la loi relative à l'extradition

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 6 pour abroger la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition par coordination avec la décision d'insérer les dispositions de cette loi au sein du code de procédure pénale.

Article additionnel après l'article 6
(Art. 113-8-1 nouveau du code pénal)
Jugement en France des personnes dont l'extradition est refusée

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 6, afin de prévoir dans le code pénal la compétence des juridictions françaises pour juger un étranger lorsque la France a refusé son extradition, soit parce que l'infraction était punie dans le pays requérant d'une peine contraire à l'ordre public français, soit parce que la personne avait été jugée par un tribunal n'assurant pas la garantie des droits de la défense.

CHAPITRE III
DISPOSITIONS CONCERNANT LA LUTTE CONTRE
LES INFRACTIONS EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE, FINANCIÈRE
ET DOUANIÈRE ET EN MATIÈRE DE SANTÉ PUBLIQUE
ET DE POLLUTION MARITIME

Le présent chapitre a pour objet de compléter les règles d'organisation judiciaire spécifiques prévues en matière économique et financière, de santé publique et de pollution des navires, afin d'en renforcer l'efficacité.

Si le mouvement de spécialisation est ancien, il a ces dernières années investi des domaines nouveaux. L'institution judiciaire est en effet confrontée à l'impératif permanent d'adapter sa réponse à des contentieux toujours plus divers et complexes.

L'organisation judiciaire en matière civile a toujours connu des juridictions spécialisées tels par exemple les tribunaux de commerce introduits en France au XVIème siècle, les conseils de prud'hommes qui existaient déjà sous l'ancien régime ou encore les tribunaux paritaires des baux ruraux érigés au milieu du XXème siècle, par opposition aux juridictions de droit commun (les tribunaux de grande instance et, sous certaines réserves, les tribunaux d'instance). Les premières, contrairement aux secondes, ont toutes en commun d'être majoritairement composées de juges non professionnels.

Depuis de nombreuses années, l'architecture judiciaire en matière pénale a également développé un mode d'organisation spécialisé. Aux côtés des juridictions pénales de droit commun (les tribunaux correctionnels, les tribunaux de police et les cours d'assises) existent des tribunaux spécialisés compétents uniquement dans les cas strictement prévus par la loi pour juger soit certaines infractions (en matière économique et financière depuis 1975, en matière de terrorisme depuis 1986 47 ( * ) ), soit certaines personnes limitativement énumérées (pour les mineurs par exemple, il s'agit du tribunal pour enfants).

A la différence des tribunaux civils spécialisés et à l'instar des juridictions pénales de droit commun, des magistrats professionnels composent la plupart des tribunaux dédiés à ces contentieux particuliers. Il s'agit en fait d'une simple division du travail de la justice professionnelle destinée à améliorer la qualité et la rapidité des jugements rendus . Les juridictions pénales spécialisées se confondent géographiquement avec la juridiction de droit commun soit en constituant simplement un service du tribunal de grande instance, soit en constituant une partie seulement des attributions d'un magistrat exerçant par ailleurs d'autres fonctions (affaires familiales, audiences correctionnelles...) au sein de ce tribunal (tel est le cas par exemple du tribunal de grande instance du Havre en matière de pollution maritime).

En juin 2002, la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice constituée au sein de votre commission des Lois relevait que « la complexité croissante du droit et des procédures, l'augmentation des contentieux imposent une spécialisation des juridictions . (...). En fonction de leur nature et de leur degré de complexité, certains contentieux peuvent être jugés rapidement et simplement, d'autres requièrent des connaissances juridiques particulières et des expertises. En tout état de cause, la spécialisation est un facteur de rapidité de la prise de la décision » 48 ( * ) .

Ce point de vue est d'ailleurs unanimement partagé non seulement par les acteurs et les partenaires de l'institution judiciaire, mais également par les justiciables eux-mêmes.

Le législateur semble avoir pris toute la mesure de cet impératif croissant en créant de nouveaux tribunaux spécialisés dans certaines matières très techniques et composés de magistrats professionnels . On peut ainsi citer la récente spécialisation de tribunaux en matière de santé publique depuis la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, de rejets polluants des navires et de pollution des eaux depuis la loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants par les navires, de marques communautaires depuis l'ordonnance n° 2001-670 du 25 juillet 2001, d'enlèvement international d'enfant depuis la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale.

Le présent projet de loi s'inscrit dans la continuité d'un mouvement de spécialisation qui s'est accéléré ces dernières années . Il tend à renforcer l'organisation judiciaire spécialisée dans trois domaines fonctionnant selon des modalités analogues : en matière économique et financière , de santé publique et de pollution des navires . Il prévoit quatre séries de modifications relatives :

- à l'extension du champ des compétences des juridictions spécialisées dans chacun de ces domaines . A cet effet, il est prévu d'ajouter le pouvoir d' enquête à la liste des attributions dévolues à ces tribunaux actuellement limitées à la poursuite, à l'instruction, et au jugement de certaines infractions. Il est également proposé d'accroître le nombre des infractions susceptibles de relever de ces juridictions et donc d'élargir à de nouvelles formes de délinquance leur périmètre d'intervention ;

- à la généralisation des juridictions spécialisées interrégionales . Si de telles juridictions existent déjà en matière de santé publique et de pollution des navires, le projet de loi prévoit en effet de créer des structures juridictionnelles spécialisées en matière économique et financière, compétentes dans le ressort de plusieurs cours d'appel ;

- au renforcement des moyens humains affectés à ces juridictions . Le projet de loi prévoit de modifier le statut des assistants spécialisés chargés d'assister les magistrats spécialisés exerçant leurs fonctions dans ces trois types de juridictions en vue de consacrer leurs missions dans la loi et de les préciser ;

- à la clarification des rapports entre les juridictions spécialisées et les juridictions de droit commun . Le projet de loi propose d'instaurer une procédure de dessaisissement spécifique, dérogatoire au droit commun, pour permettre le règlement des conflits d'attributions et faciliter la saisine de la juridiction spécialisée.

Votre commission des Lois vous soumet un amendement de forme en vue d'ajouter dans l'intitulé du présent chapitre une mention relative à la lutte contre les infractions en matière de terrorisme, par coordination avec l'insertion d'articles additionnels relatifs à ce domaine qu'elle vous soumettra ultérieurement.

SECTION 1
Dispositions relatives aux infractions
en matière économique et financière

La présente section tend à compléter l'arsenal législatif dédié à la lutte contre la délinquance économique et financière créé en 1975.

Selon le ministère de la justice, ce type de délinquance particulière  recouvre : « un champ délicat à circonscrire en termes d'infractions sanctionnées par le système judiciaire. On s'accorde habituellement à lui reconnaître deux dimensions : l'une se situe dans l'économie légale lorsqu'elle est autorisée mais non déclarée à l'Etat ; l'autre se situe à la frontière ou au passage entre l'économie légale et l'économie illégale recouvrant des actions prohibées par l'Etat (économie de la drogue). Elle s'apparente à la notion couramment admise de « délinquance en col blanc (...)» 49 ( * ) .

Comme le montre le tableau ci-après, ce contentieux spécifique concerne une délinquance « d'âge mûr », l'âge moyen des condamnés s'élevant à 39 ans 50 ( * ) :

CARACTÉRISTIQUES DES CONDAMNÉS EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
-1999-

CONDAMNÉS EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE OU FINANCIÈRE

CONDAMNÉS POUR VOL-RECEL

Age moyen des condamnés

39,3 ans

24,6 ans

Répartition des condamnés par âge
moins de 25 ans
de 25 ans à moins de 30 ans
de 30 ans à moins de 40 ans
de 40 ans à moins de 60 ans
60 ans et plus

Par nationalité
Français
Étrangers
dont Union européenne

100 %

10,7 %
10,6 %
28,7 %
46,1 %
3,9 %


79,7 %
20,3 %
8,5 %

100 %

61,4 %
15,1 %
16 %
7,1 %
0,4 %


86,7 %
13,3 %
1,5 %

Source : casier judiciaire national

Ce type de délinquance se caractérise par son astuce et sa complexité : plus de la moitié des condamnations sanctionnent la commission de plusieurs infractions. Il se distingue également par la longueur des procédures (quatre ans entre la commission des faits et la date de condamnation par le tribunal correctionnel en 1999) et par un taux d'appel particulièrement élevé (21 % contre 6,3 % pour l'ensemble des condamnations).

Ces considérations ont conduit le ministère de la justice à mettre en place une organisation judiciaire spécifique en ce domaine qui s'est effectuée en trois étapes .

La loi n° 75-701 du 6 août 1975 modifiant et complétant certaines dispositions de procédure pénale a créé des tribunaux de grande instance spécialisés dans le traitement de certaines infractions entrant dans le champ de la délinquance économique et financière, compétents dans le ressort d'une cour d'appel. Leur intervention est subordonnée à deux conditions relatives, d'une part, à la nature de l'infraction en cause- seules certaines infractions limitativement énumérées à l'article 704 du code de procédure pénale (criminalité d'affaires, abus de confiance, escroquerie) étant concernées-, et d'autre part, à la complexité de l'affaire .

Cette loi a également posé le principe d'une compétence concurrente des juridictions spécialisées avec les juridictions de droit commun qui demeurent compétentes sur ces affaires (article 705 du code de procédure pénale).

La loi n° 94-89 du 1 er février 1994 instituant une peine incompressible et relative au nouveau code pénal et à certaines dispositions de procédure pénale a tenté d'améliorer ce dispositif afin d'élargir le périmètre d'intervention des juridictions spécialisées à certaines infractions telles celles relatives aux jeux de hasard ou encore le trafic d'influence. En outre, ce texte a simplifié le mode de saisine de la juridiction spécialisée en supprimant le mécanisme de renvoi ouvert à l'initiative du président de la chambre d'accusation prévu par la loi du 6 août 1975 précitée.

Un décret n° 94-259 du 25 mars 1994 a fixé la liste et le ressort des 35 tribunaux spécialisés en matière économique et financière . Un décret n° 2000-606 du 30 juin 2000 a modifié la carte judiciaire pour consacrer la compétence du tribunal de grande instance spécialisé de Marseille sur l'ensemble du ressort de la cour d'appel d'Aix-en-Provence 51 ( * ) .

Ces dispositions, peu utilisées, ont produit des résultats décevants , la spécialisation n'ayant en effet guère été effective . La plupart des juridictions n'a pas bénéficié de moyens humains et matériels adéquats pour traiter facilement ce type de contentieux tant au siège qu'au parquet. Les magistrats des tribunaux spécialisés en matière économique et financière n'étaient pas exclusivement chargés de ce contentieux et devaient répartir leur temps, comme leurs collègues, entre plusieurs tâches. De plus, situées au siège de la cour d'appel, dans des zones à forte délinquance quotidienne, ces juridictions se sont concentrées sur le contentieux de masse, reléguant au second rang le traitement d'affaires spécialisées.

Afin de mettre en place une véritable justice économique et financière, le législateur, en 1998, a jugé utile de compléter une procédure qui n'était pas encore parvenue à maturité . Comme l'indique le rapport du groupe de travail du tribunal de grande instance de Paris sur le pôle économique et financier publié en mars dernier, « les rédacteurs d'un rapport de janvier 1998 sur la création de la structure financière, après avoir rappelé que l'inflation des contentieux économiques et financiers avait entraîné une politique restrictive d'ouverture d'informations , réservée aux affaires les plus difficiles mettant en cause la santé publique, le secteur bancaire, les partis politiques, l'équilibre boursier, l'attribution des marchés publics et des pans entiers de l'économie ou du secteur associatif, soulignaient la nécessité  de renforcer, tant qualitativement que quantitativement, les effectifs, de créer des équipes pluridisciplinaires composées de magistrats, d'assistants de justice et d'assistants spécialisés (et) de mettre en place des outils nouveaux » 52 ( * ) .

La loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a institué des assistants spécialisés (principalement des fonctionnaires) chargés d'apporter leur expertise (article 706 du code de procédure pénale). En parallèle, ont été nommés des magistrats spécialement affectés au contentieux économique et financier dans certains tribunaux, qui se sont vu attribuer des moyens matériels nouveaux notamment en matière informatique et immobilière.

Cet apport de moyens nouveaux n'a pas bénéficié à l'ensemble des juridictions spécialisées mais s'est limité à quelques-unes, érigées en pôles économiques et financiers et retenues en priorité en fonction du nombre et de la complexité des procédures traitées. Il s'agit des tribunaux de Bastia, Lyon, Marseille et Paris. D'autres juridictions spécialisées au sens de l'article 704 du code de procédure pénale, telles que Bordeaux, Nanterre et Fort-de-France, sans pour autant être érigées en pôles économiques et financiers, ont également été dotées de moyens humains supplémentaires 53 ( * ) .

La notion de pôle économique et financier est complexe. Elle n'est pas définie par le code de procédure pénale . Le rapport du tribunal de grande instance de Paris précité a tenté d'en cerner les contours à partir des moyens dévolus à ces unités 54 ( * ) .

En pratique, l'intervention de ces structures, tout en recoupant rigoureusement les compétences des juridictions financières, s'avère vaste et inégale. A Paris, par exemple, sont traitées certaines infractions liées aux accidents du travail, certains délits relevant du pôle de santé publique ainsi que toutes les infractions économiques et financières commises dans le ressort du tribunal de grande instance de Paris, y compris celles ne figurant pas dans l'énumération de l'article 704 du code de procédure pénale stricto sensu . A Marseille, les contentieux spécialisés en matière de santé publique et de pollution des navires relèvent du pôle économique et financier. En revanche, ce pôle ne couvre que le champ des infractions économiques et financières définies aux termes de l'article 704 et non l'ensemble des affaires afférent à ce domaine.

LES PÔLES ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS DE PARIS ET DE MARSEILLE 55 ( * )

? LE PÔLE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER DE PARIS EN MARS 2003
Le pôle économique parisien a été installé au 5-7 rue des italiens en mars 1999 dans des locaux distincts de ceux qui abritent le tribunal de grande instance. Ses locaux, quoique d'une superficie limitée, ont dans l'ensemble donné satisfaction. Lors de son audition, M. Yves Bot, procureur de la République, a toutefois regretté l'éclatement en plusieurs lieux des services du parquet du tribunal de grande instance de Paris.
Des moyens humains insuffisants
Ce pôle compte 27 juges d'instruction sur un effectif théorique de 30 (appartenant aux troisième et cinquième sections), 28 magistrats du parquet (appartenant à la deuxième division du parquet), 7 assistants spécialisés (3 à l'instruction et 4 au parquet) et 24 assistants de justice .
« Si le nombre de trente juges d'instruction, correspondant à un effectif théorique, est apparu comme satisfaisant au groupe de travail, il n'en est pas de même en ce qui concerne les effectifs du parquet. (...) Il est donc souhaité que : pour l'instruction, les postes vacants soient pourvus, pour le parquet, le nombre de magistrats soit porté de 30 à 36, comme cela était préconisé en 1998. Il y a lieu en outre d'insister sur l'absolue nécessité que l'ensemble des postes de fonctionnaires des secrétariats-greffes soient occupés ». (Extrait du rapport public du groupe de travail du TGI sur le pôle économique et financier- mars 2003 - p. 12).
Des moyens informatiques à moderniser
Le pôle dispose de logiciels permettant la gestion électronique des documents (GED) ou encore l'instruction assistée par ordinateur (IAO). La modernisation de la reprographie pénale a permis de mettre en place un système basé sur la numérisation des dossiers d'instruction sous forme de CDroms.
« Le pôle financier a finalement été doté de moyens informatiques modestes (...). La seule véritable innovation fut le logiciel GED pour le parquet, malheureusement limité à la seule section financière. » (Extrait du rapport précité p. 2).
Un contentieux varié
Le contentieux traité par le pôle marque une baisse notamment en ce qui concerne les procédures d'instruction. En 2002, on dénombrait l'ouverture de 1.300 informations (soit  - 550 par rapport à 1996 s'agissant de la division économique et financière) et le suivi de 2.300 informations (soit - 900). Chaque année, le parquet traite en moyenne 17.000 affaires nouvelles, établit 1.100 réquisitoires introductifs, 2.200 citations directes et 150 convocations par officier de police judiciaire. Le contentieux se répartit entre trois sections, la délinquance astucieuse dite section F1 (fraudes informatiques, fausse monnaie, abus de confiance) qui enregistre 700 affaires nouvelles par mois, la délinquance financière dite section F2 (droit pénal, droit des sociétés, fraude fiscale) qui représente 60 à 70 affaires par mois et la section économique et sociale dite section F3 (droit du travail, droit de la consommation) saisie d'environ 400 dossiers par mois. Par ailleurs, il existe une cellule commerciale F4 installée au tribunal de commerce de Paris.

L'avenir du pôle
En décembre 2002, « face aux difficultés rencontrées par le pôle économique et financier et au malaise ressenti par les magistrats qui y sont affectés, le président et le procureur du tribunal de grande instance ont décidé (...) la mise en place d'un groupe de travail chargé de réfléchir sur un éventuel recentrage des activités du pôle économique et financier et sur les moyens d'en améliorer le fonctionnement ». (Extrait du rapport précité).

Constatant que les dossiers étaient attribués aux cabinets d'instruction sans aucun critère de répartition préalablement établi, le groupe de travail a préconisé de spécialiser les cabinets sur certains contentieux soit très spécifiques (droit de la concurrence, règles de passation de marchés publics, infractions douanières, faux monnayage, fraude informatique), soit d'une grande complexité (intervention de multiples comptes et sociétés « off shore » par exemple). Il a également proposé de resserrer le périmètre de compétence du pôle par un redéploiement vers des sections d'autres divisions du tribunal des contentieux dépourvus de complexité ou ne figurant pas dans l'énumération de l'article 704 du code de procédure pénale (faux et usage de faux, faux témoignage, port illégal de l'uniforme).

Le parquet du tribunal de grande instance de Paris a récemment fait l'objet d'une réorganisation en ce sens : désormais, le pôle financier ne compte plus que trois divisions : la section de la lutte contre la délinquance astucieuse (F1), la section des affaires financières (F2) et la cellule commerciale (F4), la section F3 des affaires économiques et sociales ayant été supprimée.

? LE PÔLE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER DE MARSEILLE
Créé en septembre 1999, le pôle économique et financier de Marseille a été installé en janvier 2001 dans de nouveaux locaux au sein du TGI de Marseille (aménagés par redéploiement interne des services du tribunal).
Des moyens humains à renforcer
Il compte 3 magistrats instructeurs spécialisés , 4 magistrats du parquet , 2 assistants spécialisés , 5 assistants de justice (3 au parquet, 2 au service de l'instruction), 6 magistrats du siège affectés à la chambre correctionnelle spécialisée. Les magistrats rencontrés à Marseille ont souligné la nécessité de renforcer les effectifs du parquet et d'augmenter le nombre d'assistants spécialisés en vue de leur permettre de travailler « en binôme ».
Des moyens informatiques obsolètes
Le pôle a été doté de logiciels IAO et de micro-ordinateurs portables. Les magistrats du pôle ont fait part de la nécessité d'améliorer les systèmes d'enregistrement des procédures pénales et de favoriser des connexions avec les systèmes d'autres juridictions. La mise en place du logiciel GED a été présentée comme « une exigence majeure ».
Un contentieux étendu à l'ensemble du ressort de la cour d'appel
De juillet 2000 à décembre 2002, le pôle économique et financier de Marseille a été saisi de 41 procédures , essentiellement en matière de blanchiment. En outre, il a été consulté officieusement à 5 reprises par les autres parquets du ressort (en matière de douane, d'abus de bien social, de démarchage financier, de blanchiment, de dénonciation de la commission des opérations de bourse). 32 procédures sont en cours dont 15 enquêtes préliminaires, 17 informations judiciaires. 9 procédures sont terminées et ont donné lieu à une dénonciation à des autorités étrangères, une transmission pour compétence au parquet local, 5 classements sans suite et 2 poursuites et jugements de condamnation. Le délai entre la saisine du pôle et l'évocation de l'affaire par le tribunal varie entre 18 mois et 2 ans. En 2002 : 13 saisines (blanchiment, abus de confiance, détournements de fonds publics) concernant les parquets de Nice, Grasse, Draguignan et Aix-en-Provence, ont donné lieu à 7 ouvertures d'information judiciaire et 6 enquêtes préliminaires.

Les partenaires du pôle de Marseille
Le pôle économique et financier de Marseille entretient des relations très étroites avec certaines administrations comme TRACFIN 56 ( * ) , les chambres régionales des comptes, la direction interrégionale des douanes, la DIRCOFI (direction interrégionale du contrôle fiscal) du Sud Est, les antennes du service régional de la police judiciaire de Marseille, qui agissent notamment dans le cadre de l'article 40 du code de procédure pénale. Des réunions avec ces services sont régulièrement organisées, permettant ainsi un échange d'informations et une coordination des actions administratives et judiciaires dans des domaines ciblés. Les procédures les plus importantes ont souvent pour origine une dénonciation ou une saisine émanant de ces partenaires institutionnels.

L'intervention des pôles a été positive . En réponse à une question écrite de notre excellent collègue M. Michel Charasse, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, a récemment indiqué que « le premier bilan du fonctionnement de ces pôles a montré qu'ils avaient permis un traitement plus efficace des dossiers dont ils avaient été saisis » 57 ( * ) . Le contentieux économique et financier est resté stable entre 1994 et 2001. Néanmoins, il semblerait que la partie la plus complexe de certaines affaires (infractions à la législation sur les sociétés) soit plus fréquemment sanctionnée depuis 1998.

La logique de concentration de moyens semble donc avoir porté ses fruits.

Le Gouvernement a d'ailleurs annoncé son intention de mettre en place deux nouvelles structures spécialisées , l'une  à Lille pour couvrir la région Nord et l'autre à Fort-de-France qui serait compétente pour les Antilles. En parallèle, le présent projet de loi propose de prolonger la démarche entamée il y a quatre ans en renforçant le dispositif déjà mis en place.

Plusieurs justifications ont conduit le Gouvernement à améliorer l'organisation judiciaire spécialisée en matière économique et financière.

D'une part, la lutte contre la délinquance économique et financière, en particulier en matière de corruption, demeure toujours d'actualité , des efforts restant à accomplir.

Cet objectif constitue « l'une des priorités du ministère de la justice » 58 ( * ) . A cet égard, le présent projet de loi s'inscrit dans une démarche plus globale, la France participant aux travaux des Nations Unies sur le renforcement de la lutte contre la corruption. De même, plusieurs circulaires récentes sont venues rappeler aux parquets l'importance des politiques de partenariat avec les juridictions financières et avec les différentes administrations (direction générale des impôts et direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression et des fraudes).

En dépit de ces efforts, le classement effectué chaque année par l'organisation non gouvernementale « Transparency international » fait ressortir que la France, située en vingt-cinquième position (douzième rang européen, derrière la Grande-Bretagne et l'Allemagne) sur 102 pays passés au crible, occupe une position assez modeste en matière de lutte contre la corruption.

D'autre part, la spécialisation des partenaires de l'institution judiciaire dans la lutte contre la délinquance économique et financière a rendu nécessaire le renforcement des moyens des juridictions spécialisées .

La circulaire interministérielle du 22 mai 2002 a créé au sein de chaque région administrative des groupes d'intervention régionaux (28 au total) composés de policiers de la sécurité publique, d'officiers de police judiciaire, d'agents des renseignements généraux et d'agents de la police aux frontières, de gendarmes, de fonctionnaires des services fiscaux, de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, et de la direction départementale du travail et de l'emploi ayant pour objectif de lutter contre l'économie souterraine et les différentes formes de délinquance organisée qui y sont associées .

En application de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure n° 2002-1094 du 29 août 2002, le décret n° 2003-390 du 24 avril 2003 a institué 9 directions interrégionales de police judiciaire ainsi que 2 directions régionales .

De même, il existe des directions interrégionales des douanes , ainsi que des directions interrégionales du contrôle fiscal (DIRCOFI).

Enfin, certains avocats ont développé des compétences très spécialisées en matière économique et financière. Les magistrats du pôle économique et financier au tribunal de grande instance de Marseille ont à cet égard confirmé travailler régulièrement avec les mêmes professionnels.

Au cours de son audition devant votre commission des Lois, le garde des Sceaux a d'ailleurs fait valoir la nécessité d'opérer un rééquilibrage au profit des outils mis à la disposition de la justice en vue de lui permettre d'appréhender plus efficacement les dossiers compte tenu des capacités correspondantes de la police judiciaire.

Le garde des Sceaux a considéré que l'actuelle carte judiciaire avec ses 181 tribunaux de grande instance n'était pas adaptée à certains types de délinquance lesquels nécessitaient la mise en place de véritables « plateaux techniques ».

Le présent projet de loi tend donc à améliorer le dispositif judiciaire en vue d'un traitement plus efficace et plus rapide des procédures complexes liées aux infractions commises en matière économique et financière.

Article 7
(art. 704, art.705-1 et 705-2 nouveaux, art. 706 et 706-1
du code de procédure pénale)
Règles relatives à l'organisation judiciaire en matière économique et financière - Extension des compétences des juridictions spécialisées - Création d'une juridiction spécialisée interrégionale -
Procédure de dessaisissement de la juridiction de droit commun au profit de la juridiction spécialisée -
Renforcement du statut des assistants spécialisés

Le présent article a pour objet de moderniser les règles d'organisation judiciaire particulières applicables aux infractions commises en matière économique et financière énoncées au titre XIII (De la poursuite, de l'instruction et du jugement des infractions en matière économique et financière ) du livre IV ( De quelques procédures particulières) du code de procédure pénale . Il propose de marquer une nouvelle étape dans la centralisation du traitement de ce contentieux instituée en 1975 .

Le présent article comprend cinq paragraphes tendant à :

- modifier l'intitulé du titre XIII du livre IV du code de procédure pénale ;

- étendre le champ de compétence des tribunaux de grande instance spécialisés en matière économique et financière et créer une juridiction interrégionale spécialisée (article 704 du code de procédure pénale) ;

- instituer une procédure spécifique de dessaisissement des tribunaux de droit commun au profit des structures spécialisées (articles 705-1 et 705-2 nouveaux du même code) ;

- renforcer le statut des assistants spécialisés affectés dans les juridictions spécialisées (article 706 du même code) ;

- instituer une procédure de dessaisissement des tribunaux de droit commun au profit du tribunal de grande instance de Paris en matière de corruption active d'agents publics étrangers (article 706-1 du même code).

? Le paragraphe I A , inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de sa commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, avec l'avis favorable du Gouvernement, a pour objet de modifier l'intitulé du titre XIII du livre IV du code de procédure pénale, renommé « De la procédure applicable aux infractions en matière économique et financière » pour lui donner une portée plus générale qu'actuellement. Il s'agit d'une modification de forme destinée à tirer les conséquences de l'extension à l'enquête des compétences des tribunaux spécialisés en matière économique et financière proposée au paragraphe I.

? Le paragraphe I tend à modifier l'article 704 du code de procédure pénale pour prévoir, d'une part, une extension des compétences des tribunaux spécialisés dans le traitement de la délinquance économique et financière, d'autre part, la création de juridictions spécialisées interrégionales appelées à compléter l'actuelle carte judiciaire.

1. Une extension des compétences dévolues aux juridictions spécialisées

a) Un pouvoir d'enquête affirmé dans la loi

Dans sa rédaction actuelle, l'article 704, introduit dans le code de procédure pénale par la loi du 6 août 1975 précitée, pose en son premier alinéa le principe selon lequel les infractions en matière économique et financière relèvent d'une procédure particulière centralisée auprès d'un ou plusieurs tribunaux de grande instance spécialisés, compétents dans le ressort de la cour d'appel pour la poursuite, l'instruction et, s'agissant des délits, le jugement.

Le 1°) du paragraphe I 59 ( * ) propose d'étendre à l'enquête le champ des compétences actuellement dévolues à ces juridictions spécialisées.

En pratique, ce pouvoir leur est déjà reconnu . En effet, même si les services d'enquête ne relèvent pas directement de la structure juridictionnelle spécialisée, les parquets des tribunaux spécialisés comme les juges d'instruction spécialisés, à l'instar de ceux des juridictions de droit commun, exercent déjà un contrôle sur les enquêtes.

Si l'affirmation dans la loi du rôle des juridictions spécialisées dans la conduite de l'enquête paraît opportune, leurs difficultés à exercer pleinement ces prérogatives n'en sont pas moins réelles. Outre la réticence des parquets locaux à transmettre des informations aux magistrats spécialisés, le nombre insuffisant d'officiers de police judiciaire conjugué à une spécialisation lacunaire en matière économique et financière explique en partie cette situation.

b) Une compétence matérielle élargie à des infractions nouvelles

Les seize alinéas suivants de l'article 704 du code de procédure pénale énumèrent les infractions susceptibles d'entrer dans le champ de la délinquance économique et financière et pour lesquelles l'article 705 du même code prévoit une compétence territoriale concurrente entre les juridictions correctionnelles de droit commun et les juridictions correctionnelles spécialisées .

Faute de définition satisfaisante, le législateur s'est montré soucieux d'appréhender ce type de délinquance moderne dans ses formes les plus diverses en dressant une longue liste de délits . Cette énumération s'est étoffée au fil des années, la dernière modification ayant été introduite par la loi n° 2000-595 du 30 juin 2000 modifiant le code pénal et le code de procédure pénale relative à la lutte contre la corruption pour y inclure la corruption active et passive de fonctionnaire communautaire ou de fonctionnaire d'un autre Etat membre de l'Union européenne ainsi que d'un membre de la Commission européenne, du Parlement européen, de la Cour de justice ou de la Cour des comptes des Communautés européennes.

Actuellement, cette liste regroupe des délits prévus par sept codes différents, sous réserve qu'il s'agisse d'affaires « qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité » (premier alinéa de l'article 704).

Il s'agit de certains délits figurant :

- dans le code général des impôts (6° de l'article 704 du code de procédure pénale) tels que la fraude fiscale, l'organisation de refus collectif de l'impôt (article 1741 à 1753 bis ) ;

- dans le code pénal (1° de l'article 704 du code de procédure pénale) tels que le blanchiment de fonds (article 222-38), l'escroquerie (articles 313-1 et 313-2), la filouterie (article 313-4), l'entrave à la liberté des enchères et la fraude dans le cadre d'une adjudication publique (article 313-6), l'abus de confiance (articles 314-1 et 314-2), le blanchiment simple et aggravé (articles 324-1 et 324-2), les manquements au devoir de probité notamment la concussion ou la prise illégale d'intérêts (articles 432-10 à 432-15), la corruption active et le trafic d'influence commis par les particuliers (articles 433-1 et 433-2), la corruption de magistrat (article 434-9), la corruption active et passive impliquant des fonctionnaires ressortissants européens précédemment évoquée (articles 435-1 et 435-2).

S'y ajoute l'ensemble des délits mentionnés :

- dans le code de la construction et de l'habitation (4° de l'article 704) tels que l'abus de confiance à l'occasion d'une vente d'immeuble à construire ;

- dans le code de la propriété intellectuelle (5° de l'article 704) comme ceux relatifs à la propriété littéraire, artistique et musicale, aux marques et brevets ;

- dans le code des douanes (7° de l'article 704) tels que la contrebande ou encore les transferts de fonds issus du trafic de stupéfiants ;

- dans le code de l'urbanisme (8° de l'article 704) comme la continuation des travaux nonobstant une décision d'interruption ;

- dans le code de la consommation (9° de l'article 704), par exemple la publicité mensongère, les abus de faiblesse.

En outre, il est fait référence à certaines infractions prévues par des lois ou des ordonnances. Sont visées :

- la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, qui traite notamment de délits relatifs à la constitution et à la gestion de sociétés et valeurs mobilières (2° de l'article 704 du code de procédure pénale) ;

- la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, qui concerne par exemple les délits de banqueroute, les déclarations de créances supposées (3° de l'article 704) ;

- la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit (4° de l'article 704) ;

- la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard qui définit des interdictions d'importation, de fabrication, de détention et d'exploitation d'appareils fonctionnant sur le hasard (12° de l'article 704) ;

- la loi du 28 mars 1885 sur les marchés à terme qui traite des infractions relatives au démarchage d'opérations sur les contrats à terme d'instruments financiers ou de marchandises (13° de l'article 704) ;

- la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et portant création des fonds communs de créances, qui mentionne certaines infractions relatives à l'information mensongère, aux conditions de publicité ou de démarchage (14° de l'article 704) ;

- la loi n° 86-897 du 1 er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse qui traite des délits relatifs à l'avantage illicite par exemple (15° de l'article 704) ;

- l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une commission des opérations de bourse (COB) et relative à l'information des porteurs de valeurs mobilières et à la publicité de certaines opérations de bourse (11° de l'article 704), qui vise le délit d'initié ;

- l'ordonnance n° 86-1243 du 1 er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence (16° de l'article 704), qui prévoit par exemple les délits de participation frauduleuse à une entente, de revente à perte.

Les 2° et 3° du paragraphe I 60 ( * ) proposent de modifier l'énumération des textes mentionnés à l'article 704.

Il est tout d'abord prévu des modifications de forme pour actualiser les références aux dispositions des lois et ordonnances visées à l'article 704 du code de procédure pénale désormais codifiées . Il s'agit :

- de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales et de celle du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, intégrées au code de commerce depuis l'ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce ;

- de la loi de 1885 sur les marchés à terme, de celle de 1984 sur les établissements de crédit, de la loi de 1988 sur les OPCVM et des ordonnances de 1967 instituant une COB et de 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, insérées dans le code monétaire et financier depuis l'ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 relative à la partie législative du code monétaire et financier.

Ces références, devenues obsolètes, seraient donc supprimées (10°, 11°, 14° et 16° de l'article 704 du code de procédure pénale) et remplacées par des mentions relatives aux deux codes concernés (2° et 3° de l'article 704 réécrit par le projet de loi).

Il est également proposé d'inclure de nouvelles infractions parmi les délits relevant de la compétence des juridictions correctionnelles spécialisées visés par le 1° de l'article 704 du code de procédure pénale et, partant, d'étendre le périmètre d'intervention des tribunaux spécialisés en matière économique et financière aux :

- abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse (article 223-15-2 inséré dans le code pénal par la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales) ;

- atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données tels que le fait d'y accéder ou de s'y maintenir frauduleusement, d'en entraver ou d'en fausser le fonctionnement (articles 323-1 à 323-4 du code pénal) ;

- contrefaçons et falsifications de pièces de monnaie ou de billets (faux monnayage), transports de tout signe monétaire non autorisé (articles 442 à 442-8 du même code) ;

L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a complété cette liste pour y ajouter le fait pour une personne de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en entretenant des relations habituelles avec une ou plusieurs personnes participant à une association de malfaiteurs (article 450-2-1 inséré dans le code pénal par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques).

2. La création d'un nouvel échelon judiciaire spécialisé interrégional appelé à compléter la carte judiciaire actuelle

a) Le dispositif proposé

Le premier alinéa du texte proposé par le 4°) du paragraphe I 61 ( * ) propose d'insérer à l'article 704 du code de procédure pénale un antépénultième alinéa créant des tribunaux de grande instance dotés d'une compétence territoriale étendue à plusieurs ressorts de cour d'appel .

Appelés à connaître des mêmes infractions que les actuelles juridictions spécialisées compétentes dans le ressort d'une seule cour d'appel (visées au premier alinéa de l'article 704), ces tribunaux disposeraient des mêmes attributions que celles-ci (enquête, poursuite, instruction et jugement).

S'inspirant des règles de fonctionnement en vigueur selon lesquelles les compétences des juridictions spécialisées en matière économique et financière se limitent aux « affaires qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité », le dispositif proposé fixe un critère analogue relatif au caractère très complexe du dossier pour déterminer le périmètre d'intervention des nouvelles juridictions interrégionales.

Dans un souci pédagogique, le projet de loi mentionne, à titre indicatif, quelques « indices » permettant d'évaluer la difficulté d'une affaire tels que : « le grand nombre d'auteurs, de complices ou de victimes ». L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a souhaité compléter cette liste par un élément relatif au ressort géographique des affaires.

Enfin, les deux derniers alinéas du texte proposé par le 4° du I pour l'article 704 du code de procédure pénale reprend les règles énoncées aux deux derniers alinéas de ce même article moyennant des adaptations destinées à prendre en compte la création de juridictions nouvelles. Le principe selon lequel la compétence des tribunaux spécialisés en matière économique et financière s'étend aux infractions connexes serait maintenu et également applicable aux juridictions interrégionales.

La fixation de la liste et du ressort des tribunaux spécialisés demeure renvoyée au pouvoir réglementaire. Il est prévu que ces structures juridictionnelles comprennent, comme actuellement, des formations d'instruction et de jugement spécialisées, le projet de loi ajoutant à cette énumération une mention relative à « une section du parquet » spécifique. Cette dernière précision traduit la volonté de mettre l'accent sur le rôle du parquet de la juridiction spécialisée et de marquer une distinction avec les sections financières des juridictions de droit commun 62 ( * ) .

Un troisième échelon judiciaire serait donc ajouté à l'organisation judiciaire actuelle en matière de délinquance économique et financière . En pratique, il s'agirait même d'un quatrième niveau si l'on considère qu'il existe au sein même de la catégorie des juridictions spécialisées une dichotomie entre celles dépourvues de moyens matériels et humains particuliers et celles érigées en pôles économiques et financiers. Un tel système n'a pas d'équivalent au sein de l'organisation judiciaire, le traitement de certains contentieux spécialisés (affaires terroristes ou pollution maritime) étant généralement confié à deux types de juridictions différentes (le tribunal correctionnel de droit commun et le tribunal correctionnel spécialisé) dotées d'une compétence concurrente.

Manifestant la volonté de concentrer les moyens nécessaires sur un nombre limité de structures pour éviter des déperditions, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, a annoncé son intention de mettre en place six ou sept structures juridictionnelles interrégionales sur le territoire national , qui pourraient être installées dans les pôles économiques et financiers (Paris, Marseille, Lyon, Bastia) et dans certaines juridictions spécialisées non érigées en pôles telles que Lille, Rennes, Bordeaux, Strasbourg. A ce jour, le maillage géographique de ces futures juridictions interrégionales n'a toutefois pas encore été arrêté. Il conviendra à cet égard de trouver un juste équilibre afin que ces dernières puissent atteindre une taille critique leur permettant d'être efficaces.

b) La position de votre commission des Lois

? Quelques observations sur le dispositif proposé

Sans remettre en cause le bien-fondé du dispositif novateur proposé du projet de loi, votre rapporteur tient néanmoins à faire part de ses interrogations quant à la complexité et à la rationalité de la nouvelle organisation appelée à se mettre en place.

En effet,  du strict point de vue de la cohérence de l'architecture judiciaire, le maintien d'un échelon judiciaire intermédiaire compétent dans le ressort de la cour d'appel risque d'accroître la complexité de la carte judiciaire. Il est donc permis de craindre une difficile articulation entre les critères de « complexité » et de  « grande complexité » des affaires qui fondent respectivement la compétence de la juridiction régionale et celle de la juridiction interrégionale. Le partage des compétences entre chaque niveau de juridiction pourrait s'avérer délicat et difficilement lisible pour les justiciables .

? Quelques observations générales sur la spécialisation des juridictions 63 ( * )

Les juridictions spécialisées doivent être dotées de magistrats compétents et rapidement opérationnels.

L'amélioration de la formation des magistrats constitue à cet égard une priorité .

S'agissant de la formation initiale , des progrès ont été accomplis : un tiers des dernières promotions d'auditeurs de justice a effectué son stage extérieur en entreprise, dans les chambres régionales des comptes ou dans des institutions nationales ou internationales en relation avec la vie économique (Conseil de la concurrence, Commission des Communautés européennes...). De plus, tout en comprenant désormais un module spécialement consacré aux comptes de l'entreprise, l'Ecole nationale de la magistrature organise des conférences et des ateliers spécialisés portant sur différents thèmes tels que le redressement judiciaire des entreprises, la corruption. Cet effort récent devra être poursuivi .

En revanche, la formation des magistrats nommés dans les pôles s'avère encore trop sommaire , ces derniers disposant d'une simple faculté de bénéficier d'une formation de huit jours avant leur entrée en fonction effective. Comme l'avait précédemment préconisé la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice 64 ( * ) , il semble donc souhaitable de rendre obligatoire une formation des magistrats spécialisés avant leur entrée en fonction et de développer la formation continue déconcentrée comme support de formation des pôles spécialisés. Il convient de créer les conditions les plus favorables pour donner toutes les chances de succès aux juridictions spécialisées.

Une réflexion sur le profil des magistrats affectés dans les juridictions spécialisées paraît également incontournable .

Le rapport du groupe de suivi des pôles économiques et financiers publié en mai 2001 avait déjà souligné la nécessité de « mettre en place une politique de nomination des magistrats prenant en compte leur spécialisation acquise à l'occasion d'actions de formation ou dans de précédentes fonctions, et valorisant celle-ci par des affectations ciblées , c'est-à-dire par la consécration d'une véritable filière économique et financière ».

La mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice a en effet constaté que les nominations dans les pôles économiques et financiers étaient souvent le « fruit du hasard », comme l'ont d'ailleurs déploré auprès de votre rapporteur les magistrats du tribunal de grande instance de Marseille 65 ( * ) . La mission avait d'ailleurs préconisé « l'établissement de fiches de postes précises permettant de sélectionner les candidats » appropriés. Une telle orientation paraît souhaitable. Sans porter atteinte à l'indépendance des magistrats, libres de choisir leur affectation et donc toujours indépendants, il ne s'agirait que d' « affiner » la sélection des meilleurs candidats et d'améliorer la gestion des ressources humaines affectées dans les juridictions spécialisées .

Enfin, en adoptant le dispositif qui nous est proposé, le Parlement est en droit d'attendre que des moyens suffisants soient mis à la disposition des juridictions spécialisées dans le contentieux complexe . Votre rapporteur observe à cet égard que les juridictions spécialisées non érigées en pôles économiques et financiers n'ont pas véritablement fonctionné.

M. Yves Bot, procureur de la République du tribunal de grande instance de Paris n'a pas manqué, au cours de l'audience solennelle de rentrée en janvier dernier, d'insister sur la nécessité de doter les sections spécialisées des moyens nécessaires 66 ( * ) .

Un magistrat du parquet de Marseille a jugé  les effectifs actuels du parquet et de l'instruction à peine suffisants pour faire face aux compétences et saisines actuelles. Ce dernier a d'ailleurs évalué que la mise en place d'un pôle spécialisé à Marseille pris en compte dans ses quatre dimensions (criminalité organisée, économique et financière, santé et pollution des navires) impliquait de multiplier par 2,5 les effectifs de magistrats du parquet, de l'instruction et du siège correctionnel affectés actuellement, et ce au démarrage  du dispositif !

En outre, plusieurs magistrats ont attiré l'attention de votre rapporteur sur la nécessité de nommer des magistrats d'un niveau hiérarchique élevé , donc déjà expérimentés et dotés d'une autorité suffisante et du personnel d'encadrement en nombre suffisant pour animer les futurs pôles interrégionaux. Certains ont fait valoir que la responsabilité de ce pôle devrait en toute logique être assurée par deux procureurs adjoints hors hiérarchie supplémentaires en vue de permettre un partage des tâches de direction quotidienne et de faciliter les relations avec les autres juridictions et particulier avec leurs chefs ou encore avec les administrations partenaires.

Enfin, un effort devra être fourni pour doter ces juridictions de moyens matériels modernes, notamment informatiques. L'ensemble des magistrats entendus par votre rapporteur a jugé obsolètes les logiciels informatiques mis à leur disposition .

Le rapport du groupe de travail sur le pôle économique et financier de Paris publié en mars 2003 a jugé les outils informatiques relativement anciens : « le tribunal de grande instance dispose d'une chaîne pénale informatique (NCP) et d'une application dédiée aux cabinets d'instruction (non compatible avec la NCP) ». Il semble que les systèmes informatiques des autres pôles économiques et financiers soient encore moins perfectionnés.

Selon l'étude d'impact, il semblerait que la mise en place de la présente réforme s'effectue à moyens constants, ce qui n'a pas manqué d'étonner votre rapporteur. Le succès de cette réforme dépendra étroitement des moyens mis à la disposition des juridictions spécialisées, tant humains que matériels (informatique, immobilier) pour leur permettre de fonctionner dans de bonnes conditions . A cet égard, un renforcement des effectifs de magistrats et de fonctionnaires des greffes paraît indispensable.

? Le paragraphe II propose d'insérer dans le code de procédure pénale deux articles (705-1 et 705-2) destinés à clarifier le mécanisme de compétence concurrente entre les juridictions spécialisées en matière économique et financière et les juridictions de droit commun en cas de conflit d'attributions .

La loi du 6 août 1975 précitée avait initialement prévu une procédure spécifique destinée à prévenir les conflits de compétences entre juridictions, en confiant au président de la chambre d'accusation (devenue chambre de l'instruction) le soin d'attribuer les affaires à la juridiction spécialisée. L'arbitrage de ce dernier s'étant avéré peu utile et source de complications, le législateur a souhaité simplifier ces règles jugées contraignantes et trop complexes en renvoyant au droit commun le règlement des conflits.

La loi du 1 er février 1994 précitée a donc mis en place un dispositif toujours en vigueur ayant préservé le principe de la compétence concurrente mais supprimé les règles spécifiques prévues en cas de conflit de compétence entre deux juridictions (article 705 du code de procédure pénale). Ainsi, en l'absence de mécanisme de renvoi spécifiquement aménagé au profit des juridictions spécialisées en matière économique et financière, deux modes de résolution des conflits sont aujourd'hui possibles :

- soit par la voie d'un dessaisissement volontaire de la juridiction de droit commun au profit de la juridiction spécialisée (ce qui peut prendre la forme d'un dessaisissement de parquet à parquet ou de juge d'instruction à juge d'instruction). Cette situation n'est pas rare . La saisine des juridictions spécialisées s'effectue à l'amiable, avec l'accord des juridictions de droit commun, comme l'a confirmé à votre rapporteur le responsable de la section économique et financière du tribunal de grande instance de Créteil.

De même, M. Jean-Pierre Dintilhac, à l'époque procureur de la République du tribunal de grande instance de Paris, a expliqué à la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice que malgré cette dualité de compétences, la saisine du pôle s'effectuait la plupart du temps de « manière consensuelle », après une concertation entre les procureurs, sous l'autorité du procureur général, et quelquefois du ministère de la justice ;

- soit par la voie de la procédure de droit commun dite du «  règlement de juges » prévue aux articles 658 et suivants du code de procédure pénale. Ce régime, empreint de formalisme, vise à régler les conflits déclarés, ce qui rend nécessaire la création d'un conflit de compétence positif 67 ( * ) « artificiel ». Ainsi pour renvoyer le dossier devant le juge d'instruction spécialisé faut-il ouvrir une seconde information judiciaire auprès de ce dernier sur la base d'une copie du dossier traité par la juridiction de droit commun. Il appartient ensuite à la chambre de l'instruction de statuer sur le dessaisissement du juge d'instruction initialement saisi au profit de son collègue du pôle financier.

En dépit d'un effort de simplification, la réforme de 1994 n'a pas donné satisfaction .

D'une part, le dessaisissement volontaire des juridictions de droit commun a parfois suscité une certaine amertume et un sentiment de dépossession des procédures dans lesquelles elles s'étaient investies, engendrant parfois des tensions entre les parquets.

Comme l'a souligné un magistrat du pôle économique et financier de Marseille, un mode consensuel de saisine du pôle économique et financier a été défini, les parquets des tribunaux de grande instance autres que celui de Marseille étant invités à lui signaler les procédures pouvant relever de la compétence concurrente, la saisine procédant ensuite d'un accord de ces parquets, le parquet général d'Aix-en-Provence ayant théoriquement à trancher les divergences d'approche. Il a mis en avant qu'en pratique, ce dispositif n'avait pas fonctionné, après avoir expliqué qu'il existait une réticence naturelle des parquets à se dessaisir des procédures jugées intéressantes et une propension à se dessaisir des procédures jugées complexes, peu intéressantes ou initialement mal entamées et restées ensuite en jachère.

D'autre part, la lourdeur du dispositif de droit commun de règlement des conflits s'est avérée inadaptée aux exigences de célérité et d'efficacité qu'impose la lutte contre la délinquance économique et financière.

Afin de remédier à ces difficultés, le présent projet de loi prévoit de revenir à un mécanisme de dessaisissement spécifiquement aménagé au profit des juridictions spécialisées .

L'économie du dispositif, strictement reproduit aux articles premier (articles 706-77 et 706-78 nouveaux) pour les juridictions spécialisées en matière de criminalité organisée, 8 (article 706-2) pour les tribunaux spécialisés en matière sanitaire et 9 (articles 706-105 et 705-106 nouveaux) s'agissant des tribunaux spécialisés en matière de pollution maritime, s'inspire fortement des règles en vigueur en matière de terrorisme.

Cette nouvelle procédure ne vise pas les conflits susceptibles de survenir au stade de l'enquête entre deux parquets. On peut supposer, comme actuellement en matière terroriste ou en matière économique et financière, que la saisine du parquet spécialisé pourra s'opérer de manière informelle avec l'accord du procureur de la République et, en cas de divergence avérée, pourra être tranchée par l'arbitrage du procureur général.

Le champ d'application de ce mécanisme couvre uniquement les conflits susceptibles de survenir au stade de l'instruction du dossier .

Les articles 705-1 et 705-2 qu'il est proposé d'insérer dans le code de procédure pénale fixent respectivement les règles relatives à la mise en oeuvre de la procédure et celles relatives aux voies de recours possibles en cas de désaccord .

S'agissant de la procédure de dessaisissement de la juridiction d'instruction non spécialisée :

- l'initiative appartient exclusivement au procureur de la République près le tribunal de grande instance non spécialisé qui adresse une requête au juge d'instruction saisi de l'affaire au sein de cette même juridiction. On notera qu'il s'agit là d'une simple faculté offerte au parquet non spécialisé , ce qui paraît logique. Les juridictions de droit commun ont vocation à connaître des infractions commises en matière économique et financière et ne sont donc pas obligées de renvoyer systématiquement une affaire devant la juridiction spécialisée ; il est probable que ce dispositif ne trouve à s'appliquer que dans des affaires très complexes par exemple lorsque des éléments nouveaux modifient les caractéristiques de l'affaire (premier alinéa du texte proposé pour l'article 705-1) ;

- des garanties sont prévues pour assurer l'information des parties (le mis en examen et les parties civiles) qui sont avisées préalablement et invitées à présenter leurs observations. En l'absence de toute indication relative au magistrat chargé d'effectuer ces diligences, votre commission vous propose un amendement de précision tendant à confier au juge d'instruction le soin d'informer les parties ;

- l'accomplissement de ces obligations d'information déclenche le délai à partir duquel l'ordonnance du juge d'instruction , confirmant ou refusant le dessaisissement , peut être rendue , soit huit jours au plus tôt après avoir avisé les parties (premier alinéa du texte proposé pour l'article 705-1).

Ce dispositif paraît insuffisant pour garantir l'efficacité de la nouvelle procédure de dessaisissement. En effet, le projet de loi n'impose au juge d'instruction aucune obligation de rendre cette ordonnance. Celui-ci pourrait donc choisir de ne pas répondre à la sollicitation du procureur de la République afin d'exprimer tacitement son refus d'être dessaisi. Le ministère public n'aurait alors aucun recours face à cette décision, le dessaisissement ne pouvant avoir lieu.

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il paraît important d'éviter une telle situation.

Telle est la raison pour laquelle votre rapporteur vous propose par un amendement de permettre au ministère public de surmonter l'inertie du juge d'instruction en obligeant ce dernier à répondre dans un délai d'un mois et en prévoyant, à défaut de réponse , une possibilité pour le ministère public de saisir la chambre de l'instruction , qui pourra si elle l'estime opportun ordonner le dessaisissement du magistrat instructeur ;

- l'ordonnance du juge d'instruction prend effet cinq jours après sa notification, délai pendant lequel le ministère public et les parties peuvent déférer cette décision. L'introduction d'un recours n'a pas d'effet suspensif sur la compétence du juge d'instruction qui garde la maîtrise pleine et entière du dossier jusqu'à ce que l'arrêt de la chambre d'instruction ou de la chambre criminelle de la Cour de cassation soit passé en force de chose jugée (deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 705-1). En l'absence de recours à l'expiration du délai de cinq jours, le procureur de la République à l'initiative du dessaisissement adresse le dossier de la procédure au procureur de la République désormais compétent, responsable du parquet spécialisé (troisième alinéa du texte proposé pour l'article 705-1).

Le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 705-1 précise que cette procédure s'applique également devant la chambre de l'instruction. Cette précision tend à faire référence aux hypothèses dans lesquelles cette dernière procède au règlement de l'affaire (par exemple dans le cas d'une instruction trop longue).

S'agissant de la procédure applicable en cas d'appel de la décision du juge d'instruction initialement saisi :

- le délai prévu pour introduire un recours, fixé à cinq jours, court à compter de la notification de l'ordonnance au mis en examen et à son conseil ;

- les personnes autorisées à former ce recours sont le ministère public et les parties ;

- la juridiction compétente pour statuer sur ce recours diffère selon le lieu d'implantation de la juridiction spécialisée en matière économique et financière. Si les ressorts de la juridiction spécialisée au profit de laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé et de la juridiction initialement saisie sont identiques, le projet de loi indique que la chambre de l'instruction de la cour d'appel est compétente. Dans le cas contraire, une saisine de la chambre criminelle de la Cour de cassation est prévue. L'Assemblée nationale a modifié ce dispositif pour apporter une précision relative à la compétence de la chambre de l'instruction. Votre rapporteur vous propose un amendement tendant à améliorer la rédaction retenue par les députés en vue d'éviter des erreurs d'interprétation ;

- la juridiction compétente en appel dispose d'un délai de huit jours suivant la date de réception du dossier pour désigner le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information. L'arrêt ainsi rendu est communiqué au juge d'instruction, au ministère public et notifié aux parties.

Il revient donc à la chambre de l'instruction ou à la chambre criminelle de la Cour de cassation selon le cas, d'arbitrer les conflits de compétences entre les juridictions spécialisées et les juridictions de droit commun et de décider en dernier ressort du juge d'instruction compétent. Il est précisé qu'aucune autre voie de recours n'est possible. Ce mécanisme présente l'avantage évident de fixer des délais permettant d'éviter qu'un conflit d'attributions ne perdure trop longtemps et de clarifier la procédure en la matière .

Le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 705-2 vise le cas particulier mentionné au dernier alinéa de l'article 705-1 d'une affaire portée en premier ressort devant la chambre de l'instruction et prévoit que l'appel à l'encontre de l'arrêt rendu par cette juridiction est alors formé devant la chambre criminelle de la Cour de cassation, par dérogation au principe général selon lequel la compétence de la juridiction d'appel se détermine selon les ressorts géographiques des juridictions en conflit.

? Le paragraphe III modifie l'article 706 du code de procédure pénale en vue de renforcer le statut des assistants spécialisés affectés dans les juridictions financières spécialisées .

1. Le statut actuel des assistants spécialisés, de nouveaux collaborateurs au service de l'institution judiciaire

Inspirés du modèle des assistants de vérification placés auprès des chambres régionales des comptes généralement issus de la direction générale de la comptabilité publique, les assistants spécialisés ont été créés par le I de l'article 91 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier qui a inséré un article 706 dans le code de procédure pénale .

Ce dispositif novateur a contribué à renforcer le mouvement de modernisation des méthodes de travail au sein de l'institution judiciaire initié par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative qui a créé, à l'initiative de notre collègue M. Pierre Fauchon, rapporteur du texte à l'époque, des assistants de justice chargés d'apporter leur concours aux magistrats du siège et du parquet . Jusqu'alors, le mode de fonctionnement des juridictions reposait sur un travail solitaire devenu peu à peu inadapté à la complexité croissante du contentieux.

Toutefois, si ces deux fonctions ont été justifiées par le même souci d'améliorer le fonctionnement des juridictions judiciaires, le profil des assistants spécialisés diffère fortement de celui des assistants de justice (1.232 en 2002) recrutés parmi les étudiants titulaires d'un diplôme de troisième cycle universitaire en fin de parcours ou ayant tout juste quitté l'Université et dotés d'un statut plus précaire. Si l'assistant spécialisé est un professionnel en cours de carrière, tel n'est pas le cas des assistants de justice, recrutés pour la majorité parmi des étudiants, qui exercent leurs fonctions sous forme de vacations 68 ( * ) dans l'attente de réussir un concours ou de trouver un emploi .

* Les règles de recrutement des assistants spécialisés figurent au premier alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale complété par les articles R. 50 bis à R. 50 sexies du même code (insérés par le décret n° 99-75 du 5 février 1999).

La justification d'une compétence ou d'une expérience professionnelle qualifiant particulièrement le candidat est requise, l'accès à ces fonctions étant réservé :

- soit aux fonctionnaires de catégorie A ou B , quelle que soit l'ancienneté dans leurs fonctions ;

- soit aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation économique, financière, juridique ou sociale d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat, qui remplissent les conditions d'accès à la fonction publique et justifient d'une expérience professionnelle minimale de quatre années.

Les fonctions d'assistants spécialisés sont exclusives de toute autre , à l'exception des activités d'enseignement.

Comme l'indique la circulaire du 19 février 1999, les candidatures sont adressées par les administrations d'origine au ministère de la justice qui, après avoir vérifié le respect par les candidats des conditions légales, soumet pour avis les dossiers aux chefs de cour et par leur intermédiaire aux chefs de juridiction du lieu d'exercice des fonctions.

Nommés par un arrêté pris par le ou les ministres compétents pour une durée de trois ans renouvelable , les assistants spécialisés sont affectés dans les juridictions spécialisées sous le statut, soit de la mise à disposition par leur administration d'origine, soit du détachement . En pratique, comme l'a relevé la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice,  les assistants spécialisés ont tous été recrutés parmi des agents des services publics mis à disposition , « évitant ainsi au ministère de la justice de prendre en charge financièrement leur traitement . (...) La formule du détachement n'a connu aucun succès pour des raisons financières » 69 ( * ) .

Leur recrutement a débuté en février 1999. On recense à ce jour 17 assistants spécialisés affectés dans les différentes juridictions spécialisées, 9 étant issus de la direction générale des impôts (inspecteurs ou contrôleurs des impôts), 3 de la direction générale des douanes et des droits indirects (inspecteurs ou contrôleurs des douanes), 2 de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, 2 de la banque de France 70 ( * ) et 1 de la commission des opérations de bourse. Il s'agit de fonctionnaires chevronnés ayant acquis une spécialisation technique dans des domaines très précis et enclins à faire bénéficier l'institution judiciaire de leur expérience administrative pour une durée limitée.

Le groupe de suivi des pôles économiques et financiers a regretté l'absence de spécialistes issus de la direction générale de la comptabilité publique. La mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice a pour sa part déploré l'absence de professionnels issus du secteur privé parmi les assistants spécialisés et mis en lumière l'utilité pour certains pôles de disposer d'un analyste financier.

Le tableau ci-après récapitule la répartition de ces assistants spécialisés dans les différentes juridictions spécialisées :

RÉPARTITION DES ASSISTANTS SPÉCIALISÉS
(au 1 er juin 2003)

PÔLES ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

EFFECTIFS

Bastia

3

Lyon

2

Marseille

2

Paris

7

Total

14

JURIDICTIONS SPÉCIALISÉES NON ÉRIGÉES EN PÔLES ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Bordeaux

1

Fort-de-France

1

Nanterre

1

Total

3

Source : ministère de la justice

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, le ministère de la justice a sollicité 23 fonctionnaires et agents supplémentaires du ministère de l'Economie et des finances et de la banque de France 71 ( * ) .

* Les missions dévolues aux assistants spécialisés, définies au deuxième alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale, consistent à assister le juge spécialisé dans le déroulement de la procédure sans toutefois être autorisés à accomplir des actes par eux-mêmes .

Ils peuvent donc assister aux auditions, aux interrogatoires et aux perquisitions sans toutefois être autorisés à délivrer des mandats, des commissions rogatoires par exemple, ni à procéder à des interrogatoires ou à des auditions ou encore à signer des réquisitions.

Comme l'a rappelé le rapport du groupe de suivi des pôles économiques et financiers en avril 2001, « il s'agissait de mettre à la disposition des magistrats chargés des procédures économiques et financières les plus lourdes une équipe de collaborateurs de haut niveau afin de leur permettre d'exercer plus efficacement leurs pouvoirs en suscitant un travail en équipe. En revanche, il n'était pas dans l'intention du législateur d'en faire des acteurs de la procédure ».

Les assistants spécialisés ne jouent donc pas un rôle d'experts ni d'enquêteurs, non plus qu'ils ne disposent d'un pouvoir juridictionnel et ne peuvent se substituer aux magistrats auprès desquels ils sont affectés . Ils fournissent essentiellement un travail d'analyse en amont de la procédure afin de donner aux magistrats les moyens d'appréhender tous les aspects d'un dossier et d'améliorer la qualité des enquêtes. A cet égard, le deuxième alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale ouvre aux assistants spécialisés la possibilité d'accéder au dossier de la procédure pour l'exécution des tâches qui leur sont confiées.

Quatre types de travaux différents sont susceptibles de leur être confiés : l'audit de dossiers, qui se traduit le plus souvent par la production de notes de synthèse ou de rapports, des études techniques sur un point précis, l'apport de compléments antérieurs ou postérieurs aux saisines des services d'enquête visant le plus souvent à appréhender l'environnement économique et financier des personnes visées par la procédure et enfin des interrogations ponctuelles sur des points précis qui s'apparentent à des demandes informelles plus qu'à des travaux approfondis.

* Des obligations déontologiques strictes leur sont imposées qui constituent la contrepartie logique de leur étroite association aux travaux des magistrats . Le deuxième alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale prévoit qu'ils sont soumis au secret professionnel et qu'ils prêtent serment 72 ( * ) . En outre, comme l'indique la circulaire du 19 février 1999, les assistants spécialisés ont l'obligation d'être strictement indépendants de leur administration d'origine et ne sauraient se voir « confier des travaux dans des procédures qu'ils auraient eu à connaître au cours de [leurs] précédentes fonctions ».

* Les modalités de rattachement des assistants spécialisés aux juridictions sont définies au premier alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale, complété par les articles R. 50 quater et quinquies .

Placé sous l'autorité des chefs de juridiction, l'assistant spécialisé peut exercer ses fonctions auprès soit d'une ou plusieurs cours d'appel, soit d'un ou plusieurs tribunaux de grande instance. Outre que les assistants peuvent être affectés dans des juridictions de différents degrés, il existe également des possibilités de mutualisation entre les différentes juridictions.

En pratique, ces souplesses n'ont jamais été exploitées.

D'une part, les assistants spécialisés ont été exclusivement affectés auprès des tribunaux de grande instance spécialisés en matière économique et financière, l'objectif premier de la création de cette fonction ayant été de lutter plus efficacement contre une forme de délinquance moderne et complexe. D'ailleurs, la circulaire du 19 février 1999 invitait les chefs de cour d'appel à les placer dans les tribunaux de grande instance spécialisés.

D'autre part, les possibilités de mutualisation des assistants n'ont à ce jour jamais été mises en oeuvre. Il semblerait comme l'avait précédemment relevé le groupe de suivi des pôles économiques et financiers, qu'il n'existe pratiquement aucune relation entre les pôles.

2. Le contexte : un rôle reconnu et apprécié qui mérite d'être précisé

Après quelques difficultés d'intégration au moment de leur arrivée en 1999 liées à la réticence des magistrats vis à vis du travail en équipe, les assistants spécialisés semblent avoir trouvé leur place au sein des juridictions spécialisées .

Leur concours est très apprécié des magistrats qui, comme l'a relevé le groupe de suivi des pôles économiques et financiers, s'accordent sur l'excellente qualité de leurs travaux et « le très grand intérêt de leurs apports techniques dans les procédures économiques et financières ». Leur intervention s'est révélée particulièrement utile au stade de l'enquête en permettant un meilleur ciblage des investigations à conduire, ce qui constitue un élément déterminant de leur succès.

Le rapport du groupe de travail sur le pôle économique et financier de Paris de mars 2003 confirme cette analyse en attribuant une partie de la diminution du nombre d'ouverture d'informations judiciaires à l'efficacité des assistants spécialisés « qui, par leur travail d'analyse et de propositions d'orientation, permettent d'éviter les recours inutiles à l'instruction ».

Il est apparu utile au législateur de préciser le cadre juridique de leur action et de renforcer leur statut en apportant les retouches nécessaires à un dispositif récemment créé qui semble avoir fait ses preuves.

Une clarification de leur rôle s'est avérée nécessaire . En effet, la formulation très générale retenue pour définir les missions des assistants spécialisés, fortement inspirée du statut des assistants de justice, visait à donner le maximum de souplesse à un dispositif que la pratique quotidienne n'avait pas encore éprouvé. Si cet objectif a été atteint, comme en témoigne le développement des interventions des assistants spécialisés dans des domaines très larges, certaines difficultés se sont fait jour.

D'une part, la présence des assistants spécialisés à tous les stades de la procédure a conduit à des interrogations, voire des contestations sur les modalités de leur intervention.

Ainsi, dans certains cas, le versement au dossier de documents établis par ces derniers a pu être contesté par les parties civiles . Certains avocats ont critiqué le fait que le rôle actif joué par ces assistants ne figure pas dans la loi, jugeant que cette situation portait atteinte au principe du contradictoire et, partant, aux droits de la défense.

Les assistants spécialisés se sont également heurtés à certaines administrations , réticentes à leur communiquer des documents au motif qu'il s'agissait d'un pouvoir dévolu au seul magistrat.

En outre, leur intervention s'est effectuée en marge du cadre légal . Par exception à l'interdiction de se substituer aux magistrats, certains actes, par exemple en matière de procédures collectives, ont parfois été établis sous le double timbre du magistrat mandant et de l'assistant spécialisé.

Les services d'enquête (notamment de police) ont également éprouvé des difficultés à accepter la présence d'acteurs autres que des magistrats lors de certaines perquisitions.

Les assistants spécialisés eux-mêmes ont eu le sentiment d'être occultés de la procédure . Certains ont pu être découragés, voire démotivés. Comme l'a souligné le groupe de suivi des pôles économiques et financiers, « la nécessité d'un véritable statut était indispensable, faute de quoi les assistants spécialisés en poste ne demanderaient pas le renouvellement de leur mise à disposition et il serait extrêmement difficile d'en recruter d'autres » 73 ( * ) .

D'autre part, le caractère très général des missions définies dans la loi a conduit à des différences d'approche entre les juridictions spécialisées, notamment entre le pôle de Paris et les autres pôles. La participation « passive » des assistants spécialisés aux auditions, aux confrontations ou à l'audience n'a été développée qu'au pôle économique de Paris. Le versement de documents établis par ces derniers au dossier a été retenu par les juges d'instruction du pôle de Paris, contrairement à ceux du pôle de Bastia qui avaient décidé de n'en verser aucun.

Telles sont les raisons pour lesquelles il est apparu indispensable de clarifier le rôle des assistants spécialisés au sein de la procédure pénale afin de préciser l'étendue de leurs tâches et d'harmoniser les pratiques des pôles .

3. Le dispositif proposé : un renforcement du statut des assistants spécialisés

A l'instar de la position exprimée par le groupe de suivi des pôles économiques et financiers (mai 2001), la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice, en juin 2002, avait préconisé le renforcement de l'attractivité du statut des assistants de justice (recommandation n° 40).

Sensible à ces observations, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, avait annoncé, dès l'examen de la loi n° 2002- 1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, son intention de réfléchir « à la manière dont sont associés au travail des magistrats les assistants spécialisés » marquant le souci « d'évaluer l'efficacité (de leur collaboration) avant de renforcer éventuellement ces pôles et d'augmenter le nombre des assistants spécialisés » 74 ( * ) .

Le présent projet de loi a pour objet de mettre en oeuvre une partie des propositions précédemment évoquées conformément aux engagements pris par le garde des Sceaux au cours de la session extraordinaire de juillet-août 2002.

Trois séries de modifications apportées au droit actuel sont proposées.

* Les règles de recrutement prévues au premier alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale demeureraient identiques à celles en vigueur moyennant une adaptation destinée à élargir les critères de recrutement des personnes éligibles à la fonction d'assistant spécialisé . Il est proposé de modifier les conditions de diplômes imposées aux personnes non fonctionnaires afin de renvoyer au décret les types de diplômes permettant d'accéder à ces fonctions, qui ne seraient plus limités aux seules matières économique, financière, juridique ou sociale. Un tel dispositif pourrait permettre par exemple d'ouvrir l'accès aux fonctions à un candidat titulaire d'un diplôme sanctionnant une formation d'informaticien d'une durée égale ou supérieure à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat, ce qui n'est pas permis actuellement.

* Les modalités d'affectation définies au premier alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale seraient alignées sur la pratique pour prévoir un rattachement au tribunal de grande instance spécialisé en matière économique et financière. Il est donc proposé de supprimer la possibilité d'affecter les assistants spécialisés auprès des cours d'appel ainsi que la règle permettant de mutualiser leur intervention au profit de plusieurs tribunaux de grande instance.

Si le rattachement exclusif des assistants spécialisés aux tribunaux de grande instance dédiés au traitement de la délinquance économique et financière est clairement affirmé, une dérogation à ce principe est néanmoins prévue par l'article premier du projet de loi (article 706-79 nouveau inséré dans le code de procédure pénale), qui ouvre la possibilité aux magistrats exerçant dans les juridictions spécialisées en matière de criminalité organisée de solliciter leur participation dans les procédures concernant les crimes et délits entrant dans le champ de ce contentieux.

Leurs compétences seraient donc mutualisées entre plusieurs types de juridictions spécialisées. Toutefois, en pratique, ils devraient néanmoins exercer leurs fonctions dans un même lieu , l'implantation et le ressort des juridictions spécialisées en matière financière et celles spécialisées dans la lutte contre la grande criminalité devant être identiques, le ministère de la justice ayant annoncé son intention de retenir entre sept et dix sites environ.

? Les missions des assistants spécialisés seraient élargies et précisées .

La nouvelle définition de leurs missions proposée par le projet de loi ne s'écarte pas fondamentalement de la logique retenue par le législateur en 1998, mais tend plutôt à la pérenniser en affinant le dispositif initial .

Le deuxième alinéa de l'article 706 du code de procédure pénale réécrit par le présent article maintient donc le principe selon lequel les assistants spécialisés n'ont pas vocation à devenir des acteurs de la procédure à part entière en prévoyant que, comme actuellement, ils participent aux procédures sous la responsabilité des magistrats sans pouvoir se substituer à ces derniers ni signer des actes par délégation du magistrat.

Cette formulation générale est ensuite complétée par six alinéas nouveaux, précisant le périmètre de leur intervention . Il s'agit avant tout de rendre leur présence plus transparente et de consacrer leur double rôle d'assistance des magistrats et des services d'enquête et d'aide à la décision. Le présent texte dresse une liste purement indicative énumérant les tâches les plus courantes susceptibles de leur être confiées à chaque stade de l'enquête, telles que :

- assister tous les acteurs de la procédure : magistrats (juge d'instruction, magistrat du parquet dans l'exercice de l'action publique) et officiers de police judiciaire agissant sur délégation des magistrats ; la possibilité pour le procureur général de leur demander d'assister le ministère public devant la juridiction d'appel est également prévue ;

- fournir une aide à la décision à travers la production de documents de synthèse ou d'analyse remis aux magistrats et versés au dossier ; le texte apporte une clarification par rapport au droit en vigueur en imposant l'obligation de verser ces travaux au dossier ;

Le présent projet de loi propose un dispositif équilibré soucieux de mettre fin aux difficultés actuelles de positionnement des assistants spécialisés vis à vis des acteurs de la procédure pénale (magistrats et enquêteurs) sans pour autant porter atteinte aux prérogatives de ces derniers . Il concrétise certaines des propositions du groupe de suivi des pôles économiques sans toutefois reprendre celles relatives à la participation plus active des assistants spécialisés 75 ( * ) .

Outre un amendement rédactionnel, l'Assemblée nationale, sur la proposition du rapporteur de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, a adopté deux modifications au dispositif initial sans pour autant remettre en cause sa philosophie.

Les députés ont tout d'abord jugé opportun d'étendre le champ des compétences de ces professionnels en prévoyant une dérogation de portée limitée à l'interdiction générale de recevoir par délégation un pouvoir de signature figurant au deuxième alinéa de l'article 706 réécrit par le projet de loi. Il s'agit de la possibilité de signer des réquisitions judiciaires correspondant à des tâches matérielles de recueil d'informations et de documents , telles :

- la mise à disposition 76 ( * ) par les opérateurs de télécommunications des informations contenues dans les systèmes informatiques ou les traitements de données nominatives à l'exception d'organismes ayant des activités liées à la presse, au syndicalisme, ou à la vie politique ou religieuse, au stade de l'enquête de flagrance, préliminaire ou encore pour l'exécution d'une commission rogatoire 77 ( * ) ;

-  la mise à disposition par toute personne, tout établissement, tout organisme privé ou public ou toute administration publique de documents de tous ordres intéressant l'enquête, y compris ceux contenant des informations dans des fichiers nominatifs, au stade de l'enquête de flagrance, de l'enquête préliminaire ou encore pour des perquisitions, saisies ou transports ordonnés dans le cadre d'une instruction 78 ( * ) .

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur à l'Assemblée nationale, a fait valoir qu'il s'agissait d'un simple alignement du droit sur la pratique. Il a également justifié sa démarche par le souci de revaloriser les tâches des assistants spécialisés qui, en tant que professionnels de haut niveau, ont souvent exercé des fonctions de responsabilité dans leur corps d'origine. En juin 2002, la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice avait d'ailleurs exprimé une préoccupation analogue en relevant « une certaine frustration » chez les assistants spécialisés, certains souhaitant exercer davantage de responsabilités, à l'instar de leurs précédentes fonctions 79 ( * ) . Votre rapporteur ne peut qu'approuver cet ajout qui contribue à remédier à un formalisme excessif . En effet, il arrive que ces réquisitions doivent souvent être modifiées, ce qui nécessite à chaque fois la signature du magistrat mandant.

Dans le prolongement de l'initiative de l'Assemblée nationale, votre commission des Lois vous propose également un amendement pour autoriser les assistants spécialisés à mettre en oeuvre le droit de communication reconnu aux magistrats par l'article 132-22 du code pénal. Il apparaît plus conforme à la pratique de leur donner un tel pouvoir, ces derniers se rendant souvent seuls dans les administrations concernées pour obtenir les informations nécessaires.

La deuxième modification de l'Assemblée nationale consiste à donner une plus grande souplesse au statut des assistants spécialisés, en remplaçant l'obligation de verser au dossier les travaux effectués (documents de synthèse ou d'analyse) par les assistants spécialisés par une simple faculté. Cette solution s'est avérée plus satisfaisante dans la mesure où elle permet d'autoriser cette pratique en la mentionnant dans la loi tout en évitant de la systématiser. Le versement au dossier de documents écrits pourrait en effet constituer un dangereux précédent susceptible de faire peser la même contrainte sur les notes personnelles des magistrats. Ainsi, seules les notes rédigées destinées au dossier devraient y être jointes.

4. La position de votre commission des Lois

Votre commission se félicite des avancées proposées par le présent texte qui tendent à apporter une réponse à des préoccupations légitimes. L'amélioration du statut des assistants spécialisés permettra de faciliter la mise en place d'équipes pluridisciplinaires autour du juge et d'accroître l'ouverture de l'institution judiciaire à des collaborations extérieures, qui constitue aujourd'hui un impératif pour garantir l'efficacité et la qualité de la justice.

Cette analyse fait l'unanimité, y compris chez les magistrats qui, naturellement enclins à exercer leur métier de façon solitaire, s'étaient montrés réticents à collaborer étroitement avec d'autres corps de métiers.

Tout en approuvant pleinement l'économie du dispositif proposé , votre rapporteur tient néanmoins à relever que certaines interrogations ne relevant pas directement du domaine de la loi demeurent auxquelles des réponses devront être apportées pour garantir l'attractivité de la fonction d'assistant spécialisé.

Le mode de rémunération constitue une première source de difficulté. Force est de constater que les conditions financières de la mise à disposition se sont avérées pénalisantes , les assistants spécialisés ayant été privés des primes correspondant aux fonctions exercées antérieurement dans leur administration d'origine. En outre, il semblerait que les administrations d'origine fassent preuve d'une réticence croissante à prendre en charge des emplois dont elles ne retirent pas directement les bénéfices.

Le ministère de la justice, conscient de ces difficultés, a annoncé son intention de financer sur ses crédits le traitement des assistants spécialisés 80 ( * ) . Il reviendra donc au Gouvernement de traduire cet engagement dans le futur projet de loi de finances pour 2004 et de garder à l'esprit la nécessité d'éviter que ces professionnels ne subissent un préjudice financier par rapport à leur niveau antérieur de rémunération. A défaut, leur recrutement pourrait s'avérer problématique, ce qui hypothéquerait le bon fonctionnement des juridictions régionales spécialisées nouvellement créées en matière économique et financière et de grande criminalité.

Votre commission tient également à souligner les insuffisances de la formation de ces assistants spécialisés . Ce constat fait l'unanimité, comme l'avait relevé la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice en juin 2002. La demande est très forte de la part des assistants spécialisés souvent ignorants des règles de fonctionnement de l'institution judiciaire et de la matière pénale. La plupart d'entre eux s'estime à cet égard insuffisamment armée. Comme l'a relevé le rapport du groupe de suivi des pôles économiques et financiers, outre qu'elle permettrait à ces derniers de situer plus facilement leurs travaux dans la perspective souhaitée par le magistrat mandant, l'instauration d'une formation serait « un facteur de valorisation au moment de leur réintégration dans leur administration d'origine ». Telles sont les raisons pour lesquelles votre commission vous propose un amendement tendant à inscrire dans la loi le principe d'une formation obligatoire avant l'entrée en fonction. Il s'agit de renforcer la qualité de la justice en renforçant l'efficacité de ses agents.

? Le paragraphe IV complète l'article 706-1 du code de procédure pénale relatif aux règles de procédure applicables aux infractions relatives à la corruption active d'agents publics étrangers à l'Union européenne afin de clarifier le régime de compétence concurrente entre les juridictions correctionnelles de droit commun et le tribunal de grande instance de Paris en cas de conflit d'attributions .

L'article 706-1 inséré dans le code de procédure pénale par la loi du 30 juin 2000 modifiant le code pénal et le code de procédure pénale relative à la lutte contre la corruption précitée confie à une juridiction spécialisée unique, la juridiction parisienne, concurremment avec les juridictions de droit commun, le soin de connaître des infractions prévues par les articles 435-3 et 435-4 du code pénal, relatifs à la corruption active respectivement de personnes détenant un mandat judiciaire (un magistrat, un juré ou toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle, un arbitre ou un expert nommé soit par une juridiction, soit par les parties ...) et de personnes dépositaires de l'autorité publique , chargées d'une mission de service public, ou investies d'un mandat électif public dans un Etat étranger autre que les Etats membres de l'Union européenne ou au sein d'une organisation internationale publique autre que les institutions des Communautés européennes.

Cette disposition constitue une dérogation à la procédure applicable aux infractions commises en matière économique et financière qui relèvent des juridictions spécialisées visées aux articles 704 et 705 du code de procédure pénale. Elle résulte d'une initiative du Sénat sur proposition de sa commission des Lois. Notre excellent collègue M. José Balarello, rapporteur du texte à l'époque, avait fait valoir le caractère très complexe de certains contrats passés dans le cadre du commerce international ainsi que les conséquences irrémédiables susceptibles de résulter d'une procédure lancée contre les dirigeants d'une entreprise qui feraient l'objet d'un non-lieu ou d'une relaxe. Ces considérations avaient conduit le législateur à instituer le principe d'une compétence parisienne afin d'assurer le traitement judiciaire de ce contentieux par des magistrats rompus à des mécanismes financiers très complexes et de préserver la cohérence de l'action publique 81 ( * ) .

Le présent paragraphe n'a pas pour objet de remettre en cause ce dispositif, mais tend au contraire à en faciliter le fonctionnement en instituant une procédure particulière de dessaisissement spécifique des juridictions de droit commun au profit de la seule juridiction parisienne, strictement calquée sur celle définie aux articles 705-1 et 705-2 insérés dans le code de procédure pénale par le paragraphe II du présent article relatif aux juridictions spécialisées en matière économique et financière et auxquels il est d'ailleurs expressément renvoyé.

Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle vous a précédemment soumis, votre commission vous propose d'adopter l'article 7 ainsi modifié .

Article 7 bis
(art. 3 à 6 et art. 7-1 nouveau de la loi du 21 mai 1936)
Clarification du régime applicable aux loteries - Assouplissement de la dérogation prévue en faveur des lotos traditionnels

L'article 7 bis, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois et Thierry Mariani, le Gouvernement s'en étant remis à la sagesse de l'Assemblée, a pour objet, d'une part, de clarifier les règles applicables aux loteries et, d'autre part, d'assouplir la dérogation particulière prévue pour les lotos traditionnels.

La loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries en vigueur depuis plus d'un siècle et demi a posé un principe général d'interdiction des loteries (article premier). Comme l'indique son article 2, entrent dans cette catégorie particulière de jeux de hasard : « les ventes d'immeubles, de meubles ou de marchandises effectuées par la voie du sort ou auxquelles auraient été réunies des primes ou autres bénéfices dus, même partiellement au hasard et généralement toutes opérations offertes au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait acquis par la voie du sort ».

Deux exceptions ont été prévues pour tempérer cette interdiction générale 82 ( * ) . Elles concernent :

- les loteries d'objets mobiliers exclusivement destinées à des actes de bienfaisance , à l'encouragement des arts ou au financement d'activités sportives à but non lucratif visées à l'article 5 de la loi du 21 mai 1836 issu de la loi n° 86-1019 du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre la criminalité et la délinquance. Le but non lucratif doit être avéré. Le décret n° 87-430 du 19 juin 1987 fixant les conditions d'autorisation des loteries précise qu'elles demeurent soumises à une autorisation administrative du préfet qui en apprécie la régularité en tenant compte du contexte local et de l'affectation des sommes recueillies. Ce dispositif, fondé sur le souci d'encourager les arts ou de financer des activités sportives à but non lucratif, permet ainsi à des associations à but non lucratif (humanitaires ou d'utilité publique par exemple) d'organiser des loteries dans le cadre de leurs activités ;

- les lotos de tradition locale (rifles, poules au gibier ou quines) ; cette souplesse est prévue par l'article 6 de la loi du 21 mai 1836 résultant de la loi du 9 septembre 1986 précitée, sous réserve du respect de trois conditions cumulatives , l'une portant sur l'organisation de ces jeux qui doivent se dérouler « en cercle restreint », l'autre relative à leur finalité strictement limitée à certains domaines (social, culturel, scientifique, éducatif, sportif, d'animation locale) et la dernière introduite par la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 liée à la faible valeur des mises et des lots . Un arrêté conjoint des ministres de l'intérieur et de l'économie et des finances du 10 juillet 2001 a fixé à 400 euros la valeur marchande de chaque lot susceptible d'être mis en jeu.

Comme le souligne le ministère de l'intérieur en réponse à une question écrite d'un député : « le législateur a ainsi entendu concilier, d'une part, les exigences de l'attrait pour ce type de jeux particulièrement bénéfique aux associations désireuses de se procurer des ressources et, d'autre part, la protection contre les dérives compulsives de certains joueurs » 83 ( * ) . Contrairement aux dérogations accordées au titre de l'article 5 de la loi de 1836, celles fondées sur l'article 6 de cette même loi ne sont soumises à aucune autorisation administrative.

Ces deux dérogations particulières partagent le même objectif de permettre le financement du secteur associatif tout en lui évitant d'être concurrencé par des projets fondés sur une logique purement commerciale .

Dans un arrêt Schindler du 24 mars 1994, la Cour de justice des Communautés européennes, tout en reconnaissant que l'organisation de loteries constituait une activité économique relevant du droit communautaire, a jugé qu'elle présentait néanmoins certaines particularités susceptibles de conduire les Etats membres à la restreindre, sous réserve que les mesures restrictives en cause ne soient pas discriminatoires.

La dérogation prévue par l'article 6 de la loi du 21 mai 1836 a permis aux associations de trouver une source de financement indispensable à l'équilibre de leur budget. Pour certaines associations, notamment d'anciens combattants, ces lotos traditionnels constituent des sources de financement indispensables à leur pérennité. Or, la valeur modeste des lots susceptibles d'être gagnés, fixée par le pouvoir réglementaire, a pesé sur l'attractivité des lotos traditionnels, et partant, a privé un certain nombre d'associations de ressources substantielles et attendues.

Notre excellent collègue M. Jean-Claude Carle a au cours d'une séance de questions orales sans débat en octobre 2002 mis en lumière la nécessité d'assouplir une réglementation fragilisant les associations , faisant valoir l'inadaptation et le caractère trop contraignant des règles en vigueur : « les recettes en jeu sont modestes, mais elles permettent aux associations, tels les amicales de sapeurs-pompiers, les clubs sportifs ou les associations de parents d'élèves de pouvoir vivre. Or, des recettes propres en moins, ce sont autant de subventions en plus à leur verser » 84 ( * ) . Ainsi certaines associations sont-elles conduites à renoncer à l'organisation de lotos traditionnels.

Le présent article, qui comprend cinq paragraphes, tend à remédier à cette situation en modernisant le cadre juridique applicable aux loteries défini par la loi du 21 mai 1836. Deux séries d'adaptations sont prévues .

1. Les modifications de forme proposées par le projet de loi : une clarification du régime des loteries destinée à permettre une meilleure compréhension des règles en vigueur.

Les paragraphes I, II, III et V proposent une série de modifications de forme destinées à améliorer la cohérence rédactionnelle de certaines dispositions de la loi du 21 mai 1836 .

En effet, M. Thierry Mariani a, au cours de la séance publique du 22 mai dernier à l'Assemblée nationale, fait état du manque de lisibilité des règles applicables aux loteries après avoir expliqué qu'elles relevaient de trois lois différentes : la loi du 21 mai 1836, la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard et la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 relative à l'information et à la protection des consommateurs ainsi qu'à diverses pratiques commerciales. Il a fait valoir que cette dispersion normative rendait difficile une bonne compréhension de la loi par les organisateurs de loterie et rendait indispensable la rédaction d'un texte clair regroupant au sein d'une même loi, celle de 1836, toutes les dispositions relatives à ce domaine énoncées dans d'autres textes 85 ( * ) .

? Le texte proposé par le paragraphe I pour l'article 3 de la loi du 21 mai 1836 relatif aux peines susceptibles d'être infligées en cas de violation du principe général de prohibition des loteries prévoit une modification de forme . Plutôt que de renvoyer au premier alinéa de l'article 2 et à l'article 3 de la loi du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard précitée, il est proposé de reproduire dans la loi du 21 mais 1836 le contenu de ces articles.

L'article 3 serait également complété par trois alinéas, qui se bornent à reproduire les dispositions plus générales et déjà applicables par ailleurs, mentionnées à l'article 4 de la loi du 12 juillet 1983 précitée et relatives aux sanctions susceptibles d'être infligées aux personnes morales coupables des infractions à la législation sur les jeux de hasard.

? Le texte proposé par le paragraphe II reprend intégralement l'article 4 actuellement en vigueur relatif aux peines encourues par les auteurs, entrepreneurs ou agents de loteries françaises et étrangères, sous réserve d'une précision indiquant que les loteries visées sont celles « prohibées par la présente loi ».

? Le texte proposé par le paragraphe III tend à compléter l'actuel article 5 de la loi du 21 mai 1836 présenté précédemment, afin d'y faire figurer certaines dispositions énoncées actuellement dans le décret du 19 juin1987 précité selon lesquelles il revient au préfet du département du siège social de l'organisme bénéficiaire, et à Paris, au préfet de police, d'accorder les dérogations au bénéfice de loteries destinées à des actes de bienfaisance ou à l'encouragement des arts et au financement des activités sportives. Le renvoi à un décret en Conseil d'Etat serait maintenu s'agissant des autres modalités d'application de cet article.

? Le texte proposé par le paragraphe V pour l'article 7-1 nouveau inséré par le projet de loi dans la loi du 21 mai 1836 tend à reprendre les dispositions de l'article 9 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 86 ( * ) relatives au régime des loteries, qui a ouvert la possibilité de faire constater et poursuivre certaines infractions par des enquêteurs spécialement habilités à cet effet. Il s'agit, là encore, de faire figurer dans la loi de 1836 des dispositions concernant les loteries et mentionnées dans des textes épars.

Votre commission vous propose un amendement rédactionnel tendant à supprimer des mentions inutiles . En effet, il paraît redondant de renvoyer l'application de l'article 7-1 à certaines dispositions du code de commerce (premier et troisième alinéas de l'article L. 450-1, articles L. 450-2, L. 450-3 et L. 450-8) et d'en reproduire intégralement le contenu.

2. Les modifications de fond prévues par le projet de loi : un assouplissement de la dérogation au principe général d'interdiction des loteries aménagée en faveur des lotos traditionnels

Sans remettre en cause le principe général de la prohibition des loteries défini par l'article premier de la loi du 21 mai 1836, le texte proposé par le paragraphe IV tend à modifier l'économie de son article 6 présenté précédemment.

Il tend à supprimer une des conditions requises pour bénéficier de la dérogation prévue en faveur des lotos relative à la limitation de la valeur des lots pour y substituer un montant de mise maximal fixé à 20 euros .

Cette démarche, essentiellement fondée sur le souci pragmatique de faciliter les modalités d'organisation des loteries pour les associations, ne parait pas remettre en cause la philosophie initiale de la loi de1836.

Il convient de souligner que les dérogations accordées au titre de l'article 6 de la loi de 1836 font l'objet d'un strict encadrement destiné à éviter des abus. La circulaire interprétative du ministère de l'intérieur du 29 octobre 1997 s'est efforcée de préciser les conditions d'application de ce dispositif, notamment l'étendue des notions de « cercle restreint », « but social » ou encore d'« animation locale ». De plus, le juge judiciaire s'est employé à sanctionner d'éventuels abus en exerçant un contrôle approfondi sur les circonstances de chaque espèce. La jurisprudence sur l'application de cette loi est désormais bien établie comme en ont témoigné trois arrêts concordants prononcés en 1994 par la cour d'appel (Montpellier, 16 mars 1994, Bordeaux, 26 avril 1994 et Toulouse, 30 juin 1994).

Ces éléments constituent autant de garanties d'une bonne application de la loi de 1836 et paraissent suffisants pour éviter que, dans la pratique, ses dispositions ne soient détournées à des fins purement lucratives, voire délictueuses.

Sous le bénéfice de ces observations et de l'amendement de cohérence rédactionnelle présenté précédemment, votre commission vous propose d'adopter l'article 7 bis ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions relatives aux infractions en matière de santé publique

La présente section tend à compléter les règles relatives au fonctionnement des pôles judiciaires de santé publique.

La mise en place de juridictions spécialisées en matière de santé publique est encore récente. Inspirée de l'organisation actuelle en matière économique et financière et terroriste, la centralisation du traitement des infractions commises en ce domaine , régie par le titre XIII bis relatif à « la poursuite, l'instruction et au jugement des infractions en matière sanitaire », a été instituée par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé , qui a inséré un article 706-2 dans le code de procédure pénale 87 ( * ) .

Comme l'a résumé M. François  Gosselin, en qualité de premier substitut au tribunal de grande instance de Paris, dans son discours d'audience de rentrée solennelle prononcé le 15 janvier 2002, la politique pénale en matière de santé publique n'avait pas jusqu'alors encore véritablement réussi à trouver ses marques : « constat cuisant pour nous : les procédures emblématiques touchant à la santé publique ont été initiées depuis 15 ans par la voie de plaintes avec constitution de partie civile, c'est-à-dire que les parquets n'ont en ces occasions pris aucune initiative mais que c'est par le soin de quelques victimes et de leurs conseils que des dossiers ont été ouverts dans les cabinets d'instruction » 88 ( * ) .

Plusieurs raisons liées à la complexité et à la technicité de ce contentieux justifient ce choix en faveur de la spécialisation d'un petit nombre de juridictions :

- la caractérisation des infractions de droit commun d'atteintes à l'intégrité des personnes dans les procédures de santé publique nécessite une certaine connaissance et une bonne compréhension de la législation applicable aux produits de santé (sang, médicaments, dispositifs médicaux) ;

- la caractérisation des infractions connexes au droit pénal, prévues par exemple par le code de la santé publique, le code rural et le code de consommation exige une culture juridique particulière s'agissant à la fois de la qualification juridique des faits et de la connaissance du contexte économique ou sanitaire de chaque affaire ;

- certaines procédures liées à la santé publique, telles que l'affaire du sang contaminé ou celle de la maladie de « Creutzfeldt Jakob » 89 ( * ) , ont donné lieu à l'ouverture d'informations longues, ce qui est apparu difficilement compréhensible et admissible pour les victimes.

A l'époque, votre commission avait pleinement souscrit à cette démarche . Comme le soulignait notre excellent collègue M. Pierre Fauchon dans son avis présenté au nom de la commission des Lois en janvier 2002 : « pour certaines infractions complexes, il est indispensable en effet que des magistrats puissent acquérir une spécialisation poussée sans laquelle le travail d'investigation pourrait s'avérer vain », tandis qu'il relevait d'ailleurs que dans la « pratique aujourd'hui, les affaires pénales de santé publique de grande ampleur sont renvoyées au tribunal de grande instance de Paris » 90 ( * ) .

Des modalités de fonctionnement particulières mentionnées au I de l'article 706-2 du code de procédure pénale ont donc été instituées .

Après l'avoir dans un premier temps envisagé, le ministère de la justice n'a pas souhaité confier le soin de traiter les affaires de santé à une seule juridiction. Comme l'a indiqué en mars 2002 M. Dominique Perben, garde des Sceaux, en réponse à une question écrite de notre collègue M. Georges Gruillot : « la création d'une juridiction spécialisée pour Paris et la région parisienne va de soi, compte tenu de l'implantation de nombreux sièges sociaux de sociétés commerciales, industrielles ou pharmaceutiques, d'établissements publics et d'autorités administratives et sanitaires. Cependant, certains contentieux liés à des phénomènes de santé publique tels la listériose ou les trafics de produits dopants ou à la sécurité sanitaire en matière d'élevage, d'abattage ou de vente d'animaux ont tout autant vocation à être traités par des juridictions spécialisées interrégionales, par exemple dans l'ouest ou le sud de la France » 91 ( * ) .

Le champ territorial de compétence des pôles de santé s'étend donc à plusieurs ressorts de cour d'appel . Le décret n° 2002-599 du 22 avril 2002 fixant la liste et le ressort des tribunaux spécialisés en matière sanitaire a prévu la mise en place de deux pôles de santé à compétence interrégionale : l'un à Paris appelé à connaître des litiges répartis sur les trois-quarts de la France, l'autre à Marseille, compétent pour le sud du pays et la région Rhône-Alpes.

Le législateur n'a pas souhaité instituer un monopole au profit de ces juridictions spécialisées. Il a donc prévu, comme en matière économique et financière, une compétence concurrente de celle des juridictions de droit commun susceptibles d'être normalement saisies en application des règles posées par le code de procédure pénale.

Le champ matériel d'intervention des juridictions spécialisées s'étend à la poursuite, à l'instruction et, s'agissant des délits, au jugement dans les affaires d'une grande complexité relatives à certains produits de santé 92 ( * ) ou à un produit destiné à l'alimentation de l'homme ou de l'animal. Les infractions concernées sont :

- les atteintes à la personne humaine au sens du titre II du livre II du code pénal ;

- les infractions prévues par le code de santé publique, le code rural ou le code de la consommation.

A l'instar des pôles économiques et financiers, la loi du 4 mars 2002 précitée a doté les pôles de santé de moyens spécifiques en leur permettant de bénéficier du concours d' assistants spécialisés en matière sanitaire , recrutés parmi soit des fonctionnaires de catégorie A ou B relevant des ministères chargés de la santé, de la recherche et de l'agriculture, soit des personnes justifiant d'une qualification et d'une expérience précisées dans un décret (II de l'article 706-2 du code de procédure pénale). Le ministère de la justice a demandé à ses homologues chargés de la santé et de l'agriculture la mise à disposition de quatre fonctionnaires, de préférence issus du corps des pharmaciens ou médecins inspecteurs de la santé.

Le pôle de Paris bénéficie d'une situation privilégiée grâce au concours d'enquêteurs spécialisés (brigade des affaires sanitaires et des libertés publiques dépendant de la préfecture de police (BASLP) et cellule spécialisée à la section de recherches de la gendarmerie de Paris).

Article 8
(art. 706-2 du code de procédure pénale)
Règles relatives à l'organisation judiciaire en matière de santé publique- Extension des compétences des juridictions spécialisées -
Procédure de dessaisissement de la juridiction de droit commun
au profit de la juridiction spécialisée -
Renforcement du statut des assistants spécialisés

Le présent article, qui comprend trois paragraphes, a pour objet d'améliorer un dispositif entré en vigueur depuis à peine un an en vue d'en renforcer l'efficacité. Les modifications proposées constituent, pour l'essentiel, le décalque des adaptations prévues par l'article 7 du projet de loi précédemment analysé relatif aux infractions commises en matière économique et financière.

? Le paragraphe I , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des Lois, propose de modifier l'intitulé du titre XIII afin lui de donner une portée plus générale relative à « La procédure applicable aux infractions en matière sanitaire ». Il s'agit d'une modification de forme strictement analogue à celle précédemment évoquée s'agissant de l'organisation judiciaire spécialisée en matière économique et financière (voir supra article 7 du projet de loi) et destinée à tenir compte de l'extension à l'enquête des compétences des tribunaux spécialisés en matière économique et financière proposée au paragraphe II ci-après.

? Le paragraphe II 93 ( * ) propose de compléter les règles actuellement applicables aux juridictions spécialisées en matière de santé publique figurant à l'article 706-2 du code de procédure pénale en vue de les harmoniser avec les dispositions relatives à l'organisation judicaire spécialisée économique et financière .

Le 1° de ce paragraphe reprenant rigoureusement le 1° du paragraphe I de l'article 7 étend à l'enquête le champ des compétences dévolues aux juridictions spécialisées en matière de santé publique. L'analyse du présent article constitue une nouvelle occasion de réitérer les observations formulées précédemment relatives au nécessaire renforcement de la spécialisation et du nombre des officiers de police judiciaire.

Le 1° bis, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, propose d'inclure dans le champ des compétences des juridictions spécialisées les affaires d'une grande complexité liées à une substance réglementée en raison de ses effets ou de sa dangerosité et à laquelle l'homme est exposé durablement . Ainsi, les procédures relatives à la sécurité environnementale, notamment celles liées au plomb, à l'amiante, au mercure, aux substances radioactives ou encore à certains produits chimiques, pourraient relever des juridictions spécialisées interrégionales. Comme l'a fait valoir le rapporteur de l'Assemblée nationale M. Jean-Luc Warsmann, au cours de la séance publique du 22 mai dernier, « il s'agit en fait de parachever la réforme commencée en mars 2002 » 94 ( * ) .

Par coordination avec la modification proposée au 1° bis, le 1° ter du paragraphe I également inséré par les députés avec l'avis favorable du Gouvernement prévoit de faire référence aux infractions prévues par le code de l'environnement et par le code du travail, la mention du seul code de la santé publique prévue par le 1° bis étant insuffisante pour viser toutes les affaires relatives à la sécurité environnementale.

Le 2° du paragraphe I 95 ( * ) apporte deux modifications au I de l'article 706-2 du code de procédure pénale :

- l'une, de pure forme , tendant à remplacer les renvois aux règles de fonctionnement des juridictions spécialisées en matière économique et financière par une reproduction intégrale de leur contenu. Il s'agit du principe défini à l'avant-dernier alinéa de l'article 704 du code de procédure pénale selon lequel la compétence des juridictions s'étend aux infractions connexes, du renvoi de la liste et du ressort de ces tribunaux à un décret  mentionné au dernier alinéa de ce même article, ainsi que de la compétence concurrente entre les juridictions spécialisées et les juridictions de droit commun visée au premier alinéa de l'article 705 du même code ;

- l'autre, pour instituer une procédure de dessaisissement de la juridiction de droit commun au profit de la juridiction spécialisée strictement identique à la procédure instituée en matière économique et financière mentionnée au II de l'article 7 du projet de loi (articles 705-1 et 705-2 nouveaux du code de procédure pénale). Le présent article se contente d'ailleurs de renvoyer purement et simplement au dispositif applicable en matière économique et financière.

? Le paragraphe III 96 ( * ) tend à clarifier le statut des assistants spécialisés en matière de santé publique en l'alignant strictement sur le dispositif prévu pour les assistants spécialisés en matière économique et financière par le texte proposé par le III de l'article 7 du projet de loi pour l'article 706 du code de procédure pénale auquel, s'agissant des missions, il est renvoyé.

Les règles de recrutement demeureraient identiques à celles en vigueur, sous réserve d'une modification des conditions imposées aux personnes non fonctionnaires. Il est proposé d'imposer à ces candidats une condition de diplôme sanctionnant une formation d'une durée d'au moins quatre années et obtenu dans des matières strictement définies par décret, appelée à se substituer à l'exigence d'une qualification professionnelle définie par décret.

Comme pour les assistants spécialisés en matière économique et financière, votre commission vous soumet un amendement tendant à imposer aux assistants spécialisés en matière de santé publique l'obligation de suivre une formation obligatoire préalablement à leur entrée en fonction .

Tout en approuvant les avancées proposées par le projet de loi en faveur des pôles de santé, votre commission tient néanmoins à faire part de ses interrogations quant aux moyens effectifs susceptibles d'être mis à leur disposition par le ministère de la justice.

Les pôles de santé créés par la loi du 4 mars 2002 demeurent encore largement « théoriques ». Comme l'ont indiqué à votre rapporteur les magistrats du tribunal de grande instance de Marseille, « le pôle santé est pour l'instant resté lettre morte, faute de moyens ».

Selon les informations fournies à votre rapporteur, le ministère de la justice a décidé, en première étape, de donner priorité à la juridiction parisienne. Jusqu'à une période récente, le pôle de santé de Paris fonctionnait avec une seule magistrate spécialisée dans le traitement des affaires de santé publique, et actuellement chargée d'instruire une cinquantaine de dossiers. Une nouvelle division du parquet a été créée en septembre dernier (cinquième division). Scindée en deux sections -la section des affaires de santé économiques et sociales et la section des fraudes et moyens de paiement-, elle devrait comprendre six magistrats du parquet spécialisés dans ces affaires. En outre, quatre magistrats instructeurs spécialisés en affaires de santé devraient venir étoffer les effectifs. L'ensemble de ces magistrats sera installé à terme dans les locaux du pôle économique et financier.

Le ministère chargé de la santé a fait connaître son accord de principe à la mise à disposition d'un médecin inspecteur en chef de la santé publique pour exercer les fonctions d'assistant spécialisé. L'arrêté de nomination devrait être signé prochainement. De même, un ou deux inspecteurs vétérinaires de la santé publique devraient être mis à disposition par le ministère de l'agriculture. A la demande des ministères concernés, ces assistants spécialisés pourraient être placés en détachement à partir de l'année prochaine, le ministère de la justice ayant annoncé son intention de créer des emplois dédiés à ces fonctions dans le futur projet de loi de finances pour 2004.

Il n'est pas envisagé de créer d'autres pôles de santé dans l'immédiat, le ministère de la justice ayant souhaité évaluer l'importance du contentieux traité par les autres juridictions avant d'arrêter son choix.

Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve de l' amendement précédemment soumis, votre commission vous propose d'adopter l'article 8 ainsi modifié .

Division additionnelle après l'article 8
Création d'une section 2 bis relative aux infractions
en matière de terrorisme

Votre commission des Lois vous propose par un amendement de créer une division additionnelle après l'article 8 du projet de loi pour y insérer des dispositions relatives aux infractions en matière de terrorisme.

Article additionnel après l'article 8
Procédure de dessaisissement au profit de la juridiction parisienne spécialisée en matière terroriste

Votre commission des Lois vous propose d'insérer un article additionnel après l'article 8 du projet de loi tendant à renforcer l'efficacité de la procédure de dessaisissement de la juridiction d'origine au profit de la juridiction parisienne spécialisée en matière de terrorisme .

Rappelons brièvement que la loi du 9 septembre 1986 précitée a mis en place une centralisation des affaires relevant du terrorisme afin de lutter plus efficacement contre cette forme particulièrement violente de délinquance. Ce dispositif a été modifié à plusieurs reprises, en mars 1994 avec l'entrée en application du nouveau code pénal, en janvier 1995 pour allonger les délais de prescription de l'action publique et des peines, en juillet et en décembre 1996 respectivement pour étendre le champ des infractions et autoriser, sous certaines conditions, les perquisitions de nuit. Les modifications les plus récentes de ces règles remontent à la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne qui les a complétées 97 ( * ) .

S'inspirant largement des règles applicables en matière économique et financière, le législateur s'en est écarté sur un point en confiant à une juridiction spécialisée unique, la juridiction parisienne, le soin de traiter les affaires terroristes. Il existe donc deux sections spécialisées qui regroupent des magistrats spécialisés, l'une au sein du parquet (terrorisme et atteintes à la sûreté de l'Etat, section A 6) et l'autre du côté de l'instruction (quatrième section). En revanche le jugement de ces affaires, pour les délits, relève d'une juridiction de droit commun, pour les crimes, d'une cour d'assises composée uniquement de magistrats professionnels.

Cette compétence n'est toutefois pas exclusive, ce tribunal spécialisé s'étant vu attribuer une compétence concurrente de celle qui résulte des règles de droit commun (article 706-17 du code de procédure pénale). Une procédure de dessaisissement spécifique au profit de la juridiction spécialisée , quasiment analogue à celles instituées en matière de criminalité organisée, économique et financière, de santé publique et de pollution des navires, a été mise en place (articles 706-18 et 706-22 du code de procédure pénale). La seule différence avec les dispositifs proposés par le projet de loi réside dans la compétence exclusive de la chambre criminelle de la Cour de cassation pour connaître des appels formés à l'encontre des ordonnances rendues par le juge d'instruction.

A l'instar des observations formulées précédemment en matière de criminalité organisée et économique et financière, votre rapporteur relève quelques lacunes dans le dispositif existant en matière de terrorisme auxquelles il paraît opportun de remédier :

- d'une part, si une obligation d'informer les parties est prévue par la loi, aucune précision quant à l'autorité chargée d'informer les parties n'est apportée ;

- d'autre part, le dispositif n'envisage pas le cas d'une inertie du juge d'instruction qui refuserait de répondre à des réquisitions du parquet tendant à son dessaisissement au profit de la juridiction parisienne. Le ministère public n'aurait alors pas la possibilité de saisir la chambre criminelle de la Cour de cassation en application de l'article 702-22 et le dessaisissement ne pourrait avoir lieu.

Votre rapporteur vous propose un amendement pour préciser qu'il appartient au juge d'instruction d'informer les parties et pour obliger le juge d'instruction à répondre dans un délai d'un mois, en précisant qu'à défaut de réponse de sa part, la chambre criminelle de la Cour de cassation pourra être directement saisie par le ministère public pour ordonner, si elle l'estime opportun, le dessaisissement du magistrat instructeur.

Tel est l'objet de l'article additionnel que votre commission des Lois vous demande d'insérer par amendement .

SECTION 3
Dispositions relatives aux infractions
en matière de pollution des eaux maritimes par rejets des navires

Si l'attention des médias se focalise sur de grandes catastrophes comme les naufrages de l'Erika ou du Prestige, l'essentiel des pollutions d'origine maritime par hydrocarbures découle de déballastages, c'est-à-dire de rejets en mer provenant des machines et des espaces à cargaison. Contrairement aux marées noires, ces pollutions sont intentionnelles, et d'autant plus insidieuses qu'elles sont quotidiennes. En raison de sa géographie, la France assume une grande partie des risques de transit pour l'Europe. On estime ainsi à près de 2 millions de tonnes les hydrocarbures ainsi déversés chaque année et à l'équivalent d'un Erika par semaine les rejets effectués en Méditerranée.

Si les rejets sont déjà soumis à une réglementation très stricte, tant internationale qu'interne, les comportements n'ont pas pour autant évolué car la probabilité d'être poursuivi et les sanctions effectivement prononcées restent faibles.

1. Une réglementation complexe

La convention internationale de Londres du 2 novembre 1973 pour la prévention de la pollution par les navires, modifiée par un protocole de 1978, dite MARPOL 73/78 et entrée en vigueur en 1982, réglemente rigoureusement les rejets d'hydrocarbures, interdits dans certaines zones comme la Méditerranée et soumis à des conditions très strictes ailleurs (selon la zone dans laquelle s'effectue le rejet, sa teneur en hydrocarbures et la nature des navires). Elle comporte en outre des prescriptions techniques relatives à la construction et à l'exploitation des pétroliers, comme la présence d'équipements techniques destinés à prévenir la pollution.

L'article 4 de cette convention prévoit que « les sanctions doivent être, par leur rigueur, de nature à décourager les contrevenants éventuels, et d'une sévérité égale quel que soit l'endroit où l'infraction a été commise » .

Au plan interne, la répression des infractions à cette convention était prévue par la loi n° 83-583 du 5 juillet 1983 , codifiée par une ordonnance de septembre 2000 dans le code de l'environnement. Ses dispositions étant d'ordre pénal, la souscription d'une assurance, s'agissant de fautes intentionnelles, est exclue 98 ( * ) .

Posant le principe de la responsabilité du capitaine du navire ayant déballasté, elle prévoyait des peines non négligeables, variables en fonction de la taille du navire, et aggravées par la loi du 3 mai 2001 .

Le propriétaire ou l'exploitant du navire ayant donné l'ordre de commettre l'infraction encourt les mêmes peines que le capitaine, même s'il est difficile d'en apporter la preuve. Le tribunal peut également décider de mettre à la charge de l'armateur le paiement des amendes prononcées à l'encontre du capitaine, mais ces mécanismes de mise en cause de la responsabilité de l'armateur sont peu utilisés par les juridictions.

2. Une situation encore difficile

a) Des problèmes juridiques liées à l'insuffisance du droit de la mer

La convention des Nations-Unies dite de Montego Bay de 1982 sur le droit de la mer distingue :

- les eaux territoriales , jusqu'à 12 milles marins à partir des côtes (soit 22,2 kilomètres), sur lesquelles s'exerce pleinement la souveraineté de l'Etat côtier, les navires de commerce bénéficiant du principe de libre circulation ;

- la zone économique exclusive (ZEE), d'une largeur maximale de 188 milles marins à partir de la limite externe des eaux territoriales (soit 348 kilomètres), où l'Etat côtier jouit de droits souverains sur les ressources vivantes et minérales des eaux, du sol et du sous-sol et dispose de droits de juridiction dans le domaine de la pollution des mers, la navigation maritime y étant libre ;

- la haute mer , où s'exerce la seule loi du pavillon.

S'agissant des navires étrangers , les infractions commises en haute mer ne peuvent donc être sanctionnées que par l'État du pavillon , mais on se heurte souvent à l'indifférence des États délivrant des pavillons de complaisance 99 ( * ) . Suivant l'exemple des États-Unis, la France pourrait chercher à conclure des accords bilatéraux afin de poursuivre les navires étrangers en haute mer, notamment s'agissant de Chypre et de Malte, importants pavillons de complaisance et candidats à l'adhésion à l'Union européenne.

Dans la zone économique exclusive , les navires étrangers sont passibles des seules sanctions pécuniaires , en vertu de l'article 230 de la convention de Montego Bay 100 ( * ) repris à l'article L. 218-21 du code de l'environnement. Des peines d'emprisonnement ne sont possibles concernant des infractions commises dans les eaux territoriales que s'il s'agit d'un acte de pollution délibéré et grave.

b) Des difficultés persistantes

- La disponibilité des installations portuaires apparaît comme une condition essentielle de l'effectivité de la réglementation concernant les rejets. Conformément à la directive communautaire du 7 septembre 2000 imposant notamment la réalisation d'installations de réception des déchets d'exploitation des navires et des résidus de cargaison dans tous les ports de l'Union européenne, la loi n° 2001-43 du 16 janvier 2001 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports a prévu que les navires faisant escale dans un port maritime français devront déballaster dans les stations portuaires et qu'il pourra être interdit aux bateaux ne justifiant pas avoir effectué cette opération de quitter le port.

De plus, les nouvelles normes de construction des navires, prévoyant des systèmes de séparateurs d'eau et d'hydrocarbures, de filtrage, de citernes à ballast séparé et d'incinérateurs à bord, devraient réduire considérablement les besoins en installations de réception à moyen terme.

- Les navires responsables demeurent difficiles à identifier. Si depuis 1996, et suivant une recommandation de 1983 de l'Organisation maritime internationale, les photographies aériennes effectuées par la douane ou la Marine nationale suffisent généralement pour prouver le flagrant délit devant les juridictions, les déballastages s'effectuent surtout la nuit, et dans le sillage d'autres navires 101 ( * ) . L'analyse de prélèvements s'avère alors nécessaire.

- Par ailleurs, les effectifs d'inspecteurs des affaires maritimes ont diminué depuis 1980, alors même que le trafic de marchandises dangereuses a doublé, et ce malgré les mesures annoncées au comité interministériel de la mer de Nantes du 28 février 2000 ayant érigé la lutte contre les déballastages sauvages en priorité, ce métier demeurant peu attractif.

Moins de 10 % des rejets volontaires signalés aboutissent donc à des procédures judiciaires transmises au parquet.

- En outre, l'insuffisance des sanctions effectivement prononcées par rapport au coût d'une vidange dans les installations portuaires 102 ( * ) décrédibilise le dispositif. Les peines prononcées sont peu sévères (250.000 francs d'amende en moyenne avant la loi de 2001), les peines de prison, même prononcées avec sursis, demeurant exceptionnelles. Or, le seuil de dissuasion des amendes doit prendre en compte, outre le coût d'utilisation des installations, le coût de l'immobilisation d'un navire dans un port en termes de pertes d'exploitation, ainsi que le pourcentage de poursuites (moins de 10 % des infractions constatées) et le montant des amendes effectivement prononcées.

L'exemple de l'Oil Pollution Act adopté en 1990 aux Etats-Unis à la suite du naufrage en Alaska de l'Exxon Valdez montre qu'un durcissement de l'arsenal des sanctions à l'encontre des rejets tant volontaires qu'accidentels d'hydrocarbures peut prévenir les déballastages. Les sanctions prononcées 103 ( * ) ont permis de réduire de 50 % la pollution par hydrocarbures entre 1994 et 1997.

- Or si les navires étrangers sont passibles des seules amendes pécuniaires, le recouvrement des amendes demeure rare, seul Monaco ayant une convention avec la France traitant de cette question.

Plus qu'un problème de coût ou de disponibilité des installations, c'est donc davantage la faible probabilité d'être identifié et moins encore condamné qui est à l'origine du maintien à un niveau insupportable du nombre de pollutions intentionnelles.

c) Des initiatives européennes prometteuses

Sept pays ont signé le 16 novembre 1998 la convention du Conseil de l'Europe sur la protection de l'environnement par le droit pénal , premier traité international criminalisant les actes portant atteinte, ou risquant de porter atteinte, à l'environnement. Si son article 6 indique que les pays signataires doivent prévoir non seulement des sanctions pécuniaires, mais également des peines d'emprisonnement, ce texte ne vise pas spécifiquement la pollution maritime et n'instaure aucun organisme de contrôle.

Les naufrages de l'Erika le 12 décembre 1999 puis du Prestige le 19 novembre 2002 ont renforcé l'implication de l'Union européenne en matière de protection contre les pollutions, notamment par hydrocarbures.

A la suite des recommandations du Conseil européen de Tampere des 15 et 16 octobre 1999 en faveur de l'adoption de définitions, incriminations et sanctions communes portant notamment sur la criminalité au détriment de l'environnement, le Parlement européen a donné le 7 juillet 2000 un avis favorable à l'initiative danoise visant à instaurer une coopération policière et judiciaire pour lutter contre les infractions graves au détriment de l'environnement.

En outre, le « paquet Erika I » , adopté en décembre 2000 dans le cadre de l'Union européenne, et entré en vigueur en juin 2002 tend à :

- interdire les pétroliers à simple coque au plus tard en 2015 ;

- améliorer le contrôle des activités des sociétés de classification, en introduisant notamment la suspension d'agrément communautaire pour un an, voire à titre définitif, l'exigence préalable de bonne performance de sécurité et de prévention des pollutions avant l'octroi de l'agrément communautaire, des critères de qualité plus stricts ;

- renforcer les contrôles dans les ports, le bannissement et le refus d'accès aux ports de l'Union européenne pour les bâtiments immobilisés à plusieurs reprises pour leur mauvais état et battant pavillon de complaisance, sur la base d'une liste noire publiée par la Commission européenne ;

- prévoir l'inspection annuelle renforcée des navires à risques.

Par ailleurs, le Conseil des ministres européens des transports du 27 mars 2003 a adopté une modification du règlement 417/2002, entrée en vigueur à l'été 2003, afin d'accélérer l'entrée en service des pétroliers à double coque, d'exiger que certains produits pétroliers soient transportés dans des pétroliers à double coque et de renforcer les contrôles de la structure des pétroliers. Son extension à l'échelle mondiale a été demandée à l'Organisation maritime internationale (OMI).

Le « paquet Erika II » , adopté en mars 2002 et qui devrait prochainement entrer en vigueur prévoit :

- l'amélioration du signalement et du suivi du navire avec notamment la présence de boîtes noires similaires à celles prévues dans les avions et de systèmes d'identification automatiques (transpondeurs) permettant respectivement de déterminer les responsabilités en cas de déballastages et de suivre les navires en continu. Ces dispositifs sont également à l'étude à l'OMI ;

- la révision des régimes de responsabilité et de compensation des dommages de pollution en vigueur par la création d'un fonds de compensation des dommages de pollution complétant à concurrence d'un plafond global de 2 milliards d'euros l'indemnisation des victimes en cas de dépassement des plafonds fixés actuellement à 200 millions d'euros ;

- la mise en place d'une agence européenne de sécurité maritime .

A la suite du Conseil « Justice et affaires intérieures » du 19 décembre 2002 appelant à « renforcer la protection de l'environnement, en particulier les mers, au moyen du droit pénal », la Commission européenne a adopté le 5 mars 2003 une proposition de directive prévoyant des sanctions pénales incluant des peines de prison pour les responsables d'une pollution maritime, tant dans les eaux territoriales de l'Union qu'en haute mer. Ces sanctions pourraient s'appliquer à la société de classification et à toute personne, y compris le capitaine, le propriétaire, l'exploitant et l'affréteur d'un navire, reconnue coupable d'avoir causé ou contribué à causer une pollution, intentionnellement ou par négligence grave .

Par ailleurs, diverses initiatives nationales doivent être soulignées. A la suite du naufrage du Prestige, la France, l'Espagne et le Portugal ont mis en oeuvre dans leur zone économique exclusive des mesures de recherche, d'identification et de contrôle (par radio, voire par hélitreuillage à bord d'une équipe d'évaluation) des pétroliers à simple coque de plus de quinze ans transportant certains produits pétroliers particulièrement polluants.

La France, l'Espagne, la Belgique, le Portugal, le Royaume-Uni et l'Irlande ont présenté à l'OMI le projet de faire de certains espaces maritimes (allant du nord de la Grande-Bretagne au sud du Portugal et couvrant la Manche) une zone maritime particulièrement vulnérable , en application de l'article 211-6 de la convention sur le droit de la mer.

La France a par ailleurs renforcé les contrôles au port de certains types de navires à risques, dont les pétroliers à simple coque de plus de quinze ans et collabore au développement du système européen de suivi du trafic maritime (projet Safeseanet de la Commission européenne, projet Trafic 2000 français), tout en engageant le renouvellement des radars de surveillance du trafic. Elle s'apprête enfin à installer des stations AIS (identification automatique des navires par radio) sur ses côtes métropolitaines.

L'adhésion de la France au protocole de 1996 à la convention de 1976 sur la limitation de responsabilité en matière de créances maritimes et à la convention de 2001 sur les dommages créés par les soutes de navires est également prévue.

L'amélioration de l'indemnisation des dommages à travers un troisième niveau du Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL) ou un fonds européen est en cours. Le FIPOL portera à environ un milliard d'euros le montant indemnisable à partir de 2004 (contre 171 millions d'euros actuellement).

Un protocole devrait être ouvert à la ratification en juillet et sans doute applicable au premier trimestre de l'année 2004. Il ne sera pas rétroactif 104 ( * ) .

Le présent projet de loi s'inscrit donc dans ce cadre international, ce qui réduit la marge de manoeuvre du législateur, dont l'efficacité de l'action est de plus subordonnée aux moyens de surveillance, de contrôle et de dissuasion disponibles.

Pour la troisième fois en deux ans , il modifie le cadre juridique de la répression de la pollution maritime par les rejets des navires.

Rappelons que déjà la loi du 3 mai 2001 avait renforcé les sanctions applicables et prévu des règles dérogatoires, précisées par la récente loi du 15 avril 2003 permettant la création d'une zone de protection écologique en Méditerranée.

Article 9
(art. 706-102, 706-103, 706-104, 706-105 et 706-106 nouveaux
du code de procédure pénale)
De la procédure applicable en cas de pollution
des eaux maritimes par rejets des navires

L'article 9 du projet de loi tend à créer un nouveau titre dans le livre quatrième du code de procédure pénale relatif aux procédures particulières. Ce titre XXVI, intitulé « De la procédure applicable en cas de pollution des eaux maritimes par rejets des navires » s'insèrerait après le nouveau titre XXV traitant de la procédure applicable à la criminalité organisée, créé par l'article 1 er du projet de loi.

L'insertion -novatrice, les deux révisions récentes des règles de compétence juridictionnelle applicables en matière de pollution maritime ayant seulement été insérées dans le code de l'environnement- de règles de droit pénal spécial de l'environnement dans le code de procédure pénale doit permettre de rationaliser et clarifier les procédures particulières.

Ce nouveau titre comprendrait cinq articles et modifierait les règles relatives à la compétence juridictionnelle en matière de pollution maritime tout en aggravant les peines actuellement prévues.

Article 706-102 du code de procédure pénale
Compétence des juridictions spécialisées
en matière de pollution maritime

Les règles de compétence des juridictions spécialisées en matière de pollution maritime ont récemment fait l'objet de deux réformes successives.

Avant la loi du 3 mai 2001, l'article 12 de la loi du 5 juillet 1983, codifié depuis une ordonnance du 18 septembre 2000 aux articles L. 218-28 et L. 218-29 du code de l'environnement, prévoyait trois critères de compétence juridictionnelle alternatifs, de nature géographique :

- soit le tribunal compétent du lieu de l'infraction ;

- soit celui dans le ressort duquel le bâtiment est attaché en douanes ou immatriculé s'il est français ;

- soit celui dans le ressort duquel peut être trouvé le bâtiment s'il est étranger.

S'agissant de la ZEE et des eaux internationales (en ce qui concerne les navires français exclusivement), était compétent le tribunal de grande instance de Paris. En vertu de cette disposition, l'affaire de l'Erika est donc instruite et jugée par ce tribunal.

L'éclatement des juridictions saisies, conjugué à la relative faiblesse du nombre des poursuites judiciaires (27 procédures judiciaires transmises au parquet en 1999), rend aléatoire la condamnation effective des responsables de pollutions volontaires, nuit à l'unité de la jurisprudence et ne permet pas de développer de réels pôles de compétences ni de sensibiliser les magistrats.

Des problèmes de recevabilité de preuves (en l'espèce très souvent des photographies prises lors d'observations aériennes par des agents des douanes ou par la Marine nationale) ont ainsi pu se poser, du fait du manque d'expérience de certains magistrats. De plus, les peines prononcées ne sont pas sévères. Des séminaires de sensibilisation ont été organisés pour certains magistrats dans le cadre des accords de Bonn.

1. La loi du 3 mai 2001

La loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants par les navires a prévu la création des tribunaux du littoral maritime spécialisés , éventuellement compétents sur les ressorts de plusieurs cours d'appel. Le décret n° 2002-196 du 11 février 2002 relatif aux juridictions compétentes en matière de pollution des eaux de mer par rejets des navires a ainsi créé six tribunaux au ressort identique à celui des préfectures maritimes et aux compétences spécifiques, dont trois en métropole 105 ( * ) , au Havre pour la zone de la Manche 106 ( * ) , à Brest pour la zone de l'Atlantique 107 ( * ) et à Marseille pour la zone de la Méditerranée 108 ( * ) .

L'article 6 de cette loi leur attribue une compétence exclusive pour le jugement des infractions intervenues dans les eaux territoriales (paragraphe I de l'article L. 218-29 du code de l'environnement).

Dès lors que ces infractions sont commises par tout navire en ZEE française ou par un navire français en haute mer , le tribunal de grande instance de Paris a une compétence exclusive en matière de jugement.

En revanche, les tribunaux territorialement compétents, le tribunal de grande instance de Paris, ainsi que les tribunaux désignés par une liste fixée par décret exercent une compétence concurrente s'agissant de la poursuite et de l'instruction .

Il s'agissait d'éviter qu'une compétence exclusive n'entraîne des nullités, dans le cas où le tribunal du lieu de l'infraction, s'étant indûment saisi, ne renverrait pas le dossier à la juridiction compétente. La compétence ne devenait donc exclusive qu'au stade du jugement, une circulaire ministérielle devant enjoindre aux ministères publics des juridictions territorialement compétentes de transmettre les poursuites à la juridiction ayant la compétence de jugement exclusive (c'est-à-dire le tribunal de grande instance de Paris s'agissant de la zone économique exclusive et de la haute mer ou l'une des juridictions déterminées par décret s'agissant des eaux territoriales).

2. La loi du 15 avril 2003 : l'extension du champ de compétences des tribunaux spécialisés en matière de pollution maritime

Une nouvelle modification des règles de compétence juridictionnelle prévues à l'article L. 218-29 du code de l'environnement est intervenue à l'occasion de l'examen de la loi n° 2003-346 du 15 avril 2003 relative à la création -en Méditerranée- d'une zone de protection écologique (ZPE) au large des côtes du territoire de la République.

La loi confie une compétence exclusive de jugement aux tribunaux spécialisés pour les infractions de pollution maritime commises, non seulement dans les eaux territoriales, mais aussi dans la zone de protection écologique ainsi que dans la zone économique exclusive, le tribunal de grande instance de Paris n'exerçant plus qu'une compétence exclusive de poursuite, d'instruction et de jugement sur les navires français coupables de pollution maritime en haute mer.

Il s'agit là d'un dessaisissement conséquent du TGI de Paris, la majeure partie des déballastages ou des dégazages et la quasi totalité des naufrages entraînant des pollutions se déroulant en ZEE.

Déjà, en 2000, les conclusions de la commission de la Production de l'Assemblée nationale sur la proposition de loi de M. Gilbert Le Bris ayant abouti à la loi de 2001 précitée prévoyaient de confier aux tribunaux spécialisés prévus la compétence exclusive de jugement des plaintes relatives aux dégazages et déballastages illicites. Néanmoins, lors de la discussion à l'Assemblée nationale en première lecture, un amendement présenté par M. Jean-Pierre Dufau avait été adopté, maintenant la compétence du tribunal de grande instance de Paris.

3. Le projet de loi

L'article 9 du projet de loi, outre qu'il tend à introduire dans le code de procédure pénale les dispositions sur les tribunaux spécialisés du littoral maritime prévues par la loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 ayant modifié l'article L. 218-29 du code de l'environnement, tend à modifier également les règles régissant la compétence de ces juridictions.

Comme les articles 704 (en matière économique et financière), 706-2 (en matière de santé publique) et 706-75 (en matière de criminalité organisée), le texte proposé pour l'article 706-102 vise à confier au pouvoir réglementaire la possibilité d'étendre la compétence d'un tribunal de grande instance au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel pour connaître des infractions de pollution maritime commises dans les eaux territoriales, les eaux intérieures, les voies navigables et la zone économique exclusive.

L'existence de ces juridictions, créées par un décret de février 2002 pris en application de l'article L. 218-29 du code de l'environnement modifié par la loi du 3 mars 2001, serait donc consacrée dans le code de procédure pénale.

Le premier alinéa du texte proposé par l'article 706-12 nouveau consacre de plus le principe de l'extension de la compétence d'un tribunal de grande instance au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel, tandis que le deuxième alinéa précise que cette compétence s'étend aux infractions connexes et que le troisième renvoie au décret pour fixer la liste et le ressort de ces juridictions, dont il est précisé qu'elles comprennent une section du parquet et des formations d'instruction et de jugement spécialisées.

En outre, le texte proposé pour l'article 706-102 nouveau harmonise les dispositions du code de l'environnement avec les dispositions similaires du code de procédure pénale en indiquant, à l'instar de ce qui est prévu pour les juridictions économiques et financières et de santé publique, que la compétence de ces juridictions s'étend à l'enquête sur les délits dont elles ont à connaître, outre la poursuite, l'instruction, et le jugement.

De plus, le champ de ces infractions serait étendu à l'ensemble des infractions en matière de pollution des eaux marines et des voies ouvertes à la navigation maritime prévues et réprimées par le chapitre VIIII du titre I du livre 2 du code de l'environnement. Au-delà des seuls rejets polluants des navires, accidentels ou volontaires, les juridictions spécialisées en matière de pollution maritime auraient également à connaître de la pollution due aux opérations d'exploration ou d'exploitation du fond de la mer ou de son sous-sol et de la pollution par les opérations d'immersion ou d'incinération.

4. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Tout d'abord, afin de prendre en compte la récente loi du 15 avril 2003 précitée, l'Assemblée nationale a précisé que les tribunaux de grande instance spécialisés prévus par la loi du 3 mai 2001 seraient compétents également pour les infractions commises dans la zone de protection écologique.

Plus fondamentalement, l'Assemblée nationale a profondément remanié le dispositif, en y apportant une certaine complexité.

Revenant sur la loi du 15 avril 2003 retirant au TGI de Paris la compétence sur les affaires de pollution intervenues dans la ZEE, soit 75 % des faits de pollution et la quasi-totalité des grandes marées noires, pour la confier aux six tribunaux spécialisés des façades maritimes, elle a considéré que ces tribunaux ne disposaient pas actuellement des moyens de traiter de manière satisfaisante ces affaires, qui constituent avant tout des affaires financières, comme l'a d'ailleurs rappelé le chef de l'Etat le 29 janvier dernier lors des Assises de l'environnement à Nantes : « La France et l'Europe ne laisseront pas des hommes d'affaires véreux, des voyous des mers profiter cyniquement du manque de transparence du système actuel. »

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, s'est ainsi félicité de l'instruction de l'Erika, soulignant la synergie positive due à la double spécialisation du TGI de Paris en matière d'environnement d'une part, d'affaires économiques et financières d'autre part, très précieuse pour analyser des montages financiers internationaux particulièrement complexes 109 ( * ) .

De plus, peu de juridictions peuvent faire face en termes d'effectifs à de tels dossiers de marées noires, comme le montre la situation du tribunal de Brest, compétent pour l'affaire du Prestige intervenue dans les eaux territoriales, même si les informations fournies à votre rapporteur par le ministère de la justice indiquent qu'elle entend pourvoir l'ensemble des postes affectés aux juridictions de Marseille, du Havre, de Brest afin qu'elles aient les moyens de traiter efficacement ce contentieux et que tous les postes de magistrats au TGI de Brest seront pourvus, deux postes de greffiers ayant été créés et la juridiction dotée en moyens informatiques spéciaux (notamment l'information assistée par ordinateur).

L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, deux amendements tendant à préciser que :

- le TGI de Paris serait compétent s'agissant de l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des accidents 110 ( * ) intervenus dans la zone économique exclusive ou dans la zone de protection écologique ;

- les tribunaux spécialisés demeureraient compétents pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et, s'agissant de délits , le jugement des infractions de pollution maritime intervenues dans les eaux territoriales, dans la zone exclusive ou dans la zone de protection écologique (mis à part les accidents intervenus dans la ZEE ou la ZPE) ;

- s'agissant d'affaires qui seraient ou apparaîtraient d'une grande complexité, même intervenues dans les eaux territoriales , le juge d'instruction du TGI spécialisé pourrait être requis de se dessaisir au profit du TGI de Paris, qu'il s'agisse d'infractions volontaires ou non, dans les conditions et selon les modalités prévues par les nouveaux articles 706-105 et 706-106 du code de procédure pénale, que le présent projet de loi tend à créer.

Ainsi que l'a indiqué lors du débat à l'Assemblée nationale le garde des Sceaux, ces affaires revêtent pratiquement toutes une dimension internationale et la coopération judiciaire internationale requiert l'instauration de liens privilégiés avec nos partenaires étrangers. La centralisation à Paris des affaires complexes devrait faciliter la mise en oeuvre de cette coopération internationale.

Article 706-103 du code de procédure pénale
Compétence du tribunal de grande instance de Paris
en matière de pollution maritime

Le texte proposé pour l'article 706-103 nouveau du code de procédure pénale prévoit une compétence exclusive du TGI de Paris pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions visées à l'article précédent, lorsqu'elles sont commises dans les eaux internationales par un navire français. En effet, en vertu du droit international public maritime, la loi de l'Etat du pavillon s'applique dans les eaux internationales.

Contrairement au droit existant, qui ne consacre la compétence exclusive du TGI de Paris qu'en matière de jugement, le projet de loi prévoit d'étendre la compétence exclusive du TGI de Paris à l'enquête, la poursuite et l'instruction, estimant inutile l'instauration d'une compétence concurrente s'agissant d'infractions impliquant des bâtiments français, donc aisés à identifier.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de coordination avec les modifications apportées à l'article 706-102 par le rapporteur, M. Jean-Luc Warsmann, avec l'avis favorable du Gouvernement, prévoyant que le tribunal de grande instance de Paris serait également compétent pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement de l'infraction visée à l'article L. 218-22 du code de l'environnement, c'est-à-dire les accidents de mer, lorsque ces infractions sont commises dans la ZEE ou la ZPE.

Article 706-104 du code de procédure pénale
Compétence concurrente des juridictions spécialisées
en matière de pollution maritime

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 706-14 remplace la compétence exclusive des juridictions spécialisées du littoral ou de Paris en matière de jugement par une compétence concurrente à tous les stades de la procédure, conformément aux règles de fonctionnement des autres tribunaux spécialisés.

Sont donc reprises ici les règles de compétence de droit commun définies aux articles 43, 52 et 382 du code de procédure pénale, qui prévoient la compétence, respectivement, du procureur de la République, du juge d'instruction et du tribunal correctionnel du lieu de l'infraction, de la résidence de l'une des personnes soupçonnées ou du lieu de leur arrestation, tandis que le deuxième alinéa de l'article 663 prévoit la compétence du procureur de la République, du juge d'instruction et du tribunal du lieu de détention d'une personne condamnée, l'article 706-42 prévoyant, s'agissant de personnes morales, la compétence du procureur de la République et de la juridiction du lieu de l'infraction ou du siège de la personne morale.

Cependant, il prévoit des critères de compétence territoriale complémentaires liés aux spécificités de l'environnement maritime, en réintroduisant des critères prévus à l'article 12 de la loi du 5 juillet 1983 précitée. Ainsi, le projet de loi prévoit que les tribunaux spécialisés en matière de pollution maritime exerceraient également une compétence concurrente de celle résultant des critères du lieu d'immatriculation ou du lieu de rattachement en douanes du navire, de l'engin ou de la plate-forme d'une part, et du lieu où le bâtiment peut être trouvé d'autre part.

Si la multiplicité des critères de compétence peut générer une certaine complexité et ralentir la procédure, elle vise avant tout à prévenir le risque de conflits de compétence négatifs et éviter les causes de nullité de procédure. Elle doit en outre permettre de prévenir la surcharge d'une juridiction maritime spécialisée.

Le dernier alinéa reprend les dispositions déjà étudiées à l'article 705 du code de procédure pénale applicables aux juridictions économiques et financières ainsi qu'aux juridictions compétentes en matière de santé et créées, pour les juridictions spécialisées en matière de criminalité organisée, par l'article 706-76 nouveau. Il prévoit qu'une fois saisie, la juridiction spécialisée demeurerait compétente quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l'affaire, mais que si les faits constituaient une contravention, le juge d'instruction devait prononcer le renvoi devant le tribunal de police compétent.

Articles 706-105 et 706-106 du code de procédure pénale
Procédure de dessaisissement du juge non spécialisé au profit
des juridictions spécialisées en matière de pollution maritime

La procédure de dessaisissement prévue par les textes proposés par les articles 706-105 et 706-106 nouveaux du code de procédure pénale constitue la reprise des dispositions des articles 705-1 et 705-2 relatifs aux juridictions compétentes en matière économique et financière, 706-2 relatif à la santé publique, et 706-77 nouveau, relatif à la criminalité organisée.

Le premier alinéa du texte proposé par l' article 706-15 prévoit que le procureur de la République près un tribunal de grande instance non spécialisé pourrait, pour les infractions relatives à la pollution des mers, requérir le juge d'instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction compétente. Les parties seraient préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations, l'ordonnance étant rendue huit jours au plus tôt après cet avis.

Conformément aux décisions qu'elle a prises à propos des juridictions spécialisées en matière de criminalité organisée et en matière économique et financière, votre commission des Lois vous propose d'adopter trois amendements tendant à :

- obliger le juge d'instruction à répondre dans un délai d'un mois aux réquisitions du parquet tendant à son dessaisissement, la chambre de l'instruction pouvant, à défaut de réponse, être directement saisie par le ministère public pour ordonner si elle l'estime opportun le dessaisissement du magistrat instructeur ;

- préciser que c'est le juge d'instruction qui informerait les parties et les invite à faire connaître leurs observations avant de rendre son ordonnance ;

- assurer une cohérence rédactionnelle.

Le deuxième alinéa prévoit que si le juge décidait de se dessaisir, son ordonnance ne prendrait effet qu'à compter d'un délai de cinq jours. En cas de recours, le juge d'instruction demeurerait saisi jusqu'à ce que soit porté à sa connaissance l'arrêt de la chambre de l'instruction passé en force jugée ou celui de la chambre criminelle de la Cour de cassation. Dès lors que l'ordonnance serait passée en force de chose jugée, le procureur de la République adresserait le dossier de la procédure au procureur de la République près le tribunal compétent, ceci étant également applicable devant la chambre de l'instruction.

Le premier alinéa du texte proposé pour l' article 706-106 nouveau prévoit pour sa part que l'ordonnance pourrait, à l'exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, soit à la chambre de l'instruction si la juridiction devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel soit, dans le cas contraire, à la chambre criminelle de la Cour de cassation.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement précisé que la juridiction devant laquelle le dessaisissement était ordonné ou refusé était la juridiction spécialisée. Il s'agit en fait de la juridiction au profit de laquelle le dessaisissement est requis. Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement de clarification tendant à préciser que le dessaisissement interviendrait au profit de la juridiction spécialisée et que la chambre de l'instruction serait saisie lorsque les ressorts de la juridiction spécialisée et de la juridiction de droit commun se recoupent au niveau de la même cour d'appel, comme précédemment s'agissant des juridictions spécialisées en matière économique et financière et en matière de santé.

Les deuxième et troisième alinéas du texte proposé pour l'article 706-106 nouveau prévoient en outre que l'arrêt de la chambre de l'instruction ou de la chambre criminelle serait porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'à celle du ministère public et notifié aux parties.

Par ailleurs, L'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement introduisant un second paragraphe préservant, pour le traitement des procédures en cours, la compétence des juridictions saisies avant la promulgation de la loi du 15 avril 2003 relative à la création d'une zone de protection écologique au large des côtes. Ceci vise notamment à permettre au tribunal de grande instance de Paris de mener à son terme l'affaire de l'Erika. Rappelons en effet qu'en vertu de cette loi récente, les infractions commises dans la zone économique exclusive ne sont plus du ressort du tribunal de grande instance de Paris. Il paraît en effet préférable d'apporter cette précision, afin d'éviter de fragiliser la procédure en cours.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 9 ainsi modifié .

Article 10
(art. L. 218-10, L. 218-22, L. 218-24, L. 218-25
et L. 218-29 du code de l'environnement)
Aggravation de la répression des infractions
en matière de pollution maritime

L'article 10 du projet de loi tend à modifier le code de l'environnement , où sont actuellement prévues les dispositions relatives à la répression de la pollution de la mer et aux tribunaux spécialisés du littoral maritime, pour y intégrer les modifications introduites dans le code de procédure pénale relatives aux règles de procédure applicables aux infractions en matière de pollution maritime.

De plus, à l'instar de ce qui avait été fait par la loi du 3 mai 2001 précitée, il vise à aggraver encore les sanctions prévues.

Le 1° a pour objet d'insérer dans le code de l'environnement un paragraphe 1 intitulé « Incriminations et peines » regroupant les actuels articles L. 218-10 à L. 218-25 ainsi qu'un paragraphe 2 intitulé « Procédure » incluant les articles L. 218-26 à L.218-31.

Le 7° vise à reprendre à l'article L. 218-19 du code de l'environnement les articles 706-102 à 706-106 nouveaux du code de procédure pénale relatifs à la compétence juridictionnelle en matière de répression de la pollution maritime précédemment étudiés à l'article 9 du projet de loi, selon la technique du « code pilote » et du « code suiveur ».

Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement de coordination des modifications proposées à l'article 9.

En outre, les 2° à 4° tendent à aggraver la répression des infractions en matière de pollution maritime en augmentant le quantum des peines d'une part, en introduisant des peines complémentaires d'autre part. Rappelons que la loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants des navires a déjà procédé à un durcissement des sanctions. Le présent projet de loi prévoit de :

- durcir les sanctions à l'encontre des capitaines de navires de gros tonnage (navires d'une jauge supérieure à 150 tonneaux pour les navires citernes et à 500 tonneaux pour les autres navires) coupables d'infractions aux dispositions internationales relatives aux rejets d'hydrocarbures en mer. Il est prévu dix ans d'emprisonnement, au lieu de quatre, et un million d'euros d'amende, au lieu de 600.000, ou bien une amende équivalente aux deux tiers de la valeur de la cargaison transportée ou du fret (2° modifiant l'article L. 218-10 du code de l'environnement). Avant la loi de 2001, cette infraction n'était passible que de deux ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende ;

- durcir les sanctions à l'encontre des capitaines des navires de faible tonnage (navires d'une jauge inférieure à 150 tonneaux pour les navires citernes et à 500 tonneaux pour les autres navires) coupables d'infractions aux dispositions internationales sur les rejets d'hydrocarbures en mer. Il est prévu cinq ans d'emprisonnement, au lieu de deux, et 500.000 euros d'amende, au lieu de 180.000 (3° modifiant l'article L. 218-11 du code de l'environnement). Avant la loi de 2001, cette infraction n'était passible que d'un an d'emprisonnement et de 22.500 euros d'amende ;

- durcir les sanctions à l'encontre des personnes responsables d'un accident de mer tel que défini par la convention du 29 novembre 1969 sur l'intervention en haute mer, par imprudence, négligence ou inobservation des lois et règlements. Il est prévu cinq ans d'emprisonnement, au lieu de deux, et 500.000 euros d'amende, au lieu de 300.000, lorsque l'infraction est commise par un navire de gros tonnage ; trois ans d'emprisonnement, au lieu d'un, et 200.000 euros d'amende, au lieu de 90.000, lorsque l'infraction est commise par un navire de faible tonnage (5° modifiant l'article L. 218-22 du code de l'environnement). Une peine d'amende de 4.000 euros est prévue lorsque l'infraction est commise par d'autres navires, alors qu'elle était précédemment punie de 1.875 euros d'amende et du double et de six mois d'emprisonnement en cas de récidive. L'Assemblée nationale a adopté à l'initiative du rapporteur et avec l'avis favorable du Gouvernement un amendement rédactionnel.

Le 5° tend à modifier l'article L. 218-24 du code de l'environnement, qui prévoit actuellement, outre la possibilité pour le tribunal de mettre le paiement des amendes prononcées à l'encontre du capitaine ou du responsable à bord à la charge de l'exploitant ou du propriétaire s'il a été cité à l'audience, que les personnes physiques encourent à titre de peine complémentaire la peine d'affichage de la décision ou sa diffusion.

Le projet de loi prévoit en outre six peines complémentaires :

- l'interdiction, à titre définitif ou pour cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise (1° du b) ;

- la fermeture, définitive ou pour une durée de cinq ans au plus, des établissements ou de l'un ou plusieurs des établissements ayant servi à commettre l'infraction (2° du b)) ;

- l'exclusion des marchés publics, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus (3° du b)) ;

- la confiscation du navire ou de l'engin ayant servi à commettre l'infraction (4° du b)) ;

- la confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis (6° du b)).

Le 6° de l'article 10 du présent projet de loi vise à modifier l'article L. 218-25, relatif aux sanctions susceptibles d'être prononcées à l'encontre des personnes morales ayant commis des infractions de pollution maritime.

Actuellement, les personnes morales encourent, outre l'amende, certaines des peines prévues au titre de l'article 131-39 du code pénal, comme l'exclusion des marchés publics, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, l'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, et l'affichage ou la diffusion de la décision de condamnation.

Désormais, pourraient également être prononcées à leur encontre des mesures de dissolution, si la personne morale a été créée ou détournée de son objet pour commettre les faits incriminés, d'interdiction, définitive ou pour cinq ans, d'exercer des activités professionnelles ou sociales, de fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus de l'un ou plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés et de confiscation de la chose ayant servi ou destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit. Seuls ne seraient donc pas applicables le placement sous surveillance judiciaire et l'interdiction d'émettre des chèques.

Par ailleurs, le projet de loi tend à instaurer la possibilité pour le tribunal de prononcer la confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. Ceci va donc bien au-delà de la peine de confiscation prévue par l'article 131-39 du code pénal qui ne vise que la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou qui en est le produit.

Néanmoins, en vertu de l'article 230 de la convention de Montego bay, les personnes de nationalité étrangère ne sont passibles que de sanctions pécuniaires, ce qui relativise fortement la portée de ces modifications.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 10 ainsi modifié .

SECTION 4
Dispositions relatives aux infractions en matière douanière
Article 11
(art. 28-1 du code de procédure pénale, art. 67 bis et 343-3 du code
des douanes, art. L. 235 du livre des procédures fiscales
et art. L. 152-4 du code monétaire et financier)
Amélioration de l'efficacité de la douane judiciaire
et de la douane administrative

L'article 11 regroupe cinq paragraphes distincts, portant sur des objets et des codes différents.

- le paragraphe I tend à modifier le code de procédure pénale et traite de la douane judiciaire ;

- le paragraphe II vise à modifier le code des douanes pour aligner le régime de la surveillance et de l'infiltration mises en oeuvre par la douane sur celui des policiers agissant en matière de criminalité organisée ;

- le paragraphe III tend également à modifier le code des douanes, afin d'articuler le fonctionnement spécifique de la douane judiciaire et les modalités d'action de droit commun des douanes ;

- le paragraphe IV a pour objet de modifier le livre des procédures fiscales pour tirer les conséquences de l'action de la douane judiciaire ;

- le paragraphe V tend enfin à modifier le code monétaire et financier sur un point annexe à l'objet du texte.

1. Le paragraphe I : l'extension du champ de compétences et des pouvoirs de la douane judiciaire

a) La douane judiciaire

On observe depuis une dizaine d'années une tendance à la judiciarisation du droit douanier, qu'il s'agisse du régime des retenues douanières calqué sur celui des gardes à vue ou celui des visites domiciliaires calqué sur celui des perquisitions.

En outre, la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale a inséré un article 28-1 dans le code de procédure pénale créant un service de douane judiciaire , en prévoyant que des agents des douanes de catégorie A et B, spécialement désignés par arrêté des ministres de la justice et du budget, peuvent être habilités à effectuer des enquêtes judiciaires sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d'instruction.

Des enquêteurs spécialisés issus du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sont ainsi mis à la disposition de l'autorité judiciaire afin qu'elle bénéficie de leur expérience en matière économique. Ils sont habilités à mener des enquêtes judiciaires selon les règles du code de procédure pénale dans des domaines qui constituent le champ habituel de leur activité : fraudes douanières, fraudes en matière de contributions indirectes, de contrefaçons, de marques de fabrique, de commerce ou de service, ainsi que les infractions pénales connexes à ces faits. A peine de nullité, ils ne peuvent recourir aux pouvoirs du code des douanes ou du livre des procédures fiscales. Aucun cumul de fonction ou de pouvoir ne peut donc se produire.

La douane judiciaire constitue un service très différent de la douane administrative, qui n'entre en contact avec un magistrat que dans le cadre opérationnel, notamment lorsqu'elle avise le parquet d'une retenue douanière ou que ce dernier lui ordonne, à l'issue d'une procédure administrative douanière, de confier la procédure à la police judiciaire.

Au contraire, la douane judiciaire est chargée exclusivement de missions de police judiciaire et agit en vertu des prescriptions du code de procédure pénale et non du code des douanes, à peine de nullité. Elle ne peut d'ailleurs en aucun cas transiger dans les procédures dont elle est chargée, et entretient vis-à-vis de l'institution judiciaire des rapports analogues à ceux de la police judiciaire ou de la gendarmerie.

La procédure d'habilitation des officiers de douane judiciaire

Les conditions requises pour pouvoir exécuter des enquêtes judiciaires ou des commissions rogatoires nationales ou internationales sont calquées sur celles des officiers de police judiciaire (articles 16-1 et suivants du code de procédure pénale). Les agents des douanes doivent :

- être de catégorie A ou B et avoir deux ans de service effectif dans leur corps en qualité de titulaire. L'administration des douanes privilégie d'ailleurs les agents ayant une certaine expérience, notamment dans des secteurs très spécialisés comme les milieux bancaire ou agricole ;

- avoir satisfait aux épreuves d'un examen technique , l'examen oral ayant lieu devant un jury composé de magistrats et de représentants de l'administration des douanes et présidé par un avocat général près la Cour de cassation.

L' habilitation est ensuite accordée, suspendue ou retirée par arrêté des ministres de la justice et du budget. Dans le mois qui suit la notification de la décision de suspension ou de retrait de l'habilitation, l'agent concerné peut demander au procureur général de rapporter cette décision. Il statue dans un délai d'un mois, son silence valant rejet de la demande. Dans un délai d'un mois à partir du rejet de la demande, l'agent peut former un recours devant la commission prévue à l'article 16-2 du code de procédure pénale. La procédure applicable devant cette commission est celle prévue par l'article 16-3 111 ( * ) du même code et ses textes d'application.

Dès lors qu'il est habilité, l'officier de douane judiciaire est placé sous la direction administrative d'un magistrat de l'ordre judiciaire selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. Un magistrat de l'ordre judiciaire dirige l'unité de douane judiciaire . Ce magistrat a rang de sous-directeur délégué aux missions judiciaires de la douane et placé en position de détachement auprès du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et exerce ses fonctions auprès du directeur général des douanes et droits indirects. Il veille au bon fonctionnement du dispositif et doit être l'interlocuteur naturel des parquets et des magistrats instructeurs.

Pour l'exercice des missions de police judiciaire, les agents des douanes sont placés sous la direction du procureur de la République, sous la surveillance du procureur général et sous le contrôle de la chambre de l'instruction du siège de leur fonction, dans les conditions prévues par les articles 224 à 230 du code de procédure pénale. Les dispositions applicables au contrôle de l'activité des officiers et agents de police judiciaire leur ont donc été expressément étendues par la loi du 23 juin 1999.

Le service national de douane judiciaire (SNDJ), mis en place en 2002, peut se targuer d'un premier bilan très positif. Depuis le 15 novembre 2001, une cinquantaine d'agents des douanes a reçu l'habilitation à effectuer des enquêtes judiciaires sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d'instruction. Pour l'année 2002, première année de fonctionnement de la douane judiciaire, les magistrats ont confié 68 enquêtes judiciaires à ce service, soit 17 enquêtes préliminaires et 2 enquêtes de flagrance, ainsi que 49 commissions rogatoires.

Le présent projet de loi tend à accroître ses moyens et s'inscrit dans le prolongement de la constitution des pôles économiques et financiers et des dispositions relatives à la lutte contre la criminalité organisée. Ceci devrait particulièrement concerner le trafic de stupéfiants, pour lequel les douanes jouent un rôle déterminant, puisqu'elles effectuent un tiers des constatations et 60 à 80 % des saisies.

b) Les domaines de compétence de la douane judiciaire

L'administration des douanes procède à plus de 450 types de contrôles différents dans les secteurs les plus variés afin notamment de protéger les intérêts financiers de la Communauté européenne, pour laquelle les droits de douane constituent une part de ressources propres importante. La circulaire du 10 mai 2001 112 ( * ) indique que des secteurs prioritaires de contrôle ont été définis. En particulier, la douane judiciaire :

- protège les intérêts financiers, notamment en ce qui concerne la politique agricole commune et le FEOGA-garantie ;

- contrôle les mesures de politique commerciale commune et l'application des préférences tarifaires accordées à certains pays tiers en matière de produits textiles (certaines entreprises européennes souscrivant de fausses déclarations d'origine lors de l'importation pour en bénéficier) ;

- contrôle l'ensemble de la filière pétrolière et assure la perception des impôts ;

- vérifie les licences d'exportation des biens à double usage (civil et militaire), leur absence constituant un délit de contrebande ;

- intervient en matière de stupéfiants, lors du franchissement des frontières, mais aussi sur l'ensemble du territoire ;

- lutte contre la contrefaçon, qui constitue un délit douanier indépendamment des dispositions du code de la propriété intellectuelle ;

- contrôle les régimes douaniers sensibles à la fraude, comme le régime du transit, qui permet le transport de marchandises en suspension des droits et taxes ;

- contrôle le trafic par conteneur dans les ports, susceptible de masquer des trafics (contrebande de cigarettes, trafic d'espèces protégées de la faune ou de la flore, stupéfiants) ;

- assure la protection des consommateurs et de l'environnement par la vérification du respect de la réglementation des déchets et des normes techniques (jouets, matériels électriques...) à l'occasion des importations ;

- contrôle les mesures antidumping destinées à protéger l'industrie communautaire ;

- intervient en matière de contributions indirectes. La douane perçoit chaque année près de 58 milliards d'euros de droits et taxes, soit près de 14 % des recettes du budget national, l'essentiel des perceptions étant constitué par des accises, impôts indirects sur certains biens de consommation tels que les produits pétroliers, les alcools et les tabacs. La douane perçoit aussi la TVA sur les produits importés des pays tiers ;

- lutte contre les fraudes communautaires (fraudes aux ressources propres de l'Union européenne constituées notamment par les droits de douane), fraudes à la dépense, en particulier dans le secteur agricole, fraudes aux procédures de transit.

Contrairement à la police judiciaire, et même si elle dispose d'une compétence sur l'ensemble du territoire national, la douane judiciaire n'a qu'une compétence d'attribution , en vertu de l'article 28 du code de procédure pénale, qui prévoit que « les fonctionnaires et agents des administrations et services publics auxquels des lois spéciales attribuent certains pouvoirs de police judiciaire exercent ces pouvoirs dans les conditions et dans les limites fixées par la loi ».

Actuellement , le deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 28-1 du code de procédure pénale prévoit la compétence de la douane judiciaire pour :

- les infractions douanières, c'est-à-dire les fraudes relatives au commerce international (contrebande, importation et exportation sans déclaration ...), les fraudes au budget communautaire (s'agissant des ressources propres, du FEOGA-garantie), les manquements à l'obligation déclarative relative aux transferts de capitaux en provenance ou à destination de l'étranger ;

- les infractions en matière de contributions indirectes , c'est-à-dire celles prévues par le code général des impôts (relatives à l'alcool et aux boissons alcoolisées, aux tabacs, aux spectacles et à la garantie des métaux précieux notamment), ainsi que celles spécifiques dans le domaine de la viticulture et des céréales ;

- les contrefaçons de marques de fabrique, de commerce ou de service (sont visées les infractions prévues par les articles L. 716-9 à L. 716-11 du code de la propriété industrielle : reproduction, imitation, utilisation, apposition, suppression ou modification d'une marque en violation des droits conférés par son enregistrement, importation, sous tous régimes douaniers, ou exportation de marchandises présentées sous une marque contrefaite).

En outre, les agents de la douane judiciaire peuvent constater les infractions pénales connexes .

Lorsqu'à l'occasion d'un signalement, d'une plainte avec ou sans constitution de partie civile, les faits sont susceptibles de relever d'une infraction douanière, il appartient, soit au parquet en l'absence d'enquête administrative douanière préalable, soit au magistrat instructeur, de saisir la douane judiciaire, même si ces faits sont déjà appréciés sous leur expression pénale. Néanmoins, cette saisine reste marginale, les magistrats étant peu familiers du droit douanier.

Or, de nombreuses infractions de droit commun peuvent être connexes à des infractions douanières. Ainsi, les fraudes communautaires peuvent être appréhendées sous la qualification pénale d'escroquerie, mais aussi d'obtention d'avantage indu à l'exportation. Le détournement de l'utilisation de sommes provenant du budget communautaire peut être abordé sous l'angle de l'escroquerie et de faux ou usage de faux, mais aussi sous l'angle de fausses déclarations d'origine, d'espèce ou de valeur lors du dédouanement de marchandises. De même, un trafic transfrontières de véhicules volés peut être appréhendé sous la qualification de vols commis en bande organisée, mais aussi sous l'angle douanier d'exportation frauduleuse. En matière viticole, les fraudes, le plus souvent appréciées sous l'angle de la publicité trompeuse ou encore de la tromperie, pourraient être appréhendées au regard des contributions indirectes.

En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, un même fait peut être concurremment poursuivi s'il est constitutif à la fois d'une infraction douanière et d'une infraction pénale, sous réserve que ne soient pas cumulées des peines de même nature.

La douane judiciaire peut ainsi être saisie à titre complémentaire de dossiers gérés à titre principal par des services de la police judiciaire.

Dans tous ces domaines, les agents de la douane judiciaire peuvent agir seuls.

Néanmoins, le troisième alinéa du paragraphe I de l'article 28-1 exclut explicitement de la compétence des agents des douanes habilités agissant seuls le trafic de stupéfiants, le trafic d'armes, le vol de biens culturels et le blanchiment du produit de ces trois catégories d'infractions 113 ( * ) . Il s'agit pourtant de domaines d'activité centraux de la douane administrative, mais il a été décidé en 1999 de ne pas remettre en cause la compétence des offices centraux de la police nationale.

Par conséquent, le paragraphe II de l'article 28-1 du code de procédure pénale prévoit que pour la recherche et la constatation des infractions par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal, c'est-à-dire le trafic de stupéfiants, et par le décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions et des infractions qui leur sont connexes, le procureur de la République ou le juge d'instruction territorialement compétent peut constituer des unités temporaires composées d'officiers de police judiciaire (policiers ou gendarmes) et d'agents de la douane judiciaire, si les services concernés en ont au préalable accepté le principe.

Le procureur de la République ou le juge d'instruction désigne le chef de ces équipes mixtes temporaires en fonction des caractéristiques et circonstances de l'enquête (service à l'origine de l'information, compétences des enquêteurs notamment). Il en assure également la direction, conformément aux dispositions du code de procédure pénale. Elles ont compétence sur tout le territoire national.

Le paragraphe I de l'article 11 du projet de loi tend à étendre la compétence de la douane judiciaire à la recherche et à la constatation des escroqueries sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Est notamment visé le « carrousel » de TVA.

Le « carrousel » de TVA à l'intérieur de l'Union européenne

Une société A effectue une livraison intracommunautaire à une société B située dans un autre pays pour un montant hors taxes de 100.000 euros. La société B dite taxi revend à la société C située dans le même pays pour 100.000 euros toutes taxes comprises (soit 83.612 euros hors taxes pour un taux de TVA de 19,6 %) en facturant un montant de TVA qu'elle ne déclare pas, avant de disparaître. La société C va pouvoir imputer (ou se faire rembourser) la TVA facturée par B, soit 16.388 euros. Ayant acheté à un prix hors taxes de 83.612 euros, C a abaissé son prix de revient de 16,4 % et bénéficie donc d'un avantage concurrentiel qui lui permettra d'accroître ses ventes ou sa marge.

Dans un tel montage, le bénéfice est localisé au niveau de la société C mais c'est la société B qui joue un rôle décisif. La fraude résulte directement du mécanisme de la TVA intracommunautaire et du fait que A vend hors taxes à B. En effet, en TVA interne, B chercherait à déduire la TVA facturée par A : pour cela, il faudrait soit l'imputer sur la TVA facturée à C (ce qui oblige à verser celle-ci), soit éventuellement en demander le remboursement, ce qui éveillerait l'attention de l'administration fiscale et ne permettrait pas une disparition immédiate de l'entreprise taxi. A l'inverse de la TVA intracommunautaire, B doit normalement auto-liquider la TVA sur son acquisition intracommunautaire auprès de A et la déduire immédiatement, sans aucun mouvement de trésorerie.

La rentabilité des fraudes carrousel est très élevée, dans la mesure où chaque traversée de frontière (on peut en rencontrer plusieurs successivement) permet de transformer un prix hors taxes en prix TTC et donc de gagner le montant de la TVA sur la totalité de la valeur du bien.

Source : Conseil des impôts, la taxe sur la valeur ajoutée, XIXème rapport au président de la République, juin 2001.

Actuellement, la douane judiciaire traite déjà de la fraude à la TVA, mais uniquement lorsqu'elle constitue une infraction connexe, comme c'est fréquemment le cas en matière d'escroquerie. Elle ne peut intervenir dès lors que l'infraction directe est constituée par le carrousel de TVA. Or elle peut effectuer des recoupements concernant les opérateurs économiques entre les données des bases intracommunautaires (comme la base de recoupement des Etats membres (BREM) -qui comprend les livraisons intracommunautaires des fournisseurs d'un Etat membre vers un opérateur français-) et les déclarations d'acquisition de l'opérateur. Le projet de loi devrait mettre fin à cette lacune.

Par ailleurs, à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, et avec les avis favorables tant du rapporteur de la commission des Lois que du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à étendre le champ d'intervention de la douane judiciaire agissant seule.

Alors que la loi du 23 juin 1999 précitée exclut expressément de la compétence de la douane judiciaire agissant seule le trafic d'armes et le vol de biens culturels et leur blanchiment, les douanes ne pouvant intervenir dans ce cas que dans le cadre d'unités mixtes comprenant des officiers de police judiciaire, l'Assemblée nationale leur a donné une compétence judiciaire propre dans ces matières. La restriction actuelle empêche les douaniers d'intervenir seuls dans les domaines où ils sont les plus compétents.

c) La suppression de l'interdiction faite au procureur de la République de saisir la douane judiciaire de faits constatés par la douane administrative

La loi du 23 juin 1999 précitée a confié à certains agents des douanes habilités des missions de police judiciaire, sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge d'instruction.

Néanmoins, le paragraphe III de l'article 28-1 du code de procédure pénale prévoit que les agents de la douane judiciaire ne sont pas compétents pour effectuer des enquêtes judiciaires lorsque les faits ont été constatés par les agents de la douane administrative en application des dispositions du code des douanes. Le procureur de la République ne peut donc saisir la douane judiciaire après une enquête administrative.

Cependant, ce même paragraphe prévoit que la douane judiciaire peut encore être saisie par le juge d'instruction sur commission rogatoire.

Il était en effet craint un « mélange des genres » entre les services de la douane judiciaire et ceux de la douane administrative. Néanmoins, la distinction opérée entre magistrats du siège et du parquet n'apparaissait pas justifiée, dans la mesure où le parquet est familier des services de la douane judiciaire dont il habilite les agents.

De plus, les risques de confusion entre les activités de la douane judiciaire et celles de la douane administrative sont restreints, la douane judiciaire constituant un service indépendant de la douane administrative, dont les agents agissent sous la direction d'un magistrat en application des seules dispositions du code de procédure pénale.

Le projet de loi tend donc à supprimer l'interdiction pour le procureur de la République de saisir la douane judiciaire de faits constatés par la douane administrative.

d) Des pouvoirs de la douane judiciaire étendus

Dans l'exercice de ses fonctions, l'officier de douane judiciaire est largement assimilable à un officier de police judiciaire. Ses pouvoirs d'investigation sont identiques à ceux de la police judiciaire, comme le souligne le renvoi effectué par l'article 28-1 du code de procédure pénale aux articles du code de procédure pénale relatifs à la garde à vue, aux perquisitions ou à la réquisition judiciaire. Néanmoins, s'ils ont tous les pouvoirs reconnus aux officiers de police judiciaire, ceux-ci sont limités à la constatation d'infractions délimitées.

L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement de coordination relatif à l'extension des pouvoirs des agents de la douane judiciaire en matière de surveillance et d'infiltration. La référence à l'article 706-32 du nouveau code de procédure pénale est remplacée par celle aux articles 706-80 à 706-86 du nouveau code de procédure pénale, l'Assemblée nationale ayant parallèlement supprimé l'article 706-87 du code de procédure pénale que l'article 1 er du projet de loi tendait à introduire, et qui visait à interdire de condamner une personne sur le seul fondement des déclarations d'officiers de police judiciaire ayant procédé à une infiltration. Par coordination avec le rétablissement de cet article (quoique modifié, les déclarations de l'agent infiltré ne pouvant constituer le seul fondement de la condamnation que s'il choisit de dévoiler son identité), votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement de coordination rétablissant la référence à ce nouvel article 706-87 du code de procédure pénale.

Par ailleurs, le 3° tend à compléter l'actuel paragraphe VI de l'article 28-1 du code de procédure pénale pour étendre le champ des procédures auxquelles les agents de la douane judiciaire peuvent recourir dans le cadre de leurs fonctions.

Actuellement, en vertu du paragraphe VI de l'article 28-1, les agents des douanes procédant à des enquêtes judiciaires peuvent appliquer certaines procédures prévues par le code de procédure pénale : les saisies d'objets constituant des indices en cas de crime flagrant (deuxième et troisième alinéas de l'article 54), les saisies, placements sous scellés, auditions de témoins, interdiction à toute personne de s'éloigner du lieu de l'infraction et perquisitions en cas de crime flagrant (articles 56 à 62), les gardes à vue (articles 63 à 67), les règles en cas d'enquête préliminaire (articles 75 à 78), les règles spécifiques à la législation sur les stupéfiants en matière de perquisition, saisie et garde à vue (articles 706-28, 706-29) et relatives à la surveillance et à l'infiltration dans ce même domaine (article 706-32).

Le projet de loi prévoit que les officiers de douane judiciaire pourront en outre faire application des dispositions des articles du code de procédure pénale :

- relatives aux interceptions de communications téléphoniques pour les infractions dont la peine encourue est au minimum de deux ans d'emprisonnement (articles 100 à 100-7) ;

- relatives à l'entraide judiciaire internationale (articles 694 à 695-3 créés par l'article 6 du projet de loi), notamment la transmission et l'exécution des demandes d'entraide en matière internationale (articles 694 à 694-9 nouveaux) et entre les membres de l'Union européenne (695 à 695-3 nouveaux). Ceci permettra en particulier aux agents de la douane judiciaire de participer à des équipes communes d'enquête avec d'autres services de police judiciaire des Etats membres de l'Union européenne ;

- relatives aux règles spécifiques à la délinquance et à la criminalité organisées (articles 706-73 à 706-101 nouveaux introduits par l'article premier du présent projet de loi).

De plus, il est précisé que les agents de la douane judiciaire pourront être assistés par les « personnes mentionnées aux articles 706 et 706-2 », à savoir les assistants spécialisés, déjà présents dans les juridictions spécialisées en matière économique et financière ainsi que celles spécialisées en matière sanitaire et de santé publique, et dont l'existence et le rôle sont confortés par le projet de loi. De fait, la plupart des infractions constatées dans le domaine des fraudes communautaires relèvent de la compétence des juridictions spécialisées prévues à l'article 704 du code de procédure pénale.

Néanmoins, l'article 706 du code de procédure pénale modifié par l'article 7 du projet de loi tend à prévoir que les assistants spécialisés sont placés sous la responsabilité de magistrats, et ne peuvent assister les officiers de police judiciaire que sur délégation de ces derniers. Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement prévoyant des dispositions similaires s'agissant des agents de la douane judiciaire.

2. Le paragraphe II : L'alignement du régime des livraisons surveillées et contrôlées réalisées par la douane administrative sur le régime prévu en matière de criminalité organisée pour la police judiciaire

Le paragraphe II tend à aligner les procédures de surveillance et d'infiltration mises en oeuvre par la douane administrative sur le régime défini en la matière pour les officiers de police judiciaire par les articles 706-80 à 706-87 nouveaux du code de procédure pénale introduits par l'article premier du présent projet de loi en matière de délinquance et de criminalité organisées.

a) Le régime actuel

La loi n° 91-1264 du 19 décembre 1991 relative au renforcement de la lutte contre le trafic de stupéfiants habilite déjà les douaniers à procéder à des opérations de livraisons surveillées et contrôlées correspondant à la surveillance et à l'infiltration dans ce seul domaine.

Le premier alinéa de l'article 67 bis du code des douanes prévoit donc que les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes peuvent procéder à la surveillance de l'acheminement de substances ou plantes classées comme stupéfiants dans le but de :

- constater les infractions douanières d'importation, d'exportation ou de détention de substances ou plantes classées comme stupéfiants ou utilisées pour la fabrication illicite des produits stupéfiants, ainsi que des matériels servant à cette fabrication ;

- d'identifier les auteurs et complices de ces infractions ainsi que ceux y ayant participé comme intéressés au sens de l'article 399 ;

- d'effectuer les saisies prévues par le code des douanes.

L'administration des douanes doit simplement informer le procureur de la République du début de l'opération de surveillance. Il en contrôle ensuite le déroulement.

Le deuxième alinéa prévoit que les agents des douanes peuvent également aux mêmes fins acquérir, détenir, transporter ou livrer ces substances ou plantes ou mettre à la disposition des personnes les détenant ou se livrant aux infractions douanières mentionnées à l'alinéa précédent des moyens de caractère juridique, ainsi que des moyens de transport, de dépôt ou de communication. A la différence de la procédure de livraison surveillée, la livraison contrôlée doit être autorisée par le procureur de la République. L'autorisation ne couvre pas les actes de provocation à la commission des infractions visées.

Le dernier alinéa exonère les agents de toute responsabilité pénale , non seulement pour les actes visés précédemment, mais aussi lorsque ces actes sont accomplis sur des fonds visés par l'article 415 (opération financière portant sur des fonds connus par l'auteur comme provenant d'un délit douanier ou d'une infraction à la législation sur les stupéfiants) et pour la constatation de celle-ci.

Il s'agit dans une large mesure de la reprise des dispositions de l'article 706-32 du code de procédure pénale relatif à la surveillance par les officiers de police judiciaire en matière de trafic de stupéfiants.

b) Le projet de loi

Le projet de loi tend à modifier l'article 67 bis du code des douanes, afin de préciser et d'étendre le régime des livraisons surveillées et contrôlées, à l'instar de ce qui est prévu par l'article 1 er pour la police judiciaire en matière de criminalité organisée.

En matière de surveillance ( paragraphe I du texte proposé pour l'article 67 bis du code des douanes), le champ d'application de cette procédure serait étendu des seules infractions douanières liées au trafic de stupéfiants à tous les délits douaniers pour lesquels la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement . Ceci concernerait notamment la réalisation non autorisée d'opérations financières entre la France et l'étranger (cinq ans) ou encore la réalisation d'opérations financières entre la France et l'étranger sur des fonds provenant d'un délit douanier ou d'infraction à la législation sur les stupéfiants (dix ans), l'importation et l'exportation non déclarées de marchandises prohibées ou fortement taxées (trois ans, six en cas de récidive), ainsi que la contrebande de ces mêmes marchandises (trois ans, six en cas de récidive).

Seraient susceptibles d'être placées sous surveillance non seulement les personnes pour lesquelles « il existe une ou plusieurs raisons plausibles de les soupçonner » d'être les auteurs d'un délit douanier, comme en matière de délinquance et de criminalité organisées, mais également celles soupçonnées d'en être complices ou d'être intéressées à la fraude en vertu de l'article 399 du code des douanes, les peines encourues étant dans cette dernière hypothèse similaires à celles auxquelles s'exposent les auteurs de l'infraction eux-mêmes. Sont visés :

- les entrepreneurs, membres d'entreprise, assureurs, assurés, bailleurs de fonds, propriétaires de marchandises et en général les personnes ayant un intérêt direct à la fraude ;

- les personnes ayant coopéré à un ensemble d'actes accomplis par un certain nombre d'individus agissant de concert, d'après un plan de fraude arrêté pour assurer le résultat poursuivi en commun ;

- les personnes ayant sciemment, soit couvert les agissements des fraudeurs ou tenté de leur procurer l'immunité, soit acheté ou détenu des marchandises provenant d'un délit de contrebande ou d'importation sans déclaration.

A l'instar des officiers de police judiciaire et des officiers de douane judiciaire, les agents de la douane administrative bénéficieraient d'une extension de leur compétence sur l'ensemble du territoire national afin, dans le cadre d'une opération de surveillance, d'acheminer ou transporter les biens, objets ou produits tirés de la commission des infractions douanières ou servant à les commettre. Les douanes travaillent en effet sur l'ensemble du territoire et notamment sur les grands axes autoroutiers. L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel sur ce point, à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement.

Les conditions de forme demeureraient inchangées par rapport au régime existant de l'article 67 bis, d'ailleurs repris en matière de criminalité organisée : seule l'information préalable du procureur de la République serait requise, le silence de ce dernier, qui pourrait s'opposer à l'opération, valant consentement. Le dernier alinéa du paragraphe I précise néanmoins que cette information doit être donnée « par tout moyen ». Le procureur de la République compétent serait soit celui près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance débutent soit, le cas échéant, celui appartenant à la juridiction spécialisée en matière de criminalité organisée saisie de ces faits.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision présenté par M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, sous-amendé par la commission des Lois avec l'avis favorable du Gouvernement, visant à maintenir les conditions actuelles de l'exercice par les douanes de la procédure du droit de visite.

En matière d' infiltration (paragraphes II à IX) , les dispositions introduites à l'article 67 bis du code des douanes reprennent également celles prévues en matière de criminalité organisée à l'article 706-81 nouveau du code de procédure pénale, sous réserve des adaptations justifiées par la matière douanière.

Le paragraphe II du texte proposé pour l'article 67 bis indique que l'infiltration « consiste, pour un agent des douanes spécialement habilité dans des conditions fixées par décret, agissant sous la responsabilité d'un agent de catégorie A chargé de coordonner l'opération, à surveiller des personnes suspectées de commettre un délit douanier en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou intéressés à la fraude ».

L'infiltration vise donc à constater l'infraction, identifier les auteurs et complices et ceux y ayant participé comme intéressés et éventuellement saisir des produits.

La prohibition de la provocation établie par la Cour de cassation est réaffirmée. Ainsi, les actes commis dans le cadre d'une infiltration ne pourraient constituer, à peine de nullité, une incitation à commettre des infractions. Rappelons qu'à la suite de la décision Gomez du 5 mai 1999 annulant une procédure de livraison contrôlée effectuée par les douanes, celles-ci ont pratiquement cessé ce type d'interventions, pour privilégier les livraisons surveillées. Ainsi, si en 2002 66 livraisons surveillées postales ont été effectuées, dont 48 ont abouti à l'interception de la personne, aucune livraison contrôlée n'a été effectuée.

La procédure d'infiltration proposée est strictement encadrée .

Ainsi, le projet de loi initial prévoyait qu'elle ne pourrait intervenir « qu'à titre exceptionnel ». Comme à l'article 706-81 nouveau en matière de criminalité et de délinquance organisée à l'article premier du projet de loi, l'Assemblée nationale a adopté avec l'avis favorable du Gouvernement un amendement présenté par le rapporteur tendant à supprimer le caractère exceptionnel de l'infiltration.

Par ailleurs, le champ d'intervention de l'infiltration s'étendrait à des infractions limitativement énumérées :

- les infractions douanières d'importation, d'exportation ou de détention de substances ou plantes classées comme stupéfiants ;

- les infractions de contrebande de tabacs manufacturés, d'alcools et spiritueux ;

- les opérations financières portant sur des fonds connus par l'auteur comme provenant d'un délit douanier ou d'une infraction à la législation sur les stupéfiants.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement, adopté un amendement afin d'étendre les possibilités d'infiltration pour constater des infractions douanières de contrefaçon, domaine de plus en plus investi par la criminalité organisée et les mafias.

Le paragraphe III du texte proposé pour l'article 67 bis du code des douanes encadre l'exonération de responsabilité pénale des agents des douanes. Ainsi, ils pourraient acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions, utiliser ou mettre à disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens juridiques ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation et de télécommunication. De même, le texte proposé reprend dans son paragraphe II les règles insérées à l'article 706-82 nouveau du code de procédure pénale relatives aux faits que peuvent commettre les agents infiltrés, en les adaptant légèrement : ainsi, sont seuls visés les substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions et non ceux servant à leur commission comme en matière de délinquance et de criminalité organisées.

Cette exonération de responsabilité s'applique également aux personnes requises par les agents des douanes pour permettre de procéder à l'opération d'infiltration, dans les mêmes conditions qu'à l'article 706-82 nouveau. Comme à cet article, l'Assemblée nationale a, à l'initiative de son rapporteur, adopté avec l'avis favorable du Gouvernement un amendement renforçant la sécurité des agents infiltrés en permettant que ces personnes puissent être requises par d'autres agents des douanes que ceux participant à l'infiltration. Cette exonération de responsabilité semble cependant très large. Comme en matière de délinquance et de criminalité organisée, votre commission des Lois vous propose, par un amendement, de la limiter aux seuls actes ayant permis l'infiltration de l'agent.

Les paragraphes II et IV du texte proposé pour l'article 67 bis du code des douanes prévoient les garanties formelles entourant l'opération d'infiltration :

- l'opération d'infiltration devrait être autorisée par le procureur de la République.

Le projet de loi apporte quelques précisions quant au contenu et à la forme de l'autorisation du procureur, afin de remédier aux imprécisions actuelles, qui ont abouti à des nullités de procédure, et sont à l'origine dans une large mesure de la disparition des infiltrations dites ouvertes au profit de celles dites fermées, la constatation des infractions étant présentée dans le dossier de procédure comme résultant de circonstances fortuites, ainsi que le soulignait dans son rapport 114 ( * ) M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois de l'Assemblée nationale.

Le paragraphe IV du texte proposé prévoit par conséquent que l'autorisation doit être écrite et spécialement motivée, à peine de nullité de la procédure. Elle doit de plus mentionner la ou les infractions justifiant le recours à cette procédure.

Le projet de loi initial prévoyait que devaient y figurer l'identité de l'agent des douanes sous la responsabilité duquel se déroule l'opération ainsi que l'identité d'emprunt de l'agent ou des agents effectuant l'opération. Comme à l'article 706-83 nouveau du code de procédure pénale introduit par l'article 1 er relatif à la délinquance et à la criminalité organisées, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de son rapporteur, et avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement supprimant la mention de l'identité d'emprunt dans l'autorisation d'infiltration afin de protéger les agents infiltrés, seule la mention de l'identité du responsable de l'opération y figurant.

L'autorisation fixerait la durée de l'opération d'infiltration, qui ne pourrait excéder quatre mois. Elle pourrait cependant être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée, ces opérations pouvant parfois s'échelonner sur plusieurs années. Le magistrat ayant délivré l'autorisation pourrait à tout moment ordonner son interruption avant l'expiration de la durée fixée.

L'autorisation serait versée au dossier de la procédure après achèvement de l'opération d'infiltration, ce qui constitue une garantie pour les personnes mises en cause à l'issue de cette procédure.

Contrairement à ce qui est prévu en matière de surveillance, le texte proposé ne précise pas quel est le parquet compétent . Or cette question suscite déjà des interrogations en matière de stupéfiants. Il est généralement considéré que tous les procureurs dans le ressort desquels ces agents infiltrés pourraient être amenés à intervenir devraient accorder leur autorisation. Les difficultés pratiques en découlant devraient être limitées par la création de pôles interrégionaux spécialisés.

En outre, le procureur de la République contrôlerait le déroulement de l'opération d'infiltration. L'actuel article 67 bis ne précise pas les modalités d'exercice de ce pouvoir d'encadrement. Néanmoins, il ressort de la jurisprudence que le procureur de la République doit, avant de donner son autorisation, recueillir tous les renseignements nécessaires à son appréciation, et donc exiger de l'agent habilité des informations détaillées. L'autorité judiciaire doit d'ailleurs, selon la Cour de cassation, vérifier les conditions de réalisation de la livraison contrôlée, pour s'assurer que les douaniers n'ont commis aucun excès de pouvoir 115 ( * ) ;

-  un rapport concernant le déroulement de l'opération d'infiltration devrait être rédigé par l'agent de catégorie A ayant coordonné l'opération (paragraphe II de l'article 67 bis du code des douanes). Ce rapport serait versé au dossier de la procédure. L'Assemblée nationale a adopté avec l'avis favorable du Gouvernement un amendement présenté par le rapporteur prévoyant que ce rapport contient les éléments strictement nécessaires à la constatation des infractions et ne mettant pas en danger la sécurité de l'agent infiltré ni celle des personnes requises par lui.

Par ailleurs, les dispositions relatives à l'identité d'emprunt (paragraphe V) reprennent les dispositions de l'article 706-84 nouveau.

Ainsi, l'identité réelle des agents des douanes ayant effectué l'infiltration sous une identité d'emprunt ne devrait apparaître à aucun stade de la procédure. La révélation de l'identité de ces agents serait punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende.

Cette solution s'éloigne donc de la législation en vigueur aux Etats-Unis, où l'agent infiltré témoigne sous sa véritable identité. Cette dernière solution poserait des problèmes de sécurité des agents infiltrés, mais interdirait également de les utiliser dans d'autres enquêtes, alors même que le nombre d'agents susceptibles d'être infiltrés est limité.

Comme à l'article 706-84 nouveau, l'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, renforcé les dispositions du projet de loi pour prévoir que la révélation de l'identité des agents infiltrés serait punie de sept ans d'emprisonnement et de 100.000 euros d'amende si elle causait des violences, coups et blessures à l'encontre des agents infiltrés ou de leur conjoints, enfants et ascendants directs. Si la révélation de l'identité de l'agent infiltré causait la mort de celui-ci ou de ses conjoint, enfants et ascendants directs, les peines seraient portées à dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende.

Les dispositions des paragraphes VI (dispositif de sortie de la procédure), VII (témoignage de l'agent infiltré et confrontation) et IX (interdiction de condamner sur le seul fondement des déclarations de l'agent infiltré) sont respectivement identiques à celles des articles 706-85, 706-86 et 706-87 nouveaux.

Ainsi, le paragraphe VI du texte proposé pour l'article 67 bis prévoit qu'en cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'infiltration et en l'absence de prolongation, l'agent pourrait poursuivre son infiltration sans en être pénalement responsable « le temps strictement nécessaire » pour lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité.

Comme à l'article 706-85 nouveau du code de procédure pénale introduit par l'article premier du projet de loi, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le rapporteur, avec l'avis favorable du Gouvernement, tendant à prévoir que le juge qui a autorisé cette opération devrait, d'une part en être informé dans les meilleurs délais et, d'autre part, être informé de l'achèvement de l'opération. Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement tendant à prévoir la fixation d'un délai par le juge pour la sortie du dispositif, afin d'éviter des contentieux à ce sujet.

Par ailleurs, le paragraphe VII prévoit que l'agent des douanes sous la responsabilité duquel se déroule l'opération d'infiltration pourrait seul être entendu en qualité de témoin sur l'opération. Toutefois, s'il ressortait du rapport relatif à l'opération d'infiltration que la personne mise en examen ou comparaissant devant la juridiction de jugement était directement mise en cause par des constatations effectuées par un agent ayant personnellement réalisé les opérations d'infiltration, elle pourrait demander à être confrontée à cet agent dans les conditions prévues par l'article 706-61 du code de procédure pénale. Selon cet article, introduit par la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, et qui permet à un témoin de déposer sans que son nom figure au dossier de la procédure, la confrontation peut intervenir par l'intermédiaire d'un dispositif technique permettant l'audition du témoin à distance ou l'interrogation de ce témoin par son avocat par ce même moyen. La voix du témoin est alors rendue non identifiable.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement du rapporteur, M. Jean-Luc Warsmann, avec l'avis favorable du Gouvernement, tendant à interdire lors d'une confrontation avec la personne directement mise en cause par l'agent infiltré que les questions posées à l'agent infiltré aient pour objet ou pour effet de révéler, directement ou indirectement, sa véritable identité.

Le paragraphe VIII du texte proposé pour l'article 67 bis du code des douanes définit le régime international de la surveillance et de l'infiltration douanières . Actuellement, compte tenu de l'absence de disposition sur cette question, l'agent étranger infiltré utilisé par un réseau de trafiquants de drogue pour conduire un camion contenant de la drogue devrait théoriquement cesser de conduire tout le temps de la traversée du territoire français.

Le premier alinéa de ce paragraphe vise l'hypothèse d'un agent français devant poursuivre dans un Etat étranger sa surveillance . Le projet de loi initial prévoyait qu'elle était autorisée par le procureur de la République chargé de l'enquête. L'Assemblée nationale a supprimé à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement, la précision « chargé de l'enquête », afin de prévoir qu'une opération de surveillance des douanes peut être poursuivie à l'étranger dans le cadre d'une procédure administrative, comme dans celui d'une procédure judiciaire.

Les procès-verbaux d'exécution de l'observation ou rapports y afférents ainsi que l'autorisation d'en poursuivre l'exécution sur le territoire d'un Etat étranger seraient versés au dossier de procédure.

Les trois alinéas suivants traitent de l'infiltration d'un agent étranger sur le territoire français :

- si l'opération était demandée par un Etat étranger, le ministre de la justice devrait préalablement donner son accord à une demande d'entraide judiciaire. Cet accord pourrait être assorti de conditions. En outre, les agents étrangers devraient être affectés dans leur pays à un service spécialisé et exercer des missions similaires à celles des agents de la douane habilités. Ils seraient placés sous la direction d'agents des douanes français. L'opération devrait enfin être autorisée par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, dans les conditions prévues au II ;

- si l'infiltration d'un agent étranger concernait une procédure douanière nationale, le seul accord des autorités judiciaires étrangères suffirait, outre les dispositions prévues à l'article 67 bis. L'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision présenté par M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement afin de soumettre, dans ce cas, les douaniers étrangers aux mêmes conditions que les douaniers français.

Enfin, le paragraphe IX du texte proposé pour l'article 67 bis du code des douanes prévoyait, dans le projet de loi initial, qu'aucune condamnation ne pouvait être prononcée sur le seul fondement des déclarations faites par des agents des douanes infiltrés . Comme à l'article 706-87 nouveau en matière de criminalité organisée, l'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, supprimé cette disposition, au motif que l'agent infiltré pouvait être l'unique témoin d'infractions dont ne subsisterait aucun indice, pas même le corps de la victime, comme dans l'hypothèse d'un assassinat sur un bateau. Par un amendement , votre commission des Lois vous propose néanmoins de rétablir cette disposition . Il apparaît en effet très délicat au regard des droits de la défense et de la Convention européenne de sauvegarde des droit de l'homme et des libertés fondamentales de condamner une personne sur ce seul fondement, alors même que les possibilités de confrontation sont extrêmement réduites et que la véritable identité de l'agent infiltré ne peut être révélée. Votre commission propose de préciser que l'interdiction de condamner une personne sur le seul fondement des déclarations d'un agent infiltré n'est pas applicable si l'agent infiltré choisit de témoigner sous sa véritable identité .

3. Les paragraphes III et IV et le dernier alinéa du I : une clarification des modalités d'exercice de l'action en paiement des droits et taxes éludés et des sanctions fiscales afin de tenir compte du dispositif de la douane judiciaire

a) La clarification des compétences du ministère public pour l'exercice de l'action fiscale à l'article 28-1 du code de procédure pénale

Le cinquième alinéa du paragraphe VI du texte proposé par le paragraphe I du présent article pour l'article 28-1 du code de procédure pénale vise à améliorer les modalités d'exercice de l'action fiscale par le ministère public.

Il prévoit que, par dérogation à la règle fixée au 2° de l'article 343 du code des douanes, l'action pour l'application des sanctions fiscales peut être exercée par le ministère public, en vue de l'application des dispositions de l'article 28-1 .

Cette disposition vise à lever une ambiguïté du régime actuel de recouvrement des sanctions fiscales.

L'article 343 du code des douanes prévoit en effet, au 1°, que l'action pour l'application des peines est exercée par le ministère public, qui a donc compétence exclusive pour diligenter des poursuites judiciaires et requérir le prononcé des peines.

Le 2° prévoit en revanche que l'action pour l'application des sanctions fiscales est exercée à titre principal par l'administration des douanes, le ministère public pouvant l'exercer accessoirement à l'action publique lorsque :

- l'infraction douanière est punie à la fois de sanctions fiscales et de peines (contraventions de la cinquième classe et délit douanier de relations financières avec l'étranger) ;

- une contravention de l'une des trois premières classes est connexe, soit à un délit douanier porté en justice, soit à une infraction de droit commun.

Lors de l'adoption des dispositions sur la douane judiciaire dans la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 a été introduit un 3° afin de traiter du cas spécifique de la douane judiciaire, le droit commun ne pouvant s'appliquer du fait de l'interdit absolu de l'application du code des douanes posé à l'article 28-1 du code de procédure pénale. Le ministère public détient alors une compétence exclusive pour l'exercice de l'action fiscale dans les instances répressives faisant suite aux affaires constatées par les agents de la douane judiciaire.

Ainsi, la constatation d'une infraction douanière dans le cadre d'une enquête judiciaire menée par les agents de la douane judiciaire pourrait donner lieu à l'exercice de trois actions différentes exercées par le ministère public :

- l'action publique en vue de la condamnation du prévenu aux sanctions de droit commun éventuellement prévues par le code pénal (pour autant que l'infraction douanière soit connexe à une infraction de droit commun) ;

- l'action prévue au 1° de l'article 343 du code des douanes en vue d'une condamnation aux peines d'emprisonnement prévues par le code des douanes ;

- l'action fiscale prévue par le 2° de l'article 343 du code des douanes, en vue de l'application des sanctions fiscales prévues par le code des douanes.

b) L'affirmation de la compétence du ministère public concernant le paiement des droits et taxes compromis ou éludés en matière d'infractions douanières constatées par la douane judiciaire

Les paragraphes III et IV de l'article 11 tendent à adapter les dispositions de droit commun en matière de poursuite des infractions douanières et en matière de contributions indirectes au régime spécifique de la douane judiciaire.

En effet, si la loi de 1999 précitée a prévu que, dans les procédures dont les agents de la douane judiciaire ont été saisis, le ministère public a seul compétence pour exercer l'action pour l'application des sanctions fiscales, elle a omis de préciser l'autorité compétente pour recouvrer le principal, c'est-à-dire les droits et taxes compromis ou éludés, disposition certes connexe à l'infraction pénale, mais ayant des conséquences importantes pour les finances publiques.

Pour remédier à cette lacune, et conformément à la solution préconisée par circulaire 116 ( * ) , le paragraphe III tend à compléter le 3° de l'article 343 du code des douanes pour donner compétence à l'administration des douanes pour exercer l'action en paiement dans ce domaine.

Cette évolution doit permettre à l'administration des douanes de mettre en oeuvre effectivement l'article 377 bis du code des douanes, qui permet de ne pas dissocier les poursuites pénales et civiles engendrées par ce type de contentieux, en donnant compétence aux tribunaux répressifs pour ordonner en sus des pénalités fiscales le paiement des droits et taxes fraudés ou indûment obtenus. Cette compétence trouve à s'exercer même en l'absence de condamnations pénales et s'analyse en un redressement fiscal faisant suite à une action en paiement exercée devant le juge pénal.

A cette fin, l'administration des douanes est informée de la date de l'audience par l'autorité judiciaire compétente. On notera qu'à ce stade de la procédure, l'action de la douane judiciaire est éteinte.

L'administration des douanes en tant qu'administration fiscale chargée de percevoir les droits et taxes recouvrés selon les modalités du code des douanes sera donc seule compétente pour exercer l'action en paiement des sommes compromises ou éludées par les infractions douanières constatées par les agents de la douane judiciaire.

c) L'affirmation de la compétence du ministère public concernant les infractions relatives aux contributions indirectes constatées par la douane judiciaire

Lors de l'adoption du dispositif de la douane judiciaire par la loi de 1999, l'article 343 du code des douanes prévoyant les modalités d'exercice de l'action publique et de l'action fiscale en matière douanière a été modifié, le 3° interdisant à l'administration des douanes d'exercer l'action fiscale dans les affaires dont des agents de la douane judiciaire ont été saisis et d'user dans ces mêmes affaires du droit de transaction prévu par l'article 350 du code des douanes.

Néanmoins, la loi a omis de modifier parallèlement les dispositions concernant l'action fiscale en matière de contributions indirectes dans le livre des procédures fiscales. L' action en vue d'infliger les sanctions fiscales prévues par le livre des procédures fiscales reste donc de la compétence de l'administration des douanes, ainsi que le droit de transaction prévu par l'article L. 248 du livre des procédures fiscales , même si ces infractions ont été constatées par des agents de la douane judiciaire.

Le paragraphe IV de l'article 11 du présent projet de loi a donc pour objet d'apporter deux modifications à l'article L. 235 du livre des procédures fiscale afin d'harmoniser les deux régimes d'exercice de l'action fiscale et de paiement des droits et taxes compromis ou éludés, qu'il s'agisse du code des douanes ou du livre des procédures fiscales.

Le texte proposé prévoit des dispositions équivalentes à celles du 3° de l'article 343 du code des douanes. Le ministère public serait donc compétent pour exercer l'action publique ainsi que l'action pour l'application des sanctions fiscales dans les affaires dans lesquelles la douane judiciaire a été requise en application de l'article 28-1 du code de procédure pénale. De même, le texte propose d' exclure explicitement l'application de la procédure de transaction , qui permet à l'administration, en accord avec le ministère public, de transiger lorsque l'infraction relative aux contributions indirectes est punie à la fois de sanctions fiscales et de peines ou seulement de sanctions fiscales.

Ensuite, par coordination avec la modification apportée au 3° de l'article 343 du code des douanes, le présent paragraphe prévoit la compétence de l'administration des douanes pour exercer l'action en paiement des droits et taxes compromis ou éludés conformément aux dispositions de l'article L. 1804 B du code général des impôts autorisant le tribunal à ordonner le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues (qui constitue le pendant de l'article 377 bis du code des douanes).

En cas d'infraction touchant à la fois au régime fiscal et au régime économique de l'alcool, le service désigné par décret serait seul chargé des poursuites.

La compétence des douanes pour l'exercice de l'action en paiement des droits et taxes compromis ou éludés jouerait donc à la fois pour les infractions douanières et pour les infractions en matière de contributions indirectes .

d) Les sanctions au manquement à l'obligation déclarative des transferts à l'étranger

Enfin, le paragraphe V de l'article 11 du présent projet de loi vise à réécrire l'article L. 152-4 du code monétaire et financier .

Actuellement , l'article L. 152-1 de ce code prévoit que « les personnes physiques qui transfèrent vers l'étranger ou en provenance de l'étranger des sommes, titres ou valeurs sans l'intermédiaire d'un établissement de crédit ou d'un organisme ou service mentionné à l'article L. 518-1 doivent en faire la déclaration dans des conditions fixées par décret ». Le seuil de cette obligation de déclaration est fixé à 7.600 euros.

A défaut, l'article L. 152-4 du même code prévoit la confiscation du corps du délit ou, lorsque la saisie en est impossible, d'une somme en tenant lieu et d'une amende égale au montant de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction. Lorsque la sanction a été appliquée, la majoration de 40 % prévue par le code général des impôts ne s'applique pas.

Ce dispositif est contesté au niveau communautaire.

La Commission européenne a ainsi adressé un avis motivé à la France le 25 juillet 2001 dans lequel elle considère que les sanctions prévues (amende égale à la totalité de la somme non déclarée et confiscation de cette somme) sont disproportionnées et constituent une violation du principe de libre circulation des capitaux, puisqu'elles ne prévoient aucune distinction entre les transferts intracommunautaires et ceux à destination des Etats tiers. En outre, la Commission européenne a saisi le 20 décembre 2001 la Cour de Justice des Communautés européennes d'un recours en manquement contre la France.

Le projet de loi tend donc à modifier ce régime de sanction :

- le montant de l'amende prononcée en cas de méconnaissance des obligations déclaratives serait réduit au quart de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction (paragraphe I du texte proposé pour l'article L. 152-4) ;

- la confiscation du corps du délit ou à défaut d'une somme en tenant lieu et du montant de l'amende serait remplacée par une possibilité de consignation prévue dans le seul cas où l'infraction est constatée par des agents des douanes 117 ( * ) .

Les agents des douanes pourraient ainsi consigner la totalité de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction, pendant une durée de trois mois renouvelable, dans la limite de six mois au total, sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure.

La consignation ne deviendrait confiscation que sur décision de la juridiction compétente et si pendant la durée de la consignation l'auteur de l'infraction était ou avait été en possession d'objets laissant présumer qu'il est l'auteur d'autres infractions prévues et réprimées par le code des douanes, voire un simple participant à la commission de ces infractions, ou s'il existerait des raisons plausibles de le penser.

En revanche, le projet de loi initial prévoyait qu'en cas de prononcé d'une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, ou d'extinction de l'action publique, la mainlevée des mesures de consignation, confiscation et saisie ordonnées serait de plein droit et aux frais du Trésor.

L'Assemblée nationale a adopté à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement, trois amendements tendant respectivement à supprimer la référence à l'acquittement, le manquement à l'obligation de transfert de capitaux n'étant pas un crime, à supprimer la référence à la mainlevée de la mesure de confiscation, celle-ci ne pouvant intervenir préalablement à la décision de la juridiction compétente, à préciser enfin que la méconnaissance de l'obligation de déclaration des transferts de capitaux est passible de sanctions fiscales, et non de sanctions pénales.

Le paragraphe III du texte proposé pour l'article L. 152-4 reprend des dispositions y figurant déjà. Ainsi, la recherche, la constatation et la poursuite du manquement à l'obligation déclarative sont effectuées dans les conditions fixées par le code des douanes et la majoration de 40 % mentionnée au premier alinéa de l'article 1759 du code général des impôts n'est pas appliquée lorsque l'amende est effectivement perçue.

Il n'est pas certain que la modification proposée de l'article L. 152-4 satisfasse pleinement aux exigences résultant du droit communautaire. En effet, le projet de loi n'opère toujours aucune distinction entre les transferts intracommunautaires et ceux à destination des Etats tiers. L'administration des douanes entendue par votre rapporteur considère cependant que de nombreux transferts non déclarés à destination d'Etats membres de la Communauté européenne comme le Luxembourg visent au blanchiment de sommes tirées du trafic de stupéfiants ou des êtres humains.

e) Dispositions introduites par l'Assemblée nationale relatives aux déclarations de soupçon de blanchiment de capitaux

L'Assemblée nationale a inséré à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, et avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement, cinq amendements tendant à insérer à l'article 11 cinq paragraphes additionnels relatifs aux déclarations de soupçon en matière de blanchiment de capitaux .

Aux termes des articles L. 561-1 à L. 562-10 du code monétaire et financier, un service placé sous l'autorité du ministre chargé de l'économie, TRACFIN, recueille et rassemble tous les renseignements propres à établir l'origine des sommes ou la nature des opérations faisant l'objet de déclarations de soupçon. Lorsque les informations recueillies mettent en évidence des faits susceptibles de relever du trafic de stupéfiants ou de l'activité d'organisations criminelles, il en réfère au procureur de la République.

Ces déclarations sont émises par les organismes financiers et certaines personnes mentionnées à l'article L. 562-1 et concernent les sommes inscrites dans leurs comptes lorsque celles-ci paraissent provenir du trafic de stupéfiants ou de l'activité d'organisations criminelles, ainsi que les opérations portant sur des sommes paraissant de même provenance. De plus, les informations de nature à modifier cette appréciation doivent également être transmises.

TRACFIN peut former opposition à l'exécution de l'opération pendant une durée n'excédant pas douze heures. A défaut de décision du président du tribunal de grande instance de Paris ou, à défaut, du juge d'instruction, l'opération est exécutée.

Le paragraphe VI nouveau tend à compléter l'article L. 562-1 du code monétaire et financier, qui énumère les organismes soumis à cette obligation de déclaration.

Sont actuellement concernés les établissements de crédit, les banques mutualistes ou coopératives, les sociétés anonymes de crédit immobilier, les caisses de crédit municipal, les sociétés financières, les compagnies financières, les établissements et services autorisés à effectuer des opérations de banque, les intermédiaires en opérations de banque, la Banque de France, l'institut d'émission des départements d'outre-mer et l'institut d'émission d'outre-mer, les entreprises d'assurance, les courtiers d'assurance et de réassurance, les mutuelles, les entreprises d'investissement, les membres des marchés réglementés d'instruments financiers, les changeurs manuels ainsi que les personnes qui réalisent, contrôlent ou conseillent des opérations portant sur l'acquisition, la vente, la cession ou la location de biens immobiliers.

Le projet de loi vise à étendre l'obligation de déclaration de soupçon aux groupements, cercles et sociétés organisant des jeux de hasard, des loteries, des paris, des pronostics sportifs ou hippiques . Il s'agit en effet d'un moyen classique de blanchiment. De plus, cette évolution doit permettre d'harmoniser la législation en la matière avec celle concernant les casinos, qui sont depuis la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 soumis à cette obligation de déclaration.

Les groupements, cercles et sociétés concernés devront donc s'assurer de l'identité des gagnants de sommes supérieures à un montant fixé par décret et enregistrer les noms et adresses de ces joueurs ainsi que le montant des sommes gagnées, ces données devant être conservées pendant cinq ans.

Le paragraphe VII nouveau de l'article 11 du projet de loi a pour objet de modifier en outre les articles L. 562-2, L. 562-4 et L. 562-5 du code monétaire et financier pour prévoir que cette obligation de déclaration porte, outre sur les sommes paraissant provenir du trafic de stupéfiants ou de l'activité d'organisations criminelles, sur celles qui pourraient participer au financement du terrorisme.

Le paragraphe VIII nouveau de l'article 11 du projet de loi vise à étendre le champ de compétences de TRACFIN.

Actuellement, l'article L. 562-4 du code monétaire et financier prévoit que TRACFIN recueille et rassemble tous renseignements propres à établir l'origine des sommes ou la nature des opérations faisant l'objet de la déclaration.

Désormais, il pourrait également analyser les renseignements portant sur des sommes ou opérations faisant l'objet :

- de l'examen particulier prévu à l'article L. 563-3, qui concerne les opérations importantes portant sur des sommes dont le montant est supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat et qui, sans nécessiter de déclaration, se présentent dans des conditions inhabituelles de complexité et ne paraissent pas avoir de justification économique ou d'objet licite. L'organisme financier doit se renseigner auprès du client sur l'origine et la destination de ces sommes ainsi que sur l'objet de la transaction et l'identité de la personne qui en bénéficie. Les caractéristiques de l'opération sont alors consignées par écrit et conservées par l'organisme financier pendant cinq ans à compter de la clôture de leurs comptes ou de la cessation de leurs relations avec eux les documents relatifs à l'identité de leurs clients habituels ou occasionnels. Ils conservent également les documents relatifs aux opérations effectuées pendant cinq ans à compter de leur exécution. TRACFIN et l'autorité de contrôle peuvent seuls obtenir communication de ce document et des pièces qui s'y rattachent ;

- ou de l'information mentionnée à l'article L. 563-5. TRACFIN pourrait donc recueillir les informations recueillies par les autorités de contrôle.

TRACFIN pourrait donc enrichir les renseignements qui lui sont communiqués et, sur le fondement de cette communication, saisir le procureur de la République.

Le paragraphe IX nouveau de l'article 11 du projet de loi tend à modifier les règles d'information des déclarants à TRACFIN sur les suites données à leur déclaration en cas de saisine du procureur de la République.

Depuis la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, l'article L. 562-6 du code monétaire et financier prévoit que TRACFIN peut, à la demande des déclarants, leur indiquer s'il a saisi le procureur de la République sur le fondement de cette déclaration.

Désormais, cette information serait systématique en cas de saisine du procureur de la République. Un décret en Conseil d'Etat devra en déterminer les modalités.

Le paragraphe X nouveau de l'article 11 du projet de loi a pour objet de modifier l'article L. 563-5 du code monétaire et financier, qui prévoit, depuis la loi sur les nouvelles régulations économiques, que TRACFIN peut recevoir des officiers de police judiciaire et des autorités de contrôle, ainsi que des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics toutes les informations nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

Désormais, les organismes visés à l'article L. 134-1 du code des juridictions financières, c'est-à-dire les organismes de sécurité sociale, pourraient également fournir des informations.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 11 ainsi modifié .

SECTION 5
Dispositions relatives à la contrefaçon

Cette nouvelle section a été insérée à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, avec les avis favorables du rapporteur de la commission des Lois et du Gouvernement, par coordination avec l'insertion d'un article additionnel après l'article 11 tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon.

Article 11 bis
(art. L. 335-2, L. 335-4, L. 343-1, L. 521-4, L. 615-14, L. 632-32, L. 716-9
et L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle)
Dispositions relatives aux délits de contrefaçon

Cet article additionnel introduit à l'initiative de M. François d'Aubert, rapporteur pour avis de la commission des Finances, avec les avis favorables du rapporteur de la commission des Lois et du Gouvernement, vise à renforcer la lutte contre la contrefaçon.

1. Une progression inquiétante de la contrefaçon

La contrefaçon constitue la reproduction ou l'utilisation totale ou partielle d'une marque, d'un dessin, d'un modèle, d'un brevet ou d'un droit d'auteur sans l'autorisation de son titulaire.

Selon l'OCDE 118 ( * ) , elle génère 250 milliards d'euros de revenus illégaux et représente 5 à 7 % du commerce mondial. Elle est ainsi passée d'une activité artisanale à une logique de plus en plus élaborée, industrielle, mondialisée et criminelle car bien souvent elle finance des trafics de stupéfiants, d'armes ou le terrorisme, ainsi que l'a indiqué la commission économique de l'OTAN 119 ( * ) . Le plan en faveur de la propriété industrielle présenté le 28 novembre 2002 par la ministre déléguée à l'industrie souligne d'ailleurs que « la contrefaçon est devenue l'un des soutiens majeurs de la grande criminalité ».

Or, la contrefaçon porte atteinte, outre au chiffre d'affaires et aux parts de marché des entreprises, tout en annihilant leurs efforts en recherche et développement, à la santé et à la sécurité des consommateurs, s'agissant notamment des contrefaçons de médicaments, de jouets ou de pièces détachées de véhicules, ainsi qu'à l'emploi et aux ressources fiscales des pays victimes On estime ainsi qu'elle conduit à la suppression chaque année de 38.000 emplois en France et que cette économie souterraine représenterait 6 milliards d'euros en France.

Le 19 juin étant la journée mondiale contre la contrefaçon, une campagne d'information nationale est organisée depuis début juin par les entreprises du luxe réunis au sein du comité Colbert et les services des douanes.

En effet, la situation se dégrade rapidement. Le nombre de faux saisis en Europe a bondi de 900 % entre 1998 et 2001 pour dépasser les cent millions d'articles. En 2002, les seules douanes françaises ont intercepté 1.272.433 produits contrefaits. Du 1 er janvier au 15 mai 2003, on constate une hausse de 180 % par rapport à la même période de 2002.

De plus, la contrefaçon ne se limite plus désormais aux produits de luxe. Un compact-disc vendu sur trois dans le monde, 12 % du commerce mondial des jouets, 5 à 10 % des pièces de rechange de véhicules dans l'Union européenne sont piratés.

2. Le renforcement de la lutte contre la contrefaçon

Le présent article vise à modifier le code de la propriété intellectuelle afin d'adapter l'arsenal pénal à l'ampleur du phénomène. Outre un renforcement général des peines, il prévoit une aggravation spécifique lorsque les infractions sont commises en bande organisée.

Pour la contrefaçon d'écrit, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production protégée par les droits d'auteur (article L. 335-2 du code de la propriété intellectuelle), pour la reproduction d'une prestation, d'un phonogramme, vidéogramme ou programme (article L. 335-4 du même code), de bases de données (article L. 343-1 du même code), de dessins et modèles (article L. 521-4 du même code) et de brevets d'invention (article L. 615-14 du même code), les peines seraient portées de deux à trois ans d'emprisonnement et de 150.000 à 300.000 euros d'amende . Cette augmentation permettra en application de l'article 143-1 du code de procédure pénale le placement en détention provisoire.

En outre, les peines seraient portées à cinq ans d'emprisonnement et 500.000 euros en cas de commission des délits en bande organisée . Cette aggravation permettra d'appliquer, conformément à l'article 706-64 nouveau du code de procédure pénale, la procédure prévue pour la délinquance et la criminalité organisées.

S'agissant de la contrefaçon de certificat d'obtention végétale (article L. 623-32 du code de la propriété intellectuelle), l'amende passe de 3.750 à 10.000 euros. La peine de six mois d'emprisonnement prévue en cas de récidive dans les cinq ans serait étendue en cas de commission du délit en bande organisée.

Par ailleurs, la définition des délits de contrefaçon de marque (articles L. 716-9 et L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle) serait modifiée afin de punir de manière différenciée la vente de contrefaçons par des particuliers.

Actuellement, l'article L. 716-9 du code de la propriété intellectuelle punit de deux ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende quiconque aura reproduit, imité, utilisé, supprimé ou modifié une marque ou importé ou exporté des marchandises présentées sous une marque contrefaite.

L'article L. 716-10 du même code punit des mêmes peines quiconque aura détenu sans motif légitime des produits qu'il sait revêtus d'une marque contrefaite ou aura sciemment vendu, mis en vente, fourni ou offert de fournir des produits ou services sous une telle marque.

Le projet de loi vise à punir désormais de quatre ans d'emprisonnement et de 400.000 euros d'amende le fait pour toute personne, en vue de vendre, fournir, offrir à la vente ou louer des marchandises présentées sous une marque contrefaite, de se livrer à des actes de commerce, d'importation sous tout régime douanier, d'exportation, de réexportation, de transit ou de transbordement de marchandises présentées sous une marque contrefaite, de les produire industriellement ou de donner des instructions pour la commission de ces actes.

Les sanctions seraient portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500.000 euros d'amende lorsque les délits sont commis en bande organisée.

L'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle punirait désormais le fait pour toute personne de détenir sans motif légitime des marchandises présentées sous une marque contrefaite, de les offrir à la vente, de reproduire, imiter, utiliser, apposer, supprimer ou modifier une marque, de sciemment livrer un produit ou fournir un service autre que celui qui est demandé sous une marque enregistrée (mis à part le cas des médicaments génériques par les pharmaciens).

Les peines passeraient donc de deux ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende à trois ans d'emprisonnement et 300.000 euros d'amende.

En outre, comme pour les autres délits de contrefaçon, il serait créé une aggravation des peines (qui passeraient à cinq ans d'emprisonnement et 500.000 euros d'amende) lorsque les délits ont été commis en bande organisée, ce qui permettrait l'application des dispositions de la procédure prévue par l'article 706-74 du code de procédure pénale.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 11 bis sans modification .

CHAPITRE IV
DISPOSITIONS CONCERNANT LA LUTTE
CONTRE LES DISCRIMINATIONS

Les articles 12 A à 16 bis du projet de loi tendent à renforcer la lutte contre les discriminations raciales.

En effet, on observe depuis deux ans une augmentation inquiétante des violences racistes, xénophobes et antisémites (lieux de culte incendiés, personnes frappées ou insultées en raison de la couleur de leur peau ou de leur religion), directement liée à l'actualité française et internationale. Si la violence raciste vise majoritairement la population d'origine maghrébine, les actes antisémites connaissent une progression importante, d'ailleurs soulignée par la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) dans son rapport d'activité pour l'année 2002 remis le 27 mars dernier au Premier ministre. Si les sentiments racistes semblent être moins partagés depuis 1995, leur expression est plus violente. En outre, ce phénomène concerne de plus en plus les jeunes, notamment dans les écoles.

Les textes réprimant le racisme, la xénophobie et les discriminations sont pourtant nombreux.

Au plan international ont été adoptées depuis la fin de la seconde guerre mondiale de nombreuses déclarations, recommandations ou conventions tendant à prohiber les discriminations raciales, ethniques ou religieuses, parmi lesquelles la charte des Nations Unies du 26 juin 1945 (article 1 er ), la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 (article 2), la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (article 14 120 ( * ) ), la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (article 3), la Convention internationale du 7 mars 1966 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale (préambule) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 (article 2).

Cette préoccupation a également été prise en compte au niveau de l'Union européenne , par le traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne 121 ( * ) , puis le traité sur l'Union européenne 122 ( * ) .

Depuis juin 1997, un observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes situé à Vienne doit permettre l'échange d'informations et d'expériences dans ce domaine.

En outre, la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique a défini un cadre minimal afin d'interdire la discrimination fondée sur la race ou l'origine ethnique et d'en protéger juridiquement les victimes, qui doivent pouvoir avoir recours à une procédure administrative et judiciaire pour faire valoir leur droit à l'égalité de traitement. La charge de la preuve incombe au défendeur lorsque le plaignant « établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ».

La directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail tend pour sa part à interdire les discriminations directes et indirectes sur le lieu de travail.

Par ailleurs, une proposition de décision-cadre présentée le 28 novembre 2001 par la Commission européenne concernant la lutte contre le racisme et la xénophobie -et encore en cours de discussion- définit le racisme et la xénophobie comme « la croyance dans la race, la couleur, l'ascendance, la religion ou les convictions, l'origine nationale ou l'origine ethnique en tant que facteur déterminant de l'aversion envers des individus ou des groupes », et tend à imposer aux Etats membres d'ériger en infractions pénales une série de comportements intentionnels, tels que l'incitation publique à la violence ou à la haine, les insultes ou menaces à caractère raciste ou xénophobe, l'apologie publique de crimes contre l'humanité, le négationnisme, ainsi que la diffusion ou la distribution de tout contenu comportant des propos racistes ou xénophobes, y compris sur Internet.

En France , la prohibition du racisme et des discriminations fait partie du bloc de constitutionnalité, puisque le préambule de la Constitution de la IVème République adoptée le 27 octobre 1946, auquel fait référence la Constitution de la Vème République, déclare : « Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés ». De plus, en 1958, dans le contexte de la décolonisation, a été ajouté à l'article 1 er que : « La France (...) assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion ».

Ce n'est qu'avec la loi n° 72-546 du 1 er juillet 1972 réprimant directement les agissements discriminatoires qu'ont été érigés en infractions certains actes commis à raison de « l'origine ou de l'appartenance ou de la non appartenance [d'une personne] à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ». Les phénomènes racistes et discriminatoires ayant d'abord été abordés sous l'angle de la sanction des abus de la parole ou de l'écrit propagés dans le public, ces dispositions ont été insérées dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse .

Les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse relatives aux discriminations

Son article 24 punit d'un an d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende ceux qui auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

L'article 24 bis de cette loi, qui résulte de la loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe punit en outre d'un an d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende ceux qui auront contesté l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité tels que définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international de Nuremberg. La Cour de cassation 123 ( * ) a estimé que cet article entre dans le champ des exceptions prévues par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif à la liberté d'expression 124 ( * ) .

Les articles 32 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 sanctionnent la diffamation et l'injure publique commises envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Ils ont motivé de nombreuses procédures, généralement à l'initiative d'associations habilitées à exercer les droits de la partie civile.

En effet, l'article 48-1 de cette loi permet aux associations de lutte contre le racisme d'exercer les droits reconnus à la partie civile pour les infractions de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciales, de diffamation et d'injures publiques à caractère racial, l'association devant avoir l'accord des personnes lorsque l'infraction est commise envers des personnes considérées individuellement. L'article 48-2 permet pour sa part aux associations défendant les intérêts moraux et l'honneur de la Résistance ou des déportés d'exercer les droits reconnus à la partie civile, notamment s'agissant de l'infraction de contestation de l'existence d'un crime contre l'humanité.

Néanmoins, ces délits ne sont constitués que s'ils sont commis « soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par tout moyen de communication audiovisuelle ».

Condamnations prononcées sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881

1997

1998

1999

2000

2001*

Provocation à la discrimination nationale, sociale, religieuse (art. 24)

3

7

15

7

15

Contestation de l'existence du crime contre l'humanité (art. 24 bis)

1

3

2

3

2

Diffamation en raison de la race, la religion ou l'origine (art. 32)

2

1

3

3

9

Injure publique en raison de la race, la religion ou l'origine (art. 33)

83

83

82

98

106

* Provisoire

Source : Casier judiciaire.

En revanche, les diffamations ou injures non publiques commises envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée sont punies de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe par les articles 624-3 et 624-4 du code pénal.

Les dispositions du code pénal relatives aux discriminations

Le nouveau code pénal a regroupé l'ensemble des discriminations dans le Livre II parmi les « atteintes à la dignité de la personne » et créé de nouvelles infractions renforçant la répression des délits racistes (responsabilité des personnes morales, aggravation du délit de profanation des sépultures, incrimination des crimes contre l'humanité).

Le génocide, qui figure parmi les crimes contre l'humanité, est défini comme un « plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux », et puni de la réclusion criminelle à perpétuité. L'article R. 645-1 du code pénal punit de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe le port ou l'exhibition en public d'un uniforme, un insigne ou un emblème rappelant ceux portés par les membres d'une organisation déclarée criminelle par le tribunal de Nuremberg ou toute personne reconnue coupable de crime contre l'humanité.

Comme en matière de délits de presse, les associations de lutte contre le racisme peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile pour certaines infractions : discriminations, atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne (meurtre, tortures et actes de barbarie, violences, menaces), ainsi que les destructions ou dégradations de biens.

L'article 225-1 du code pénal définit la discrimination comme une distinction opérée entre les personnes « à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

L'article 225-2 la punit de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende lorsqu'elle consiste à refuser la fourniture d'un bien ou d'un service, à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque, à refuser d'embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne, à subordonner la fourniture d'un bien ou d'un service à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1, à subordonner une offre d'emploi, une demande de stage ou une période de formation en entreprise à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1, à refuser d'accepter une personne à certains stages.

Condamnations prononcées sur le fondement
de l'article 225-2 du code pénal

1997

1998

1999

2000

2001*

Discrimination dans l'offre ou la fourniture d'un bien ou d'un service à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

1

2

2

4

Discrimination dans l'offre ou la fourniture d'un bien ou d'un service à raison de la race

2

9

0

5

1

Discrimination dans une offre d'emploi à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

1

0

1

1

Discrimination dans une offre d'emploi à raison de la race

1

1

1

7

1

Refus d'embauche à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

2

2

0

2

Refus d'embauche à raison de la race

0

0

1

1

0

Licenciement à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

1

0

0

0

0

Entrave à l'exercice d'une activité économique à raison de l'origine, l'ethnie ou la nationalité

0

1

1

0

0

Entrave à l'exercice d'une activité économique à raison de la race

0

0

0

0

1

* Provisoire

Source : Casier judiciaire

L'article 432-7 du code pénal punit de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende la discrimination commise à l'égard d'une personne physique ou morale par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, lorsqu'elle consiste à refuser le bénéfice d'un droit accordé par la loi ou à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque.

Enfin, la loi n° 2001-1066 du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations a modifié le code du travail afin de transposer les directives adoptées à la suite du Conseil européen de Tampere, et sanctionner les comportements discriminatoires lors d'un recrutement, dans le cadre du pouvoir disciplinaire de l'employeur ou encore dans le cadre du règlement intérieur de l'entreprise ou d'une convention collective. En cas de litige, l'article L. 122-45 du code du travail opère un renversement de la charge de la preuve , la partie défenderesse devant prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination au vu des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte présentés.

Ont été mises en place des structures spécifiques de lutte contre le racisme et de soutien aux victimes de discriminations raciales :

- le GELD (Groupement d'études et de lutte contre les discriminations) conduit et centralise les études et les données statistiques afin de mieux identifier les phénomènes racistes et d'en combattre les causes. Il gère en outre le numéro d'appel 114 mis en service en mai 2000, qui permet aux victimes ou aux témoins de discriminations de signaler des cas ou des pratiques qui leur semblent discriminatoires 125 ( * ) ;

- les CODAC (commissions départementales d'accès à la citoyenneté), créées en janvier 1999, lieux d'écoute et de conseil, mettent en place les programmes départementaux de lutte contre les discriminations et l'exclusion.

Les récentes avancées

Au vu de l'ampleur des cas de discrimination signalés, le Président de la République a annoncé le 14 octobre dernier la mise en place d'une autorité administrative indépendante de lutte contre toutes les formes de discrimination, préconisée par le Haut conseil à l'intégration dès 1998.

De même, le 21 mars dernier, à l'occasion de la journée pour l'élimination de la discrimination raciale, le garde des sceaux a adressé une circulaire aux procureurs généraux afin de réprimer systématiquement et avec sévérité les actes de discrimination raciale, qui portent atteinte « à la nécessaire cohésion de la Nation et au respect du pacte républicain » 126 ( * ) .

Encore récemment, le droit positif ne prenait pas en compte le fait que le délit soit commis « à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, des personnes décédées à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » comme élément constitutif d'une infraction de droit commun ou comme une circonstance aggravante de l'infraction commise (sauf en ce qui concerne la profanation de sépulture et l'atteinte à l'intégrité du cadavre réprimées à l'article 225-18).

Or, la Commission européenne a présenté le 28 novembre 2001 une proposition de décision-cadre concernant la lutte contre le racisme et la xénophobie dont l'article 8 demande aux Etats membres de « faire en sorte que la motivation raciste et xénophobe puisse être considérée comme une circonstance aggravante dans la détermination de la sanction ».

La loi n° 2003-88 du 4 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe adoptée à l'initiative de MM. Pierre Lellouche et Jacques Barrot en a donc anticipé la transposition. Néanmoins, elle ne concerne que les infractions racistes ou relatives à la religion et laisse de côté les discriminations.

Le nouvel article 132-76 du code pénal prévoit que les peines encourues pour certains crimes ou délits sont aggravées « lorsque l'infraction est précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature portant atteinte à l'honneur ou la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

Cette aggravation concerne :

- le meurtre, alors passible de la réclusion criminelle à perpétuité (article 221-4) au lieu de trente années d'emprisonnement dans le régime de droit commun (article 221-1) ;

- les actes de torture ou de barbarie, passibles de vingt ans de réclusion criminelle (article 222-3) au lieu de quinze (article 222-1) ;

- les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, punies de vingt ans de réclusion criminelle (article 222-8) au lieu de quinze (article 222-7) ;

- les violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, passibles de quinze ans de réclusion criminelle (article 222-10) au lieu de dix (article 222-9) ;

- les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours, punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende (article 222-12) au lieu de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende (article 222-11) ;

- les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ayant entraîné aucune incapacité de travail, punies de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende (article 222-13) ;

- les destructions, dégradations ou détériorations de biens appartenant à autrui, punies de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende et de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende lorsque les faits sont commis à l'encontre d'un lieu de culte, d'un établissement scolaire, éducatif ou de loisirs ou d'un véhicule transportant des enfants (article 322-2) au lieu de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende (article 322-1) ;

- les destructions, dégradations ou détériorations de biens appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, punies de vingt ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende (article 322-8) au lieu de dix ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende (article 322-6).

Le présent projet de loi tend à compléter les dispositions récemment adoptées afin de poursuivre la politique menée par le Gouvernement en matière de lutte contre le racisme, la xénophobie et les discriminations.

Les mesures proposées par les articles 12 A à 16 bis ont pour objet :

- d'étendre le champ d'application de la circonstance aggravante créée par la loi du 3 février 2003 aux menaces, vols et extorsions, aux discriminations à caractère sexuel ainsi qu'aux refus d'accès dans des lieux accueillant du public ;

- de renforcer les peines encourues en cas de discrimination par des agents publics ou des personnes chargées d'une mission de service public ;

- d'allonger le délai de prescription de l'action publique pour certaines infractions à caractère raciste relevant de la loi du 29 juillet 1881.

La plupart de ces mesures avaient été préconisées par notre excellent collègue M. Patrice Gélard 127 ( * ) lors de l'examen de la loi du 3 février 2003.

SECTION 1
Dispositions relatives à la répression des discriminations et des atteintes
aux personnes ou aux biens présentant un caractère raciste
Article 12 A (nouveau)
(art. 132-76 du code pénal)
Circonstance aggravante liée au racisme

L'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement inséré un article additionnel avant l'article 12 visant à apporter une précision rédactionnelle à l'article 132-76 du code pénal introduit par la loi du 3 février 2003 précitée prévoyant une nouvelle circonstance aggravante liée au racisme, afin d'indiquer que cette circonstance aggravante ne s'applique qu'à certaines catégories d'infractions prévues par la loi .

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 12 A sans modification .

Article 12
(art. 222-18-1 et 222-18-2 nouveaux du code pénal)
Peines aggravées en matière de menaces
à caractère raciste ou discriminatoire

Les articles 12 et 13 du projet de loi visent à étendre le caractère aggravant des infractions à caractère raciste institué par la loi n° 2003-88 du 3 février 2003 aux menaces, aux vols et aux extorsions.

Il s'agissait là d'une préconisation de notre excellent collègue M. Patrice Gélard.

Le paragraphe II de l'article 12 tend à insérer dans le code pénal un nouvel article 222-18-1 prévoyant des peines aggravées pour les menaces proférées « à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

Ainsi, la menace réitérée ou matérialisée par un écrit, une image ou tout autre objet de commettre un crime ou un délit contre les personnes serait punie de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende au lieu de six mois d'emprisonnement et de 7.500 euros d'amende (premier alinéa de l'article 222-17 du code pénal).

La menace de mort (deuxième alinéa de l'article 222-18 du code pénal) ou celle de commettre un crime ou un délit contre les personnes avec ordre de remplir une condition (premier alinéa de l'article 222-18 du code pénal) serait punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende au lieu de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende.

Enfin, la menace de mort avec ordre de remplir une condition (deuxième alinéa de l'article 222-18 du code pénal) serait punie de sept ans d'emprisonnement et de 100.000 euros d'amende au lieu de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, de MM. André Vallini, Jean-Pierre Blazy, Jérôme Lambert, Jean-Yves Le Bouillonnec et les commissaires membres du groupe socialiste, ainsi que de M. Noël Mamère, Mme Martine Billard et M. Yves Cochet, et avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement tendant à étendre le champ de la circonstance aggravante prévue pour certaines infractions à caractère raciste aux menaces proférées à raison de l'orientation sexuelle vraie ou supposée de la victime, dans la logique des modifications apportées au code pénal par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure à l'initiative de M. Pierre Lellouche.

Le paragraphe I tend à procéder à une mesure de coordination consistant à déplacer le principe de la responsabilité des personnes morales en matière de menaces de l'article 222-18-1 à l'article 222-18-2 (nouveau).

Votre commission des Lois vous propose d' adopter l'article 12 sans modification .

Article 13
(art. 311-4 et 312-2 du code pénal)
Peines aggravées en matière de vols et extorsions
à caractère raciste ou discriminatoire

L'article 13 du présent projet de loi tend à aggraver les peines encourues en matière de vols et d'extorsions lorsqu'ils sont motivés par l'appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une race ou une religion déterminée ou de son orientation sexuelle, vraie ou supposée, la prise en compte de cette dernière motivation résultant d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur, et de MM. André Vallini, Jean-Pierre Blazy, Jérôme Lambert, Jean-Yves Le Bouillonnec et les commissaires membres du groupe socialiste.

Il s'agissait là encore d'une préconisation de notre excellent collègue M. Patrice Gélard.

Ainsi, un vol au mobile raciste ou discriminatoire serait passible de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende, au lieu de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende  (article 311-4 du code pénal), tandis qu'une extorsion, passible normalement de sept ans d'emprisonnement et de 100.000 euros d'amende, serait punie de dix ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende (article 312-2) si elle avait un fondement raciste ou discriminatoire.

Ces dispositions confortent donc la portée de la loi du 3 février 2003 et vont dans le sens d'une application plus complète de la proposition de décision-cadre du Conseil de l'Union européenne relative à la lutte contre le racisme et la xénophobie 128 ( * ) .

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 13 sans modification .

Article 14
(art. 225-2 et 432-7 du code pénal)
Renforcement de la répression à l'encontre des infractions
à caractère raciste ou discriminatoire

L'article 14 du projet de loi tend à aggraver les peines prévues à l'encontre des délits de discrimination et vise à instituer une circonstance aggravante lorsque lesdites infractions sont commises dans des lieux accueillant du public.

Le paragraphe I a pour objet de modifier et de compléter l'article 225-2 du code pénal.

- Le 1) vise à aggraver les sanctions prévues à l'encontre des faits de discrimination 129 ( * ) visés à l'article 225-2 du code pénal, c'est-à-dire le refus de fourniture d'un bien ou d'un service, l'entrave à l'exercice normal d'une activité économique, la subordination de la fourniture d'un bien ou d'un service, d'un emploi, d'un stage ou d'une formation à une condition fondée sur la race, la religion, l'orientation sexuelle, le sexe ou l'âge. Les peines seraient portées de deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende à trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende.

- Le 2) tend à compléter l'article 225-2 afin de prévoir que lorsqu'un « refus discriminatoire » est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d'en interdire l'accès, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.

Comme l'indiquait notre excellent collègue M. Patrice Gélard, les opérations de « testing » conduites ces dernières années par certaines associations à l'entrée de discothèques, et admises comme mode de preuve par la Cour de cassation 130 ( * ) , ont montré que les comportements discriminatoires n'étaient pas rares dans les établissements accueillant du public.

De même, le paragraphe II tend à aggraver les peines prévues par l'article 432-7 du code pénal en cas de discrimination commise par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, lorsqu'elle consiste à refuser le bénéfice d'un droit accordé par la loi ou à entraver l'exercice normal d'une activité économique. Les peines seraient portées de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 14 sans modification .

Article 15
(art. 2-1 du code procédure pénale)
Constitution de partie civile par certaines associations

Cet article tend à modifier les règles relatives à l'exercice par les associations combattant le racisme ou assistant les victimes de discriminations des droits reconnus à la partie civile.

Le 1° vise à compléter la liste des infractions pour lesquelles ce droit peut s'exercer, afin de viser les vols et les extorsions, par coordination avec les dispositions prévues par l'article 13 du projet de loi.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement prévoyant que ce droit peut également être exercé s'agissant des menaces, par coordination avec les dispositions prévues à l'article 14 du projet de loi.

En outre, le 2° tend à préciser dans l'article 2-1 du code de procédure pénale que lorsque l'infraction a été commise envers une personne considérée individuellement, l'association doit justifier avoir reçu l'accord de la personne intéressée ou, si celle-ci est mineure, celui du titulaire de l'autorité parentale ou du représentant légal, lorsque cet accord peut être recueilli.

La subordination de l'action de l'association à l'accord de la victime est déjà prévue s'agissant de la lutte contre les violences sexuelles (article 2-2 du code de procédure pénale), contre la violence faite aux enfants (article 2-3 du code de procédure pénale), ou contre les discriminations fondées sur le sexe ou les moeurs (article 2-6 du code de procédure pénale).

De plus, l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prévoit déjà que les associations ne peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne la diffamation (deuxième alinéa de l'article 32) et l'injure (troisième alinéa de l'article 33) qu'avec l'accord de la victime.

Cette règle du consentement de la victime ne s'applique que si celle-ci est une personne physique.

A l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 15 ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions procédurales relatives à la répression
des messages racistes ou xénophobes
Article 16
(art. 65-3 nouveau de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse)
Modification du délai de prescription
pour les messages racistes ou xénophobes publiés par voie de presse

En 1996, M. Jacques Toubon, alors garde des Sceaux, avait proposé dans un projet de loi 131 ( * ) de retirer de la loi de 1881 les infractions de provocation, de diffamation et d'injure raciales pour les insérer dans le code pénal. Il estimait en effet que leur insertion dans la loi sur la presse imposait le respect de règles de procédure spécifiques, comme le délai de prescription de trois mois (contre trois ans pour les délits de droit commun), qui a souvent pour conséquence, s'agissant d'écrits racistes ou xénophobes diffusés en faible nombre, d'empêcher le parquet ou les associations habilitées de réagir en temps utile pour engager des poursuites.

Si ce projet de loi n'a jamais été discuté, notre excellent collègue M. Patrice Gélard avait, lors de l'examen de la loi du 8 février 2003 précitée, préconisé de réexaminer l'opportunité d'exclure de la loi sur la presse les provocations, diffamations et injures raciales, ou du moins de prévoir des règles spécifiques de prescription concernant les infractions à caractère raciste.

Actuellement, l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 prévoit que « l'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescriront après trois mois révolus à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait ».

Le présent article tend à insérer un article 65-3 nouveau dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse portant ce délai de prescription de trois mois à un an en ce qui concerne les délits suivants commis par voie de presse ou par tout autre moyen de publication :

- la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (huitième aliéna de l'article 24) ;

- la contestation de l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité (article 24 bis) ;

- la diffamation à raison de l'origine ou de l'appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion (deuxième alinéa de l'article 32) ;

- l'injure à raison de l'origine ou de l'appartenance ou de la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion (troisième alinéa de l'article 33).

La question d'une remise en cause, même marginale, de la loi de 1881 sur la liberté de la presse est très sensible. Néanmoins, ainsi que l'a souligné le garde des Sceaux lors de l'examen à l'Assemblée nationale de cet article, il ne s'agit là que d'une modification très limitée de la loi de 1881, qui vise à réprimer plus efficacement des infractions extrêmement graves en matière de racisme et de xénophobie (et d'ailleurs punies de peines d'emprisonnement, à la différence de la quasi-totalité des autres infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881).

Cette modification s'avère indispensable du fait de l'évolution technologique et du développement d'Internet, qui entraîne une augmentation exponentielle des informations diffusées. Or, du fait des spécificités du réseau Internet (consultation continue après la première mise en ligne, publication spontanée de messages par des journalistes auto-proclamés, caractère plus ou moins confidentiel de certains sites notamment), il est extrêmement difficile de repérer tous les messages à caractère raciste ou xénophobe dans le délai de trois mois prévu.

Or, la Cour de cassation a, dans plusieurs arrêts rendus en 2001, estimé que le point de départ du délai de prescription de l'action publique prévu par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 devait être fixé, s'agissant d'Internet, à la date du « premier acte de publication » comme pour la presse traditionnelle sur un support écrit, celle-ci étant celle à laquelle le message avait été mis pour la première fois à la disposition des utilisateurs du réseau 132 ( * ) .

La modification apportée par le présent projet de loi apparaît donc indispensable.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative du rapporteur M. Jean-Luc Warsmann, et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement de rectification d'une erreur matérielle.

Par un amendement , votre commission des Lois vous propose de déplacer ces dispositions avant l'article 65-2 de la loi de 1881 relatif à l'imputation sur un fait susceptible de revêtir une qualification pénale.

Le présent projet de loi contribue donc à renforcer la lutte contre le racisme et les discriminations. En outre, le paragraphe III de l'article 84 du projet de loi tend à modifier la loi n° 2003-88 du 3 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe, afin d'étendre son application à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna et à Mayotte.

Il conviendrait en outre que la France transpose intégralement les directives communautaires relatives à la lutte contre les discriminations, en particulier la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes, sans distinction de race ou d'origine ethnique. Cette directive, qui impose un aménagement de la charge de la preuve, couvre un champ d'application très vaste puisqu'elle vise les discriminations à raison de la race et de l'origine ethnique, non seulement dans le domaine de l'emploi, mais également dans les domaines de la protection sociale, des avantages sociaux, de l'éducation et de l'accès aux biens et services.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 16 ainsi modifié .

Division additionnelle après l'article 16
Dispositions concernant la prévention et la répression des infractions sexuelles

Votre commission vous soumet un amendement destiné à insérer une division additionnelle après l'article 16, consacrée à la prévention et à la répression des infractions sexuelles.

Article additionnel après l'article 16
(art. 131-36-1 du code pénal)
Allongement de la durée du suivi socio-judiciaire

La mesure de suivi socio-judiciaire a été introduite dans notre droit par la loi n°98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles.

Le suivi socio-judiciaire, qui peut être prononcé en cas de condamnation pour certaines infractions sexuelles, emporte pour le condamné l'obligation de se soumettre, sous le contrôle du juge de l'application des peines et pendant une durée déterminée par la juridiction de jugement, à des mesures de surveillance et d'assistance destinées à prévenir la récidive.

La durée du suivi socio-judiciaire ne peut excéder dix ans en cas de condamnation pour délit ou vingt ans en cas de condamnation pour crime.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 16, afin d'augmenter la durée de la mesure de suivi socio-judiciaire. Il s'agit de prévoir :

- qu'en matière correctionnelle, la durée du suivi socio-judiciaire peut être portée à vingt ans par décision spécialement motivée de la juridiction de jugement ;

- que lorsque le crime est puni de trente ans de réclusion criminelle, la durée du suivi socio-judiciaire est de trente ans ;

- que lorsque le crime est puni de la réclusion criminelle à perpétuité, la cour d'assises peut décider que le suivi socio-judiciaire s'appliquera sans limitation de durée.

Article additionnel après l'article 16
(art. 706-47 et 706-47-1 nouveau du code de procédure pénale)
Organisation des dispositions relatives aux infractions sexuelles

Par un amendement ultérieur, votre commission vous proposera la création, dans le code de procédure pénale, d'un fichier des auteurs d'infractions sexuelles.

Par un amendement , elle vous propose d'insérer un article additionnel après l'article 16 pour apporter des modifications formelles au titre du code de procédure pénale consacré aux infractions sexuelles, afin qu'il comporte désormais deux chapitres, l'un consacré à des dispositions générales, l'autre au fichier des auteurs d'infractions sexuelles.

Votre commission vous propose en outre d'étendre le champ de la procédure applicable en matière d'infractions sexuelles aux délits de harcèlement sexuel et de recours à la prostitution d'un mineur, qui n'y figurent pas actuellement.

Article additionnel après l'article 16
(art. 706-53-1 à 706-53-5 du code de procédure pénale)
Fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 16 pour créer un fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles.

Des affaires récentes ont montré que les dispositifs en vigueur ne permettaient pas de connaître l'adresse de personnes condamnées pour des infractions sexuelles après l'accomplissement de leur peine.

Votre commission propose en conséquence la création d'un fichier spécifique qui, dans un souci d'efficacité, serait géré par le casier judiciaire. Ce fichier accueillerait les condamnations pour les infractions sexuelles énumérées à l'article 706-47 du code de procédure pénale.

Le fichier mentionnerait l'adresse ou la dernière adresse connue des condamnés. Les informations figurant dans le fichier seraient conservées pendant une durée de quarante ans à compter de la date de la décision judiciaire, y compris en cas d'amnistie ou de réhabilitation.

Les informations contenues dans le fichier seraient accessibles aux magistrats, aux officiers de police judiciaire pour les enquêtes portant sur des infractions sexuelles et aux préfets pour l'examen des demandes d'agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs.

Les modalités de fonctionnement du fichier seraient déterminées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

Article additionnel après l'article 16
(art. 706-56 du code de procédure pénale)
Prélèvements d'empreintes génétiques

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 16 pour renforcer les règles relatives aux prélèvements d'empreintes génétiques.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 706-56 du code de procédure pénale dispose que l'officier de police judiciaire peut procéder ou faire procéder sous son contrôle, à l'égard de certains condamnés ou de certains suspects, à un prélèvement biologique destiné à permettre l'analyse d'identification de leur empreinte génétique.

Le refus de se soumettre au prélèvement biologique est puni d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende. Ces peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende lorsque la personne est condamnée pour crime.

Le présent article additionnel tend à renforcer l'efficacité de ces dispositions en prévoyant :

-la possibilité d'effectuer un prélèvement sans le consentement de l'intéressé lorsqu'il s'agit d'un condamné pour crime ;

- la possibilité d'identifier l'empreinte génétique d'une personne à partir de matériel biologique qui se serait naturellement détaché du corps de l'intéressé ;

- la création d'une incrimination sanctionnant le fait pour une personne faisant l'objet d'un prélèvement de commettre ou de tenter de commettre des manoeuvres destinées à substituer à son propre matériel biologique le matériel biologique d'une tierce personne.

Division additionnelle avant l'article 16 bis
Dispositions diverses

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer après l'article 16 du projet de loi un nouveau chapitre appelé à accueillir des dispositions diverses, en particulier l'article 16 bis du projet, inséré par l'Assemblée nationale et qui est sans rapport avec le chapitre sur les discriminations dans lequel il figure pourtant.

Article 16 bis
(art. 314-2 du code pénal)
Circonstances aggravantes en cas d'abus de confiance

Cet article additionnel résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale avec les avis favorables tant du rapporteur que du Gouvernement sur proposition de M. Guy Geoffroy, visant à prévoir deux nouvelles circonstances aggravantes pour le délit d'abus de confiance, défini à l'article 314-1 du code pénal comme le fait pour une personne de détourner au préjudice d'autrui des valeurs ou un bien qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé.

Normalement puni de trois ans d'emprisonnement et de 375.000 euros d'amende, l'abus de confiance est, en vertu de l'article 314-2, passible de sept ans d'emprisonnement et de 750.000 euros d'amende lorsqu'il est réalisé par une personne qui fait appel au public afin d'obtenir la remise de fonds ou par toute autre personne qui de manière habituelle se livre ou prête son concours, même à titre accessoire, à des opérations portant sur les biens de tiers pour le compte desquels elle recouvre des fonds ou des valeurs.

Le fait de réaliser un abus de confiance au préjudice, d'une part, d'une association faisant appel au public en vue de la collecte de fonds à des fins d'entraide humanitaire ou sociale, d'autre part, d'une personne particulièrement vulnérable (du fait de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse) constituerait désormais une circonstance aggravante.

Il s'agit d'une mesure de cohérence visant à prévoir des peines similaires à celles prévues en matière d'escroquerie par l'article 313-2 du code pénal et à prendre en compte les nouveaux seuils institués pour la détention provisoire.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 16 bis sans modification .

Article additionnel après l'article 16 bis
(art. 32-1 nouveau, 36 et 37 de la loi du 29 juillet 1881
sur la liberté de la presse, art.2 de la loi du 2 juillet 1931 modifiant l'article 70 du code d'instruction criminelle)
Offenses aux chefs d'Etat étrangers - Divulgation d'informations
relatives à une constitution de partie civile

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel pour modifier la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

Cet amendement vise à mettre notre droit en conformité avec les exigences de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, grâce à l'abrogation de plusieurs délits de presse jugés contraires à cette convention et qui ont donné lieu à plusieurs condamnations de la France.

Il s'agit d'une part des délits d'offense ou d'outrages aux chefs d'Etat étrangers et aux diplomates étrangers prévus par les articles 36 et 37 de la loi de 1881, d'autre part du délit prévu par l'article 2 de la loi du 2 juillet 1931 qui réprime le fait de publier des informations sur une plainte avec constitution de partie civile avant toute décision judiciaire, délit dont la Cour de cassation a demandé l'abrogation dans son rapport annuel pour 2001.

En contrepartie de l'abrogation du délit de publication d'informations sur une plainte avec constitution de partie civile, le présent article additionnel tend à aggraver la répression de la diffamation lorsqu'elle est accompagnée d'informations sur une plainte avec constitution de partie civile.

La solution proposée permettra une discussion judiciaire sur la vérité des allégations diffamatoires, à la différence de l'incrimination existante, ce qui a conduit à la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme.

TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACTION PUBLIQUE,
AUX ENQUÊTES, À L'INSTRUCTION, AU JUGEMENT
ET À L'APPLICATION DES PEINES
CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES À L'ACTION PUBLIQUE

SECTION 1
Dispositions générales
Article 17
(art. 30 du code de procédure pénale)
Attributions du ministre de la justice en matière de politique pénale

Dans notre droit, le ministère public, confié à des magistrats spécialisés et chargés d'exercer l'action publique et de requérir l'application de la loi, a un rôle charnière entre le pouvoir exécutif et les juges.

Son organisation est hiérarchisée sous l'autorité du garde des Sceaux. L'article 5 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 dispose en effet que « les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l'autorité du garde des Sceaux, ministre de la justice ».

Au sein du code de procédure pénale, le rôle du garde des Sceaux n'est évoqué qu'à l'article 36, qui lui permet de « dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre, par instructions écrites et versées au dossier de la procédure, d'engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministre juge opportunes ».

Cette rédaction résulte de la loi n° 93-1073 du 24 août 1993, qui a précisé que les instructions devaient être écrites et versées au dossier.

Au cours de la précédente législature, le Gouvernement a proposé, dans un projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale, de modifier les dispositions du code de procédure pénale relatives à l'action publique en consacrant la possibilité pour le garde des Sceaux d'adresser des orientations générales de politique pénale aux procureurs généraux tout en lui interdisant de leur adresser des instructions individuelles. En contrepartie, le texte proposait que le garde des Sceaux se voie reconnaître un droit d'action propre lui permettant de mettre en mouvement l'action publique.

Lors de l'examen de ce projet de loi, le Sénat avait estimé inconcevable qu'aucune autorité à compétence nationale ne puisse plus exercer la coordination de l'action publique et avait en conséquence -face au refus du Gouvernement d'assurer cette mission- proposé de créer un procureur général de la République, susceptible de donner des instructions générales et individuelles aux procureurs généraux.

Pour sa part, notre excellent collègue M. Robert Badinter avait relevé que, dans un monde où se développait la criminalité organisée nationale et surtout internationale, l'exercice de l'action publique impliquait unité, hiérarchie et responsabilité. Soulignant qu'il était possible de s'interroger sur l'importance de la criminalité organisée dans la future Europe élargie, il avait affirmé qu'« il était de la responsabilité du garde des Sceaux d'exercer l'action publique et qu'il devait en être responsable devant l'opinion publique » 133 ( * ) .

Le projet de loi a finalement été abandonné en même temps que le projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature.

Le présent article tend à consacrer et à définir le rôle du garde des Sceaux dans l'action publique. A cet effet, il a pour objet d'insérer un chapitre Ier bis, relatif aux attributions du garde des Sceaux, ministre de la justice, dans le titre I (Des autorités chargées de l'action publique et de l'instruction) du livre premier (De l'exercice de l'action publique et de l'instruction) du code de procédure pénale.

Ce nouveau chapitre se composerait d'un unique article. L'article 30, qui concernait les missions de police des préfets en cas de déclaration d'état d'urgence et a été abrogé par la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 réformant la procédure pénale, serait rétabli pour prévoir que « le garde des Sceaux, ministre de la justice, veille à la cohérence de l'application de la loi pénale sur l'ensemble du territoire de la République ».

Un tel dispositif, qui définit le rôle du garde des Sceaux en matière d'action publique, est particulièrement bienvenu.

Le texte proposé s'inscrit parfaitement dans le cadre des dispositions de l'article 20 de la Constitution, aux termes duquel « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation ».

Jusqu'à présent, le rôle du garde des Sceaux n'est évoqué dans le code de procédure pénale qu'à travers l'un des moyens (les instructions individuelles) dont il dispose pour assurer la cohérence de l'application de la loi pénale. La définition de son rôle dans la conduite de l'action publique est donc une évolution positive.

Pour conduire son action, le garde des Sceaux peut adresser, conformément à l'article 36 du code de procédure pénale, des instructions individuelles, écrites et versées au dossier, aux procureurs généraux.

D'après les informations transmises à votre rapporteur, au cours des derniers mois, le garde des Sceaux a fait usage de cette possibilité à plusieurs reprises dans des affaires de pollution maritime, d'importation irrégulière de produits phytosanitaires, de discrimination fondée sur l'appartenance nationale ou la religion, de santé publique, de terrorisme et de suspension de peine pour raison médicale.

Il peut également adresser aux procureurs généraux des orientations générales par voie de circulaires.

Les circulaires de politique pénale
adressées aux parquets depuis mai 2002

- circulaire du 29 mai 2002 sur la mise en place des groupes d'intervention régionaux (GIR) ;

- circulaire du 10 juin 2002 sur la mise en place des groupes d'intervention régionaux et l'habilitation provisoire des OPJ ;

- circulaire du 10 juillet 2002 sur l'habilitation des OPJ en fonction dans les GIR ;

- circulaire du 24 juillet 2002 visant au renforcement des contrôles routiers ;

- circulaire du 2 octobre 2002 sur l'application de la loi d'amnistie du 6 août 2002 aux délits en matière de pêches maritimes ;

- circulaire du 16 octobre 2002 sur la pêche et la commercialisation de poissons « sous taille ou sous poids » ;

- circulaire du 23 octobre 2002 sur les accidents du travail et la sécurité et la santé des travailleurs ;

- circulaire du 7 novembre 2002 de présentation des dispositions portant réforme du droit pénal des mineurs et de certaines dispositions de droit pénal spécial résultant de la loi du 9 septembre 2002 ;

- circulaire du 8 novembre 2002 de présentation des dispositions de procédure pénale de la loi du 9 septembre 2002 ;

- circulaire du 22 novembre 2002 sur les entraves apportées à la circulation et aux autres infractions commises à l'occasion du conflit dans les transports ;

- circulaire du 27 novembre 2002 sur le décret du 5 juillet 2001 portant création du système de traitement des infractions constatées (STIC) ;

- circulaire du 5 décembre 2002 sur le traitement des infractions des « raves parties » ;

- circulaire du 13 décembre 2002 sur la politique pénale en matière de délinquance des mineurs ;

- circulaire du 18 décembre 2002 sur la politique pénale dans le domaine de la protection des intérêts financiers de l'Union européenne ;

- circulaire du 20 décembre 2002 relative à l'obtention de copies de pièces de procédure à la demande des administrations ;

- circulaire du 13 janvier 2003 sur le fichier automatisé des empreintes génétiques ;

- circulaire du 30 janvier 2003 sur le traitement judiciaire des infractions de nature sexuelle commises au préjudice des mineurs par le biais du réseau Internet ;

- circulaire du 17 février 2003 sur l'usage criminel de produits psycho-actifs ;

- circulaire du 4 mars 2003 sur la lutte contre le braconnage des anguilles ;

- circulaire du 6 mars 2003 relative à la création de commissions d'action publique en matière économique et financière ;

- circulaire du 21 mars 2003 relative à l'application des dispositions de l'article 322-4-1 du code pénal ;

- dépêche du 24 mars 2003 sur le suivi des mineurs placés en centre éducatif fermé ;

- circulaire du 27 mars 2003 sur l'article 8 de la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ;

- circulaire du 1 er avril 2003 sur la répression des infractions de pollution des eaux de mers par rejets volontaires des navires ;

- circulaire du 1 er avril 2003 sur les réponses judiciaires aux actes de violences commis au préjudice des agents de l'administration pénitentiaire ;

- circulaire du 16 avril 2003 sur les pêches maritimes ;

- circulaire du 7 mai 2003 sur la mise en oeuvre de l'article L. 10 B du livre des procédures fiscales ;

- circulaire du 13 mai 2003 sur la politique pénale en matière de lutte contre les fraudes à l'état civil ;

- circulaire du 2 juin 2003 sur la réforme de la compétence territoriale des services de police judiciaire ;

- circulaire du 3 juin 2003 de présentation des dispositions de la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure et de la loi du 3 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe ;

- circulaire interministérielle du 5 juin 2003 relative aux plis, colis et substances suspects ;

- circulaire du 11 juin 2003 sur les relations entre l'autorité judiciaire et les juridictions financières.

Par ailleurs, les gardes des Sceaux ont pris l'habitude, au cours des dernières années, de recevoir régulièrement les procureurs généraux et, plus rarement, les procureurs de la République.

Si votre commission approuve pleinement la consécration des attributions du garde des Sceaux dans le code de procédure pénale, elle s'interroge sur la lisibilité du système proposé. Alors que le rôle du garde des Sceaux serait défini dans un chapitre relatif à ses attributions, la possibilité d'adresser des instructions individuelles continuerait à figurer à l'article 36, au sein d'une section relative aux attributions du procureur général près la cour d'appel.

Par ailleurs, il est possible de se demander si le dispositif proposé est suffisamment complet dès lors qu'il n'évoque que la cohérence de la politique pénale sur l'ensemble du territoire. Or, il revient également au garde des Sceaux de définir des priorités en matière d'action publique , dans le respect des dispositions législatives en vigueur.

En 1997, la commission de réflexion sur la justice mise en place par le Président de la République avait proposé de consacrer la notion de politique d'action publique dans le code de procédure pénale :

« Un des axes de réflexion majeurs de la commission est l'introduction dans nos textes de la notion de « politique d'action publique ».

« Ce terme est choisi à dessein : « politique » au sens de manière concertée de répondre à des situations données, « action » au sens d'agir et non seulement de réagir à une situation imposée, ce qui suppose prévention, recherche des faits et appréciation de la suite la plus opportune à leur donner, « publique » au sens, d'une part, de référence à un ensemble plus large et, d'autre part, de transparence.

« Ce terme doit être préféré à « politique pénale » qui est trop réducteur car il laisse de côté toute l'activité civile, commerciale, sociale qui, par le retentissement qu'elle a parfois sur les équilibres d'une société, peut être d'une importance au moins égale à l'activité répressive. » 134 ( * )

Dans un souci de cohérence et de lisibilité, votre commission vous propose, par un amendement , de modifier et de compléter le texte proposé pour l'article 30 du code de procédure pénale, afin de :

- préciser que le garde des Sceaux conduit la politique d'action publique déterminée par le Gouvernement et qu'il veille à la cohérence de son application sur l'ensemble du territoire de la République.

- transférer dans cet article les dispositions relatives aux instructions individuelles du garde des Sceaux figurant aujourd'hui parmi les dispositions relatives aux procureurs généraux ;

- inscrire dans la loi la possibilité pour le garde des Sceaux d'adresser des instructions générales d'action publique aux magistrats du parquet. Ainsi, l'article 30 contiendrait une définition du rôle du garde des Sceaux en matière de politique pénale et préciserait les moyens mis à sa disposition pour exercer ses attributions (instructions générales et instructions individuelles).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 17 ainsi modifié .

Article 18
(art. 35 du code de procédure pénale)
Rôle des procureurs généraux en matière de politique pénale

Les attributions du procureur général près la cour d'appel sont actuellement définies par la section II du chapitre II (Du ministère public) du titre I (Des autorités chargées de l'action publique et de l'instruction) du livre premier (De l'exercice de l'action publique et de l'instruction) du code de procédure pénale.

Le procureur général représente le ministère public auprès de la cour d'appel et auprès de la cour d'assises constituée au siège de la cour d'appel (article 34 du code de procédure pénale). Il est chargé de veiller à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du ressort de la cour d'appel (article 35). Il a autorité sur tous les officiers du ministère public du ressort de la cour d'appel (article 37). Enfin, les officiers et agents de police judiciaire sont placés sous sa surveillance (article 38).

Dans sa rédaction actuelle, l'article 35, consacré aux attributions du procureur général, dispose dans son premier alinéa que celui-ci est chargé de veiller à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du ressort de la cour d'appel. Le deuxième alinéa prévoit que chaque procureur de la République lui adresse tous les mois un état des affaires de son ressort. Enfin, le texte précise, dans son troisième alinéa, que le procureur général a, dans l'exercice de ses fonctions, le droit de requérir directement la force publique.

Le présent article tend à préciser davantage les attributions des procureurs généraux en remplaçant les deux premiers alinéas de l'article 35 par trois nouveaux alinéas.

Le texte proposé prévoit tout d'abord que le procureur général veille non seulement à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du ressort de la cour d'appel, mais également au bon fonctionnement des parquets de son ressort .

Le texte précise que le procureur général anime et coordonne l'action des procureurs de la République ainsi que la conduite des différentes politiques publiques par les parquets de son ressort.

Enfin, le projet de loi tend à remplacer l'obligation faite aux procureurs d'adresser tous les mois au procureur général un état des affaires de leur ressort par une obligation pour le procureur de la République d'adresser au procureur général un rapport annuel sur l'activité et la gestion de son parquet ainsi que sur l'application de la loi.

Le dispositif proposé clarifie le rôle du procureur général, notamment en affirmant sa mission d'animation et de coordination de l'action des procureurs de la République.

Une disposition soulève néanmoins certaines interrogations. Le procureur général serait chargé d'animer et de coordonner « la conduite des différentes politiques publiques par les parquets de son ressort ».

Or, les parquets ne conduisent pas « différentes politiques publiques ». La seule politique qu'ils conduisent est la politique pénale ou politique d'action publique, sous l'autorité du garde des Sceaux et des procureurs généraux. Ils sont certes associés à d'autres politiques publiques, telles que les politiques de prévention de la délinquance, mais ils ne conduisent pas pour autant ces politiques.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer la référence à la coordination par le procureur général de la conduite des différentes politiques publiques par les parquets de son ressort, pour viser la conduite de la politique d'action publique.

Elle vous propose d'adopter l'article 18 ainsi modifié .

Article 19
(art. 37 du code de procédure pénale)
Injonction des procureurs généraux
en matière d'engagement des poursuites

Dans sa rédaction actuelle, l'article 37 du code de procédure pénale prévoit que le procureur général a autorité sur tous les officiers du ministère public du ressort de la cour d'appel et qu'à l'égard de ces magistrats, il a les mêmes prérogatives que celles reconnues au ministre de la justice par l'article 36, à savoir la possibilité d'adresser des instructions écrites et versées au dossier.

Les officiers du ministère public sont les représentants du ministère public qui exercent devant les tribunaux de police lors du jugement des contraventions des quatre premières classes. Leur rôle et leur statut sont définis par les articles 45 à 48 du code de procédure pénale.

Il s'agit en principe de commissaires de police, mais en cas d'empêchement, le procureur général désigne, pour une année entière, un ou plusieurs remplaçants qu'il choisit parmi les commissaires et les commandants ou capitaines de police en résidence dans le ressort du tribunal de grande instance.

Le présent article tend à compléter l'article 37 du code de procédure pénale pour prévoir que le procureur général peut enjoindre aux procureurs de la République, par instructions écrites et versées au dossier de la procédure, d'engager des poursuites, notamment à la suite d'un recours hiérarchique formé par la victime contre une décision de classement , ou de prendre des réquisitions qu'il juge opportunes. S'il estimait le recours infondé, le procureur général devrait en informer le requérant.

Le projet de loi initial prévoyait que le procureur général « peut notamment enjoindre au procureur de la République d'engager des poursuites à la suite d'un recours hiérarchique formé par la victime contre une décision de classement ». L'Assemblée nationale a préféré une rédaction plus proche de celle prévue par l'article 36 du code de procédure pénale, relatif aux instructions données par le garde des Sceaux aux procureurs généraux.

Le dispositif proposé constitue en fait une consécration du droit actuel, les procureurs généraux ayant autorité sur les procureurs de la République. Il soulève néanmoins quelques difficultés :

- il apparaît inopportun d'insérer les dispositions relatives aux instructions adressées par les procureurs généraux aux procureurs à la fin de l'article 37, consacré à l'autorité des procureurs généraux sur les officiers du ministère public ;

- de même, la mention du recours hiérarchique, qui peut être formé contre une décision de classement sans suite, à l'intérieur d'un article sur les instructions données par le procureur général n'apparaît pas satisfaisante ;

- enfin, le texte proposé ne précise pas que les réquisitions que les procureurs généraux peuvent enjoindre aux procureurs de prendre doivent être écrites, alors que cette mention est prévue en ce qui concerne les réquisitions que le garde des Sceaux peut enjoindre aux procureurs généraux de prendre.

En conséquence, votre commission vous propose de modifier le dispositif. Par un amendement , elle vous propose :

- d'insérer les dispositions relatives aux instructions adressées par les procureurs généraux aux procureurs au sein de l'article 36, qui concerne actuellement les instructions du garde des Sceaux. Votre commission a en effet proposé d'inscrire les dispositions actuelles de l'article 36 au sein de l'article 30, afin que les attributions du garde des Sceaux soient définies au sein d'un même article ;

- de supprimer la référence au recours hiérarchique contre les décisions de classement, afin de les reprendre à l'article 21 du projet de loi, relatif à l'opportunité des poursuites ;

- de préciser que les réquisitions que les procureurs généraux peuvent enjoindre aux procureurs de prendre seront écrites.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 19 ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 19
(art. 37 du code de procédure pénale)
Coordination

Votre commission, ayant décidé de transférer à l'article 30 du code de procédure pénale les dispositions de l'article 36, relatif aux instructions données par le garde des Sceaux aux procureurs généraux, vous propose, par un amendement , d'insérer un article additionnel dans le projet de loi pour opérer une coordination au sein de l'article 37 du code de procédure pénale.

Cet article dispose en effet que le procureur général a les mêmes prérogatives à l'égard des officiers du ministère public que celles reconnues au ministre de la justice « à l'article précédent ». Cette disposition devient inutile, compte tenu des modifications proposées précédemment par votre commission.

Article 20
(art. 40-1 du code de procédure pénale)
Coordination

Le présent article tend à modifier la numérotation de l'article 40-1 du code de procédure pénale, relatif aux modalités de désignation de l'avocat de la victime d'infraction qui s'est constituée partie civile, pour en faire un article 40-3 du code de procédure pénale, afin de tenir compte de l'insertion, par l'article 21 du projet de loi, de deux nouveaux articles 40-1 et 40-2 dans le code de procédure pénale. Pour prendre en considération un amendement qu'elle proposera à l'article 21, votre commission vous propose, par un amendement , de faire de l'actuel article 40-1 du code de procédure un article 40-4.

Elle vous propose d'adopter l'article 20 ainsi modifié .

Article 21
(art. 40-1 et 40-2 nouveaux du code de procédure pénale)
Principe de la réponse judiciaire systématique

L'article 40 du code de procédure pénale pose le principe de l'opportunité des poursuites en disposant que « le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner ».

Alors que, pendant longtemps, les procureurs n'ont eu le choix qu'entre l'exercice des poursuites et le classement sans suite, d'autres réponses se sont fortement développées au cours des dernières années, parfois à l'initiative du législateur, parfois à l'initiative des procureurs eux-mêmes, leurs pratiques faisant ensuite l'objet d'une consécration législative.

Parmi ces procédures, improprement qualifiées d'alternatives aux poursuites -elles constituent souvent des alternatives aux classements sans suite- figurent le rappel à la loi , l' orientation vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle , la médiation pénale et la composition pénale .

Le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale deux nouveaux articles numérotés 40-1 et 40-2, afin d'une part de consacrer dans la loi les possibilités ouvertes au procureur de la République en matière d'exercice de l'action publique et d'encadrer l'exercice de l'opportunité des poursuites, d'autre part de prévoir une information des victimes sur les suites réservées aux plaintes qu'elles déposent.

Le texte proposé pour l' article 40-1 du code de procédure pénale prévoit que lorsqu'il estime que les faits qui ont été portés à sa connaissance en application de l'article 40 constituent un délit commis par une personne dont l'identité et le domicile sont connus et pour lequel aucune disposition légale ne fait obstacle à la mise en mouvement de l'action publique, le procureur peut :

- soit engager des poursuites ;

- soit mettre en oeuvre une procédure alternative aux poursuites en application des articles 41-1 ou 41-2 ;

- soit classer sans suite la procédure dès lors que les circonstances particulières liées à la commission des faits le justifient.

Rappelons que l'article 41-1 du code de procédure pénale énumère les mesures alternatives aux poursuites que le procureur peut ordonner, tandis que l'article 41-2 est consacré à la composition pénale.

Le texte proposé a le mérite d'opérer une claire distinction entre les infractions non poursuivables et celles qui donnent lieu à l'exercice par le procureur de la République de l'opportunité des poursuites.

Il précise en effet qu'un choix véritable n'est offert au procureur de la République que lorsque les faits constituent une infraction commise par une personne dont l'identité et le domicile sont connus et pour laquelle aucune disposition légale ne fait obstacle à la mise en mouvement de l'action publique. Dans le cas contraire, le procureur de la République ne peut que classer une plainte sans que soit remis en cause le principe de l'opportunité des poursuites. En pratique, le ministère de la justice a pris l'habitude de distinguer, dans les statistiques qu'il élabore, les infractions non poursuivables et les infractions poursuivables .

Ainsi, en 2001, 3.611.142 affaires ont fait l'objet d'un classement sans suite parce qu'elles n'étaient pas poursuivables (défaut d'élucidation, infractions mal caractérisées ou charges insuffisantes).

Dans ces conditions, 1.327.848 affaires ont donné lieu à une décision d'orientation par le parquet, dans les conditions résumées par le tableau suivant :

Évolution de la réponse pénale de 1998 à 2002

1988

1999

2000

2001

2002 P

Ensemble de la réponse pénale

777.211

852.106

878.716

893.373

902.646

Part des procédures alternatives aux poursuites

21,1 %

25,1 %

28,5 %

30,2 %

31,1 %

Part des poursuites

78,9 %

74,9 %

71,5 %

69,6 %

68,3 %

Procédures alternatives aux poursuites

163.799

214.108

250.651

269.996

280.850

Classement sous condition

-

-

-

-

-

Médiation

25.972

30.334

33.991

33.484

-

Médiation - réparation mineurs

3.168

4.296

4.772

4.974

-

Injonction thérapeutique

4.254

4.183

3.606

4.038

-

Plaignant désintéressé, régularisation

33.475

34.971

37.424

38.823

-

Rappel à la loi, avertissement

62.471

95.863

116.694

129.021

-

Autres alternatives

34.459

44.461

54.164

59.656

-

Poursuites

613.412

638.000

628.065

621.866

616.810

Composition pénale

1.511

4.986

Taux de réponse pénale

65,1 %

67,5 %

67,9 %

67,3 %

67,5 %

Classement sans suite

416.841

410.840

413.876

434.475

434.933

Taux de classement sans suite

34,9 %

32,5 %

32,1 %

32,7 %

32,5%

P : provisoire
Source : ministère de la Justice

Par un amendement , votre commission vous propose de remplacer dans le texte proposé pour l'article 40-1 le terme « délit » par le terme « infraction ».

Le principe de l'opportunité des poursuites s'applique en effet à l'ensemble des infractions, qu'il s'agisse de crimes, de délits ou de contraventions. Pour l'ensemble des infractions, le procureur peut engager des poursuites, mettre en oeuvre une procédure alternative ou prendre une décision de classement.

Si le législateur limitait aux seuls délits les nouvelles règles destinées à encadrer le principe de l'opportunité des poursuites, cela pourrait être interprété comme signifiant que le procureur de la République dispose d'une plus grande liberté d'appréciation en matière criminelle qu'en matière correctionnelle, ce qui n'est à l'évidence pas l'objectif recherché.

Si la solution proposée par votre commission ne devait pas être retenue, il conviendrait alors de préciser dans le code de procédure pénale qu'en cas de crime, des poursuites doivent obligatoirement être engagées dès lors que l'auteur des faits est identifié.

Le texte proposé pour l' article 40-2 du code de procédure pénale prévoit que le procureur de la République avise les plaignants et les victimes si elles sont identifiées, ainsi que les personnes ou autorités mentionnées au deuxième alinéa de l'article 40, des poursuites ou des mesures alternatives aux poursuites qui ont été décidées à la suite de leur plainte ou de leur signalement.

Le second alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale dispose que toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en aviser sans délai le procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

Le texte proposé pour l'article 40-2 précise en outre que lorsque l'auteur des faits est identifié mais que le procureur de la République décide de classer sans suite la procédure, il avise également les plaignants et les victimes de sa décision qui doit être motivée.

En 1999, dans son projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale, Mme Elisabeth Guigou, alors garde des Sceaux, avait déjà proposé d'inscrire dans la loi la notification et la motivation des classements sans suite, mais l'examen du projet de loi par le Parlement n'avait pu être conduit à son terme.

Le dispositif proposé présente deux intérêts :

- il consacre l'obligation pour le procureur d'informer les plaignants et les victimes des suites données à leurs plaintes ou signalements. Les décisions de classement sans suite devraient être notifiées et motivées sauf dans le cas où l'auteur des faits n'est pas identifié ;

- il prévoit que les autorités ayant obligation de dénoncer les infractions dont elles ont connaissance seront également avisées des suites données à leurs dénonciations. Ce dispositif devrait notamment permettre aux maires qui dénoncent des infractions commises sur le territoire de leur commune d'être informés des suites données à leur intervention.

Votre commission vous soumet un amendement prévoyant la notification aux victimes et la motivation de l'ensemble des décisions de classement sans suite et non seulement de celles prises bien que l'auteur des faits ait été identifié. Actuellement, l'article 40 du code de procédure pénale prévoit que le procureur « avise le plaignant du classement de l'affaire ainsi que la victime lorsque celle-ci est identifiée ».

Certes, ces dispositions ne sont pas appliquées de manière homogène sur l'ensemble du territoire. Il n'apparaît cependant pas souhaitable de limiter l'information des victimes sur les décisions de classement aux seuls cas dans lesquels l'auteur des faits est identifié.

Une telle décision pourrait en effet être interprétée comme un recul par rapport au droit actuel, même si celui-ci n'est qu'imparfaitement appliqué et que le code de procédure pénale ne prévoit pas, contrairement au projet de loi, la motivation des décisions de classement sans suite.

L'amendement proposé par votre commission impliquera vraisemblablement une réorganisation des bureaux d'ordre des juridictions qui pourrait nécessiter un certain délai.

Par un amendement , votre commission vous propose de compléter le présent article pour insérer un article 40-3 dans le code de procédure pénale, afin de prévoir explicitement que les décisions de classement sans suite peuvent faire l'objet d'un recours hiérarchique auprès du procureur général.

Le projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale, présenté en 1999, prévoyait de consacrer le recours hiérarchique susceptible d'être exercé contre les décisions de classement sans suite, tout en n'accordant ce recours qu'aux personnes n'ayant pas qualité pour se constituer partie civile. Notre excellent collègue M. Pierre Fauchon, rapporteur du projet de loi, avait estimé qu'une telle limitation n'était pas cohérente et avait ouvert le recours hiérarchique à l'ensemble des personnes ayant dénoncé des faits au procureur de la République.

Le présent projet de loi tend lui aussi à consacrer le recours hiérarchique, mais de manière indirecte, par une référence à ce recours, au sein des dispositions relatives aux instructions que les procureurs généraux peuvent adresser aux procureurs.

Votre commission estime préférable d'inscrire le recours hiérarchique à la suite des dispositions relatives à l'information donnée aux plaignants et victimes sur les suites réservées à leurs plaintes et dénonciations.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 21 ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions relatives à la composition pénale
et aux autres procédures alternatives aux poursuites
Article additionnel avant l'article 22
(art. 41-1 du code de procédure pénale)
Possibilité d'utiliser la procédure d'injonction de payer
en cas de médiation pénale

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel, afin de modifier l'article 41-1 du code de procédure pénale, relatif aux alternatives aux poursuites, pour permettre aux victimes, en cas de réussite d'une médiation pénale, de demander le recouvrement des dommages et intérêts suivant la procédure d'injonction de payer, conformément aux règles prévues par le nouveau code de procédure civile.

Article 22
(art. 41-1 du code de procédure pénale)
Engagement de poursuites
en cas d'échec d'une mesure alternative aux poursuites

L'article 41-1 du code de procédure pénale, consacré aux alternatives aux poursuites, permet au procureur de la République, préalablement à sa décision sur l'action publique :

- de rappeler à l'auteur des faits les obligations résultant de la loi ;

- d'orienter l'auteur des faits vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle ;

- de demander à l'auteur des faits de régulariser sa situation au regard de la loi ou des règlements ;

- de demander à l'auteur des faits de réparer le dommage résultant de ceux-ci ;

- de faire procéder, avec l'accord des parties, à une mission de médiation entre l'auteur des faits et la victime.

Le présent article tend à compléter ces dispositions pour prévoir qu'en cas de non exécution de la mesure en raison du comportement de l'auteur des faits, le procureur de la République, sauf élément nouveau, met en oeuvre une composition pénale ou engage des poursuites.

Au cours des auditions et déplacements auxquels il a procédé, votre rapporteur a constaté que ce dispositif suscitait parfois des inquiétudes, en ce qu'il limiterait le pouvoir d'appréciation du procureur de la République.

En réalité, le texte proposé tend à encadrer plus qu'à limiter le pouvoir d'appréciation du parquet. Il prévoit en effet deux conditions cumulatives pour que le parquet soit tenu d'engager des poursuites :

- la non-exécution de la mesure en raison du comportement de l'auteur des faits (cela exclut notamment les situations dans lesquelles une médiation échoue à cause du comportement de la victime, qui souhaite que des poursuites soient engagées) ;

- l'absence de tout élément nouveau.

Le présent article, en posant le principe que la non-exécution d'une mesure alternative aux poursuites entraîne la mise en mouvement de l'action publique, pourrait permettre d'exercer une pression sur les auteurs d'infractions, afin qu'ils exécutent les mesures alternatives ordonnées à leur encontre.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 22 sans modification .

Article 23
(art. 41-2 du code de procédure pénale)
Extension du champ d'application de la composition pénale
et de la liste des mesures susceptibles d'être proposées

La loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale a créé la procédure de composition pénale.

Tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, le procureur de la République peut proposer, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée, à une personne majeure qui reconnaît avoir commis certains délits, une composition pénale, qui consiste en une ou plusieurs mesures, parmi lesquelles figurent le versement d'une amende de composition, la remise au tribunal du permis de conduire ou du permis de chasser...

La mesure de composition pénale, lorsqu'elle est acceptée par l'auteur des faits, doit faire l'objet d'une validation par le président du tribunal.

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a modifié les dispositions relatives à la composition pénale, notamment pour étendre son champ d'application et prévoir l'inscription au bulletin n° 1 du casier judiciaire des compositions pénales exécutées.

Créée par le législateur en 1999, la mesure de composition pénale n'a commencé à être mise en oeuvre par les parquets que récemment, compte tenu de la parution tardive du décret d'application. Au cours de ses déplacements, votre rapporteur a pu constater que cette mesure suscitait un intérêt réel de la part des parquets, même si sa mise en oeuvre est jugée complexe. Il semble que les parquets utilisent cette procédure surtout lorsque l'infraction n'a pas fait de victime (par exemple en matière de conduite en état alcoolique).

En 2001, première année d'application de la mesure, 3.534 compositions pénales ont été proposées, 1.511 ayant été exécutées avec succès (extinction de l'action publique). Soixante tribunaux de grande instance ont mis en oeuvre cette procédure.

Pour 2002, le seul chiffre actuellement disponible est le nombre de compositions pénales ayant donné lieu à extinction de l'action publique, soit 4.986 mesures.

Le présent article tend à modifier substantiellement les dispositions relatives à la composition pénale.

Le paragraphe I a pour objet de modifier l'article 41-2 relatif à l'application de la composition pénale en matière délictuelle.

Le texte proposé tend tout d'abord à permettre l'application de la procédure de composition pénale à l'ensemble des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans . L'Assemblée nationale a prévu que cette mesure pourrait également être proposée aux personnes reconnaissant avoir commis un délit puni à titre de peine principale d'une peine d'amende.

Ce dispositif constitue une simplification heureuse du droit actuel, puisque l'article 41-2 énumère actuellement l'ensemble des délits pour lesquels la procédure de composition pénale est applicable. Le recours à un seuil de peine encourue facilitera l'action des magistrats du parquet chargés de proposer la mesure de composition pénale.

Le projet de loi tend également à étendre fortement la liste des mesures que le procureur peut proposer à l'auteur des faits dans le cadre d'une composition pénale.

Actuellement, le procureur de la République peut proposer à l'auteur des faits :

- de verser une amende de composition au Trésor public ;

- de se dessaisir au profit de l'Etat de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou qui en est le produit ;

- de remettre au greffe du tribunal de grande instance son permis de conduire pour une durée maximale de six mois ou permis de chasser pour une période maximale de quatre mois ;

- d'effectuer au profit de la collectivité un travail non rémunéré pour une durée maximale de soixante heures dans un délai qui ne peut être supérieur à six mois ;

- de suivre un stage ou une formation dans un service ou organisme sanitaire, social ou professionnel pour une durée qui ne peut excéder trois mois dans un délai qui ne peut être supérieur à dix-huit mois.

Enfin, lorsque la victime est identifiée, le procureur de la République doit également proposer à l'auteur des faits de réparer les dommages causés par l'infraction.

Le présent article tend à compléter la liste des mesures susceptibles d'être proposées par le procureur de la République pour viser les obligations suivantes :

- ne pas émettre, pour une durée de six mois au plus, des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés, et ne pas utiliser de cartes de paiement ;

- ne pas paraître, pour une durée de six mois ou plus, dans le ou les lieux dans lesquels l'infraction a été commise, à l'exception des lieux dans lesquels la personne réside habituellement ;

- ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, la ou les victimes de l'infraction ou ne pas entrer en relation avec elles ;

- ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée maximale de six mois, le ou les co-auteurs ou complices éventuels ou ne pas entrer en relation avec eux ;

- ne pas quitter le territoire national et remettre son passeport pour une durée qui ne saurait excéder six mois.

L'extension de la liste des mesures susceptibles d'être proposées par le procureur de la République est une excellente évolution. Bien souvent, face à des auteurs d'infractions socialement marginalisés, les procureurs de la République ont des difficultés à proposer des mesures susceptibles d'être effectivement mises en oeuvre.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des lois, M. Jean-Luc Warsmann, a modifié les règles prévues par l'article 41-2 en ce qui concerne l'amende de composition. Alors que le montant de celle-ci ne peut aujourd'hui dépasser ni la moitié du maximum de l'amende encourue ni 3.750 euros d'amende, l'Assemblée nationale a supprimé toute limitation du montant de l'amende. Dans ces conditions, des amendes de 75.000 euros pourraient être proposées dans le cadre d'une composition pénale, ce qui paraît excessif s'agissant d'une mesure alternative aux poursuites.

Votre commission vous propose, par un amendement , de prévoir que le montant de l'amende de composition ne peut excéder ni la moitié du maximum de l'amende encourue ni 7.500 euros.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des lois M. Jean-Luc Warsmann, a complété la liste des mesures susceptibles d'être proposées par le procureur de la République pour prévoir la remise par l'auteur des faits de son véhicule , pour une période maximale de six mois, à des fins d'immobilisation.

Par un amendement , votre commission vous propose de porter de quatre à six mois la période maximale durant laquelle le permis de chasser pourrait être remis au greffe du tribunal de grande instance dans le cadre d'une composition pénale. Il est en effet difficilement compréhensible que le permis de conduire ou le véhicule puisse être remis pendant une période de six mois alors que le permis de chasser ne peut l'être que pendant une période de quatre mois.

Le texte proposé tend également à modifier les dispositions de l'article 41-2 relatives à l'absence d'acceptation de la composition pénale par l'auteur des faits ou à la non exécution de la composition pénale. Alors que le texte actuel prévoit que le procureur apprécie la suite à donner à la procédure, le présent article tend à préciser que le procureur de la République met en mouvement l'action publique, sauf élément nouveau. Un tel système est conforme aux positions qu'avait défendues le Sénat lors de l'examen du projet de loi renforçant l'efficacité de la procédure pénale, qui a conduit à la création de la procédure de composition pénale.

Le texte proposé modifie également les règles applicables en matière de prescription. Le texte actuel prévoit que la prescription de l'action publique est suspendue entre la date à laquelle le procureur propose une composition pénale et la date d'expiration des délais impartis pour exécuter la composition pénale. Le texte proposé par le projet de loi dispose que les actes tendant à la mise en oeuvre ou à l'exécution de la composition pénale sont interruptifs de la prescription de l'action publique. Cette modification doit permettre de faire redémarrer le délai de prescription en cas de non-exécution de la composition pénale.

Par ailleurs, le projet de loi tend à prévoir que le tribunal est composé d'un seul magistrat lorsque la partie civile délivre citation directe afin qu'il soit statué sur les intérêts civils.

Enfin, le texte proposé tend à insérer un nouvel alinéa dans l'article 41-2 pour prévoir que la composition pénale n'est applicable ni aux mineurs de dix-huit ans, ni en matière de délits de presse, de délits d'homicides involontaires ou de délits politiques. L'exclusion des mineurs de la procédure de composition pénale correspond au droit actuel. En revanche, les autres exclusions prévues par le projet de loi ont pour objet d'éviter que l'extension du champ d'application de la composition pénale ne conduise à appliquer cette procédure à des infractions qui méritent un examen en audience publique.

Il faut cependant reconnaître que la notion de délits à caractère politique apparaît assez imprécise. Si les crimes politiques sont aisément identifiables au sein du code pénal, parce qu'ils sont punis de peines de « détention criminelle » et non de « réclusion criminelle », il n'en est pas de même en matière délictuelle. Il est donc revenu à la jurisprudence de distinguer les délits politiques des autres délits. La Cour de cassation a reconnu la qualité d'infractions politiques à des délits de presse, à des infractions réprimées par le code électoral, aux atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation...

Par un amendement , votre commission vous propose de compléter l'article 41-2 du code de procédure pénale pour prévoir qu'en cas de validation d'une composition pénale, la victime peut demander le recouvrement des dommages et intérêts selon la procédure de l'injonction de payer, dans les conditions prévues par le nouveau code de procédure civile.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 41-3 du code de procédure pénale, qui permet l'application de la procédure de composition pénale en cas de violences ou de dégradations contraventionnelles ainsi que, depuis la loi du 9 septembre 2002, pour les contraventions dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat.

Dans ce cas, le montant maximum de l'amende de composition ne peut excéder ni 750 euros ni la moitié du maximum de l'amende encourue, la durée de la remise du permis de conduire ou du permis de chasser ne peut dépasser deux mois et la durée du travail non rémunéré ne peut être supérieure à trente heures, dans un délai maximum de trois mois.

Le présent article tend à modifier ces règles pour permettre l'application de la composition pénale à l'ensemble des contraventions de cinquième classe.

Il tend également à modifier le quantum des mesures qui peuvent être proposées. Le montant de l'amende ne serait plus limité et pourrait donc atteindre 1.500 euros, montant maximal encouru pour une contravention de la cinquième classe. La durée de privation du permis de conduire ou du permis de chasser pourrait atteindre trois mois et non plus deux comme actuellement (il convient de noter qu'en matière contraventionnelle, les durées maximales de retrait des permis de conduire et de chasser sont identiques, ce qui justifie pleinement l'amendement proposé par votre commission dans le texte proposé pour l'article 41-2). Le texte proposé précise également que l'interdiction d'émettre des chèques ne peut dépasser trois mois (contre six en matière délictuelle). Enfin, les mesures interdisant à l'auteur de paraître dans certains lieux, de rencontrer la victime, de rencontrer les co-auteurs ou de quitter le territoire national ne seront pas applicables en matière contraventionnelle.

Il apparaît justifié d'étendre le champ d'application de la mesure de composition pénale. Cependant, le dispositif proposé constitue paradoxalement à la fois une extension et une réduction de ce champ d'application. Actuellement, en effet, la composition pénale est applicable à certaines dégradations qui constituent une contravention de la quatrième classe et qui n'entreraient plus dans le champ d'application de la mesure.

Votre commission vous propose un amendement tendant à permettre l'application de la mesure de composition pénale à l'ensemble des contraventions. Sauf dans le cas où les contraventions donnent lieu à une amende forfaitaire, la procédure de la composition pénale peut être tout à fait adaptée pour le traitement de petites infractions, lorsque la procédure de l'ordonnance pénale (qui permet un jugement sans convocation de l'auteur des faits) n'apparaît pas opportune.

Corrélativement, votre commission vous propose d'exclure dans ce cas la possibilité de prononcer certaines mesures prévues par les articles sur la composition pénale, afin d'éviter que certaines contraventions puissent être sanctionnées plus sévèrement en composition pénale que devant le tribunal de police.

Le paragraphe III tend à modifier l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit notamment que les détenus exécutant un travail pénal ou les condamnés exécutant un travail d'intérêt général bénéficient des dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux accidents du travail pour les accidents survenus par le fait ou à l'occasion de ce travail. Le présent paragraphe tend à mentionner également dans l'article L. 412-8 les personnes effectuant un travail non rémunéré dans le cadre d'une composition pénale.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 23 ainsi modifié .

SECTION 3
Dispositions diverses et de coordination
Article 24 A
(art. 706-53-1 nouveau du code de procédure pénale)
Prescription des infractions sexuelles

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, et Gérard Léonard, tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 706-53-1 pour augmenter la durée de la prescription de l'action publique et de la peine pour certaines infractions sexuelles.

Les règles en matière de prescription sont actuellement les suivantes :

- en matière criminelle, l'action publique se prescrit par dix années révolues à compter du jour où le crime a été commis si, dans cet intervalle, il n'a été fait aucun acte d'instruction et de poursuite. S'il a été effectué des actes dans cet intervalle, l'action publique ne se prescrit qu'après dix années révolues à compter du dernier acte (article 7 du code de procédure pénale).

Les peines prononcées pour un crime se prescrivent par vingt années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive (article 133-2 du code pénal) ;

- en matière de délit, la prescription de l'action publique est de trois années révolues (article 8 du code de procédure pénale). Les peines prononcées se prescrivent par cinq années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive.

Des règles spécifiques ont été prévues par le législateur dans certaines matières. Ainsi, les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles .

En ce qui concerne les infractions commises contre des mineurs, des règles particulières ont été posées au cours des dernières années :

- le délai de prescription de l'action publique des crimes commis contre des mineurs ne commence à courir qu'à compter de la majorité de ces derniers ;

- il en est de même pour de nombreux délits commis contre les mineurs : violences (articles 222-9 et 222-15 du code pénal), agressions sexuelles (articles 222-27 à 222-30), proxénétisme (article 225-7), corruption de mineur (article 227-22) et atteintes sexuelles (articles 227-25 à 227-27).

Ce report du point de départ du délai de prescription, prévu par la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles, a été institué pour tenir compte de la difficulté pour les mineurs de dénoncer les infractions dont ils sont victimes et qui sont souvent commises par leurs proches ;

- par ailleurs, le délai de prescription des délits d'agressions sexuelles aggravées (article 222-30 du code pénal) et d'atteintes sexuelles aggravées sur un mineur de quinze ans (article 227-26 du code pénal) est de dix ans lorsque la victime est mineure.

Le présent article tend à porter à trente ans le délai de prescription de l'action publique et des peines pour les crimes mentionnés à l'article 706-47 du code de procédure pénale et à vingt ans le délai de prescription de l'action publique et des peines pour les délits mentionnés au même article.

L'article 706-47 du code de procédure pénale prévoit que les personnes poursuivies pour certaines infractions doivent faire l'objet d'une expertise médicale avant tout jugement sur le fond. Les infractions concernées sont :

- le meurtre ou l'assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie ;

- le viol et les autres agressions sexuelles (articles 222-23 à 222-32 du code pénal) ;

- la corruption de mineur (article 227-22 du code pénal) ;

- la fixation et la diffusion d'images pédopornographiques ou de messages à caractère violent ou pornographique portant atteinte à la dignité (articles 227-23 et 227-24 du code pénal) ;

- les atteintes sexuelles (articles 227-25 à 227-27 du code pénal).

Si l'objectif poursuivi par le présent article est parfaitement compréhensible, le dispositif retenu n'en soulève pas moins de sérieuses difficultés.

D'une part, le texte proposé ne concerne pas seulement des infractions commises contre les mineurs, mais l'ensemble des agressions sexuelles, quel que soit l'âge de la victime . Il englobe à la fois le viol et l'exhibition sexuelle, dont le délai de prescription de l'action publique serait désormais de vingt ans. Il contredit en outre formellement l'article 8 du code de procédure pénale, qui a prévu un délai de prescription de dix ans pour certains délits commis contre les mineurs.

D'autre part et surtout, votre commission n'estime pas souhaitable de multiplier les règles dérogatoires au régime de la prescription, quelle que soit la répulsion que peuvent inspirer certaines catégories d'infractions. La situation des mineurs victimes a été prise en compte par un report justifié du point de départ du délai de prescription destiné à faciliter la libération de la parole. Il ne paraît pas justifié d'aller au-delà, sauf à redéfinir entièrement notre régime de prescription.

La prescription n'est pas un principe universellement admis, puisqu'elle n'existe pas dans les pays de common law .

Par ailleurs, les progrès scientifiques permettent désormais de poursuivre certaines infractions longtemps après leur commission, alors que tel n'était pas le cas dans le passé.

Cette évolution doit être prise en considération, tout comme l'augmentation de l'espérance de vie et la transformation de la société, qui admet moins qu'auparavant l'oubli des infractions passées.

Dans ces conditions, un réexamen des règles générales de la prescription pourrait être envisagé par le législateur. Il semble en revanche inapproprié de procéder par retouches successives des règles relatives à certaines catégories d'infractions.

En conséquence, votre commission vous propose la suppression de l'article 24 A.

Article 24
(art. L. 2211-2 nouveau du code général des collectivités territoriales)
Rappel de certaines dispositions
relatives aux échanges d'informations relatifs à des crimes
ou délits entre les maires et les parquets

Le présent article tend à insérer dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2211-2, qui figurerait au sein du chapitre premier (dispositions générales) du titre premier (police) du livre deuxième (administration et services communs) de ce code.

Le texte proposé pour l'article L. 2211-2 prévoit que le maire est tenu de signaler sans délai au procureur de la République les crimes ou les délits dont il acquiert la connaissance dans l'exercice de ses fonctions, conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 40 de procédure pénale.

Le maire serait avisé des suites données conformément aux dispositions de l'article 40-2 du même code.

Enfin, le texte prévoit que la procureur de la République peut également communiquer au maire les éléments d'information sur les procédures relatives à des infractions commises sur le territoire de la commune qu'il rend publics conformément à l'article 11 du code de procédure pénale.

La loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a complété l'article 11 du code de procédure pénale pour permettre au procureur de la République, afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, de rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause.

Les maires revendiquent depuis longtemps une meilleure information sur les infractions commises sur le territoire de leur commune. A l'occasion de l'examen de plusieurs projets de loi, le Sénat a souhaité que l'information du maire soit améliorée.

Le présent projet de loi vise à répondre à cette attente. Son article 21 prévoit en effet l'obligation pour le procureur d'informer les autorités constituées qui dénoncent des infractions des suites réservées à ces dénonciations.

Le présent article ne constitue qu'un rappel dans le code général des collectivités territoriales des dispositions que le projet de loi tend à insérer dans le code de procédure pénale.

En ce qui concerne les informations rendues publiques par le procureur de la République, ce texte apparaît dépourvu de toute portée normative dès lors qu'il ouvre une simple faculté au procureur de la République de transmettre au maire des informations qu'il a choisi de rendre publiques. Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir que le procureur peut communiquer des informations au maire, que celles-ci soient ou non rendues publiques.

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, a indiqué qu'il avait mis en place un groupe de travail rassemblant des élus et des procureurs de la République, notamment pour réfléchir à la question de l'information des maires. Le ministre a également précisé que « S'agissant de l'information des maires, un premier pas a été franchi. Sans doute est-il insuffisant. Mais n'oublions pas qu'il faut aussi respecter le secret de l'instruction et les règles de la procédure pénale. J'essaie de faire travailler ce groupe mixte suffisamment rapidement pour que, d'ici à la seconde lecture de votre assemblée, nous puissions vous proposer des compléments en termes d'informations... » 135 ( * ) .

Dès à présent, votre commission vous soumet un amendement tendant à compléter le présent article, afin d'améliorer les conditions dans lesquelles le maire est informé des infractions survenant sur le territoire de sa commune.

En 2001, lors de l'examen du projet de loi relatif à la sécurité quotidienne, le Sénat avait voté, à l'initiative de notre excellent collègue M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur du projet de loi, un amendement prévoyant l'information du maire sur l'ensemble des infractions commises sur le territoire de sa commune. Ce dispositif avait été jugé irréaliste.

Depuis lors, le décret n° 2002-999 du 17 juillet 2002 relatif aux dispositifs territoriaux de sécurité et de coopération pour la prévention et la lutte contre la délinquance est venu apporter des précisions sur cette question.

L'article 4 de ce décret prévoit en particulier que « les maires sont informés sans délai des actes graves de délinquance commis dans leur commune ». Cette information doit être donnée par les responsables locaux de la police et de la gendarmerie.

Votre commission vous propose d'inscrire ces dispositions dans un nouvel article du code général des collectivités territoriales, afin de compléter les dispositions de l'article 24 du projet de loi, qui rappellent que les maires doivent être avisés des suites données à leurs plaintes et dénonciations. Elle propose toutefois de viser les infractions causant un trouble à l'ordre public plutôt que les infractions graves. Les informations les plus utiles aux maires sont en effet celles qui concernent les infractions causant un trouble à l'ordre public dans la commune.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 24 ainsi modifié .

Article 25
(art. 40 du code de procédure pénale)
Coordination

Le présent article tend à opérer des coordinations au sein de l'article 40 du code de procédure pénale pour tenir compte de l'insertion dans le code de procédure pénale d'un article 40-2 consacré à l'information des victimes et des plaignants sur les suites réservées à leurs plaintes et dénonciations.

Dans sa rédaction actuelle, le premier alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale dispose que le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner. Il avise le plaignant du classement de l'affaire ainsi que la victime lorsque celle-ci est identifiée . Enfin, lorsqu'il s'agit de certaines infractions commises contre un mineur, l'avis de classement doit être motivé et notifié par écrit.

Le présent projet de loi tend à compléter les règles actuelles en matière d'information des plaignants sur les suites données à leurs plaintes. Le texte proposé pour l'article 40-2 (article 21 du projet de loi) prévoit une information systématique des plaignants et des victimes en cas de poursuites ou de mesure alternative aux poursuites. Il prévoit également une obligation pour le procureur d'adresser aux victimes et plaignants un avis motivé lorsque l'auteur des faits est identifié mais que le procureur décide de classer sans suite la procédure.

Par ailleurs, l'article 26 du projet de loi prévoit l'obligation pour les services de police et de gendarmerie d'indiquer aux plaignants qu'ils seront informés par le procureur de la République de la suite réservée à leur plainte si l'auteur des faits est identifié.

Ainsi, les classements sans suite pour absence d'identification de l'auteur ne seraient pas notifiés aux victimes et aux plaignants. Le système proposé tend donc à prévoir une information plus complète des victimes et des plaignants tout en écartant l'obligation d'aviser les plaignants du classement en l'absence d'identification de l'auteur.

A l'article 21, votre commission a proposé un amendement tendant à prévoir l'information de la victime dans tous les cas, y compris en l'absence d'identification de l'auteur.

Le présent article tend à supprimer les dispositions de l'article 40, qui prévoient que le procureur avise le plaignant du classement de l'affaire et posent des règles particulières pour certaines catégories d'infractions. Cette suppression est logique dès lors que les règles sur l'information des victimes et des plaignants figureront désormais à l'article 40-2 du code de procédure pénale.

Cet article tend par ailleurs à renvoyer explicitement à l'article 40-1 nouveau du code de procédure pénale en ce qui concerne la mise en oeuvre du principe de l'opportunité des poursuites. L'article 21 du projet de loi tend en effet à insérer un article 40-1 destiné à mieux préciser les contours du principe d'opportunité des poursuites.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 25 sans modification .

CHAPITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX ENQUÊTES

SECTION 1
Dispositions concernant le dépôt de plainte,
la durée ou l'objet des enquêtes
Article 26
(art. 15-3, 53 et 74 du code de procédure pénale)
Dispositions relatives au dépôt de plainte, à la durée de l'enquête de flagrance et à la procédure de recherche des causes de la mort

Le présent article tend à modifier les articles 15-3, 53 et 74 du code de procédure pénale, respectivement relatifs au dépôt de plainte, à l'enquête de flagrance et à la procédure de recherche des causes de la mort.

Le paragraphe I tend à compléter l'article 15-3 du code de procédure pénale, créé par la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. Dans sa rédaction actuelle, cet article dispose que la police judiciaire est tenue de recevoir les plaintes déposées par les victimes d'infractions à la loi pénale et de les transmettre, le cas échéant, au service ou à l'unité de police judiciaire territorialement compétent.

Le présent article tend à compléter cet article pour prévoir que le dépôt de plainte fait l'objet d'un procès-verbal dont une copie est immédiatement remise à la victime . La rédaction initiale du projet de loi conditionnait cette remise à une demande de la victime, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur M. Jean-Luc Warsmann, de M. André Vallini et les membres du groupe socialiste et de M. Michel Vaxès et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, a supprimé cette restriction.

Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir la remise systématique d'un récépissé à la victime, mais de rétablir le texte initial du projet de loi en ce qu'il prévoyait la remise du procès-verbal du dépôt de plainte à la demande de la victime. La remise systématique du procès-verbal pourrait en effet présenter parfois des inconvénients pour les victimes elles-mêmes. Les procès-verbaux contiennent parfois des précisions que les victimes ne souhaitent pas faire connaître à des tiers, même si elles ont besoin de justifier auprès d'administrations ou d'organismes sociaux du dépôt de la plainte. La remise d'un récépissé paraît alors suffisante.

Le présent paragraphe prévoit également que, lorsque la plainte est déposée contre une personne dont l'identité n'est pas connue, la victime est avisée qu'elle sera informée par le procureur de la République de la suite réservée à sa plainte si l'auteur des faits est identifié .

Ce dispositif vient compléter les dispositions des articles 21 et 25 du projet de loi, prévoyant que les victimes et les plaignants seront informés de manière plus complète des suites réservées à leurs plaintes et dénonciations en cas d'identification de l'auteur des faits, mais ne recevront pas d'avis de classement lorsque celui-ci est motivé par l'absence d'identification de l'auteur. En contrepartie, elles seraient informées de cette règle dès le moment du dépôt de plainte .

Votre commission ayant proposé de prévoir une information systématique des plaignants par le procureur de la République en cas de classement sans suite vous propose par un amendement de supprimer l'obligation pour les services de police et de gendarmerie d'informer le plaignant qu'il ne sera informé des suites données à la plainte qu'en cas d'identification de l'auteur de l'infraction.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 53 du code de procédure pénale relatif aux enquêtes de flagrance . Cet article définit le crime ou le délit flagrant comme « le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre ». Il précise qu'il y a ainsi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l'action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d'objets, ou présente des traces ou indices laissant penser qu'elle a participé au crime ou au délit.

Le second alinéa de l'article 53 dispose que l'enquête de flagrance menée à la suite de la constatation d'un crime ou d'un délit flagrant ne peut se poursuivre pendant plus de huit jours .

Dans sa rédaction initiale, le présent paragraphe modifiait le second alinéa de l'article 53, pour préciser que l'enquête peut se poursuivre « sans discontinuer » pendant une durée de huit jours et porter ce délai à quinze jours pour les crimes et les délits mentionnés aux articles 706-73 et 706-74 nouveaux du code de procédure pénale, qui énumèrent les infractions entrant dans le champ de la criminalité et de la délinquance organisées .

L'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, M. Jean-Luc Warsmann, a choisi de porter à quinze jours la durée de l'enquête de flagrance pour l'ensemble des crimes et délits. Elle a précisé que le procureur de la République pourrait, à tout moment, mettre fin à l'enquête de flagrance, ordonner que les investigations se poursuivent en enquête préliminaire ou requérir l'ouverture d'une information. Ces précisions ne constituent qu'un rappel du droit actuel.

La limitation à huit jours de la durée de l'enquête de flagrance résulte de la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale. Avant cette date, aucune limite légale n'était posée et, en pratique, les enquêtes de flagrance duraient souvent plus de huit jours.

L'introduction d'une souplesse dans l'article 53 du code de procédure pénale paraît bienvenue car elle peut éviter un changement de cadre d'enquête à un moment où des investigations doivent absolument être poursuivies. Actuellement, en effet, au bout de huit jours, l'enquête de flagrance doit impérativement s'arrêter pour laisser place à une enquête préliminaire ou à une instruction même si des investigations sont en cours.

Cependant, il paraît préférable que la nécessité de prolonger l'enquête de flagrance puisse être appréciée par le magistrat qui dirige l'enquête. Dès 2001, dans une proposition de loi aménageant la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, notre excellent collègue M. Hubert Haenel avait proposé que le procureur puisse prolonger de huit jours la durée de l'enquête de flagrance lorsque des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité ne peuvent être différées. Votre commission vous propose, par un amendement , de reprendre ce dispositif, qui permet au procureur de s'assurer que les conditions de la flagrance demeurent réunies .

Le paragraphe III tend à compléter l'article 74 du code de procédure pénale, qui définit la procédure à suivre en cas de découverte d'un cadavre , qu'il s'agisse ou non d'une mort violente, si la cause en est inconnue ou suspecte. Dans un tel cas, l'officier de police judiciaire informe immédiatement le procureur de la République, se transporte sur les lieux et procède aux premières constatations.

Le procureur de la République se rend sur place s'il le juge nécessaire. Il peut déléguer aux mêmes fins un officier de police judiciaire de son choix. Le procureur, s'il se rend sur place, peut se faire assister de personnes capables d'apprécier la nature des circonstances du décès.

Enfin, le procureur peut requérir information pour recherche des causes de la mort .

Le présent article vise à compléter l'article 74 pour prévoir que ces dispositions, à l'exception de celle qui permet au procureur de requérir information pour recherche des causes de la mort, sont également applicables en cas de découverte d'une personne grièvement blessée lorsque la cause de ses blessures est inconnue ou suspecte. Comme l'indique l'étude d'impact du projet de loi, ces dispositions pourraient être appliquées en cas de découverte d'une personne dans le coma ou amnésique après avoir été blessée dans des circonstances inconnues.

Ce dispositif apporte une précision utile au droit existant, même si votre rapporteur ne peut croire qu'actuellement aucune enquête ne serait conduite en cas de découverte d'une personne dans le coma et blessée par une cause inconnue.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 26 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 26
(art. 18 du code de procédure pénale)
Intervention des officiers de police judiciaire
sur le territoire d'un Etat étranger

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 26, afin de compléter l'article 18 du code de procédure pénale, relatif à la compétence territoriale des officiers de police judiciaire.

Actuellement, les officiers de police judiciaire ne peuvent intervenir sur le territoire d'un Etat étranger, sur commission rogatoire ou sur réquisitions judiciaires, que s'il existe une convention entre la France et l'Etat concerné.

Cette règle rigide, posée par la jurisprudence, soulève des difficultés importantes. Le présent article additionnel tend à prévoir dans l'article 18 du code de procédure pénale que les officiers de police judiciaire peuvent procéder à des auditions sur le territoire d'un Etat étranger avec l'accord des autorités compétentes de cet Etat.

SECTION 2
Dispositions concernant les perquisitions et les réquisitions
Article 27
(art. 56, 76 et 96 du code de procédure pénale)
Présence des témoins durant les perquisitions

Le présent article tend à compléter ou à modifier les articles 56, 76 et 96 du code de procédure pénale, relatifs aux perquisitions.

Le paragraphe I tend à compléter l'article 56 du code de procédure pénale, qui fixe les règles applicables aux perquisitions et aux saisies effectuées au cours d'une enquête de flagrance.

Cet article permet à l'officier de police judiciaire de procéder à une perquisition sans l'assentiment de la personne chez laquelle elle se déroule « si la nature du crime est telle que la preuve en puisse être acquise par la saisie des papiers, documents ou autres objets en la possession des personnes qui pourraient avoir participé au crime ou détenir des pièces ou objets relatifs aux faits incriminés ».

L'article 56 prévoit notamment que l'officier de police judiciaire a seul, avec la personne chez qui se déroule la perquisition, les témoins sollicités pour y assister et les personnes susceptibles de procéder à des constatations techniques ou scientifiques, le droit de prendre connaissance des documents avant de procéder à leur saisie. Il énonce également des règles relatives au respect du secret professionnel, à l'inventaire et au placement sous scellés des objets et documents.

Une réglementation renforcée est prévue en ce qui concerne les perquisitions et saisies dans les cabinets d'avocats (article 56-1), les entreprises de presse (article 56-2) et les cabinets médicaux (article 56-3).

Le présent paragraphe tend à compléter l'article 56 pour prévoir que, si elles sont susceptibles de fournir des renseignements sur les objets et documents saisis, les personnes présentes lors de la perquisition peuvent être retenues sur place par l'officier de police judiciaire le temps strictement nécessaire à l'accomplissement de ces opérations.

De fait, le bon déroulement de la perquisition peut justifier que les témoins présents sur les lieux au moment de l'arrivée de l'officier de police judiciaire puissent y être retenus pendant les opérations.

Il convient de noter que cette disposition a vocation, par renvoi, à s'appliquer aux perquisitions régies par les règles particulières des articles 706-24 (en matière de terrorisme) et 706-28 (en matière de stupéfiants).

Par un amendement , votre commission vous propose d'opérer dans le présent projet de loi une coordination avec les dispositions du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique, en cours d'examen par le Parlement. Ce projet de loi tend à modifier l'article 56 du code de procédure pénale pour mentionner les données informatiques parmi les objets qui peuvent être saisis. Votre commission vous propose de viser également ces données dans le dispositif proposé par le présent article.

Les paragraphes II et III , insérés dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tendent à modifier les articles 76 et 96 du code de procédure pénale, pour préciser de manière certaine que la règle posée à l'article 56 s'appliquera également aux perquisitions conduites au cours d'une enquête préliminaire ou d'une instruction.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 27 ainsi modifié .

Article 28
(art. 60-2 et 77-1-2 nouveaux du code de procédure pénale)
Réquisitions judiciaires

Le présent article tend à compléter et à étendre le droit des enquêteurs de délivrer des réquisitions judiciaires.

Rappelons que l'article 18 de la loi pour la sécurité intérieure a inséré dans le code de procédure pénale trois nouveaux articles 60-1, 77-1-1 et 151-1-1 pour prévoir la possibilité, au cours d'une enquête ou d'une instruction, de requérir des organismes publics ou des personnes morales de droit privé la mise à disposition des informations utiles à la manifestation de la vérité contenues dans le ou les systèmes informatiques ou traitements de données nominatives qu'ils administrent.

Le présent article tend à prévoir un pouvoir de réquisition plus large au cours des enquêtes.

Le paragraphe I tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 60-2 pour prévoir que l'officier de police judiciaire peut requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des documents intéressant l'enquête , y compris ceux figurant dans des fichiers nominatifs, de lui remettre ces documents sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret professionnel.

Le texte initial faisait également référence aux « informations » intéressant l'enquête, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé cette mention.

Le texte proposé pour l'article 60-2 précise qu'à l'exception des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3 du code de procédure pénale, le fait de refuser de répondre dans les meilleurs délais et sans motif légitime à cette réquisition est puni d'une amende de 3.750 euros, les personnes morales étant responsables pénalement dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal.

Il est tout à fait justifié de prévoir une sanction en cas de refus de répondre aux réquisitions de l'officier de police judiciaire. Toutefois, il est également nécessaire d'exclure de la sanction les personnes visées par les articles 56-1, 56-2 et 56-3 du code de procédure pénale. Ces articles énoncent les conditions dans lesquelles des perquisitions et saisies peuvent être effectuées dans les cabinets d'avocats , dans les entreprises de presse , dans le cabinet d'un médecin, d'un notaire, d'un avoué ou d'un huissier .

Dès lors que les perquisitions chez ces personnes sont soumises à des règles très particulières (par exemple la présence du bâtonnier en cas de perquisition dans un cabinet d'avocat), il serait anormal de délivrer des réquisitions à ces personnes et de les sanctionner pénalement en cas de refus.

En définitive, le texte prévoit que des réquisitions pourront être adressées à toute personne, mais les personnes mentionnées aux articles 56-1, 56-2 et 56-3 pourront refuser d'y répondre si elles le jugent nécessaire. Il reviendra dans ce cas aux enquêteurs d'apprécier si une perquisition est justifiée. Celle-ci devra être accomplie dans les formes prévues par les articles 56-1 à 56-3.

Le paragraphe II tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 77-1-2 pour prévoir la possibilité de réquisitions judiciaires au cours de l'enquête préliminaire. Dans ce cas, les réquisitions seraient émises par le procureur de la République ou par l'officier de police judiciaire, sur autorisation du procureur.

Votre commission approuve le dispositif proposé. Elle constate cependant que la multiplication des lois modifiant la procédure pénale n'est pas sans inconvénients.

Ainsi, le législateur a commencé par créer un pouvoir de réquisition informatique avant de prévoir un pouvoir général de réquisition. Dans ces conditions, les dispositions de la loi pour la sécurité intérieure et du présent projet de loi se recoupent partiellement.

Afin de clarifier les dispositions du code de procédure pénale en cette matière, votre commission vous propose un amendement de réécriture du présent article pour :

- rétablir l'ordre logique de ces dispositions en prévoyant d'abord le pouvoir général de réquisition puis le pouvoir spécifique de réquisitions informatiques ;

- prévoir que les réquisitions prévues par les actuels articles 60-1 et 77-1-1 du code de procédure pénale, résultant de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, sont toujours transmises par voie télématique, afin qu'elles se distinguent clairement des autres réquisitions ;

- exclure les avocats de l'application des règles proposées en matière de réquisition. Il paraît difficilement concevable que les officiers de police judiciaire demandent aux personnes exerçant la défense de personnes mises en cause de transmettre des documents intéressant l'enquête ;

- procéder à des coordinations et à des améliorations rédactionnelles.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 28 ainsi modifié .

SECTION 3
Dispositions relatives aux personnes convoquées,
recherchées ou gardées à vue au cours de l'enquête
Article 29 A
(art. 63-1 du code de procédure pénale)
Notification des droits en garde à vue
au moyen de formulaires écrits

L'article 63-1 du code de procédure pénale concerne les modalités d'information des personnes gardées à vue sur leurs droits au cours d'une enquête.

Cet article prévoit notamment que la personne est immédiatement informée des droits mentionnés aux articles 63-2 (droit de contacter une personne avec laquelle elle vit habituellement), 63-3 (droit d'être examinée par un médecin) et 63-4 (droit de s'entretenir avec un avocat).

Cet article prévoit également que les informations doivent être communiquées à la personne gardée à vue dans une langue qu'elle comprend.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Thierry Mariani, tend à prévoir que la communication à la personne de ses droits dans une langue qu'elle comprend peut être faite au moyen de formulaires écrits .

Cette disposition correspond aux pratiques actuelles. Compte tenu de la difficulté de faire appel à un interprète dès le début d'une garde à vue, il est fréquent que les droits soient notifiés au moyen d'un formulaire rédigé dans la langue de la personne gardée à vue.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 29 A sans modification .

Article 29 B
(at. 75-2 du code de procédure pénale)
Information du procureur en cas d'identification d'un suspect

L'article 75-2 du code de procédure pénale, dont la rédaction résulte de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, dispose que l'officier de police judiciaire qui mène une enquête préliminaire concernant un crime ou un délit avise le procureur de la République dès qu'une personne à l'encontre de laquelle existent des indices faisant présumer qu'elle a commis ou tenté de commettre l'infraction est identifiée.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, et de MM. Thierry Mariani et Christian Estrosi, tend à prévoir que le procureur n'est plus informé dès que la personne est identifiée, mais dans les meilleurs délais.

A la connaissance de votre rapporteur, l'article 75-2 du code de procédure pénale n'a jamais soulevé de difficultés d'application.

La circulaire du 4 décembre 2000 présentant les dispositions de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes énonce très clairement :

« Bien évidemment, sauf dans les procédures d'une importance particulière et/ou instructions précises du parquet, cette information ne doit pas nécessairement intervenir aussitôt après que les enquêteurs aient été informés de tels indices, qui peuvent se révéler infondés (ainsi les déclarations d'un témoin mettant en cause telle ou telle personne ne justifient pas de téléphoner immédiatement au parquet). Cette information doit en revanche intervenir dans les meilleurs délais et si possible avant que des actes de coercition soient exercés contre le suspect ainsi identifié, notamment lorsque ces actes n'ont pas besoin d'être effectués dans l'urgence.

« (...) Même si elle n'est pas non plus prescrite à peine de nullité, cette obligation d'information est en effet de nature à améliorer le contrôle de l'autorité judiciaire sur le déroulement d'investigations dont la durée peut être de nature à porter atteinte aux libertés individuelles . »

Le procureur dirige l'enquête préliminaire et il paraît tout à fait souhaitable qu'il puisse exercer un véritable contrôle sur le déroulement de celle-ci.

Compte tenu de l'absence de difficultés soulevées par la rédaction actuelle de l'article 75-2 du code de procédure pénale, votre commission vous propose la suppression de l'article 29 B.

Article 29 C
(art. 77-3 du code de procédure pénale)
Information du procureur ayant dirigé l'enquête
lorsqu'une personne gardée à vue
demande les suites données à l'enquête

L'article 77-2 du code de procédure pénale, issu de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, prévoit la possibilité pour toute personne placée en garde à vue au cours d'une enquête préliminaire ou de flagrance qui, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la fin de la garde à vue, n'a pas fait l'objet de poursuites, d'interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s'est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d'être donnée à la procédure.

A l'origine, cet article définissait les modalités de réponse du procureur et prévoyait une saisine du juge des libertés et de la détention lorsque le procureur souhaitait poursuivre l'enquête. Ces dispositions ont cependant été supprimées par la loi  n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, en sorte que l'article 77-2 est dépourvu de portée normative.

L'article 77-3 prévoit pour sa part que lorsque l'enquête n'a pas été menée sous la direction du procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la garde à vue a été réalisée, celui-ci adresse sans délai la demande prévue par l'article 77-2 au procureur de la République qui dirige l'enquête.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur de la commission des Lois et de M. Thierry Mariani, tend à prévoir que l'envoi de la demande au procureur qui dirige l'enquête sera effectué dans les meilleurs délais.

Votre commission ne perçoit pas la nécessité de modifier la règle actuelle en ce qui concerne l'information du procureur dirigeant l'enquête par le procureur du ressort dans lequel la garde à vue a eu lieu.

Elle vous propose la suppression de l'article 29 C.

Article 29
(art. 62, 63-4 et 78 du code de procédure pénale)
Comparution des personnes convoquées
et intervention de l'avocat dans le cadre de la garde à vue

Le présent article tend à modifier les articles 62, 63-4 et 78 du code de procédure pénale pour préciser les conditions dans lesquelles une personne peut être contrainte de comparaître devant un officier de police judiciaire et modifier les conditions d'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 62 du code de procédure pénale qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit notamment que l'officier de police judiciaire peut, au cours d'une enquête de flagrance, appeler et entendre toutes personnes susceptibles de fournir des renseignements sur les faits ou sur les objets et documents saisis. Les personnes convoquées par l'officier de police judiciaire sont tenues de comparaître. Si elles ne satisfont pas à cette obligation, avis en est donné au procureur de la République, qui peut les contraindre à comparaître par la force publique.

Ces dispositions posent des difficultés d'application, dès lors que la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence a explicitement interdit le placement en garde à vue des témoins.

Rien n'est prévu pour permettre aux enquêteurs d'interroger les témoins si ceux-ci refusent de comparaître. L'article 61 du code de procédure pénale prévoit seulement que l'officier de police judiciaire peut défendre à toute personne de s'éloigner du lieu de l'infraction jusqu'à la clôture de ses opérations.

En revanche, les enquêteurs ne peuvent contraindre un témoin à les accompagner jusqu'à un local de police pour être entendu. Dans un tel cas, l'officier de police judiciaire doit aviser le procureur, qui peut alors contraindre les personnes à comparaître. Une telle procédure est excessivement rigide. Il est parfois difficile, sur une scène de crime, de distinguer d'emblée les suspects des témoins.

En 2001, dans sa proposition de loi tendant à adapter la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, notre excellent collègue M. Hubert Haenel avait prévu une possibilité de retenir un témoin pour une durée maximale de quatre heures .

Votre commission des Lois avait alors proposé, à l'occasion de la discussion de la proposition de loi présentée par M. Julien Dray complétant la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, de permettre à l'officier de police judiciaire de contraindre lui-même à comparaître les personnes présentes sur les lieux d'une infraction. Cette proposition n'avait pas été retenue par l'Assemblée nationale.

Le présent paragraphe reprend le dispositif proposé par votre commission en 2002. Il prévoit que l'officier de police judiciaire peut contraindre à comparaître les personnes présentes sur les lieux d'une infraction. Il pourrait également contraindre à comparaître par la force publique, avec l'autorisation préalable du procureur de la République, les personnes qui n'ont pas répondu à une convocation à comparaître ou dont il est à craindre qu'elles ne répondent pas à une telle convocation.

Dans certains cas en effet, l'envoi d'une convocation à certaines personnes peut être un élément qui les déterminera à prendre la fuite. Il paraît donc normal que le procureur de la République puisse, dans certains cas, autoriser l'officier de police judiciaire à contraindre une personne à comparaître sans qu'une convocation lui soit préalablement adressée.

Le paragraphe II tendait, dans le texte initial du projet de loi, à modifier l'article 63-4 du code de procédure pénale, relatif au droit pour une personne gardée à vue de s'entretenir avec un avocat.

L'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur et de la commission des Lois, a supprimé ces dispositions pour les rétablir à l'article 29 quinquies, tout en proposant d'autres modifications de l'article 63-4.

Ces dispositions seront donc examinées à l'article 29 quinquies.

Le paragraphe III tend à modifier l'article 78 du code de procédure pénale, relatif aux conditions dans lesquelles les personnes convoquées par un officier de police judiciaire pour les nécessités d'une enquête préliminaire sont tenues de comparaître. Cet article prévoit actuellement que les personnes convoquées par l'officier de police judiciaire sont tenues de comparaître et que, si elles ne satisfont pas à cette obligation, avis en est donné au procureur de la République qui peut les y contraindre par la force publique.

Le présent paragraphe tend à modifier ce dispositif pour permettre à l'officier de police judiciaire, sur autorisation préalable du procureur de la République, de contraindre à comparaître par la force publique les personnes qui n'ont pas répondu à une convocation ou dont on peut craindre qu'elles ne répondent pas à une telle convocation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 29 sans modification .

Article 29 bis
(art. 63 et 77 du code de procédure pénale)
Information du procureur en cas de placement en garde à vue

Le présent article tend à modifier les articles 63 et 77 du code de procédure pénale, relatifs aux conditions de placement en garde à vue respectivement au cours d'une enquête de flagrance et d'une enquête préliminaire. Ces articles prévoient, depuis l'entrée en vigueur de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, que le procureur de la République est informé du placement en garde à vue d'une personne dès le début de la mesure.

Le présent article tend à revenir sur cette rédaction pour prévoir que « sauf circonstances insurmontables, il (l'officier de police judiciaire) en informe dans les meilleurs délais le procureur de la République ».

La loi du 4 janvier 1993 avait déjà prévu une information « sans délai » du procureur de la République, avant que la loi du 24 août 1993 ne prévoie une information « dans les meilleurs délais ».

Saisi, le Conseil constitutionnel avait précisé que « les dispositions prévoyant que le procureur de la République est informé par l'officier de police judiciaire des décisions de mise en garde à vue « dans les meilleurs délais » doivent s'entendre comme prescrivant une information qui, si elle ne peut être immédiate pour des raisons objectives tenant aux nécessités de l'enquête, doit s'effectuer dans le plus bref délai possible de manière à assurer la sauvegarde des droits reconnus par la loi à la personne gardée à vue . »

Depuis la loi du 15 juin 2000, le procureur doit donc être avisé du placement en garde à vue « dès le début » de celle-ci. A la connaissance de votre rapporteur, cette disposition ne soulève pas de difficultés d'application, dès lors que l'information peut être donnée par tous moyens . La Cour de cassation a déjà rendu plusieurs décisions sur cette question, qui permettent d'évaluer la marge laissée aux officiers de police judiciaire dans l'accomplissement de cette obligation. Dans un arrêt du 28 février 2001, elle a admis qu'un délai d'une heure et demie n'était pas excessif. Elle a en revanche considéré qu'un délai de trois heures et demie n'était pas admissible.

Dans ces conditions, votre commission n'estime pas opportun de modifier une nouvelle fois les règles relatives à l'information du procureur. Si cette modification ne change rien à la situation actuelle, elle n'est pas nécessaire. Si au contraire, elle devait modifier la situation actuelle, elle conduirait à un affaiblissement du rôle du procureur de la République qui, aux termes de l'article 12 du code de procédure pénale, dirige l'activité de la police judiciaire .

Votre commission vous propose la suppression de l'article 29 bis.

Article 29 ter
(art. 63 et 77 du code de procédure pénale)
Défèrement à l'issue de la garde à vue

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à réglementer les conditions dans lesquelles les personnes gardées à vue peuvent être déférées devant un magistrat à l'issue de la garde à vue.

Dans leur rédaction actuelle, les articles 63 et 77 du code de procédure pénale, respectivement relatifs aux mesures de garde à vue intervenant en enquête de flagrance et en enquête préliminaire, précisent simplement que sur instruction du procureur de la République, les personnes à l'encontre desquelles les éléments recueillis sont de nature à motiver l'exercice de poursuites sont, à l'issue de la garde à vue, soit remises en liberté, soit déférées devant ce magistrat.

La période pendant laquelle la personne n'est plus en garde à vue sans être pourtant effectivement présentée au procureur de la République ne fait l'objet d'aucune réglementation.

Or, dans certaines juridictions de grande taille, cette période peut être longue. Dans quelques juridictions, lorsque des gardes à vue s'achèvent à un moment de la soirée où la présentation au procureur n'est plus envisageable, les personnes sont conduites au palais de justice et peuvent passer la nuit au dépôt dans l'attente de leur présentation effective au procureur.

La question du défèrement a donné lieu à une abondante jurisprudence. Dans un récent arrêt du 21 janvier 2003, la Cour de cassation a refusé de faire droit à un pourvoi formé par des personnes dont la garde à vue s'était achevée entre 18 h 50 et 19 h 05, qui avaient été mises à la disposition du procureur entre 21 h 25 et 22 h 00, mais ne lui avaient été effectivement présentées que le lendemain à 16 h 00. La Cour a constaté « qu'ayant été, en l'espèce, mis à la disposition du procureur de la République après 21 heures, les intéressés n'ont matériellement pas pu, le même jour, ni être entendus par ce magistrat, ni être traduits devant le tribunal correctionnel ou devant le juge des libertés et de la détention, avec l'assistance de l'avocat prévu par l'article 393 du code de procédure pénale (...) ».

Afin de clarifier la situation actuelle, l'Assemblée nationale a souhaité réglementer les conditions de défèrement des personnes gardées à vue.

Le présent article tend en conséquence à compléter les articles 63 et 77 du code de procédure pénale pour prévoir qu'à l'issue de la garde à vue, la personne, si elle n'est pas remise en liberté, doit être présentée au procureur de la République dans un délai qui ne peut excéder vingt heures . Pendant ce délai, les personnes auraient le droit de faire prévenir un proche, d'être examinées par un médecin et de s'entretenir avec un avocat dans les mêmes conditions qu'au cours de la garde à vue.

Votre commission approuve la volonté de l'Assemblée nationale de réglementer une pratique qui doit demeurer exceptionnelle.

Le texte proposé par l'Assemblée nationale paraît cependant insuffisamment précis. Il ouvre des droits aux personnes déférées quelle que soit la durée de la période s'écoulant entre la fin de la garde à vue et la présentation effective au procureur de la République. Il ne précise pas dans quels locaux la personne peut être retenue, en sorte que la personne pourrait être gardée dans des lieux de police ou de gendarmerie pendant de nombreuses heures après la levée de la mesure de garde à vue.

Enfin, il ne traite que des défèrements à l'issue des gardes à vue et non de ceux qui interviennent après arrestation d'une personne sur mandat d'arrêt ou mandat d'amener.

Par un amendement , votre commission vous propose de réécrire le présent article pour :

- inscrire les dispositions relatives au défèrement parmi les dispositions générales du code de procédure pénale, qui figurent à la fin de ce code ;

- viser l'ensemble des cas de défèrement devant le procureur de la République ou le juge d'instruction ;

- poser le principe qu'à l'issue de sa garde à vue, la personne doit être présentée le jour même devant le procureur de la République ou le juge d'instruction ;

- prévoir qu'en cas de nécessité, cette comparution peut avoir lieu le jour suivant et que la personne peut être retenue jusqu'à cette comparution dans des locaux de la juridiction adaptés à cette fin , à condition que la comparution intervienne au plus tard dans un délai de vingt heures à compter de l'arrivée de la personne dans ces locaux. Dans ce cas, la personne devrait avoir la possibilité de s'alimenter, d'être examinée par un médecin, de faire prévenir un proche et de s'entretenir avec un avocat par elle désigné ou commis d'office à sa demande ;

- exiger que l'identité des personnes retenues, leurs heures d'arrivée et de conduite devant le magistrat ainsi que l'application des prescriptions relatives à leurs droits fassent l'objet d'une mention dans un registre spécial tenu à cet effet dans le local où ces personnes sont retenues ;

- préciser que le local de rétention est surveillé, sous le contrôle du procureur de la République, par des fonctionnaires de la police nationale ou des militaires de la gendarmerie ;

- enfin, prévoir que les dispositions permettant la comparution le lendemain de la fin de la garde à vue ne sont pas applicables lorsque la personne a fait l'objet d'une garde à vue ayant duré plus de soixante-douze heures. Dans un tel cas, la personne devra obligatoirement être présentée le jour même de la fin de sa garde à vue.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 29 ter ainsi modifié .

Article 29 quater
(art. 63-1 du code de procédure pénale)
Diligences des enquêteurs pour la mise en oeuvre
des droits des personnes gardées à vue

L'article 63-1 du code de procédure pénale énumère les informations qui doivent être notifiées par les enquêteurs aux personnes placées en garde à vue.

Les personnes gardées à vue doivent notamment être informées des droits mentionnés aux articles 63-2 (droit de faire prévenir une personne de son entourage), 63-3 (droit à un examen médical) et 63-4 (droit de s'entretenir avec un avocat).

Cet article précise in fine depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2002-307 du 4 mars 2002 complétant la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes que « sauf en cas de circonstances insurmontables, les diligences résultant pour les enquêteurs de la communication des droits mentionnés aux articles 63-2 et 63-3 doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a été placée en garde à vue . »

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 63-1 pour prévoir que « sauf en cas de circonstances insurmontables, les diligences résultant pour les enquêteurs de la communication des droits mentionnés à l'article 63-4 doivent intervenir dans les meilleurs délais . »

Ce dispositif peut susciter une certaine perplexité. L'article 63-4 prévoit que la personne gardée à vue a le droit de demander à s'entretenir avec un avocat dès le début de la garde à vue . Le présent article tend à préciser que les diligences résultant pour les enquêteurs de ce droit doivent être accomplies dans les meilleurs délais, sauf circonstances insurmontables .

Or, l'article 63-4, que l'Assemblée nationale n'a pas modifié sur ce point, précise que si la personne demande qu'il lui soit commis un avocat d'office, « le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens et sans délai ».

Ces dispositions sont à l'évidence contradictoires.

Par ailleurs, l'introduction de la notion de « meilleurs délais » pour les diligences résultant du droit de s'entretenir avec un avocat peut susciter des interrogations en ce qui concerne son articulation avec le délai de trois heures prévu pour les autres diligences. Les « meilleurs délais » peuvent-ils ou non dépasser les trois heures prévues pour que la personne fasse prévenir un proche et soit examinée par un médecin ?

Le droit actuel ne suscite pas de difficultés d'interprétation et ne met à la charge des officiers de police judiciaire qu'une obligation de moyens et non une obligation de résultats, comme l'a précisé très clairement la circulaire du 4 décembre 2000 présentant les dispositions de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes :

« Comme le rappelle la jurisprudence constante de la chambre criminelle de la Cour de cassation, l'officier de police judiciaire n'a, dans la mise en oeuvre de l'entretien avec un avocat, qu'une obligation de moyen et non de résultat et ne saurait donc être rendu comptable de l'impossibilité de joindre l'avocat, de l'impossibilité pour ce dernier à se déplacer ou de son retard éventuel .

« Il faut toutefois, rappelle la Haute Juridiction, que l'officier de police judiciaire justifie avoir accompli les démarches de nature à permettre, dans le délai légal, l'exercice du droit à l'entretien avec un avocat (...) .

« La loi n'impose pas à l'avocat prévenu de se présenter aux services de police ou aux unités de gendarmerie avant l'expiration d'un délai maximum. Les contraintes inhérentes à son déplacement peuvent en effet conduire à ce qu'il ne se présente que plusieurs heures après avoir été prévenu. C'est donc dès cette arrivée au service ou à l'unité qu'il devra pouvoir s'entretenir avec la personne gardée à vue. Si cette dernière était en train d'être interrogée par les enquêteurs, ces derniers devront cesser leur audition pour permettre l'entretien avec l'avocat .

« Pour éviter toute difficulté dans l'exercice de ce droit, les officiers de police judiciaire devront demander à l'avocat, au moment où ils l'avisent de la demande d'assistance du gardé à vue, de leur indiquer, dans la mesure du possible, les délais probables de son intervention afin de leur permettre d'organiser en conséquence leur planning d'investigations, d'auditions et de confrontations . »

Le dispositif actuel en ce qui concerne le droit pour les personnes gardées à vue de s'entretenir avec un avocat paraît équilibré.

Votre commission vous propose la suppression de l'article 29 quater.

Article 29 quinquies
(art. 63-4 du code de procédure pénale)
Entretien avec un avocat au cours de la garde à vue

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier l'article 63-4 du code de procédure pénale, relatif au droit pour les personnes gardées à vue de s'entretenir avec un avocat.

Rappelons que cet article prévoit notamment que dès le début de la garde à vue ainsi qu' à l'issue de la vingtième heure , la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat. En cas de prolongation de la garde vue, elle peut de nouveau demander à s'entretenir avec un avocat à l'issue de la douzième heure de la prolongation .

Les 1° et 2° du présent article, qui figuraient à l'origine dans l'article 29 du projet de loi, mais que l'Assemblée nationale a choisi de transférer dans le présent article, tendent à simplifier ce système en prévoyant que la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat dès le début de la garde à vue puis, en cas de prolongation, dès le début de celle-ci .

Comme l'indique l'étude d'impact du projet de loi, le système actuel a pour conséquences « à la fois une efficacité moins grande des enquêtes -de nombreuses gardes à vue cessent avant la vingtième heure, sauf si elles sont prolongées, car les quatre dernières heures de la garde à vue ne peuvent servir qu'à l'intervention de l'avocat- et un affaiblissement du rôle de la défense -la plupart des prolongations cessant à la trente-sixième heure, ce qui ne permet pas à l'avocat d'être présent lors de la prolongation. Il est donc préférable que l'avocat intervienne dès le début de la prolongation, ce qui conduit à supprimer son intervention à la vingtième heure ».

Les 3° et 4° du présent article, insérés dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, ont pour objet de simplifier les différents régimes de garde à vue.

L'article 63-4, dans sa rédaction actuelle, repousse en effet à la trente-sixième heure l'intervention de l'avocat pour certaines infractions (association de malfaiteurs, proxénétisme ou extorsion de fonds aggravés ainsi que certaines infractions commises en bande organisée). Cet article rappelle également que l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de soixante-douze heures lorsque la garde à vue est soumise à des règles particulières de prolongations (trafic de stupéfiants et terrorisme).

L'Assemblée nationale a proposé de prévoir l'intervention de l'avocat après soixante-douze heures de garde à vue pour l'ensemble des infractions qui viennent d'être énumérées.

Votre commission ayant proposé une solution différente à l'article 5 du présent projet de loi, vous propose par un amendement de supprimer ces dispositions.

Elle vous propose d'adopter l'article 29 quinquies ainsi modifié .

Article 30
(art. 70 et 77-4 nouveau du code de procédure pénale)
Mandat de recherche délivré par le procureur de la République

Dans sa rédaction actuelle, l'article 70 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas de crime flagrant et si le juge d'instruction n'est pas encore saisi, le procureur de la République peut décerner mandat d'amener contre toute personne suspectée d'avoir participé à l'infraction. Le procureur interroge sur-le-champ la personne ainsi conduite devant lui. Si elle se présente spontanément, accompagnée d'un défenseur, elle ne peut être interrogée qu'en présence de ce dernier.

Le dispositif du mandat d'amener est tombé en désuétude, notamment parce qu'il contraint les enquêteurs à amener la personne au procureur ayant délivré le mandat sans pouvoir l'interroger dès son arrestation.

Or, une procédure efficace de recherche des personnes en fuite est déterminante pour la réussite des enquêtes.

Le Gouvernement a décidé de créer un office central chargé de rechercher les délinquants et les criminels en fuite . Le décret de création de cet office central devrait être publié prochainement.

Le présent article tend à substituer au mandat d'amener délivré par le procureur de la République un mandat de recherche .

Le paragraphe I tend à procéder à une réécriture de l'article 70 du code de procédure pénale pour prévoir que le procureur de la République peut décerner mandat de recherche contre toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre l'infraction sur laquelle porte l'enquête.

Ce dispositif serait applicable si les nécessités d'une enquête portant sur un crime ou un délit flagrant puni d'au moins trois ans d'emprisonnement l'exigeaient.

Le texte précise que ce dispositif ne remet pas en cause l'article 73 du code de procédure pénale, aux termes duquel en cas de crime ou de délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement, toute personne a qualité pour appréhender l'auteur des faits et le conduire devant un officier de police judiciaire.

Conformément à l'article 134 du code de procédure pénale, les personnes chargées de l'exécution d'un mandat de recherche ne pourraient s'introduire dans un domicile privé entre vingt-et-une heures et six heures.

Le principal intérêt du texte proposé pour l'article 70 est de prévoir que la personne découverte en vertu du mandat de recherche est placée en garde à vue par l'officier de police judiciaire du lieu de la découverte, qui peut procéder à son audition, sans que cela mette en cause la compétence du procureur du lieu de l'infraction ni la possibilité pour les enquêteurs déjà saisis des faits de se transporter sur place afin de procéder eux-mêmes à l'audition, après avoir si nécessaire bénéficié d'une extension de compétence conformément à l'article 18 du code de procédure pénale.

Le procureur de la République du lieu où la personne a été découverte devrait être avisé dès le début de la mesure tandis que le procureur de la République ayant délivré le mandat de recherche serait avisé dans les meilleurs délais .

Cette rédaction, en l'occurrence justifiée, montre bien que les termes « dès le début » et « dans les meilleurs délais » ne se recouvrent pas exactement. Elle conforte votre commission dans son souhait de voir un magistrat prévenu d'une garde à vue « dès le début » de la mesure.

Le texte proposé précise que le procureur de la République ayant délivré le mandat de recherche peut ordonner que, pendant la durée de la garde à vue, la personne soit conduite dans les locaux du service d'enquête saisi des faits.

Enfin, en l'absence de découverte au cours de l'enquête de la personne ayant fait l'objet du mandat de recherche, si le procureur décidait de requérir l'ouverture d'une information contre une personne non déterminée, le mandat de recherche demeurerait valable pour le déroulement de l'information sauf s'il était rapporté par le juge d'intervention.

Ce dispositif a été approuvé par l'ensemble des magistrats rencontrés par votre rapporteur, ceux-ci y voyant un renforcement substantiel de l'efficacité des enquêtes.

Le paragraphe II tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 77-4 pour prévoir la possibilité de décerner un mandat de recherche au cours d'une enquête préliminaire dans les mêmes conditions qu'au cours d'une enquête de flagrance. Le texte initial prévoyait que le mandat serait décerné par le juge des libertés et de la détention à la requête du procureur de la République, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a prévu que le procureur de la République pourrait lui-même décerner mandat de recherche. De fait, la délivrance du mandat de recherche par le procureur de la République paraît conforme aux règles habituellement applicables au cours de l'enquête préliminaire.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 30 sans modification .

Article 31
(art. 74-2 du code de procédure pénale)
Recherche des personnes en fuite

Le présent article tend à insérer un article 74-2 dans le code de procédure pénale, afin de prévoir un cadre d'enquête permettant de rechercher activement une personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt après la clôture de l'information. Actuellement, dans une telle hypothèse, aucun cadre judiciaire ne permet de mener une enquête pour rechercher la personne en fuite, en dehors de l'inscription au fichier des personnes recherchées.

Le texte proposé pour l'article 74-2 du code de procédure pénale tend à permettre aux officiers de police judiciaire, assistés le cas échéant des agents de police judiciaire, sur instructions du procureur de la République, de procéder aux actes prévus par les articles 56 à 62 du code de procédure pénale, relatifs à l'enquête de flagrance, aux fins de rechercher et de découvrir une personne en fuite.

Les officiers de police pourraient ainsi procéder à des auditions , à des perquisitions et à des examens techniques .

Un dispositif similaire a été créé par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice en cas de disparition d'un mineur ou d'un majeur protégé .

Le nouveau cadre d'enquête pourrait permettre de rechercher :

- les personnes faisant l'objet d'un mandat d'arrêt délivré par le juge d'instruction, le juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction ou son président ou le président de la cour d'assises, alors qu'elles sont renvoyées devant une juridiction de jugement ;

- les personnes faisant l'objet d'un mandat d'arrêt délivré par une juridiction de jugement ou par le juge de l'application des peines ;

- les personnes condamnées à une peine privative de liberté sans sursis supérieure ou égale à un an, lorsque cette condamnation est exécutoire ou passée en force de chose jugée.

Le texte proposé prévoit que, si les nécessités de l'enquête l'exigent, le juge des libertés et de la détention peut, à la requête du procureur de la République, autoriser l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications.

Les modalités prévues par les articles 100, 100-1 et 100-3 à 100-7 du code de procédure pénale, qui définissent le cadre des écoutes téléphoniques au cours d'une instruction, devraient être respectées.

Rappelons que l'article 100 prévoit notamment que la décision d'interception est écrite et qu'elle n'est susceptible d'aucun recours. L'article 100-1 dispose que la décision d'interception doit comporter tous les éléments d'identification de la liaison à intercepter et la durée de l'interception.

L'article 100-3 permet de requérir une personne qualifiée pour procéder à l'installation d'un dispositif d'interception. L'article 100-4 fait obligation au juge d'instruction ou à l'officier de police judiciaire commis par lui de dresser procès-verbal de chacune des opérations d'interception et d'enregistrement.

L'article 100-5 pose le principe de la transcription de la correspondance utile à la manifestation de la vérité.

L'article 100-6 prévoit la destruction des enregistrements à la diligence du procureur de la République ou du procureur général, à l'expiration du délai de prescription de l'action publique. Enfin, l'article 100-7 prévoit des modalités particulières lorsque l'interception concerne la ligne d'un député ou d'un sénateur ou une ligne dépendant du cabinet d'un avocat ou de son domicile.

Le texte proposé pour l'article 74-2 du code de procédure pénale prévoit que les attributions exercées par le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui aux termes des articles 100-3 à 100-5 seront exercées par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire requis par ce magistrat en cas d'enquête pour rechercher une personne en fuite.

En ce qui concerne la durée des interceptions, le projet de loi initial prévoyait une durée maximale de deux mois renouvelable sans limitation .

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a limité la durée des interceptions à une période de deux mois, renouvelable trois fois , soit six mois au total.

Votre commission s'interroge sur l'opportunité de limiter la durée des interceptions dans un tel cas. Au cours d'une instruction, la durée des interceptions n'est pas limitée. Dans le cas prévu par le nouvel article 74-2, il s'agit de rechercher une personne en fuite. Si une interception était ordonnée en vain pendant six mois, puis que de nouvelles pistes apparaissaient, aucune interception ne pourrait plus être ordonnée.

Compte tenu des garanties qui entourent le déroulement des interceptions prévues par le présent article, votre commission vous propose, par un amendement , de conserver la durée maximale de six mois en matière correctionnelle et de prévoir la possibilité de renouveler la décision d'interception au-delà de cette période en matière criminelle. Il convient de rappeler que les interceptions s'exercent sous le contrôle du juge des libertés et de la détention. Le texte proposé prévoit que celui-ci devra être informé des actes accomplis par le procureur sur l'officier de police judiciaire.

Le projet de loi initial prévoyait une information « sans délai » du procureur de la République, mais l'Assemblée nationale a prévu une information « dans les meilleurs délais ».

Par un amendement , votre commission vous propose de rétablir l'obligation d'informer sans délai le juge des libertés et de la détention, afin de renforcer le contrôle exercé par celui-ci sur les interceptions.

Elle vous propose d'adopter l'article 31 ainsi modifié .

CHAPITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES À L'INSTRUCTION

SECTION 1
Dispositions relatives aux droits des victimes
Article 32 A
(art. 80-3 du code de procédure pénale)
Information de la victime sur les modalités de la
constitution de partie civile

L'article 80-3 du code de procédure pénale introduit dans ce code par la loi n° 2000-516 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes dispose que, dès le début de l'information, le juge d'instruction doit avertir la victime d'une infraction de l'ouverture d'une procédure, de son droit de se constituer partie civile et des modalités d'exercice de ce droit. Si la victime est mineure, l'avis est donné à ses représentants légaux.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Gérard Vignoble et Rudy Salles, tend à compléter l'article 80-3 pour préciser que l'avis donné à la victime doit lui indiquer qu'elle a le droit, si elle souhaite se constituer partie civile, d'être assistée d'un avocat qu'elle pourra choisir ou qui, à sa demande, sera désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats, en précisant que les frais seront à sa charge sauf si elle remplit les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle ou si elle bénéficie d'une assurance de protection juridique.

Le texte précise que lorsque le juge d'instruction est informé par la victime qu'elle se constitue partie civile et qu'elle demande la désignation d'un avocat, il en informe sans délai le bâtonnier de l'ordre des avocats.

Cette dernière disposition est tout à fait utile, dès lors qu'elle simplifiera les démarches de la victime.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 32 A sans modification .

Article 32
(art. 90-1 nouveau et 175-3 du code de procédure pénale)
Information de la partie civile au cours de l'information

La loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a inséré dans le code pénal un article 175-3 prévoyant que le juge d'instruction informe tous les six mois la partie civile de l'avancement de l'instruction.

Au cours de l'examen du projet de loi, le Sénat s'était inquiété de la charge représentée par cette information de l'ensemble des parties civiles, alors même que leurs avocats peuvent avoir accès au dossier de la procédure à tout moment. Notre assemblée n'avait cependant pas été entendue.

Après trois ans d'application, il apparaît que l'obligation d'informer la partie civile tous les six mois du déroulement de l'information constitue une charge importante pour le juge d'instruction sans toujours être véritablement utile à la partie civile. Il a même été indiqué à votre rapporteur par des magistrats instructeurs que les avis aux parties civiles déroutaient souvent celles-ci.

Le présent article tend donc à limiter cette information aux cas où elle est particulièrement justifiée.

Le paragraphe I tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 90-1 pour prévoir l'obligation pour le juge d'instruction d'informer tous les six mois la partie civile de l'état d'avancement de l'information. Cette obligation ne serait désormais applicable qu'en matière criminelle et pour les délits contre les personnes prévus par le livre II (atteintes aux personnes) du code pénal.

Votre commission approuve ce dispositif. Elle constate cependant que certains délits prévus par le livre III (atteintes aux biens) du code pénal s'accompagnent d'atteintes aux personnes, quelquefois aussi graves ou plus graves que celles qui résultent des délits prévus par le livre II du code pénal. Ainsi, certains vols sont accompagnés de violences, voire de tortures et d'actes de barbarie et n'en sont pas moins réprimés par le livre III du code pénal. Par un amendement , votre commission vous propose en conséquence de viser également les délits prévus par le livre III du code pénal lorsqu'ils s'accompagnent d'une atteinte aux personnes . L'avis pourrait être donné par lettre simple adressée à la partie civile et à son avocat, ou à l'occasion de l'audition de la partie civile.

Enfin, le texte précise que lorsqu'une association regroupant plusieurs victimes d'un accident collectif s'est constituée partie civile, l'avis est donné à cette seule association, à charge pour elle d'en informer les victimes regroupées en son sein, sauf si ces victimes se sont également constituées parties civiles à titre individuel.

Le paragraphe II tend à supprimer, par coordination, l'actuel article 175-3 du code de procédure pénale, qui prévoit l'information de la partie civile sur le déroulement de l'instruction.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 32 ainsi modifié .

Article 32 bis
(art. 82-2 du code de procédure pénale)
Demande d'audition de la victime en présence de l'avocat
de la personne mise en examen

La loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a étendu le droit pour la personne mise en examen de formuler des demandes d'actes au cours de l'instruction.

L'article 82-2 du code de procédure pénale prévoit désormais que, lorsque la personne mise en examen saisit le magistrat instructeur de certaines demandes d'actes (transport sur les lieux, audition d'un témoin, d'une partie civile ou d'une autre partie mise en examen), elle peut demander que cet acte soit effectué en présence de son avocat.

Le même droit est ouvert à la partie civile s'agissant d'un transport sur les lieux, de l'audition d'un témoin ou d'une autre partie civile ou de l'interrogatoire de la personne mise en examen.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM.  Gérard Vignoble et Rudy Salles, tend à compléter l'article 82-2 pour prévoir que lorsque la présence de l'avocat est sollicitée pour l'audition de la victime, le juge d'instruction est tenu de rejeter la demande s'il lui apparaît que la personnalité de la victime, notamment s'il s'agit d'une personne particulièrement vulnérable, le justifie.

Déjà, le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice présenté au Parlement en juillet 2002 prévoyait de supprimer la possibilité pour la personne mise en examen de demander que son avocat puisse assister aux actes qu'elle demande.

Le Sénat s'était opposé à cette disposition en rappelant que le juge d'instruction peut toujours refuser de faire droit aux demandes de la personne mise en examen comme de la partie civile .

Le dispositif proposé par le présent article est dépourvu de portée normative. Il paraît évident -et des magistrats instructeurs l'ont confirmé à votre rapporteur- que les juges d'instruction refusent la présence de l'avocat de la personne mise en examen lors de l'audition de la victime, si cette dernière est susceptible d'en être fragilisée. Il paraît souhaitable, dans une telle matière, de faire confiance aux magistrats instructeurs.

Votre commission vous propose la suppression de l'article 32 bis.

Article 33
(art. 91-1 nouveau du code de procédure pénale)
Assimilation de la partie civile au témoin pour le paiement des indemnités

Les articles 375-1 et 422 du code de procédure pénale assimilent la partie civile au témoin lors de sa comparution devant le tribunal correctionnel ou la cour d'assises pour le paiement des indemnités , sauf décision contraire de la juridiction de jugement.

Ces dispositions permettent aux parties civiles de se voir accorder des indemnités de comparution et de frais de voyage et de séjour, dans des conditions fixées par les articles R. 123 à R. 138 du code de procédure pénale.

En revanche, aucune indemnité n'est prévue pour les parties civiles pendant le déroulement de l'information. Or, dans certains cas, les parties civiles sont contraintes d'effectuer des dépenses importantes pour se rendre à des auditions ou confrontations sans qu'aucun remboursement de frais ne soit possible.

L'article 7 de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales incite les Etats membres de l'Union européenne à prévoir pour la victime « la possibilité d'être remboursée des frais exposés en raison de sa participation légitime à la procédure pénale ».

Le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 91-1 pour permettre au juge d'instruction de décider que la partie civile est assimilée au témoin en ce qui concerne le paiement des indemnités. Afin d'éviter une augmentation très importante des frais de justice, ce dispositif serait limité aux crimes et aux délits contre les personnes prévus par le livre II du code pénal .

Comme l'a indiqué votre rapporteur à propos de l'article 32 du projet de loi, certains délits prévus par le livre III du code pénal (atteintes aux biens) s'accompagnent d'atteintes aux personnes plus graves que certaines infractions prévues par le livre II. Elle vous propose en conséquence, par un amendement , de prévoir la possibilité d'assimiler la partie civile au témoin pour les délits prévus par le livre III du code pénal lorsqu'ils s'accompagnent d'atteintes aux personnes.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 33 ainsi modifié .

Article 34
(art. 138-1 nouveau et 144-2 du code de procédure pénale)
Prise en compte de l'intérêt de la victime lors d'un contrôle judiciaire
ou d'une mise en liberté

Le présent article tend à renforcer la prise en compte des intérêts de la victime en cas de placement sous contrôle judiciaire ou de mise en liberté de la personne mise en examen.

Ces dispositions doivent en particulier permettre d'assurer le plein respect dans notre pays des mesures prévues par la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 15 mars 2001. Dans son article 4, cette décision-cadre prévoit l'obligation pour chaque Etat membre de garantir aux victimes l'accès aux informations pertinentes pour la protection de leurs intérêts.

Cet article prévoit notamment que les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour assurer, au moins dans les cas où il existe un danger pour la victime, qu'au moment de la remise en liberté de la personne poursuivie ou condamnée pour l'infraction, l'information puisse, si elle s'avère nécessaire, être décidée.

Le paragraphe I tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 138-1 pour améliorer la prise en compte des intérêts de la victime lorsque la personne mise en examen fait l'objet d'un contrôle judiciaire.

Le texte proposé pour l'article 138-1 du code de procédure pénale fait obligation au juge d'instruction ou au juge des libertés et de la détention, lorsque la personne mise en examen est soumise à l'interdiction de recevoir, ou rencontrer la victime ou d'entrer en relation de quelque façon que ce soit avec elle, d'adresser à la victime un avis l'informant de cette mesure. Le texte précise que l'avis est également adressé à l'avocat de la victime lorsque celle-ci est partie civile.

L'avis devrait préciser les conséquences susceptibles de résulter pour la personne mise en examen du non-respect de l'interdiction de rencontrer la victime.

Votre commission approuve pleinement cette disposition. Bien souvent, compte tenu des difficultés de contrôler le respect des obligations du contrôle judiciaire par les services qui sont chargés de ce contrôle, la violation des obligations du contrôle judiciaire est signalée par la victime elle-même. Il est donc souhaitable qu'elle sache que la personne mise en examen a l'interdiction de la rencontrer.

Le paragraphe II tend à rétablir l'article 144-2 du code de procédure pénale, qui permettait d'exécuter une détention provisoire sous le régime du placement sous surveillance électronique, mais qui a été supprimé par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice.

Le texte proposé pour l'article 144-2 prévoit tout d'abord qu'avant toute décision de mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire, la juridiction saisie doit prendre en considération les conséquences qui pourraient en résulter pour la victime.

Il dispose en outre que le placement sous contrôle judiciaire avec interdiction de recevoir, de rencontrer ou d'entrer en relation avec la victime de quelque manière que ce soit doit être ordonné chaque fois que la mise en liberté est susceptible d'entraîner un risque pour la victime, notamment un risque de pressions. Ces dispositions ont été modifiées lors de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale sans cependant que la portée du texte soit modifiée.

Des dispositions similaires sont prévues par le présent projet de loi (article 68) en ce qui concerne la phase suivant le jugement.

Votre commission estime redondant de préciser que la juridiction saisie doit prendre en compte les conséquences qui pourraient résulter pour la victime d'une décision de mise en liberté.

L'article préliminaire du code de procédure pénale dispose déjà que « l'autorité judiciaire veille à l'information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale ». Il n'apparaît pas souhaitable de décliner ce principe dans les différents chapitres du code .

Par ailleurs, il résulte déjà très clairement des dispositions du code de procédure pénale que les juridictions doivent prendre en compte l'intérêt de la victime lorsqu'elles envisagent de mettre en liberté une personne placée en détention provisoire. L'un des motifs essentiels du placement et du maintien en détention provisoire, aux termes de l'article 144 du code de procédure pénale, est le risque de pression sur les témoins et les victimes .

Dans ces conditions, votre commission vous propose, par un amendement , une nouvelle rédaction du texte proposé pour l'article 144-2, afin de ne maintenir que l'obligation pour la juridiction saisie d'interdire à la personne remise en liberté de rencontrer la victime, lorsque la mise en liberté est susceptible d'entraîner un risque pour celle-ci.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 34 ainsi modifié .

Article 35
(art. 142 du code de procédure pénale)
Constitution de sûretés au profit de la victime dans le cadre
du contrôle judiciaire

Aux termes de l'article 138 du code de procédure pénale, relatif au contrôle judiciaire, la personne mise en examen peut notamment être soumise aux obligations suivantes :

- fournir un cautionnement dont le montant et les délais de versement, en une ou plusieurs fois, sont fixés par le juge d'instruction, compte tenu notamment des ressources et des charges de la personne mise en examen ;

- constituer, dans un délai, pour une période et un montant déterminés par le juge d'instruction, des sûretés personnelles ou réelles .

L'article 142 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, précise l'objet du cautionnement et des sûretés.

Le cautionnement ou les sûretés sont destinés à garantir :

- la représentation de la personne mise en examen, du prévenu ou de l'accusé à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement, ainsi que, le cas échéant, l'exécution des autres obligations qui lui ont été imposées ;

- le paiement de la réparation des dommages causés par l'infraction, des restitutions, de la dette alimentaire si la personne est poursuivie pour défaut de paiement de cette dette, et des amendes.

Le dernier alinéa de l'article 142 précise que la décision du juge d'instruction détermine les sommes affectées à chacune des deux parties du cautionnement ou des sûretés. Le juge d'instruction peut décider que les sûretés garantiront dans leur totalité les droits des victimes.

Un projet de décret destiné à mettre en oeuvre ces dispositions a été élaboré et soumis au Conseil d'Etat, qui a estimé que son contenu excédait la compétence du pouvoir réglementaire. La Haute juridiction a estimé que « dans la mesure où les sûretés ont en commun de porter par nature atteinte aux droits des tiers, il revient au législateur, dans un souci de sécurité du commerce juridique, d'en aménager les principes fondamentaux par application de l'article 34 de la Constitution, qui range les principes fondamentaux du droit des obligations et des droits réels parmi les matières législatives ». Le Conseil d'Etat a ajouté qu'il « n'appartient pas au pouvoir réglementaire, même pour favoriser le recours au contrôle judiciaire et améliorer la protection de certaines victimes, de mettre en place des dispositifs dérogatoires que seule la loi peut imposer ».

Dans ces conditions, le présent article tend à modifier l'article 142 du code de procédure pénale pour faciliter l'application de cet article.

Le 1° tend à modifier le dernier alinéa de l'article 142 pour prévoir que le juge d'instruction peut décider que les sûretés garantissent dans leur totalité les sommes destinées au paiement de la réparation des dommages, d'une part, des amendes, d'autre part, ou l'une ou l'autre de ces sommes. Cette rédaction est plus souple que la rédaction actuelle, qui n'autorise le juge d'instruction qu'à décider que les sûretés garantissent dans leur totalité les droits des victimes. L'Assemblée nationale a supprimé une mention inutile.

Le 2° tend à compléter l'article 142 pour préciser les conditions d'établissement des sûretés, lesquelles sont destinées, en totalité ou en partie, à garantir les droits des victimes.

Le texte précise que lorsque les sûretés garantissent les droits d'une ou plusieurs victimes qui ne sont pas encore identifiées ou qui ne se sont pas encore constituées parties civiles, elles sont établies au nom d'un bénéficiaire, personne agissant pour le compte des victimes et, le cas échéant, du Trésor, lorsque les sûretés garantissent également le paiement de l'amende, dans des conditions précisées par décret en Conseil d'Etat.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 35 sans modification .

SECTION 2
Dispositions relatives aux témoins et aux témoins assistés
Article 36
(art. 102 du code de procédure pénale)
Modalités d'audition des témoins

Dans sa rédaction actuelle, l'article 102 du code de procédure pénale prévoit, dans son premier alinéa, que les témoins sont entendus séparément et hors la présence de la personne mise en examen, par le juge d'instruction assisté de son greffier.

Cette rédaction paraît exclure la présence de toute autre personne que le témoin, le juge d'instruction et son greffier. En pratique, il arrive fréquemment que le juge d'instruction entende les témoins lors de confrontations entre eux ou avec l'une ou l'autre des parties.

Le présent article tend à clarifier la situation en prévoyant que les témoins sont entendus, soit séparément et hors la présence des parties, soit lors de confrontations réalisées entre eux ou avec l'une ou l'autre des parties par le juge d'instruction, assisté de son greffier.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 36 sans modification .

Article 37
(art. 113-1, 113-2, 113-3, 113-8, 120, 167, 170 et 175
du code de procédure pénale)
Statut du témoin assisté

La loi du 15 juin 2000 renforçant la protection d'innocence et les droits des victimes a étendu le champ d'application de la procédure du témoin assisté, jusqu'alors utilisée de manière marginale, tout en définissant un véritable statut du témoin assisté.

Une personne visée par un réquisitoire introductif doit toujours être entendue comme témoin assisté si le juge n'envisage pas de la mettre en examen. Les personnes nommément visées dans une plainte ou mises en cause par la victime peuvent également être entendues comme témoins assistés, ce statut étant de droit si elles le demandent. Enfin, les personnes mises en cause par un témoin ou à l'encontre desquelles il existe des indices rendant vraisemblable la participation à la commission de l'infraction peuvent également être entendues comme témoin assisté sur décision du juge d'instruction.

Le témoin assisté bénéficie du droit d'être assisté par un avocat qui est avisé préalablement des auditions et a accès au dossier de la procédure. Il peut également demander au juge d'instruction à être confronté avec le ou les personnes qui le mettent en cause.

Le témoin assisté ne peut être placé sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire, ni faire l'objet d'une ordonnance de renvoi ou de mise en accusation.

A tout moment de la procédure, le témoin assisté peut demander au juge d'instruction à être mis en examen. Il bénéficie alors de l'ensemble des droits de la défense.

Le témoin assisté ne prête pas serment.

Le juge d'instruction peut mettre en examen le témoin assisté s'il apparaît au cours de la procédure que des indices graves ou concordants le justifient. Il ne peut en principe le faire qu'au cours d'une audition après l'avoir informé de son intention, le cas échéant par lettre recommandée. Il peut procéder à la mise en examen par lettre recommandée, lorsque cette mise en examen est jointe à l'avis de fin d'information.

Au cours de la discussion du projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, le Sénat s'était prononcé pour la plus grande extension possible du statut du témoin assisté, afin de limiter au maximum les mises en examen inutiles.

En 2001, 43.346 personnes ont été mises en examen ab initio et 5.903 ont été placées sous le régime du témoin assisté. Au cours de la même année, 718 personnes ont été mises en examen après avoir été précédemment entendues comme témoin assisté .

Le présent article a pour objet de renforcer la cohérence des dispositions relatives au témoin assisté, afin de favoriser le recours à cette procédure.

Le paragraphe I tend à compléter l'article 113-1 du code de procédure pénale pour prévoir l'obligation d'entendre comme témoin assisté, lorsqu'elle n'est pas mise en examen, non seulement la personne visée par un réquisitoire introductif mais également la personne visée par un réquisitoire supplétif .

Le réquisitoire supplétif permet au magistrat instructeur d'informer sur des faits non visés dans le réquisitoire introductif et découverts en cours d'instruction.

Il paraît tout à fait logique d'appliquer les mêmes règles en cas de réquisitoire supplétif qu'en cas de réquisitoire introductif.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 113-2 qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit que toute personne nommément visée par une plainte ou mise en cause par la victime peut être entendue comme témoin assisté. Lorsqu'elle comparaît devant le juge d'instruction, elle est obligatoirement entendue en cette qualité si elle en fait la demande.

Le présent paragraphe tend à compléter ces dispositions pour prévoir que si la personne est nommément visée par une plainte avec constitution de partie civile, elle est avisée de son droit d'être entendue comme témoin assisté lorsqu'elle comparaît devant le juge d'instruction. De fait, il est utile que la personne mise en cause soit informée par le juge d'instruction de la possibilité qui s'ouvre à elle d'être entendue comme témoin assisté et donc de bénéficier de certains droits.

Le paragraphe III a pour objet de modifier l'article 113-3 du code de procédure pénale, qui énumère les droits du témoin assisté : droit d'être assisté par un avocat qui est avisé des auditions et a accès au dossier de la procédure, droit de demander au juge d'instruction d'être confronté avec la ou les personnes qui le mettent en cause.

Le présent paragraphe vise à étendre les droits du témoin assisté en lui permettant non seulement de demander à être confronté avec la ou les personnes qui le mettent en cause mais également de formuler des requêtes en annulation sur le fondement de l'article 173 du code de procédure pénale. L'article 173 décrit la procédure suivie en matière de requêtes en nullité.

Le paragraphe IV vise à refondre l'article 113-8 du code de procédure pénale, relatif aux modalités de mise en examen du témoin assisté. Dans sa rédaction actuelle, cet article ne permet au juge d'instruction de mettre en examen la personne qu'après l'avoir informée de son intention, le cas échéant par lettre recommandée, et l'avoir mise en mesure de faire connaître ses observations au cours d'un interrogatoire de première comparution. Il ne peut mettre en examen la personne par lettre recommandée que s'il lui adresse en même temps l'avis de fin d'information.

Le texte proposé pour l'article 113-8 prévoit que la mise en examen peut se faire dans les formes prévues à l'article 114 (avocat convoqué cinq jours avant l'interrogatoire), le juge d'instruction devant respecter les formes prévues aux septième et huitième alinéas de l'article 116 (notification des droits du mis en examen et notification du délai prévisible d'achèvement de la procédure).

Le juge d'instruction pourrait également procéder à la mise en examen en adressant à la personne une lettre recommandée précisant les faits reprochés et leur qualification juridique et informant la personne de son droit de formuler des demandes d'actes ou des requêtes en annulation, ainsi que du délai prévisible d'achèvement de la procédure.

La lettre recommandée pourrait, comme actuellement, être adressée en même temps que l'avis de fin d'information.

Enfin, en cas de mise en examen par lettre recommandée, la personne serait informée que si elle demande à être à nouveau entendue par le juge d'instruction, celui-ci est tenu de procéder à son interrogatoire.

Lors de l'examen du projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, le Sénat a été à l'origine de la suppression des possibilités de mise en examen par lettre recommandée. Votre commission des Lois avait en effet estimé anormal qu'une personne puisse être mise en examen sans avoir jamais eu la possibilité d'être entendue par le magistrat instructeur.

Le cas prévu par le présent article est différent, puisque la personne susceptible d'être mise en examen aura déjà été entendue une ou plusieurs fois en tant que témoin assisté. Dans ces conditions, la possibilité de la mettre en examen par lettre recommandée n'apparaît pas choquante.

Le paragraphe V tend à modifier l'article 120 du code de procédure pénale, relatif aux interrogatoires et confrontations, pour mentionner les avocats des témoins assistés au même titre que les avocats des parties dans la liste des personnes qui peuvent poser des questions, présenter de brèves observations ou déposer des conclusions afin de demander acte d'un désaccord avec le juge d'instruction.

Le paragraphe VI tend à compléter l'article 167 du code de procédure pénale, relatif à la notification par le juge d'instruction des conclusions des expertises, pour permettre au juge d'instruction de notifier au témoin assisté des expertises qui le concernent en lui fixant un délai pour présenter une demande de complément d'expertise ou de contre-expertise. Contrairement à la situation qui prévaut à l'égard de la personne mise en examen, le juge d'instruction ne serait pas tenu de rendre une ordonnance motivée s'il estimait la demande injustifiée, sauf si la personne demandait à être mise en examen.

Une telle différence est logique, dès lors que le témoin assisté, contrairement à la personne mise en examen, ne peut pas demander au juge d'ordonner des expertises.

Par un amendement , votre commission vous propose, par cohérence avec la rédaction de l'article 167 du code de procédure pénale, de faire référence à la notification des conclusions des expertises et non à la notification des expertises.

Le paragraphe VII tend à mentionner le témoin assisté dans l'article 170 du code de procédure pénale, qui prévoit qu'en toute matière, la chambre de l'instruction peut, au cours de l'information, être saisie aux fins d'annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure par le juge d'instruction, le procureur de la République ou les parties.

Cette rédaction résulte d'un amendement apporté au projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des lois. Le texte initial prévoyait que l'ensemble des dispositions relatives aux nullités s'appliquaient au témoin assisté, et notamment le délai de six mois laissé à la personne mise en examen ou à la partie civile pour invoquer les moyens pris de la nullité d'un acte d'instruction. La rédaction retenue par l'Assemblée nationale ne permet pas l'application, pourtant justifiée, au témoin assisté de l'ensemble des règles relatives aux requêtes en nullité. Tout en conservant la rédaction proposée par l'Assemblée nationale, votre commission vous propose, par un amendement , d'insérer dans le présent article deux paragraphes additionnels, afin de prévoir l'application au témoin assisté du délai de six mois pour invoquer les nullités, ainsi que des règles procédurales qui doivent être respectées pour formuler les requêtes en nullité.

Enfin, le paragraphe VIII tend à modifier l'article 175 du code de procédure pénale, qui définit la procédure de règlement de l'information. Dans son dernier alinéa, cet article dispose que les dispositions faisant obligation au juge d'instruction d'aviser les parties, aussitôt que l'information lui paraît terminée, s'appliquent également au témoin assisté.

Le présent article tend à compléter cet alinéa pour prévoir que les dispositions qui donnent aux parties un délai de vingt jours à compter de l'envoi de l'avis de fin d'information pour former des requêtes en nullité sont également applicables au témoin assisté. Une telle évolution est logique dès lors que le témoin assisté se voit reconnaître la possibilité de formuler des requêtes en nullité.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 37 ainsi modifié.

SECTION 3
Dispositions relatives aux mandats

L'ordonnance criminelle de 1670 prévoyait trois mandats, qui étaient appelés « décrets » : le « décret d'assigné pour être ouï », simple invitation à comparaître, le « décret d'ajourné pour comparaître », qui obligeait à se présenter en personne, et le « décret de prise de corps » qui entraînait l'arrestation et la détention.

Aujourd'hui, le code de procédure pénale distingue quatre mandats :

- le mandat de comparution a pour objet de mettre la personne à l'encontre de laquelle il est décerné en demeure de se présenter devant le juge à la date et à l'heure indiquées par ce mandat ;

- le mandat d'amener est l'ordre donné par le juge à la force publique de conduire immédiatement la personne à l'encontre de laquelle il est décerné devant lui ;

- le mandat de dépôt est l'ordre donné par le juge des libertés et de la détention au chef de l'établissement pénitentiaire de recevoir et de détenir la personne mise en examen à l'encontre de laquelle il a rendu une ordonnance aux fins de placement en détention provisoire ;

- le mandat d'arrêt est l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la conduire à la maison d'arrêt indiquée sur le mandat, où elle sera reçue et détenue.

La présente section tend à modifier profondément les règles relatives aux mandats, d'une part pour créer un mandat de recherche , d'autre part pour simplifier les modalités d'exécution des différents mandats.

Article 38
(art. 122, 123, 134, 135-1 nouveau et 136 du code de procédure pénale)
Création d'un mandat de recherche

Le présent article tend à créer une nouvelle catégorie de mandat pouvant être délivré par le juge d'instruction : le mandat de recherche. Conformément aux dispositions de l'article 30 du projet de loi, le mandat de recherche pourrait également être décerné par le procureur de la République au cours de l'enquête.

Le paragraphe I tend à réécrire l'article 122 du code de procédure pénale, qui définit les différentes catégories de mandats. Le projet de loi initial tendait à compléter l'article 122 sans en modifier la structure, l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a estimé préférable de procéder à une réécriture complète de cet article.

Le texte proposé pour l'article 122 prévoit que le juge d'instruction peut, selon les cas, décerner mandat de recherche, de comparution, d'amener ou d'arrêt, tandis que le juge des libertés et de la détention peut décerner mandat de dépôt.

Le texte énumère ensuite, comme actuellement, les différentes catégories de mandats, tout en mentionnant, outre les mandats déjà existants, le mandat de recherche.

Le mandat de recherche pourrait être décerné à l'égard d'une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Il ne pourrait être décerné à l'égard d'une personne ayant fait l'objet d'un réquisitoire nominatif, d'un témoin assisté ou d'une personne mise en examen.

Le texte proposé prévoit que le mandat de recherche est l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la placer en garde à vue.

La création du mandat de recherche est une innovation saluée par l'ensemble des praticiens consultés par votre rapporteur. Aucun mandat ne permet en effet aujourd'hui le placement en garde à vue de la personne recherchée, celle-ci devant toujours être présentée au magistrat ayant décerné le mandat. Or, dans certains cas, le placement en garde à vue sur le lieu d'interpellation de la personne peut permettre d'éviter son transfèrement s'il n'est pas indispensable.

Ce mandat ne pourra être utilisé à l'encontre de témoins assistés, de personnes mises en examen ou de personnes ayant fait l'objet d'un réquisitoire nominatif. Cette règle permettra de distinguer clairement ce nouveau mandat des autres puisque le texte proposé pour l'article 122 prévoit que les mandats de comparution, d'amener ou d'arrêt peuvent être décernés à l'encontre des personnes à l'égard desquelles il existe des indices graves ou concordants (et non des raisons plausibles) rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer à la commission d'une infraction, y compris si elles sont témoins assistés ou mises en examen.

Le juge d'instruction serait tenu d'entendre comme témoins assistés les personnes contre lesquelles il a été décerné un mandat de comparution, d'amener ou d'arrêt, sauf à les mettre en examen. Ces personnes ne pourraient être mises en garde à vue pour les faits ayant donné lieu à la délivrance du mandat.

Le texte proposé ne modifie pas, pour l'essentiel, les définitions des mandats de comparution, d'amener ou d'arrêt, rappelées en introduction des dispositions de la présente section. Il prévoit cependant que le mandat d'arrêt consiste à rechercher la personne concernée et à la conduire devant le juge d'instruction, l'incarcération à la maison d'arrêt n'étant désormais prévue que lorsque la personne arrêtée se trouve à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 123 du code de procédure pénale, qui précise les formes que doivent revêtir les mandats. Cet article prévoit ainsi que les mandats d'amener, de dépôt et d'arrêt mentionnent la nature des faits imputés à la personne, leur qualification juridique et les articles de loi applicables. Le présent paragraphe tend à prévoir dans l'article 123 les formes que devra revêtir le mandat de recherche. Il devrait naturellement mentionner, comme les autres mandats, la nature des faits imputés à la personne et leur qualification juridique. Comme le mandat d'amener ou d'arrêt, il serait notifié et exécuté par un officier ou agent de la police judiciaire ou par un agent de la force publique.

Comme les mandats d'amener et d'arrêt, il pourrait, en cas d'urgence, être diffusé par tous moyens.

Le paragraphe III a pour objet de modifier l'article 134 du code de procédure pénale, qui fixe les règles d'exécution des mandats d'amener et d'arrêt, afin de prévoir l'application de ces règles au mandat de recherche. Ainsi, l'agent chargé de l'exécution d'un mandat de recherche ne pourrait s'introduire dans le domicile d'un citoyen avant six heures ni après vingt-et-une heures. Si la personne ne pouvait être saisie, un procès-verbal de perquisition et de recherches infructueuses serait adressé au magistrat ayant délivré le mandat.

Le paragraphe IV tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 135-1 destiné à fixer les règles procédurales propres au mandat de recherche. Dans la rédaction initiale du projet de loi, le texte proposé pour l'article 135-1 prévoyait que le mandat de recherche pourrait être décerné contre les personnes à l'encontre desquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont commis l'infraction. L'Assemblée nationale a cependant préféré inscrire cette disposition dans l'article 122 du code de procédure pénale, qui définit les différents mandats.

Dans ces conditions, le texte proposé pour l'article 135-1 du code de procédure pénale prévoit que la personne découverte en vertu d'un mandat de recherche est placée en garde à vue par l'officier du lieu de la découverte, suivant les modalités prévues à l'article 154 du code de procédure pénale, qui définit les modalités des gardes à vue intervenant au cours d'une commission rogatoire.

Le projet de loi initial prévoyait que le juge d'instruction territorialement compétent serait informé du placement en garde à vue dès le début de la mesure, le juge d'instruction saisi des faits devant être informé dans les meilleurs délais. La même règle est prévue par l'article 30 du projet de loi en ce qui concerne l'information du procureur de la République en cas de placement en garde à vue d'une personne découverte en vertu d'un mandat de recherche délivré au cours d'une enquête.

L'Assemblée nationale a modifié la rédaction proposée pour prévoir seulement une information du juge d'instruction saisi des faits dès le début de la mesure.

D'une part, il n'existe aucune raison de prévoir un régime d'information différent selon que le mandat de recherche a été délivré au cours d'une enquête ou au cours d'une instruction.

D'autre part, l'Assemblée nationale a proposé, dans tous les textes relatifs à la garde à vue, de prévoir une information du procureur de la République et du juge d'instruction « dans les meilleurs délais » et non plus « dès le début » de la mesure. Dans ces conditions, il est singulier qu'elle ait souhaité prévoir, dans le seul cas du mandat de recherche, une information du juge d'instruction saisi des faits « dès le début » de la mesure de garde à vue.

Par un amendement , votre commission vous propose de rétablir la rédaction initiale du projet de loi pour prévoir une information du juge d'instruction territorialement compétent dès le début de la garde à vue et une information du juge d'instruction saisi des faits dans les meilleurs délais.

Le texte proposé pour l'article 135-1 du code de procédure pénale dispose in fine que l'officier de police judiciaire du lieu où la personne a été découverte peut être requis pour procéder à l'audition de la personne et exécuter tous actes d'information nécessaires. Pendant la durée de la garde à vue, la personne pourrait également être conduite dans les locaux du service d'enquête saisi des faits.

Le paragraphe V a pour objet de modifier l'article 136 du code de procédure pénale, qui fixe les sanctions en cas de non-respect des formes des mandats. Il s'agit de prévoir que l'inobservation des formalités prescrites pour le mandat de recherche peut donner lieu à des sanctions disciplinaires , conformément aux règles actuelles applicables aux mandats de comparution, d'amener, de dépôt et d'arrêt tout en supprimant l'amende civile de 7,5 euros qui peut aujourd'hui être prononcée contre le greffier par le juge d'instruction.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 38 ainsi modifié .

Article 39
(art. 125, 126, 127, 132, 133, 133-1 nouveau
et 822 du code de procédure pénale)
Règles relatives à l'exécution des mandats

Le présent article a pour objet de simplifier les règles relatives à l'exécution des mandats d'amener et d'arrêt.

1. Le droit actuel

- Le mandat d'amener

Actuellement, lorsqu'une personne est arrêtée en vertu d'un mandat d'amener , elle est immédiatement interrogée par le juge d'instruction. Néanmoins, si l'interrogatoire ne peut être immédiat, la personne est conduite à la maison d'arrêt où elle ne peut être détenue plus de vingt-quatre heures. A l'expiration de ce délai, elle est conduite devant le procureur de la République, qui requiert le juge d'instruction ou le président du tribunal ou un juge désigné par lui de procéder immédiatement à l'interrogatoire, à défaut de quoi la personne est mise en liberté.

Si la personne est trouvée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction qui a délivré le mandat, elle est conduite, soit, avec son accord, devant le juge d'instruction qui a délivré le mandat, soit devant le procureur de la République du lieu de l'arrestation.

Dans ce dernier cas, le procureur de la République l'interroge sur son identité, lui notifie le mandat et reçoit ses déclarations si elle décide d'en faire. Si la personne refuse d'être transférée, elle est conduite dans la maison d'arrêt et avis immédiat est donné au juge d'instruction compétent.

Le juge d'instruction saisi de l'affaire doit décider aussitôt s'il y a lieu d'ordonner le transfèrement. Dans ce cas, la personne doit être conduite devant lui dans les quatre jours de la notification du mandat, ce délai étant porté à six jours en cas de transfèrement d'un département d'outre-mer vers un autre département ou de la France métropolitaine vers un département d'outre-mer.

- Le mandat d'arrêt

Si la personne est en fuite ou si elle réside hors du territoire de la République, le juge d'instruction peut décerner contre elle un mandat d'arrêt si le fait pour lequel elle est recherchée comporte une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave.

La personne saisie en vertu d'un mandat d'arrêt est conduite sans délai dans la maison d'arrêt indiquée sur le mandat. Dans les vingt-quatre heures de l'incarcération de la personne, il est procédé à son interrogatoire. Si la personne est arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction qui a délivré le mandat, elle est conduite immédiatement devant le procureur de la République du lieu de l'arrestation, qui reçoit ses déclarations si elle souhaite en faire.

Le procureur de la République informe sans délai le magistrat qui a délivré le mandat et requiert le transfèrement. Lorsqu'il y a lieu à transfèrement, la personne doit être conduite à la maison d'arrêt indiquée sur le mandat dans les mêmes délais que ceux prévus pour le transfèrement d'une personne arrêtée en vertu d'un mandat d'amener.

2. Les dispositions du projet de loi

Le paragraphe I tend à modifier l'article 125 du code de procédure pénale, qui prévoit notamment que lorsqu'une personne arrêtée en vertu d'un mandat d'amener ne peut être interrogée immédiatement, elle est conduite dans la maison d'arrêt où elle ne peut être détenue plus de vingt-quatre heures.

Le présent paragraphe tend à mettre fin à cette possibilité de conduire la personne arrêtée en maison d'arrêt pour la remplacer par une mesure de rétention par les services de police ou de gendarmerie d'une durée maximale de vingt-quatre heures avant la présentation au juge d'instruction ou au président du tribunal ou à un juge désigné par lui.

Le paragraphe II a pour objet de modifier l'article 126 du code de procédure pénale, qui dispose notamment que toute personne arrêtée en vertu d'un mandat d'amener, qui a été maintenue pendant plus de vingt-quatre heures dans la maison d'arrêt sans avoir été interrogée, est considérée comme arbitrairement détenue. Il s'agit de remplacer la référence à la maison d'arrêt et à la détention par une référence à la rétention, par coordination avec les dispositions du paragraphe I.

Le paragraphe II bis , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, vise à modifier l'article 127 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article dispose que la personne arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction qui a délivré le mandat est conduite dans les vingt-quatre heures soit devant le juge d'instruction qui a délivré le mandat, soit devant le procureur de la République du lieu de l'arrestation.

Le présent paragraphe tend à modifier ce dispositif pour prévoir que la personne n'est conduite devant le procureur de la République que s'il n'est pas possible de la présenter dans les vingt-quatre heures au juge d'instruction ou au président du tribunal ou au magistrat désigné par lui.

Le paragraphe III tend à abroger l'article 132 du code de procédure pénale, qui prévoit que la personne saisie en vertu d'un mandat d'arrêt est conduite sans délai dans la maison d'arrêt indiquée sur le mandat. Il s'agit d'une coordination avec le paragraphe suivant, destinée à mettre fin à l'incarcération en maison d'arrêt des personnes saisies en vertu d'un mandat d'arrêt.

Le paragraphe IV a pour objet de modifier l'article 133 du code de procédure pénale qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit notamment que dans les vingt-quatre heures de l'incarcération de la personne, il est procédé à son interrogatoire et il est statué sur le maintien de sa détention.

Désormais, les personnes saisies en vertu d'un mandat d'arrêt devraient être présentées dans les vingt-quatre heures suivant leur arrestation devant le juge d'instruction ou le président du tribunal ou un magistrat désigné par lui pour qu'il soit procédé à leur interrogatoire et qu'il soit le cas échéant statué sur leur placement en détention provisoire. Les dispositions de l'article 126 du code de procédure pénale, modifié par le projet de loi, qui disposent qu'une personne retenue plus de vingt-quatre heures après avoir été arrêtée en vertu d'un mandat d'amener est arbitrairement détenue, seraient applicables.

Par ailleurs, le présent paragraphe tend à modifier les dispositions de l'article 133 prévoyant que lorsque la personne est arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction qui a délivré le mandat, elle est conduite immédiatement devant le procureur de la République du lieu de l'arrestation, pour prévoir que cette présentation intervient dans les vingt-quatre heures et non plus immédiatement.

Le paragraphe V tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 133-1 définissant les droits de la personne arrêtée en vertu d'un mandat d'amener ou d'arrêt et retenue pendant vingt-quatre heures.

La personne retenue par les services de police ou de gendarmerie sur exécution d'un mandat d'amener, parce que son interrogatoire ne peut être immédiat (article 125 du code de procédure pénale) ou qu'elle se trouve à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction (article 127), ou sur exécution d'un mandat d'arrêt (article 133) aurait le droit de faire prévenir un proche et d'être examinée par un médecin.

Le projet de loi initial prévoyait que le procureur de la République devait être prévenu dès le début de la mesure de rétention, mais l'Assemblée nationale a prévu une information de ce magistrat « dans les meilleurs délais ». Par un amendement , votre commission vous propose de rétablir la rédaction initiale du projet de loi, conformément aux décisions qu'elles a prises précédemment.

Le présent article constitue un progrès incontestable en évitant l'incarcération en maison d'arrêt des personnes arrêtées en vertu d'un mandat d'amener ou d'un mandat d'arrêt. Certes, ces personnes pourront être retenues pendant vingt-quatre heures mais elles bénéficieront alors de certains des droits reconnus aux personnes placées en garde à vue.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 39 ainsi modifié .

Article 40
(art. 135-2 et 135-3 nouveaux du code de procédure pénale)
Exécution du mandat d'arrêt après le règlement de l'information -
Inscription des mandats d'arrêt et de recherche
au fichier des personnes recherchées

Le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale deux nouveaux articles 135-2 et 135-3, d'une part pour régler le cas dans lequel une personne est arrêtée sur mandat d'arrêt après le règlement de l'information, d'autre part pour prévoir l'inscription au fichier des personnes recherchées de tout mandat d'arrêt ou de recherche.

Le texte proposé pour l' article 135-2 du code de procédure pénale tend à clarifier et à simplifier les règles applicables lorsqu'une personne est arrêtée sur mandat d'arrêt après le règlement de l'information. Actuellement, dans un tel cas, le juge d'instruction ne peut plus interroger la personne ni demander son maintien en détention. La personne doit être présentée devant le tribunal correctionnel (si elle est poursuivie pour un délit) ou la chambre de l'instruction (si elle est poursuivie pour un crime) afin d'être incarcérée jusqu'au jugement.

Le texte proposé pour l'article 135-2 du code de procédure pénale prévoit que lorsqu'une personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt est découverte après le règlement de l'information, le procureur de la République du lieu de l'arrestation est avisé de la rétention de cette personne par les services de police ou de gendarmerie. Le projet de loi initial prévoyait que le procureur était avisé « dès le début » de la rétention, mais l'Assemblée nationale a souhaité que l'avis soit donné au procureur « dans les meilleurs délais ». Par coordination avec les décisions prises précédemment, votre commission vous propose, par un amendement , de rétablir le texte initial du projet de loi.

Pendant la période de rétention, qui ne pourrait durer plus de vingt-quatre heures, la personne pourrait faire prévenir un proche et être examinée par un médecin.

La personne retenue devait être conduite dans les meilleurs délais et au plus tard dans les vingt-quatre heures de son arrestation devant le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel siège la juridiction de jugement saisie des faits. Après avoir vérifié son identité et lui avoir notifié le mandat d'arrêt, ce magistrat devrait la présenter devant le juge des libertés et de la détention.

Le texte proposé prévoit que le juge des libertés et de la détention peut alors, sur réquisitions du procureur de la République, ordonner le placement en détention provisoire de la personne jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement par ordonnance motivée rendue à l'issue d'un débat contradictoire. Dans ce cas, les durées maximales de détention provisoire seraient celles respectivement prévues par l'article 179 du code de procédure pénale en cas de renvoi d'un prévenu devant le tribunal correctionnel (deux mois renouvelables deux fois) et par l'article 215-2 du même code en cas de renvoi devant la cour d'assises (délai d'un an pouvant être prolongé de six mois à deux reprises). L'Assemblée nationale a très heureusement précisé que ces délais couraient à compter de l'ordonnance de placement en détention. Le juge des libertés et de la détention pourrait également placer la personne sous contrôle judiciaire.

Le texte proposé prévoit que la décision du juge des libertés et de la détention peut faire, dans les dix jours de sa notification, l'objet d'un appel devant la chambre des appels correctionnels si la personne est renvoyée devant le tribunal correctionnel et devant la chambre de l'instruction si elle est renvoyée devant la cour d'assises.

Si la personne était arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège de la juridiction de jugement et qu'il n'était pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel siège la juridiction de jugement, elle serait conduite devant le procureur de la République du lieu de son arrestation, qui vérifierait son identité, lui notifierait le mandat et recevrait ses éventuelles déclarations.

Ce magistrat mettrait alors le mandat à exécution en faisant conduire la personne à la maison d'arrêt et il en aviserait le procureur de la République de la juridiction de jugement. Celui-ci ordonnerait le transfèrement de la personne, qui devrait comparaître devant lui dans les quatre jours de la notification du mandat, ce délai étant porté à six jours en cas de transfèrement entre un département d'outre-mer et la France métropolitaine ou un autre département d'outre-mer.

Ces dispositions sont largement reprises des règles applicables en cas d'arrestation d'une personne sur mandat d'arrêt au cours de l'instruction.

Le texte proposé pour l' article 135-3 du code de procédure pénale précise que tout mandat d'arrêt ou de recherche est inscrit, à la demande du juge d'instruction ou de celle de l'officier de police judiciaire à qui il a été remis, au fichier des personnes recherchées. En cas de renvoi définitif de la personne devant la juridiction de jugement, le gestionnaire du fichier doit en être informé, afin qu'il puisse être fait application du nouvel article 135-2 du code de procédure pénale en cas d'arrestation de la personne.

Rappelons que le fichier des personnes recherchées, qui a fait l'objet en 1996 d'un décret (décret n° 96-417 du 15 mai 1996) et d'un arrêté, a pour finalité de faciliter les recherches effectuées par les services de police et de gendarmerie à la demande des autorités judiciaires, administratives ou militaires.

La loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a inscrit dans la loi et rendu obligatoire l'inscription au fichier des personnes recherchées de certaines peines et mesures. L'article 23 de cette loi prévoit ainsi explicitement que sont inscrits dans le fichier des personnes recherchées « les mandats, ordres et notes de recherches émanant du procureur de la République, des juridictions d'instruction, de jugement ou d'application des peines, du juge des libertés et de la détention et du juge des enfants tendant à la recherche ou à l'arrestation d'une personne ».

Le présent article vient donc confirmer dans le code de procédure pénale l'inscription des mandats d'arrêt et de recherche au fichier des personnes recherchées, afin que cette formalité ne soit pas omise par les magistrats ou officiers de police judiciaire concernés.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 40 ainsi modifié .

Article 41
(art. 141-2, 179, 181, 215, 215-2, 272-1,
367 et 380-4 du code de procédure pénale)
Suppression de l'ordonnance de prise de corps

La loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a supprimé l'obligation pour les accusés libres de se constituer prisonniers la veille de l'audience de la cour d'assises. Dans ces conditions, les dispositions du code de procédure pénale relatives à l'ordonnance de prise de corps ont perdu une grande partie de leur intérêt. Le présent article tend à les supprimer.

1. Le droit actuel

Actuellement, l'ordonnance ou l'arrêt de mise en accusation par lequel la personne mise en examen pour crime est renvoyée devant la cour d'assises ordonne également prise de corps contre l'accusé et contre les personnes renvoyées pour délits connexes.

Avant l'audience de la cour d'assises, si la personne est placée sous contrôle judiciaire et qu'elle se soustrait aux obligations de celui-ci, le président de la chambre de l'instruction ou le président de la cour d'assises, pendant la session d'assises au cours de laquelle l'accusé doit être jugé, met à exécution l'ordonnance de prise de corps qui permet d'incarcérer l'accusé.

Si la personne est en détention provisoire au moment de son renvoi devant la cour d'assises, la détention se prolonge, sans qu'il soit nécessaire de le prévoir expressément. L'ordonnance de prise de corps se substitue au mandat de dépôt.

Si, au début de l'audience de jugement, l'accusé comparaissant libre ne se présente pas sans motif légitime d'excuse, le président de la cour d'assises peut mettre à exécution l'ordonnance de prise de corps. La cour peut faire de même si, pendant l'audience, l'accusé se soustrait aux obligations du contrôle judiciaire ou si la détention est l'unique moyen d'assurer sa présence lors des débats ou d'empêcher des pressions sur les victimes et les témoins.

Enfin, à l'issue de l'audience, lorsque l'accusé est condamné à une peine ferme privative de liberté, l'ordonnance de prise de corps est mise à exécution ou continue de produire ses effets jusqu'à ce que la durée de détention ait atteint celle de la peine prononcée.

Cette dernière disposition résulte de la loi sur la présomption d'innocence qui, tout en supprimant l'obligation pour les accusés laissés libres de se constituer prisonnier la veille du procès, a mis fin à l'impossibilité pour la cour d'assises de mettre provisoirement à exécution une condamnation pour crime prononcée contre un accusé libre.

Le présent article tend, pour l'essentiel, à supprimer les règles relatives à l'ordonnance de prise de corps, afin de rendre applicables aux personnes renvoyées devant la cour d'assises les règles relatives aux mandats d'arrêt et de dépôt.

2. Les dispositions du projet de loi

Le paragraphe I tend à modifier l'article 141-2 du code de procédure pénale, qui permet notamment la mise à exécution par le président de la chambre de l'instruction ou le président de la cour d'assises de l'ordonnance de prise de corps lorsqu'une personne renvoyée devant la cour d'assises se soustrait aux obligations du contrôle judiciaire.

Désormais, dans un tel cas, le procureur de la République devrait saisir le juge des libertés et de la détention, qui pourrait révoquer le contrôle judiciaire et décerner mandat d'arrêt ou d'amener à l'encontre de la personne. Le magistrat pourrait également ordonner le placement en détention provisoire, conformément aux dispositions de l'article 135-2 nouveau du code de procédure pénale, qui définit la procédure applicable lorsqu'une personne est arrêtée sur mandat d'arrêt après la clôture de l'information.

Ce nouveau dispositif a vocation à s'appliquer non seulement en matière criminelle, mais également en matière correctionnelle. Actuellement, en effet, la possibilité de décerner un mandat d'arrêt ou d'amener et de saisir le juge des libertés et de la détention appartient à la juridiction de jugement. Dorénavant, les décisions seraient prises par le juge des libertés et de la détention saisi par le procureur de la République.

Le paragraphe II tend à compléter les dispositions de l'article 179 du code de procédure pénale, qui dispose notamment qu'en matière correctionnelle l'ordonnance de règlement met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.

Le présent paragraphe vise à préciser l'effet des différents mandats après l'ordonnance de règlement. Le texte proposé prévoit que le mandat d'arrêt conserve sa force exécutoire, mais que les mandats d'amener et de recherche cessent de pouvoir recevoir exécution, le juge d'instruction pouvant cependant les remplacer par un mandat d'arrêt.

Le paragraphe III a pour objet de modifier l'article 181 du code de procédure pénale, qui dispose notamment que l'ordonnance de mise en accusation ordonne également prise de corps contre l'accusé, et contre les personnes renvoyées pour délits connexes.

Le présent paragraphe tend à supprimer ces dispositions pour prévoir que, lorsque le juge d'instruction rend une ordonnance de mise en accusation, le mandat de dépôt décerné contre l'accusé conserve sa force exécutoire , l'accusé restant détenu jusqu'à son jugement par la cour d'assises, sous réserve, d'une part, de son droit de formuler des demandes de mise en liberté, d'autre part, des délais butoirs prévus par l'article 215-2 du code de procédure pénale pour l'examen de l'affaire par la cour d'assises (un an à compter de la mise en accusation, ce délai pouvant être prolongé à deux reprises pour six mois).

Comme en matière correctionnelle, le mandat d'arrêt resterait exécutoire s'il avait été décerné avant la mise en accusation de la personne. Les mandats de recherche et d'amener cesseraient de pouvoir recevoir exécution, mais pourraient être remplacés par un mandat d'arrêt.

Le paragraphe IV tend à modifier l'article 215 du code de procédure pénale, relatif à l'arrêt de mise en accusation rendu par la chambre de l'instruction, afin de remplacer les références à l'ordonnance de prise de corps par un renvoi aux nouvelles dispositions de l'article 181 du code de procédure pénale, relatives aux effets des mandats.

Le paragraphe V tend à opérer une coordination dans l'article 215-2 du code de procédure pénale, relatif aux délais dans lesquels une personne mise en accusation doit comparaître devant la cour d'assises.

Le paragraphe VI a pour objet de modifier l'article 272-1 du code de procédure pénale, qui permet au président ou à la cour de mettre à exécution l'ordonnance de prise de corps lorsque l'accusé ne se présente pas après avoir été convoqué, qu'il se soustrait pendant l'audience aux obligations du contrôle judiciaire ou qu'il apparaît que la détention est l'unique moyen d'assurer sa présence lors des débats ou d'empêcher des pressions sur les victimes ou les témoins.

Dans ces différents cas, le président ou la cour pourrait désormais décerner mandat de dépôt ou d'arrêt.

Les paragraphes VII et VIII tendent à opérer des coordinations dans les articles 367 et 380-4 du code de procédure pénale, respectivement relatifs à l'incarcération des condamnés et à la détention pendant les délais d'appel et durant l'instance d'appel en matière criminelle. Il s'agit de remplacer les références à l'ordonnance de prise de corps par des références au mandat de dépôt.

Par un amendement , votre commission vous propose d'insérer dans le présent article un paragraphe additionnel, afin d'opérer une coordination en supprimant la référence à l'ordonnance de prise de corps dans l'article 725 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article dispose que nul agent de l'administration pénitentiaire ne peut, à peine d'être poursuivi et puni comme coupable de détention arbitraire, recevoir ni retenir aucune personne qu'en vertu d'un arrêt ou jugement de condamnation, d'une ordonnance de prise de corps, d'un mandat de dépôt ou d'arrêt, d'un mandat d'amener lorsque ce mandat doit être suivi d'incarcération provisoire, ou d'un ordre d'arrestation établi conformément à la loi.

Il convient de supprimer la référence à l'ordonnance de prise de corps, dès lors que celle-ci est appelée à disparaître. L'article 77 bis du présent projet de loi, inséré dans le texte par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, prévoit que lors de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, les ordonnances de prise de corps décernées avant cette entrée en vigueur vaudront mandat de dépôt dans tous les cas où un accusé sera détenu en vertu de ce titre.

Enfin, le paragraphe IX , inséré dans cet article par l'Assemblée nationale, tend à supprimer une référence à l'ordonnance de prise de corps dans l'article 9 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 41 ainsi modifié.

Article 41 bis
(art. 148 du code de procédure pénale)
Demandes de mise en liberté

L'article 148 du code de procédure pénale prévoit qu'en toute matière, la personne placée en détention provisoire ou son avocat peut, à tout moment, demander sa mise en liberté.

Le même article prévoit que le juge d'instruction communique immédiatement le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions. Sauf s'il donne une suite favorable à la demande, le juge d'instruction la transmet dans les cinq jours suivant la communication au procureur au juge des libertés et de la détention. Celui-ci statue dans un délai de trois jours ouvrables, par une ordonnance comportant l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision. Toutefois, lorsqu'il n'a pas encore été statué sur une précédente demande de mise en liberté ou sur l'appel d'une précédente ordonnance de refus de mise en liberté, les délais précités ne commencent à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter ces dispositions pour prévoir que lorsqu'il a été adressé plusieurs demandes de mise en liberté, il peut être répondu à ces différentes demandes dans les délais précités par une décision unique .

Ce dispositif est bienvenu, dans la mesure où il pourrait permettre de répondre au comportement de détenus qui déposent chaque jour ou presque des demandes de mise en liberté.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 41 bis sans modification .

Article 41 ter
(art. 148-2 du code de procédure pénale)
Comparution personnelle des prévenus en cas
de demande de mise en liberté

L'article 148-2 du code de procédure pénale dispose notamment que toute juridiction appelée à statuer sur une demande de mainlevée totale ou partielle du contrôle judiciaire ou sur une demande de mise en liberté se prononce après audition du ministère public, du prévenu ou de son avocat.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Paul Garraud, tend à compléter ces dispositions pour prévoir que si la personne a déjà comparu moins de quatre mois auparavant, le président de cette juridiction peut, en cas de demande de mise en liberté, refuser la comparution personnelle de l'intéressé par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours.

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a déjà prévu un dispositif identique lorsqu'une personne placée en détention provisoire fait appel, devant la chambre de l'instruction, d'une ordonnance de refus de mise en liberté.

Il s'agit d'une simplification nécessaire, destinée à limiter le nombre des escortes, qui mobilisent un nombre considérable de policiers, sans porter atteinte aux droits de la défense, dès lors que la personne pourra faire examiner sa demande par le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention, en présence de son avocat.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 41 ter sans modification .

Article 41 quater
(art. 149 du code de procédure pénale)
Réparation à raison d'une détention

L'article 149 du code de procédure pénale définit les modalités selon lesquelles une personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.

Cet article prévoit notamment qu'aucune réparation n'est due à la personne :

- lorsque la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement a pour seul fondement :

la reconnaissance de son irresponsabilité pour trouble psychique ayant aboli son discernement (article 122-1 du code pénal) ;

une amnistie postérieure à la mise en détention provisoire ;

- ou lorsque la personne a fait l'objet d'une détention provisoire pour s'être librement et volontairement accusée ou laissée accuser à tort en vue de faire échapper l'auteur des faits aux poursuites.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Paul Garraud, tend à prévoir qu'aucune réparation n'est due lorsque le non-lieu, la relaxe ou l'acquittement a pour seul fondement la prescription de l'action publique intervenue après la libération de la personne ou lorsque la personne était dans le même temps détenue pour une autre cause.

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, M. Jean-Paul Garraud a ainsi justifié cet amendement :« Une personne faisant, par exemple, l'objet de plusieurs procédures dans des tribunaux différents pour des viols multiples et placée en détention provisoire dans le cadre de ces différentes procédures -autrement dit, alors que plusieurs mandats de dépôt ont été décernés- a droit, en l'état actuel des textes, à réparation dès lors qu'elle bénéficie d'un non-lieu dans l'une de ces affaires, même si elle est condamnée pour les autres faits ; cela paraît, à l'évidence, injustifié .

« De même, une personne mise en détention pour des cambriolages multiples, qui a reconnu les faits et qui a été remise en liberté au cours de l'information, mais dont le jugement intervient plus de trois ans après son renvoi devant le tribunal, et qui est alors relaxée en raison de la prescription de la procédure, doit être indemnisée comme si elle avait été reconnue innocente ; cela paraît pour le moins injustifié . »

Votre commission vous propose d'adopter l'article 41 quater sans modification .

SECTION 4
Dispositions relatives aux commissions rogatoires
Article 42
(art. 152, 153 et 154 du code de procédure pénale)
Dispositions de simplification des commissions rogatoires

Le présent article a pour objet d'apporter plusieurs modifications aux règles posées par le code de procédure pénale en matière de commissions rogatoires .


• Le paragraphe I tend à modifier l'article 152 du code de procédure pénale, relatif aux pouvoirs des magistrats ou officiers de police judiciaire commis pour l'exécution d'une commission rogatoire. Cet article prévoit notamment que les personnes commises pour l'exécution d'une commission rogatoire possèdent tous les pouvoirs du juge d'instruction, mais qu'ils ne peuvent procéder aux interrogatoires et confrontations des personnes mises en examen.

Le présent paragraphe tend à clarifier la manière dont le juge d'instruction peut contrôler l'exécution d'une commission rogatoire sans effectuer lui-même d'actes d'instruction. Actuellement, l'article 92 du code de procédure pénale prévoit que le juge d'instruction peut se transporter sur les lieux pour y effectuer toutes constatations utiles ou procéder à des perquisitions. Il en donne avis au procureur de la République, qui a la faculté de l'accompagner. Il est toujours assisté d'un greffier.

Le présent paragraphe tend à compléter l'article 152 du code de procédure pénale relatif aux commissions rogatoires pour permettre au juge d'instruction de se transporter, sans être assisté de son greffier ni devoir en dresser procès-verbal, pour diriger et contrôler l'exécution de la commission rogatoire, dès lors qu'il ne procède pas lui-même à des actes d'instruction.

Ce dispositif pourrait trouver à s'appliquer lors des auditions et confrontations organisées, sur commission rogatoire, dans des locaux de police ou de gendarmerie .

A l'occasion de ce transport, le juge pourrait ordonner la prolongation des gardes à vue prononcées dans le cadre de la commission rogatoire. En effet, l'article 154 du code de procédure pénale permet aux officiers de police judiciaire, pour les nécessités de l'exécution d'une commission rogatoire, de placer en garde à vue une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction.

En principe, la prolongation de la garde à vue ne peut être autorisée qu'après présentation de la personne au juge d'instruction mandant ou au juge d'instruction du lieu d'exécution. La garde à vue peut, à titre exceptionnel, être prolongée sans présentation de la personne.

Le texte proposé pour compléter l'article 152 du code de procédure pénale prévoit que, dans tous les cas où le juge d'instruction use de cette faculté de se déplacer pour contrôler l'exécution d'une commission rogatoire, mention est faite de ce transport sur les pièces d'exécution de la commission rogatoire.

Le projet de loi initial prévoyait que le juge d'instruction devait aviser le procureur de la République de son tribunal avant de se transporter pour diriger et contrôler l'exécution d'une commission rogatoire, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des lois, a supprimé cette formalité, qu'elle a jugé inutile.


• Le paragraphe II tend à compléter l'article 153 du code de procédure pénale, relatif aux auditions de témoins, qui prévoit notamment l'obligation pour les témoins de prêter serment.

Il s'agit de préciser que l'obligation de prêter serment et de déposer n'est pas applicable aux personnes gardées à vue dans le cadre de l'exécution d'une commission rogatoire, sans toutefois que le fait d'entendre une personne après lui avoir fait prêter serment ne constitue une cause de nullité de la procédure.

Les personnes gardées à vue au cours d'une enquête de flagrance ou d'une enquête préliminaire ne prêtent évidemment pas serment, dès lors qu'elles ne sont pas témoins, mais qu'il existe contre elles des raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont commis une infraction.

Dans un arrêt du 14 mai 2002, la Cour de cassation a jugé que la personne entendue en garde à vue au cours d'une commission rogatoire était tenue de prêter le serment « de dire toute la vérité, rien que la vérité » prévu par l'article 103 du code de procédure pénale.

La Cour de cassation a en effet constaté que l'article 105 du code de procédure pénale interdisait d'entendre comme témoins les personnes à l'encontre desquelles existent des indices graves et concordants d'avoir participé aux faits. L'article 153 prévoit quant à lui que tout témoin cité pour être entendu au cours de l'exécution d'une commission rogatoire est tenu de comparaître, de prêter serment et de déposer.

Enfin, l'article 154 permet le placement en garde à vue des personnes à l'encontre desquelles existent des raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont commis une infraction.

La Cour a déduit de la combinaison de ces dispositions que la personne placée en garde à vue pour les nécessités d'une commission rogatoire était tenue de prêter serment.

Le présent paragraphe tend donc à clarifier cette situation pour préciser dans l'article 153 que l'obligation de prêter serment et de déposer n'est pas applicable aux personnes gardées à vue en application des dispositions de l'article 154.


• Le paragraphe III tend à préciser le sort de la personne gardée à vue à l'issue de la garde à vue lorsque cette mesure intervient au cours d'une commission rogatoire. Actuellement, le juge d'instruction doit en effet délivrer mandat d'amener lorsqu'il souhaite que la personne lui soit présentée. Le projet de loi tend à compléter l'article 154 du code de procédure pénale pour prévoir qu'à l'issue de la garde à vue, à la demande du juge d'instruction, les personnes à l'encontre desquelles les éléments recueillis sont de nature à permettre la mise en examen sont soit remises en liberté, le cas échéant après avoir été convoquées en vue d'une entretien de première comparution, soit déférées devant le juge d'instruction. Ce dispositif permet d'aligner les règles applicables au cours d'une instruction sur celles qui prévalent au cours des enquêtes.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a complété le paragraphe pour :

- d'une part, prévoir que le magistrat instructeur n'est plus averti « dès le début » de la mesure mais « dans les meilleurs délais », « sauf circonstances insurmontables », d'un placement en garde à vue ;

- d'autre part, prévoir un délai de vingt heures entre la fin de la garde à vue et la présentation de la personne au magistrat instructeur, de façon à légaliser la pratique du passage par le dépôt.

Votre commission a adopté à l'article 29 ter un amendement réglant la question du défèrement des personnes gardées à vue pour l'ensemble des cadres procéduraux.

Elle a en outre décidé de maintenir l'avertissement du procureur dès le début de la mesure en cas de placement en garde à vue au cours d'une enquête. Par coordination, elle vous propose, par un amendement , de supprimer le présent paragraphe.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 42 ainsi modifié .

Article 42 bis
(art. 154-1 nouveau du code de procédure pénale)
Mise en examen dans le cadre d'une commission rogatoire

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 154-1 pour préciser les conditions dans lesquelles une personne peut être mise en examen sur commission rogatoire .

Le texte proposé pour l'article 154-1 prévoit que le juge d'instruction qui envisage de mettre en examen une personne qui n'a pas déjà été entendue comme témoin assisté peut requérir par commission rogatoire, selon les modalités prévues par l'article 151 (en particulier indication de la nature de l'infraction, de l'objet des poursuites...), tout juge d'instruction de procéder à la mise en examen de cette personne conformément aux dispositions de l'article 116, qui définit les modalités de la mise en examen.

Le juge d'instruction chargé d'exécuter la commission rogatoire devrait alors procéder à la mise en examen, sauf s'il estimait, au vu des observations de la personne ou de son avocat, qu'il n'existait pas contre elle d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable sa culpabilité. Dans ce cas, le juge d'instruction devrait informer la personne qu'elle bénéficie des droits du témoin assisté.

Ce dispositif vient clarifier une situation ambiguë depuis l'adoption de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. La rédaction des nouvelles dispositions relatives à la mise en examen permettait difficilement de savoir si une mise en examen sur commission rogatoire demeurait possible.

Le texte proposé pour l'article 154-1 prévoit également que lorsqu'une personne a déjà été entendue comme témoin assisté, le juge d'instruction peut requérir par commission rogatoire tout juge d'instruction de procéder à la mise en examen de cette personne.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 42 bis sans modification .

SECTION 5
Dispositions concernant les expertises
Article 43
(art. 163, 164, 166 et 167 du code de procédure pénale)
Dispositions de simplification des expertises

Les expertises jouent dans le procès un rôle essentiel. Le présent projet de loi tend à apporter des simplifications à certaines dispositions relatives à l'expertise pénale.

Il convient de rappeler que le projet de loi portant réforme du statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en ventes aux enchères publiques, en cours d'examen par le Parlement, tend à mettre en oeuvre une réforme substantielle des conditions d'élaboration des listes d'experts judiciaires . Lors de l'examen de ce projet de loi, le Sénat, à l'initiative de notre excellent collègue M. Jean-René Lecerf, a renforcé le dispositif proposé dans le projet de loi, afin que les candidatures des personnes souhaitant figurer sur une liste d'experts agréés soient examinées de manière plus approfondie qu'actuellement.


• Le paragraphe I tend à modifier l'article 163 du code de procédure pénale, relatif aux conditions de transmission des scellés aux experts et à l'ouverture des scellés par ces experts .

Dans sa rédaction actuelle, l'article 163 dispose qu'avant de faire parvenir les scellés aux experts, le juge d'instruction ou le magistrat désigné par la juridiction procède, s'il y a lieu, à leur inventaire dans les conditions prévues par l'article 97. Il énumère ces scellés dans un procès-verbal. Les experts doivent faire mention dans leur rapport de toute ouverture ou réouverture des scellés ; dans ces cas, ils en dressent l'inventaire.

L'article 97 du code de procédure pénale, relatif aux saisies effectuées au cours des informations, dispose notamment que les objets et documents placés sous main de justice sont inventoriés et placés sous scellés et que lorsque ces scellés sont fermés, ils ne peuvent être ouverts et les documents dépouillés qu'en présence de la personne mise en examen assistée de son avocat, ou eux dûment appelés. Le tiers chez lequel la saisie a été faite est également invité à assister à cette opération.

Le présent article vise à clarifier les dispositions de l'article 163 du code de procédure pénale, en ce qui concerne l'ouverture des scellés par les experts. Le texte actuel prévoit seulement que ceux-ci doivent faire mention dans leur rapport de toute ouverture ou réouverture des scellés.

Le projet de loi tend à supprimer cette disposition pour prévoir explicitement que, pour l'application de leur mission, les experts sont habilités à procéder à l'ouverture ou à la réouverture des scellés, et à confectionner de nouveaux scellés après avoir, le cas échéant, procédé au reconditionnement des objets qu'ils étaient chargés d'examiner. Dans ce cas, les experts doivent faire mention de l'ouverture des scellés dans leur rapport et en dresser, s'il y a lieu, inventaire.

Ces dispositions visent essentiellement à préciser le droit actuel, afin d'éviter toute confusion.

S'il est normal qu'avant transmission à l'expert les scellés fassent l'objet d'un inventaire en présence de la personne mise en examen et de son avocat, les dispositions actuelles ne sauraient être interprétées comme exigeant les mêmes formalités lorsque l'expert conduit sa mission.

Afin de procéder aux examens et analyses qui lui sont demandés, l'expert doit pouvoir ouvrir les scellés sans qu'il soit pour autant nécessaire que la personne mise en examen et son avocat assistent à cette opération. Une telle exigence aurait pour effet de paralyser les opérations d'expertise.

Votre commission considère qu'en cette matière, l'essentiel est d'améliorer les conditions dans lesquelles les juridictions recourent à des experts aux cours des procédures judiciaires ainsi que la formation de ces experts. A cet égard, le projet de loi relatif au statut de certaines professions judiciaires, précédemment évoqué, pourrait permettre des progrès substantiels par rapport à la situation actuelle.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann, a tenu à préciser explicitement, dans l'article 163, que les dispositions de l'article 97 du code de procédure pénale, relatives à l'ouverture des scellés en présence de la personne mise en examen et de son avocat ne s'appliquaient pas. Un tel ajout n'était pas indispensable. L'article 163 prévoit en effet qu'avant transmission à l'expert, le juge procède, s'il y a lieu, à l'inventaire des scellés dans les conditions prévues par l'article 97. Dès lors que cette référence n'est pas prévue dans les nouvelles dispositions sur l'ouverture des scellés par l'expert, les dispositions de l'article 97 n'ont pas vocation à s'appliquer. Néanmoins, afin d'éviter toute ambiguïté, votre commission ne propose pas de remettre en cause cette précision. Elle vous soumet un amendement d'amélioration rédactionnelle.


• Le paragraphe II tend à réécrire l'article 164 du code de procédure pénale relatif aux auditions que peuvent conduire les experts .

Actuellement, cet article prévoit que les experts peuvent recevoir, à titre de renseignements et pour l'accomplissement strict de leur mission, les déclarations des personnes autres que la personne mise en examen.

Ainsi, l'expert peut entendre un témoin sans être soumis à des règles procédurales particulières.

En revanche, l'interrogatoire par l'expert de la personne mise en examen, à laquelle sont assimilés depuis la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence le témoin assisté et la partie civile, répond au contraire à des règles procédurales strictement définies.

Dans de telles hypothèses, le principe est que l'expert peut demander des renseignements par l'intermédiaire du juge d'instruction ou du magistrat désigné par lui pour suivre l'expertise, en respectant les formalités prévues pour les articles 114 et 119 du code de procédure pénale (notamment convocation du conseil, mise à disposition de la procédure).

Trois exceptions sont cependant prévues :

- le juge peut donner, à titre exceptionnel et par décision motivée, délégation à l'expert pour interroger lui-même la personne concernée. L'expert doit alors respecter les formes prévues par les articles 114 et 119 ;

- la personne peut renoncer à être interrogée par le juge en présence des experts et leur fournir directement les explications nécessaires à l'exécution de leur mission, soit en présence de son avocat, soit en renonçant expressément à l'assistance de celui-ci, par déclaration remise aux experts et annexée à leur rapport ;

- enfin, les médecins et psychologues experts chargés d'examiner la personne mise en examen peuvent lui poser les questions nécessaires à l'accomplissement de leur mission, hors la présence du juge et des avocats.

La Cour de cassation a jugé que ces dispositions n'étaient pas incompatibles avec celles de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui sont étrangères aux opérations d'expertise et dont l'objet est d'assurer les droits de la défense devant les juridictions 136 ( * ) .

Le présent paragraphe tend à simplifier la rédaction de l'article 164 sans en modifier l'esprit.

Le texte prévoit que les experts peuvent recevoir, sans formalisme, les déclarations des personnes autres que les parties et les témoins assistés.

Ils pourraient toutefois recevoir, sur autorisation du juge d'instruction et avec leur accord, les déclarations de la personne mise en examen, du témoin assisté ou de la partie civile. Ces déclarations seraient recueillies en présence de leur avocat ou celui-ci dûment convoqué, sauf renonciation écrite. Les déclarations pourraient également être recueillies à l'occasion d'un interrogatoire ou d'une déposition devant le juge d'instruction en présence de l'expert.

Enfin, les médecins ou psychologues experts chargés d'examiner la personne mise en examen, le témoin assisté ou la partie civile pourraient leur poser des questions pour l'accomplissement de leur mission hors la présence du juge et des avocats.

Le paragraphe III tend à compléter l'article 166 du code de procédure pénale, qui définit la procédure applicable lorsque les opérations d'expertise sont terminées . Cet article prévoit notamment que le rapport et les scellés, ou leurs résidus, sont déposés entre les mains du greffier de la juridiction qui a ordonné l'expertise.

Le présent paragraphe tend à permettre aux experts, avec l'accord du juge d'instruction, de communiquer directement et par tout moyen les conclusions de leur rapport aux officiers de police judiciaire chargés de l'exécution de la commission rogatoire. Le texte initial prévoyait que les conclusions pourraient être également communiquées aux agents de police judiciaire, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a limité cette communication aux seuls officiers de police judiciaire.

Le paragraphe IV tend à compléter l'article 167 du code de procédure pénale, relatif aux modalités de communication des conclusions des expertises par le juge d'instruction. Cet article prévoit notamment qu'en donnant connaissance aux parties des conclusions des experts, le juge d'instruction leur fixe un délai pour présenter des observations ou formuler une demande, notamment aux fins de complément d'expertise ou de contre-expertise. Pendant ce délai, le dossier de la procédure est mis à la disposition des conseils des parties.

Le présent paragraphe tend à préciser ces dispositions pour prévoir que le délai fixé par le juge d'instruction doit tenir compte de la complexité de l'expertise et ne peut être inférieur à quinze jours ou, s'il s'agit d'une expertise comptable ou financière, à un mois. Le texte précise que passé ce délai, il ne peut plus être formulé de demande de contre-expertise, de complément d'expertise ou de nouvelle expertise portant sur le même objet, y compris sur le fondement de l'article 82-1 (qui permet aux parties de formuler des demandes d'actes), sauf élément nouveau.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 43 ainsi modifié .

SECTION 6
Dispositions concernant la chambre de l'instruction
et son président
Article 44
(art. 186, 201, 206, 207, 212-2 nouveau
et 221 du code de procédure pénale)
Pouvoirs de la chambre de l'instruction et de son président

Le présent article tend à modifier plusieurs articles du code de procédure pénale afin de renforcer les attributions de la chambre de l'instruction.

Le paragraphe I tend à étendre les possibilités pour le président de la chambre de l'instruction de rejeter certains appels lorsqu'ils ne sont pas recevables.

Le dernier alinéa de l'article 186 du code de procédure pénale donne compétence au président de la chambre de l'instruction pour rejeter les appels des ordonnances non susceptibles de recours en rendant une ordonnance de non-admission de l'appel qui n'est pas susceptible de voies de recours.

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a étendu ces dispositions aux appels des ordonnances du juge d'instruction formés après l'expiration du délai de dix jours suivant leur notification et aux appels devenus sans objet.

Le présent paragraphe tend à modifier cette dernière disposition pour étendre encore les attributions du président de la chambre de l'instruction. D'une part, le président de la chambre de l'instruction serait désormais compétent pour constater le désistement de l'appel formé par l'appelant. D'autre part, la référence aux ordonnances du juge d'instruction serait supprimée, afin que les attributions du président de la chambre de l'instruction puissent s'exercer également à l'égard des ordonnances du juge des libertés et de la détention.

Le paragraphe II tend à compléter l'article 201 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article dispose que la chambre de l'instruction peut, dans tous les cas, à la demande du procureur général, d'une des parties ou même d'office, ordonner tout acte d'information complémentaire qu'elle juge utile.

Elle peut également, dans tous les cas, le ministère public entendu, prononcer d'office la mise en liberté de la personne mise en examen.

Le présent paragraphe tend à compléter ce dispositif pour prévoir que la chambre de l'instruction peut ordonner le placement en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire de la personne mise en examen. En cas d'urgence, le président de la chambre de l'instruction ou le conseiller désigné par lui pourrait décerner mandat d'amener, d'arrêt ou de recherche. Il pourrait également ordonner l'incarcération provisoire de la personne pendant une durée déterminée ne pouvant en aucun cas excéder quatre jours ouvrables jusqu'à la réunion de la chambre de l'instruction.

Ces dispositions ont pour objet de faire face à certaines situations d'urgence lorsque la chambre de l'instruction instruit elle-même une affaire après avoir fait usage de son pouvoir d'évocation.

En principe, en effet, les audiences de la chambre de l'instruction doivent être notifiées aux parties par lettre recommandée. Un délai minimum de quarante-huit heures en matière de détention provisoire et de cinq jours en toute autre matière doit être observé entre la date d'envoi de la lettre recommandée et celle de l'audience.

Dans certaines situations, de telles formalités ne peuvent à l'évidence être respectées lorsque la chambre de l'instruction exerce toutes les attributions du juge d'instruction.

Le présent paragraphe permet de clarifier la situation. En prévoyant explicitement que la chambre de l'instruction peut ordonner le placement en détention provisoire, il met fin à une ambiguïté issue de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence.

Lorsqu'elle est saisie, la chambre de l'instruction exerce les prérogatives du juge d'instruction. Or, celui-ci n'est plus compétent pour ordonner le placement en détention provisoire, mesure qui relève du juge des libertés et de la détention. Il est donc nécessaire de prévoir que la chambre de l'instruction peut ordonner le placement en détention provisoire.

En attribuant au président de la chambre le pouvoir d'ordonner l'incarcération ou de décerner des mandats en cas d'urgence, le présent paragraphe comble également un vide juridique. Actuellement, la possibilité pour le président de la chambre de l'instruction de décerner mandat d'arrêt ou de dépôt n'est prévue qu'en cas de réouverture d'informations sur charges nouvelles. Il est utile de prévoir un système similaire dans toutes les situations où l'urgence ne permet pas de réunir immédiatement la chambre de l'instruction.

Le paragraphe III concerne les nullités soulevées devant la chambre de l'instruction. Dans sa rédaction actuelle, l'article 206 du code de procédure pénale dispose que la chambre de l'instruction examine la régularité des procédures qui lui sont soumises et que, si elle découvre une cause de nullité, elle prononce la nullité de l'acte qui en est entaché.

Ces dispositions soulèvent certaines difficultés, notamment depuis que la chambre de l'instruction n'est plus saisie systématiquement, en matière criminelle, des ordonnances de mise en accusation, mais sur appel des parties.

En l'état de la jurisprudence, une personne mise en examen en matière criminelle peut, en interjetant appel de l'ordonnance de mise en accusation, invoquer la nullité des actes antérieurs à sa mise en examen.

Or, le législateur, dans la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence, avait prévu un délai maximal de six mois pour invoquer les nullités résultant d'actes antérieurs à la mise en examen ou de la mise en examen elle-même. Il a par la suite généralisé ce système à l'ensemble des actes de l'instruction.

La Cour de cassation a proposé dans son rapport pour 2001 de modifier l'article 206 du code de procédure pénale, afin de prévoir que l'examen par la chambre de l'instruction de la régularité des procédures s'effectue sous réserve des articles 173-1, 174 et 175 du même code, qui définissent les possibilités de purge des nullités.

Le présent paragraphe tend précisément à modifier l'article 206 dans le sens recommandé par la Haute juridiction.

Le paragraphe IV tend à modifier l'article 207 du code de procédure pénale relatif au rôle de la chambre de l'instruction dans le contentieux de la détention provisoire.

Dans sa rédaction actuelle, le premier alinéa de l'article 207 prévoit que lorsque la chambre de l'instruction a statué sur l'appel relevé contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention en matière de détention provisoire ou à la suite d'une saisine du procureur de la République, soit qu'elle ait confirmé la décision du juge des libertés et de la détention, soit que, l'infirmant, elle ait ordonné une mise en liberté ou maintenu en détention ou décerné un mandat de dépôt ou d'arrêt, le procureur général fait sans délai retour du dossier au juge d'instruction après avoir annoncé l'exécution de l'arrêt.

Ainsi, lorsque la chambre de l'instruction prend une décision contraire à celle qui lui est déférée, le juge d'instruction et le juge des libertés et de la détention, pourtant désavoués, continuent à connaître des incidents ultérieurs sur la détention provisoire. Il est possible, dans ces conditions, que des personnes soient incarcérées puis libérées à plusieurs reprises.

Pour pallier cette difficulté, la Cour de cassation a élaboré une jurisprudence qui permet, en certains cas, à la chambre de l'instruction de se réserver la connaissance ultérieure du contentieux de la détention provisoire d'une personne mise en examen. Dans un arrêt de 1959 137 ( * ) , la Cour de cassation a décidé que la chambre de l'instruction, lorsqu'elle infirme la décision du juge d'instruction 138 ( * ) , reste compétente pour statuer sur les contentieux relatifs à la détention provisoire pour la suite de la procédure.

D'autres arrêts ont semblé subordonner cette « réserve du contentieux » à une déclaration expresse de la chambre de l'instruction 139 ( * ) .

Dans ces conditions, le présent article vient clarifier les dispositions actuelles en complétant le premier alinéa de l'article 207 pour prévoir que lorsque la chambre de l'instruction décerne mandat de dépôt ou qu'elle infirme une ordonnance de mise en liberté ou de refus de prolongation de détention provisoire, les décisions en matière de détention provisoire continuent de relever de la compétence du juge d'instruction et du juge des libertés et de la détention, sauf mention expresse de la part de la chambre de l'instruction disant qu'elle est seule compétente pour statuer sur les demandes de mise en liberté et prolonger, le cas échéant, la détention provisoire.

Par un amendement , votre commission vous propose de compléter le texte proposé pour prévoir qu'il en est de même lorsque la chambre de l'instruction ordonne un contrôle judiciaire ou en modifie les modalités.

La Cour de cassation, dans un récent arrêt du 23 avril 2003, a approuvé l'attitude d'une chambre de l'instruction qui, statuant sur l'appel relevé par le ministère public d'une ordonnance du juge d'instruction faisant droit à la demande de mise en liberté d'une personne et plaçant celle-ci sous contrôle judiciaire, lui avait imposé des obligations supplémentaires et s'était réservée le contentieux du contrôle judiciaire.

Il paraît utile que ce cas soit également prévu dans la loi.

Le présent paragraphe tend par ailleurs à supprimer, dans le premier alinéa de l'article 207, la référence au juge des libertés et de la détention, certaines décisions en matière de détention provisoire pouvant être prises par le juge d'instruction, notamment lorsque ce magistrat décide de ne pas suivre les réquisitions du parquet tendant au placement en détention provisoire.

Le deuxième alinéa de l'article 207 précise que lorsqu'en toute autre matière que la détention provisoire, la chambre de l'instruction infirme une ordonnance du juge d'instruction ou est saisie directement en cas d'omission du juge d'instruction de statuer dans le délai d'un mois sur la demande d'une partie tendant à ce qu'il soit procédé à l'un des actes prévus par les articles 81, neuvième alinéa, 82, quatrième alinéa, 82-1, deuxième alinéa, 156, deuxième alinéa ou 167, quatrième alinéa, elle peut soit évoquer l'affaire, soit renvoyer le dossier au juge d'instruction ou à un autre juge.

Le présent paragraphe tend à procéder à des coordinations oubliées en remplaçant les références au neuvième alinéa de l'article 81 et au quatrième alinéa de l'article 82 par un renvoi aux derniers alinéas de ces articles, qui permettent la saisine directe de la chambre de l'instruction lorsque le juge d'instruction n'a pas statué.

En outre, il tend à compléter le deuxième alinéa de l'article 207, afin d'autoriser une évocation ponctuelle du dossier. La chambre de l'instruction pourrait ainsi procéder à certains actes avant de renvoyer le dossier au juge d'instruction initialement saisi.

Le paragraphe IV bis , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à insérer un article 212-2 dans le code de procédure pénale pour prévoir la possibilité pour la chambre de l'instruction, sur réquisitions du procureur général, lorsqu'elle déclare qu'il n'y a lieu à suivre, à l'issue d'une information ouverte sur constitution de partie civile, de prononcer contre la partie civile une amende civile dont le montant ne peut excéder 15.000 euros, si elle considère que la constitution de partie civile a été abusive ou dilatoire.

La décision ne pourrait intervenir qu'à l'issue d'un délai de vingt jours à compter de la communication à la partie civile et à son avocat, par lettre recommandée ou par télécopie avec récépissé, des réquisitions du procureur général, afin de permettre à l'intéressé d'adresser des observations écrites à la chambre de l'instruction.

Dans l'hypothèse où la partie civile serait une personne morale, l'amende civile pourrait être prononcée contre son représentant légal si la mauvaise foi de ce dernier était établie.

Ce dispositif est calqué sur celui qui, depuis la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, permet au juge d'instruction de prononcer une amende civile lorsqu'il estime qu'une constitution de partie civile était abusive ou dilatoire. Il pourrait permettre de dissuader certaines constitutions de partie civile à l'évidence abusives.

Le paragraphe V a pour objet de modifier l'article 221 du code de procédure pénale. Cet article prévoit notamment qu'il est établi chaque trimestre dans chaque cabinet d'instruction un état de toutes les affaires en cours portant mention, pour chacune des affaires, de la date du dernier acte d'information exécuté.

Ces états sont adressés au président de la chambre de l'instruction et au procureur général dans les trois premiers jours du trimestre.

Le présent paragraphe tend à assouplir les obligations prévues par cet article en remplaçant la périodicité trimestrielle par une périodicité semestrielle. Il semble que cette périodicité corresponde en fait à la pratique suivie dans la plupart des juridictions.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 44 ainsi modifié .

Article 44 bis
(art. 217 du code de procédure pénale)
Signification des arrêts de mise en accusation

La loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a modifié l'article 183 du code de procédure pénale pour prévoir que les ordonnances de mise en accusation rendues par le juge d'instruction en matière criminelle seraient notifiées aux parties soit verbalement soit par lettre recommandée et non signifiées par exploit d'huissier.

Toutefois, le législateur a omis de procéder à des coordinations nécessaires dans d'autres articles du code de procédure pénale.

Dans un arrêt du 6 mars 2002, la chambre criminelle de la Cour de cassation a ainsi estimé que, l'article 268 du code de procédure pénale ayant imposé la signification des ordonnances de mise en accusation rendues par le juge d'instruction, le délai d'appel contre lesdites ordonnances courait à compter de cette signification, et ceci bien que l'article 183 prévoie que les ordonnances de règlement rendues par le juge d'instruction étaient notifiées aux accusés libres par lettre recommandée.

Dans son rapport pour 2001, la Cour de cassation avait proposé de modifier le code de procédure pénale pour faire partir le délai d'appel des ordonnances de mise en accusation (prises par le juge d'instruction) de leur notification et le délai de pourvoi contre les arrêts de mise en accusation (rendus par la chambre de l'instruction) de leur signification .

La loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice est venue satisfaire cette recommandation en abrogeant l'article 268 du code de procédure pénale, qui imposait la signification des ordonnances de mise en accusation rendues par le juge d'instruction.

La même loi a cependant modifié l'article 215 du code de procédure pénale pour prévoir également la simple notification des arrêts de mise en accusation rendus par la chambre de l'instruction.

Une nouvelle incohérence est alors apparue dans le code de procédure pénale. L'article 217 de ce code prévoit en effet que les arrêts de la chambre de l'instruction pouvant être frappés de pourvoi doivent faire l'objet d'une signification. Au nombre de ces arrêts, figurent bien entendu les arrêts de mise en accusation.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à mettre fin à cette incohérence en modifiant l'article 217 du code de procédure pénale, afin que celui-ci prévoie que les arrêts de la chambre de l'instruction pouvant être frappés d'un pourvoi font l'objet d'une signification, à l'exception des arrêts de mise en accusation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 44 bis sans modification .

SECTION 7
Dispositions diverses de simplification
Article 45
(art. 82 du code de procédure pénale)
Saisine directe de la chambre de l'instruction
par le procureur de la République

Dans sa rédaction issue de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, l'article 137-4 du code de procédure pénale fait obligation au juge d'instruction de statuer sans délai par ordonnance motivée, qui est immédiatement portée à la connaissance du procureur de la République lorsque, saisi de réquisitions du procureur tendant au placement en détention provisoire, il estime que cette détention n'est pas justifiée et qu'il décide de ne pas transmettre le dossier de la procédure au juge des libertés et de la détention.

L'article 137-3 fait pour sa part obligation au juge des libertés et de la détention de statuer par ordonnance motivée, même lorsqu'il décide de ne pas placer en détention provisoire la personne mise en examen.

L'article 82 du code de procédure pénale dispose notamment qu'à défaut d'ordonnance du juge d'instruction en cas de demande d'actes ou de demande de placement ou de maintien en détention provisoire, le procureur de la République peut, dans les dix jours, saisir directement la chambre de l'instruction. Il ne prévoit pas, en revanche, la situation dans laquelle le juge des libertés et de la détention ne rend pas d'ordonnance.

Le 2° du présent article tend à corriger cette lacune en complétant l'article 82, pour permettre explicitement au procureur de la République de saisir directement la chambre de l'instruction lorsque le juge des libertés et de la détention, saisi par le juge d'instruction, ne rend pas d'ordonnance dans le délai de dix jours à compter de sa saisine.

Le 1° du présent article tend quant à lui à procéder à une coordination omise lors des précédentes réformes législatives. L'article 85 du code de procédure pénale dispose notamment que si le juge d'instruction ne suit pas les réquisitions du procureur de la République, il doit rendre une ordonnance motivée dans les cinq jours de ces réquisitions, « sauf dans les cas prévus par le second alinéa de l'article 137 . »

Or, l'article 137 ne comporte plus qu'un alinéa. Le présent article tend à remplacer cette mention de l'article 137 par une référence à l'article 137-4, qui prévoit que lorsque le juge d'instruction estime que des réquisitions du procureur tendant au placement en détention provisoire ne sont pas justifiées, il statue « sans délai ».

Votre commission vous propose d'adopter l'article 45 sans modification .

Article 46
(art. 83 du code de procédure pénale)
Désignation de plusieurs juges d'instruction
pour suivre un même dossier

Dans sa rédaction actuelle, l'article 43 du code de procédure pénale prévoit les conditions dans lesquelles est désigné, pour chaque information, le juge d'instruction qui en sera chargé.

Cet article prévoit notamment que lorsque la gravité ou la complexité de l'affaire le justifie, le président du tribunal ou le magistrat qui le remplace peut adjoindre au juge d'instruction chargé de l'information un ou plusieurs juges d'instruction qu'il désigne, soit dès l'ouverture de l'information, soit sur demande du juge chargé de l'information à tout moment de la procédure.

Le présent article vise à étendre les possibilités de désigner plusieurs juges d'instruction pour une même information en prévoyant que cette désignation peut intervenir non seulement à la demande du juge chargé de l'information, mais également avec son accord. Le président du tribunal pourra ainsi prendre l'initiative de proposer au magistrat instructeur de lui adjoindre un ou plusieurs collègues pour suivre une information.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 46 sans modification .

Article 47
(art. 84 du code de procédure pénale)
Suppléance du juge d'instruction en cas d'urgence

L'article 84 du code de procédure pénale définit les règles applicables en cas de demande de dessaisissement du juge d'instruction ou d'empêchement de ce magistrat.

Cet article prévoit notamment qu'en cas d'urgence et pour des actes isolés, tout juge d'instruction peut suppléer un autre juge d'instruction du même tribunal, à charge pour lui d'en rendre compte immédiatement au président du tribunal.

Le présent article tend à supprimer l'obligation de rendre immédiatement compte au président du tribunal, qui ne présente qu'une utilité modeste et n'est pas appliquée actuellement.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 47 sans modification .

Article 48
(art. 82-3 du code de procédure pénale)
Régime juridique des demandes tendant à faire
constater la prescription

Dans sa rédaction actuelle, l'article 82-3 du code de procédure pénale dispose que lorsque le juge d'instruction conteste le bien fondé d'une demande des parties tendant à constater la prescription de l'action publique, il doit rendre une ordonnance motivée dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande.

Cet article ne précise ni les formes dans lesquelles la demande doit être effectuée, ni le moment où la demande doit être formulée. Dans ces conditions, il est revenu à la jurisprudence d'apporter des précisions sur cette question.

Dans un arrêt du 18 septembre 2001, la Cour de cassation a jugé que lorsqu'une partie a adressé au juge d'instruction une demande de constatation de la prescription avant l'expiration du délai de vingt jours pendant lequel les parties peuvent soulever des nullités au moment du règlement de l'information et que le juge n'a pas statué dans le délai d'un mois, l'intéressé peut saisir directement le président de la chambre de l'instruction.

La Cour de cassation a également décidé, dans un arrêt du 4 septembre 2001, que la demande de constatation de la prescription devait être faite dans les formes prévues par le dixième alinéa de l'article 81 du code de procédure pénale (déclaration auprès du greffier du juge d'instruction, lettre recommandée avec demande d'avis de réception lorsque le demandeur ou son avocat ne réside pas dans le ressort de la juridiction, déclaration auprès du chef d'établissement lorsque la personne est détenue).

Ces décisions jurisprudentielles sont venues confirmer l'interprétation de l'article 82-3 faite par la circulaire du 20 décembre 2000 présentant les dispositions de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes : « Bien que l'article 82-3 ne le précise pas, il convient de considérer que les demandes tendant à faire constater la prescription doivent être faites selon les formalités du dixième alinéa de l'article 81 et que, en l'absence d'ordonnance du juge d'instruction dans le délai d'un mois, les parties peuvent directement saisir la chambre de l'instruction en application du dernier alinéa de cet article. »

Dans son rapport pour 2001, la Cour de cassation a estimé souhaitable que, dans un souci de clarification, les termes du code de procédure pénale soient complétés afin que soit défini le régime juridique des demandes prévues par l'article 82-3.

Le présent article tend à répondre à cette demande en complétant l'article 82-3 pour prévoir que les dispositions des avant-dernier et dernier alinéas de l'article 81, qui définissent respectivement les formes de certaines demandes d'actes et les conditions dans lesquelles le demandeur peut saisir le président de la chambre de l'instruction en l'absence de réponse du juge d'instruction, sont applicables.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 48 sans modification .

Article 49
(art. 99-3 nouveau du code de procédure pénale)
Réquisitions judiciaires au cours de l'instruction

Dans son article 28, le présent projet de loi définit les conditions dans lesquelles les officiers de police judiciaire peuvent requérir, au cours d'une enquête, de toute personne, tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des documents intéressant l'enquête, de leur communiquer ces documents, sans que puissent leur être opposée l'obligation au secret professionnel.

Le présent article tend à prévoir le même dispositif au stade de l'instruction en insérant un article 99-3 dans le code de procédure pénale. Cet article figurerait dans la sous-section du code de procédure pénale consacrée aux transports, perquisitions et saisies au cours de l'instruction.

Toutefois, la loi n° 2003-239 du 18 mai 2003 a introduit la possibilité de formuler des réquisitions auprès de certains organismes aux fins d'obtenir des informations figurant dans des traitements automatisés de données personnelles et a inséré ce dispositif dans un article 151-1-1 du code de procédure pénale parmi les dispositions relatives aux commissions rogatoires. Afin d'éviter des confusions, votre commission vous soumet un amendement tendant à :

- déplacer l'article 151-1-1 du code de procédure pénale dans un article 99-4, de façon à ce que l'ensemble des réquisitions pouvant être faites au cours d'une instruction soient regroupées ;

- procéder à des coordinations avec les décisions qu'elle a prises à l'article 28 à propos des réquisitions formées en cours d'enquête.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 49 ainsi modifié .

Article 50
(art. 115 du code de procédure pénale)
Modalités de désignation d'un avocat
au cours de l'instruction

L'article 115 du code de procédure pénale dispose que les parties peuvent à tout moment de l'information faire connaître au juge d'instruction le nom de l'avocat choisi par elles, sans qu'aucune condition de forme ne soit exigée.

Cet article prévoit également, depuis l'entrée en vigueur de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, que lorsque la personne mise en examen est détenue, le choix de son avocat peut résulter d'un courrier adressé par cette personne à celui-ci et le désignant pour assurer sa défense ; une copie de ce courrier doit être remise par l'avocat, en tout ou partie, au cabinet du juge d'instruction. La personne mise en examen doit confirmer ce choix au juge d'instruction dans les quinze jours.

Dans son rapport pour 1995, la Cour de cassation a proposé de compléter les dispositions relatives à la désignation de l'avocat au cours de l'instruction :

« Ce texte pourrait être complété, afin de prévoir que le changement d'avocat, ou le changement de l'avocat auquel les convocations et notifications doivent être adressées au cours de l'information, doit faire l'objet d'une déclaration au greffe, transcrite sur un imprimé-type (...)

« En effet, des difficultés apparaissent en cas de changements, parfois très fréquents pour une même partie, du nom de l'avocat qui l'assiste ou, en cas de pluralité de conseils, du nom de l'avocat auquel les convocations doivent être adressées, notamment lorsque le changement ne résulte que d'une mention ambiguë, insérée dans une lettre adressée au juge d'instruction et ayant divers autres objets. Si un tel changement se produit pendant qu'une instance est en cours devant la chambre d'accusation (devenue la chambre de l'instruction) , la situation tourne à la confusion, et de nombreux moyens sont soumis à la chambre criminelle à la suite de difficultés de cette nature. »

Le présent article tend à modifier l'article 115 du code de procédure pénale pour répondre à cette difficulté.

Le texte proposé tend à prévoir, pour la désignation de l'avocat, un formalisme similaire à celui exigé pour les demandes d'actes, les requêtes en nullité ou les demandes de mise en liberté. Ainsi, le texte prévoit que le choix d'un avocat effectué par les parties devra faire l'objet d'une déclaration au greffier du juge d'instruction . La déclaration devrait être constatée et datée par le greffier et signée par celui-ci et par la partie concernée, une mention devant être faite en cas d'impossibilité pour la partie de signer.

Le texte proposé précise que, comme en matière de demande d'actes, lorsque la partie ne réside pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffier peut être faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

En ce qui concerne les personnes détenues, le texte prévoit deux possibilités :

- déclaration auprès du chef d'établissement pénitentiaire constatée et datée par le chef d'établissement et signée par celui-ci et par le détenu. Si le détenu ne pouvait signer, il en serait fait mention par le chef d'établissement. Le document serait adressé sans délai, en original ou en copie et par tout moyen, au greffier du juge d'instruction. La désignation de l'avocat prendrait effet à compter de la réception du document par le greffier ;

- courrier adressé par la personne à son avocat, comme actuellement. Contrairement à la situation actuelle, l'avocat désigné devrait alors lui-même faire une déclaration au greffe du juge d'instruction et lui remettre une copie, complète ou partielle du courrier. Comme aujourd'hui, le détenu devrait confirmer la désignation dans un délai de quinze jours.

Ces dispositions paraissent indispensables pour mettre fin à des comportements dilatoires et assurer la sécurité juridique des procédures.

Le texte initial prévoyait que les nouvelles dispositions n'étaient pas applicables en cas de désignation de l'avocat au cours d'un interrogatoire ou d'une audition. De manière très heureuse, l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des lois, a complété le texte proposé pour prévoir que les nouvelles formalités ne seront pas applicables lors de la première désignation d'un avocat par une partie .

De fait, s'il est légitime de faire en sorte que des changements d'avocat ne soient pas source de nullités de procédure, il n'est pas souhaitable d'alourdir systématiquement les démarches que doivent effectuer les parties ou leurs avocats.

Votre commission vous soumet un amendement de clarification rédactionnelle et vous propose d'adopter l'article 50 ainsi modifié .

Article 51
(art. 118 du code de procédure pénale)
Substitution d'une qualification criminelle
à une qualification correctionnelle

L'article 146 du code de procédure pénale définit les règles applicables lorsqu'il apparaît au cours d'une instruction qu'une qualification criminelle ne peut être retenue.

Dans un tel cas, le juge d'instruction peut, après avoir communiqué le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions, soit saisir par ordonnance motivée le juge des libertés et de la détention aux fins de maintien en détention provisoire de la personne mise en examen, soit prescrire sa mise en liberté assortie ou non d'un contrôle judiciaire.

Le juge des libertés et de la détention statue dans le délai de trois jours à compter de la date de sa saisine par le juge d'instruction.

Le code de procédure pénale ne prévoit pas la situation dans laquelle une qualification criminelle doit être substituée à une qualification correctionnelle. Il a donc fallu que la jurisprudence précise le droit applicable. Ainsi, dans un arrêt du 27 mai 1997, la Cour de cassation a considéré qu'en cas de notification d'une qualification criminelle se substituant à une qualification correctionnelle, le titre initial de détention provisoire demeurait valable, la détention se trouvant alors soumise aux règles découlant de la nouvelle qualification.

Dans son rapport pour 2001, la Cour de cassation a souhaité une clarification du droit applicable :

« Il paraît cependant souhaitable qu'en pareil cas, le juge d'instruction soit également tenu de saisir le juge des libertés et de la détention afin que celui-ci délivre un nouveau titre de détention .

« D'une part, la plus grande clarté est nécessaire s'agissant de la détermination de la durée de la détention provisoire. Une modification implicite de cette durée résultant d'une décision de requalification n'apparaît pas satisfaisante .

« D'autre part, depuis le 1 er janvier 2001, le contentieux de la détention provisoire a été retiré au juge d'instruction pour être confié au juge des libertés et de la détention. Il semble anormal que la nature du titre initial délivré par ce magistrat puisse être modifiée par une décision prise en dehors de lui, sans qu'il en soit même informé . »

Le présent article tend, en rétablissant l'article 118 du code de procédure pénale, abrogé en 1993, à prévoir explicitement les règles applicables en cas de substitution d'une qualification criminelle à une qualification correctionnelle, sans pour autant retenir l'ensemble des suggestions de la Cour de cassation.

Le texte proposé pour l'article 118 du code de procédure pénale prévoit, dans son premier alinéa, que s'il apparaît au cours de l'information que les faits reprochés à la personne mise en examen sous une qualification correctionnelle constituent en réalité un crime, le juge d'instruction notifie à la personne, après l'avoir informée de son intention et avoir recueilli ses éventuelles observations et celles de son avocat, qu'une qualification criminelle est substituée à la qualification initialement retenue. En l'absence d'une telle notification, il ne pourrait être fait application des règles prévues par l'article 181 du code de procédure pénale, qui permettent la mise en accusation devant la cour d'assises des personnes poursuivies pour crime.

Le deuxième alinéa du texte proposé dispose que si la personne est en détention provisoire, le mandat de dépôt initialement délivré demeure valable et est considéré comme un mandat de dépôt criminel . La détention provisoire se trouverait alors soumise aux règles applicables en matière criminelle, les délais prévus pour la prolongation de la mesure étant calculés à compter de la délivrance du mandat.

Ces dispositions s'éloignent des propositions de la Cour de cassation, qui souhaitait que le juge des libertés et de la détention soit de nouveau saisi.

Le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 118 précise que lors de la notification du changement de qualification, le juge d'instruction peut faire connaître un nouveau délai prévisible d'achèvement de l'information, conformément à l'article 116 du code de procédure pénale.

Rappelons que l'article 116 fait obligation au juge d'instruction, s'il estime que le délai prévisible d'achèvement de l'information est inférieur à un an en matière correctionnelle ou à dix-huit mois en matière criminelle, de donner connaissance de ce délai prévisible à la personne et de l'aviser qu'à l'expiration dudit délai, elle pourra demander la clôture de la procédure conformément aux dispositions de l'article 175-1 140 ( * ) . Dans le cas contraire, le juge indique à la personne qu'elle pourra demander la clôture de la procédure à l'expiration d'un délai d'un an en matière correctionnelle ou de dix-huit mois en matière criminelle.

Le texte initial du projet de loi prévoyait que le juge d'instruction, en cas de changement de qualification, ne pourrait faire connaître à la personne un nouveau délai prévisible d'achèvement de l'information qu'à condition que ce délai n'excède pas dix-huit mois à compter de la mise en examen initiale. Il prévoyait également qu'à défaut, la personne ne pourrait demander la clôture de la procédure qu'à l'issue de ce délai de dix-huit mois.

A juste titre, l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé ces dispositions, dès lors qu'aucune autre interprétation de l'article 116 du code de procédure pénale n'est possible.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 51 sans modification .

Article 52
(art. 119 du code de procédure pénale)
Possibilité pour le procureur d'assister
à l'audition d'un témoin ou d'un témoin assisté

Dans sa rédaction actuelle, l'article 119 du code de procédure pénale dispose que le procureur de la République peut assister aux interrogatoires et confrontations de la personne mise en examen ainsi qu'aux auditions de la partie civile.

Il prévoit également que chaque fois que le procureur de la République a fait connaître au juge d'instruction son intention d'y assister, le greffier du juge d'instruction doit, sous peine d'une amende civile de 1,5 euro prononcée par le président de la chambre de l'instruction, l'avertir par simple note, au plus tard l'avant-veille de l'interrogatoire.

Le présent article tend à actualiser les dispositions de l'article 119 pour :

- supprimer l'amende civile de 1,5 euro encourue par le greffier lorsqu'il omet d'avertir le procureur d'un interrogatoire, d'une audition ou d'une confrontation ;

- permettre au procureur de la République d'assister non seulement aux interrogatoires et confrontations de la personne mise en examen ainsi qu'aux auditions de la partie civile, mais également aux auditions du témoin assisté et des témoins .

La possibilité pour le procureur d'assister aux auditions du témoin assisté est parfaitement justifiée, dès lors que le témoin assisté a le droit d'être assisté d'un avocat lors de ses auditions (article 113-3 du code de procédure pénale).

En revanche, le droit d'assister aux auditions des témoins apparaît plus contestable. Conformément à l'article 82-2 du code de procédure pénale, l'avocat de la personne mise en examen ne peut demander à assister aux auditions des témoins que lorsqu'il a demandé lui-même ces auditions. En outre, le juge d'instruction peut refuser de faire droit à cette demande.

Dans ces conditions, il paraît préférable que le procureur de la République demande lui aussi à assister aux auditions du témoin et que le bien-fondé de cette demande soit apprécié par le juge d'instruction. En conséquence, par un amendement , votre commission vous propose la suppression du droit pour le procureur de la République d'assister systématiquement aux auditions des témoins.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 52 ainsi modifié .

Article 53
(art. 137-1 du code de procédure pénale)
Suppléance du juge des libertés et de la détention

La création du juge des libertés et de la détention , appelé à statuer sur les demandes de placement en détention provisoire à la place du juge d'instruction, a été une innovation importante de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes.

L'article 137-1 du code de procédure pénale dispose que le juge des libertés et de la détention est un magistrat du siège ayant rang de président, de premier vice-président ou de vice-président.

Il est désigné par le président du tribunal de grande instance.

Le juge des libertés et de la détention ne peut, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales dont il a connu.

Dès l'adoption de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence, les dispositions relatives au juge des libertés et de la détention ont soulevé de sérieuses difficultés d'application.

Aussi la loi n° 2000-1354 du 30 décembre 2000 tendant à faciliter l'indemnisation des condamnés reconnus innocents et portant diverses dispositions de coordination en matière de procédure pénale a-t-elle inséré un article L. 640-2 dans le code de l'organisation judiciaire pour permettre aux chefs de cour de désigner, pour une période limitée, un vice-président ou un premier vice-président pour exercer concurremment les fonctions de juge des libertés et de la détention dans un ou deux tribunaux autres que celui dans lequel il est affecté.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence, les juridictions ont mis en place des organisations diversifiées pour l'application de cette réforme. Tandis que, dans certaines juridictions, tous les vice-présidents et premiers vice-présidents, ainsi que le président, exercent les fonctions de juge des libertés et de la détention, d'autres tribunaux ont opté pour une spécialisation de certains magistrats.

Au cours de ses déplacements, votre rapporteur a pu constater que la fonction de juge des libertés et de la détention était peu recherchée par les magistrats. Le juge des libertés et de la détention n'exerce en effet qu'un contrôle ponctuel sur les affaires, lorsqu'est en cause le contentieux de la détention provisoire. Compte tenu des multiples étapes que doivent parcourir les personnes déférées avant d'être présentées au juge des libertés et de la détention, ce magistrat est très souvent conduit à organiser des débats contradictoires en fin de journée, voire en fin de soirée.

Le présent article tend à compléter l'article 137-1 du code de procédure pénale, pour prévoir qu'en cas d'empêchement, le juge des libertés et de la détention est remplacé par un magistrat du siège désigné par le président du tribunal de grande instance.

L'objectif de facilitation de l'organisation du travail des juridictions est aisément compréhensible. Néanmoins, l'évolution proposée pourrait susciter de sérieuses difficultés.

L'attribution des fonctions de juge des libertés et de la détention à un magistrat expérimenté constituait l'un des principes essentiels de la réforme portant création de ce juge.

Surtout, le présent projet de loi renforce substantiellement les attributions du juge des libertés, qui devra désormais autoriser un grand nombre d'actes, sur réquisitions du procureur de la République, au cours des enquêtes préliminaires. Ces actes se dérouleront sous son contrôle.

Il n'est pas certain, dans ce contexte, qu'il soit opportun de permettre au président du tribunal de désigner un jeune magistrat pour exercer ces fonctions.

Par ailleurs, la loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature a modifié l'organisation hiérarchique du corps de la magistrature, de sorte que le nombre de vice-présidents présents dans les juridictions a augmenté.

Dans ces conditions, votre commission vous propose la suppression de l'article 53.

Article 54
(art. 173-1 du code de procédure pénale)
Purge des nullités au cours de l'information

Lors de la discussion du projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, le Sénat a proposé d'insérer dans le code de procédure pénale un article 173-1 pour imposer à la personne mise en examen d'invoquer les moyens tirés de la nullité des actes antérieurs à la mise en examen ou de la mise en examen elle-même dans un délai de six mois après la mise en examen. La même règle a été appliquée à la partie civile pour les actes accomplis avant sa première audition ou cette audition elle-même. Cette disposition a été acceptée par l'Assemblée nationale.

Comme l'indiquait notre ancien collègue M. Charles Jolibois dans son rapport, « ces dispositions devraient permettre d'éviter certaines situations très difficiles devant les chambres d'accusation (devenues chambres de l'instruction) , celles-ci pouvant être saisies de demandes de nullité portant sur des actes accomplis plusieurs années auparavant » 141 ( * ) .

En 2002, lors de la discussion de la proposition de loi complétant la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, le Sénat, reprenant une proposition de notre excellent collègue M. Hubert Haenel, a proposé de généraliser le système de la purge des nullités, afin que le délai de six mois s'applique à l'ensemble des actes de l'instruction. Cette proposition de modification de l'article 173-1 du code de procédure pénale a de nouveau été acceptée par l'Assemblée nationale.

Notre assemblée a par conséquent été à l'origine de progrès décisifs en matière de purge des nullités .

Le présent article tend à modifier l'article 173-1 du code de procédure pénale pour ramener de six à quatre mois le délai donné à la personne mise en examen et à la partie civile pour invoquer la nullité des actes d'instruction.

Votre commission considère que le délai de six mois actuellement prévu par le code permet d'éviter les abus constatés dans le passé dans le domaine des requêtes en nullité. Elle ne perçoit pas en quoi le raccourcissement de ce délai pourrait permettre d'accélérer les procédures, dès lors que les instructions d'une durée inférieure à six mois sont fort peu nombreuses. Elle rappelle que la durée moyenne des instructions dépassait 17 mois en 2001.

Il convient en outre de noter que les délais d'obtention des copies du dossier d'instruction par les avocats sont en général assez longs.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission vous propose la suppression de l'article 54.

Article 54 bis
(art. 177 du code de procédure pénale)
Non-lieu motivé par l'irresponsabilité
ou le décès de la personne poursuivie

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 177 de code de procédure pénale, relatif aux ordonnances de non-lieu .

Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit notamment que si le juge d'instruction estime que les faits ne constituent ni crime, ni délit, ni contravention, ou si l'auteur est resté inconnu, ou s'il n'existe pas de charges suffisantes contre la personne mise en examen, il déclare, par une ordonnance, qu'il n'y a pas lieu à suivre.

Le présent article tend à insérer un nouvel alinéa dans l'article 177 pour prévoir que lorsque l'ordonnance de non-lieu est motivée par le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal ou par le décès de la personne mise en examen, elle doit également préciser s'il existe des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.

L'article 122-1 du code pénal dispose, dans son premier alinéa, que n'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.

La motivation du présent article est aisément compréhensible. Lorsqu'une personne est déclarée irresponsable ou décède au cours de l'instruction, la victime est privée du procès qui aurait permis un débat public sur les faits qu'elle a subis, ainsi que du jugement de condamnation reconnaissant la culpabilité de la personne poursuivie.

Le législateur a déjà pris des mesures destinées à voir reconnue la commission des faits par la personne poursuivie, même lorsqu'elle est déclarée irresponsable. Ainsi, l'article 349-1 du code de procédure pénale prévoit que lorsqu'est invoquée devant une cour d'assises comme moyen de défense une cause d'irresponsabilité pénale, la juridiction est invitée à répondre successivement aux deux questions suivantes :

- l'accusé a-t-il commis tel fait ?

- l'accusé bénéficie-t-il pour ce fait d'une cause d'irresponsabilité pénale ?

Il est utile de prévoir que l'ordonnance de non-lieu rendue à l'égard de personnes atteintes de troubles psychiques ou neuropsychiques ayant aboli leur discernement précise s'il existe des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.

Votre commission considère que ce dispositif pourrait être également appliqué lorsque sont invoquées d'autres causes d'irresponsabilité telles que l'action sous l'empire d'une force ou d'une contrainte à laquelle la personne n'a pu résister, l'erreur de droit inévitable qui a conduit une personne à penser qu'elle pouvait accomplir l'acte qui lui est reproché, l'accomplissement d'un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires...

En revanche, il apparaît beaucoup plus contestable de mentionner sur l'ordonnance de non-lieu d'une personne décédée qu'il existait des charges suffisantes établissant que cette personne avait commis les faits qui lui sont reprochés.

Par définition, étant décédée, la personne ne peut plus contester l'ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat instructeur, non plus que ses ayants-droits. Dans ces conditions, le dispositif proposé porterait gravement atteinte aux droits de la défense. Malgré la légitime amertume que ressentent les victimes lorsque l'auteur d'un délit ou d'un crime ne peut être jugé parce qu'il est décédé avant le procès, il ne paraît pas possible de prévoir l'obligation pour le juge d'instruction d'indiquer dans l'ordonnance de non-lieu s'il existait des charges suffisantes contre la personne poursuivie. Le décès est en effet une cause d'extinction de l'action publique .

Par un amendement , votre commission vous propose d'étendre le dispositif proposé à l'ensemble des cas d'irresponsabilité pénale tout en excluant son application en cas de décès de la personne poursuivie.

Elle vous propose d'adopter l'article 54 bis ainsi modifié .

Article 54 ter
(art. 179-1 et 503-1 nouveaux du code de procédure pénale)
Déclaration d'adresse

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à insérer deux nouveaux articles 179-1 et 503-1 dans le code de procédure pénale, afin d'obliger les personnes renvoyées devant une juridiction de police ou correctionnelle à déclarer tout changement d'adresse.

Le paragraphe I tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 179-1 pour prévoir que toute ordonnance renvoyant la personne mise en examen devant le tribunal de police ou le tribunal correctionnel informe celle-ci qu'elle doit signaler auprès du procureur de la République, jusqu'au jugement définitif de l'affaire, tout changement de l'adresse déclarée lors de sa mise en examen, par lettre recommandée avec avis de réception. L'ordonnance devrait également l'informer que toute citation, notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne.

Ces dispositions pourraient permettre de limiter le nombre de jugements par défaut.

Le paragraphe II tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 503-1 pour prévoir l'obligation pour le prévenu laissé libre qui forme appel d'un jugement correctionnel de déclarer son adresse personnelle. Le texte précise que le prévenu peut substituer à son adresse celle d'un tiers chargé de recevoir les citations, rectifications et significations qui lui seront destinées s'il produit l'accord de ce dernier. La déclaration d'adresse serait faite par l'avocat du prévenu s'il faisait lui-même l'appel.

A défaut d'une telle déclaration, l'adresse figurant dans le jugement rendu en premier ressort serait considérée comme adresse déclarée du prévenu.

Le texte précise que le prévenu ou son avocat doit signaler auprès du procureur de la République, jusqu'au jugement définitif de l'affaire, tout changement de l'adresse déclarée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Toute citation, notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée serait réputée faite à sa personne et le prévenu qui ne comparaîtrait pas à l'audience sans excuse reconnue valable par la cour d'appel serait jugé par arrêté contradictoire à signifier.

Enfin, le texte proposé prévoit que si le prévenu détenu au moment de l'appel est remis en liberté avant l'examen de son affaire par la cour d'appel, il doit faire la déclaration d'adresse préalablement à sa mise en liberté auprès du chef de la maison d'arrêt.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 54 ter sans modification .

Article 55
(art. 186-3 nouveau et 469 du code de procédure pénale)
Correctionnalisation judiciaire

Dans leur Traité de droit criminel, Roger Merle et André Vitu écrivent : « En quoi consiste la correctionnalisation judiciaire ? Au lieu de considérer comme crimes des faits qui en présentent pourtant tous les caractères juridiques, les autorités judiciaires les regardent souvent comme des délits correctionnels, auxquels elles appliquent des peines correctionnelles . » 142 ( * )

Cette pratique est illégale puisqu'elle aboutit à méconnaître les règles d'ordre public relatives à la compétence des juridictions pénales en renvoyant devant le tribunal correctionnel des affaires relevant de la cour d'assises. En pratique cependant, cette pratique est le plus souvent acceptée par tous les acteurs du procès, ce qui limite les contestations.

L'article 469 du code de procédure pénale permet néanmoins au tribunal correctionnel, si le fait qui lui est déféré sous la qualification de délit est de nature à entraîner une peine criminelle, de « renvoyer le ministère public à se pourvoir ainsi qu'il avisera ».

Par la même décision, le tribunal correctionnel peut décerner mandat de dépôt ou d'arrêt contre le prévenu.

La jurisprudence a considéré que le moyen tiré de l'incompétence de la juridiction de jugement était recevable en appel et en cassation, même s'il est présenté pour la première fois devant la Haute juridiction 143 ( * ) .

Le présent article tend à permettre aux parties de contester la compétence de la juridiction de jugement lors du règlement de l'information tout en limitant les possibilités de contester cette compétence lors du jugement.

Le paragraphe I tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 186-3 pour prévoir que la personne mise en examen et la partie civile peuvent interjeter appel de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel dans le seul cas où elles estiment que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises.

Rappelons que l'article 186 du code de procédure pénale, qui définit les conditions dans lesquelles il peut être fait appel des ordonnances rendues au cours de l'instruction, ne permet pas d'interjeter appel des ordonnances de renvoi devant le tribunal correctionnel. Il permet en revanche de faire appel des ordonnances de mise en accusation. Le présent article ouvre donc une brèche dans cette interdiction en permettant un appel dans le seul cas où la qualification correctionnelle est contestée.

Le paragraphe II tend à compléter l'article 469 du code de procédure pénale, qui permet au tribunal correctionnel d'inciter le procureur de la République à mieux se pourvoir lorsqu'il estime que les faits qui lui sont soumis constituent un crime, pour prévoir que lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction, le tribunal correctionnel ne peut pas faire application, d'office ou à la demande des parties, des dispositions lui permettant d'inciter le procureur à mieux se pourvoir si la victime était constituée partie civile et était assistée d'un avocat lorsque le renvoi a été ordonné.

Cette rédaction ménage la possibilité pour la victime qui se constitue partie civile à l'ordonnance de contester la compétence du tribunal correctionnel si elle estime que les faits en cause constituent un crime.

Par ailleurs, le texte proposé prévoit une autre exception à l'interdiction de contester la compétence du tribunal correctionnel lors de l'audience de jugement. Il dispose en effet que le tribunal correctionnel, saisi de poursuites exercées pour un délit non intentionnel, conserve la possibilité de renvoyer le ministère public à se pourvoir s'il résulte des débats que les faits sont de nature à entraîner une peine criminelle parce qu'ils ont été commis de façon intentionnelle.

De fait, il serait difficilement admissible que la décision de la juridiction d'instruction lie de manière irrévocable la juridiction de jugement. S'il apparaît, lors d'un procès pour homicide involontaire, que le prévenu a eu la volonté de donner la mort, le tribunal doit conserver la possibilité d'inciter le parquet à mieux se pourvoir.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 55 sans modification.

Article 55 bis
(art. 43 du code de procédure pénale)
Délocalisation d'une procédure par le procureur général

L'article 43 du code de procédure pénale définit les critères de compétence du procureur de la République. Il prévoit que sont compétents le procureur de la République du lieu de l'infraction, celui de la résidence de l'une des personnes soupçonnées d'avoir participé à l'infraction, celui du lieu d'arrestation d'une de ces personnes, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Rudy Salles et Gérard Vignoble, tend à compléter l'article 43 pour prévoir que lorsque le procureur de la République est saisi de faits mettant en cause, comme auteur ou comme victime, une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public qui est habituellement, par ses fonctions ou sa mission, en relation avec les magistrats ou fonctionnaires de la juridiction, le procureur général peut d'office, sur proposition du procureur de la République, ou à la demande de l'intéressé, transmettre la procédure au procureur de la République auprès du tribunal de grande instance le plus proche du ressort de la cour d'appel. Cette juridiction serait alors territorialement compétente pour connaître l'affaire, par dérogation aux règles normales de compétence territoriale. La décision du procureur général constituerait une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours.

Le présent article tend à permettre, de manière fort compréhensible, d'éviter qu'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, qui est en relation avec les magistrats de la juridiction, soit jugée par cette juridiction.

L'article 665 du code de procédure pénale prévoit déjà une possibilité de renvoi d'une affaire d'une juridiction à une autre « dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice ». Ce renvoi peut être ordonné par la chambre criminelle de la Cour de cassation, soit sur requête du procureur général près la Cour de cassation, soit sur requête du procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle la juridiction saisie a son siège, agissant d'initiative ou sur demande des parties.

Dans les dix jours de la réception de la demande et s'il n'y donne pas suite, le procureur général près la cour d'appel informe le demandeur des motifs de sa décision. Ce dernier peut alors former un recours devant le procureur général près la Cour de cassation qui, s'il ne saisit pas la chambre criminelle, l'informe des motifs de sa décision.

La chambre criminelle statue dans les huit jours de la requête.

L'article 665 du code de procédure pénale ne permet pas aujourd'hui de répondre à certaines situations. Il ne s'applique en effet que lorsqu'une juridiction est saisie.

Dans un arrêt de 1993, la chambre criminelle de la Cour de cassation a déclaré irrecevable la requête d'un procureur général tendant au renvoi devant une autre juridiction d'une procédure pouvant être suivie contre un magistrat.

La Cour de cassation a estimé que n'étaient pas réunies « les conditions d'application des dispositions de l'article 665 du code de procédure pénale qui, en prévoyant le renvoi de la connaissance d'une affaire d'une juridiction à une autre, impliquent que celle de ces deux juridictions qu'il s'agit de dessaisir se trouve effectivement saisie » 144 ( * ) .

Le présent article doit permettre le dépaysement d'une affaire avant même qu'une juridiction soit saisie, par exemple au cours d'une enquête. Il s'agit d'une mesure tout à fait utile et même nécessaire.

La solution proposée paraît pouvoir être acceptée, dès lors que le procureur général ne pourra exercer aucun choix en ce qui concerne la juridiction de renvoi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 55 bis sans modification .

SECTION 8
Dispositions diverses de coordination
Article 56
(art. 41-4, 114, 117, 138, 142, 148-1-1, 156, 179, 181,
215, 207-1 du code de procédure pénale,
art. L. 141-1 et L. 141-2 du code de l'organisation judiciaire)
Coordinations

Le présent article tend à opérer des coordinations dans un grand nombre d'articles du code de procédure pénale.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 41-4 du code de procédure pénale relatif à la restitution des objets saisis au cours d'une procédure pénale. Cet article prévoit notamment qu'il n'y a pas lieu à restitution lorsque celle-ci est de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens ; la décision de non-restitution prise pour ce motif par le procureur de la République ou le procureur général peut être contestée dans le mois de sa notification par requête de l'intéressé devant le tribunal correctionnel ou la chambre des appels correctionnels, qui statue en chambre du conseil. Le texte précise qu'il n'y a pas lieu non plus à restitution lorsqu'une disposition particulière prévoit la destruction des objets placés sous main de justice.

Le présent paragraphe, répondant à une demande de la Cour de cassation, tend à permettre l'exercice d'un recours non seulement lorsque le procureur refuse la restitution parce qu'elle est de nature à créer un danger, mais également lorsqu'il la refuse parce qu'une disposition particulière prévoit la destruction des objets placés sous main de justice ou pour tout autre motif.

Le paragraphe II tend à opérer une coordination omise lors de l'adoption de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. Cette loi a modifié l'article 80-1 du code de procédure pénale pour interdire toute mise en examen par lettre recommandée.

En revanche, le législateur n'a pas supprimé une disposition de l'article 114, qui prévoit qu'en cas de mise en examen par lettre recommandée, la procédure est mise à la disposition de l'avocat, sous réserve des exigences du bon fonctionnement du cabinet du juge d'instruction, quinze jours après l'envoi de la lettre recommandée ou de la notification par procès-verbal, s'il n'a pas été entre-temps procédé à la première comparution.

Le présent paragraphe tend à supprimer ces dispositions qui ont perdu toute portée.

Le paragraphe III tend à modifier l'article 117 du code de procédure pénale, qui énumère les cas dans lesquels le juge d'instruction peut procéder à un interrogatoire ou à une confrontation sans respecter les règles relatives à l'interrogatoire de première comparution prévues par l'article 116 : témoin en danger de mort, existence d'indices sur le point de disparaître, présence du juge d'instruction sur les lieux (dernier alinéa de l'article 72). La loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale a supprimé les deux premiers alinéas de l'article 72, mais a omis de modifier la référence au « dernier alinéa » de cet article figurant à l'article 117.

Le présent paragraphe tend à opérer cette coordination en insérant dans l'article 117 une référence à l'article 72 et non à son dernier alinéa.

Le paragraphe IV tend à modifier les articles 138, 142 et 142-1 du code de procédure pénale, respectivement relatifs au contrôle judiciaire et aux cautionnements et sûretés.

La loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a prévu la possibilité que le contrôle judiciaire soit décidé par le juge des libertés et de la détention, lorsqu'il est saisi d'une demande de placement en détention provisoire à laquelle il décide de ne pas faire droit.

Le présent paragraphe tend à opérer des coordinations omises pour mentionner le juge des libertés et de la détention au même titre que le juge d'instruction dans les articles 138, 142 et 142-1 du code de procédure pénale.

Le paragraphe V tend, comme le précédent, à modifier l'article 138 du code de procédure pénale. Cet article prévoit notamment que la personne soumise à un contrôle judiciaire peut avoir à respecter des mesures socio-éducatives destinées à favoriser son insertion sociale et à prévenir la récidive. Or, la récidive est une notion juridique répondant à des critères précis. Ainsi, elle s'apprécie dans certains délais, définis par les articles 132-8 à 132-11 du code pénal.

Le présent paragraphe, dans un souci d'exactitude, tend à remplacer, dans l'article 138 du code de procédure pénale, la notion de récidive par celle de renouvellement de l'infraction.

Le paragraphe VI tend à corriger une erreur matérielle dans l'article 148-1-1 du code de procédure pénale, inséré dans ce code par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, et relatif au référé-détention. Cet article mentionne en effet la transmission de l'ordonnance du procureur de la République alors que le législateur visait la transmission de l'ordonnance au procureur de la République.

Le paragraphe VII tend à corriger une erreur de renvoi dans l'article 156 du code de procédure pénale relatif aux demandes d'expertise. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit notamment que lorsque le juge d'instruction estime ne pas devoir faire droit à une demande d'expertise, il doit rendre une ordonnance motivée au plus tard dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande. Le texte précise que les neuvième et dixième alinéas de l'article 81 sont applicables. Il s'agissait de prévoir les mêmes formalités et les mêmes possibilités d'appel en cas de demande d'expertise qu'en cas de demande d'examens ou de toutes autres mesures utiles.

Cependant, ces dispositions sont prévues non par les neuvième et dixième alinéas de l'article 81, mais par les avant-dernier et dernier alinéas de cet article. Le présent paragraphe tend à corriger cette erreur de renvoi.

Le paragraphe VII bis , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier les articles 179, 181 et 215 du code de procédure pénale, afin que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, ainsi que les arrêts ou les ordonnances de mise en accusation devant la cour d'assises, précisent si la personne concernée bénéficie des réductions de peines prévues par le présent projet de loi en ce qui concerne les personnes apportant une collaboration à la justice.

Le paragraphe VIII tend à opérer une coordination omise dans l'article 207-1 du code de procédure pénale, qui mentionne encore la « chambre d'accusation » et non la « chambre de l'instruction ».

L'article 83 de la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a permis de remplacer les termes « chambre d'accusation » par les termes « chambre de l'instruction » dans toutes les dispositions législatives en vigueur.

En revanche, cette modification ne s'est pas appliquée automatiquement aux articles du code de procédure pénale créés par la loi sur la présomption d'innocence elle-même. Dans ces conditions, le législateur a omis une coordination que le présent paragraphe tend à opérer.

Le paragraphe IX tend à modifier le chapitre Ier du titre IV du livre Ier du code de l'organisation judiciaire relatif à la « commission d'indemnisation en matière de détention provisoire ». Ce chapitre comporte deux articles L. 141-1 et L. 141-2 qui précisent d'une part qu'il est constitué une commission juridictionnelle chargée de statuer sur les demandes d'indemnité présentées par les personnes ayant fait l'objet d'une détention provisoire, d'autre part que les règles relatives à la composition et à la compétence de cette commission sont fixées par les articles 149-1 et 149-2 du code de procédure pénale.

Or, la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes et la loi du 30 décembre 2000 tendant à faciliter l'indemnisation des condamnés reconnus innocents ont modifié les conditions d'indemnisation des détentions provisoires injustifiées, confiant la décision au premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle a été prononcée la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, avec un recours possible devant une commission nationale de réparation des détentions.

Le présent paragraphe tend à opérer des coordinations dans le code de l'organisation judiciaire pour tenir compte de ces modifications du code de procédure pénale.

Ces dispositions sont les bienvenues, même si elles auraient pu être effectuées dans le cadre de la refonte du code de l'organisation judiciaire, qui sera prochainement effectuée par ordonnances, le Parlement ayant habilité le Gouvernement à cette fin dans la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 56 sans modification .

CHAPITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES AU JUGEMENT

SECTION 1
Dispositions relatives au jugement des délits
Article 57
(art. 41, 393, 396 et 397-1 du code de procédure pénale)
Procédure de comparution immédiate

Le présent article tend à apporter plusieurs modifications à la procédure de comparution immédiate définie par les articles 393 et suivants du code de procédure pénale.

Rappelons que la procédure de comparution immédiate est une procédure de jugement rapide applicable aux majeurs et que le procureur de la République peut décider de mettre en oeuvre lors du défèrement de la personne.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002, cette procédure est applicable, en cas de flagrant délit, lorsque la peine encourue est au moins égale à six mois d'emprisonnement sans excéder dix ans d'emprisonnement, peine maximale possible en matière correctionnelle.

Hors le cas du flagrant délit, cette procédure peut également, si le maximum de l'emprisonnement prévu par la loi est au moins égal à deux ans, être utilisée par le procureur de la République lorsqu'il lui apparaît que les charges réunies sont suffisantes et que l'affaire est en état d'être jugée.

Le prévenu est retenu jusqu'à sa comparution qui doit avoir lieu le jour même. Si la réunion du tribunal est impossible le jour même et si le placement en détention provisoire du prévenu jusqu'à sa comparution devant la juridiction du jugement lui semble justifié, le procureur de la République peut saisir le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier ordonne le placement en détention provisoire. Ce magistrat statue après avoir recueilli les observations éventuelles du prévenu et de son avocat et avoir fait procéder, s'il y a lieu, à l'enquête sociale prévue par l'article 41 du code de procédure pénale. Le prévenu doit alors comparaître devant le tribunal au plus tard dans les deux jours, faute de quoi il est remis en liberté (article 396 du code de procédure pénale).

Lorsque le prévenu ne consent pas à être jugé séance tenante ou si l'affaire ne paraît pas en état d'être jugée, le tribunal, après avoir recueilli les observations des parties, renvoie l'affaire à une prochaine audience qui doit avoir lieu dans un délai compris entre deux et six semaines. Lorsque la peine d'emprisonnement est supérieure à sept ans d'emprisonnement, le prévenu peut demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience fixée dans un délai compris entre deux et quatre mois (article 397-1 du code de procédure pénale).

Lorsque l'affaire est renvoyée, le prévenu peut être maintenu en détention provisoire pendant une durée de deux mois, ce délai étant porté à quatre mois lorsque la peine d'emprisonnement encourue est supérieure à sept ans et que le prévenu a demandé à bénéficier d'un délai pour préparer sa défense.

Enfin, en cas d'appel, la personne peut être maintenue en détention provisoire jusqu'à l'examen de l'affaire, qui doit intervenir dans le délai de quatre mois.

Le présent article tend à apporter plusieurs modifications à ces dispositions.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 41 du code de procédure pénale, qui prévoit notamment qu'en cas de poursuites contre un majeur âgé de moins de vingt-et-un ans au moment de la commission de l'infraction, lorsque la peine encourue n'excède pas cinq ans d'emprisonnement, le procureur doit requérir le service pénitentiaire d'insertion et de probation, un service de la protection judiciaire de la jeunesse, ou toute personne habilitée, afin de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale de la personne .

Le présent paragraphe tend à compléter ces dispositions afin de rendre obligatoire cette enquête sociale en cas de poursuites selon la procédure de comparution immédiate ou selon la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité que le présent projet de loi tend à créer.

Une telle évolution paraît pleinement justifiée dès lors que les procédures concernées conduisent à un jugement extrêmement rapide de ces personnes. Elle implique cependant une amélioration des conditions dans lesquelles sont réalisées ces enquêtes sociales, afin qu'elles ne constituent pas une pure formalité .

Examinant le projet de loi, la commission des Lois de l'Assemblée nationale avait proposé de supprimer ce dispositif en invoquant l'inefficacité des enquêtes sociales. Elle a finalement renoncé à cette modification après que le garde des Sceaux a fait part de sa volonté d'améliorer les conditions de réalisation des enquêtes sociales pour renforcer l'effectivité des décisions de justice.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 394 du code de procédure pénale, qui permet au procureur de la République d'inviter la personne déférée à comparaître devant le tribunal dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours ni supérieur à deux mois (procédure de la convocation par procès-verbal ).

Dans un tel cas, si le procureur de la République estime nécessaire de soumettre le prévenu jusqu'à sa comparution devant le tribunal à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire, il le traduit devant le président du tribunal ou le juge délégué par lui.

Le présent paragraphe tend logiquement à attribuer au juge des libertés et de la détention la possibilité d'ordonner un contrôle judiciaire à l'égard des prévenus faisant l'objet d'une convocation par procès-verbal.

Le paragraphe III tend à modifier l'article 396 du code de procédure pénale sur trois points. Par coordination avec les dispositions modifiées de l'article 41, il tend tout d'abord à supprimer l'expression, « s'il y a lieu », appliquée à l'enquête sociale pour la remplacer par une mention précisant que ces vérifications ne sont pas nécessaires si elles ont déjà été effectuées. Le paragraphe I tend en effet à rendre l'enquête sociale systématique.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a par ailleurs souhaité modifier l'article 396 pour porter de deux à trois jours le délai à l'issue duquel le prévenu doit être jugé lorsque le tribunal ne peut pas se réunir le jour même.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer cette disposition, qui lui paraît aller à l'encontre du concept même de comparution immédiate. Le délai de deux jours ne résulte pas d'une réforme récente de la procédure pénale, mais a été arrêté dès la création de la procédure de comparution immédiate. Il n'apparaît pas justifié de le modifier aujourd'hui.

Enfin, le présent paragraphe tend à compléter l'article 396. Dans sa rédaction actuelle, cet article contraint le juge des libertés et de la détention, lorsqu'il refuse de placer un prévenu en détention provisoire dans l'attente de sa comparution devant le tribunal, à déférer de nouveau le prévenu devant le procureur de la République, afin que celui-ci puisse procéder à une convocation par procès-verbal. Dans un tel cas, le procureur, s'il souhaitait qu'un contrôle judiciaire soit ordonné, devrait demander ce placement au juge des libertés et de la détention, compte tenu des dispositions du paragraphe II du présent article.

Pour éviter ces allers-retours, le présent paragraphe tend à permettre au juge des libertés et de la détention d'ordonner un contrôle judiciaire lorsqu'il refuse le placement en détention provisoire avant de déférer de nouveau le prévenu devant le procureur de la République.

Le paragraphe IV tend à compléter l'article 397-1 du code de procédure pénale, qui permet le renvoi de l'affaire à la demande du prévenu ou lorsqu'elle ne paraît pas en état d'être jugée, pour permettre au prévenu ou à son avocat de demander au tribunal d'ordonner tout acte d'information nécessaire à la manifestation de la vérité relatif aux faits reprochés ou à la personnalité de l'intéressé. En cas de refus de faire droit à cette demande, le tribunal devrait rendre un jugement motivé.

Cette disposition, qui s'ajoute à celle du paragraphe I relative à l'enquête sociale, devrait permettre un renforcement des droits de la défense au cours de la procédure de comparution immédiate.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 ainsi modifié .

Article 57 bis
(art. 398-1 du code de procédure pénale)
Extension du champ d'application
de la procédure du juge unique

L'article 398 du code de procédure pénale prévoit que le tribunal correctionnel est composé d'un président et de deux juges. Toutefois, cet article dispose également que, pour le jugement des délits énumérés à l'article 398-1, sauf si la peine encourue, compte tenu de l'état de récidive légale du prévenu, est supérieure à cinq ans d'emprisonnement, le tribunal est composé d'un seul magistrat exerçant les pouvoirs conférés au président.

L'article 398-1 du code de procédure pénale contient une liste de délits donnant lieu à un jugement par un juge unique. Parmi ceux-ci figurent :

- les délits prévus par le code de la route ;

- les délits en matière de coordination des transports ;

- certains délits relatifs au régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

- de nombreux délits figurant dans le code pénal : certaines violences, les appels téléphoniques malveillants, les menaces, l'exhibition sexuelle, l'abandon de famille, les atteintes à l'exercice de l'autorité parentale, le vol, la filouterie, le détournement de gage ou d'objet saisi, le recel, certaines destructions, dégradations et détériorations, les menaces et actes d'intimidation contre des personnes exerçant une fonction publique, l'outrage, la rébellion, l'usage de stupéfiants et les sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux ;

- les délits prévus par le code rural en matière de chasse, de pêche et de protection de la faune et de la flore ;

- les délits prévus par le code forestier et par le code de l'urbanisme pour la protection des bois et forêts.

Depuis la loi n° 2002-1138 d'orientation et de programmation pour la justice, cette procédure est également applicable aux délits pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, à l'exception des délits de presse.

L'article 398-1 du code de procédure pénale prévoit que le tribunal est néanmoins composé de trois magistrats lorsque le prévenu est en état de détention provisoire lors de sa comparution à l'audience ou lorsqu'il est poursuivi selon la procédure de comparution immédiate.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Gérard Léonard, tend à compléter l'article 398-1, afin d'étendre la procédure du juge unique aux délits suivants :

- le racolage (article 225-10-1 du code pénal), tel qu'il a été défini par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ;

- l'installation en réunion et sans autorisation, en vue d'y installer une habitation, sur un terrain appartenant soit à une commune qui s'est conformée aux obligations lui incombant en vertu de la loi relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, soit à tout autre propriétaire (article 322-4-1 du code pénal). Ce délit résulte de la loi n° 2003-239 pour la sécurité intérieure.

Par ailleurs, le présent article tend à modifier certaines références figurant à l'article 398-1 du code de procédure pénale pour tenir compte d'autres modifications législatives. Ainsi, les articles 222-12 et 222-13 du code pénal punissent de peines aggravées les violences lorsqu'elles sont commises à l'encontre de certaines catégories de personnes ou dans certaines circonstances. L'article 398-1 prévoit que les délits prévus par les articles 222-12 et 222-13 du code pénal sont jugés par un juge unique tout en visant les 1° à 10° de ces articles. Or, la liste des circonstances aggravantes mentionnées dans les articles 222-12 et 222-13 du code pénal a été complétée depuis l'introduction de l'article 398-1 du code de procédure pénale, de sorte qu'il est nécessaire de viser désormais les 1° à 13° des articles 222-12 et 222-13.

De même, l'article 398-1 prévoit que la procédure du juge unique s'applique au délit prévu par l'article 433-3, premier alinéa, du code pénal. Jusqu'à il y a peu, l'article 433-3 comportait deux alinéas, le premier punissant la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes exerçant une fonction publique, le second sanctionnant le fait d'user de menaces, de violences ou de commettre tout autre acte d'intimidation pour obtenir d'une personne exerçant une fonction publique qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat.

La loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a modifié sensiblement l'article 433-3 du code pénal, qui comporte désormais quatre alinéas. Les deux premiers alinéas sanctionnent, comme précédemment, le fait de proférer des menaces à l'égard de personnes exerçant certaines fonctions ou missions. La liste des personnes protégées a été étendue et concerne notamment, outre les personnes dépositaires de l'autorité publique, les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, les gardiens d'immeubles et les professionnels de santé. Les conjoints, ascendants et descendants en ligne directe de certaines des personnes protégées bénéficient en outre désormais de la même protection.

Le troisième alinéa de l'article 433-3 punit de peines aggravées les menaces proférées contre les personnes protégées lorsqu'il s'agit de menaces de mort ou de menaces d'atteinte aux biens dangereuse pour les personnes. Enfin, comme précédemment, le quatrième alinéa sanctionne de peines très lourdes les menaces commises en vue de contraindre une personne exerçant une fonction publique d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction ou de sa mission.

Par coordination avec les modifications apportées à l'article 433-3 du code pénal, le présent article vise à mentionner les deux premiers alinéas de cet article et non plus le premier alinéa dans la liste des délits donnant lieu à un jugement par un juge unique.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 bis sans modification.

Article 57 ter
(art. 398-1 du code de procédure pénale)
Extension du champ d'application
de la procédure du juge unique

Comme le précédent, le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Gérard Léonard, a pour objet de compléter l'article 398-1 du code de procédure pénale pour étendre le champ d'application de la procédure du juge unique.

Cette procédure serait désormais applicable au délit prévu par l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation. Rappelons que cet article, créé par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, punit de deux mois d'emprisonnement et de 3.750 euros d'amende les voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne ou l'entrave apportée de manière délibérée à l'accès et à la libre circulation des personnes ou au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté, lorsqu'elles sont commises en réunion par plusieurs auteurs ou complices, dans les entrées, cages d'escaliers ou autres parties communes d'immeubles collectifs d'habitation. Les mêmes peines sont prévues lorsque ces faits sont commis sur les toits des immeubles collectifs d'habitation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 ter sans modification .

Article 57 quater
(art. 399 du code de procédure pénale)
Fixation du nombre et du jour des audiences correctionnelles

L'article 399 du code de procédure pénale dispose que le nombre et le jour des audiences correctionnelles sont fixés à la fin de chaque année judiciaire pour l'année judiciaire suivante par une ordonnance du président du tribunal de grande instance prise après avis de l'assemblée générale.

En cas de nécessité, cette ordonnance peut être modifiée dans les mêmes conditions en cours d'année.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann et Alain Marsaud, tend à modifier l'article 399 pour prévoir que le nombre et le jour des audiences correctionnelles sont fixés par une décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République prise après avis de l'assemblée générale du tribunal.

La préoccupation exprimée par cet amendement est légitime. Il est normal que le procureur de la République puisse être associé à la préparation de la décision relative au nombre et au jour des audiences correctionnelles.

La loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes avait, à l'inverse, inséré un nouvel article L. 311-15-1 dans le code de l'organisation judiciaire pour prévoir que la composition prévisionnelle des audiences pénales était déterminée conjointement par le président du tribunal et le procureur.

Jusqu'alors, en l'absence de texte, la composition prévisionnelle relevait essentiellement du procureur de la République.

Il est tout à fait essentiel que des décisions de cette nature soient prises après concertation entre les chefs de juridiction.

Pour autant, le texte proposé, comme celui adopté en juin 2000, soulève des difficultés dès lors qu'aucune solution n'est prévue en cas de désaccord. Un conflit entre le président du tribunal et le procureur pourrait donc conduire à une situation de blocage, alors que le présent article est conçu au contraire pour encourager le dialogue entre les chefs de juridiction.

En cas de conflit, votre commission estime normal que la décision relative au nombre et au jour des audiences correctionnelles puisse être fixée par le président du tribunal, qui est le mieux à même de veiller à l'équilibre entre les audiences civiles et les audiences pénales. Elle estime au contraire que la composition prévisionnelle des audiences correctionnelles doit alors être fixée par le procureur.

Votre rapporteur a été particulièrement sensible aux propos de Mme Danièle Entiope, présidente du tribunal de grande instance de Marseille, pour qui l'absence de traitement civil de certains conflits, notamment familiaux, conduit à alimenter ensuite le rôle des juridictions pénales, et singulièrement des cours d'assises .

En conséquence, par un amendement , votre commission vous propose de modifier l'article 399 du code de procédure pénale, pour prévoir que :

- le nombre et le jour des audiences correctionnelles, ainsi que la composition prévisionnelle de ces audiences sont fixés par décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République ;

- en cas d'impossibilité de parvenir à un accord, le nombre et le jour des audiences sont fixés par le président du tribunal, et la composition prévisionnelle est fixée par le procureur ;

- ces décisions issues d'un désaccord ne peuvent être prises qu'après avis du premier président de la cour d'appel et du procureur général . En cas de désaccord grave entre deux chefs de juridiction, il paraît en effet logique que les chefs de cour puissent intervenir, afin de contribuer à la solution du litige. Le risque de devoir solliciter l'avis des chefs de cour pourrait encourager les présidents et procureurs à parvenir à un accord.

Corrélativement, votre commission vous propose d'abroger l'article L. 311-15-1 du code de l'organisation judiciaire, qui devient inutile.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 57 quater ainsi modifié .

Article 58
(art. 410, 410-1, 411, 412, art. 412-1 et 412-2 nouveaux
du code de procédure pénale)
Jugement d'un prévenu en son absence

Le présent article tend à modifier profondément les règles applicables au jugement d'un prévenu en son absence , notamment pour tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.

1. Le droit actuel

Actuellement, tout prévenu est informé par voie de citation de la date de l'audience du tribunal correctionnel examinant son affaire.

La citation peut être faite à personne, à domicile lorsque le prévenu est absent de celui-ci mais qu'une personne y réside, à mairie lorsqu'il n'y a personne au domicile du prévenu ou enfin à parquet lorsque le prévenu est sans résidence ou domicile connu.

Le prévenu régulièrement cité à personne doit comparaître, à moins qu'il ne fournisse une excuse reconnue valable par la juridiction devant laquelle il est appelé. Il en est de même lorsque la citation a été délivrée à domicile ou à mairie, mais qu'il est établi que le prévenu a eu connaissance de la citation le concernant.

Si ces conditions sont réunies, les prévenus non comparants et non excusés sont jugés contradictoirement (article 410 du code de procédure pénale). Le jugement devient donc définitif à l'expiration du délai d'appel, qui est de dix jours à compter de la signification du jugement, quel que soit ce mode de signification, lorsque le prévenu n'a pas été informé du jour où le jugement serait prononcé.

Les prévenus cités pour une infraction passible d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement inférieure à deux années peuvent, par lettre, demander à être jugés en leur absence. Il en est de même en cas de citation directe délivrée par la partie civile quelle que soit la durée de la peine encourue.

L'avocat du prévenu est alors entendu et le prévenu est jugé contradictoirement (article 411 du code de procédure pénale).

Enfin, lorsque la citation n'a pas été délivrée à la personne du prévenu et qu'il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance de cette citation, la décision, en cas de non-comparution du prévenu, est rendue par défaut (article 412 du code de procédure pénale). Dans ce cas, le prévenu dispose d'un délai de dix jours à compter de la signification du tribunal correctionnel pour faire opposition à sa condamnation. Lorsque la signification n'a pas été faite à personne et qu'il n'est pas établi que le prévenu en ait eu connaissance, l'opposition reste recevable jusqu'à l'expiration des délais de prescription de la peine. L'opposition formée contre une décision rendue par défaut rend celle-ci nulle et non avenue sous toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le mandat d'arrêt qui a pu être décerné et la provision allouée à la victime . Elle a pour effet de saisir à nouveau la juridiction ayant statué la première fois.

2. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme

La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit notamment dans son article 6-3 que tout accusé a droit notamment à se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent.

Sur le fondement de cette disposition, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France, en 1993, dans un arrêt Poitrimol 145 ( * ) . Dans cette affaire, une cour d'appel avait refusé de faire droit à une demande de jugement du prévenu en son absence, au motif que celui-ci faisait l'objet d'un mandat d'arrêt et était en fuite. Elle avait en conséquence refusé que le prévenu soit représenté par son avocat.

La Cour a condamné la France en estimant que la suppression du droit à l'assistance d'un défenseur était une sanction disproportionnée au refus du prévenu de comparaître .

La Cour a confirmé cette jurisprudence dans un arrêt Van Pelt 146 ( * ) plus récent. Dans cette affaire, une juridiction avait considéré comme non valables les motifs médicaux de non comparution du prévenu. Elle l'avait donc jugé contradictoirement sans entendre ses avocats sur le fond de l'affaire.

Dans un arrêt Von Geyseghem 147 ( * ) , la Cour européenne a ainsi résumé sa position : « Le droit de tout accusé à être effectivement défendu par un avocat figure parmi les éléments fondamentaux du procès équitable. Un accusé n'en perd pas le bénéfice du seul fait de son absence aux débats. Même si le législateur doit pouvoir décourager les abstentions injustifiées, il ne peut les sanctionner en dérogeant au droit à l'assistance d'un défenseur ».

La Cour de cassation a récemment modifié sa jurisprudence pour tenir compte des exigences posées par la Cour européenne des droits de l'homme. Elle a mis fin à la distinction opérée par le législateur entre les prévenus passibles d'une peine d'emprisonnement inférieure à deux ans et ceux passibles d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à deux ans, pour considérer que « le droit au procès équitable et le droit de tout accusé à l'assistance d'un défenseur s'opposent à ce que la juridiction juge un prévenu non comparant et non excusé sans entendre l'avocat présent à l'audience pour assurer sa défense 148 ( * ) ».

Le présent article tend en conséquence à modifier les dispositions du code de procédure pénale relatives au jugement des prévenus en leur absence.

3. Le dispositif proposé

Le paragraphe I tend à modifier l'article 410 du code de procédure pénale, qui prévoit que le prévenu cité à personne ou celui qui, sans avoir été cité à personne, a eu connaissance de la citation, doit comparaître à moins qu'il ne fournisse une excuse reconnue valable par la juridiction. Si ces conditions sont remplies, le prévenu non comparant et non excusé est jugé contradictoirement.

Le présent paragraphe tend tout d'abord à remplacer l'expression « jugé contradictoirement » par les termes « jugé par jugement contradictoire à signifier », qui sont ceux employés par les juridictions. Cette modification doit permettre de mieux distinguer le jugement rendu en présence du prévenu et le jugement rendu en son absence.

Le texte précise également que la personne n'est pas jugée par jugement contradictoire à signifier lorsqu'il est fait application des dispositions de l'article 411, qui, dans leur rédaction issues du présent projet de loi, tendent à permettre désormais à tout prévenu de demander à être jugé en son absence, son avocat entendu. Dans un tel cas, le jugement serait contradictoire, mais n'aurait pas à être signifié.

Enfin, le présent paragraphe tend à compléter l'article 410 du code de procédure pénale pour prévoir que si un avocat se présente pour assurer la défense du prévenu, il doit être entendu, même s'il n'a pas été mandaté pour le faire . Ce dispositif doit permettre de satisfaire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui n'exige pas de formalités particulières pour la désignation de l'avocat.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 410-1 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que lorsque le prévenu cité à personne ne comparaît pas et que la peine qu'il encourt est égale ou supérieure à deux années d'emprisonnement, le tribunal peut ordonner le renvoi de l'affaire et, par décision spéciale et motivée, décerner mandat d'amener.

Le prévenu arrêté en vertu du mandat d'amener est conduit dans les vingt-quatre heures devant le procureur de la République, qui procède à son interrogatoire d'identité. Lorsqu'il est arrêté à plus de 200 km du siège de la juridiction qui a délivré le mandat d'amener, il est conduit soit devant le procureur de la juridiction qui a délivré le mandat, soit devant celui du lieu de l'arrestation. Dans ce cas, il doit être transféré au plus tard dans les cinq jours.

Le prévenu doit comparaître devant la juridiction qui a décerné mandat d'amener dès que possible et au plus tard avant l'expiration du troisième jour à compter de son arrivée à la maison d'arrêt du siège de cette juridiction, faute de quoi il est mis en liberté d'office. La juridiction apprécie s'il y a lieu de le soumettre, jusqu'à l'audience de jugement, à une mesure de contrôle judiciaire ou de détention provisoire.

Le présent paragraphe a tout d'abord pour objet de permettre à la juridiction de délivrer non seulement mandat d'amener, mais également mandat d'arrêt. Le mandat d'arrêt est délivré à l'encontre des personnes en fuite.

Surtout, le présent paragraphe tend à modifier les règles applicables en cas d'arrestation de la personne. Le texte proposé prévoit que si le prévenu est arrêté à la suite du mandat d'amener ou d'arrêt, il est fait application des dispositions de l'article 135-2, dont l'insertion dans le code de procédure pénale est prévue par l'article 40 du présent projet de loi. Dans ces conditions, le prévenu pourrait être retenu pendant vingt-quatre heures par les services de police et de gendarmerie et aurait la possibilité, pendant ce délai, de faire prévenir une personne avec laquelle il vit habituellement et de se faire examiner par un médecin. Avant l'expiration du délai de vingt-quatre heures, il devrait être conduit devant le procureur de la République du tribunal du siège de la juridiction ayant décerné le mandat, qui le présenterait devant le juge des libertés et de la détention. Ce juge pourrait ordonner le placement du prévenu sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire, sa décision étant susceptible d'appel devant la chambre des appels correctionnels.

Si la personne était arrêtée à plus de deux cents kilomètres du siège de la juridiction de jugement et qu'il n'était pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant le procureur du tribunal dans le ressort duquel siège la juridiction qui a délivré le mandat, elle serait présentée au procureur du lieu de l'arrestation, qui mettrait le mandat à exécution en faisant conduire la personne à la maison d'arrêt après avoir avisé le procureur de la République de la juridiction de jugement ; ce dernier ordonnerait le transfèrement de la personne, qui devrait comparaître dans les quatre jours devant lui pour être présentée au juge des libertés et de la détention.

Le paragraphe III tend à modifier en profondeur l'article 411 du code de procédure pénale, relatif au droit d'une personne de demander à être jugée en son absence . Actuellement, cet article permet de formuler une telle demande, soit lorsque le prévenu encourt une peine d'amende ou une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure à deux années, soit en cas de citation directe délivrée par la partie civile quelle que soit la durée de la peine encourue. Dans les deux cas, l'avocat du prévenu est entendu. Le tribunal, s'il estime nécessaire la comparution du prévenu, peut procéder à sa réassignation pour une audience dont il fixe la date. Le prévenu qui ne répond pas est jugé contradictoirement.

Le présent paragraphe modifie substantiellement ces règles pour tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, désormais entérinée par la Cour de cassation.

Le texte proposé pour l'article 411 permet au prévenu de demander à être jugé en son absence en étant représenté par son avocat ou par un avocat commis d'office, quelle que soit la peine encourue , et quelles que soient les conditions dans lesquelles il a été cité .

L'avocat du prévenu pourrait intervenir dans les débats et serait entendu dans sa plaidoirie. Le prévenu serait alors jugé contradictoirement, sans qu'il soit besoin que le jugement soit signifié.

Comme actuellement, le tribunal, s'il estimait nécessaire la comparution du prévenu, pourrait renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour que le procureur procède à une nouvelle citation. Dans cette hypothèse, si le prévenu ne comparaissait pas, il serait jugé contradictoirement si son avocat était présent, par jugement contradictoire à signifier si son avocat était absent. Le tribunal pourrait également renvoyer de nouveau l'affaire en décernant mandat d'arrêt ou mandat d'amener.

Le texte proposé prévoit in fine que lorsque l'avocat du prévenu qui a demandé à être jugé en son absence n'est pas présent au cours de l'audience, le prévenu est jugé par jugement contradictoire à signifier.

Ainsi, toute personne pourra être jugée en son absence si elle le demandait et être défendue par son avocat, quelle que soit la peine encourue . Le tribunal pourrait bien renvoyer l'affaire pour ordonner une nouvelle citation ou décerner mandat d'arrêt, mais le refus de la personne de se présenter ne pourrait plus être sanctionné par le refus d'entendre les conclusions de l'avocat.

Une telle évolution satisfait aux exigences posées par la Cour européenne des droits de l'homme, mais ne peut qu'affaiblir la signification du procès et provoquer l'amertume de victimes, qui attendent parfois beaucoup du débat public. Il reste que le tribunal pourra tenir compte, dans sa décision, du comportement d'un prévenu, qui refuserait à plusieurs reprises de comparaître, tout en mandatant un avocat pour le défendre.

Le paragraphe IV tend à modifier l'article 412, relatif au jugement par défaut. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que si la citation n'a pas été délivrée à la personne du prévenu, et s'il n'est pas établi qu'il ait eu connaissance de cette citation, la décision, en cas de non-comparution du prévenu, est rendue par défaut.

Le présent article tend à réécrire l'article 412 pour prévoir que lorsqu'il n'est pas établi que le prévenu ait eu connaissance de la citation, la décision est rendue par défaut sauf s'il est fait application de l'article 411.

Ainsi, un prévenu, dont il ne serait pas établi qu'il ait eu connaissance de la citation, pourrait demander à être jugé en son absence, son avocat entendu. La personne serait alors jugée contradictoirement.

Dans tous les cas, si un avocat se présentait pour assurer la défense du prévenu, il devrait être entendu. Le texte prévoit que le jugement est alors contradictoire à signifier sauf si le prévenu a lui-même demandé à être jugé en son absence en étant représenté par son avocat ou par un avocat commis d'office, qui a effectivement participé à l'audience. Enfin, le tribunal pourrait renvoyer l'affaire à une audience ultérieure en décernant mandat d'amener ou mandat d'arrêt.

Le paragraphe V tend à insérer dans le code de procédure pénale deux nouveaux articles 412-1 et 412-2.

- Le texte proposé pour l' article 412-1 prévoit que lorsque la citation n'a pas été délivrée à personne et qu'il n'est pas établi que le prévenu ait eu connaissance de la citation, le prévenu non comparant et non représenté ni défendu par un avocat ne peut être condamné à une peine d'emprisonnement ferme ou à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis partiel.

Si une peine d'emprisonnement était susceptible d'être prononcée, le président du tribunal devrait renvoyer l'affaire, le ministère public procédant à une nouvelle citation. Le texte prévoit que le président peut également, lorsque le prévenu est en fuite ou est susceptible de ne pas se présenter volontairement à la nouvelle audience, rendre un jugement de recherche et décerner un mandat d'arrêt après avoir procédé à l'audition des témoins et des experts et entendu la partie civile et son avocat. Dans ce cas, les délais de la prescription de l'action publique deviendraient ceux -plus longs- de la prescription de la peine. Si le prévenu était arrêté à la suite du mandat d'arrêt, il serait fait application des dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale créé par l'article 40 du projet de loi.

Enfin, le texte proposé prévoit qu'après avoir rendu son jugement de recherche, la juridiction peut, à la demande de la partie civile, ordonner toutes mesures provisoires relatives aux dommages et intérêts résultant des faits, notamment le versement d'une indemnité provisoire. La décision serait rendue par défaut.

- Le texte proposé pour l' article 412-2 tend à prévoir une exception aux règles qui viennent d'être énoncées en permettant au procureur de la République, pour les délits punis d'une peine d'emprisonnement, de demander au bâtonnier la désignation d'un avocat pour assurer la défense des intérêts d'une personne en fuite renvoyée devant le tribunal correctionnel. La demande devrait intervenir au moins un mois avant la date de l'audience.

L'avocat serait entendu dans sa plaidoirie et le tribunal pourrait alors rendre un jugement par défaut en prononçant éventuellement une peine d'emprisonnement.

Autant les dispositions qui prévoient que le prévenu absent doit, dans tous les cas, pouvoir être représenté par un avocat qui se présente à l'audience pour assurer sa défense méritent d'être approuvées compte tenu de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, même si elles soulèvent des questions de principe, autant celles qui viennent d'être présentées peuvent susciter des interrogations.

La Cour européenne des droits de l'homme n'a jamais interdit qu'une peine d'emprisonnement soit prononcée à l'encontre d'un prévenu non comparant et non défendu . Elle a seulement exigé qu'en toutes circonstances, l'avocat du prévenu qui se présente pour assurer sa défense soit entendu. Dans son arrêt Poitrimol, la Cour, si elle a condamné la France, a aussi noté que : « La comparution d'un prévenu revêt une importance capitale en raison tant du droit de celui-ci à être entendu que de la nécessité de contrôler l'exactitude de ses affirmations et de les confronter avec les dires de la victime, dont il y a lieu de protéger les intérêts, ainsi que des témoins. Dès lors, le législateur doit pouvoir décourager les abstentions injustifiées ».

Par ailleurs, il est difficile de percevoir l'avantage que représente le dispositif proposé pour les nouveaux articles 412-1 et 412-2. Ce dispositif est beaucoup plus complexe que celui du jugement par défaut, qui ne disparaît pas pour autant totalement (il resterait applicable lorsque la juridiction ne prononce pas de peine d'emprisonnement ou lorsqu'il serait fait application de la procédure permettant au procureur de demander au bâtonnier de désigner un avocat). Pour autant, le nouveau système ne garantit pas mieux que le précédent les droits du prévenu, puisqu'il serait interdit de prononcer une peine d'emprisonnement, mais que la juridiction pourrait néanmoins ordonner des mesures provisoires relatives aux dommages et intérêts et que les délais de la prescription de l'action publique deviendraient ceux de la prescription de la peine.

Enfin, la procédure consistant à permettre au procureur de demander au bâtonnier la désignation d'un avocat pour assurer la défense des intérêts d'une personne en fuite peut susciter quelques interrogations sur la conception du rôle de l'avocat qu'elle sous-tend. Quel pourrait être le rôle d'un avocat qui ignorerait tout de son client, ne l'aurait jamais rencontré, ne saurait rien de ses choix de défense ?

Il semble que les dispositions proposées pour les articles 412-1 et 412-2 du code de procédure pénale soient destinées à faciliter l'extradition en France des personnes recherchées lorsqu'elles sont découvertes à l'étranger. Notre procédure de condamnation par défaut avec possibilité d'opposition pour le condamné serait mal comprise par les autorités des autres pays.

Cette difficulté ne doit pas être négligée. Néanmoins, elle devrait être aisément résolue au sein de l'Union européenne grâce aux progrès de la coopération judiciaire, à l'assistance d'Eurojust, de magistrats de liaison et d'un réseau judiciaire européen. En tout état de cause, la solution proposée paraît présenter plus d'avantages que d'inconvénients.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer le présent paragraphe et de maintenir en conséquence la possibilité de prononcer des peines d'emprisonnement dans un jugement par défaut lorsqu'aucun avocat ne se présente pour assurer la défense du prévenu.

Les paragraphes VI, VII, VIII et IX tendent à procéder à des coordinations.

Le paragraphe VI tend à modifier l'article 416 du code de procédure pénale, relatif à l'audition du prévenu qui ne peut comparaître en raison de son état de santé. Cet article autorise un magistrat, assisté d'un greffier, à entendre le prévenu, éventuellement assisté de son avocat, à son domicile ou à la maison d'arrêt dans laquelle il se trouve détenu. Le débat est alors repris après une nouvelle citation du prévenu et celui-ci peut demander, par lettre adressée au président du tribunal, à être jugé en son absence, conformément aux deux premiers alinéas de l'article 412. Le texte précise que les dispositions de l'article 411 s'appliquent, « quel que soit le taux de la peine encourue . »

Par coordination avec la nouvelle rédaction de l'article 411 proposée par le paragraphe III, qui tend à supprimer la référence aux peines d'emprisonnement inférieures à deux ans, le paragraphe VI tend à faire disparaître, dans l'article 416, le renvoi au quantum de la peine, devenu inutile.

Le paragraphe VII tend à modifier le dernier alinéa de l'article 465 du code de procédure pénale, qui précise les conditions dans lesquelles l'affaire vient devant le tribunal à la suite d'une opposition formée par une personne arrêtée sur mandat d'arrêt.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 465 prévoit que, dans un tel cas, l'affaire doit venir devant le tribunal à la première audience ou au plus tard dans la huitaine du jour de l'opposition, faute de quoi le prévenu est remis en liberté ; le tribunal doit statuer par décision motivée sur le maintien ou la mainlevée du mandat, après avoir entendu le ministère public ; le prévenu peut en tout état de cause former une demande de mise en liberté.

Le présent paragraphe tend à remplacer ces dispositions par un renvoi à l'article 135-2 du code de procédure pénale créé par l'article 40 du présent projet de loi. La personne arrêtée en application du mandat d'arrêt devrait être présentée dans les vingt-quatre heures devant le procureur de la République, qui la traduirait devant le juge des libertés et de la détention. Ce dernier pourrait la placer en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement.

Le paragraphe VIII tend à modifier l'article 498 relatif aux délais d'appel. Il s'agit de prévoir que le délai d'appel de dix jours ne commencera à courir qu'à compter de la signification du jugement :

- pour le prévenu qui a été jugé en son absence, mais après audition d'un avocat qui s'est présenté pour assurer sa défense, sans cependant être titulaire d'un mandat de représentation ;

- pour le prévenu qui aurait demandé à être jugé en son absence lorsque son avocat n'était pas présent.

Enfin, le paragraphe VIII précise que le délai d'appel du jugement contradictoire à signifier, lorsqu'il est fait application de l'article 410, doit s'apprécier sous réserve d'un nouvel article 498-1, que le paragraphe IX du présent article tend à créer.

Le paragraphe X tend à opérer les mêmes modifications dans l'article 568 du code de procédure pénale, relatif aux pourvois en cassation, qui prévoit que les parties ont cinq jours francs après celui où la décision attaquée a été prononcée pour se pourvoir en cassation, tout en prévoyant que le délai ne court qu'à compter de la signification dans certaines situations.

Le paragraphe IX tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 498-1 pour prévoir une règle spécifique en matière d'appel lorsqu'une personne, après avoir eu connaissance d'une citation, a été jugée et condamnée en son absence.

Actuellement, un prévenu cité à personne pour lequel il est établi qu'il a eu connaissance de la citation le concernant dispose d'un délai de dix jours à compter de la signification du jugement, quel qu'en soit le mode, pour faire appel de celui-ci, même s'il n'est pas établi qu'il a eu connaissance de cette signification .

En revanche, lorsque la condamnation est rendue par défaut et qu'il n'est pas établi que le prévenu ait eu connaissance de la signification du jugement, le délai d'opposition est celui de la prescription de la peine.

Le texte proposé pour l'article 498-1 prévoit que, pour un jugement de condamnation à une peine d'emprisonnement ferme ou à une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis partiel, rendu dans les conditions prévues à l'article 410, modifié par le présent article, et qui n'a pas été signifié à personne, le délai d'appel ne court à compter de la signification du jugement faite à domicile, à mairie ou à parquet qu'à condition que le prévenu ait eu connaissance de la signification .

Le second alinéa du texte proposé prévoit en effet que lorsqu'il ne résulte pas de l'avis constatant la remise de la lettre recommandée adressée au prévenu lors de la signification à domicile ou à mairie (articles 557 et 558 du code de procédure pénale), soit d'un acte d'exécution quelconque ou de l'avis donné au prévenu à la suite d'un ordre de recherche du parquet (article 560), que le prévenu a eu connaissance de la signification du jugement, l'appel reste recevable, tant en ce qui concerne les intérêts civils que la condamnation pénale, jusqu'à l'expiration des délais de prescription de la peine. Le délai d'appel de dix jours court alors à compter de la date à laquelle le prévenu a eu connaissance de la condamnation.

Votre commission vous soumet deux amendements tendant à prendre en compte non seulement la lettre recommandée adressée au prévenu, mais également le récépissé qui peut être renvoyé en cas d'envoi d'une lettre simple. Depuis 1995, la signification à domicile ou à mairie peut être doublée d'une lettre simple dans laquelle figure un récépissé que le destinataire doit renvoyer à l'huissier.

La situation des personnes non comparantes jugées par jugement contradictoire à signifier est ainsi alignée sur celle des personnes condamnées par défaut.

Après le paragraphe X, votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un paragraphe additionnel, afin de prévoir que les dispositions du nouvel article 498-1 relatif à la signification des jugements, qui diffère le point de départ du délai d'appel à partir du moment où le prévenu a effectivement connaissance de la condamnation, sont également applicables pour les arrêts rendus par la cour d'appel, s'agissant du point de départ du délai de pourvoi en cassation.

Enfin, le paragraphe XI , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier l'article 891, relatif au jugement des délits à Mayotte, pour y apporter une coordination avec les dispositions du présent article.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 58 ainsi modifié .

Article 59
(art. 464 de code de procédure pénale)
Jugement sur les intérêts civils

La loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a complété l'article 464 du code de procédure pénale relatif au jugement sur les intérêts civils, afin de permettre au tribunal correctionnel, après avoir statué sur l'action publique, de renvoyer l'affaire à une date ultérieure pour statuer sur l'action civile, même s'il n'ordonne pas de mesure d'instruction, afin de permettre à la partie civile d'apporter les justificatifs de ses demandes. Le renvoi est de droit lorsqu'il est demandé par les parties civiles. Le tribunal doit alors fixer la date de l'audience à laquelle il sera statué sur l'action civile. La présence du ministère public à cette audience n'est pas obligatoire.

Le présent article tend à compléter ces dispositions pour prévoir qu'à cette audience, le tribunal est composé du seul président siégeant à juge unique .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 59 sans modification.

Article 60
(art. 495 du code de procédure pénale)
Extension du champ d'application de la procédure simplifiée

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a étendu la procédure de l'ordonnance pénale, jusqu'alors réservée aux contraventions, aux délits prévus par le code de la route . Cette procédure simplifiée n'est pas applicable si le prévenu est mineur, si la victime a formulé une demande de dommages et intérêts ou a fait citer directement le prévenu, enfin si le délit a été commis en même temps qu'une contravention ou un délit d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne.

Le ministère public ne peut recourir à cette procédure que lorsqu'il résulte de l'enquête que les faits reprochés au prévenu sont établis et que les renseignements concernant la personnalité de celui-ci sont suffisants.

Lorsque les conditions sont réunies, le ministère public communique au président du tribunal le dossier de la poursuite et ses réquisitions. Le président statue sans débat préalable par une ordonnance pénale portant relaxe ou condamnation à une amende, ainsi que, le cas échéant, à une ou plusieurs des peines complémentaires encourues. Le prévenu dispose d'un délai de quarante-cinq jours à compter de la notification pour former opposition, afin que l'affaire fasse l'objet d'un débat contradictoire et public.

Interrogé sur la conformité à la Constitution de ce dispositif, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 29 août 2002 149 ( * ) , a déclaré qu'il n'était pas contraire au principe d'égalité devant la justice.

Le présent article, dans sa rédaction initiale, tendait à étendre le champ de la procédure simplifiée, applicable aux délits prévus par le code de la route, aux contraventions connexes prévues par le même code, ainsi qu'aux délits en matière de réglementation relative aux transports terrestres .

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a proposé d'étendre le dispositif à l'ensemble des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement .

Votre commission est réservée face à une extension aussi massive du champ d'application de cette procédure.

D'une part, l'ordonnance pénale a été conçue pour traiter des infractions extrêmement simples dans leurs éléments constitutifs. Son application à certains délits n'a été décidée qu'il y a quelques mois et aucun bilan de l'application de cette évolution n'est encore disponible.

D'autre part et surtout, s'il est utile que le législateur fournisse aux magistrats une « gamme » de procédures permettant d'améliorer l'efficacité du fonctionnement de la justice, il convient également qu'il détermine précisément l'objet de ces procédures. Si l'ensemble des procédures devient applicable à l'ensemble des délits, il existe un risque d'application hétérogène de la loi selon les juridictions et les situations.

Votre commission estime préférable d'attendre qu'un bilan de l'application de la procédure simplifiée aux délits prévus par le code de la route soit disponible avant d'envisager une modification substantielle du champ d'application de la procédure de l'ordonnance pénale. Cette procédure, rappelons-le, exclut toute présentation de la personne poursuivie devant un magistrat du siège ou du parquet avant que la décision soit prise.

Par un amendement , votre commission vous propose de limiter l'extension de la procédure d'ordonnance pénale aux contraventions connexes prévues par le code de la route et aux délits en matière de réglementation relative aux transports terrestres.

Le paragraphe II tend à compléter l'article 495-3 du code de procédure pénale qui prévoit que l'ordonnance pénale est portée à la connaissance du prévenu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, pour prévoir qu'elle peut également être portée à la connaissance du prévenu par le procureur de la République, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée. Comme l'indique l'étude d'impact du projet de loi, « la notification de la décision par un délégué du procureur -et non uniquement par un huissier comme actuellement- peut en effet permettre à ce dernier de convaincre la personne qu'elle n'a pas intérêt à faire opposition devant le tribunal correctionnel ».

Le paragraphe III , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à insérer dans la section du code de procédure pénale consacrée à la procédure simplifiée un article 495-6-1 pour prévoir que cette procédure n'est applicable ni aux mineurs, ni en matière de délits de presse, de délits d'homicides involontaires, de délits politiques ou de délits dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale.

Votre commission ayant décidé de ne pas étendre la procédure simplifiée à l'ensemble des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans, vous propose par un amendement la suppression de ce paragraphe, qui devient sans objet. Les mineurs sont en effet déjà exclus de l'application de cette procédure par l'article 495 du code de procédure pénale.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 60 ainsi modifié.

Article 60 bis
(art. 495-6 du code de procédure pénale)
Citation devant le tribunal d'une personne jugée
par ordonnance pénale

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 495-6 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que le jugement d'une personne par ordonnance pénale ne fait pas échec aux droits de la partie lésée de citer l'auteur des faits devant le tribunal correctionnel. Dans ce cas, le tribunal statue uniquement sur les intérêts civils si l'ordonnance pénale a acquis la force de chose jugée.

Le présent article tend à prévoir qu'à l'audience sur les intérêts civils, le tribunal est composé du seul président siégeant à juge unique. Il s'agit en pratique d'une coordination avec les dispositions de l'article 59 du présent projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 60 bis sans modification .

Article 61
(art. 495-7 à 495-16 et 520-1 nouveaux du code de procédure pénale)
Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

En 1998, présentant en tant que rapporteur le projet de loi renforçant l'efficacité de la procédure pénale, qui a donné naissance à la procédure de composition pénale, notre excellent collègue M. Pierre Fauchon écrivait : « (...) cette nouvelle forme d'alternative aux poursuites constitue un premier pas vers la mise en oeuvre d'une forme de « plaider coupable ». Votre rapporteur considère que le « plaider coupable » constitue une piste qui ne doit pas être négligée dans la recherche d'une solution à l'engorgement de la justice pénale. Il y voit en outre le germe d'une conception nouvelle, plus humaniste de cette justice .

« Certes, le « plea bargaining », tel qu'il est pratiqué aux Etats-Unis, fait l'objet de certains excès et donne parfois l'impression d'être un véritable marchandage qui ne grandit pas la justice. Faut-il pour autant se priver d'un système dans lequel l'auteur de faits répréhensibles reconnaîtrait sa faute et ferait l'objet d'une sanction immédiate moins grave que celle qu'il encourait en l'absence d'aveu ? Est-il vraiment choquant qu'une personne poursuivie commence à faire amende honorable avant d'être condamnée en reconnaissant les faits qu'elle a commis et en demandant à les réparer, facilitant ainsi l'action de la justice ? Ne s'agit-il pas d'une voie plus conforme à la dignité humaine et, de ce fait, plus éducative et donc plus efficace ? » 150 ( * ) .

L'instauration d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité constitue l'une des novations les plus importantes introduites dans notre droit par le présent projet de loi.

De nombreux pays ont prévu un cadre procédural spécifique pour le traitement des affaires dans lesquelles les faits sont reconnus par la personne poursuivie :

- en Angleterre et au Pays de Galles, au Canada et aux Etats-Unis, le plaider coupable, bien que peu codifié, constitue un élément fondamental de la procédure pénale ;

- dans plusieurs pays d'Europe occidentale, des dispositifs inspirés du plaider coupable ont été mis en oeuvre.

Ces différents systèmes sont présentés en annexe au présent rapport dans une étude de législation comparée élaborée par le service des Etudes juridiques du Sénat.

LE « PLEA BARGAINING » AUX ETATS-UNIS

Aux Etats-Unis, la procédure de plaider coupable est utilisée dans 90 à 95% des affaires. Découragée jusqu'au dix-neuvième siècle, la pratique de la négociation entre le parquet et la défense a commencé à se développer dans les années 1830. Elle est aujourd'hui utilisée au niveau fédéral et dans chacun des Etats fédérés.

L'initiative du plaider coupable peut être prise tant par le procureur que par l'accusé ou son avocat. Le plaider coupable peut intervenir à tout moment de la procédure, y compris pendant la délibération du jury sur la culpabilité.

En acceptant de plaider coupable, un accusé renonce à plusieurs droits reconnus par la Constitution :

- le droit de ne pas être obligé de témoigner contre soi-même ;

- le droit d'être mis en présence des témoins à charge et de les soumettre à un contre-interrogatoire ;

- le droit que sa culpabilité soit établie par un jury populaire ;

- le droit de faire appel.

En échange de la reconnaissance de culpabilité, l'accusé peut espérer obtenir que le procureur renonce à certains chefs d'inculpation, réduisant ainsi la peine encourue. Par ailleurs, dans certaines circonstances, le procureur peut formuler des recommandations de clémence au juge.

L'accord passé entre le procureur et l'accusé doit être présenté au juge en audience publique. Celui-ci vérifie en particulier que la reconnaissance de culpabilité a été faite librement par les accusés. En règle générale, l'accord ne porte pas sur une peine précise, mais prévoit seulement une réduction des chefs d'inculpation. Le juge demeure donc libre de fixer la peine . Toutefois, depuis 1984, la liberté du juge est contrainte par des « sentencing guidelines » qui limitent sa marge de manoeuvre dans le choix de la peine.

La peine n'est pas fixée lors de l'audience de reconnaissance de culpabilité, mais lors d'une audience ultérieure, ce qui permet de procéder aux enquêtes sociales nécessaires avant le prononcé de la peine.

*

Le paragraphe I du présent article tend à insérer une nouvelle section relative à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité dans le chapitre du code de procédure pénale consacré au tribunal correctionnel. Cette nouvelle section comporterait dix articles numérotés 495-7 à 495-16. Votre commission vous soumet un amendement tendant à corriger une erreur matérielle.

Art. 495-7 du code de procédure pénale
Champ d'application

Le texte proposé pour l'article 495-7 du code de procédure pénale définit le champ et les conditions d'application de la nouvelle procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

La nouvelle procédure serait applicable aux personnes déférées devant le procureur de la République et reconnaissant avoir commis un ou plusieurs délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans.

Le procureur de la République pourrait recourir à cette procédure d'office ou à la demande de la personne ou de son avocat. Il ne serait en aucun cas tenu de faire droit à la demande de la personne ou de son avocat.

Afin de favoriser le plus possible l'usage de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de la culpabilité, votre commission vous soumet un amendement tendant à :

- permettre l'application de cette procédure aux délits punis à titre principal d'une peine d'amende ;

- permettre la mise en oeuvre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité non seulement en cas de défèrement devant le procureur de la République, mais également en cas de citation directe ou de convocation par procès-verbal.

Art. 495-8 du code de procédure pénale
Peines susceptibles d'être proposées

Le texte proposé pour l'article 495-8 tend à définir les modalités pratiques de la procédure.

Le procureur de la République pourrait proposer à la personne reconnaissant les faits qui lui sont reprochés d'exécuter une ou plusieurs des peines principales ou complémentaires encourues, la nature et le quantum de ces peines étant déterminés conformément aux dispositions de l'article 132-24 du code pénal.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 132-24 du code pénal dispose que, dans les limites fixées par la loi, la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Lorsque la juridiction prononce une peine d'amende, elle détermine son montant en tenant compte également des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.

Il est important de noter que la ou les peines seraient proposées par le procureur de la République et non par la personne ou son avocat. L'initiative demeurerait donc, pour l'ouverture de la procédure comme pour la détermination des peines, entre les mains du ministère public .

Le texte proposé pour l'article 495-8 dispose que lorsqu'est proposée une peine d'emprisonnement, sa durée ne peut être supérieure à six mois. Le procureur pourrait proposer qu'elle soit assortie en tout ou partie du sursis. Il pourrait en outre proposer qu'elle fasse l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues par l'article 722 du code de procédure pénale : placement à l'extérieur, semi-liberté, fractionnement et suspension des preuves, placement sous surveillance électronique, libération conditionnelle.

Une telle précision est importante s'agissant de courtes peines d'emprisonnement, dont il est souhaitable, aussi souvent que possible, qu'elles fassent l'objet d'aménagements.

Par un amendement , votre commission vous propose de porter à un an la durée maximale de la peine d'emprisonnement pouvant être proposée par le procureur de la République. Une telle durée paraît davantage en rapport avec le champ d'application de la nouvelle procédure (délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans) que celle de six mois proposée par le projet de loi.

Votre commission vous soumet également un amendement supprimant une indication redondante ainsi qu'un amendement supprimant la référence à l'article 722 du code de procédure pénale pour la remplacer par une référence à l'article 712-6, par coordination avec des amendements relatifs à l'application des peines qui seront présentés ultérieurement.

Enfin, votre commission vous propose un amendement tendant à préciser que le procureur doit indiquer à la personne, lorsqu'il propose une peine d'emprisonnement ferme, s'il entend qu'elle soit immédiatement mise à exécution ou si la personne sera convoquée devant le juge de l'application des peines pour que soient déterminées les modalités de son exécution.

Le projet de loi initial prévoyait que le montant de la peine d'amende proposée ne pourrait être supérieur à la moitié de l'amende encourue, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé cette disposition. Par un amendement , votre commission vous propose de la rétablir. Il lui apparaît conforme à la logique de la nouvelle procédure que les peines proposées soient nécessairement plus faibles que les peines normalement encourues.

Le texte proposé pour l'article 495-8 prévoit que les déclarations par lesquelles la personne reconnaît les faits qui lui sont reprochés sont recueillies, et la proposition de peine est faite par le procureur de la République en présence de l'avocat de l'intéressé. Celui-ci devrait pouvoir consulter sur le champ le dossier.

Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir que la personne ne peut renoncer à son droit d'être assistée d'un avocat.

La personne pourrait librement s'entretenir avec son avocat, hors la présence du procureur de la République, avant de faire connaître sa décision. Le procureur devrait l'aviser de la possibilité de demander à disposer d'un délai de dix jours avant de faire connaître si elle accepte ou si elle refuse la ou les peines proposées.

Il convient de noter que la nouvelle procédure pourrait modifier substantiellement le rôle de l'avocat. Celui-ci devra en effet conseiller son client sur le niveau des peines proposées par le ministère public. Il conviendra donc que les avocats soient formés à cette nouvelle mission.

Art. 495-9 du code de procédure pénale
Homologation

Le texte proposé pour l'article 495-9 du code de procédure pénale dispose que lorsque la personne accepte la ou les peines proposées, elle est aussitôt présentée devant le président du tribunal de grande instance, saisi par le procureur de la République d'une requête en homologation.

L'Assemblée nationale a prévu que le président du tribunal pourrait déléguer un autre juge pour exercer cette mission.

Le président du tribunal, après avoir entendu la personne et son avocat, pourrait décider d'homologuer la ou les peines proposées par le procureur de la République. A l'initiative de l'Assemblée nationale, le texte précise que le président doit vérifier la réalité des faits et leur qualification juridique.

Le texte initial prévoyait que le président du tribunal entendait la personne et son avocat en audience publique ou, si la personne ou son avocat le demandait, en chambre du conseil. L'Assemblée nationale a estimé préférable que le président du tribunal statue systématiquement en chambre du conseil, l'ordonnance étant en tout état de cause rendue publique en cas d'homologation.

Par un amendement , votre commission vous propose au contraire de prévoir que le président entend la personne et son avocat en audience publique, mais qu'il peut décider, d'office ou à la demande de la personne ou de son avocat, de statuer en chambre du conseil.

La procédure de comparution sur reconnaissance préalable de la culpabilité n'a pas vocation à être une procédure secrète. S'il est important que les propositions faites par le procureur à la personne puissent demeurer confidentielles tant qu'elles n'ont pas été acceptées, il est normal que la procédure d'homologation soit publique.

Le président du tribunal statuerait le même jour par ordonnance motivée.

Art. 495-10 du code de procédure pénale
Délai de réflexion - Placement en détention provisoire

Le texte proposé pour l'article 495-10 du code de procédure pénale tend à définir les règles applicables lorsque la personne demande à bénéficier du délai de réflexion qui doit lui être proposé par le procureur. Dans un tel cas, le procureur de la République pourrait la présenter devant le juge des libertés et de la détention pour que celui-ci ordonne son placement sous contrôle judiciaire ou, à titre exceptionnel et si l'une des peines proposées est égale ou supérieure à deux mois d'emprisonnement ferme, son placement en détention provisoire selon les modalités prévues en matière de comparution immédiate jusqu'à ce qu'elle comparaisse de nouveau devant le procureur de la République.

La nouvelle comparution devrait en toutes hypothèses intervenir dans un délai compris entre dix et vingt jours à compter de la décision du juge des libertés et de la détention. A défaut, il serait mis fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire si l'une de ces mesures avait été ordonnée.

Votre rapporteur s'est beaucoup interrogé sur l'utilité du délai de réflexion prévu dans la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Un délai identique est prévu en matière de composition pénale, mais, dans cette procédure, l'avocat n'est pas nécessairement présent. Pour la nouvelle procédure, l'instauration du délai de dix jours rend la procédure plus complexe puisqu'il est nécessaire de prévoir la possibilité d'un placement en détention provisoire, donc une présentation devant le juge des libertés et de la détention.

Après réflexion, votre rapporteur a cependant estimé que ce délai de réflexion pourrait être utile dans certaines situations et qu'il ne serait vraisemblablement que peu utilisé. Il a donc choisi de proposer son maintien.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Art. 495-11 du code de procédure pénale
Effets de l'ordonnance d'homologation

Le texte proposé pour l'article 495-11 du code de procédure pénale prévoit que l'ordonnance d'homologation doit être motivée par les constatations :

- que la personne, en présence de son avocat, reconnaît les faits qui lui sont reprochés et accepte la ou les peines proposées ;

- que cette ou ces peines sont justifiées au regard des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur.

L'ordonnance aurait les effets d'un jugement de condamnation . Il s'agit de la principale différence entre cette procédure et la procédure de composition pénale. La composition pénale n'est pas un jugement, même si son exécution éteint l'action publique.

Le projet de loi initial prévoyait que l'ordonnance du président du tribunal était immédiatement exécutoire.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a prévu que l'ordonnance ne serait immédiatement mise à exécution que dans les cas suivants :

- prévenu placé en détention provisoire et peine d'emprisonnement ferme homologuée par le président ;

- placement en semi-liberté ou sous surveillance électronique prévu par l'ordonnance d'homologation comme modalité d'exécution de la peine ;

- renonciation du prévenu à se prévaloir du délai de réflexion après que le procureur lui a proposé une peine d'emprisonnement ferme.

Dans les autres cas, l'ordonnance devrait être transmise au juge de l'application des peines.

Les distinctions opérées par l'Assemblée nationale en matière d'exécution immédiate peuvent susciter quelques interrogations. Elles auraient pour effet d'entraîner l'exécution immédiate des seules décisions comportant une peine d'emprisonnement ferme.

Or, le texte proposé permet au procureur de proposer l'ensemble des peines prévues pour une infraction ainsi que des aménagements de peine . Par un amendement précédent, votre commission a proposé que le procureur soit tenu d'indiquer à la personne s'il entendait que la peine d'emprisonnement soit immédiatement mise à exécution ou si la personne serait convoquée devant le juge de l'application des peines en vue de déterminer les modalités d'exécution de la peine. Par coordination, elle vous propose par un amendement de prévoir que la peine est toujours immédiatement exécutoire, la personne condamnée à une peine d'emprisonnement ferme étant alors soit immédiatement incarcérée soit convoquée devant le juge de l'application des peines.

Le texte proposé pour l'article 495-11 précise in fine que, dans tous les cas, l'ordonnance peut faire l'objet d'un appel de la part du condamné ou du ministère public.

Une telle possibilité d'appel heurte quelque peu la logique dès lors que la condamnation a donné lieu à un accord entre le ministère public et le prévenu et que cet accord a été validé par un juge. On perçoit mal dans quelles hypothèses une telle possibilité pourrait être utilisée.

En Italie, lorsqu'est mise en oeuvre la procédure du « pattegiamento », le seul recours possible est le pourvoi en cassation.

Néanmoins, la suppression de l'appel pourrait être considérée comme contraire à la Constitution. En outre, l'article préliminaire du code de procédure pénale, inséré dans ce code par la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, dispose expressément que « Toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction ».

Dans ces conditions, votre commission a estimé souhaitable de maintenir la possibilité d'appel. Elle vous propose néanmoins, par un amendement , de prévoir que le procureur de la République ne peut faire appel qu'à titre incident. Dès lors qu'il aura lui-même proposé une ou plusieurs peines à la personne concernée, il paraît difficile de concevoir que le procureur puisse faire appel à titre principal d'un jugement sur reconnaissance préalable de la culpabilité. En revanche, un appel incident paraît tout à fait souhaitable pour éviter que les personnes condamnées puissent faire appel sans pouvoir encourir une peine plus sévère que celle issue de l'ordonnance d'homologation du président du tribunal.

Art. 495-12 du code de procédure pénale
Échec de la procédure

Le texte proposé pour l'article 495-12 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas de refus par la personne d'accepter les peines proposées par le procureur ou en cas de refus d'homologation par le président du tribunal, le procureur remet à la personne une convocation à comparaître devant le tribunal correctionnel ou la traduit sur le champ devant le tribunal correctionnel, conformément à la procédure de comparution immédiate, sauf s'il estime nécessaire d'ouvrir une information. Il pourrait également procéder par la voie de la citation directe.

Art. 495-13 du code de procédure pénale
Préservation des intérêts de la victime

L'une des principales interrogations suscitées par la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité est celle de la place de la victime, compte tenu du caractère très rapide de la procédure.

Le texte proposé pour l'article 495-13 du code de procédure pénale dispose que, lorsque la victime de l'infraction est identifiée, elle est informée sans délai par tout moyen de la procédure. Elle devrait être invitée à comparaître en même temps que l'auteur des faits, accompagnée le cas échéant de son avocat, devant le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué par lui pour se constituer partie civile et demander réparation de son préjudice.

Le président du tribunal devrait statuer sur cette demande, même dans le cas où la partie civile n'aurait pas comparu à l'audience, en application de l'article 420-1 du code de procédure pénale (cet article permet la constitution de partie civile par tout moyen).

La partie civile pourrait faire appel de l'ordonnance dans les conditions de droit commun définies par les articles 498 et 500 (délai de dix jours augmenté de cinq jours lorsqu'une des parties fait appel).

Le projet de loi initial tendait à faire obligation au procureur de proposer au prévenu de réparer le dommage causé en cas d'identification de la victime, mais l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a supprimé ce dispositif dans un souci de simplification.

Le texte proposé pour l'article 495-13 prévoit dans son dernier alinéa que si la victime n'a pu exercer son droit de se constituer partie civile, elle doit être informée par le procureur de la République de son droit de lui demander de citer l'auteur des faits à une audience du tribunal correctionnel statuant sur les seuls intérêts civils. La victime devrait alors être avisée de la date de l'audience, afin de pouvoir se constituer partie civile. Le tribunal, composé d'un seul magistrat, par coordination avec les dispositions de l'article 59 du présent projet de loi, statuerait sur les seuls intérêts civils, au vu du dossier de la procédure.

Art. 495-14 du code de procédure pénale
Sort du procès-verbal

Le texte proposé pour l'article 495-14 du code de procédure pénale dispose qu'à peine de nullité de la procédure, il est dressé procès-verbal des formalités accomplies en application des articles 495-8 à 495-13.

Le texte précise que lorsque la personne n'a pas accepté la ou les peines prononcées ou lorsque le président du tribunal de grande instance n'a pas homologué la proposition du procureur de la République, le procès-verbal ne peut être transmis à la juridiction d'instruction ou de jugement, ni le ministère public ni les parties ne pouvant faire état devant cette juridiction des déclarations faites ou des documents remis au cours de la procédure.

Une telle règle paraît indispensable pour la crédibilité de la nouvelle procédure.

Devant l'Assemblée nationale, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, a défini les contours de la règle posée dans le texte proposé pour l'article 495-14 du code de procédure pénale : « Il est clair que ce qui disparaît du dossier c'est la procédure qui se déroule dans le bureau du procureur, et non à la gendarmerie ou au commissariat de police. C'est cela qui n'est pas transmis en cas de refus de la proposition du procureur de la République ».

Art. 495-15 du code de procédure pénale
Possibilité pour un prévenu cité ou convoqué
de demander l'application de la procédure de comparution
sur reconnaissance préalable de culpabilité

Le texte proposé pour l'article 495-15 du code de procédure pénale tend à permettre au prévenu qui a fait l'objet d'une citation directe ou d'une convocation en justice de demander l'application de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Le prévenu devrait, lui-même ou par l'intermédiaire de son avocat, indiquer par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au procureur de la République qu'il reconnaît les faits qui lui sont reprochés.

Le procureur ne serait en aucun cas tenu de faire droit à la demande du prévenu. S'il décidait d'y faire droit, il convoquerait le prévenu et son avocat ainsi que, le cas échéant, la victime. La citation directe ou la convocation en justice seraient alors caduques sauf si la personne refusait d'accepter les peines proposées ou si le président du tribunal refusait de les homologuer, à condition que l'un de ces refus intervienne plus de dix jours avant la date de l'audience devant le tribunal correctionnel mentionnée dans l'acte de poursuite initial.

Le texte proposé prévoit in fine que le procureur, lorsqu'il refuse de faire droit à la demande d'un prévenu, n'est pas tenu d'en aviser ce prévenu ou son avocat.

Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel.

Art. 495-16 du code de procédure pénale
Infractions exclues de la procédure de comparution
sur reconnaissance préalable de culpabilité

Le texte proposé pour l'article 495-16 du code de procédure pénale dispose que la nouvelle procédure n'est pas applicable :

- aux mineurs de dix-huit ans ;

- en matière de délits de presse ;

- en matière de délits d'homicides involontaires ;

- en matière de délits politiques ;

- en matière de délits dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale.

Ces exceptions sont sensiblement les mêmes que celles prévues par l'article 397-6 du code de procédure pénale en ce qui concerne la procédure de comparution immédiate. La nouvelle rédaction de l'article 41-2 du code de procédure pénale proposée par l'article 23 du projet de loi tend à exclure de l'application de la procédure de composition pénale non seulement les infractions commises par des mineurs comme actuellement, mais aussi les délits de presse, les homicides involontaires et les délits politiques.

*

Le paragraphe II du présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 520-1 pour définir les modalités de l'appel d'une ordonnance d'homologation rendue en application de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Le texte proposé pour l'article 520-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas d'appel d'une ordonnance d'homologation, la cour statue sur le fond sans pouvoir prononcer une peine plus sévère que celle homologuée par le président du tribunal, sauf s'il y a appel formé par le ministère public.

Ces dispositions sont conformes à celles prévues par l'article 513 du code de procédure pénale en cas d'appel des jugements correctionnels, qui interdit d'aggraver le sort de l'appelant, sur le seul appel du prévenu ou de la partie civile.

La seule question que soulèvent ces dispositions est celle des conditions dans lesquelles la cour d'appel statuera au fond, dès lors qu'un premier examen au fond ne sera pas intervenu en première instance.

Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir explicitement que la cour d'appel évoque l'affaire avant de statuer sur le fond. Conformément à la décision prise à l'article 495-11, votre commission vous propose en outre de prévoir que la cour ne peut aggraver la situation du prévenu qu'en cas d' appel incident du procureur de la République.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 61 ainsi modifié .

Article 61 bis
(art. 500-1 et 380-11 du code de procédure pénale)
Modalités du désistement de l'appel

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier les articles 500-1 et 380-11 du code de procédure pénale, afin de clarifier les conditions du désistement de l'appel en matière correctionnelle comme en matière criminelle.

Le 1° tend à modifier l'article 500-1 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que lorsqu'il intervient dans un délai d'un mois à compter de l'appel, le désistement par le prévenu ou la partie civile de son appel principal entraîne la caducité des appels incidents, y compris celui du ministère public. Dans tous les cas, le ministère public peut toujours se désister de son appel formé après celui du prévenu en cas de désistement de celui-ci.

Le présent article tend à prévoir que le désistement par le prévenu ou la partie civile de son appel principal n'entraîne la caducité des appels incidents que s'il intervient dans les conditions prévues pour la déclaration d'appel (déclaration au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée).

De fait, une telle formalité constitue le seul moyen de s'assurer du respect du délai d'un mois prévu pour que le désistement entraîne caducité des appels incidents.

Le présent article tend en outre à compléter l'article 500-1 pour prévoir que le désistement d'appel est constaté par ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels.

Le 2° tend à modifier l'article 380-11 du code de procédure pénale, relatif au désistement d'appel en matière criminelle. Cet article prévoit que l'accusé peut se désister de son appel jusqu'à son interrogatoire par le président de la cour d'assises d'appel.

Il dispose en outre que le désistement d'appel est constaté par ordonnance du président de la cour d'assises.

Le présent article complète cette dernière disposition pour prévoir que le désistement est constaté par le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque celle-ci est saisie aux fins de désigner la cour d'assises d'appel.

Rappelons en effet que l'article 380-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en matière criminelle, l'appel est porté devant une autre cour d'assises désignée par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Il est normal que le désistement d'appel soit constaté par le président de la chambre criminelle lorsque la procédure de désignation de la cour d'assises d'appel est en cours.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 61 bis sans modification .

Article 62
(art. 505-1 nouveau du code de procédure pénale)
Filtre des appels par le président de la chambre
des appels correctionnels

Le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 505-1 pour permettre au président de la chambre des appels correctionnels d'écarter lui-même des appels dépourvus de fondement juridique.

Le texte proposé pour l'article 505-1 dispose que le président de la chambre des appels correctionnels rend d'office une ordonnance de non-admission de l'appel insusceptible de recours :

- lorsqu'il est fait appel après expiration des délais prévus par les articles 498, 500 et 505 du code de procédure pénale (délai de dix jours à compter du prononcé du jugement contradictoire, délai supplémentaire de cinq jours en cas d'appel d'une partie, délai d'appel de deux mois pour le procureur général) ;

- lorsque l'appel est devenu sans objet ;

- lorsque l'appelant s'est désisté de son appel.

Le présent article constitue une simplification bienvenue.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 62 sans modification.

Article 62 bis
(art. 511 du code de procédure pénale)
Nombre et jour des audiences correctionnelles
de la cour d'appel

L'article 511 du code de procédure pénale dispose que le jour et le nombre des audiences correctionnelles sont fixés à la fin de chaque année judiciaire pour l'année judiciaire suivante par ordonnance du premier président prise après avis de l'assemblée général de la cour d'appel.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann et Alain Marsaud, tend à modifier l'article 511 pour prévoir que le nombre et le jour des audiences correctionnelles seront désormais fixés par une décision conjointe du premier président et du procureur général, conformément aux dispositions prévues à l'article 57 quater en ce qui concerne le tribunal correctionnel.

Par un amendement , votre commission vous propose, comme elle l'a fait à l'article 57 quater, de prévoir qu'en cas d'impossibilité de parvenir à un accord, la décision est prise par le premier président de la cour d'appel.

Elle vous propose d'adopter l'article 62 bis ainsi modifié .

Article 62 ter
(art. 547 et 549 du code de procédure pénale)
Examen par un juge unique
de l'appel des jugements de police

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Jean-Luc Warsmann et Georges Fenech, tend à prévoir que les appels des contraventions font l'objet d'un examen par un juge unique.

Le paragraphe I tend à compléter l'article 547 du code de procédure pénale qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit notamment que l'appel des jugements de police est suivi et jugé dans la même forme que les appels des jugements correctionnels, ce qui implique, aux termes de l'article 510 du code de procédure pénale, que la chambre des appels correctionnels est composée d'un président de chambre et de deux conseillers.

Le présent paragraphe tend à compléter l'article 547 pour prévoir qu'en cas d'appel des jugements de police, la cour est composée du seul président de la chambre des appels correctionnels, siégeant à juge unique.

Le paragraphe II tend à opérer une coordination dans l'article 549 du code de procédure pénale, qui énumère la liste des dispositions qui s'appliquent à la fois à l'appel des jugements correctionnels et à l'appel des jugements de police.

Votre commission est réservée sur le dispositif proposé par le présent article. Elle n'est pas convaincue en effet que la substitution du juge unique à la collégialité -qui s'est avérée indispensable en de nombreuses matières au cours des dernières décennies- soit un gage de qualité des décisions de justice.

La mission de votre commission des lois sur les métiers de la justice s'était interrogée en 2002 sur les moyens de limiter le recours au juge unique. Elle a estimé que pourrait être ultérieurement envisagée dans certains tribunaux une expérimentation permettant de recourir à des assesseurs non professionnels 151 ( * ) .

Jusqu'à présent, aucune décision d'appel n'est soumise à l'examen d'un juge unique. Votre commission n'estime pas souhaitable de recourir à une telle méthode, fût-ce en matière de jugements de police.

Elle vous propose la suppression de l'article 62 ter.

Article 63
(art. 706-71 du code de procédure pénale)
Utilisation de la visioconférence dans la phase de jugement

Dans sa rédaction actuelle, l'article 706-71 du code de procédure pénale dispose notamment que lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction le justifient, l'audition ou l'interrogatoire d'une personne ainsi que la confrontation entre plusieurs personnes peuvent être effectués en plusieurs points du territoire de la République se trouvant reliés par des moyens de télécommunications garantissant la confidentialité de la transmission. Dans les mêmes conditions, la présentation aux fins de prolongation de la garde à vue ou de la retenue judiciaire peut être réalisée par l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle. Il est alors dressé, dans chacun des lieux, un procès-verbal des opérations qui y ont été effectuées.

Ces dispositions résultent de la loi n° 2001-1062 relative à la sécurité quotidienne, complétée par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice.

Dans sa rédaction initiale, le présent article tendait à compléter l'article 706-71 pour prévoir l'application de ses dispositions devant la juridiction de jugement pour l'audition des témoins, des parties civiles et des experts, à condition que la personne poursuivie comparaisse devant la juridiction. Il interdisait donc un jugement à distance du prévenu.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a fortement élargi le champ d'application de l'article 706-71 en prévoyant l'application de la visioconférence :

- aux décisions de prolongation de la détention provisoire (ce dispositif était prévu par le projet de loi initial parmi les dispositions relatives à la criminalité organisée) ;

- au jugement devant le tribunal de police.

Elle n'a en outre posé aucune condition pour que le recours à la visioconférence soit possible.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer l'application de la visioconférence au jugement devant le tribunal de police. Par définition, le prévenu n'est pas détenu et l'on perçoit mal l'apport en termes d'efficacité de la possibilité de le juger par visioconférence. Votre commission n'est en tout état de cause pas favorable à ce que des personnes ou des accusés puissent être jugés sans être présents dans la salle d'audience. Une telle évolution mettrait à mal le principe de l'oralité des débats. Elle propose en outre que le recours à la visioconférence soit réservé aux cas où l'extraction d'un détenu devrait être évitée en raison des risques d'évasion ou de troubles à l'ordre public.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 63 ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions relatives au jugement des crimes
Article additionnel avant l'article 64
(art. 260 et 264 du code de procédure pénale)
Établissement des listes de jurés d'assises

L'article 64 du projet de loi tend à simplifier les conditions de désignation des jurés d'assises.

Par un article additionnel , votre commission vous propose de compléter ces dispositions.

L'article 260 du code de procédure pénale fixe un nombre de jurés qui doivent figurer sur les listes de chaque ressort. Le même article prévoit qu'un nombre plus élevé peut être fixé si le nombre de sessions le justifie. Mais un décret en Conseil d'Etat est alors nécessaire, ce qui constitue une procédure particulièrement lourde.

De même, l'article 264 du code de procédure pénale prévoit que le nombre de jurés figurant sur la liste des jurés suppléants est fixé par un décret en Conseil d'Etat.

Dans un souci de simplification, le présent article additionnel tend à remplacer ces décrets en Conseil d'Etat par des a rrêtés du garde des Sceaux.

Article 64
(art. 267, 288 et 256 du code de procédure pénale)
Simplification des modalités de désignation des jurés

Les conditions de constitution des listes de jurés de cour d'assises sont définies par les articles 259 à 267 du code de procédure pénale.

Il est établi annuellement dans le ressort de chaque cour d'assises une liste du jury criminel. La liste comprend, pour la cour d'assises de Paris, mille huit cents jurés et, pour les autres ressorts de cour d'assises, un juré pour mille trois cents habitants. Le nombre des jurés pour la liste annuelle est réparti proportionnellement au tableau officiel de la population. Cette répartition est faite par commune ou communes regroupées, par arrêté du préfet au mois d'avril de chaque année.

Le maire établit une liste préparatoire des jurés par tirage au sort des noms figurant sur les listes électorales. A partir de ces listes préparatoires et après avoir exclu les personnes ne remplissant pas les conditions légales d'aptitude, une commission présidée par le premier président de la cour d'appel ou le président du tribunal de grande instance, selon le siège de la cour d'assises, procède à un deuxième tirage au sort pour aboutir à une liste annuelle départementale ainsi qu'à une liste spéciale de jurés suppléants.

Trente jours au moins avant l'ouverture des assises, le premier président ou le président du tribunal de grande instance tire au sort au sein de ces listes, en audience publique, les noms des quarante jurés formant la liste de session et ceux des douze jurés suppléants figurant sur la liste spéciale.

Le présent article tend à apporter des simplifications à la procédure d'établissement des listes de jurés d'assises.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 267 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article dispose que le préfet notifie à chacun des jurés l'extrait de la liste de session ou de la liste des jurés suppléants le concernant quinze jours au moins avant le jour de l'ouverture de la session.

La notification mentionne le jour de l'ouverture de la session et la durée prévisible de cette session. Elle contient sommation de se trouver aux jour et heure indiqués.

A défaut de notification à personne, elle est faite à domicile ainsi qu'au maire, qui est alors tenu d'en donner connaissance au juré désigné.

Le présent paragraphe, dans sa rédaction initiale, tendait simplement à attribuer au greffier de cour d'assises la tâche, actuellement assumée par le préfet, de notifier à chacun des jurés l'extrait de la liste de session le concernant.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, a préféré réécrire l'article 267. Elle a prévu que la convocation envoyée par le greffier de la cour d'assises devait rappeler l'obligation, pour tout citoyen requis, de répondre à cette convocation sous peine d'être condamné à une amende civile.

Le texte proposé pour l'article 267 prévoit en outre qu'en cas de nécessité, le greffier peut requérir les services de police et de gendarmerie aux fins de rechercher les jurés qui n'auraient pas répondu à la convocation et de leur remettre celle-ci.

Le présent paragraphe tend en outre, à l'initiative de l'Assemblée nationale, à procéder à une coordination dans l'article 266 du code de procédure pénale, qui prévoit les conditions de remplacement sur les listes des jurés ayant satisfait aux réquisitions prévues par l'article 267.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 288 du code de procédure pénale, relatif aux conséquences de l'absence des jurés. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit que tout juré qui, sans motif légitime, n'a pas déféré à la citation qui lui a été notifiée, est condamné par la cour à une amende, qui est de 25 euros la première fois, la cour ayant la faculté de la réduire de moitié, de 30 euros la deuxième fois et de 75 euros la troisième fois. La troisième fois, le juré absent est déclaré incapable d'exercer à l'avenir les fonctions de juré.

Le présent paragraphe tend à faire du fait pour un juré de ne pas déférer à sa convocation sans motif légitime un délit puni de 3.750 euros d'amende. Le juré pourrait cependant, dans les dix jours de la signification de cette condamnation faite à sa personne ou à son domicile, former opposition devant le tribunal correctionnel du siège de la cour d'assises. Il devrait alors être rejugé.

L'Assemblée nationale a procédé, au sein de l'article 288, à une coordination avec les modifications qu'elle a apportées à l'article 267.

Le paragraphe III , inséré dans le projet de loi à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, a pour objet de modifier l'article 256 du code de procédure pénale, qui prévoit que sont incapables d'être juré les personnes auxquelles les fonctions de juré sont interdites en vertu de l'article 288 du code de procédure pénale ou de l'article 131-26 du code pénal (personnes interdites des droits civils, civiques et de famille).

Aux termes de la rédaction retenue par l'Assemblée nationale, la condamnation d'un juré -même pour la première fois- pour n'avoir pas déféré à une convocation adressée par le greffier de la cour d'assises vaudrait interdiction d'exercer les fonctions de juré.

Les dispositions du présent article devraient limiter les absences injustifiées de jurés, qui semblent assez nombreuses. Votre commission vous propose d'adopter l'article 64 sans modification .

Article 64 bis
(art. 281 du code de procédure pénale)
Communication des listes de témoins

Dans sa rédaction actuelle, l'article 281 du code de procédure pénale dispose notamment que le ministère public et la partie civile signifient à l'accusé, l'accusé signifie au ministère public et, s'il y a lieu, à la partie civile, vingt-quatre heures au moins avant l'ouverture des débats, la liste des personnes qu'ils désirent faire entendre en qualité de témoins.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à prévoir dans l'article 281 que la liste des personnes que les parties désirent faire entendre en qualité de témoin doit être signifiée « dès que possible et vingt-quatre heures au moins avant l'ouverture des débats ».

Votre commission vous propose d'adopter l'article 64 bis sans modification .

Article additionnel après l'article 64 bis
(art. 307 du code de procédure pénale)
Suspension des débats pour le repos de la partie civile

Dans sa rédaction actuelle, l'article 307 du code de procédure pénale dispose que les débats de la cour d'assises peuvent être suspendus pour le repos des juges ou de l'accusé.

Par un amendement , votre commission vous propose d'insérer dans le projet de loi un article additionnel modifiant l'article 307 pour prévoir que les débats peuvent également être suspendus pour le repos de la partie civile.

Article 65
(art. 308 du code de procédure pénale)
Enregistrement audiovisuel de l'audition des victimes

En 2002, lors de l'examen de la proposition de loi complétant la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes 152 ( * ) , le Sénat, à l'initiative de votre commission des Lois, avait proposé de permettre l'enregistrement audiovisuel de tout ou partie des procès d'assises, afin d'éviter aux victimes de répéter en appel l'ensemble de leur déposition faite en première instance.

Dans son rapport, notre excellent collègue M. Jean-Pierre Schosteck notait que « dans certaines affaires, notamment en matière d'infractions sexuelles, le fait pour les victimes ou certains témoins de devoir répéter à plusieurs reprises, tout au long de la procédure pénale, des faits abominables, peut être particulièrement éprouvant ».

Le Sénat n'avait alors pas été entendu. Votre commission se félicite que le Gouvernement ait décidé de reprendre à son compte cette proposition dans le présent projet de loi.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 308 du code de procédure pénale permet au président de la cour d'assises d'ordonner que les débats fassent l'objet d'un enregistrement sonore. Il prévoit que l'enregistrement peut être utilisé devant la cour d'assises jusqu'au prononcé de l'arrêt. Il peut également être utilisé devant la Cour de cassation saisie d'une demande en révision ou, après cassation ou annulation sur demande en révision, devant la juridiction de renvoi, en ce qui concerne les déclarations faites par des personnes qui ne peuvent plus être entendues. Le présent article tend à permettre au président de la cour d'assises d'ordonner l'enregistrement audiovisuel de la déposition ou de l'audition de la victime ou de la partie civile lorsque ces personnes en font la demande.

Il tend également à permettre l'utilisation de l'enregistrement sonore ou audiovisuel devant la cour d'assises statuant en appel. Naturellement, ce dispositif ne dispensera pas la victime ou la partie civile de comparaître. Il peut simplement éviter, dans certaines situations, que des personnes doivent intégralement redire ce qu'elles ont déjà dit en première instance. Après visionnage de l'enregistrement, la personne pourrait simplement être interrogée de manière plus brève par le président et les parties.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 65 sans modification .

Article 65 bis
(art. 331 du code de procédure pénale)
Déposition des témoins

Dans sa rédaction actuelle, l'article 331 du code de procédure pénale, relatif aux dépositions des témoins devant la cour d'assises , dispose notamment qu'avant de commencer leur déposition, les témoins prêtent serment et que « cela fait, les témoins déposent oralement ».

Cette règle de la déposition orale a pour conséquence que les témoins ne peuvent en principe consulter ou lire des documents pendant l'audience. Dans un arrêt de 1981, la Cour de cassation a cependant estimé que les témoins, s'ils doivent déposer oralement, peuvent toutefois exceptionnellement s'aider de documents si le président les y a autorisés 153 ( * ) .

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 331 pour prévoir que les officiers de police judiciaire et les magistrats ayant participé à l'enquête ou à l'instruction de l'affaire peuvent consulter des notes au cours de leur audition.

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, M. Jean-Luc Warsmann a ainsi justifié cet amendement. « On nous a en effet signalé des situations quelque peu désagréables : un officier de police judiciaire qui avait participé à une enquête de longs mois auparavant était fortement questionné, si ce n'est mis en porte-à-faux, sur un détail matériel dont il ne se souvenait pas. Il nous a semblé tout à fait légitime de l'autoriser expressément à s'aider de notes . »

Si l'objectif poursuivi est compréhensible, il n'apparaît pas souhaitable de limiter aux seuls officiers de police judiciaire et magistrats la possibilité de consulter des notes. Une telle possibilité peut être utile à d'autres témoins, par exemple aux enquêteurs de personnalité. Par un amendement , votre commission vous propose de prévoir que l'ensemble des témoins peuvent consulter des notes et documents lors de leur déposition, à condition que le président de la cour les y autorise. Afin de respecter le principe de l'oralité des débats, il convient en effet d'éviter que des témoins lisent des textes préparés à l'avance en guise de déposition.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 65 bis ainsi modifié .

Article 65 ter
(art. 339 du code de procédure pénale)
Retrait d'un accusé de la salle d'audience

L'article 339 du code de procédure pénale permet au président de la cour d'assises, avant, pendant ou après l'audition d'un témoin, de faire sortir un ou plusieurs accusés, et de « les examiner séparément sur quelques circonstances du procès . » Dans ce cas, le président a soin de ne reprendre la suite des débats qu'après avoir instruit chaque accusé de ce qui s'est fait en son absence, et ce qui en est résulté.

Dans un arrêt du 29 janvier 2003, la Cour de cassation a estimé que « la faculté prévue par l'article 339 du code de procédure pénale peut s'exercer non seulement à l'occasion de l'audition d'un témoin mais aussi de celle de l'interrogatoire d'un accusé . »

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à consacrer cette jurisprudence, en mentionnant explicitement la possibilité de faire sortir un ou plusieurs accusés avant, pendant ou après l'audition d'un coaccusé.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 65 ter sans modification .

Article 66
(art. 379-2 à 379-6 nouveaux du code de procédure pénale)
Jugement de l'accusé en son absence

Actuellement, les accusés absents lors de leur procès en cour d'assises sont jugés selon la procédure de contumace , définie par les articles 627-21 à 641 du code de procédure pénale.

Lorsque, après une décision de mise en accusation, l'accusé n'a pu être saisi ou ne se représente pas dans les dix jours de la signification qui en a été faite à son domicile ou lorsque, après s'être présenté ou avoir été saisi, il s'est évadé, le président de la cour d'assises rend une ordonnance de se représenter (souvent appelée ordonnance de contumace), qui fait ordre à l'accusé de se présenter dans un délai de dix jours, à défaut de quoi il sera déclaré « rebelle à la loi », suspendu de ses droits civiques et aura ses biens séquestrés.

A l'expiration du délai de dix jours, la cour d'assises peut procéder au jugement du contumax, sans que ce dernier ne puisse se faire représenter et en l'absence de jurés.

La cour se prononce après lecture de la décision de renvoi à la cour d'assises et réquisitions du procureur général, sans qu'aucun témoin ne soit entendu.

En cas de condamnation, les biens du contumax sont maintenus sous séquestre s'ils n'ont pas fait l'objet d'une confiscation et le contumax est incapable d'ester en justice. Seuls le procureur général et la partie civile peuvent se pourvoir en cassation, cette voie de recours étant interdite au contumax.

Si l'accusé est arrêté ou se constitue prisonnier avant la prescription de la peine, l'arrêt et les procédures accomplies depuis l'ordonnance de se représenter sont anéantis de plein droit et l'accusé est jugé par la cour d'assises dans les formes ordinaires.

Cette procédure est unanimement considérée comme archaïque. Elle a été jugée contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la Cour européenne des droits de l'Homme 154 ( * ) .

Le présent article tend à supprimer purement et simplement la procédure de contumace pour lui substituer de nouvelles règles en cas de non-comparution de l'accusé.

Le paragraphe I tend à faire de l'actuel article 380 du code de procédure pénale un article 379-1, de manière à pouvoir introduire le nouveau chapitre du code de procédure pénale relatif aux cas de non-comparution de l'accusé avant les dispositions du code de procédure pénale relatives à l'appel en matière criminelle. Dans ces conditions, le chapitre VIII du titre I du livre II du code de procédure pénale, consacré à l'appel des décisions rendues par la cour d'assises en premier ressort deviendrait un chapitre IX.

Le paragraphe II tend à rétablir dans le titre I (De la cour d'assises) du livre deuxième (Des juridictions de jugement) du code de procédure pénale un chapitre VIII consacré aux cas de non-comparution de l'accusé, composé de cinq articles, numérotés 379-2 à 379-6.

La procédure proposée est très proche de celle prévue par l'article 58 du présent projet de loi en matière correctionnelle. Le texte proposé prévoit que :

- si un avocat n'est pas présent pour assurer la défense des intérêts de l'accusé, le président renvoie le jugement de l'affaire sur le fond à une audience ou à une session ultérieure. Lorsque l'accusé est en fuite ou susceptible de ne pas se présenter à la nouvelle audience, la cour, statuant sans la présence des jurés, peut rendre un arrêt de recherche et décerner mandat d'arrêt contre l'accusé après avoir, le cas échéant, procédé à l'audition des biens et des experts et entendu la partie civile et un avocat. Elle peut, à la demande de la partie civile, ordonner toutes mesures provisoires relatives aux dommages et intérêts (article 379-3) ;

- si un avocat est présent pour assurer la défense des intérêts de l'accusé, la cour peut, après avoir entendu les observations du ministère public, de l'avocat de la partie civile et de l'avocat de l'accusé, décider soit de procéder à l'examen et au jugement de l'affaire, soit de renvoyer le jugement de l'affaire à une audience ou à une session ultérieure. Si elle décide de procéder à l'examen de l'affaire, la cour examine l'affaire et statue sur l'accusation sans l'assistance des jurés, sauf si sont présents d'autres accusés si l'absence de l'accusé a été constatée après le commencement des débats. En cas de condamnation à une peine ferme privative de liberté, il est décerné mandat d'arrêt contre l'accusé (article 372-4 du code de procédure pénale) ;

- lorsqu'une personne mise en accusation est en fuite, le ministère public peut demander au bâtonner la désignation d'un avocat pour assurer la défense des intérêts de l'accusé lors des débats devant la cour d'assises (article 379-5) ;

- si l'accusé condamné dans les conditions prévues par les articles 379-4 et 379-5 est arrêté ou se constitue prisonnier avant que la peine soit éteinte par la prescription, il est procédé à un nouvel examen de l'affaire (article 379-6). Dans ce cas, le mandat d'arrêt vaut mandat de dépôt et l'accusé demeure détenu jusqu'à sa comparution devant la cour d'assises.

Votre commission, qui a formulé des réserves sur la procédure prévue par le projet de loi en cas de non-comparution d'un prévenu devant le tribunal correctionnel, est conduite à formuler les mêmes critiques sur la procédure prévue par le présent article.

Le dispositif proposé a un double mérite : il met fin aux multiples archaïsmes de la procédure de contumace et permet, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, à un avocat présent pour assurer la défense d'un accusé absent d'être entendu par la cour.

Les solutions proposées lorsqu'aucun avocat n'est présent pour défendre l'accusé sont plus contestables. L'arrêt de recherche constitue un acte dont le statut est incertain puisqu'il ne contient pas de peine, mais qu'il permet à la cour d'ordonner des mesures relatives aux dommages et intérêts.

En outre, pour permettre néanmoins, dans certains cas, le prononcé de peines d'emprisonnement ou de réclusion, le texte permet au ministère public de demander au bâtonnier de désigner un avocat, pour défendre un accusé dont il ignore tout.

Par un amendement , votre commission vous propose d'instituer une procédure de défaut criminel , afin de respecter la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme sans toutefois remettre en cause la possibilité de juger une personne en son absence.

Le paragraphe III tend à supprimer le titre Ier bis du livre IV du code de procédure pénale, relatif à la procédure de contumace, ainsi que l'article 270 du même code, qui concerne également cette procédure.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 66 ainsi modifié .

Article 66 bis
(art. 380-1 du code de procédure pénale)
Examen par la chambre des appels correctionnels
de certains appels d'arrêts d'assises

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Georges Fenech, tend à compléter l'article 380-1 du code de procédure pénale, qui pose le principe de l'appel en matière criminelle, pour prévoir l'examen de cet appel par la chambre des appels correctionnels dans trois cas :

- lorsque l'accusé, renvoyé devant la cour d'assises uniquement pour un délit connexe à un crime, est le seul appelant ;

- lorsque tous les condamnés pour crime se sont désistés de leur appel ;

- lorsque l'appel du ministère public d'un arrêt de condamnation ou d'acquittement concerne un délit connexe à un crime et qu'il n'y a pas d'appel interjeté concernant la condamnation criminelle.

Dans de telles hypothèses, il ne paraît effectivement pas nécessaire de respecter tout le formalisme d'un procès d'assises. Néanmoins, votre commission estime préférable que les appels de décisions prononcées par une juridiction compétente en matière criminelle soient portés devant une juridiction ayant la même compétence. En conséquence, elle vous propose, par un amendement , que, dans les cas mentionnés au présent article, l'appel reste porté devant une cour d'assises, mais que, dans un souci de simplification, la cour statue sans l'assistance des jurés.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 66 bis ainsi modifié .

SECTION 3
Dispositions relatives à la Cour de cassation
Article 67
(art. 586, 612-1 et 626-5 du code de procédure pénale)
Suppression d'une amende civile
Extension de la cassation aux parties qui ne se sont pas pourvues Réexamen d'une décision pénale consécutif au prononcé d'un arrêt
de la Cour européenne des droits de l'Homme

Le présent article tend à opérer plusieurs modifications dans les procédures suivies devant la Cour de cassation.

Le paragraphe I a pour objet de supprimer, dans l'article 586 du code de procédure pénale, l'amende civile de 7,5 euros qui peut être prononcée à l'encontre d'un greffier qui n'accomplit pas les formalités qui lui incombent dans le délai de vingt jours à compter d'un pourvoi en cassation.

Le greffier qui reçoit une déclaration de pourvoi en cassation doit coter et parapher les pièces du dossier, y joindre une expédition de la décision attaquée et une expédition de l'acte de pourvoi. Il y joint également la justification de la notification du pourvoi aux autres parties, ainsi que le mémoire qui a pu être déposé par le demandeur dans les dix jours suivant la déclaration de pourvoi. Il doit également dresser un inventaire du tout.

Le paragraphe II tend à compléter l'article 612-1 du code de procédure pénale. Dans sa rédaction actuelle, cet article prévoit qu'en toute matière, lorsque l'intérêt de l'ordre public ou d'une bonne administration de la justice le commande, la Cour de cassation peut ordonner que l'annulation qu'elle prononce aura effet à l'égard des parties à la procédure qui ne se sont pas pourvues.

Le présent paragraphe tend à compléter ces dispositions pour prévoir que le condamné qui ne s'est pas pourvu et à l'égard duquel l'annulation de la condamnation a été étendue ne peut être condamné à une peine supérieure à celle prononcée par la juridiction dont la décision a été annulée.

Une telle précision a été demandée par la Cour de cassation dans son rapport pour 2000. Un condamné criminel, qui ne s'était pas pourvu et à l'égard duquel avait été étendue l'annulation prononcée à la demande d'un condamné dans la même procédure, a vu sa peine aggravée par la cour d'assises de renvoi.

La chambre criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt du 29 février 2000, a indiqué que la durée de la peine concernant ce condamné ne pouvait pas être plus importante devant la cour de renvoi et a limité la durée de la peine à celle qui avait été prononcée devant la première cour d'assises.

La Cour de cassation a recommandé une évolution législative sur ce point car « en l'état des textes, une telle limitation ne peut être imposée d'emblée à la première juridiction de renvoi car elle heurterait la plénitude de juridiction de celle-ci, d'ailleurs reconnue expressément par la Chambre criminelle dans son arrêt ».

Le présent paragraphe tend donc à mettre fin à une incohérence évidente.

Le paragraphe III tend à compléter les dispositions de l'article 626-5 du code de procédure pénale, relatif à la procédure de réexamen d'une décision pénale à la suite du prononcé d'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme.

Cette procédure, créée par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, permet à toute personne reconnue coupable d'une infraction de demander le réexamen d'une décision pénale définitive lorsqu'il résulte d'un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'Homme que la condamnation a été prononcée en violation des dispositions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

La demande de réexamen est adressée à une commission composée de sept magistrats de la Cour de cassation. Si elle estime la demande justifiée, la commission renvoie l'affaire devant une juridiction de même ordre et de même degré que celle qui a rendu la décision litigieuse ou devant la Cour de cassation si le réexamen du pourvoi du condamné est de nature à remédier à la violation constatée par la Cour européenne des droits de l'Homme.

L'article 626-5 permet à la commission de réexamen ou à la Cour de cassation de prononcer à tout moment la suspension de l'exécution de la condamnation.

Le présent paragraphe vient combler une lacune juridique. En effet, lorsque la commission décide le réexamen de l'affaire sans prononcer de suspension de peine, aucune disposition ne prévoit explicitement le maintien en détention de la personne condamnée ni la durée de cette détention.

Le présent paragraphe tend donc à compléter l'article 626-5 du code de procédure pénale pour prévoir que, hors les cas de suspension de l'exécution de la condamnation, la personne demeure détenue, sans que cette détention puisse excéder la durée de la peine prononcée, jusqu'à la décision de la Cour de cassation ou de la juridiction du fond.

La décision devrait intervenir dans le délai d'un an à compter de la décision de la commission, faute de quoi la personne serait remise en liberté, à moins d'être détenue pour une autre cause.

Le texte prévoit que, dans l'attente de la décision de la Cour de cassation ou de la juridiction du fond, la personne est considérée comme placée en détention provisoire et peut former des demandes de mise en liberté dans les conditions prévues aux articles 148-6 et 148-7 du code de procédure pénale (déclaration au greffe de la juridiction compétente, déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire).

Les demandes de liberté seraient examinées conformément aux articles 148-1 et 148-2 du code de procédure pénale.

L'article 148-2 fixe à la juridiction saisie les délais pour statuer sur les demandes de mise en liberté.

L'article 148-1 prévoit que lorsqu'une juridiction de jugement est saisie, il lui appartient de statuer sur la demande de mise en liberté. En matière criminelle, la cour d'assises n'est compétente que lorsque la demande est formée durant la session au cours de laquelle elle doit juger l'accusé ; dans les autres cas, la demande est jugée par la chambre de l'instruction.

Le présent paragraphe tend à préciser dans l'article 626-5 que lorsque l'affaire a été renvoyée devant l'assemblée plénière de la Cour de cassation, la demande est examinée par la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle la juridiction ayant condamné l'intéressé a son siège.

Les dispositions du présent paragraphe sont extrêmement importantes en ce qu'elles doivent permettre d'éviter la libération d'individus dangereux, dont la condamnation doit être réexaminée.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 67 sans modification .

CHAPITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES À L'APPLICATION DES PEINES

Dans sa version initiale, le présent projet de loi contenait plusieurs dispositions relatives à l'application des peines, destinées en particulier à améliorer la prise en considération de l'intérêt de la victime lorsque sont prises des décisions d'aménagement de peines.

L'Assemblée nationale, à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, a considérablement enrichi le chapitre du projet de loi relatif à l'application des peines, afin de mettre en oeuvre une grande partie des recommandations d'un rapport que celui-ci avait rédigé à la demande du garde des Sceaux.

Le rapport de M. Jean-Luc Warsmann sur
« Les peines alternatives à la détention, les modalités d'exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison »

Le rapport élaboré par M. Jean-Luc Warsmann à la demande du garde des Sceaux contient de nombreuses propositions relatives à l'exécution et à l'application des peines, organisées en trois axes :

Exécuter en temps réel les décisions de justice : partant du constat que le fonctionnement actuel de la justice pénale se caractérise notamment par des délais d'exécution des décisions inacceptables, qui ôtent l'essentiel de leur utilité aux peines alternatives et aux courtes peines d'emprisonnement, le rapport préconise notamment :

- l'informatisation de l'audience pour permettre l'exécution des sanctions pénales en temps réel ; ainsi, pour les amendes, le titre devrait être remis immédiatement au condamné ; pour une courte peine d'emprisonnement, un rendez-vous devrait être donné sur le champ devant le juge de l'application des peines pour qu'il puisse statuer sur les conditions d'exécution de la peine ;

- la transmission des informations au casier judiciaire national en temps réel ;

- un plan d'urgence pour la justice, afin de permettre aux tribunaux de résorber leur retard et de mettre en place des règles d'exécution en temps réel des décisions de justice à compter du 1 er janvier 2005.

Redonner de la réalité aux sanctions non privatives de liberté :

- accroître l'efficacité des sanctions matérielles, notamment en développant la consignation présentencielle et en simplifiant la peine de jours-amende ;

- lancer un programme national de relance du travail d'intérêt général (TIG), notamment en lançant l'exécution du TIG dès l'audience, en facilitant la sanction d'une non-exécution d'un TIG, en réduisant le délai d'exécution du TIG à douze mois contre dix-huit aujourd'hui, en permettant au juge de l'application des peines de convertir un TIG en jours-amende ou en amende, enfin en lançant un programme national de relance du TIG ;

- donner de la consistance aux mesures de sursis avec mise à l'épreuve et à l'ajournement avec mise à l'épreuve, notamment en simplifiant et en rendant effective la sanction du non-respect des obligations du sursis avec mise à l'épreuve ;

Exécuter les peines d'emprisonnement en limitant les sorties sèches :

- exécuter réellement les courtes peines d'emprisonnement, en favorisant le prononcé d'aménagements de peines par la juridiction de jugement, en améliorant la procédure permettant au juge de l'application des peines d'aménager les courtes peines d'emprisonnement, en augmentant et en diversifiant les modalités d'exécution (semi-liberté, placement sous surveillance électronique, placements extérieurs) ;

- encadrer les sorties de prison pour mieux lutter contre la récidive, en simplifiant les réductions de peine ordinaires par la mise en place d'un crédit de peine, en permettant au directeur de l'établissement pénitentiaire de prendre lui-même des décisions d'octroi de permis de sortie, en préparant la sortie dès l'entrée en détention ;

- construire un service d'insertion et de probation rénové, notamment en clarifiant la mission des conseillers d'insertion et de probation, en renforçant le corps des conseillers d'insertion et de probation, en créant la fonction d'agent de probation.

Prenant en compte ces recommandations, l'Assemblée nationale a opéré dans le présent chapitre une réforme profonde de l'application des peines. Elle a en particulier :

- attribué au juge de l'application des peines un grand nombre de prérogatives nouvelles : révocation du sursis avec mise à l'épreuve ou du sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, possibilité de convertir un travail d'intérêt général en jours-amende ou en amende... ;

- juridictionnalisé la plupart des décisions du juge de l'application des peines, complétant ainsi la réforme engagée par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes ;

- inséré dans la loi en les renforçant les dispositions permettant d'aménager les courtes peines d'emprisonnement ;

- transformé profondément le régime des réductions de peine en prévoyant une attribution de ces réductions dès l'entrée en prison, accompagnée d'une possibilité de remise en cause en cas de mauvais comportement du détenu.

Votre commission vous proposera d'approuver, pour l'essentiel, ces dispositions tout en proposant des modifications destinées à les compléter ou à en renforcer la cohérence.

Division additionnelle avant la section 1

Par un amendement , votre commission vous propose d'insérer une section additionnelle au début du chapitre du projet de loi consacré à l'application des peines, destinée à accueillir des dispositions générales.

Article additionnel avant la section 1
(art. 707 du code de procédure pénale)
Principes généraux de l'application des peines

L'assemblée nationale a inséré dans le projet de loi un article 68 bis destiné à inscrire dans un nouvel article 707 A du code de procédure pénale, appelé à figurer en tête du titre du code de procédure pénale relatif à l'exécution des sanctions pénales, les principes généraux de l'exécution des peines . Le texte qu'elle a adopté s'inspire de l'avant-projet de loi sur la peine et le service public pénitentiaire élaboré par le précédent Gouvernement, mais qui n'a pas été déposé au Parlement.

Le texte proposé par l'Assemblée nationale pour l'article 707 A prévoit :

- que les peines prononcées par les juridictions pénales doivent être mises à exécution de façon effective et dans des délais aussi rapides que possible ;

- que l'exécution des peines doit tendre, dans le respect de l'intérêt de la société et des droits des victimes, à l'insertion, au maintien de l'emploi ou à la réinsertion, notamment par le retour à l'emploi, des condamnés, ainsi qu'à la prévention de la récidive ou de la commission de nouvelles infractions ;

- que les modalités des peines peuvent évoluer au cours de leur exécution, l'aménagement des peines devant, chaque fois que cela est possible, permettre le retour progressif du condamné à la liberté et éviter une remise en liberté sans aucune forme de suivi judiciaire.

Dans un souci de cohérence et de lisibilité, votre commission vous propose, par un amendement tendant à insérer un article additionnel, d'insérer ces dispositions au début du chapitre du projet de loi consacré à l'exécution des peines.

Elle vous propose de faire figurer les principes généraux de l'exécution des peines dans l'article 707 du code de procédure pénale, en attribuant une nouvelle numérotation (707-1) au texte actuel de cet article.

Elle vous propose enfin de simplifier la rédaction proposée, afin que le nouvel article 707 constitue, pour l'application des peines, l'équivalent de l'article préliminaire du code de procédure pénale pour les autres phases de la procédure pénale.

Article additionnel avant la section 1
(art. 712-1 à 712-17 nouveaux du code de procédure pénale)
Organisation et fonctionnement des juridictions
de l'application des peines - Modalités de décision
en matière d'application des peines

L'Assemblée nationale a introduit dans le projet de loi un article 68 sexdecies, introduisant dans le code de procédure pénale un chapitre consacré aux attributions du juge de l'application des peines .

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, a ainsi décrit l'amendement qu'il présentait : « S i cet amendement peut paraître un peu long, c'est qu'il procède à une réécriture de bon nombre de dispositions de nature parfois réglementaire relatives au juge de l'application des peines , jusqu'alors dispersées ».

Le but est de bien préciser les attributions du juge de l'application des peines.

L'article 68 sexdecies tend donc à insérer cinq articles nouveaux 712-1 à 712-5 dans le code de procédure pénale pour :

- poser le principe de la présence d'un ou plusieurs juges de l'application des peines dans chaque tribunal de grande instance et rappeler leurs conditions de désignation ;

- définir les missions du juge de l'application des peines ;

- préciser les règles de compétence géographique du juge de l'application des peines, qui figurent aujourd'hui dans des textes réglementaires ;

- rappeler la possibilité pour le juge de l'application des peines de procéder, dans l'exercice de ses attributions, à tous examens, auditions, enquêtes, expertises, réquisitions ou autres mesures utiles ;

- préciser les conditions dans lesquelles le juge de l'application des peines peut délivrer mandat d'amener contre les condamnés en cas d'inobservation des obligations qui leur incombent.

Votre commission souscrit pleinement à la logique de rationalisation qui a conduit l'Assemblée nationale à rassembler des règles éparses au sein d'un même chapitre du code de procédure pénale.

Dans un souci de cohérence et de lisibilité, votre commission vous propose, par un amendement tendant à insérer un article additionnel, d'inscrire ces dispositions avant l'article 68.

Surtout, votre commission vous propose de parachever le travail de mise en cohérence des textes entamé par l'Assemblée nationale, en créant dans le code de procédure pénale un chapitre consacré non au seul juge de l'application des peines, mais aux juridictions de l'application des peines .

Ce chapitre accueillerait :

- les règles d'établissement et de composition des juridictions de l'application des peines ;

- les règles de compétence et de procédure applicables devant ces juridictions ;

- les règles applicables en cas d'appel des décisions des juridictions de l'application des peines.

Une telle architecture doit permettre de clarifier les règles relatives à l'application des peines, et notamment de faire disparaître l'actuel article 722, qui définit dans un unique article, particulièrement complexe, le rôle du juge de l'application des peines ainsi que l'ensemble des conditions dans lesquelles sont prononcés les aménagements de peines.

La rédaction que vous propose votre commission prend en compte les modifications très importantes que l'Assemblée nationale a souhaité apporter aux règles de fond de l'application des peines. La loi renforçant la protection de la présomption d'innocence avait juridictionnalisé les aménagements de peine pris à l'égard des personnes détenues ; le présent projet de loi, à l'initiative de l'Assemblée nationale, tend à opérer la même transformation en ce qui concerne les mesures de milieu ouvert.

Dans son amendement, votre commission vous propose de modifier quelque peu l'architecture actuelle des juridictions de l'application des peines.

Actuellement, l'ensemble des mesures d'application des peines, à l'exception des mesures de libération conditionnelle lorsque la peine privative de liberté prononcée est d'une durée supérieure à dix ans, sont décidées par le juge de l'application des peines. L'appel des décisions du juge de l'application des peines, lorsqu'il est possible, est porté devant la chambre des appels correctionnels .

Les mesures de libération conditionnelle concernant des condamnés à des peines privatives de liberté d'une durée supérieure à dix ans sont décidées par la juridiction régionale de la libération conditionnelle , établie auprès de chaque cour d'appel et composée d'un président de chambre ou d'un conseiller de la cour d'appel et de deux juges de l'application des peines. L'appel des décisions de cette juridiction est porté devant la juridiction nationale de la libération conditionnelle composée du premier président de la Cour de cassation ou d'un conseiller à la cour le représentant, de deux magistrats du siège de la cour, d'un représentant des associations de réinsertion et d'un responsable des associations d'aide aux victimes.

Votre commission vous propose de retenir une organisation différente, afin de simplifier les règles actuelles et de les rendre plus cohérentes.

Votre commission propose de faire de la juridiction régionale de la libération conditionnelle un tribunal de l'application des peines , compétent en matière de libération conditionnelle mais également en matière de réexamen des mesures de sûreté et qui serait composé d'un président et de deux assesseurs désignés par le premier président de la cour d'appel parmi les juges de l'application des peines du ressort.

Cette évolution permettrait de faire disparaître la juridiction nationale de la libération conditionnelle, créée par la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes. Lors du vote de cette loi, le choix d'une juridiction unique pour connaître des appels en matière de libération conditionnelle pour les condamnés à de longues peines a été fait dans un souci d'unification de la jurisprudence (il convient de rappeler qu'auparavant les décisions en la matière relevaient du garde des Sceaux). Avec trois années de recul, il apparaît que le système mis en place comporte deux défauts :

- il ne permet pas le pourvoi en cassation, dès lors que la juridiction d'appel est déjà une juridiction placée auprès de la Cour de cassation ;

- l'activité de la juridiction nationale tend à augmenter régulièrement, ce qui pourrait justifier un examen des appels au sein des cours d'appel. Au 1 er janvier 2002, 39 dossiers restaient à traiter par la juridiction nationale de la libération conditionnelle. Au cours de l'année 2002, elle a reçu 119 nouveaux dossiers. Après avoir été mensuelles, les audiences sont devenues bimensuelles, compte tenu du nombre d'affaires à juger. Au 31 décembre 2002, 126 dossiers avaient fait l'objet d'une décision, 32 restaient à juger.

Il paraît aujourd'hui possible d'unifier les règles d'appel en matière d'application des peines, en confiant l'examen de ces appels à une chambre de l'application des peines de la cour d'appel .

L'appel des décisions du juge de l'application des peines et du tribunal de l'application des peines serait porté devant une chambre de l'application des peines de la cour d'appel, composée d'un président et de deux conseillers assesseurs.

Compte tenu de l'ensemble des modifications proposées par l'amendement de votre commission, le nouveau chapitre du code de procédure pénale consacré aux juridictions de l'application des peines comporterait dix-sept articles numérotés 712-1 à 712-17, qu'il convient de présenter brièvement :

Le texte proposé pour l' article 712-1 du code de procédure pénale définit la compétence du juge de l'application des peines et du tribunal de l'application des peines , sans modifier le fond du droit actuel.

Le texte proposé pour l' article 712-2 du code de procédure pénale énonce le principe de la présence d'un ou plusieurs juges de l'application des peines dans le tribunal, rappelle leurs conditions de désignation et définit les règles applicables en cas d'empêchement.

Le texte proposé pour l' article 712-3 du code de procédure pénale définit la composition du tribunal de l'application des peines et prévoit que les débats contradictoires auxquels il procède ont lieu au siège des différents tribunaux de grande instance du ressort de la cour d'appel ou dans les établissements pénitentiaires.

Le texte proposé pour les articles 712-4 à 712-6 du code de procédure pénale définit la procédure applicable devant le juge de l'application des peines.

Rappelons qu'actuellement le juge statue par ordonnance motivée à l'issue d'un débat contradictoire en matière de placement à l'extérieur, de semi-liberté, de fractionnement et suspension des peines, de placement sous surveillance électronique et de libération conditionnelle.

Le juge statue par mesure d'administration judiciaire prise après avis de la commission d'application des peines en matière de réductions de peine, d'autorisations de sortie sous escorte et de permissions de sortir.

Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale au présent projet de loi ont pour effet d'étendre substantiellement les missions des juges de l'application des peines, appelés à exercer des attributions jusqu'à présent réservées à la juridiction de jugement, notamment en matière de travail d'intérêt général, d'emprisonnement assorti du sursis avec mise à l'épreuve ou de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général.

Votre commission vous propose de retenir deux modalités différentes de décision pour le juge de l'application des peines :

- ordonnance motivée et susceptible d'appel prise après avis de la commission d'application des peines, mais sans débat contradictoire préalable en matière de réductions de peine, d'autorisation de sortie sous escorte et de permissions de sortir. L'Assemblée nationale a proposé que le juge de l'application des peines statue après débat contradictoire sur les incidents relatifs aux réductions de peine, mais une telle perspective a paru irréaliste à votre rapporteur, compte tenu du nombre de décisions rendues en cette matière ;

- ordonnance motivée prise à l'issue d'un débat contradictoire en matière de placement à l'extérieur, de semi-liberté, de fractionnement et suspension des peines, de placement sous surveillance électronique et de libération conditionnelle.

La même procédure serait applicable, sauf si la loi en disposait autrement, pour les décisions du juge de l'application des peines concernant les peines de suivi socio-judiciaire, d'interdiction de séjour, de travail d'intérêt général, d'emprisonnement assorti du sursis avec mise à l'épreuve et de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, ou les mesures d'ajournement du prononcé de la peine avec mise à l'épreuve.

Les décisions relevant du tribunal de l'application des peines seraient prises par jugement motivé à l'issue d'un débat contradictoire .

Le texte proposé pour l' article 712-8 du code de procédure pénale énonce les règles de compétence territoriale du juge de l'application des peines , en fonction de la nature des peines ou des mesures d'aménagement accordées.

Le texte proposé pour l' article 712-9 du code de procédure pénale énonce le principe du droit d'appel à l'encontre des décisions du juge de l'application des peines et du tribunal de l'application des peines et définit les délais dans lesquels les appels doivent être formés (vingt-quatre heures pour les ordonnances rendues sans débat contradictoire, dix jours pour les autres).

Le texte proposé pour l' article 712-10 du code de procédure pénale dispose que l'appel des ordonnances rendues en matière de permissions de sortir, d'autorisations de sortie sous escorte et de réductions de peine est porté devant le président de la chambre de l'application des peines , qui statue par ordonnance motivée au vu d'observations écrites du ministère public et du condamné.

Votre commission estime que cette modalité d'appel est la seule susceptible d'éviter de graves difficultés dans l'application de la réforme.

Le texte proposé pour l' article 712-11 du code de procédure pénale prévoit que les ordonnances motivées rendues par le juge de l'application des peines après débat contradictoire, ainsi que les jugements rendus par le tribunal de l'application des peines, peuvent faire l'objet d'un appel devant la chambre de l'application des peines, qui statue après débat contradictoire. Le condamné ne serait en principe pas entendu par la chambre, mais si elle en décidait autrement, l'un de ses membres effectuerait l'audition au sein de l'établissement pénitentiaire. Elle pourrait également être effectuée par visioconférence.

Conformément au droit actuel, pour l'examen des demandes de libération conditionnelle formulées par des condamnés à une peine privative de liberté de plus de dix ans, la chambre de l'application des peines serait complétée par un représentant d'une association de réinsertion et un représentant d'une association d'aide aux victimes.

Votre commission propose également qu'en cas de rejet de l'appel formé par le condamné, la cour puisse fixer un délai pendant lequel le condamné ne pourrait former la même demande que celle qui a été rejetée. Ce délai ne pourrait excéder ni trois ans ni le tiers de la durée de détention restant à subir.

Le texte proposé pour l' article 712-12 du code de procédure pénale reprend des dispositions de l'actuel article 722 du code de procédure pénale, pour prévoir que les décisions du juge de l'application des peines et du tribunal de l'application des peines sont exécutoires par provision, mais que l'appel du ministère public formé dans les vingt-quatre heures suspend l'exécution de la décision.

Le texte proposé pour l' article 712-13 du code de procédure pénale dispose que les ordonnances et arrêts rendus par la chambre de l'application des peines ou son président peuvent faire l'objet d'un pourvoi en cassation qui n'est pas suspensif.

Le texte proposé pour l' article 712-14 du code de procédure pénale énonce le principe de la possibilité pour les juridictions de l'application des peines de procéder ou de faire procéder à tous examens, auditions, enquêtes, expertises, réquisitions ou autres mesures utiles. Il énonce également, de manière générale, la possibilité, avant toute décision par ces juridictions, d'informer la victime qu'elle peut présenter ses observations .

Le texte proposé pour l' article 712-15 du code de procédure pénale définit les conditions dans lesquelles le juge de l'application des peines pourra délivrer mandat d'arrêt ou mandat d'amener , dès lors qu'il lui reviendra de sanctionner lui-même le non-respect par les condamnés des obligations qui leur sont imposées.

Le texte proposé pour l' article 712-16 du code de procédure pénale reprend les dispositions figurant actuellement dans l'article 722, aux termes desquelles les aménagements de peine concernant des condamnés pour infractions sexuelles ne peuvent être accordés sans expertise psychiatrique préalable.

Enfin, le texte proposé pour l' article 712-17 du code de procédure pénale prévoit qu'un décret détermine les conditions d'application du chapitre du code de procédure pénale consacré aux juridictions d'application des peines.

Le présent article additionnel ne remet pas en cause les modifications que l'Assemblée nationale a souhaité apporter au droit de l'application des peines, mais devrait au contraire faciliter leur mise en oeuvre.

Article additionnel avant la section 1
(art. 709-1, 713-1 à 713-8, 722, 722-1, 722-1-1, 722-2,
730, 733, 733-1 et 763-5 du code de procédure pénale)
Coordinations

Compte tenu des importantes modifications qui sont apportées à l'architecture du code de procédure pénale en matière d'application des peines par l'article additionnel précédemment adopté, votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel pour abroger plusieurs articles du code de procédure pénale devenus inutiles et opérer des coordinations dans d'autres articles du même code.

SECTION 1
Dispositions relatives aux droits des victimes
Article 68
(art. 718, 719, 720, 720-1 AA, 720-1-A, 720-1, 721-2 nouveau,
722,723-4, 723-10 et 731 du code de procédure pénale)
Prise en compte des intérêts de la victime à la libération du condamné

Le présent article a pour objet de permettre une meilleure prise en compte des intérêts de la victime à la libération du condamné.

Comme l'indique l'article préliminaire du code de procédure pénale : « L'autorité judiciaire veille à l'information et à la garantie des droits des victimes au cours de toute procédure pénale ».

La garantie des droits des victimes ne doit pas s'arrêter le jour du jugement, mais doit être également assurée lorsque l'auteur des faits est libéré.

Le paragraphe I tend à donner une nouvelle numérotation aux articles 718, 719, 720, 720-1 AA et 720-1-A, qui concernent notamment la répartition des condamnés dans les prisons, les suspensions de peines, les activités de travail et de formation des détenus, de manière à pouvoir insérer de nouveaux articles avant les articles 720-2 et suivants relatifs à la période de sûreté.

Le paragraphe I bis , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à opérer, dans les articles 706-47 relatif à la procédure applicable en matière d'infractions sexuelles et 763-7 relatif au placement sous surveillance électronique, des coordinations avec la décision de renuméroter plusieurs articles du code de procédure pénale.

Le paragraphe II tend à rétablir l'article 720 du code de procédure pénale, déplacé par le paragraphe I du présent article, pour prévoir qu'avant toute décision entraînant la cessation temporaire ou définitive de l'incarcération d'une personne condamnée à une peine privative de liberté avant la date d'échéance de cette peine, le juge de l'application des peines ou la juridiction régionale de la libération conditionnelle (compétente en matière de libération conditionnelle pour les longues peines privatives de liberté) prend en considération les intérêts de la victime au regard des conséquences pour celle-ci de cette décision.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer ces dispositions. Déjà prévues par l'article préliminaire du code de procédure pénale, elles s'imposent à tous les magistrats sans qu'un texte soit nécessaire.

En outre, l'article 68 bis du projet de loi, que votre commission a décidé de déplacer avant l'article 68, tend à définir les principes généraux applicables en matière d'application des peines et mentionne les intérêts de la société et les droits des victimes.

De manière plus normative, le texte proposé pour l'article 720 du code de procédure pénale prévoit que lorsqu'une mesure de suspension de peine, de placement à l'extérieur, de semi-liberté, de permission de sortir, de placement sous surveillance électronique et de libération conditionnelle est prononcée et qu'il existe soit un danger pour la victime ou la partie civile, soit un risque que le condamné puisse se trouver en sa présence, la juridiction compétente interdit au condamné de la recevoir, de la rencontrer ou d'entrer en relation avec elle de quelque façon que ce soit.

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer la référence à l'existence d'un danger pour la victime, insérée dans le projet de loi par l'Assemblée nationale. Il paraît inconcevable que des mesures d'aménagement de peines soient prononcées lorsque la juridiction sait qu'elles vont créer un danger pour les victimes.

Le texte proposé pour l'article 720 fait obligation à la juridiction d'adresser à la victime un avis l'informant de l'interdiction qui a été faite au condamné de la rencontrer, ainsi que des conséquences qui pourraient résulter pour le condamné de la violation de cette interdiction. L'avis pourrait cependant ne pas être envoyé à la victime dans les cas suivants :

- lorsque la personnalité de la victime ou de la partie civile le justifie ;

- lorsque la victime ou la partie civile fait connaître qu'elle ne souhaite pas être avisée des modalités d'exécution de la peine ;

- dans le cas d'une cessation provisoire de l'incarcération du condamné pour une durée ne dépassant pas sept jours.

Il est tout à fait heureux que les aménagements de peine puissent être assortis de l'interdiction d'entrer en contact avec la victime.

Les paragraphes III, VII, VIII, IX tendent à opérer des coordinations dans d'autres articles du code de procédure pénale.

Il s'agit de modifier les articles du code de procédure pénale relatifs à la suspension de peine (article 720-1 modifié par le paragraphe III), au placement extérieur, à la semi-liberté et à la permission de sortir (article 723-4 nouveau inséré par le paragraphe VII), au placement sous surveillance électronique (article 723-10 nouveau, inséré par le paragraphe VIII) et à la libération conditionnelle (article 731 modifié par le paragraphe IX), afin de mentionner l'interdiction de rencontrer la victime, ainsi que l'obligation de l'indemniser parmi les obligations pouvant être imposées au condamné. En cas de violation de l'interdiction de rencontrer la victime, la mesure dont a bénéficié le condamné pourrait être révoquée.

En pratique, aujourd'hui, ces mesures peuvent déjà être prononcées. Les articles du code de procédure pénale relatifs aux aménagements de peine prévoient en effet, de manière très générale, que les aménagements de peine peuvent être assortis de conditions particulières, ainsi que de mesures d'assistance et de contrôle. Il n'est pas certain qu'il soit opportun de consacrer une catégorie de mesures dans la loi, les autres restant définies par décret. L'absence dans la loi d'une liste, même non exhaustive, des obligations qui peuvent être imposées à un condamné bénéficiant d'un aménagement de peine est une singularité. Le code pénal énumère en revanche, dans ses articles 132-44 et 132-45, les mesures de contrôle et obligations qui peuvent être imposées aux condamnés à une peine d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve.

Dans ces conditions, par quatre amendements , votre commission vous propose de renvoyer, en ce qui concerne les obligations pouvant être imposées au condamné bénéficiant d'une libération conditionnelle, d'une suspension de peine, d'un placement sous surveillance électronique ou d'une mesure de semi-liberté, aux obligations prévues par le code pénal en matière de sursis avec mise à l'épreuve.

Le paragraphe IV tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 721-2, destiné à modifier les règles relatives aux réductions de peine accordées en cas d'incarcération.

Deux types de réductions de peine existent actuellement : les réductions de peine pour bonne conduite (article 721 du code de procédure pénale) et les réductions de peine en cas d'efforts sérieux de réadaptation sociale (article 721-1 du code de procédure pénale). En pratique, les premières sont accordées de manière quasi-automatique, les secondes de façon plus individualisée.

Le texte proposé pour l'article 721-2 tend à permettre au juge de l'application des peines d'ordonner que le condamné ayant bénéficié d'une ou plusieurs réductions de peine soit soumis après sa libération à certaines obligations ou interdictions destinées à prévenir la récidive et à assurer la sécurité et les droits des victimes, pendant une durée qui ne peut excéder le total des réductions de peine accordées.

Le texte précise que les obligations et interdictions peuvent être celles prévues par l'article 731 en matière de libération conditionnelle (mesures d'assistance et de contrôle destinées à faciliter et à vérifier le reclassement de l'intéressé). Elles peuvent notamment reprendre l'interdiction de recevoir la victime de l'infraction, de la rencontrer ou d'entrer en relation avec elle de quelque façon que ce soit, ainsi que l'obligation de l'indemniser.

En cas d'inobservation par le condamné des obligations et interdictions ainsi imposées, le juge de l'application des peines pourrait ordonner la réincarcération du condamné pour tout ou partie de la durée des réductions de peine accordées .

Le dispositif proposé est novateur. Il peut au premier abord susciter l'étonnement. Dès lors que les réductions de peines sont accordées, est-il possible de les remettre en cause au moment de la sortie de prison ? Ne risque-t-on pas de pénaliser ceux qui se comportent le mieux en détention, obtenant ainsi des réductions de peine ?

Toutefois, le système envisagé repose sur l'idée qu'une personne condamnée à une peine d'emprisonnement pour une certaine durée doit des comptes à l'autorité judiciaire pendant toute cette période. Même si celle-ci lui accorde des réductions de peine, la personne peut faire l'objet de mesures de contrôle pendant toute la durée de la peine qui a été prononcée.

Ce dispositif a été proposé dès 1994 par une commission d'étude pour la prévention de la récidive des criminels (rapport Cartier).

Extrait du rapport de la commission d'étude
pour la prévention de la récidive des criminels

« La pratique des réductions de peine n'est pas satisfaisante, comme en ont convenu d'ailleurs toutes les personnes entendues par la Commission. Il a été montré précédemment que les réductions de peine ordinaires engendraient une érosion de la peine sans la moindre contrepartie de la part des condamnés, ce qui signifie que ces mesures ne contribuent en rien à la politique de réinsertion du détenu et par suite à la prévention de la récidive.

« La Commission, après avoir mesuré les risques d'une suppression des réductions de peine ou du moins d'un retour à une attribution circonstanciée du bénéfice de celles-ci, estime qu'il ne lui appartient pas de prendre position sur de telles décisions.

« C'est pourquoi, tout en considérant qu'il serait hautement souhaitable de n'accorder de réductions de peine qu'aux condamnés, qui ont eu une réelle bonne conduite en prison, la Commission a recherché les moyens, tout en maintenant le cadre actuel, de « rentabiliser » les réductions de peine ordinaires .

« Pour ce faire, il est proposé de conserver la libération anticipée du condamné consécutive à l'octroi des réductions de peine mais de transformer la réduction « sèche » de la peine en un suivi post-carcéral d'une durée équivalente.

« Ainsi, le condamné retrouverait la liberté, à la date escomptée par lui, après imputation du temps de réduction prévu par l'article 721 du code de procédure pénale, mais il serait, pour la même durée, soumis à un certain nombre de mesures d'assistance et de contrôle propres à prévenir une éventuelle récidive.

« La principale objection faite à ce système est que la durée du suivi serait d'autant moins longue (sinon même ramenée à zéro) que le condamné a eu une mauvaise conduite en prison, ce qui à première vue peut paraître illogique.

« En réalité, il ne faut pas perdre de vue que le temps global (peine + suivi) sera dans tous les cas équivalent ; certes, le condamné ayant eu une mauvaise conduite en détention fera l'objet d'un suivi post-pénal plus court que celui qui a cumulé la totalité des réductions de peine, mais il aura en revanche passé plus de temps en prison. Or, pendant cette période de détention (égale au temps de réduction de peine supprimé pour mauvaise conduite), non seulement le condamné ne fait pas courir de risques à la société, mais encore il peut être activement préparé à sa libération et améliorer ses chances de réinsertion . »

Les dispositions du présent article ne peuvent être analysées qu'en lien avec l'article 69 quater, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, et qui tend à créer un système de crédit de réduction de peine permettant l'attribution au condamné des réductions de peine ordinaires dès son entrée en détention, ces réductions pouvant être ensuite remises en cause en cas de mauvais comportement. Le système proposé reviendrait donc à préempter à un condamné ses réductions de peine tout en prévoyant qu'en tout état de cause, le condamné doit accepter d'être soumis à des obligations pendant toute la durée de la peine prononcée par la juridiction, qu'il soit ou non en détention.

Ce système présente l'avantage de permettre un retour progressif à la liberté. Il peut contribuer à restaurer l'autorité de la décision du juge du fond, la peine prononcée n'étant plus érodée mais transformée par les réductions de peine.

Votre commission approuve le dispositif proposé. Elle vous propose cependant, par un amendement , de limiter les mesures pouvant être ordonnées par le juge de l'application des peines à l'interdiction de recevoir la victime de l'infraction, de la rencontrer ou d'entrer en relation avec elle de quelque façon que ce soit ainsi qu'à l'obligation de l'indemniser.

Rappelons que lorsque le juge de l'application des peines soumet un condamné à certaines obligations dans le cadre d'une libération conditionnelle, d'une mesure de semi-liberté, d'un placement à l'extérieur, le service pénitentiaire d'insertion et de probation est saisi pour assurer le suivi des mesures ordonnées. Si, après l'adoption du présent projet de loi, la plupart des décisions de libération, dès lors que le condamné a bénéficié de réductions de peines, devaient s'accompagner d'obligations imposées aux condamnés, les services pénitentiaires d'insertion et de probation seraient probablement dans l'incapacité matérielle d'assurer le suivi de ces mesures. C'est pourquoi il paraît raisonnable - au moins dans un premier temps - de limiter le champ d'application du dispositif novateur proposé par le Gouvernement en ce qui concerne les détenus libérés après avoir bénéficié de réductions de peine.

Les paragraphes V et VI tendent à opérer des coordinations dans l'article 722 du code de procédure pénale, qui définit les attributions du juge de l'application des peines. Votre commission ayant proposé d'insérer les missions du juge de l'application des peines dans de nouveaux articles et, en conséquence, de supprimer l'article 722, vous propose, par un amendement , de supprimer les paragraphes V et VI.

Le paragraphe VI bis , inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 722-1 pour prévoir que la juridiction nationale de la libération conditionnelle, compétente pour statuer en appel sur les demandes de libération conditionnelle concernant les condamnés à de longues peines privatives de liberté, prend en compte les intérêts de la victime et peut les informer pour qu'elles puissent présenter leurs observations. Votre commission, ayant décidé de reprendre ces dispositions dans un nouvel article 712-14 du code de procédure pénale, vous propose, par un amendement , de supprimer le présent paragraphe.

Elle vous propose d'adopter l'article 68 ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 68
(art. 706-3 du code de procédure pénale)
Indemnisation des victimes de traite des êtres humains

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel pour compléter l'article 706-3 du code de procédure pénale, afin de permettre aux victimes de traite des êtres humains de former un recours en indemnisation devant les commissions d'indemnisation des victimes d'infractions.

Article 68 bis
(art. 707 A nouveau du code de procédure pénale)
Principes généraux de l'application des peines

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à insérer un article 707 A au début des dispositions du code de procédure pénale relatives à l'application des peines, afin d'énoncer les principes généraux de l'exécution des peines.

Votre commission ayant décidé, dans un souci de cohérence et de lisibilité du projet de loi, d'inscrire ces principes au début des dispositions du projet de loi consacrées à l'application des peines, vous propose la suppression de l'article 68 bis.

Article 68 ter
(art. 707 du code de procédure pénale)
Exécution des peines d'amende

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, tend à compléter l'article 707 du code de procédure pénale, qui prévoit que le ministère public et les parties poursuivent l'exécution de la sentence chacun en ce qui le concerne, pour inscrire dans cet article des dispositions relatives au paiement de l'amende et aux situations dans lesquelles le non-paiement de l'amende peut entraîner incarcération.

Des dispositions similaires sont déjà prévues dans les textes qui définissent la peine de jours-amende ou la contrainte par corps, que le présent projet de loi tend à transformer en contrainte judiciaire.

En conséquence, votre commission vous propose la suppression de l'article 68 ter.

Article 68 quater
(art. 728-1 du code de procédure pénale)
Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme
et d'autres infractions

Dans sa rédaction actuelle, l'article 728-1 du code de procédure pénale prévoit que les valeurs pécuniaires des détenus, inscrites à un compte nominatif, sont divisées en trois parts : la première sur laquelle seules les parties civiles et les créanciers d'aliments peuvent faire valoir leurs droits ; la deuxième, affectée au pécule de libération, qui ne peut faire l'objet d'aucune voie d'exécution, la troisième, laissée à la libre disposition des détenus.

Le même article dispose que les sommes destinées à l'indemnisation des parties civiles leur sont versées directement, sous réserve des droits des créanciers d'aliments, à la demande du procureur de la République, par l'établissement pénitentiaire.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à compléter l'article 728-1 pour permettre au Fonds de garantie des victimes d'infractions , lorsqu'il est subrogé dans les droits de la victime, d'être assimilé à une partie civile et de bénéficier des mêmes droits dès lors que le prélèvement au profit des parties civiles a eu lieu.

L'évolution proposée devrait faciliter l'action du Fonds de garantie des victimes d'infractions, qui éprouve parfois des difficultés à obtenir remboursement par l'auteur des faits des sommes qu'il a versées à la victime.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 68 quater sans modification .

Article 68 quinquies
(art. L. 135 M nouveau du livre des procédures fiscales)
Information du Fonds de garantie des victimes d'infractions
par l'administration fiscale

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à insérer dans le livre des procédures fiscales un article L. 135 M, afin de prévoir l'obligation pour l'administration fiscale de transmettre au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions les informations relatives à la situation des personnes ayant à répondre financièrement des dommages qu'elles ont provoqués.

Comme l'a indiqué M. Jean-Luc Warsmann lors des débats à l'Assemblée nationale : « Aujourd'hui, le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme n'a pas accès à un certain nombre de données qui lui permettraient d'évaluer la situation financière des personnes condamnées, ce qui donne lieu à une débauche de démarches administratives. Ainsi, le fonds de garantie doit demander l'autorisation au procureur de la République du tribunal concerné d'interroger le fichier des comptes bancaires, le procureur doit signer l'autorisation et la renvoyer au fonds de garantie, qui peut alors s'adresser au fichier des comptes bancaires. Et la procédure doit être renouvelée autant de fois qu'il y a de comptes bancaires. »

Dans un souci de précision, votre commission vous soumet un amendement pour viser les condamnés plutôt que les personnes.

Elle vous propose d'adopter l'article 68 quinquies ainsi modifié .

SECTION 1 BIS
Dispositions relatives aux peines de jours-amende
et de travail d'intérêt général, au suivi socio-judiciaire,
au sursis avec mise à l'épreuve et à l'ajournement avec mise à l'épreuve

Dans son rapport sur les peines alternatives à la détention et l'exécution des courtes peines d'emprisonnement, remis au garde des Sceaux en avril dernier, M. Jean-Luc Warsmann a formulé de nombreuses propositions destinées à renforcer les peines alternatives à l'emprisonnement. Devenu rapporteur du présent projet de loi, il est attaché à y intégrer les peines qu'il avait proposées. Tel est l'objet de la présente section.

Article 68 sexies
(art. 131-5 et 131-25 du code pénal)
Peine de jours-amende

L'article 131-5 du code pénal dispose que lorsqu'un délit est puni d'une peine d'emprisonnement, la juridiction peut prononcer une peine de jours-amende consistant pour le condamné à verser au Trésor une somme dont le montant global résulte de la fixation par le juge d'une contribution quotidienne pendant un certain nombre de jours .

Le montant de chaque jour-amende est déterminé en tenant compte des ressources et des charges du prévenu ; il ne peut excéder 300 euros.

L'article 131-25 du code pénal prévoit qu'en cas de condamnation à une peine de jours-amende, le montant global est exigible à l'expiration du délai correspondant au nombre de jours-amende prononcés.

Le défaut total ou ponctuel du paiement de ce montant entraîne l'incarcération du condamné pour une durée qui correspond à la moitié du nombre de jours-amende impayés . Il est procédé comme en matière de contrainte par corps.

En 2001, les tribunaux ont prononcé 14.265 peines de jours-amende, contre 5.392 en 1996. Dans son rapport précité, M. Jean-Luc Warsmann a constaté que : « La peine de jours-amende souffre des lenteurs d'exécution communes à toute la justice française. Concrètement, le montant global de l'amende due n'est exigible qu'à l'expiration du délai correspondant au nombre de jours-amende prononcé. Un mois au plus tard après la date d'exigibilité du montant des jours-amende ou après l'envoi de l'avertissement lorsque celui-ci est postérieur, le comptable du trésor met le débiteur en demeure de payer par un commandement. Si le paiement total de la somme due n'est pas intervenu dans les cinq jours de la mise en demeure, le comptable du trésor en avise le procureur. Celui-ci prend alors des réquisitions d'incarcération pour la moitié du nombre de jours impayés. »

M. Jean-Luc Warsmann a formulé plusieurs propositions destinées à simplifier l'utilisation des jours-amende. Il a également proposé de clarifier la position de cette peine dans l'échelle des peines :

- en fixant le principe d'un jour d'incarcération à effectuer pour un jour-amende impayé ;

- en élevant le montant maximum du jour-amende à 1.000 euros afin que le prélèvement sur les très hauts revenus reste significatif.

Le présent article tend à mettre en oeuvre ces recommandations. Le 1° tend à modifier l'article 131-5 du code pénal pour porter à 1.000 euros le montant maximum du jour-amende.

Le 2° a pour objet de modifier l'article 131-25, d'une part pour prévoir que le défaut de paiement entraîne l'incarcération pour une durée correspondant au nombre de jours-amende impayés, d'autre part pour remplacer la référence à la contrainte par corps par une référence à la contrainte judiciaire, par coordination avec les dispositions de l'article 73 du présent projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 68 sexies sans modification .

Article 68 septies
(art. 131-8 et 131-22 du code pénal)
Travail d'intérêt général

La peine de travail d'intérêt général (TIG) est définie par l'article 131-8 du code pénal, qui prévoit que lorsqu'un délit est puni d'une peine d'emprisonnement, la juridiction peut prescrire que le condamné accomplira, pour une durée de quarante à deux cent quarante heures, un travail d'intérêt général non rémunéré au profit d'une personne morale de droit public ou d'une association habilitée à mettre en oeuvre des travaux d'intérêt général.

La peine de travail d'intérêt général ne peut être prononcée contre le prévenu qui la refuse ou qui n'est pas présent à l'audience.

L'article 131-22 du code pénal dispose notamment que la juridiction qui prononce la peine de travail d'intérêt général fixe le délai pendant lequel le travail d'intérêt général doit être accompli dans la limite de dix-huit mois.

En 2001, 9.246 peines de travail d'intérêt général ont été prononcées, ce qui représente une baisse de 26,5 % en cinq ans .

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, tend à modifier les dispositions relatives au travail d'intérêt général sur deux points :

- le 1° tend à ramener la durée maximale de la peine de travail d'intérêt général de deux cent quarante à deux cent dix heures ;

- le 2° tend à ramener de dix-huit à douze mois le délai maximal dans lequel un travail d'intérêt général doit être accompli et à permettre à la juridiction qui prononce la peine de fixer l'emprisonnement et l'amende encourus par le condamné en cas d'inexécution de la peine.

Comme l'indique M. Jean-Luc Warsmann, dans son rapport au garde des Sceaux : « Le non-accomplissement d'un TIG est dans le droit actuel un nouveau délit. Le parquet, qui dispose donc de l'opportunité des poursuites, peut convoquer le condamné devant le tribunal correctionnel, généralement trois à six mois plus tard. Ensuite, une fois que le tribunal a prononcé une nouvelle peine pour inexécution du TIG, se pose le problème actuel du délai d'exécution des sanctions... Autant dire que la simplification du dispositif est une demande quasi unanime. »

Votre commission approuve sans réserve la possibilité donnée à la juridiction qui prononce un TIG de fixer la peine que le condamné pourrait avoir à effectuer en cas de non-accomplissement.

Elle est plus réservée sur la réduction à douze mois du délai maximal pour accomplir un TIG. Certes, les sanctions rapidement administrées sont mieux comprises et plus efficaces. Certes, le rapport de M. Jean-Luc Warsmann préconise un grand nombre de mesures techniques, qui devraient permettre une prise en charge plus rapide des condamnés par les services de probation.

Néanmoins, il paraît utile de laisser une souplesse dans l'exécution du TIG, notamment pour que sa réalisation puisse en être étalée dans le temps lorsque le condamné exerce une activité professionnelle. Faute d'une telle souplesse, le juge de l'application des peines risque de recourir plus souvent que nécessaire à la possibilité que lui offre le présent projet de loi de convertir un TIG en jours-amende ou en amende.

Par un amendement , votre commission vous propose de maintenir à dix-huit mois le délai maximal pour accomplir un travail d'intérêt général.

Elle vous propose d'adopter l'article 68 septies ainsi modifié .

Article 68 octies
(art. 132-40 et 132-42 du code pénal)
Sursis avec mise à l'épreuve

Le présent article tend à modifier certaines règles relatives au sursis avec mise à l'épreuve .

Le paragraphe I tend à modifier l'article 132-40 du code pénal qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit notamment que le président de la juridiction qui prononce un emprisonnement assorti du sursis avec mise à l'épreuve avertit le condamné, lorsqu'il est présent, des conséquences qu'entraînerait une condamnation pour une nouvelle infraction commise au cours du délai d'épreuve ou un manquement aux mesures de contrôle et aux obligations particulières qui lui sont imposées.

Le présent paragraphe tend à compléter ce dispositif pour prévoir que le président notifie au condamné, lorsqu'il est présent, les obligations à respecter durant le sursis avec mise à l'épreuve.

Cette disposition pourrait permettre d'éviter une convocation du condamné par le juge de l'application des peines, dès lors que le condamné recevrait à l'avance notification de ses obligations. Il pourrait être convoqué directement par le service d'insertion et de probation.

Un tel dispositif implique naturellement une évolution des méthodes de travail des greffes, afin que des formulaires de notification d'obligations puissent être immédiatement remis aux condamnés.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 132-42, qui prévoit que le délai d'épreuve ne peut être inférieur à dix-huit mois ni supérieur à trois ans, pour ramener à douze mois la durée minimale du délai d'épreuve. De fait, dans l'hypothèse où les délais d'exécution des peines seraient substantiellement réduits, il paraît utile que la juridiction puisse limiter le délai d'épreuve à douze mois, dès lors qu'il ne s'agit que d'une faculté.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 68 octies sans modification .

Article additionnel après l'article 68 octies
(art. 132-45 du code pénal)
Interdiction pour certains condamnés de diffuser
une oeuvre écrite ou audiovisuelle

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel, afin de compléter les obligations qui peuvent être imposées à un condamné dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve. Il s'agit de permettre à la juridiction compétente au moment où elle prononce la mesure de sursis avec mise à l'épreuve d'interdire au condamné de diffuser tout ouvrage ou oeuvre audiovisuelle dont il serait l'auteur et qui porterait sur l'infraction pour laquelle il a été condamné et de prendre des positions publiques à propos de cette infraction.

Ce dispositif ne s'appliquerait qu'en cas d'atteintes volontaires à la vie, d'agressions sexuelles ou d'atteintes sexuelles. Compte tenu des renvois prévus par des amendements de votre commission, cette règle s'appliquerait non seulement au sursis avec mise à l'épreuve mais également à la libération conditionnelle et à la suspension de peine.

Article 68 nonies
(art. 132-54 du code pénal)
Sursis assorti de l'obligation d'accomplir
un travail d'intérêt général

L'article 132-54 du code pénal définit les conditions dans lesquelles une juridiction peut assortir une peine d'emprisonnement avec sursis de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général pour une durée de quarante à deux cent quarante heures.

Le texte prévoit notamment que, dès l'accomplissement de la totalité du travail d'intérêt général, la condamnation est considérée comme non avenue.

Le présent article tend à apporter deux modifications à ces règles.

Le 1° ramène à deux cent dix heures la durée maximale du travail d'intérêt général, conformément aux dispositions prévues par l'article 68 septies à propos du travail d'intérêt général lorsqu'il est prononcé en tant que peine principale.

Le 2° tend à compléter l'article 132-54 pour prévoir que la juridiction peut décider que les obligations imposées au condamné perdureront au-delà de l'accomplissement du travail d'intérêt général, dans un délai qui ne peut excéder douze mois.

Cette disposition pourrait permettre un suivi réel des condamnés dont la situation fait craindre des risques élevés de récidive.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 68 nonies sans modification .

Article 68 decies
(art. 132-57 du code pénal, art. 747-2 du code de procédure pénale)
Transformation d'une peine d'emprisonnement
en sursis assorti de l'obligation d'accomplir
un travail d'intérêt général

L'article 132-57 du code pénal permet à toute juridiction ayant prononcé une condamnation comportant un emprisonnement ferme de six mois au plus, lorsque cette condamnation n'est plus susceptible de faire l'objet d'une voie de recours, d'ordonner qu'il sera sursis à l'exécution de cette peine et que le condamné accomplira un travail d'intérêt général.

Le paragraphe I , dans un souci de simplification et d'efficacité de l'exécution des peines, tend à apporter plusieurs modifications à l'article 132-57.

En premier lieu, il a pour objet de transférer au juge de l'application des peines la possibilité, aujourd'hui reconnue à la juridiction de jugement, de convertir une peine ferme d'emprisonnement en un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général.

En deuxième lieu, il tend à compléter l'article 132-57 pour permettre au juge de l'application des peines de transformer la peine ferme d'emprisonnement de six mois au plus en une peine de jours-amende.

En troisième lieu, il tend à opérer une coordination en limitant à deux cent dix heures la durée du travail d'intérêt général pouvant être ordonné.

Ces mesures méritent d'être approuvées. Le retour devant la juridiction de jugement pour des questions liées à l'inexécution des peines constitue une lourdeur incontestable qui contribue à l'inexécution des peines.

Le paragraphe II tend à prendre en compte les modifications prévues par le paragraphe I dans l'article 747-2 du code de procédure pénale, qui définit la procédure de mise en oeuvre des dispositions de l'article 132-57 du code pénal. Il s'agit de remplacer la saisine de la juridiction de jugement par celle du juge de l'application des peines.

Votre commission vous soumet deux amendements de coordination avec les décisions prises avant l'article 68 en ce qui concerne l'organisation des juridictions de l'application des peines.

Elle vous propose d'adopter l'article 68 decies ainsi modifié .

Article 68 undecies
(art. 132-65 du code pénal)
Ajournement avec mise à l'épreuve

L'article 132-63 permet à une juridiction, lorsque le prévenu est présent à l'audience, d'ajourner le prononcé de la peine en plaçant l'intéressé sous le régime de la mise à l'épreuve pendant un délai qui ne peut être supérieur à un an.

L'article 132-65 dispose qu'à l'audience de renvoi, la juridiction peut, en tenant compte de la conduite du coupable au cours du délai d'épreuve, soit le dispenser de peine, soit prononcer la peine prévue par la loi, soit ajourner une nouvelle fois le prononcé de la peine.

Le présent article tend à compléter ces dispositions pour permettre au juge de l'application des peines, trente jours avant l'audience de renvoi, de prononcer lui-même la dispense de peine, avec l'accord du procureur de la République, à l'issue d'un débat contradictoire.

Une telle simplification, en évitant une deuxième audience, est susceptible d'encourager le recours à la mesure d'ajournement de la peine assortie d'une mise à l'épreuve.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination et vous propose d'adopter l'article 68 undecies ainsi modifié .

Article 68 duodecies
(art. 733-2 et 733-3 nouveaux du code de procédure pénale)
Procédure de mise en oeuvre des travaux d'intérêt général

Le présent article tend à insérer dans le livre du code de procédure pénale consacré à l'exécution des peines un titre III bis relatif au travail d'intérêt général et composé de deux articles 733-2 et 733-3.

Le texte proposé pour l' article 733-2 du code de procédure pénale dispose que le juge de l'application des peines peut, d'office, à la demande de l'intéressé ou sur réquisitions du procureur de la République, ordonner par décision motivée de substituer au travail d'intérêt général une peine d'amende ou de jours-amende, la décision devant être prise à l'issue d'un débat contradictoire.

Cette proposition est directement issue du rapport précité remis par M. Jean-Luc Warsmann au garde des Sceaux :

« La logique du TIG est claire : plutôt que d'enlever la liberté par une courte peine par exemple d'un mois, la société demande au condamné de lui donner gratuitement du temps de travail, dans un but d'intérêt général.

« Si les jours-amende ôtent une part du niveau de vie sur une période déterminée, le TIG, lui, prive de temps libre. Nos amis suisses ont poussé jusqu'au bout cette logique en posant qu'un jour de détention équivaut à quatre heures de TIG pour une personne occupant par ailleurs un emploi à temps plein. Leur idée est bien d'enlever le temps libre du condamné et de le lui faire consacrer à une oeuvre d'intérêt général.

« Sans aller jusqu'à cette logique, il conviendrait de donner au juge de l'application des peines la possibilité de convertir un travail d'intérêt général en jours-amende ou en amende. L'intérêt de cette souplesse est évident lorsqu'il apparaît que le TIG ne peut matériellement être exécuté. Il permet également d'adapter la sanction à une évolution de la situation de la personne. »

Si votre commission approuve pleinement la volonté de l'Assemblée nationale de simplifier les procédures pour permettre l'exécution effective des peines, elle s'inquiète néanmoins de l'affaiblissement dans notre procédure pénale du rôle de la juridiction de jugement, qui intervient après que de nombreuses mesures, parfois privatives de liberté, ont été prises pendant la phase préparatoire et qui peut voir ses décisions modifiées sans qu'elle intervienne .

Par un amendement , votre commission vous propose de supprimer la possibilité de convertir un TIG en amende tout en maintenant la conversion possible en jours-amende, afin que l'échelle des peines soit mieux respectée. Elle vous soumet en outre un amendement de coordination.

Le texte proposé pour l' article 733-3 du code de procédure pénale tend à permettre au juge de l'application des peines, d'office ou sur réquisitions du procureur de la République, d'ordonner la mise à exécution de l'emprisonnement et de l'amende prononcés par la juridiction de jugement en cas d'inexécution d'un travail d'intérêt général.

Votre commission approuve pleinement ce dispositif, qui peut garantir une sanction plus effective et plus rapide du non-respect de ses obligations par un condamné. Elle vous soumet deux amendements de coordination. Elle vous soumet en outre un amendement modifiant les numérotations proposées pour tenir compte de l'abrogation de l'article 733-1, proposée dans un article additionnel avant l'article 68.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 68 duodecies ainsi modifié .

Article 68 terdecies
(art. 741, 741-1, 741-2, 741-3, 742, 743 et 744
du code de procédure pénale)
Non-respect des obligations d'un sursis
avec mise à l'épreuve

Le présent article tend à modifier les règles applicables lorsqu'un condamné ne respecte pas les obligations d'un sursis avec mise à l'épreuve.

Votre commission vous propose, par un amendement , d'insérer un paragraphe additionnel avant le paragraphe I du présent article pour opérer une coordination dans l'article 132-47 du code pénal, relatif à la révocation du sursis avec mise à l'épreuve.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 741, qui oblige le condamné à une peine d'emprisonnement assorti d'un sursis avec mise à l'épreuve à se présenter devant le juge de l'application des peines chaque fois qu'il en est requis. Le texte précise que s'il ne défère pas à la convocation, le juge de l'application des peines peut ordonner qu'il sera conduit devant lui par la force, si le condamné se trouve dans son ressort. Dans le cas contraire, il doit saisir le juge de l'application des peines du ressort dans lequel se trouve le condamné pour qu'il se le fasse présenter.

Le présent paragraphe tend à modifier ces dispositions en permettant au juge de l'application des peines de délivrer mandat d'amener ou mandat d'arrêt si le condamné est en fuite. Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Le paragraphe II tend à abroger les articles 741-1, 741-2 et 741-3 du code de procédure pénale, relatifs aux conséquences du non-respect par un condamné de ses obligations. Ces articles prévoient dans un tel cas la saisine du tribunal correctionnel. Or, le présent article tend à donner compétence au juge de l'application des peines en matière de révocation des sursis avec mise à l'épreuve.

Le paragraphe III tend à modifier l'article 742 du code de procédure pénale, qui permet au tribunal correctionnel de prolonger le délai d'épreuve lorsqu'un condamné ne respecte pas ses obligations ou a commis une infraction suivie d'une condamnation à l'occasion de laquelle la révocation de sursis n'a pas été prononcée, ou s'est soustrait à l'obligation de contribuer aux charges familiales.

Le texte proposé pour l'article 742 modifie entièrement les règles applicables en cas de non-respect des obligations d'un sursis avec mise à l'épreuve en donnant compétence, dans les cas qui viennent d'être énumérés, au juge de l'application des peines pour ordonner la prolongation du délai d'épreuve ou révoquer le sursis.

La décision serait prise en chambre du conseil à l'issue d'un débat contradictoire. Le texte précise que ces dispositions sont applicables même lorsque le délai d'épreuve a expiré, si le motif de la prolongation du délai ou de la révocation s'est produit pendant le délai d'épreuve.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination et un amendement de précision.

Le paragraphe IV tend à réécrire les articles 743 et 744 du code de procédure pénale, qui définissent actuellement les règles applicables par le tribunal correctionnel en matière de sursis avec mise à l'épreuve.

Le texte proposé pour l'article 743 dispose que lorsque le juge de l'application des peines prolonge le délai d'épreuve, ce délai ne peut au total être supérieur à trois années.

Le texte proposé pour l'article 744 du code de procédure pénale permet au juge de l'application des peines, et non plus au tribunal correctionnel, de déclarer la condamnation non avenue si le condamné satisfait aux mesures de contrôle et d'aide et aux obligations particulières qui lui sont imposées et si son reclassement paraît acquis. La décision serait prise à l'issue d'un débat contradictoire.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination, ainsi qu'un amendement complétant le présent article pour procéder à des coordinations dans d'autres articles du code de procédure pénale.

Elle vous propose d'adopter l'article 68 terdecies ainsi modifié .

Article 68 quaterdecies
(art. 747-1-1 nouveau du code de procédure pénale)
Substitution d'une peine de jour-amende à un sursis assorti
de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général

Le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 747-1-1, afin de permettre au juge de l'application des peines, d'office, à la demande de l'intéressé ou sur réquisitions du procureur de la République, de substituer au sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général une peine de jours-amende. La décision serait prise à l'issue d'un débat contradictoire.

Ce dispositif, comme les précédents, répond à une volonté de voir effectivement effectuées les peines, éventuellement en les transformant lorsque leur exécution s'avère matériellement impossible.

Contrairement à l'article 68 decies qui prévoyait la possibilité de transformer un travail d'intérêt général en amende, le présent article ne prévoit la transformation du sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général qu'en jours-amende, solution qui paraît préférable à votre commission. Elle vous soumet un amendement de coordination.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 68 quaterdecies ainsi modifié .

SECTION 1 TER
Dispositions relatives au placement en semi-liberté
ou sous surveillance électronique

L'ensemble des articles figurant dans la présente section y ont été insérés par l'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois.

Article 68 quindecies
(art. 132-25 du code pénal, art. 723-2 du code de procédure pénale)
Semi-liberté et placement sous surveillance électronique

Le présent article tend à modifier les règles relatives à la semi-liberté afin d'encourager le développement de ces modalités d'aménagement de peines.

Le paragraphe I tend à compléter les dispositions de l'article 132-25 du code pénal, qui permet à la juridiction de jugement de décider, sous certaines conditions, que les peines d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à un an seront exécutées sous le régime de la semi-liberté, pour prévoir la possibilité d'ordonner l'exécution provisoire de la mesure de semi-liberté lorsque le prévenu a été placé en détention provisoire dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate.

La peine pourrait être ainsi immédiatement aménagée, sans intervention du juge de l'application des peines.

Le paragraphe II tend à proposer une nouvelle rédaction de l'article 723-2 du code de procédure pénale, qui définit les conditions dans lesquelles le tribunal correctionnel peut mettre fin à la mesure de semi-liberté si le condamné ne satisfait pas aux obligations qui lui sont imposées.

Conformément à la solution retenue par les articles précédents en matière de travail d'intérêt général, de sursis avec mise à l'épreuve et de sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, le texte proposé pour l'article 723-2 attribue au juge de l'application des peines le pouvoir de fixer les modalités d'exécution de la semi-liberté par ordonnance non susceptible de recours dans un délai d'un mois et de retirer au condamné le bénéfice de la semi-liberté si les conditions qui ont permis au tribunal de décider que la peine serait subie sous le régime de la semi-liberté ne sont pas remplies, si le condamné ne satisfait pas aux obligations qui lui sont imposées ou s'il fait preuve de mauvaise conduite.

Le délai d'un mois donné au juge de l'application des peines pour fixer les modalités d'exécution de la semi-liberté est particulièrement rigoureux. Il conviendra que le nombre de places de semi-liberté soit augmenté dans de fortes proportions au cours des prochaines années.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Le paragraphe III tend à insérer dans le code pénal, parmi les dispositions relatives aux modes de personnalisation des peines, une nouvelle section consacrée au placement sous surveillance électronique, qui comprendrait deux articles 132-26-1 et 132-26-2.

De fait, l'ensemble des dispositions relatives au placement sous surveillance électronique figurent actuellement dans le code de procédure pénale, alors que les modes de personnalisation des peines sont en principe définis dans le code pénal.

Le texte proposé pour l' article 132-26-1 du code pénal reprend pour partie des dispositions qui figurent aujourd'hui à l'article 723-7 du code de procédure pénale, en prévoyant que la juridiction de jugement -actuellement, seul le juge de l'application des peines peut le faire- peut décider que la peine d'emprisonnement sera exécutée sous le régime du placement sous surveillance électronique lorsque la peine est inférieure ou égale à un an d'emprisonnement et que le condamné justifie soit de l'exercice d'une activité professionnelle, soit de son inscription à un enseignement ou une formation professionnelle ou encore d'un stage ou d'un emploi temporaire en vue de son insertion sociale, soit de sa participation essentielle à la vie de famille, soit de la nécessité de subir un traitement médical.

Par un amendement , votre commission vous propose de remplacer l'inscription à un enseignement par l'assiduité à un enseignement. Le texte actuel de l'article 723-7 évoque, en effet, le suivi d'une formation et non seulement l'inscription à cette formation .

Comme actuellement, le placement sous surveillance électronique d'un mineur non émancipé ne pourrait être ordonné qu'avec l'accord des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale.

Comme en matière de semi-liberté, le texte prévoit que si la personne a été placée en détention provisoire dans le cadre d'une procédure de comparution immédiate, la juridiction de jugement peut ordonner l'exécution provisoire du placement sous surveillance électronique.

Par un amendement , votre commission vous propose de compléter ces dispositions pour prévoir, comme actuellement, que la décision de placement sous surveillance électronique ne peut être prise qu'avec l'accord du prévenu, donné en présence de son avocat.

Le texte proposé pour l' article 132-26-2 du code pénal reprend des dispositions qui figurent actuellement dans le code de procédure pénale pour prévoir l'interdiction pour le condamné de s'absenter de son domicile ou de tout autre lieu désigné par le juge de l'application des peines en dehors des périodes fixées par celui-ci. Le texte proposé reprend les dispositions de l'article 723-7 du code de procédure pénale en ce qui concerne les motifs qui peuvent justifier que le condamné s'absente de son domicile.

Le paragraphe IV tend à modifier l'article 723-7 du code de procédure pénale, qui définit actuellement les conditions et les modalités du placement sous surveillance électronique, pour tenir compte de l'insertion dans le code pénal d'une partie de ces dispositions.

Il tend en outre à insérer dans le code de procédure pénale un nouvel article 723-7-1, pour permettre au juge de l'application des peines de retirer lui-même le bénéfice du placement sous surveillance électronique, lorsqu'il a été accordé par la juridiction de jugement à un condamné qui ne remplit plus les conditions requises, qui fait preuve de mauvaise conduite, qui refuse une modification nécessaire des conditions d'exécution ou qui en fait la demande. Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Le paragraphe V tend à modifier l'article 723-13 du code de procédure pénale, qui définit les conditions dans lesquelles le juge de l'application des peines peut retirer à un condamné le bénéfice du placement sous surveillance électronique lorsqu'il a lui-même ordonné cette mesure, afin d'opérer des coordinations avec les dispositions du projet de loi juridictionnalisant l'ensemble des décisions du juge de l'application des peines. Votre commission vous soumet deux amendements de coordination.

Elle vous propose d'adopter l'article 68 quindecies ainsi modifié .

Article 68 sexdecies
(art. 712-1 à 712-5 nouveaux du code de procédure pénale)
Rôle et prérogatives du juge de l'application des peines

Le présent article tend à insérer cinq nouveaux articles 712-1 à 712-5 dans le code de procédure pénale, afin de rassembler des dispositions éparses relatives au juge de l'application des peines pour que ses missions et ses prérogatives soient mieux définies.

Votre commission, ayant proposé d'insérer ces dispositions en les complétant avant l'article 68 du projet de loi, vous propose la suppression du présent article.

Article 68 septdecies
(art. 712-6 à 712-14 nouveaux du code de procédure pénale)
Exécution des peines d'emprisonnement
d'une durée inférieure ou égale à un an

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à inscrire dans la loi les conditions dans lesquelles les courtes peines d'emprisonnement peuvent être aménagées .

Actuellement, les conditions d'aménagement des courtes peines d'emprisonnement sont définies par l'article D. 49-1 du code de procédure pénale, de nature réglementaire.

L'article D. 49-1 dispose que, préalablement à la mise à exécution, à l'encontre d'une personne non incarcérée, d'une condamnation à une peine égale ou inférieure à un an d'emprisonnement, ou pour laquelle la durée de la détention restant à subir est inférieure ou égale à un an, le ministère public communique au juge de l'application des peines un extrait de la décision accompagné de toutes informations utiles.

Le juge de l'application des peines peut alors proposer des mesures d'aménagement de peine.

A défaut de décision du juge de l'application des peines dans les trois mois suivant la communication de l'extrait de la décision et même avant ce terme en cas d'urgence, la peine peut être ramenée à exécution par le ministère public.

L'Assemblée nationale a proposé d'inscrire dans la loi ce dispositif tout en le modifiant substantiellement et en le complétant, conformément aux conclusions du rapport de M. Jean-Luc Warsmann sur l'exécution des courtes peines d'emprisonnement, précédemment cité.

Dans ce rapport, M. Jean-Luc Warsmann a constaté que l'exécution des courtes peines d'emprisonnement était aléatoire, inefficace et coûteuse, écrivant notamment : « Il faut donc abandonner l'idée trop répandue selon laquelle l'aménagement des modalités d'exécution de la peine serait un cadeau fait au condamné : bien au contraire, l'intérêt de la société commande de s'assurer de sa réinsertion pour lutter contre la récidive et de donner la priorité à sa possibilité de travailler, notamment afin d'assurer l'indemnisation des victimes . »

Afin d'améliorer la situation, M. Warsmann a formulé plusieurs propositions, parmi lesquelles la possibilité pour la juridiction de jugement de prononcer elle-même un aménagement de la peine (semi-liberté, placement sous surveillance électronique...).

S'agissant de la procédure d'aménagement de peine par le juge de l'application des peines, il a proposé que les procédures soient accélérées, notamment par la remise au condamné d'une convocation dès l'audience de jugement et la limitation du délai donné au juge de l'application des peines pour prendre une décision.

Le présent article tend à prendre en compte ces recommandations. Il pose un principe selon lequel « toute peine inférieure ou égale à un an d'emprisonnement ou pour laquelle la durée de la détention restant à subir est inférieure ou égale à un an, concernant une personne laissée libre à l'issue de son jugement, doit s'exécuter suivant des modalités permettant d'assurer la réinsertion du condamné et la prévention de la récidive .

« Sauf en cas de trouble manifeste à l'ordre public, d'un risque établi de danger grave pour les personnes ou les biens, ou si le condamné ne satisfait pas aux exigences imposées par le juge de l'application des peines conformément à la loi, l'exécution des peines (...) doit être accomplie de manière individualisée, notamment par l'octroi du bénéfice de la semi-liberté, du placement à l'extérieur ou du placement sous surveillance électronique . »

Afin de mettre en oeuvre ces principes, le texte prévoit que la juridiction de jugement délivre au condamné une convocation devant le juge de l'application des peines à une date fixée entre le onzième et le trentième jour de la remise de l'avis. Si la personne ne se présentait pas à la convocation, le ministère public mettrait à exécution la peine.

Le juge de l'application des peines disposerait d'un délai de quatre mois pour rendre une décision d'aménagement après un débat contradictoire. La décision serait susceptible d'appel. Le ministère public ne pourrait mettre à exécution la peine qu'en cas d'urgence motivée par un risque établi, en raison de la survenance d'un fait nouveau, de danger pour les personnes ou les biens ou par l'incarcération de la personne dans le cadre d'une autre procédure. Le condamné pourrait alors demander une mesure d'individualisation. Le juge de l'application des peines devrait organiser un débat contradictoire dans un délai de quinze jours.

Par un amendement , votre commission vous propose une réécriture de cet article. Tout en approuvant sans réserve l'orientation choisie, votre commission considère que la rédaction proposée est susceptible de poser certaines difficultés.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale semble poser en principe presque intangible l'interdiction d'incarcérer le condamné laissé libre à l'issue de son jugement lorsqu'a été prononcée une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à un an.

Or, il convient de rappeler que le tribunal correctionnel ne peut décerner mandat de dépôt à l'audience lorsque la peine prononcée est d'une durée inférieure à un an et que le prévenu comparaît libre. Dans ces conditions, un texte excluant presque systématiquement l'incarcération de ces condamnés pourrait présenter l'effet pervers de conduire les juridictions à prononcer des peines d'une durée supérieure à un an, ce qui serait radicalement contraire à l'objectif recherché .

Par ailleurs, le texte adopté par l'Assemblée nationale pose le principe d'une remise obligatoire au condamné de sa convocation devant le juge de l'application des peines le jour de l'audience. Une telle évolution est éminemment souhaitable, mais elle implique une évolution profonde du fonctionnement des juridictions et notamment des greffes. Dans ces conditions, il paraît préférable à ce stade de ne pas rendre ce système obligatoire.

Compte tenu de ces observations, votre commission vous propose, par un amendement , une nouvelle rédaction de l'article 68 septdecies, reprenant l'essentiel des dispositions proposées par l'Assemblée nationale tout en les aménageant.

Elle propose tout d'abord de rétablir l'article 474 du code de procédure pénale pour prévoir la faculté pour le tribunal correctionnel de remettre au condamné le jour de l'audience une convocation devant le juge de l'application des peines, sans toutefois rendre ce dispositif obligatoire.

Elle propose par ailleurs d'insérer les dispositions relatives à l'aménagement des courtes peines d'emprisonnement dans une nouvelle section du code de procédure pénale située après les dispositions relatives au placement sous surveillance électronique et qui comporterait cinq nouveaux articles 723-15 à 723-19.

Le texte proposé par votre commission pour l' article 723-15 du code de procédure pénale dispose qu'en cas de condamnation à une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure à un an, le ministère public communique au juge de l'application des peines un extrait de la décision, afin de déterminer les modalités d'exécution de la peine.

Celui-ci convoquerait alors la personne. Le texte proposé par votre commission ménage la possibilité que le tribunal correctionnel notifie la convocation le jour du jugement, sans cependant rendre cette procédure obligatoire.

Comme dans le texte prévu par l'Assemblée nationale, le juge de l'application des peines disposerait d'un délai de quatre mois pour statuer. Le ministère public pourrait mettre à exécution la peine à défaut de décision du juge de l'application des peines.

Le texte proposé par votre commission pour l' article 723-16 du code de procédure pénale permet, comme le texte de l'Assemblée nationale, de mettre à exécution la peine en cas d'urgence motivée soit par un risque de danger pour les personnes ou les biens établi par la survenance d'un fait nouveau soit par l'incarcération de la personne dans le cadre d'une autre procédure.

Le texte proposé par votre commission pour l' article 723-17 du code de procédure pénale prévoit que lorsqu'une condamnation n'a pas été mise à exécution dans le délai d'un an, le condamné peut saisir le juge de l'application des peines afin de bénéficier d'une mesure d'aménagement. Cette saisine suspendrait la possibilité pour le parquet de mettre à exécution la peine, sauf en cas d'urgence.

Le texte proposé par votre commission pour l' article 723-18 du code de procédure pénale prévoit que lorsque le condamné doit exécuter un reliquat de peine inférieur ou égal aux réductions de peine susceptibles d'être octroyées, le juge de l'application des peines peut accorder cette mesure sans qu'il soit nécessaire que la personne soit à nouveau écrouée.

Enfin, le texte proposé par votre commission pour l' article 723-19 du code de procédure pénale dispose qu'un décret détermine, en tant que de besoin, les conditions d'application de la nouvelle section du code de procédure pénale.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 68 septdecies ainsi modifié .

SECTION 2
Dispositions relatives à l'exécution
des peines privatives de liberté
Article 69
(art. 710 et 711 du code de procédure pénale)
Simplification du régime de la confusion
des peines et des modalités de présentation du détenu

Aux termes de l'article 710 du code de procédure pénale, « tous incidents contentieux relatifs à l'exécution sont portés devant le tribunal ou la cour qui a prononcé la sentence . »

Dans ces conditions, les personnes condamnées à plusieurs reprises pour différentes infractions et qui sont incarcérées dans un établissement pénitentiaire d'un ressort différent de celui de la juridiction qui a prononcé la peine doivent être extraites de l'établissement pénitentiaire lorsqu'elles forment des demandes de confusion de peines . Ces extractions mobilisent d'importantes forces de police ou de gendarmerie pour assurer les escortes. Le présent article tend à remédier à cette difficulté.

Le paragraphe I tend à compléter l'article 710 pour modifier les règles de compétence en matière de contentieux de l'exécution, afin que soient également compétentes les juridictions du ressort dans lequel le condamné est détenu . Le ministère public de la juridiction destinataire d'une demande de confusion de peines déposée par une personne détenue pourrait adresser cette requête à la juridiction du lieu de détention.

Le paragraphe II tend à compléter l'article 711 du code de procédure pénale qui, dans sa rédaction actuelle, prévoit que le tribunal ou la cour, sur requête du ministère public ou de la partie intéressée, statue en chambre du conseil après avoir entendu le ministère public, le conseil de la partie s'il le demande et, s'il échet, la partie elle-même, sous réserve des dispositions permettant une audition d'une personne détenue au sein de l'établissement pénitentiaire.

Le présent paragraphe tend à compléter ces dispositions pour prévoir que lorsque le requérant est détenu, sa comparution devant la juridiction n'est de droit que s'il en fait la demande expresse dans sa requête. Dans cette hypothèse, sa comparution pourrait intervenir devant la juridiction compétente du ressort de l'établissement pénitentiaire.

Les mesures proposées constituent des simplifications bienvenues.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 69 sans modification .

Article 69 bis
(art. 716-5 nouveau du code de procédure pénale)
Rétention des personnes arrêtées en vertu
d'un extrait de jugement ou d'arrêt portant condamnation
à une peine d'emprisonnement ou de réclusion

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Gérard Léonard, tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 716-5 pour permettre de retenir vingt-quatre heures dans un local de police ou de gendarmerie une personne arrêtée en vertu d'un extrait de jugement ou d'arrêt portant condamnation à une peine d'emprisonnement ou de réclusion.

La personne pourrait bénéficier du droit de faire prévenir un proche, d'être examinée par un médecin et de s'entretenir avec un avocat.

Le texte prévoit qu'à l'issue de la mesure, le procureur de la République peut se faire présenter la personne s'il envisage de ramener la peine à exécution. Il pourrait également demander à un officier ou un agent de police judiciaire d'aviser la personne qu'elle est convoquée devant le juge de l'application des peines, ou ordonner qu'elle soit conduite devant ce magistrat, si celui-ci devait être saisi pour décider des modalités d'exécution de la peine.

Le présent article tend à mettre fin à une situation d'incertitude. Actuellement, lorsqu'une personne est arrêtée en vertu d'un extrait de jugement ou d'arrêt, la pratique, se fondant sur l'article 307 du décret du 20 mai 1903 portant règlement sur l'organisation et le service de la gendarmerie, admet qu'il est possible de retenir la personne pendant un délai de vingt-quatre heures. Or, cette disposition de nature réglementaire ne concerne que la gendarmerie. Par ailleurs, cette rétention ne s'accompagne d'aucun droit pour la personne condamnée. Le présent article tend donc à régulariser et à encadrer une pratique dont l'assise juridique paraissait incertaine.

Votre commission vous soumet un amendement destiné à préciser que le procureur est prévenu « dès le début » de la mesure de rétention et non « dans les meilleurs délais » « sauf circonstances insurmontables ».

Elle vous propose d'adopter l'article 69 bis ainsi modifié .

Article 69 ter
(art. 720-4 du code de procédure pénale)
Conditions de modification de la durée
de la période de sûreté

En vertu de l'article 720-4 du code de procédure pénale, lorsqu'un condamné présente des gages sérieux de réadaptation sociale , le juge de l'application des peines peut, à titre exceptionnel, saisir la juridiction du lieu de détention, de même degré que celle qui a prononcé la condamnation, pour que la durée de la période de sûreté soit réduite ou pour qu'il soit mis fin à l'interdiction de prononcer certaines mesures d'aménagement de peine pendant la période de sûreté.

Lorsque la condamnation a été prononcée par une cour d'assises, la juridiction compétente est la chambre de l'instruction dans le ressort de laquelle le condamné est détenu.

Lorsque la cour d'assises a porté à trente ans la durée de la période de sûreté, la chambre de l'instruction ne peut être saisie qu'après que le condamné a subi une incarcération d'une durée au moins égale aux deux tiers de la période de sûreté (soit vingt ans). Dans le cas où la cour d'assises a décidé qu'aucune mesure d'aménagement de peine ne pouvait être accordée au condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, le juge de l'application des peines peut, à l'expiration d'une période de trente ans suivant la condamnation, saisir un collège de trois experts médicaux pour se prononcer sur l'état de dangerosité du condamné. Une commission composée de magistrats de la Cour de cassation détermine alors s'il y a lieu de mettre fin à la décision de la cour d'assises interdisant les aménagements de peine.

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier l'article 720-4 du code de procédure pénale pour attribuer le pouvoir de remettre en cause les décisions des juridictions relatives aux périodes de sûreté à la juridiction régionale de la libération conditionnelle , déjà compétente pour statuer sur les demandes de libération conditionnelle concernant les condamnés à de longues peines. La juridiction statuerait par décision motivée rendue après un débat contradictoire.

Une telle évolution mérite d'être approuvée. Il paraît en effet préférable que des décisions de cette nature soient prises par une juridiction spécialisée en matière d'application des peines.

Toutefois, le texte proposé n'apparaît pas pleinement satisfaisant. Sa rédaction laisse à penser que tout aménagement de peine est interdit aux condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité pendant une période de trente ans, alors que cette règle ne vaut que lorsque la cour d'assises a expressément interdit toute mesure d'aménagement.

Votre commission vous soumet un amendement de réécriture tendant à :

- maintenir les règles actuelles en ce qui concerne le moment où les périodes de sûreté décidées par les juridictions de jugement peuvent être remises en cause ;

- opérer des coordinations avec les modifications proposées avant l'article 68 et tendant notamment à faire de la juridiction régionale de la libération conditionnelle un tribunal de l'application des peines ;

- prévoir une expertise médicale dans tous les cas où la remise en cause d'une période de sûreté prononcée par une cour d'assises est demandée ;

- ne pas exiger que la saisine du tribunal de l'application des peines soit toujours effectuée par le juge de l'application des peines. Compte tenu des délais fixés par la loi, il ne paraît pas anormal que le tribunal puisse éventuellement être saisi par le condamné lui-même

Elle vous propose d'adopter l'article 69 ter ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 69 ter
(art. 720-1-1 du code de procédure pénale)
Suspension de peine pour raisons médicales

Par un article additionnel, votre commission propose d'apporter plusieurs modifications à l'article 720-1-1 du code de procédure pénale, relatif aux suspensions de peine pour raisons médicales.

Rappelons que cet article, inséré dans le code de procédure pénale par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, prévoit qu'une suspension de peine peut être ordonnée, quelle que soit la nature de la peine ou la durée de la peine restant à subir, pour les condamnés dont il est établi qu'ils sont atteints d'une pathologie engageant le pronostic vital ou que leur état de santé est incompatible avec le maintien en détention.

Votre commission vous propose tout d'abord d'opérer dans cet article des coordinations avec des amendements précédents modifiant l'organisation du code de procédure pénale en ce qui concerne les juridictions chargées de l'application des peines.

Elle propose en outre de prévoir une exception à la possibilité d'accorder une suspension de peine lorsqu'il existe un risque grave de renouvellement de l'infraction. Dans certains cas, une personne très diminuée physiquement peut reprendre ses activités criminelles si elle fait l'objet d'une libération. Tel est en particulier le cas du dirigeant d'une organisation criminelle. Il paraît donc opportun d'interdire la suspension de peine dans une telle situation.

Enfin, votre commission vous propose de prévoir explicitement dans l'article 720-1-1 que la suspension de peine peut être assortie d'obligations devant être respectées par le condamné. Actuellement, ces obligations sont mentionnées dans un décret, ce qui n'apparaît pas satisfaisant. En ce qui concerne la liste des obligations qui pourraient être imposées au condamné, votre commission vous propose de renvoyer aux obligations prévues par les articles 132-44 et 132-45 à propos du sursis avec mise à l'épreuve.

Article 69 quater
(art. 721 et 721-1 du code de procédure pénale)
Instauration d'un crédit de réduction de peine

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, tend à modifier les dispositions du code de procédure pénale relatives aux réductions de peine .

Rappelons que l'article 721 du code de procédure pénale prévoit qu'une réduction de peine peut être accordée aux condamnés détenus en exécution d'une ou plusieurs peines privatives de liberté, s'ils ont donné des preuves suffisantes de bonne conduite . La réduction est accordée par le juge de l'application des peines, après avis de la commission d'application des peines, sans qu'elle puisse excéder trois mois par an et sept jours par mois .

La réduction de peine est prononcée en une seule fois si l'incarcération est inférieure à une année et par fractions annuelles dans le cas contraire. Dans l'année suivant son octroi, et en cas de mauvaise conduite du condamné en détention, la réduction de peine peut être rapportée en tout ou en partie par le juge de l'application des peines après avis de la commission de l'application des peines.

L'article 721-1 prévoit pour sa part qu'après un an de détention, une réduction supplémentaire de peine peut être accordée aux condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale , notamment en passant avec succès un examen scolaire, universitaire ou professionnel traduisant l'acquisition de connaissances nouvelles, en justifiant de progrès réels dans le cadre d'un enseignement ou d'une formation ou en s'efforçant d'indemniser les victimes.

La réduction ne peut excéder, si le condamné est en état de récidive légale, un mois par année d'incarcération ou deux jours par mois lorsque la durée d'incarcération restant à subir est inférieure à un année. Si le condamné n'est pas en état de récidive légale, ces limites sont respectivement portées à deux mois et à quatre jours.

Le présent article tend à modifier profondément les règles relatives aux réductions de peine accordées en cas de bonne conduite.

En pratique, sauf exception, ces réductions de peine sont actuellement accordées à tous les détenus. Ceux-ci intègrent ces réductions de peine, dès leur entrée en prison, pour calculer la durée prévisible de leur incarcération.

Dans ces conditions, dans son rapport sur les peines alternatives à la détention, les modalités d'exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison, M. Jean-Luc Warsmann a proposé de modifier le régime des réductions de peines : « Les réductions de peine ordinaires, accordées lorsque le condamné a un bon comportement en détention, doivent faire l'objet d'un crédit de peine, et être préemptées au moment de l'incarcération et de la mise à exécution de la peine : ce système a l'avantage de la simplicité ; il facilite le travail du greffe pénitentiaire, et permet d'évaluer immédiatement la durée prévisible de la peine pour envisager les modalités de son exécution .

« En outre, il est beaucoup plus pédagogique ; en effet, en cas d'incident disciplinaire justifiant un retrait de réduction de peine, un débat contradictoire sera organisé à la demande du chef d'établissement et le condamné pourra se voir sanctionné par un recul de sa date prévisible de sortie . »

L'idée d'instaurer un crédit de réduction de peine n'est pas neuve. Elle avait déjà été proposée en 1994 par une commission d'étude pour la prévention de la récidive des criminels.

Extrait du rapport de la commission d'étude
pour la prévention de la récidive des criminels

« L'adoption du système du crédit de peine est réclamé en France par un nombre non négligeable de personnes (...).

« Ce système est directement inspiré d'une pratique anglaise : « la rémission », solution consistant à prévoir dès la condamnation une diminution automatique du temps d'incarcération, temps qui ne peut être réduit ou supprimé qu'au cas de mauvais comportement du détenu en détention. La rémission anglaise provient quant à elle du « ticket of leave » ou billet de libération institué au siècle dernier au profit des condamnés transportés en Australie (...).

« A dire vrai, l'institution du crédit de peine a suscité d'importantes réserves parmi les membres de la commission.

« Il apparaît en effet que l'adoption de ce système consacre et pérennise la pratique pervertie des réductions de peine, ce qui conduit à s'interroger sur le bien fondé d'une réforme qui entérinerait un état de fait peu satisfaisant .

« Comme cela a été souligné, " l'attribution partielle des réductions de peines vaut mieux qu'un retrait partiel : le fait de ne relever dans les décisions que les éléments négatifs du comportement (en ne procédant que par retrait en cas de mauvaise conduite) n'est pas de nature à inciter les détenus à adopter un comportement positif (...). "

« De plus, le crédit de peine est perçu comme portant immédiatement atteinte à l'autorité de la chose jugée puisqu'aussitôt prononcée, la décision de condamnation se trouve amputée d'une partie de ses effets. Il y a lieu de craindre (cela s'est produit en Angleterre) une augmentation de la durée des peines, notamment de celles prononcées par les cours d'assises, pour compenser l'érosion résultant du crédit de peine accordé.

« Pourtant, bien que consciente des aspects négatifs du crédit de peine, la commission estime qu'un tel système pourrait être adopté, à la condition cependant d'être assorti d'un suivi post-pénal .

« Dans ce cas, la peine prononcée (...) serait immédiatement créditée d'un temps égal à celui résultant des réductions de peine ordinaires actuellement prévues par l'article 721 du code de procédure pénale. Ainsi, au jour de la condamnation, le condamné saurait exactement le temps de réclusion à accomplir jusqu'à sa libération.

« Il devrait être toutefois informé des conséquences éventuelles d'une mauvaise conduite en détention. En effet, comme aujourd'hui, le juge de l'application des peines pourrait, à la demande des autorités pénitentiaires, retirer au condamné tout ou partie du crédit de peine initialement octroyé.

« La véritable nouveauté consisterait à prévoir que le crédit de peine est automatiquement générateur d'un suivi post-pénal d'une durée équivalente . »

Le présent article tend à inscrire dans notre droit le système du crédit de peine.

Le paragraphe I tend à réécrire l'article 721 du code de procédure pénale pour prévoir que chaque condamné bénéficie, lors de la mise sous écrou, d'un crédit de réduction de peine calculé sur la durée de la condamnation prononcée à hauteur de trois mois pour la première année, deux mois pour les années suivantes, sept jours par mois pour les condamnations inférieures à un an et cinq jours par mois au moins pour les autres condamnations.

En cas de mauvaise conduite du condamné en détention, le juge de l'application des peines pourrait être saisi par le chef d'établissement ou sur réquisition du procureur de la République aux fins de retrait, à hauteur de trois mois maximum, du crédit de réduction de peine. Il statuerait à l'issue d'un débat contradictoire.

L'idée de précompter les réductions de peine lors de l'entrée en prison ne constitue qu'une confirmation de la situation actuelle. Elle mérite d'être approuvée. Cette évolution doit d'ailleurs être analysée en lien avec les dispositions de l'article 68 du projet de loi qui tendent à créer ce suivi post-pénal des condamnés ayant bénéficié de réductions de peine.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale soulève cependant deux difficultés :

- d'une part, il diminue les durées actuelles des réductions de peine, sans doute pour compenser le fait qu'elles seraient accordées dès l'entrée en détention ; une telle limitation n'apparaît pas nécessaire ;

- d'autre part, il prévoit un débat contradictoire devant le juge de l'application des peines sur l'ensemble des incidents liés à la mauvaise conduite du détenu ; d'après les informations transmises à votre rapporteur, ces incidents sont très nombreux et il n'est pas certain que l'organisation de débats contradictoires dans tous les cas soit matériellement envisageable .

Dans ces conditions, par un amendement , votre commission vous propose une réécriture du texte proposé, afin de :

- ne pas modifier les règles relatives aux durées de réduction de peine qui peuvent être accordées ;

- prévoir qu'en cas de mauvais comportement, le juge de l'application des peines statue par décision motivée susceptible d'appel , mais sans débat contradictoire ;

- prévoir qu'en cas de nouvelle condamnation à une peine ferme privative de liberté pour un crime ou un délit commis par le condamné après sa libération pendant une période égale à la durée de la réduction de peine qu'il a obtenue, la juridiction de jugement peut ordonner le retrait de tout ou partie de cette réduction de peine et la mise à exécution de l'emprisonnement correspondant.

Ainsi, une personne condamnée à une peine d'emprisonnement ferme devrait des comptes à la justice pendant toute la durée de cette peine, quand bien même elle aurait bénéficié de réductions de peine ; il s'agit de reprendre les préconisations en ce sens de la commission d'étude pour la prévention de la récidive des criminels ;

- prévoir une information du condamné par le greffe sur la date prévisible de libération et la possibilité de retrait des réductions de peine en cas de mauvaise conduite ou de nouvelle infraction après la libération.

Le paragraphe II tend à modifier l'article 721-1 du code de procédure pénale, relatif aux réductions de peine supplémentaires accordées aux condamnés qui manifestent des gages de réadaptation sociale. Il s'agit de supprimer la disposition interdisant que ces réductions de peine supplémentaires soient accordées avant qu'une année de détention se soit écoulée.

Le présent paragraphe tend en outre à réduire la durée des réductions de peine qui peuvent être accordées sur le fondement de cet article. Par un amendement , votre commission vous propose de maintenir les durées actuelles de réductions supplémentaires de peine pouvant être accordées par le juge de l'application des peines.

Elle vous propose d'adopter l'article 69 quater ainsi modifié .

Article 70
(art. 722-2 et 763-5 du code de procédure pénale)
Modalités d'amener de la personne n'ayant pas respecté
ses obligations dans le cadre du régime de la libération conditionnelle
ou du suivi socio-judiciaire

Compte tenu des simplifications apportées au régime des mandats par les articles 38 à 41 du présent projet de loi, le présent article avait pour objet de modifier les modalités d'exécution du mandat d'amener prononcé par le juge de l'application des peines à l'encontre des personnes n'ayant pas respecté les obligations qui leur incombaient dans le cadre de la libération conditionnelle ou du suivi socio-judiciaire.

Les articles 722-2 et 763-5, qui concernent les mandats d'amener pouvant être délivrés par le juge de l'application des peines, se réfèrent aux articles 122, 124 et 126 à 134 du code de procédure pénale, qui sont modifiés ou supprimés par les articles 38 à 41 du projet de loi.

Le présent article tendait donc à clarifier la situation en modifiant les articles 722-2 et 763-5.

L'Assemblée nationale a cependant supprimé cet article. Dans le cadre des modifications qu'elle a apportées au régime de l'application des peines, elle a en effet abrogé l'article 722-2 du code de procédure pénale et repris le contenu du présent article dans l'article 68 sexdecies du projet de loi.

Votre commission des Lois ayant proposé une nouvelle architecture des règles relatives à l'application des peines, les dispositions du présent article ont été reprises dans deux articles additionnels avant l'article 68. Aux termes des propositions de votre commission des Lois, les dispositions relatives aux mandats délivrés par le juge de l'application des peines devraient figurer dans un nouvel article 712-15 du code de procédure pénale.

En conséquence, votre commission vous propose le maintien de la suppression de l'article 70.

Article 71
(art. 434-27 et 434-30 du code pénal)
Aggravation des peines encourues en matière d'évasion

L'article 434-27 du code pénal définit l'évasion punissable comme le fait, pour un détenu, de se soustraire à la garde à laquelle il est soumis, par violence, effraction ou corruption, lors même que celles-ci auraient été commises, de concert avec lui, par un tiers . L'évasion est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende.

L'article 434-30 du même code porte les peines encourues à sept ans d'emprisonnement et 100.000 euros d'amende lorsque les violences consistent en la menace d'une arme ou d'une substance explosive, incendiaire ou toxique ou lorsqu'elles ont été commises dans le cadre d'une action concertée entre plusieurs détenus. Elles sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150.000 euros d'amende lorsqu'il a été fait usage d'une arme ou d'une substance explosive, incendiaire ou toxique.

Le présent article tend à élargir l'incrimination du délit d'évasion.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 434-27, afin de supprimer la condition de violence, effraction ou corruption pour caractériser le délit d'évasion. Ainsi, celui-ci serait désormais défini comme le fait, pour un détenu, de se soustraire à la garde à laquelle il est soumis.

Cette modification devrait permettre de réprimer des évasions opérées par la ruse, par exemple en utilisant un faux ordre de levée d'écrou.

La violence, l'effraction ou la corruption constitueraient désormais des circonstances aggravantes du délit d'évasion qui serait alors puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende.

Le paragraphe II tend à opérer une coordination dans l'article 434-30 du code pénal.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 71 sans modification .

Article 71 bis
(art. 33 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945
relative à l'enfance délinquante)
Placement en centre éducatif fermé
dans le cadre d'une libération conditionnelle

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a inséré, dans l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, un article 33 pour prévoir la création de centres éducatifs fermés .

Ces centres, au sein desquels les mineurs font l'objet des mesures de surveillance et de contrôle permettant d'assurer un suivi éducatif et pédagogique renforcé et adapté à leur personnalité, sont définis comme des établissements publics ou des établissements privés habilités dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, dans lesquels les mineurs sont placés en application d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve .

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Rudy Salles, tend à modifier l'article 33 de l'ordonnance de 1945 pour permettre le placement en centre éducatif fermé de mineurs bénéficiant d'une mesure de libération conditionnelle .

Une telle mesure peut être tout à fait adaptée pour certains mineurs, évitant un passage trop brusque de la contention totale (la prison) à la liberté totale. Elle pourrait contribuer à augmenter le nombre de mesures de libération conditionnelle accordées aux mineurs.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 71 bis sans modification .

SECTION 3
Dispositions relatives au recouvrement des peines d'amende
Article 72
(art. 707-1 et 707-2 nouveaux du code de procédure pénale)
Diminution forfaitaire du montant des amendes pénales
en cas de paiement rapide

Alors que le montant total des amendes mises en recouvrement atteignait 2.787 millions d'euros en 2001, les sommes effectivement recouvrées n'étaient que de 820 millions d'euros.

Afin de renforcer l'effectivité des sanctions pécuniaires, le présent article tend à insérer dans le code de procédure pénale deux nouveaux articles 707-1 et 707-2 pour prévoir une réduction du montant de l'amende en cas de paiement rapide.

Le texte proposé pour l' article 707-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en matière correctionnelle ou de police, toute personne condamnée à une peine d'amende peut s'acquitter de son montant dans un délai de vingt jours francs à compter de la date à laquelle le jugement a été prononcé. L'amende serait alors diminuée de 10 % sans que cette diminution puisse excéder mille euros.

Le texte précise que, dans le cas où une voie de recours est exercée contre les dispositions pénales de la décision, il est procédé, sur demande de l'intéressé, à la restitution des sommes versées.

Un décret en Conseil d'Etat devrait préciser les conditions d'application de cet article.

Le texte proposé pour l' article 707-2 du code de procédure pénale prévoit une information du condamné par le président du tribunal sur la possibilité d'obtenir une diminution du montant de l'amende en s'en acquittant dans un délai de vingt jours francs à compter du prononcé du jugement.

Le condamné serait également informé que le paiement de l'amende ne fait pas obstacle à l'exercice des voies de recours.

Les dispositions du présent article sont semblables à celles qui permettent une diminution des amendes forfaitaires lorsqu'elles sont acquittées dans un bref délai.

En 1994, M. Pierre Méhaignerie, alors garde des Sceaux, avait proposé un dispositif similaire dans son projet de loi relatif à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative (devenu loi du 8 février 1995). Il prévoyait alors une réduction de 20 % du montant de l'amende.

Ce dispositif avait cependant été refusé par l'Assemblée nationale et écarté du projet de loi. Votre commission avait au contraire accepté cette mesure, « la réduction (...) du montant d'une amende lorsque celle-ci est payée dans un délai rapide lui paraissant de nature à accélérer le recouvrement des amendes sans pour autant supprimer leur caractère punitif » 155 ( * ) .

Votre commission vous soumet un amendement de coordination, destiné à prendre en compte le fait qu'un article additionnel avant l'article 68 a déjà prévu la création d'un article 707-1 dans le code de procédure pénale.

Elle vous propose d'adopter l'article 72 ainsi modifié .

Article 73
(art. 473, 543, 706-31, 749, 750,
752, 754, 755, 756 du code de procédure pénale,
art. L. 240, L. 271, L. 272 et L. 272 A du livre des procédures fiscales)
Remplacement de la contrainte par corps
par la contrainte judiciaire

Lorsqu'un condamné à une amende pénale ne l'acquitte pas, la procédure de la contrainte par corps, définie par les articles 749 à 762 du code de procédure pénale, permet de l'emprisonner.

L'article 750 définit les règles relatives à la durée de la contrainte par corps en fonction du montant de l'amende et des condamnations pécuniaires. Ainsi, la durée de la contrainte par corps est de cinq jours lorsque l'amende et les condamnations pécuniaires sont comprises entre 150 et 450 euros, elle est de dix jours lorsque l'amende et les condamnations pécuniaires sont comprises entre 450 et 1.500 euros.

Aux termes de l'article 754 du code de procédure pénale, la contrainte par corps ne peut être exercée que cinq jours après un commandement fait au condamné à la requête de la partie poursuivante.

Sur le vu de l'exploit de signification du commandement et sur la demande de la partie poursuivante, le procureur de la République adresse les réquisitions nécessaires aux agents de la force publique et autres fonctionnaires chargés de l'exécution des mandements de justice.

Ces dispositions ont été jugées contraires à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la Cour européenne ayant considéré que la contrainte par corps était une peine et qu'elle ne pouvait être ordonnée que par un juge 156 ( * ) . Le présent article tend en conséquence à modifier ce dispositif pour le juridictionnaliser.

Le paragraphe I tend à modifier l'article 706-31 du code de procédure pénale, qui prévoit que la durée de la contrainte par corps est de deux années lorsque l'amende et les condamnations pécuniaires prononcées pour des infractions en matière de stupéfiants excèdent 75.000 euros. Dorénavant, cette règle dérogatoire ne serait applicable que si l'amende et les condamnations pécuniaires excédaient 100.000 euros. La durée de la contrainte par corps serait en outre ramenée de deux ans à un an.

Le paragraphe II a pour objet de remplacer la contrainte par corps par la contrainte judiciaire et de réécrire en conséquence les articles 749 et 750 du code de procédure pénale. Aux termes du texte proposé pour l'article 749, il appartiendrait désormais au juge de l'application des peines et non plus au procureur de la République, en cas d'inexécution volontaire d'une ou plusieurs condamnations à une peine d'amende, d'ordonner « une contrainte judiciaire consistant en un emprisonnement dont la durée est fixée par ce magistrat dans la limite d'un maximum fixé par la loi . »

Ces dispositions s'appliqueraient aux amendes prononcées en matière criminelle ou en matière correctionnelle pour un délit puni d'une peine d'emprisonnement, y compris en cas d'inexécution volontaire de condamnations à des amendes fiscales ou douanières.

Le texte proposé pour l'article 750 du code de procédure pénale définit les durées maximales de la contrainte judiciaire, qui seraient ainsi fixées :

- à vingt jours lorsque l'amende est comprise entre 2.000 et 4.000 euros ;

- à un mois lorsque l'amende est comprise entre 4.000 et 8.000 euros ;

- à deux mois lorsque l'amende est comprise entre 8.000 et 15.000 euros ;

- à trois mois lorsque l'amende est supérieure à 15.000 euros.

Le paragraphe III tend à simplifier la procédure de constat de l'insolvabilité du débiteur prévue par l'article 752 du code de procédure pénale. Alors qu'aujourd'hui, la personne concernée doit justifier de son insolvabilité en produisant soit un certificat de perception constatant sa non-imposition soit un certificat du maire ou du commissaire de police soit tout autre moyen de preuve, le débiteur pourrait désormais rapporter la preuve de son insolvabilité par tous moyens.

Le paragraphe IV tend à modifier substantiellement la procédure de mise à exécution de la contrainte, définie par l'article 754 du code de procédure pénale, pour tenir compte de la juridictionnalisation. Ainsi, le Trésor public devrait adresser une demande au procureur de la République, qui pourrait alors requérir le juge de l'application des peines de prononcer la contrainte judiciaire après un débat contradictoire. Le juge de l'application des peines pourrait délivrer mandat d'amener ou mandat d'arrêt. Sa décision serait exécutoire par provision et pourrait faire l'objet d'un appel.

Le juge de l'application des peines pourrait accorder des délais de paiement et ajourner sa décision pour une durée maximale de six mois. Votre commission vous soumet trois amendements de coordination avec les décisions qu'elle a prises en matière d'application des peines.

Le paragraphe V tend à remplacer dans tous les textes législatifs en vigueur les termes de « contrainte par corps » par ceux de « contrainte judiciaire ».

Les paragraphes VI et VII tendent à procéder à des coordinations, notamment en abrogeant plusieurs articles du code de procédure pénale (473, 755, 756 et 757) et du livre des procédures fiscales (L. 240, L. 271, L. 272 et L. 272 A), devenus inutiles.

Votre commission vous soumet un amendement procédant à une coordination omise.

Elle vous propose d'adopter l'article 73 ainsi modifié .

Article additionnel avant l'article 74 A
(art. 768 du code de procédure pénale)
Coordination

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 74 A pour opérer une coordination omise dans l'article 768 du code de procédure pénale relatif au casier judiciaire.

Articles 74 A à 74 D
(art. 769 et 769-2 du code de procédure pénale)
Maintien au casier judiciaire des peines et mesures
prononcées à l'égard des mineurs

Les peines et mesures prononcées à l'égard des mineurs font l'objet d'un traitement spécifique en ce qui concerne leur inscription au casier judiciaire.

Conformément aux règles applicables aux majeurs, l'ensemble des condamnations pénales prononcées contre les mineurs font l'objet d'une inscription au casier judiciaire en vertu de l'article 768 du code de procédure pénale. De même, les mesures éducatives prononcées en application de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante font l'objet d'une inscription. Parmi celles-ci figurent l'admonestation, la remise à parents, le placement, la liberté surveillée... La loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 a créé les « sanctions éducatives », qui donneront elles aussi lieu à inscription au casier judiciaire. Les sanctions éducatives sont la confiscation d'un objet ayant servi à commettre l'infraction ou qui en est le produit, l'interdiction de paraître dans le ou les lieux dans lesquels l'infraction a été commise, l'interdiction de rencontrer ou de recevoir la ou les victimes de l'infraction, l'interdiction de rencontrer le ou les coauteurs ou complices éventuels, une mesure d'aide ou de réparation, enfin l'obligation de suivre un stage de formation civique.

En ce qui concerne le retrait des fiches du casier judiciaire, des règles spécifiques sont prévues pour les mineurs.

L'article 769 du code de procédure pénale énonce les règles générales applicables en matière de retrait des fiches insérées au casier judiciaire. Il prévoit ainsi le retrait des fiches relatives à des condamnations effacées par une amnistie ou par une réhabilitation ainsi que des fiches relatives à des condamnations prononcées depuis plus de quarante ans et qui n'ont pas été suivies d'une nouvelle condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle. Des règles particulières sont cependant prévues pour certaines catégories de condamnations. Ainsi, les condamnations pour contraventions sont effacées à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où ces condamnations sont définitives. Les condamnations assorties en tout ou partie de sursis sont effacées à l'expiration des délais prévus par le code pénal en matière de réhabilitation (trois ans, cinq ans ou six ans selon les cas).

En ce qui concerne les mineurs, l'article 769-2 du code de procédure pénale prévoit le retrait du casier judiciaire :

- des fiches relatives aux mesures éducatives et aux sanctions éducatives à la date d'expiration de la peine et en tout cas lorsque le mineur a atteint l'âge de la majorité ;

- des fiches relatives à des condamnations à des peines d'amende ainsi qu'à des peines d'emprisonnement n'excédant pas deux mois, lorsque l'intéressé atteint l'âge de la majorité ;

- des fiches relatives aux autres condamnations pénales prononcées par les tribunaux pour enfants, assorties du bénéfice du sursis avec ou sans mise à l'épreuve ou assorties du bénéfice du sursis avec l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général, à l'expiration du délai d'épreuve.

La situation des mineurs en matière d'inscription des peines et mesures au casier judiciaire déroge donc fortement au droit commun.

Cette dérogation a été introduite dans le code de procédure pénale par la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 relative à l'entrée en vigueur du nouveau code pénal.

Les articles 74 A à 74 D, insérés dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de MM. Thierry Mariani et Jean-Luc Warsmann, tendent à modifier cette situation. L'article 74 A tend à compléter l'article 769 du code de procédure pénale, qui énumère les cas de retrait des fiches du casier judiciaire pour prévoir que les fiches relatives aux mesures éducatives et aux sanctions éducatives prononcées à l'égard des mineurs sont retirées à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter du jour où la mesure a été prononcée si la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une composition pénale, soit fait l'objet d'une nouvelle mesure prononcée en vertu de l'ordonnance du 2 février 1945 .

Corrélativement, les articles 74 B, 74 C, 74 D tendent à abroger chacun des alinéas de l'article 769-2, qui définit aujourd'hui les règles applicables aux mineurs.

Le système proposé revient donc à prévoir :

- un délai de cinq ans pour l'effacement des mesures et sanctions éducatives en l'absence de nouvelle condamnation ;

- un alignement sur les règles applicables aux majeurs en ce qui concerne les condamnations pénales prononcées à l'égard des mineurs.

La modification proposée mérite d'être retenue. Le système actuel suscite en effet de sérieuses difficultés lorsque les magistrats doivent statuer sur la situation de jeunes majeurs qui comparaissent devant eux. Ignorant tout de leur passé judiciaire, ils ne peuvent en effet tenir compte des peines et mesures qui ont déjà été prononcées dans le passé à l'encontre de la personne et il leur est plus difficile, dans ces conditions, de déterminer une sanction adaptée.

La volonté d'oubli des fautes de jeunesse qui a présidé à l'établissement du régime spécifique applicable aux mineurs en matière d'inscription au casier judiciaire s'accorde mal avec l'impératif de réinsertion des jeunes délinquants, qui impose de prendre des mesures adaptées à leur personnalité et à leur parcours passé.

L'essentiel en cette matière est que le passé du jeune délinquant ne puisse être connu que des magistrats et non d'éventuels employeurs. Or, l'article 775 du code de procédure pénale exclut l'inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'ensemble des peines et mesures prononcées à l'égard de mineurs 157 ( * ) .

Dans ces conditions, la solution proposée par l'Assemblée nationale apparaît raisonnable, dès lors qu'elle ne peut entraver l'insertion de la personne dans la société. Pour tenir compte de la nature particulière de ces mesures, votre commission vous propose simplement, par un amendement de ramener de cinq à trois ans la durée de conservation au casier judiciaire des mesures éducatives.

Elle vous propose en outre de rassembler les modifications proposées par l'Assemblée nationale dans l'article 74 A et vous soumet en conséquence des amendements de suppression des articles 74 B, 74 C et 74 D.

Article 74
(art. 775-1 du code de procédure pénale)
Interdiction de la non-inscription au casier judiciaire
de certains jugements concernant des infractions
commises contre des mineurs

Dans sa rédaction actuelle, l'article 775-1 du code de procédure pénale permet au tribunal qui prononce une condamnation d'exclure expressément sa mention au bulletin n° 2, soit dans le jugement de condamnation, soit par jugement rendu postérieurement sur la requête du condamné.

Le même article précise que l'exclusion de la mention d'une condamnation au bulletin n° 2 comporte relèvement de toutes les interdictions, déchéances ou incapacités de quelque nature qu'elles soient résultant de cette condamnation.

Ce dispositif peut soulever des difficultés en ce qui concerne certaines catégories de condamnations et entraîner l'impossibilité de vérifier le respect d'interdictions professionnelles.

Le présent article tend à compléter l'article 775-1 pour exclure son application aux personnes condamnées pour l'une des infractions mentionnées à l'article 706-47 du code de procédure pénale.

L'article 706-47 relatif à la procédure applicable aux infractions de nature sexuelle prévoit l'obligation, avant tout jugement au fond, d'une expertise médicale sur les personnes poursuivies pour :

- meurtre ou assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie ;

- viol et agressions sexuelles (articles 222-23 à 222-32 du code pénal) ;

- corruption de mineurs ou diffusion d'images de pornographie infantile (articles 227-22 à 227-24 du code pénal) ;

- atteintes sexuelles sur mineur (articles 227-25 à 227-27 du code pénal).

Il paraît tout à fait logique d'interdire la possibilité d'exclure du bulletin n° 2 du casier judiciaire les condamnations prononcées pour infractions sexuelles sur mineur. Une telle exclusion pourrait en effet permettre au condamné de postuler à des emplois impliquant des contacts avec des enfants. Votre rapporteur suppose que, dès à présent, les décisions juridictionnelles écartant l'inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire de condamnations pour infractions sexuelles sont tout à fait exceptionnelles.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 74 sans modification .

Article 75
(art. 776 du code de procédure pénale)
Extension de l'accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire

L'article 776 du code de procédure pénale énumère la liste des autorités auxquelles est délivré le bulletin n° 2 du casier judiciaire. Parmi celles-ci figurent :

- les préfets et les administrations publiques de l'Etat saisis de demandes d'emplois publics, de propositions relatives à des distinctions honorifiques ou de soumissions pour des adjudications de travaux ou de marchés publics ou en vue de poursuites disciplinaires ou de l'ouverture d'une école privée ;

- les autorités militaires pour les appelés des classes et de l'inscription maritime et pour les jeunes qui demandent à contracter un engagement ;

- les autorités publiques compétentes en cas de contestation sur l'exercice des droits électoraux ou sur l'existence de l'incapacité d'exercer une fonction publique élective ;

- les présidents des tribunaux de commerce ainsi que les juges commis à la surveillance du registre du commerce ;

- enfin les administrations et personnes morales dont la liste est déterminée par décret en Conseil d'Etat. Cette liste figure à l'article R. 79 du code de procédure pénale et comprend par exemple les administrations chargées de la police des étrangers, la SNCF, certains conseils de l'ordre...

Le présent article tend à compléter l'article 776 du code de procédure pénale, afin que le bulletin n° 2 du casier judiciaire puisse être communiqué aux administrations ou organismes chargés par la loi ou le règlement du contrôle de l'exercice d'une activité professionnelle ou sociale lorsque cet exercice fait l'objet de restrictions expressément fondées sur l'existence de condamnations pénales.

Ce dispositif doit notamment permettre aux organismes contrôlant l'activité d'établissements accueillant des mineurs de vérifier que les personnes travaillant dans ces établissements n'ont pas subi de condamnation pour infractions sexuelles sur mineur. Il s'agit du corollaire de l'article 74 du projet de loi.

Rappelons que d'ores et déjà l'article R. 79 du code de procédure pénale prévoit la transmission du bulletin n° 2 du casier judiciaire au juge des enfants à l'occasion de l'instruction des procédures d'habilitation des personnes physiques, établissements, services ou organismes publics ou privés auxquels l'autorité judiciaire confie habituellement des mineurs ainsi que dans le cadre du contrôle que les juges des enfants exercent sur les mêmes personnes ou établissements.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 75 sans modification .

Article 75 bis
(art. 776 du code de procédure pénale)
Transmission du bulletin n° 2 du casier judiciaire
aux organismes exerçant une activité auprès des mineurs

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois M. Jean-Luc Warsmann, tend, comme le précédent, à compléter l'article 776 du code de procédure pénale pour prévoir la délivrance du bulletin n° 2 du casier judiciaire aux dirigeants des personnes morales de droit public ou privé exerçant une activité culturelle, éducative, sportive ou sociale au sens de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles auprès des mineurs et pour les seules nécessités liées au recrutement d'une personne. La liste des personnes morales concernées serait déterminée par décret.

Rappelons que l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles définit les établissements et services sociaux et médico-sociaux. Parmi ces établissements figurent notamment :

- les établissements ou services prenant en charge habituellement, y compris au titre de la prévention, des mineurs et des majeurs de moins de vingt-et-un ans ;

- les établissements ou services d'enseignement et d'éducation spéciale qui assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d'adaptation ;

- les établissements ou services mettant en oeuvre les mesures éducatives ordonnées par l'autorité judiciaire en application de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

Comme les articles 74 et 75, le présent article a pour objet de faciliter le contrôle des antécédents des personnes souhaitant exercer une activité auprès de mineurs.

Il soulève davantage d'objections que les précédents. L'accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire n'est aujourd'hui ouvert qu'à des personnes publiques. S'il était adopté dans sa rédaction proposée par l'Assemblée nationale, le présent article aurait pour effet d'étendre considérablement la liste des personnes susceptibles de se voir délivrer le bulletin n° 2.

Une telle évolution n'apparaît pas souhaitable. Il ne serait pas sain que les associations travaillant auprès de mineurs puissent elles-mêmes réclamer le bulletin n° 2 du casier judiciaire d'un candidat à un emploi et apprendre ainsi que ce candidat a été condamné pour des faits n'ayant aucun rapport avec l'activité de l'association.

Cependant, votre commission est consciente qu'il est aujourd'hui difficile de faire respecter certaines interdictions professionnelles sans pouvoir accéder au passé judiciaire d'une personne. A cet égard, l'article 75 du projet de loi, qui permet aux services chargés de contrôler les personnes publiques et privées travaillant auprès de mineurs de demander le bulletin n° 2 du casier judiciaire, constitue un progrès.

Afin de faciliter l'action des personnes publiques et privées exerçant des activités auprès de mineurs, votre commission vous propose, par un amendement , une nouvelle rédaction du présent article pour prévoir, dans l'article 776 du code de procédure pénale, que les personnes publiques ou privées exerçant une activité auprès d'enfants peuvent obtenir le bulletin n° 2 du casier judiciaire lorsqu'il est vierge, ce qui est le cas le plus fréquent. Dans l'hypothèse contraire, la personne publique ou privée concernée aurait deux possibilités :

- demander aux organismes chargés de contrôler son activité de solliciter délivrance du bulletin n° 2 aux fins de vérification ;

- demander à l'intéressé de fournir une attestation indiquant qu'il n'a pas été condamné pour infraction sexuelle. Votre commission vous propose en effet dans son amendement de compléter l'article 777-2 du code de procédure pénale, qui permet à une personne d'obtenir par le procureur de la République communication du relevé intégral des mentions du casier judiciaire la concernant tout en interdisant la délivrance de copies de ce relevé, pour permettre à une personne d'obtenir du procureur de la République la délivrance d'une attestation indiquant que son casier judiciaire ne comporte aucune mention de condamnation concernant une infraction sexuelle.

Le système proposé doit permettre d'opérer les vérifications nécessaires avant de recruter une personne pour travailler auprès d'enfants, sans pour autant étendre à des personnes privées l'accès direct au bulletin n° 2 du casier judiciaire.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 75 bis ainsi modifié .

TITRE III
DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET
DISPOSITIONS RELATIVES À L'OUTRE MER
CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 76
Entrée en vigueur différée de certaines dispositions

Le présent article tend à différer l'entrée en vigueur de certaines dispositions du projet de loi, afin que les acteurs de la justice, en particulier les magistrats, puissent se préparer à les appliquer dans de bonnes conditions. Le délai prévu doit notamment permettre au ministère de la justice d'adresser aux juridictions des circulaires présentant les nouvelles dispositions législatives.

Le présent article tend à reporter au premier jour du quatrième mois suivant la publication de la loi au Journal Officiel l'entrée en vigueur des dispositions suivantes :

- l'obligation d'informer la victime lorsqu'une personne mise en examen ou condamnée est soumise à l'interdiction d'entrer en relation avec elle ainsi que les modifications apportées au régime des réductions de peine (articles 34 et 68) ;

- l'ensemble des dispositions relatives aux mandats, ainsi que la suppression de l'ordonnance de prise de corps (articles 30 et 38 à 41) ;

- la modification des modalités de désignation d'un avocat par les parties (article 50) ;

- la modification des règles relatives à l'enquête de personnalité (article 57) ;

- les dispositions relatives au jugement d'une personne en son absence (articles 58 et 66) ;

- la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (article 61) ;

- les dispositions remplaçant la contrainte par corps par la contrainte judiciaire (article 73).

Le projet de loi initial mentionnait également l'article 29, paragraphe II, qui tendait à reporter de la vingtième à la vingt-quatrième heure la deuxième intervention de l'avocat au cours d'une garde à vue. Toutefois, l'Assemblée nationale ayant déplacé les dispositions de l'article 29, paragraphe II, dans un autre article du projet de loi, a supprimé la référence à cet article dans le présent article.

Il est vraisemblable, compte tenu des nombreux amendements apportés au projet de loi par l'Assemblée nationale et des propositions que formule votre commission qu'il sera nécessaire de compléter le présent article pour différer l'entrée en vigueur d'autres dispositions. Votre commission estime cependant que le Gouvernement est seul en mesure de déterminer la liste des articles dont l'entrée en vigueur doit être différée afin de permettre leur application par les juridictions dans les meilleures conditions. Elle proposera seulement un article additionnel fixant la date d'entrée en vigueur des dispositions relatives à l'extradition, dès lors qu'il est logique de prévoir l'entrée en vigueur de ces dispositions à la date d'entrée en vigueur des conventions qu'elles tendent à transposer.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 76 sans modification .

Article 77
Demandes d'entraide émanant d'une autorité étrangère

Le présent article disposait, dans le projet de loi initial, que les dispositions de l'article 30 de la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers demeureraient applicables aux commissions rogatoires émanant d'une autorité étrangère et adressées à la France avant la date de la publication de la loi.

L'Assemblée nationale, à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, constatant que les dispositions de l'article 30 de la loi du 10 mars 1927 étaient intégralement reprises dans le texte proposé par l'article 6 du projet de loi pour l'article 694 du code de procédure pénale, a logiquement supprimé le présent article, celui-ci apparaissant inutile.

Votre commission vous propose le maintien de la suppression de l'article 77.

Article 77 bis
Ordonnances de prise de corps

Le présent article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois, dispose que les ordonnances de prise de corps décernées avant l'entrée en vigueur de la loi valent mandat de dépôt lorsque l'accusé est détenu en vertu de ce titre.

De fait, la notion d'ordonnance de prise de corps disparaîtra quatre mois après la publication de la loi. Si le présent article n'était pas adopté, aucun titre de détention ne subsisterait à l'égard des personnes détenues sur le fondement d'une ordonnance de prise de corps.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 77 bis sans modification .

Article 78
Sort des jugements par défaut rendus avant l'entrée en vigueur de la loi

L'article 58 du projet de loi tend à interdire la condamnation par défaut d'un prévenu à une peine d'emprisonnement et prévoit la possibilité pour le tribunal correctionnel de rendre un « jugement de recherche » lorsqu'il envisage de prononcer une peine d'emprisonnement.

Le présent article prévoit que les jugements rendus par défaut par les tribunaux correctionnels avant l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 58, lorsqu'ils ont condamné le prévenu à une peine d'emprisonnement et ont donné lieu à la délivrance d'un mandat d'arrêt, sont considérés comme des jugements de recherche. Les mandats d'arrêt délivrés à la suite de ces jugements demeureraient valables et devraient être exécutés conformément à l'article 135-2 du code de procédure pénale, créé par le présent projet de loi.

Votre commission a décidé de maintenir la possibilité pour un tribunal correctionnel de rendre des jugements par défaut comportant une peine d'emprisonnement, considérant que ce système ne heurtait pas les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme. Les dispositions du présent article deviennent en conséquence inutiles.

Votre commission vous propose la suppression de l'article 78.

Article 79
Sort des condamnations par contumace rendues
avant l'entrée en vigueur de la loi

L'article 66 du projet de loi tend à faire disparaître les condamnations par contumace et à les remplacer par des arrêts de recherche ne comportant le prononcé d'aucune peine. Le procureur de la République pourrait cependant, dans le cas d'une personne en fuite, demander au bâtonnier de désigner un avocat pour assurer la défense des intérêts de l'accusé. La Cour pourrait alors prononcer un arrêt de condamnation ou d'acquittement.

Le présent article tend à prévoir que les personnes condamnées par contumace avant l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 66 sont considérées comme faisant l'objet d'un arrêt de recherche. L'ordonnance de prise de corps décernée contre elles vaudrait mandat d'arrêt, qui devrait être exécuté conformément aux dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale créé par le présent projet de loi.

Votre commission, si elle a approuvé la disparition de la procédure de contumace, a néanmoins considéré que la possibilité de condamner en leur absence des personnes en fuite ne heurtait pas les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme à condition qu'un avocat se présentant pour assurer la défense de la personne soit toujours entendu par la juridiction. Elle a en conséquence décidé de créer une procédure de « défaut criminel » plutôt que de retenir les propositions du projet de loi consistant à interdire les condamnations en l'absence de l'accusé tout en prévoyant des exceptions impliquant la désignation d'office d'un avocat ignorant tout de son client.

Dans ces conditions, par un amendement , votre commission vous propose de prévoir que les personnes condamnées par contumace avant l'entrée en vigueur de la loi sont considérées comme des personnes condamnées par défaut.

Elle vous propose d'adopter l'article 79 ainsi modifié .

Article 80
Entrée en vigueur des dispositions tendant à interdire au condamné ayant bénéficié d'une réduction de peine de rencontrer la victime

L'article 68 du projet de loi prévoit l'insertion dans le code de procédure pénale d'un article 721-2 ayant pour objet de permettre au juge de l'application des peines d'imposer au condamné ayant bénéficié de réductions de peine le respect de certaines obligations pendant une période correspondant à la durée des réductions de peine dont il a bénéficié.

Votre commission a proposé de limiter les obligations pouvant être imposées au condamné à l'interdiction de rencontrer la victime ou d'entrer en relation avec elle ainsi qu'à l'obligation de l'indemniser.

Le présent article prévoit que les dispositions de l'article 721-2 nouveau du code de procédure pénale sont applicables aux seules réductions de peine accordées postérieurement à l'entrée en vigueur de l'article 68 de la loi, soit le premier jour du quatrième mois suivant la publication de la loi, conformément à l'article 76.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 80 sans modification .

Article 81
Entrée en vigueur des dispositions relatives à la contrainte judiciaire

L'article 73 du projet de loi tend à remplacer la contrainte par corps par une procédure contradictoire dénommée contrainte judiciaire.

Le présent article prévoit que les contraintes par corps en cours à la date d'entrée en vigueur de l'article 73, soit le premier jour du quatrième mois suivant la publication de la loi, s'exécutent jusqu'à leur terme, sans préjudice des décisions qui pourraient être prises par le juge de l'application des peines conformément à la nouvelle procédure contradictoire.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination et vous propose d'adopter l'article 81 ainsi modifié .

Article 81 bis
Entrée en vigueur différée des dispositions relatives à la transmission directe des demandes d'entraide judiciaire

Le présent article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois avec l'avis favorable du Gouvernement, a pour objet de prévoir une entrée en vigueur différée du texte proposé pour l'article 695-1 du code de procédure pénale relatif à la transmission directe des demandes d'entraide judiciaire entre la France et les autres Etats membres de l'Union européenne, fixée à la date d'application en France de la convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne.

En l'absence d'indication figurant dans le projet de loi initial, les dispositions visées étaient donc supposées s'appliquer dès la date de promulgation de la présente loi.

La convention du 29 mai 2000 n'étant toujours pas entrée en vigueur 158 ( * ) dans l'Union européenne, les députés ont jugé préférable de reporter l'application des mesures de transposition correspondantes. Plutôt que de retenir l'entrée en vigueur dans l'Union européenne de la convention comme date butoir, l'Assemblée nationale a préféré prévoir que ces dispositions pourraient entrer en vigueur de manière anticipée dans leurs relations bilatérales avec les autres Etats membres, sous réserve de réciprocité. Comme l'a fait valoir en séance publique M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, cette disposition témoigne d'une « démarche volontaire » du législateur, soucieux de promouvoir l'application du droit européen le plus rapidement possible.

Votre commission vous soumet un amendement de cohérence rédactionnelle .

Elle vous propose d'adopter l'article 81 bis ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 81 bis
Entrée en vigueur des dispositions relatives à l'extradition

Par un amendement, votre commission a proposé de compléter l'article 6 du projet de loi afin d'intégrer dans le code de procédure pénale la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition tout en la modifiant pour prendre en compte deux conventions relatives à l'extradition négociées dans le cadre de l'Union européenne.

Par un article additionnel , votre commission vous propose que les nouvelles dispositions du code de procédure pénale transposant les stipulations des conventions européennes entrent en vigueur dès l'entrée en vigueur de ces conventions.

CHAPITRE II
DISPOSITIONS ÉTENDANT CERTAINES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES À LA NOUVELLE-CALÉDONIE, À LA POLYNÉSIE FRANÇAISE, AUX ÎLES WALLIS-ET-FUTUNA, AUX TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES ET À MAYOTTE

Article 82
Application de certaines dispositions
de la présente loi aux collectivités d'outre-mer

Composé de trois paragraphes, le présent article a pour objet de rendre applicables certaines dispositions du projet de loi, d'une part, à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, d'autre part, aux Terres australes et antarctiques françaises, et enfin à Mayotte.

? Le paragraphe I propose de définir la liste des articles du présent projet de loi applicables à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, ces collectivités étant soumises au principe de spécialité législative selon lequel l'applicabilité des textes législatifs est subordonnée à l'adoption d'une disposition expresse d'extension .

Sont visées les dispositions concernant la lutte contre la délinquance et la criminalité organisées figurant aux articles premier à 4, à l'exclusion de celles relatives :

- aux peines infligées pour les infractions commises en matière de vente, de production, d'exportation ou d'importation de poudres ou substances explosives prévues au paragraphe XVII de l'article 2 (circonstance aggravante de bande organisée) et au paragraphe XV de l'article 3 (atténuation de peines au bénéfice des repentis) ;

- à l'aggravation des peines infligées pour les infractions commises en bande organisée en matière d'infractions au régime des jeux visées aux paragraphes XIX (courses de chevaux), XX et XXI (jeux de hasard) de l'article 2.

Sont également concernés :

- les articles 5, 5 bis, et 7 bis respectivement relatifs à des coordinations avec les dispositions de lutte contre la criminalité organisée, à la possibilité pour les agents de la direction générale des impôts de concourir à la recherche de certaines infractions (proxénétisme, traite des êtres humains par exemple), et à la réglementation des loteries ;

- les nouvelles règles en matière d'entraide judiciaire internationale prévues par l'article 6 ;

- les nouvelles règles d'organisation judiciaire en matière économique et financière, de santé publique et de pollution par rejets des navires définies aux articles 7, 8, 9 et 10 ;

- l'extension des pouvoirs de la douane judiciaire prévue par le I de l'article 11 ;

- les dispositions relatives à la lutte contre les discriminations énoncées aux articles 12 à 16 bis ;

- les dispositions relatives à l'action publique , aux enquêtes, à l'instruction, au jugement et à l'application des peines définies aux articles 17 à 56, à l'exclusion du paragraphe III de l'article 23 relatif à certaines modalités concernant la composition pénale, de l'article 24 relatif aux échanges d'informations sur des crimes ou délits entre les maires et les parquets, dont l'application est par ailleurs étendue à certaines collectivités d'outre-mer par l'article 85 du projet de loi, et du paragraphe IX de l'article 56 tendant à modifier l'intitulé afin de faire référence à la commission nationale de réparations des détentions ;

- les dispositions relatives au jugement des délits et des crimes prévues aux articles 57 à 66 bis ;

- les dispositions relatives à la Cour de cassation définies à l'article 67 ;

- les dispositions relatives à l'application des peines figurant aux articles 68 à 75 bis ;

- les dispositions transitoires énoncées aux articles 76 à 81.

? Le paragraphe II du présent article a pour objet de rendre applicables aux Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) :

- l'article 2 élargissant le champ d'application de la circonstance aggravante de bande organisée à l'exception de ses paragraphes XVII, XIX, XX et XXI précédemment mentionnés ;

- l'article 3 relatif au statut des repentis à l'exception de son paragraphe XV précédemment mentionné ;

- l'article 4 traitant de l'entrave au fonctionnement de la justice ;

- l'article 10 aggravant la répression des infractions en matière de pollution maritime ;

- les articles 12 à 14 relatifs à la lutte contre les discriminations ;

- l'article 71 aggravant les peines en cas d'évasion.

? Le paragraphe III du présent article a pour objet d'étendre à Mayotte certaines dispositions du projet de loi.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, le principe de la spécialité législative subsiste dans cette collectivité bien qu'elle n'y soit que partiellement soumise, certains domaines, notamment la procédure pénale et le droit pénal , étant en revanche soumis au principe de l'assimilation législative 159 ( * ) . Ainsi la majorité des dispositions du présent texte est-elle directement applicable.

Rappelant cette évidence dans un souci pédagogique, le projet de loi propose d'étendre l'application à Mayotte de certaines mesures n'entrant pas dans le champ des dispositions régies par le principe de l'assimilation législative. Il s'agit :

- des paragraphes XIII à XVI et XVIII de l'article 2, qui concernent la circonstance aggravante de bande organisée pour les infractions en matière d'armes et de substances dangereuses (machines ou engins meurtriers ou incendiaires, matériels de guerre prohibés, armes biologiques ou à base de toxines), à l'exception de son paragraphe XVII relatif aux poudres et substances explosives ;

- des paragraphes XIII et XIV de l'article 3 consacrés à l'atténuation des peines encourues par les repentis pour des infractions concernant des machines ou engins meurtriers et des matériels de guerre prohibés ;

- de l'article 10 aggravant la répression des infractions en matière de pollution maritime ;

- de l'article 16 modifiant le délai de prescription pour les messages racistes ou xénophobes publiés par voie de presse ;

- de l'article 24 consacré aux échanges d'informations sur des crimes et délits entre les maires et les parquets ;

- du paragraphe IX de l'article 56 précédemment mentionné.

Votre commission vous propose un amendement de réécriture de cet article pour prendre en compte les modifications apportées au projet de loi initial par les députés , l'Assemblée nationale n'ayant pas opéré toutes les coordinations nécessaires. Ainsi, elle vous propose de compléter la liste des dispositions applicables outre-mer par certaines dispositions absentes du projet de loi initial et, par souci de clarté, de mentionner pour chaque collectivité d'outre-mer les articles qui y seraient applicables.

Elle vous propose d'adopter l'article 82 ainsi modifié .

Article 83
Extension aux collectivités d'outre-mer de
l'application de diverses dispositions

Composé de trois paragraphes, le présent article a pour objet d'étendre aux collectivités d'outre-mer diverses dispositions législatives.

? Le paragraphe I du présent article a pour objet d'étendre à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna et aux TAAF l'application de dispositions destinées à faciliter le passage à l'euro fiduciaire figurant dans la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF), notamment ses articles 17 et 18, qui seraient applicables aux trois premières collectivités précitées, seul l'article 17 étant en revanche applicable dans les TAAF.

Ces dispositions transposent dans le code pénal les dispositions de la décision-cadre adoptée par le Conseil de l'Union européenne le 29 mai 2000, sur le fondement des articles 31 et 34 du traité sur l'Union européenne, faisant obligation aux Etats membres de renforcer la protection de l'euro contre le faux monnayage par des sanctions pénales .

Outre qu'il contient une disposition spécifique relative aux opérations d'échange de pièces et de billets en francs, l'article 17 de la loi MURCEF modifie le code pénal pour :

- étendre le champ de l'incrimination liée à la fabrication, l'emploi ou la détention sans autorisation des matières, instruments et outils divers notamment informatiques spécialement destinés à la fabrication ou à la protection contre la contrefaçon ou la falsification des billets de banque ou de pièces de monnaie, et doubler les peines encourues (article 442-5) ;

- sanctionner le faux monnayage de billets de banque et de pièces de monnaie avant leur mise en circulation (article 442-15) ;

- étendre la liste des infractions commises à l'étranger par des étrangers arrêtés sur le territoire français ou extradés vers la France à la contrefaçon ou la falsification de billets et pièces en euros dans diverses hypothèses (avant et pendant leur mise en circulation, durant le transport) (article 113-10).

L'article 18 de la loi MURCEF modifiant les articles 56 et 97 du code de procédure pénale facilite la collecte d'informations relatives à la contrefaçon des pièces et billets en euros en vue de permettre la mise en place par le système européen de banques centrales d'un dispositif européen d'échange d'informations statistiques et techniques.

Si votre rapporteur se réjouit de ce que le projet de loi s'efforce de mettre en conformité le droit applicable outre-mer avec les exigences européennes, force est néanmoins de constater que ces dispositions s'avéraient urgentes avant la mise en circulation de l'euro et paraissent aujourd'hui avoir perdu de leur intérêt plus de deux ans après le passage à l'euro.

? Le paragraphe II du présent article étend à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna l'application de certaines dispositions de l'article 12 de la loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 160 ( * ) relatives au renforcement des pouvoirs des contrôleurs de transports terrestres et de la répression des infractions en matière de transport de matières dangereuses (par exemple lors des opérations d'emballage et de remplissage).

? Le paragraphe III du présent article énumère les dispositions de la loi n° 2002-1138 d'orientation et de programmation pour la justice applicables à la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, mentionnant :

- l'article 33 reconnaissant la possibilité de se constituer partie civile aux associations ayant vocation à défendre les victimes d'un accident survenu dans les transports collectifs ou dans un lieu ou un local ouvert au public ;

- les articles 34 et 35 relatifs aux moyens de télécommunication audiovisuelle au cours de la procédure ;

- l'article 36 étendant le champ d'application de la procédure de composition pénale ;

- les articles 37 et 38 modifiant certaines règles de la détention provisoire respectivement relatives, d'une part, aux conditions et à la durée du placement en détention provisoire et, d'autre part, au référé-détention et aux demandes de mise en liberté ;

- l'article 39 qui traite des règles relatives à l'instruction ;

- l'article 40 étendant le champ de la procédure de comparution immédiate modifiant le délai d'audiencement en cas de demande de renvoi par le prévenu ;

- l'article 41 étendant la compétence du juge unique en matière correctionnelle ;

- l'article 42 prévoyant des dispositions relatives à la procédure simplifiée en matière de délits ;

- l'article 43 modifiant le régime de la procédure criminelle ;

- l'article 44 simplifiant les règles applicables en matière d'aménagement des peines ;

- l'article 45 réprimant certaines atteintes à l'encontre d'une personne chargée d'une mission de service public ;

- l'article 46 aggravant les sanctions pour certains actes de terrorisme  et allongeant la durée totale de la détention provisoire prévue en ce domaine ;

- l'article 49 qui traite du placement sous surveillance électronique.

En outre, le présent paragraphe étend aux TAAF l'application de l'article 46, mais uniquement en ce qui concerne ses dispositions relatives à l'aggravation des sanctions pour certains actes de terrorisme prévues au paragraphe I.

Votre commission vous propose par un amendement de compléter ces dispositions par un paragraphe additionnel pour étendre à la Nouvelle-Calédonie, moyennant quelques adaptations, les dispositions du code de procédure pénale relatives à certaines infractions commises en matière de transport terrestre.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 83 ainsi modifié .

Article 84
Extension aux collectivités d'outre-mer de l'application
de diverses dispositions

Composé de trois paragraphes, le présent article a pour objet d'étendre à certaines collectivités situées outre-mer des dispositions de procédure pénale et de droit pénal.

? Le paragraphe I du présent article propose de compléter la loi n° 97-1159 du 19 décembre 1997 consacrant le placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des peines privatives de liberté par un article 14 en vue de prévoir une mention expresse d'applicabilité à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, à Wallis et Futuna et à Mayotte.

La référence à Mayotte présente un caractère plus pédagogique que normatif, l'article 3 de la loi du 11 juillet 2001 ayant inclus dans le champ du principe de l'assimilation législative la matière pénale.

? Le paragraphe II du présent article propose de compléter la loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants des navires par un article 10 pour en étendre l'application aux mêmes collectivités que celles énumérées précédemment.

? Le paragraphe III du présent article propose de compléter la loi n° 2003-88 du 3 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe par un article 11 en vue d'en étendre l'application à Wallis et Futuna, aux Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte, la mention de cette dernière collectivité se contentant de décliner le principe général énoncé à l'article 3 de la loi du 11 juillet 2001 relative à Mayotte précitée.

Votre commission vous propose un amendement tendant à supprimer les mentions relatives à Mayotte qui, outre qu'elles s'avèrent inutiles, pourraient se révéler dangereuses. En effet, elles risquent en contradiction avec les termes très explicites de la loi statutaire précitée de créer un précédent en imposant une exigence de mention expresse d'extension dans des matières applicables de plein droit. Telle est la raison pour laquelle elle vous soumet un amendement en ce sens.

En conséquence, elle vous propose d'adopter l'article 85 ainsi modifié .

CHAPITRE III
DISPOSITIONS MODIFIANT LES CODES DES COMMUNES APPLICABLES À SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON,
À LA POLYNÉSIE FRANÇAISE ET À LA NOUVELLE-CALÉDONIE

Articles 85, 86 et 87
(art. L. 122-27-1 nouveau des codes des communes applicables
à Saint-Pierre-et-Miquelon et en Nouvelle-Calédonie,
art. 3 de la loi n° 77-1460 du 29 décembre 1977
modifiant le régime communal dans le territoire de la Polynésie française)
Application outre-mer des dispositions relatives aux échanges d'informations entre les maires et les parquets

Les articles 85, 86 et 87 du projet de loi ont pour objet d'étendre à Saint-Pierre-et-Miquelon, à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française les dispositions de l'article 24 du projet de loi relatives aux échanges d'informations entre les maires et les parquets sur les crimes et délits commis sur le territoire de la commune. Les codes des communes applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française rappelleraient donc, comme le code des communes applicable en métropole que :

- le maire est tenu de signaler sans délai au procureur de la République les crimes ou les délits dont il acquiert la connaissance dans l'exercice de ses fonctions ;

- le maire est avisé des suites données à son signalement ;

- le procureur de la République peut communiquer au maire des éléments d'information sur les procédures relatives à des infractions commises sur le territoire de la commune, qu'il rend publics conformément à l'article 11 du code de procédure pénale.

A l'article 24, votre commission a proposé la suppression de la mention selon laquelle le procureur pourrait communiquer au maire les éléments qu'il rendait publics, considérant que cette disposition pouvait donner le sentiment que le maire ne pouvait être informé qu'à condition que l'ensemble de l'opinion publique le soit...

Par trois amendements , votre commission vous propose de supprimer cette mention dans les textes proposés pour modifier les codes des communes applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

Elle vous propose d'adopter les articles 85, 86 et 87 ainsi modifiés .

*

* *

Au bénéfice de l'ensemble de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter le projet de loi.

ANNEXES

_____

ANNEXE 1 : PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

ANNEXE 2 : PERSONNES RENCONTRÉES AU COURS DES DÉPLACEMENTS

ANNEXE 3 : AUTIDION DE M. DOMINIQUE PERBEN, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE

ANNEXE 4 : LES REPENTIS PASSENT À LA JUSTICE PÉNALE - LE PLAIDER COUPABLE

ANNEXE 5 : ÉTUDE D'IMPACT

ANNEXE 1

-PERSONNES ENTENDUES
PAR LE RAPPORTEUR

_____

- Syndicat de la magistrature

Mme Evelyne SIRE-MARIN, présidente
M. Dominique BRAULT, secrétaire général

- FO Magistrats

Mme Naïma RUDLOFF, secrétaire générale

- SGP - FO

Mme Laurence WIART, secrétaire nationale

- Association des magistrats du parquet

M. Laurent MARCADIER, secrétaire général

- Syndicat des commissaires de police et des hauts fonctionnaires
de la police nationale

M. André-Michel VENTRE, secrétaire général

- Synergie officiers

M. Patrick MAUDUIT

- Alliance Police

M. Jean-Yves BUGELLI, secrétaire administratif général

- Association nationale des juges de l'application des peines

Mme Marie-Suzanne PIERRARD, présidente

M. Michaël JANAS

- Office central pour la répression du banditisme

M. Hervé LAFRANQUE

- EUROJUST

M. Olivier de BAYNAST, vice-président, membre national

- Cour de cassation

M. Guy CANIVET, premier président de la Cour de cassation

M. Bruno COTTE, président de la Chambre criminelle

de la Cour de cassation

M. François BURGELIN, procureur général près la Cour de cassation

- Union syndicale des magistrats

M. Dominique BARELLA, président

M. Nicolas BLOT, secrétaire général

- Barreau de Paris

Me Jean-Louis PELLETIER

Me Frédérique PONS

- Conseil national des barreaux

Me Jean-Paul LEVY, président de la commission « Textes »
Me Didier LIGER, président de la commission
« Libertés et droits de l'homme »

Mme Danielle MONTEAUX, chargée des relations institutionnelles

- Conférence des Bâtonniers

Me Franck NATALI

Mme Françoise LOUIS, chargée des relations institutionnelles

- Fédération nationale des unions de jeunes avocats

Me David GORDON-KRIEFF, président d'honneur

Me Loïc DUSSEAU, président de la section de Paris

- Association aide aux parents d'enfants victimes (APEV)

M. Alain BOULAY, président

- Union nationale des syndicats autonomes de la police

M. Alain CORBION

- Direction générale des douanes et droits indirects

M. Pierre FOND, sous-directeur des affaires juridiques, du contentieux,
des contrôles et de la lutte contre la fraude

- Direction centrale de la police judiciaire

M. Gérard GIREL, directeur

- Conférence des premiers présidents de cour d'appel

M. Olivier AIMOT, président

- Direction générale de la police nationale

M. Michel GAUDIN, directeur général

Mme Lilianne LEYMARIE, conseiller technique

M. Michel ROUZEAU, conseiller technique

- Office central de lutte contre le trafic illicite de stupéfiants

M. Bernard PETIT, responsable

M. Nicolas TOGNOTTI, officier de liaison

- Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions

M. Alain BOURDELAT, directeur général

- Association des praticiens de Cour d'assises

M. Henri-Claude LEGALL

- Conférence des Procureurs généraux

M. André RIDE, président

- Service de lutte contre la criminalité organisée au parquet de Paris

M. Philippe MAÎTRE , magistrat

- Personnalités

Me Daniel SOULEZ-LARIVIERE, avocat

Me Corinne LEPAGE, avocat, ancien ministre de l'environnement

M. Yves BOT, procureur de la République près le TGI de Paris

Me Henri LECLERC, avocat

Me Jacques VERGÈS, avocat

M. Francis TEITGEN, ancien bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris, vice-président d'« Ouest-France »

M. Alphonse ARZEL, ancien sénateur

ANNEXE 2
-
PERSONNES RENCONTRÉES AU COURS
DES DÉPLACEMENTS

_____

Tribunal de grande instance de Créteil

(28 mai 2003)

- M. Didier MARSHALL, président ;

- M. Michel BARRAU, procureur de la République 161 ( * ) ;

- Mme Jacqueline AUDAX, vice-présidente chargée de l'instruction, doyen des juges d'instruction ;

- Mme Annie BASSET, vice-présidente, secrétaire générale ;

- Mme Marie-José BOITEAU-LEBON, vice procureure, chef de la section « unité de permanence » ;

- Mme Martine BOUJU, vice-présidente chargée du service du juge des libertés et de la détention ;

- M. Jean-Paul CONTENT, procureur de la République adjoint ;

- Mme Marie-Jeanne CROS, greffier en chef, chef de greffe ;

- Mme Catherine GIUDICELLI, vice-présidente chargée de l'instruction ;

- M. Laurent MARCADIER, substitut, section « délinquance organisée » ;

- Mme Solange MORACCHINI, vice-procureure, adjoint au procureur ;

- M. Dominique PAUTHE, vice-président chargé du service correctionnel ;

- Mme Marie-Suzanne PIERRARD, vice-présidente chargée de l'application des peines ;

- Monsieur Jean-Pierre SABATIER, vice-procureur, chef de la section « économique et financière » ;

- M. Bernard THOUVENOT, vice-président chargé de l'instruction.

Déplacement à Rome
(avec MM. José Balarello et Robert Bret)

(3 au 5 juin 2003)

- Mme IANNINI, directeur des affaires criminelles, ministère de la justice ;

- M. TINEBRA, directeur de l'administration pénitentiaire ;

- M. MANTOVANO, sous-secrétaire d'Etat, président de la commission pour la définition et la mise en oeuvre des mesures spéciales de sécurité ;

- M. FERA, directeur de la police criminelle ;

- M. CUFALO, directeur du service central de protection ;

- M. NITO PALMA, député ;

- M. VIGNA, procureur national antimafia ;

- M. DA NOVI, président Conseil national des Barreaux ;

- M. SPIGARELLI, secrétaire général de l'Union des chambres pénales ;

- M. CENTARO, sénateur, président de la commission bicamérale antimafia ;

- M. BARBE, magistrat de liaison français en Italie ;

- M. BRIATTA, premier conseiller à l'Ambassade de France.

Déplacement à Laval

(6 juin 2003)

Commissariat de police

- M. Laurent COINDREAU, directeur départemental de la sécurité publique.

Tribunal de grande instance

- M. Patrice DOUCHY, président ;

- M. Philippe VARIN, procureur de la République ;

- M. Georges BORG, juge d'instruction ;

- M. Jacques CAZAL, vice-président ;

- Mme Brigitte CHEVRET, substitut du procureur ;

- Mme Véronique DANIEL, juge d'application des peines ;

- Mme Patricia GRANGE-PITEL, juge d'application des peines ;

- M. Alain LE COZ, substitut placé ;

- Mme Françoise NORMANT, vice-présidente chargée du tribunal pour enfants ;

- M. Fabrice TREMEL, substitut du procureur.

Ordre des avocats

- Me Jacques DESBOIS ; bâtonnier ;

- Me Renaud GISSELBECHT ;

- Me Jean LANDRY ;

- Me Patrice MARCEL, ancien bâtonnier ;

- Me Anne-Marie MAYSONNAVE, ancien bâtonnier ;

- Me Francis PENARD, ancien bâtonnier ;

- Me Benoît de TREVERRET.

Tribunal de grande instance de Marseille
(avec M. Robert Bret)

(10 juin 2003)

- Mme Danièle ENTIOPE, président ;

- M. Jacques BEAUME, procureur ;

- Mme Fabienne ADAM, vice-présidente, instruction ;

- M. Patrick ANDRE, vice-président, instruction ;

- M. Mougline ARISTIDE, substitut ;

- Mme Béatrice BRUE, vice-présidente ;

- M. Michel CALARD, chef de greffe ;

- M. Marc CIMAMONTI, vice-procureur ;

- M. Patrick COUENNE, vice-président ;

- Mme Marie-Ange DAUMAZ, vice-présidente ;

- Mme Béatrice DELVOLGO, vice présidente, instruction ;

- Mme Parvine DERIVERY ;

- M. J. FAGLIN, vice-président ;

- M. J. FERNANDEZ, vice procureur ;

- M. Marc GOUTON, vice-procureur ;

- M. C. GRILLAT, vice-procureur ;

- M. Pascal GUICHARD, vice-président, instruction ;

- M. F. ISSENJOU, vice-président ;

- M. Y. LE BAUT, procureur adjoint ;

- Mme Elisabeth LIARD, assistante spécialisée ;

- Mme Brigitte LOPEZ-REANS, greffier en chef, parquet ;

- Mme Michèle MAESTRACCI, assistante spécialisée ;

- M. P. OLLIVIER-MAURE, substitut ;

- Mme Cathy PAUTROT, vice-procureur ;

- M. Pascale SEGRERA, greffier en chef, greffe pénal ;

- M. Olivier VANBREMEERSCH, vice-président.

Déplacement à Washington
(avec MM. Robert Bret, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Patrice Gélard
et Georges Othily)

(9 au 12 septembre 2003)

- M. Jean-David LEVITTE, ambassadeur de France ;

- M. Christopher WRAY, assistant attorney general ;

- M. Bruce OHR, chef de la section de lutte contre la criminalité organisée au département de la justice ;

- M. James SENSENBRENNER, président du comité judiciaire de la chambre des représentants ;

- M. Roscoe HOWARD, procureur fédéral du District of Columbia ;

- M. Michel HOROWITZ, membre de la Federal Sentencing Commission ;

- Réunion de travail à la Cour supérieure de Washington avec des juges et des avocats, présidée par l'honorable juge John BAYLY, Jr. ;

- M. Denis PIETTON, ministre - conseiller de l'Ambassade de France ;

- M. Orlando RIVIERA, chief inspector ;

- Mme Vas MANTZOURANIS, supervisory analyst ; United States

- Mme Robyn ANDERSON, senior inspector ; Marshals Service

- Mme Tania CLINE, senior inspector

- M. Richard TRODDEN, Commonwealth attorney du Comté d'Arlington ;

- M. Jean-Pierre PICCA, magistrat de liaison français aux Etats-Unis ;

- M. Philippe BUGEAUD, attaché de sécurité intérieure français aux Etats-Unis.

ANNEXE 3

AUDITION DE M. DOMINIQUE PERBEN,
GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE

(mardi 17 juin 2003)

_____

La commission a procédé à l'audition de M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de loi n° 314 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a expliqué que le projet de loi s'inscrivait dans un triple mouvement : prolonger la modernisation et le rééquilibrage engagé en matière pénale par la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 2 septembre 2002, renforcer la politique de sécurité du gouvernement fondée sur l'action combinée des services de police et de gendarmerie et de l'institution judiciaire et définir un cadre procédural applicable aux formes nouvelles de criminalité.

Il a exposé les trois séries de mesures proposées par le projet de loi relatives, d'une part, à la lutte contre la criminalité organisée, d'autre part, à la répression des infractions en matière économique et financière, sanitaire, environnementale et de discriminations raciales, et enfin à l'amélioration et à la simplification du fonctionnement de la procédure pénale générale.

Sur le premier volet, le ministre a constaté le développement, au niveau international, d'entreprises criminelles organisées et violentes, nécessitant une réponse plus efficace. Il a précisé que le projet de loi dressait une liste d'infractions recouvrant les activités délinquantes et criminelles les plus graves relatives aux atteintes, directes ou potentielles, aux personnes comme aux biens, tout en définissant un régime procédural adapté en matière de poursuite, d'instruction et de jugement de ces affaires.

Convaincu de l'impossibilité, pour les 181 tribunaux de grande instance répartis sur le territoire national, de traiter des dossiers de grande délinquance dans des conditions satisfaisantes, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a prôné la création de juridictions spécialisées couvrant le ressort de plusieurs cours d'appel érigées en véritables « plateaux techniques ». Il a fait valoir l'urgence de cette réforme en parallèle de la réorganisation en cours des services de police judiciaire en 9 directions interrégionales.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a ensuite relevé que le projet de loi tendait à renforcer certaines procédures spécifiques, telles que l'infiltration, la garde à vue, les perquisitions de nuit et les écoutes téléphoniques mises en oeuvre sous le contrôle du parquet et sur autorisation d'un magistrat du siège. Il a fait observer que l'Assemblée nationale, après avoir adopté un amendement permettant la sonorisation et la fixation d'images dans les lieux privés, avait proposé une simplification des régimes applicables en matière de garde à vue, n'excluant pas que ces dispositifs puissent être encore affinés au cours de la navette parlementaire.

Soulignant que le projet de loi tendait également à renforcer la répression des auteurs d'infractions, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a insisté sur l'affermissement du système des repentis proposé par le texte. Rappelant que ce système existait déjà en pratique, il a indiqué que le projet de loi visait, d'une part, à lui donner un cadre légal, et d'autre part, à en étendre le champ d'application.

Le ministre a souligné que la mise en place de règles d'investigation renforcées justifiait l'insertion, dans le projet de loi, de certains aménagements procéduraux, destinés à garantir les droits de la défense tout au long de la procédure.

Sur le volet relatif à la lutte contre les infractions en matière économique et financière, sanitaire et environnementale et de discriminations, le garde des sceaux a annoncé le renforcement des compétences des juridictions spécialisées, instituées depuis 1975 en matière économique et financière, la création de juridictions interrégionales, ainsi que la clarification du statut des assistants spécialisés appelés à assister les magistrats de ces juridictions, conformément aux recommandations du rapport publié en juin 2002 de la mission d'information de la commission des lois du Sénat sur l'évolution des métiers de la justice, présidée par M. Jean-Jacques Hyest et dont M. Christian Cointat était le rapporteur.

Estimant que le projet de loi permettrait de renforcer l'efficacité des deux juridictions spécialisées de Paris et Marseille en matière de santé publique, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a ensuite déclaré que la lutte contre les rejets polluants des navires serait également renforcée grâce à l'extension de la compétence des trois juridictions existantes en matière d'enquête, d'instruction, de poursuite et de jugement des infractions intentionnelles survenues dans la zone économique exclusive, au maintien de la compétence du tribunal de grande instance de Paris pour les affaires présentant une grande complexité et à l'alourdissement des peines encourues en cas de rejets polluants par des navires. Il a ajouté que le texte proposait de réprimer plus efficacement les atteintes aux personnes ou aux biens présentant un caractère raciste comme les délits de discrimination.

Abordant le troisième volet tendant à renforcer la cohérence, l'efficacité et l'effectivité de la justice pénale, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a expliqué que le principe d'une réponse pénale systématique et diversifiée était consacré, évoquant l'extension de la procédure de composition pénale et la création d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Il a indiqué que cette dernière procédure permettrait au procureur de la République de proposer une peine à la personne, soupçonnée d'un délit puni de cinq ans d'emprisonnement au plus, qui reconnaîtrait en être l'auteur. Il a précisé que le consentement de la personne mise en cause serait recueilli en présence de son conseil, qui aurait accès au dossier, et qu'elle bénéficierait d'un délai de réflexion de dix jours pour accepter la proposition. Il a précisé que la proposition du procureur ferait l'objet d'une homologation par le président du tribunal de grande instance et que la personne mise en cause pourrait faire appel de la décision du président dans les dix jours. Il a enfin souligné que les peines prononcées à l'issue de cette procédure seraient plus faibles que celles susceptibles d'être prononcées par le tribunal, la peine d'emprisonnement ne pouvant être supérieure à six mois, bien que l'Assemblée nationale ait supprimé l'impossibilité, pour la peine d'amende prononcée, d'excéder la moitié de l'amende encourue.

M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a mis en avant la meilleure prise en considération des victimes, notamment en matière d'information et d'indemnisation. Il a ajouté que l'entraide internationale en matière judiciaire serait également facilitée en vue de l'édification d'un véritable espace judiciaire européen.

Enfin, il a évoqué les amendements de l'Assemblée nationale reprenant des propositions faites par M. Jean-Luc Warsmann, dans son rapport sur l'exécution des peines remis au Premier ministre sur les alternatives à l'emprisonnement et la préparation à la sortie des détenus. Le ministre a indiqué qu'il s'agissait d'accélérer le traitement des fins de peines ou des courtes peines, de prévoir la possibilité de transformer certaines peines d'emprisonnement en peines de travail d'intérêt général, de donner au tribunal la possibilité de prononcer directement une peine de placement sous bracelet électronique et de faciliter l'exécution des peines de travail d'intérêt général.

Après avoir indiqué qu'il avait effectué de nombreuses auditions et plusieurs déplacements dans des juridictions, M. François Zocchetto, rapporteur , a observé que le projet de loi allait enfin doter la justice des instruments d'enquête lui faisant actuellement défaut, conformément aux recommandations de conventions internationales relatives notamment à la modification de l'organisation judiciaire par la création de juridictions spécialisées. A ce titre, il s'est interrogé sur les moyens consacrés à cette réforme, et sur ses conséquences sur la formation des magistrats.

Le rapporteur s'est interrogé sur la modestie de la transposition de la décision-cadre Eurojust, notamment au regard des pouvoirs dévolus par le texte au représentant français au sein de cette institution et, d'autre part, sur l'opportunité de transposer à cette occasion d'autres textes communautaires, tels que celui relatif au mandat d'arrêt européen.

M. François Zocchetto, rapporteur , s'est également interrogé sur l'avenir du juge d'instruction après l'ouverture au procureur de la République de nombreux outils de conduite des enquêtes.

Prenant acte de l'intérêt des magistrats pour la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité instituée par le projet de loi, il a fait état de leurs inquiétudes du fait de sa complexité et a demandé au garde des sceaux s'il ne conviendrait pas de la simplifier et de mieux la différencier de celle relative à la composition pénale, afin d'en assurer le succès.

S'agissant des moyens alloués aux juridictions spécialisées en matière de criminalité organisée, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a souligné que, si la localisation de ces nouvelles juridictions n'était pas encore arrêtée, l'avant-projet de budget pour 2004 prévoyait déjà les moyens nécessaires grâce à l'augmentation des effectifs prévue par la loi d'orientation et de programmation pour la justice. De plus, il a indiqué que la concentration de ressources humaines et logistiques sur cinq à dix « plateaux techniques spécialisés » serait un facteur d'économie et d'efficacité. Il a donc estimé que ce projet de loi permettrait d'économiser les crédits, d'autant plus que la reconnaissance préalable de culpabilité et l'extension de la procédure de composition pénale constituaient autant de mesures simplificatrices.

Estimant difficile de s'improviser spécialiste de la grande criminalité, il s'est déclaré convaincu de la nécessité d'améliorer la formation des magistrats et plus particulièrement de définir des profils adaptés aux fonctions spécialisées. Il a indiqué qu'une réflexion sur l'évolution des formations initiale et continue était actuellement en cours à l'Ecole nationale de la magistrature.

Par ailleurs, le garde des sceaux a considéré que le coût de la prise en charge des repentis, à la charge du ministère de l'intérieur, serait marginal.

Au sujet de la coopération judiciaire, il a reconnu la modestie des pouvoirs du représentant au sein d'Eurojust, mais a estimé qu'elle s'inscrivait dans le cadre d'une évolution progressive vers un collège constituant un futur parquet européen. Il a annoncé le dépôt à l'automne, au Parlement, du texte de transposition de la directive relative au mandat d'arrêt européen.

Abordant le caractère accusatoire ou inquisitoire de la procédure pénale française, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a indiqué qu'il s'agissait en pratique d'un système mixte, comme dans la plupart des pays européens. Il a jugé équilibrée la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité proposée par le projet de loi issue d'une longue maturation et de multiples négociations avec les magistrats et les avocats. Il a rappelé que l'objectif de cette réforme était également d'améliorer le traitement judiciaire des dossiers pour les justiciables en le rendant plus fluide.

Après avoir dénoncé les dispositions dérogatoires au droit commun en matière de criminalité organisée proposées par le projet de loi, M. Michel Dreyfus-Schmidt a regretté que l'étude d'impact jointe au projet de loi n'analyse pas les faiblesses du dispositif actuel susceptibles de justifier la présente réforme. Il a déploré l'éloignement géographique pour les victimes du lieu des procès susceptibles de relever des juridictions interrégionales, inconvénient déjà dénoncé pour la cour d'assises spécialisée en matière de terrorisme. Assimilant le choix du gouvernement de retenir une dizaine de sites pour traiter de la délinquance en matière de criminalité organisée à une mesure de centralisation de la justice, il a souhaité connaître les cours d'appel de rattachement de chacune de ces juridictions.

Tout en admettant l'intérêt de prévoir des procédures différentes lorsque la personne reconnaissait sa culpabilité, il a dénoncé la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité, considérant qu'il s'agissait d'un marchandage, et contestant le principe selon lequel l'initiative de la réduction de peine appartenait au parquet. Il a souhaité savoir ce que le projet de loi prévoyait lorsque la personne revenait sur sa déclaration.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a jugé nécessaire une limitation du nombre de régimes de garde à vue. Il s'est également interrogé sur l'opportunité des dispositions relatives à la prise en charge spécifique des repentis et à l'organisation d'infiltrations par les officiers de police judiciaire.

Après avoir déploré les changements trop fréquents intervenus ces dernières années en matière pénale, M. Michel Dreyfus-Schmidt s'est enquis de l'avenir du juge d'instruction et s'est demandé s'il ne fallait pas plutôt prévoir un collège de juges d'instruction pour les affaires de grande criminalité, soulignant l'isolement et la vulnérabilité de ces magistrats.

M. Jacques Larché a souhaité savoir comment l'avocat jouerait son rôle de conseil dans la procédure de la reconnaissance préalable de culpabilité.

Mme Nicole Borvo s'est interrogée sur l'opportunité d'une nouvelle loi réformant la procédure pénale et a affirmé son attachement au système actuel ainsi qu'au rôle du juge d'instruction.

M. Pierre Fauchon a souligné que l'efficacité opérationnelle de la justice s'opposait à un éclatement géographique du parquet du tribunal de grande instance de Paris et a souhaité connaître l'état d'avancement du dossier relatif au relogement de cette juridiction.

En réponse à M. Michel Dreyfus-Schmidt, M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice , a justifié la mise en place de juridictions spécialisées en matière de délinquance et de criminalité organisées par l'impossibilité pour chacun des 181 tribunaux de grande instance de traiter de dossiers particulièrement complexes.

Il est revenu sur la nécessité de concentrer les moyens de la justice pour une plus grande efficacité de la procédure. Il a indiqué que le recours aux nouvelles juridictions spécialisées devrait demeurer exceptionnel, le choix des dossiers s'effectuant au cas par cas, notamment en fonction de la gravité, de la complexité et de la situation géographique des affaires. Il a ajouté que des procédures similaires existaient déjà aux Pays-Bas, en Espagne, en Italie et en Belgique.

Concernant la réforme du régime de la garde à vue, M. Dominique Perben a indiqué que la navette parlementaire serait l'occasion d'améliorer le dispositif voté par l'Assemblée nationale.

Il a ensuite indiqué que la reconnaissance préalable de culpabilité permettrait seulement de parvenir à une solution pour les dossiers les plus simples.

En réponse à M. Jacques Larché, M. Dominique Perben a expliqué que le rôle de l'avocat serait déterminant, celui-ci ayant accès au dossier et pouvant conseiller son client tout au long de la procédure.

Concernant le site judiciaire du tribunal de grande instance de Paris, il s'est déclaré personnellement favorable au maintien de cette juridiction dans l'île de la Cité, cette décision présentant l'avantage de limiter la multiplication des surfaces et des coûts de fonctionnement. Il a annoncé la mise en place d'un établissement public, estimant que ce dossier devait faire l'objet d'une gestion particulière.

En réponse à M. Jacques Larché, qui avait souhaité connaître les modalités de la reconnaissance préalable de culpabilité en cas de pluralité de mises en cause, M. Dominique Perben a précisé qu'il appartenait exclusivement au procureur de la République, et non aux parties, de proposer cette procédure au prévenu, contrairement au « plea bargaining » américain.

M. Robert Badinter a insisté sur la nécessité de maintenir le site judiciaire de Paris sur l'île de la Cité, rappelant que l'acte judiciaire français le plus ancien, datant de 474, avait été pris en ce lieu.

M. Dominique Perben a indiqué que seul le déplacement du tribunal de grande instance de Paris avait été envisagé, et non celui de la Cour de cassation ou de la Cour d'appel. Il a toutefois réaffirmé son souhait de maintenir l'ensemble de ces juridictions sur l'île de la Cité.

En réponse à M. Michel Dreyfus-Schmidt, il a enfin précisé que la cour d'appel de rattachement des juridictions spécialisées serait identique à celle du tribunal de grande instance désigné pour accueillir ces juridictions.

ANNEXE 4
LES REPENTIS FACE À LA JUSTICE PÉNALE
LE PLAIDER-COUPABLE

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SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES

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Division des études de législation comparée

LES DOCUMENTS DE TRAVAIL DU SÉNAT

Série LÉGISLATION COMPARÉE

LES REPENTIS FACE À LA JUSTICE PÉNALE

Ce document constitue un instrument de travail élaboré à l'intention des Sénateurs par la Division des études de législation comparée du Service des Études juridiques. Il a un caractère informatif et ne contient aucune prise de position susceptible d'engager le Sénat.

n° LC 124 Juin 2003

LES REPENTIS FACE À LA JUSTICE PÉNALE

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Les « repentis », parfois qualifiés de « collaborateurs de justice », sont les personnes qui, ayant participé à des activités criminelles, acceptent de coopérer avec les autorités judiciaires ou policières et obtiennent différents avantages en échange de leur collaboration.

Celle-ci peut prendre différentes formes. Elle peut par exemple consister à fournir des informations susceptibles d'empêcher la réalisation d'une infraction planifiée ou de faciliter l'identification de l'auteur d'une infraction déjà réalisée. En contrepartie de sa collaboration, le délinquant peut obtenir un abandon des poursuites de la part du ministère public ou une réduction de peine, voire une exemption, de la part du juge.

Ce dispositif existe déjà en France pour certaines infractions , notamment pour le trafic de stupéfiants, les actes de terrorisme et l'association de malfaiteurs. Le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité , présenté en conseil des ministres le 9 avril 2003 et adopté par l'Assemblée nationale en première lecture le 23 mai 2003, vise à en étendre l'application aux cas d'empoisonnement, d'assassinat, de torture, de séquestration et d'enlèvement, de détournement d'avion, de proxénétisme, de traite des êtres humains, de vol en bande organisée et de trafic d'armes, c'est-à-dire à toutes les infractions relevant de la criminalité organisée .

De plus, pour assurer la sécurité des repentis, le projet de loi prévoit la possibilité de leur accorder une identité d'emprunt.

Comme le dispositif du repenti est directement inspiré du système anglais du « témoin de la Couronne », lui-même adapté aux États-Unis, la réforme envisagée justifie l'examen du statut du repenti dans ces deux pays. Il a également semblé nécessaire d'étudier les exemples allemand et italien.

En Allemagne, la loi sur les repentis, adoptée en 1989 dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et étendue en 1994 pour faciliter le démantèlement des associations de malfaiteurs, a été abandonnée en 1999, mais il subsiste plusieurs dispositions isolées sur les repentis, notamment dans le code pénal.

En Italie, en revanche, des règles similaires à la loi allemande de 1989, également adoptées pour lutter contre le terrorisme à la fin des années 70, ont vu leur champ d'application étendu peu à peu à tout le domaine de la criminalité organisée et même au-delà.

Par ailleurs, le régime autrichien des atténuations de peine pour collaboration avec les autorités judiciaires, adopté en 1998 pour faciliter la lutte contre la criminalité organisée, a été analysé.

De même, les diverses dispositions pénales belges actuellement en vigueur sur les repentis ont été prises en compte, tout comme la proposition de loi « instaurant un régime pour les collaborateurs de justice », déposée à la Chambre des représentants en février 2002.

Enfin, le projet de loi néerlandais sur les promesses faites aux témoins dans les affaires pénales, actuellement soumis au Parlement et qui vise à ancrer dans la législation une pratique déjà admise par le parquet, a été étudié.

En revanche, en Suisse, dans le cadre des travaux préalables à l'élaboration d'un code de procédure pénale unique, une commission d'experts s'est prononcée contre l'introduction d'un tel dispositif.

Pour chacun des huit pays qui disposent d'un statut du repenti ou qui envisagent son introduction, l'Allemagne, l'Angleterre et le Pays de Galles, l'Autriche, la Belgique, l'Espagne , l'Italie, les Pays-Bas et les États-Unis, les principales caractéristiques de ce régime ont été examinées :

- les infractions visées par le dispositif ;

- la nature de la collaboration justifiant sa mise en oeuvre  ;

- les remises de peine et la protection spéciale accordée aux repentis ;

- la valeur probatoire de leurs déclarations .

1) Le dispositif anglo-saxon du témoin de l'accusation a un champ d'application illimité, à la différence des règles continentales sur les repentis

a) Peu codifié, le système anglo-saxon est applicable à tous les accusés

Ce sont les règles relatives à la preuve qui expliquent le système anglo-saxon. En effet, l'impossibilité d'entendre un accusé comme témoin à charge dans une affaire pénale s'il était encore susceptible d'être condamné pour une infraction citée dans la procédure en cours obligeait la Couronne, titulaire de l'action publique, à lui accorder son pardon et à abandonner les poursuites. L'accusé à qui le pardon avait été accordé se commuait ainsi en « témoin de la Couronne ».

Si la pratique du pardon a disparu, de nos jours, l'accusation a la possibilité de négocier différents accords d'abandon ou de désistement partiel des poursuites en échange d'informations de la part d'un accusé, y compris lorsque les informations portent sur un coaccusé ou un complice.

Il en va de même aux États-Unis, où les procureurs jouissent d'une grande liberté et peuvent ainsi conclure des accords avec les accusés. Ce type de négociation entre l'accusation et la défense permet notamment de faire échec au cinquième amendement de la Constitution fédérale , grâce auquel tout citoyen peut refuser de témoigner contre lui-même dans une affaire pénale et qui exclut en principe toute collaboration des repentis avec les autorités judiciaires.

Par ailleurs, sous l'appellation d' « immunité légale », le code fédéral américain prévoit la possibilité pour un tribunal de contraindre un suspect à collaborer avec la justice sous peine de sanctions et de lui promettre en échange que son témoignage ne sera pas utilisé contre lui.

Que le repenti bénéficie d'un accord de renonciation aux poursuites ou de l'immunité légale, le champ d'application du dispositif anglo-saxon est en principe illimité. Il n'exclut aucune infraction ni aucun type de collaboration : il suffit que l'accusation considère le témoignage de l'accusé comme servant l'intérêt général.

b) Dans les pays d'Europe continentale, les récompenses accordées aux repentis sont explicitement prévues et ne sont applicables que dans certains cas

En Allemagne, en Autriche, en Belgique, Espagne, en Italie, les dispositions sur le traitement pénal favorable accordé aux repentis figurent soit dans le code pénal, soit dans d'autres lois comportant des dispositions pénales. Le projet de loi néerlandais vise également à modifier le code pénal.

Les infractions visées

En règle générale, ces dispositions ne sont applicables qu'à certaines infractions, souvent limitativement énumérées et limitées aux cas de criminalité organisée (association de malfaiteurs, trafic de stupéfiants ou de fausse monnaie, terrorisme...), ainsi que, le cas échéant, aux infractions connexes.

Cependant, le législateur italien a progressivement étendu le champ d'application des mesures sur les repentis à des infractions très diverses, comme les atteintes au droit d'auteur ou le vol. De même, le projet de loi néerlandais vise non seulement les infractions commises par des bandes organisées, mais également toutes les infractions les plus graves, punissables de peines de prison d'au moins huit ans.

La nature de la collaboration

À l'exception du projet de loi néerlandais, qui prévoit que les déclarations de l'intéressé doivent constituer une « contribution importante » au déroulement de la procédure, tous les textes précisent que l'attribution de récompenses aux repentis est limitée à certaines formes de collaboration.

L'octroi d'un traitement pénal avantageux peut par exemple être réservé aux accusés qui empêchent la réalisation d'une infraction déjà planifiée, qui permettent l'obtention d'éléments déterminants pour l'identification d'autres délinquants, qui fournissent des informations sur les dirigeants de l'organisation à laquelle ils appartenaient ou qui s'efforcent d'éviter que cette dernière ne poursuive ses activités.

En outre, en Allemagne, en Belgique et en Italie, la teneur de la collaboration détermine l'ampleur de la récompense : réduction de peine (le plus souvent de l'ordre de 30 %), impunité, voire abandon des poursuites. Cependant, dans ce cas, le contenu et le moment des déclarations du repenti ne constituent pas les seuls éléments déterminants, car la nature de l'infraction est également prise en compte. Il en résulte donc des dispositions multiples, la récompense pénale variant en fonction de la nature de l'infraction, du moment où la collaboration a lieu et des informations fournies.

En revanche, en Autriche et en Espagne, si la nature de la collaboration du repenti conditionne l'octroi d'une récompense, elle n'en détermine pas l'importance, qui est laissée à l'appréciation du juge, car la collaboration est considérée comme une circonstance atténuante.

2) Les mesures de protection sont réservées aux repentis particulièrement menacés

En règle générale, les repentis peuvent bénéficier des dispositions relatives aux témoins menacés , ce qui leur permet d'être entendus dans des conditions particulières (à huis clos, par vidéoconférence, de manière anonyme...).

Par ailleurs, la plupart des pays ont mis en place des programmes spéciaux de protection . Toutefois, l'octroi d'un traitement pénal favorable n'entraîne pas automatiquement le bénéfice de ces mesures de protection, car celles-ci sont réservées aux repentis particulièrement menacés.

Le meilleur exemple à cet égard est fourni par l'Italie, où le législateur a décidé au début de l'année 2001 de dissocier l'incitation à la collaboration et la protection. Les mesures de protection sont désormais réservées aux seuls repentis accusés ou condamnés pour terrorisme, association mafieuse, trafic de stupéfiants ou enlèvement crapuleux (alors que le champ d'application des dispositions sur les repentis est beaucoup plus large), dans la mesure où leurs déclarations, parfaitement fiables, ont un caractère de « nouveauté », d'« exhaustivité » ou revêtent une « importance exceptionnelle ». En outre, pour bénéficier des mesures de protection, le repenti doit prendre plusieurs engagements, et notamment remettre au procureur de la République un « procès-verbal de collaboration » contenant toutes les informations qu'il détient.

Partout, les mesures de protection, qui sont souvent décidées par une commission ad hoc , peuvent être étendues aux membres de la famille en cas de besoin.

Ces mesures diffèrent selon que le repenti est ou non incarcéré. Dans le premier cas, il purge sa peine dans une unité spécialisée et peut parfois bénéficier d'un aménagement de son régime pénitentiaire (permissions, assignation à résidence...). Dans le second, plusieurs niveaux de protection sont généralement prévus selon le danger couru : simple protection policière, déménagement, versement de prestations pour compenser l'impossibilité de travailler, voire changement définitif d'identité dans les cas les plus graves.

Qu'elles soient initialement prises pour une durée déterminée ou non, les mesures de protection sont maintenues aussi longtemps qu'elles sont justifiées.

3) La valeur probatoire des déclarations faites par les repentis est généralement laissée à l'appréciation du juge

En l'absence de dispositions expresses, le juge est le plus souvent conduit à apprécier ces déclarations au même titre que les autres éléments de preuve.

Cependant, le projet de loi néerlandais est particulièrement explicite : il prévoit non seulement qu'aucune déclaration de culpabilité ne peut reposer sur les seuls dires d'un repenti, mais également que tout jugement prenant en compte les témoignages d'un repenti doit être motivé à cet égard.

De même, le code de procédure pénale italien dispose que les informations fournies par les repentis, qu'il s'agisse de coaccusés ou de personnes poursuivies séparément dans le cadre de procédures connexes, « sont évaluées concurremment avec les autres éléments de preuve qui en confirment la crédibilité ».

Dans les autres pays, bien qu'aucune disposition n'interdise explicitement qu'une condamnation soit prononcée sur la seule base des déclarations d'un repenti, la prudence constitue la règle. Ainsi, les plus hautes juridictions espagnoles estiment que la crédibilité des témoignages des repentis doit être évaluée notamment en fonction de la personnalité des intéressés et des raisons qui les ont incités à collaborer avec les autorités. De même, les juges anglais et les cours fédérales américaines invitent les jurés à la prudence lorsqu'une condamnation risque d'être prononcée sur la seule base des déclarations d'un repenti.

*

* *

Le projet de loi français vise à modifier le code pénal pour définir les récompenses accordées aux repentis pour chacune des infractions auxquelles le dispositif est applicable. Il prévoit également de fournir une identité d'emprunt aux repentis pour assurer leur sécurité.

Il est donc tout à fait comparable aux dispositions actuellement en vigueur en Europe continentale, où les mesures en faveur des repentis résultent de modifications successives apportées au code pénal, puis, le cas échéant, de textes spécifiques sur la protection.

Le « statut » du repenti apparaît donc comme l'addition de moyens épars, sans que les modalités de la collaboration avec les autorités soient clairement définies. Le projet de loi néerlandais est le seul texte qui règle ce point : il prévoit que le repenti et le procureur concluent un accord écrit, précisant les engagements des deux parties. Le bien-fondé de cet accord devrait ensuite être contrôlé par le juge d'instruction, avant que le juge ne puisse, à la demande du procureur, octroyer une remise de peine dont le quantum est également fixé dans le projet.

ALLEMAGNE

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Confrontée au problème du terrorisme, la République fédérale d'Allemagne a adopté en 1989 une loi accordant un régime pénal particulier aux repentis, la loi du 9 juin 1989 qui modifiait notamment le code pénal et le code de procédure pénale. Cette loi est souvent qualifiée de loi sur le « témoin de la Couronne » ( Kronzeugengesetz ).

La loi du 9 juin 1989 avait initialement été adoptée pour une période limitée et s'appliquait aux seules infractions relevant du terrorisme. Son champ d'application a été étendu en 1994 à l'association de malfaiteurs et sa durée de validité a été prolongée à plusieurs reprises, de sorte qu'elle est restée en vigueur jusqu'au 31 décembre 1999 .

Dès le milieu des années 70, un dispositif similaire, mais de portée beaucoup plus limitée, avait été introduit dans les articles du code pénal sur le terrorisme et la criminalité organisée. Pour renforcer la lutte contre la criminalité organisée, il a ensuite été étendu. Il a en effet été intégré en 1982 dans la loi sur les stupéfiants et en 1992 dans l'article du code pénal relatif au blanchiment d'argent.

À la différence de la loi du 9 juin 1989, ces dispositions, dénommées « petite réglementation du témoin de la Couronne » ( 162 ( * ) ), continuent à s'appliquer.

Le texte ci-dessous analyse la loi du 9 juin 1989, qui n'est plus en vigueur, ainsi que les règles actuellement applicables, c'est-à-dire la « petite réglementation du témoin de la Couronne ».

A. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

La loi du 9 juin 1989

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Les règles actuellement en vigueur

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Initialement, elle s'appliquait uniquement aux infractions définies par l'article 129a du code pénal ainsi qu'aux infractions connexes, à l'exception des génocides.

Relatif à la constitution d'organisations terroristes, l'article 129a du code pénal vise la création de groupements tendant à la réalisation de meurtres, d'assassinats, de prises d'otages, d'attentats et de certaines autres infractions créant un danger collectif (incendies volontaires, détournements de véhicules, empoisonnement de l'eau du réseau public de distribution...). L'article 129a vise également l'appartenance à de tels groupements.

En 1994, le champ d'application de la loi a été étendu aux infractions définies par l'article 129 du code pénal .

Sous l'appellation « constitution d'organisations criminelles », cet article vise non seulement la création d'associations de malfaiteurs, mais aussi l'appartenance et soutien à de telles organisations.

Elles s'appliquent aux infractions définies par :

- les articles 129, 129a, 129b et 261 du code pénal ;

- les articles 29, 29a, 30, 30a de la loi sur les stupéfiants.

Les articles 129 et 129a, relatifs aux organisations terroristes et criminelles, sont décrits dans la colonne de gauche. L'article 129b du code pénal a été ajouté en août 2002 : il vise les associations de malfaiteurs et les organisations terroristes implantées à l'étranger.

L'article 261 du code pénal se rapporte au blanchiment d'argent lié à la criminalité organisée.

Les articles 29, 29a, 30 et 30a de la loi sur les stupéfiants visent les principales infractions à la loi (culture, production, distribution et commercialisation de substances illicites en dehors de toute autorisation, et fourniture à des mineurs).

2. b) Les personnes concernées

La loi du 9 juin 1989

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Les règles actuellement en vigueur

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La loi s'appliquait aux auteurs (et à leurs complices) des infractions définies par les articles 129 et 129a du code pénal et à ceux d'autres faits liés à ces infractions , dans la mesure où ils fournissaient aux autorités judiciaires, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des informations susceptibles :

- d'empêcher à l'avenir la réalisation de telles infractions ;

- d'élucider des infractions déjà commises ;

- de contribuer à l'arrestation des auteurs ou des complices de telles infractions.

Elles s'appliquent uniquement aux personnes accusées des infractions définies, d'une part, par les articles 129, 129a, 129b et 261 du code pénal et, d'autre part, par les articles  29, 29a, 30, 30a de la loi sur les stupéfiants, dans la mesure où elles collaborent avec la justice, la nature de leur collaboration déterminant l'ampleur de la réduction de peine.

B. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

La loi du 9 juin 1989

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Les règles actuellement en vigueur

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L'article 129a du code pénal

Le procureur de la Cour fédérale suprême pouvait, avec l'accord de l'une des chambres pénales de cette cour, renoncer aux poursuites lorsque les informations livrées le justifiaient, notamment eu égard aux infractions ainsi empêchées.

Si les poursuites étaient entamées, le tribunal avait la possibilité de ne pas prononcer de peine ou de prononcer la peine minimale prévue par la loi .

Cependant, dans les cas d'homicide, la loi excluait l'abandon des poursuites ou l'impunité, et prévoyait une peine de prison d'au moins trois ans.

On estime à une vingtaine le nombre de cas où la mesure a été utilisée.

L'article 129 du code pénal

Les dispositions prévues pour les infractions définies par l'article 129a étaient applicables, mais seulement si l'intéressé était passible d'une peine de prison d'au moins une année et si son infraction justifiait l'application de l'article 73d du code pénal sur la confiscation.

Cette dernière condition limitait l'application de la mesure à quelques infractions (relatives à la fausse monnaie, au trafic d'êtres humains, au vol aggravé...). Elle semble avoir été mise en oeuvre une vingtaine de fois.

Les articles 129, 129a et 129b du code pénal

Le tribunal peut s'abstenir de prononcer une peine ou prononcer la peine minimale prévue par la loi ( 163 ( * ) ) dans deux cas :

- si l'auteur de l'infraction s'est efforcé, de son plein gré et de façon sérieuse, d'empêcher la survie de l'organisation ou la réalisation d'une nouvelle infraction correspondant aux objectifs de l'organisation ;

- s'il a communiqué à temps des informations qui ont empêché la réalisation d'une infraction déjà planifiée.

Ces trois articles du code pénal accordent l'impunité lorsque le concours du délinquant permet le démantèlement de l'organisation.

Ces dispositions sont considérées comme peu efficaces, car elles ne sont pas applicables à des infractions déjà réalisées. En outre, à la différence de la loi de 1989, elles s'appliquent aux seules infractions définies par les articles 129, 129a et 129b du code pénal, c'est-à-dire uniquement à la constitution d'organisations criminelles ou terroristes. Elles ne peuvent pas être mises en oeuvre pour des infractions connexes , comme des enlèvements ou des attentats.

L'article 261 du code pénal

Il accorde l'impunité aux auteurs d'infractions qui :

- dénoncent de leur plein gré aux autorités compétentes (ou agissent de façon à permettre une telle dénonciation) l'infraction à laquelle ils ont participé, alors que les faits n'ont pas encore été découverts ;

- garantissent la sauvegarde de l'objet recelé.

Il prévoit également que le tribunal ne prononce pas de peine ou prononce la peine minimale prévue par la loi lorsque les auteurs d'infractions fournissent de leur propre initiative des informations et apportent ainsi une contribution décisive à la découverte d'autres infractions relevant du même article.

L'article 31 de la loi sur les stupéfiants

Il dispose que, dans deux cas, le tribunal peut ne pas prononcer de peine ou prononcer la peine minimale prévue par la loi :

- lorsque, de leur propre initiative, les délinquants fournissent des informations plus larges que celles concernant leur seule participation à l'infraction et apportent ainsi une contribution importante à la découverte de l'infraction à laquelle ils ont participé ;

- lorsque leurs révélations empêchent la réalisation d'infractions planifiées.

Cette disposition est massivement utilisée : entre son entrée en vigueur en 1982 et la fin de l'année 1998, elle l'a été plus de 6 000 fois, mais sans que le rôle des repentis soit nécessairement décisif, car, dans le même temps, moins de 450 personnes ont bénéficié de mesures de protection.

2. b) Les mesures de protection

Les repentis bénéficient des dispositions sur la protection des témoins .

Dans les cas les plus graves (criminalité organisée au niveau international par exemple), cette protection relève de la compétence de l'Office fédéral pour la police criminelle , qui a institué en 1987 un programme spécifique . Les bénéficiaires en sont les personnes dont le témoignage est ou a été « important pour la recherche de la vérité ». Le programme, applicable aussi bien aux témoins incarcérés qu'à ceux qui ne le sont plus, pourvoit à tous les besoins des repentis : mise à disposition de gardes du corps, fourniture de gilets pare-balles, prise en charge des frais de chirurgie esthétique, hébergement, prestations en espèces pour compenser l'impossibilité de travailler...

Les autres repentis relèvent de la loi du 11 décembre 2001 portant harmonisation de la protection apportée aux témoins menacés . D'après cette loi, les mesures de protection sont prises par l'administration compétente de chaque Land, en règle générale la police, en fonction de son appréciation du danger couru par les intéressés. La loi prévoit explicitement que la protection peut être étendue aux membres de la famille et qu'un changement d'identité provisoire peut être accordé. Les mesures de protection sont secrètes. Elles ne figurent pas dans le dossier d'instruction, mais sont communiquées au ministère public sur demande.

C. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

Aucune disposition n'interdit explicitement qu'une condamnation soit prononcée sur la seule base des déclarations d'un repenti, mais l'introduction d'une telle mesure est demandée par une partie de la police et de la magistrature.

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* *

En décembre 1999, le Bundestag s'est opposé à la reconduction de la loi du 9 juin 1989 , alors que les autorités policières ainsi que les magistrats du siège et du parquet s'étaient majoritairement prononcés en faveur d'une telle reconduction, à la différence des avocats. Au cours des mois suivants, il a rejeté plusieurs propositions de loi tendant à étendre à d'autres articles du code pénal les règles actuellement en vigueur sur les repentis. À la même époque, le ministère de la Justice avait envisagé d'insérer dans le code pénal un nouvel article remplaçant les dispositions éparses régissant les repentis par une clause générale applicable indépendamment de la nature de l'infraction.

L'accord conclu entre le SPD et les Verts à l'issue des élections législatives de 2002 exclut explicitement toute réintroduction d'une disposition générale en faveur des repentis. En revanche, il prévoit de modifier le code pénal pour y insérer une clause générale d'atténuation de peine applicable notamment aux délinquants qui acceptent de collaborer avec la justice. En effet, dans la rédaction actuelle du code pénal, la clause d'atténuation de peine n'est applicable que dans les cas où les règles relatives à l'infraction considérée le prévoient.

ANGLETERRE ET PAYS DE GALLES

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Le plaider coupable ainsi que les accords informels passés entre l'accusation et la défense permettent l'octroi de récompenses aux accusés qui acceptent de collaborer avec la justice.

Toutefois, la collaboration des repentis peut se heurter à la question de la recevabilité de leur témoignage. En effet, par exception au précepte général selon lequel toute personne peut témoigner, le droit de la preuve interdit à un accusé d'être entendu comme témoin à charge s'il peut encore être condamné pour une infraction citée dans la procédure en cours.

Pour garantir la recevabilité des témoignages des coaccusés qu'elle souhaite entendre, l'accusation doit donc utiliser les instruments à sa disposition (abandon ou suspension des poursuites par exemple).

D. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

Les négociations entre l'accusation et la défense sont possibles quelles que soient la gravité et la nature de l'infraction. Elles sont notamment utilisables dans le cadre de la lutte contre les activités criminelles organisées.

2. b) Les personnes concernées

Les règles relatives à la preuve empêchent uniquement le témoignage des coaccusés et des complices encore susceptibles d'être condamnés pour une infraction citée dans l'affaire en cours.

Lorsqu'un tel témoignage apparaît capital et qu'il est impossible de l'obtenir autrement, l'accusation peut mettre en oeuvre plusieurs instruments protégeant les intéressés d'une condamnation et rendant donc leur témoignage à charge recevable.

Elle peut :

- abandonner définitivement les poursuites, dispositif utilisable seulement par les deux plus hautes autorités responsables des poursuites ( 164 ( * ) ) et rarement mis en oeuvre ;

- ne pas mentionner le nom du repenti dans l'acte d'accusation qui est transmis au tribunal ;

- ne pas fournir de preuves contre le repenti, ouvrant ainsi la voie à un acquittement ;

- prendre en compte le plaider coupable du repenti, de sorte que le tribunal n'a plus à prononcer de condamnation ( 165 ( * ) ) ;

- demander à l' Attorney-General d'adresser un nolle prosequi au tribunal après le début du procès. Le nolle prosequi est un simple courrier par lequel l 'Attorney-General indique au tribunal qu'il n'a plus l'intention de poursuivre. Cette décision, qui n'a pas besoin d'être motivée et qui échappe à tout contrôle du tribunal, suspend les poursuites, qui peuvent donc reprendre à tout moment. En outre, elle ne lie que l' Attorney-General qui l'a prise. Elle peut donc être remise en cause par ses successeurs.

E. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

La récompense accordée au repenti (abandon des poursuites, réduction des charges...) dépend de la négociation avec l'accusation.

Cependant deux remarques s'imposent :

- l'impunité est généralement limitée et garantit seulement que les déclarations du repenti ne seront pas utilisées contre lui, de sorte que les poursuites peuvent reprendre sur le fondement de nouveaux éléments ;

- en cas de plaider coupable du repenti, le juge a le choix : il peut prononcer la peine avant ou après la déposition. En pratique, les juges préfèrent généralement attendre la fin de la procédure pour prononcer la peine.

2. b) Les mesures de protection

Des mesures de protection (changement d'identité, déménagement, attribution d'une somme d'argent forfaitaire) peuvent être prises en faveur des repentis dont la vie est gravement menacée à la suite de témoignages relatifs à des activités criminelles organisées.

De telles mesures sont prises au cas par cas et n'ont aucune base légale ou réglementaire. Pour des raisons de sécurité, aucune information n'est disponible à leur sujet.

Elles sont mises en oeuvre et gérées par les forces de police spécialisées dans les affaires criminelles les plus graves.

La protection des témoins est au coeur des préoccupations du ministère de la Justice et du ministère de l'Intérieur depuis quelques années. Ce dernier a publié le 15 mai 2003 un plan d'action qui aborde notamment le problème des repentis. Ce document, qui évoque les risques encourus par les repentis eux-mêmes et par leur nouveau voisinage dans l'hypothèse d'un déménagement, souligne la nécessité pour tous les services administratifs concernés (services sociaux et de la santé, du logement et de l'éducation) de faciliter l'adaptation des repentis à leur nouvel environnement. Il insiste également sur la nécessaire sensibilisation des propriétaires de logements locatifs, et notamment des bailleurs de logements sociaux, qui devraient faciliter le déménagement des personnes menacées.

F. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

Selon une pratique judiciaire bien établie, le juge doit prévenir solennellement les jurés du danger d'une condamnation fondée uniquement sur le témoignage d'un repenti . Une fois cet avertissement reçu, les jurés sont libres de prononcer une condamnation sur la base d'un seul témoignage, même non corroboré par d'autres éléments.

AUTRICHE

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Dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, le Parlement a adopté en 1997 une loi introduisant dans le code de procédure pénale différentes « mesures particulières relatives à l'instruction » et modifiant le code pénal pour y insérer un article sur les repentis .

Intitulé « Atténuation de peine exceptionnelle en cas de collaboration avec les autorités chargées des poursuites », cet article est entré en vigueur le 1 er janvier 1998 pour une durée initialement limitée à quatre ans .

La loi de 1997 a été modifiée au cours de l'année 2002. La nouvelle loi, intitulée « loi de 2002 portant différentes mesures de nature pénale », est entrée en vigueur le 1 er octobre 2002. Ses dispositions sur les repentis reprennent sous une forme presque identique celles de la loi précédente.

A. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

L'article 41a du code pénal , intitulé « Atténuation de peine exceptionnelle en cas de collaboration avec les autorités chargées des poursuites », vise les infractions définies par les articles 277, 278, 278a et 278b, ainsi que celles qui leur sont liées.

Les articles 277, 278 et 278a définissent et punissent les différentes formes d'association de malfaiteurs , tandis que l'article 278b se rapporte à la direction d'une organisation terroriste ou à l'appartenance à une telle organisation .

Dans la version initiale, l'article 41a du code pénal ne visait que l'association de malfaiteurs, l'article 278b du code pénal ayant été ajouté en 2002.

2. b) Les personnes concernées

L'article 41a s'applique aux auteurs des infractions définies par les articles 277, 278, 278a et 278b du code pénal, ainsi qu'aux auteurs d'infractions connexes , dans la mesure où ils révèlent aux autorités chargées des poursuites des informations dont la connaissance contribue d'une manière essentielle :

- à éliminer ou à réduire considérablement le danger que constitue l'association ou l'organisation ;

- à favoriser l'éclaircissement d'une telle infraction ;

- à trouver un dirigeant de l'une des organisations ou associations visées par les articles 277, 278, 278a et 278b du code pénal.

B. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

Selon les termes de l'article 41a du code pénal, le tribunal peut, tout en tenant compte de la gravité des infractions commises, accorder aux repentis les atténuations de peine prévues à l'article 41 du même code, à condition que l'importance de leurs déclarations le justifie.

L'article 41 ne vise pas les seuls repentis, mais, de façon générale, les cas où les circonstances atténuantes l'emportent sur les circonstances aggravantes ( 166 ( * ) ) .

Durée de la peine d'emprisonnement applicable à l'infraction

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Peine minimale après atténuation

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Perpétuité

un an d'emprisonnement

Perpétuité ou durée limitée, comprise entre dix et vingt ans

un an d'emprisonnement

Durée limitée, mais supérieure à dix ans

six mois d'emprisonnement

Entre cinq et dix ans

six mois d'emprisonnement

Entre un et cinq ans

trois mois d'emprisonnement

Moins d'un an

un jour d'emprisonnement

Toutefois, lorsque l'infraction commise constitue un homicide, la peine infligée doit, même après réduction, être d'au moins six mois.

2. b) Les mesures de protection

La loi sur la police dispose que la protection des personnes susceptibles de fournir des renseignements sur un attentat ou une organisation criminelle incombe aux forces de l'ordre. La protection peut être étendue aux proches, pour autant que ces derniers soient également menacés.

La même loi prévoit que, à la demande du ministère de l'Intérieur, les administrations compétentes ont l'obligation de fournir aux repentis des documents leur permettant de ne pas révéler leur véritable identité. À cette exception près, elle ne précise pas la nature des mesures de protection accordées aux repentis, mais une unité du ministère de l'Intérieur gère un programme de protection ad hoc .

Par ailleurs, les repentis peuvent bénéficier des mesures de protection prévues par le code de procédure pénale pour les témoins menacés et déposer de façon anonyme, se présenter dissimulés (dans la mesure, toutefois, où la défense peut observer leur comportement, de façon à se forger une opinion sur la crédibilité de leurs propos). Le recours à la vidéoconférence est également possible.

C. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

L'article 258 du code de procédure pénale précise que le juge doit, d'une façon générale, vérifier « soigneusement et scrupuleusement » la « crédibilité et la valeur probatoire » des éléments de preuve, en les considérant aussi bien isolément que les uns par rapport aux autres.

Dans son dernier alinéa, cet article attire l'attention particulière du juge sur les témoins qui ont été autorisés à déposer de façon anonyme. Même si le code de procédure pénale paraît exclure qu'une condamnation puisse être prononcée sur la seule base des déclarations d'un repenti, en octobre 1999, un Congolais a été condamné pour trafic de drogue sur la seule foi d'un témoignage anonyme.

BELGIQUE

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Il n'existe pas de règles générales sur la reconnaissance des repentis par la justice pénale, mais il existe, notamment dans le code pénal, plusieurs dispositions accordant une exemption ou une réduction de peine à celui qui dénonce une infraction dont il est le coauteur ou le complice. Certaines remontent au XIX e siècle, d'autres ont été introduites récemment.

Depuis une dizaine d'années, la mise en place d'un droit des repentis pour lutter contre la grande criminalité et le crime organisé est régulièrement évoquée , aussi bien dans les rapports des commissions d'enquête parlementaires que dans les projets du gouvernement.

En 1997, la question a fait l'objet d'une étude universitaire commandée par le gouvernement. Cette étude a donné lieu à un avant-projet de loi du ministère de la Justice , mais, faute de consensus au sein du gouvernement, aucun projet définitif n'a été élaboré. Récemment, deux propositions de loi reprenant la plupart des dispositions de l'avant-projet ont été déposées à la Chambre des représentants.

A. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

Elles sont précisées par le code pénal et par trois lois comportant des dispositions d'ordre pénal.

• Les articles du code pénal qui régissent les complots contre la sûreté de l'État , l'association de malfaiteurs, ainsi que les infractions relatives à la fausse monnaie comportent des mesures en faveur des repentis.

Les dispositions du même code sur la diffusion d'écrits sans indication d'auteur ou d'imprimeur et sur les loteries non autorisées prévoient également de telles mesures.

À l'exception de celle qui vise l'association de malfaiteurs, qui a été introduite en 1999, toutes ces règles remontent au XIX e siècle.

• La loi du 12 mars 1858 relative aux crimes et délits qui portent atteinte aux relations internationales envisage également le cas des repentis pour les complots dirigés contre un gouvernement étranger.

• Depuis 1975, la loi sur les stupéfiants comporte des dispositions favorables aux repentis. Elles visent toutes les infractions, qu'elles soient définies par la loi ou par ses arrêtés d'application. (usage en groupe de telles substances, fourniture à autrui, prescription abusive par un médecin...).

• Il en va de même depuis 1994 de la loi de 1985 sur les hormones animales pour les infractions consistant à s'opposer aux contrôles de l'Agence fédérale pour la sécurité alimentaire (refus d'inspection ou de prélèvement d'échantillons, fourniture de renseignements inexacts...).

2. b) Les personnes concernées

Dans tous les cas, les règles sur les repentis visent les auteurs et les complices des infractions qui viennent d'être définies, sans que les infractions connexes soient prises en compte.

Les dispositions du code pénal sur la diffusion d'écrits sans indication d'auteur ou d'imprimeur et sur les loteries non autorisées prévoient que la collaboration du repenti sert à identifier l'auteur d'une infraction déjà réalisée. Plus qu'une incitation à la collaboration, elles constituent plutôt la traduction de l'obligation de dénoncer, prévue par les textes.

En revanche, les autres mesures sur les repentis précisent que la collaboration sert des objectifs différents selon le moment où elle a lieu. Elle peut :

- empêcher la réalisation d'une infraction et fournir aux autorités l'identité des organisateurs, lorsqu'elle est antérieure à la réalisation d'une infraction ;

- permettre d'informer les autorités de la réalisation d'une infraction qu'elles ignorent encore et fournir l'identité des organisateurs, lorsqu'elle est postérieure à l'infraction mais antérieure aux poursuites pénales ;

- faciliter l'identification du coupable d'une infraction, lorsqu'elle est postérieure aux poursuites pénales.

B. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

La loi sur les hormones animales prévoit des réductions ou des exemptions de peine, selon que la collaboration est postérieure ou antérieure aux poursuites pénales. Il en va de même de la loi sur les stupéfiants, à une exception près : les auteurs de crimes ( 167 ( * ) ) ne peuvent bénéficier que d'une réduction de peine, jamais de l'impunité.

Les autres textes, dont la plupart réservent les avantages offerts aux repentis aux seuls cas où la collaboration a lieu avant les poursuites pénales, prévoient l'impunité.

• La réduction de peine

Pour les infractions à la loi sur les hormones animales , si la collaboration est postérieure aux poursuites pénales, les peines prévues (un emprisonnement de huit jours à trois ans et/ou une amende 5 000 à 25 000 €) sont réduites à une peine d'emprisonnement de huit jours à trois mois et/ou à une amende de 500 à 2 500 €.

Pour les infractions à la loi sur les stupéfiants , la collaboration avec les autorités entraîne une réduction de peine :

- lorsqu'elle a lieu après le début des poursuites, mais seulement pour les repentis auteurs de délits (emprisonnement de huit jours à trois mois et amende de 130 à 500 €, au lieu d'un emprisonnement de trois mois à cinq ans et/ou d'une amende de 5 000 à 500 000 €) ;

- lorsqu'elle a lieu avant le début des poursuites pour les repentis auteurs de crimes. Pour un crime punissable de la réclusion à perpétuité, la peine applicable est alors l'emprisonnement d'un à cinq ans et pour un crime punissable de la réclusion de vingt à trente ans, la peine consiste en une amende de 500 à 2 500 €. Pour tous les autres crimes, la peine (emprisonnement de six mois à deux ans et une amende de 250 à 1 000 €) est également beaucoup plus faible que la sanction normalement applicable.

• L'impunité

Dans tous les autres cas, le repenti bénéficie d'une exemption de peine :

- la collaboration, antérieure aux poursuites, a lieu dans le cadre de la loi sur les hormones animales ;

- la collaboration, antérieure aux poursuites, a lieu dans le cadre de la loi sur les stupéfiants, le repenti ayant commis un délit ;

- la collaboration, antérieure aux poursuites, a lieu dans le cadre des articles du code pénal comportant des dispositions sur les repentis (essentiellement complots contre la sûreté de l'État, fausse monnaie et associations de malfaiteurs) ;

- la collaboration a lieu dans le cadre de la loi de 1858, que le coupable ait fourni des informations sur le complot et ses auteurs avant les poursuites, ou qu'il ait permis l'arrestation de ceux-ci grâce aux informations fournies ultérieurement.

2. b) Les mesures de protection

Il n'existe pas de mesures spécifiques visant à protéger les repentis et leurs proches.

Le témoignage des repentis peut toutefois être recueilli selon des modalités particulières , la Constitution prévoyant, d'une part, que l'audition de certains témoins peut avoir lieu à huis clos et le code de procédure pénale disposant, d'autre part, qu'elle peut se dérouler hors de la présence de l'accusé. Dans certaines conditions, la jurisprudence accepte les auditions masquées. Les repentis peuvent également bénéficier des dispositions contenues dans la loi du 8 avril 2002 relative à l'anonymat des témoins.

En revanche, la loi du 7 juillet 2002 sur la protection des témoins menacés, qui prévoit différentes mesures de protection ( 168 ( * ) ) , ne s'applique pas aux repentis, car elle prévoit que « les mesures de protection octroyées à un témoin menacé sont retirées lorsqu'il est formellement inculpé ou poursuivi par le ministère public pour les faits sur lesquels il fait témoignage ». Les mesures de protection peuvent cependant bénéficier aux témoins auteurs d'infractions liées à celles qui font l'objet de leur témoignage.

De même, les repentis ne peuvent pas demander l'application de la loi du 2 août 2002 relative au recueil de déclarations au moyen de médias audiovisuels. En effet, celle-ci ne prévoit la possibilité de procéder à des auditions à distance par vidéoconférence, par télévision en circuit fermé ou par conférence téléphonique qu'en faveur des témoins menacés bénéficiaires d'une mesure de protection octroyée selon les termes de la loi du 7 juillet 2002 ainsi que, sur la base d'un principe de réciprocité, en faveur des témoins ou des personnes soupçonnées résidant à l'étranger.

C. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

En l'absence de dispositions spécifiques, la valeur probatoire des déclarations des repentis est laissée à la libre appréciation des juges .

La loi du 8 avril 2002 relative à l'anonymat des témoins exige que les témoignages anonymes soient « corroborés dans une mesure déterminante par des éléments recueillis par d'autres modes de preuve ».

*

* *

Deux propositions de loi sur les repentis ont été déposées au Parlement au cours des derniers mois.

La plus récente , qui vise à instaurer un régime pour les collaborateurs de justice, a été déposée par deux députés de la majorité le 21 février 2002 . Elle reprend l'avant-projet de loi du ministre de la Justice. Faisant suite aux travaux de la commission d'enquête sur la criminalité organisée qui avait été instituée en 1996 et au rapport de recherche réalisé en 1997 par l'Université de Gand, cette proposition a un champ d'application limité aux infractions commises dans le cadre d'une organisation criminelle et aux violations les plus graves du droit international humanitaire . Le repenti (une personne inculpée, déclarée coupable ou purgeant une peine) pourrait passer un accord écrit avec le ministère public , cet accord pouvant contenir une promesse d'extinction de l'action publique, d'exemption ou de réduction de peine, ou un engagement relatif à l'exécution de la peine. La déposition ne pourrait être prise en compte à titre de preuve que si elle était corroborée par d'autres éléments et ne pourrait, en aucun cas, être anonyme.

La précédente, déposée par l'opposition en août 2001, reprend également l'essentiel des dispositions de l'avant-projet de loi, mais elle n'aborde pas la question du témoignage sous couvert d'anonymat.

ESPAGNE

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Il n'existe pas de dispositions générales sur la reconnaissance des repentis par la justice pénale.

Cependant, pour faciliter le démantèlement des réseaux terroristes , d'une part, et des filières de trafic de drogues , d'autre part, le législateur a introduit dans le code pénal de 1995 deux articles qui octroient des réductions de peine aux condamnés qui ont accepté de collaborer avec la justice.

A. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

Il s'agit de toutes les infractions relatives :

- aux produits stupéfiants (culture, fabrication, commerce, transport...) ;

- au terrorisme , défini comme le fait de participer ou de collaborer à une organisation dont l'objectif consiste à perturber l'ordre public ou le fonctionnement des institutions.

Le code pénal de 1973 comportait déjà une disposition favorable aux terroristes repentis. Elle avait été introduite en 1988.

2. b) Les personnes concernées

Dans les deux cas (terrorisme et trafic de stupéfiants), pour pouvoir bénéficier d'un traitement favorable, le condamné doit remplir trois conditions :

- avoir abandonné de son propre chef ses actions coupables ;

- se présenter aux autorités et avouer les faits auxquels il a participé ;

- collaborer avec la justice.

La collaboration avec la justice peut prendre l'une des formes suivantes :

- empêcher la réalisation d'une infraction ;

- permettre l'obtention de preuves déterminantes pour l'identification ou l'arrestation d'autres délinquants ;

- empêcher l'organisation à laquelle il a appartenu de poursuivre ou de développer ses activités.

Sous l'empire du code pénal de 1973, il suffisait de remplir l'une des conditions suivantes :

- avoir abandonné de son propre chef ses activités délictueuses et se présenter aux autorités en avouant les faits ;

- avoir contribué, par l'abandon de ses activités, à éviter ou à limiter un danger, en empêchant la réalisation d'une infraction ou en aidant au recueil de preuves déterminantes pour l'identification ou l'arrestation d'autres délinquants.

B. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

Le juge a la possibilité de prononcer une peine plus clémente que celle normalement prévue pour l'infraction considérée, mais ne peut pas accorder une remise totale de peine. La règle est donc la même que celle qui est applicable lorsque des circonstances atténuantes sont reconnues.

Le jugement octroyant la réduction de peine doit être motivé .

Sous l'empire du code pénal de 1973 , les terroristes repentis pouvaient obtenir les mêmes réductions de peine. Ils pouvaient également obtenir une remise totale lorsque leur collaboration s'était révélée d'une « portée particulière ». En outre, lorsqu'ils avaient purgé le tiers de leur peine, ils pouvaient prétendre à la libération conditionnelle.

Au début du mois de mars 2003, le gouvernement a déposé au Parlement un projet de loi organique portant sur l'exécution des peines . Ce projet, qui vise à garantir l'exécution réelle et complète des peines, modifie notamment les règles relatives à la libération conditionnelle. Les règles qu'il contient à cet égard tendent à encourager la collaboration : la libération conditionnelle serait susceptible d'être accordée aux détenus qui ont purgé les trois quarts de leur peine, à condition que leur conduite le justifie. Ainsi, les personnes condamnées pour une infraction relevant de la criminalité organisée ou du terrorisme ne pourront bénéficier d'une telle mesure que si elles remplissent deux conditions :

- avoir abandonné sans équivoque possible les objectifs et les moyens du terrorisme ;

- avoir collaboré de façon active avec les autorités, que ce soit pour empêcher la réalisation d'autres infractions par le groupe criminel ou terroriste, pour limiter les conséquences de l'infraction commise ou pour faciliter l'identification, l'arrestation et le jugement de responsables.

2. b) Les mesures de protection

Les repentis peuvent bénéficier des mesures prévues par la loi organique du 23 décembre 1994 sur la protection apportée aux témoins et aux experts dans les affaires criminelles.

Prises par le juge d'instruction, qui agit de son propre chef ou à la demande de l'intéressé, les mesures de protection peuvent ensuite être maintenues, modifiées ou suspendues par le tribunal au moment de l'ouverture du procès.

Ces mesures visent à garantir la personne, la liberté et les biens des personnes menacées de représailles à cause de leur collaboration avec la justice. Elles peuvent être étendues aux ascendants, aux descendants, ainsi qu'aux frères et soeurs. Elles consistent en principe en l'octroi d'une protection policière. Dans les cas exceptionnels, les repentis peuvent, à l'issue du procès et à la demande du ministère public, se voir accorder une nouvelle identité et une aide pour leur permettre de déménager et de changer d'emploi.

C. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

En l'absence de dispositions explicites sur les modalités de ces déclarations ou sur leur valeur, le seul précepte applicable est l'article 741 du code de procédure pénale, selon lequel le tribunal apprécie librement les preuves qui ont été présentées au cours du procès, ainsi que les arguments de la défense et de l'accusation.

Le Tribunal constitutionnel et le Tribunal suprême se sont prononcés sur la valeur des déclarations des repentis : ils leur reconnaissent la qualité de témoignages, dont la crédibilité doit être évaluée notamment en fonction de la personnalité du repenti et des raisons qui l'ont incité à collaborer avec les autorités.

ITALIE

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Même si le code pénal de 1930 comprend depuis l'origine plusieurs articles qui prévoient des réductions de peine notamment pour les personnes qui « empêchent de manière volontaire » la réalisation d'une infraction et pour celles qui s'emploient « spontanément et efficacement à éliminer ou atténuer les conséquences dommageables » de leurs actes, c'est à partir de la fin des années 70 que, pour faire face au terrorisme, le législateur a multiplié les mesures favorables aux repentis. Il les a en même temps transformées, pour les appliquer à des infractions commises non par des individus isolés, mais par des groupes organisés.

Depuis 1978, l'évolution des dispositions législatives sur les repentis se caractérise par trois orientations :

- l'extension du champ d'application des remises de peine à d'autres formes de criminalité que le terrorisme politique ;

- l'instauration de mesures de protection destinées à assurer la sécurité des repentis ;

- l'octroi d'un régime pénitentiaire favorable.

Devant certaines dérives liées notamment à ce traitement pénitentiaire, le législateur a adopté au début de l'année 2001 un texte visant à dissocier l'incitation à la collaboration de la protection, et à sélectionner plus rigoureusement les bénéficiaires des programmes de protection.

Les règles sur les remises de peine accordées aux repentis sont dispersées dans plusieurs textes, chacun de ces textes visant une forme particulière de délinquance, et les questions relatives à la protection sont principalement réglées par un décret-loi du 15 janvier 1991, converti en loi quelques semaines plus tard et modifié en dernier lieu par la loi du 13 février 2001, ainsi que par plusieurs règlements d'application.

A. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

Les premières mesures en faveur des repentis résultent d'un décret-loi de mars 1978, qui a modifié le code pénal et qui a été converti en loi quelques semaines plus tard. Elles concernaient les auteurs d' enlèvements , que ceux-ci fussent réalisés pour l'obtention d'une rançon ou dans un but terroriste. Ces dispositions sont toujours en vigueur, celles qui régissent la première catégorie d'enlèvements ayant été modifiées en 1980.

Le décret-loi Cossiga du 15 décembre 1979 , intitulé « Mesures urgentes pour la défense de l'ordre démocratique et de la sécurité publique » et converti en loi du 6 février 1980, offrait d'importantes réductions de peine aux terroristes qui acceptaient de fournir à la justice ou à la police des informations sur leur organisation.

La loi du 29 mai 1982 portant mesures pour la défense de l'ordre constitutionnel, qui lui a succédé ( 169 ( * ) ) , visait également les infractions contre l'État. Le champ d'application des dispositions sur les récompenses octroyées aux repentis se limitait aux infractions commises à des fins de terrorisme ou de déstabilisation de l'ordre démocratique.

Il a progressivement été étendu :

- au trafic de stupéfiants, en 1990 ;

- à toutes les infractions relevant de « l'association mafieuse » en 1991 (170 ( * )) ;

- plus récemment à des infractions très diverses, telles les atteintes au droit d'auteur en 2000, la contrebande de cigarettes en 2001 et le vol, également en 2001.

Ces élargissements successifs visent les différentes formes de criminalité organisée, ainsi que certains de ses domaines de prédilection (trafic de stupéfiants, d'enregistrements audio-visuels et de cigarettes). Toutefois, le dernier ajout, réalisé par la loi du 26 mars 2001 qui comporte différentes mesures destinées à la « protection de la sécurité des citoyens » apparaît sans lien avec l'évolution précédente.

2. b) Les personnes concernées

Les différentes règles en vigueur visent les auteurs d'infractions qui communiquent à la justice ou à la police des informations de nature à faciliter le déroulement d'une procédure, qu'elle soit ou non liée à l'affaire dans laquelle ils sont impliqués, ou à éviter la réalisation de nouvelles infractions.

Elles visent également ceux qui reconnaissent les infractions qui leur sont reprochées et qui renoncent à utiliser la violence dans la lutte politique.

B. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

Il n'existe aucune norme générale sur les repentis, de sorte que les avantages qui leur sont accordés diffèrent à la fois selon l'infraction commise et selon la nature de la collaboration.

En règle générale, la collaboration des accusés avec la justice ou la police entraîne une réduction de peine comprise entre le tiers et la moitié. Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, elle pouvait permettre à l'accusé de bénéficier de l'impunité .

Par ailleurs, la collaboration peut entraîner une exemption des peines complémentaires et un aménagement du régime pénitentiaire.

• La réduction de peine

Elle est comprise entre le tiers et la moitié :

- pour les personnes accusées d'appartenance à une association mafieuse qui « s'emploient à éviter que l'activité coupable n'ait des conséquences ultérieures, notamment en aidant concrètement la police ou la justice à recueillir des éléments décisifs pour la reconstitution des faits et pour l'identification ou l'arrestation des auteurs des infractions » ;

- pour les personnes accusées de trafic de cigarettes qui collaborent de la même façon que les précédentes ou qui contribuent à « l'identification des moyens importants pour la réalisation des délits » ;

- pour les personnes coupables d'un vol qui permettent, « avant le jugement, l'identification des complices et de ceux qui ont acquis, obtenu ou caché l'objet volé ou se sont entremis pour permettre son achat, sa transmission ou sa dissimulation » ;

- pour celui qui, avant d'avoir reçu une notification de l'autorité judiciaire relative à une violation de la loi sur les droits d'auteur, la « dénonce spontanément ou, fournissant toutes les informations dont il dispose, permet l'identification du promoteur ou l'organisateur de l'activité illicite ».

Elle est comprise entre la moitié et les deux tiers en matière de trafic de stupéfiants pour qui « s'est efficacement employé à garantir les preuves du délit ou à soustraire à l'association des ressources importantes pour la réalisation des infractions ».

Les participants à des enlèvements de personnes qui s'emploient à ce que la personne enlevée recouvre la liberté sont passibles, selon que l'enlèvement est d'ordre terroriste ou purement crapuleux, d'une peine de prison de six mois à huit ans ou de deux à huit ans, alors que la peine normalement encourue est de vingt-cinq à trente ans.

Lorsque la peine applicable est la réclusion à perpétuité, elle est remplacée par une peine de durée limitée. Ainsi, dans le cas de la criminalité de type mafieux, la réclusion à perpétuité est remplacée par la réclusion de douze à vingt ans.

La réduction de peine peut être encore plus importante, car la collaboration permet, dans certains cas, d'empêcher le juge de tenir compte de la circonstance aggravante liée au caractère même de l'infraction commise . Ainsi, le décret-loi de mai 1991 portant mesures urgentes en faveur de la lutte contre la criminalité organisée, qui a été converti en loi quelques semaines plus tard, dispose que les peines applicables aux infractions de type mafieux sont augmentées d'un tiers. Toutefois, comme les réductions offertes aux repentis sont calculées à partir de la peine de base, et non à partir de la peine aggravée, l'incitation à la collaboration est plus importante.

• L'impunité

Elle était prévue par le décret-loi Cossiga au bénéfice de ceux qui empêchaient la survenance d'un attentat à la sécurité publique planifié par une organisation terroriste (incendie, naufrage d'un bateau, catastrophe aérienne, attentat contre un réseau de communication, empoisonnement de l'eau potable ou d'aliments...). Elle était également prévue par la loi de 1982 pour les auteurs de crimes et délits contre l'État qui dissolvaient l'organisation, agissaient de façon à permettre sa dissolution, fournissaient des informations sur sa structure ou son organisation ou empêchaient la réalisation d'infractions constituant l'un de ses objectifs.

• L'exemption des peines complémentaires

Elle est prévue par la loi d'août 2000 qui a modifié les dispositions sur le droit d'auteur. Compte tenu de l'importance des peines complémentaires dans ce domaine (interdictions professionnelles par exemple), l'incitation à la collaboration est également renforcée.

• L'aménagement du régime pénitentiaire

Le décret-loi du 15 janvier 1991, récemment modifié par la loi du 13 février 2001 , qui définit les mesures spéciales accordées à ceux qui collaborent avec la justice, prévoit notamment un aménagement du régime pénitentiaire de certains repentis.

Ces dispositions sont réservées aux personnes condamnées pour terrorisme, association mafieuse, trafic de stupéfiants ou enlèvement crapuleux, dans la mesure où elles ont pleinement collaboré avec la justice, y compris après leur condamnation. Après avoir purgé au moins le quart de leur peine (ou dix ans si elles ont été condamnées à perpétuité), elles peuvent prétendre à des permissions, voire à un régime d'assignation à résidence, de liberté conditionnelle ou de semi-liberté.

La collaboration avec la justice peut également mettre fin à la détention préventive lorsque le juge a l'assurance que l'intéressé a rompu tout lien avec son organisation et respecte tous les engagements qui conditionnent sa protection.

2. b) Les mesures de protection

Même si le droit de la procédure pénale comporte des dispositions utilisables dans le cas des repentis (auditions à huis clos par exemple) ou qui les visent explicitement, comme l'obligation de recourir à la vidéoconférence dans tous les procès pour association mafieuse et pour terrorisme, la protection des repentis est essentiellement assurée par des mesures extra-judiciaires .

Les mesures de protection des repentis sont définies par le décret-loi du 15 janvier 1991.

Le bénéfice de ces mesures est désormais réservé aux seuls repentis qui remplissent les conditions suivantes :

- ils ont été accusés ou condamnés pour terrorisme, association mafieuse, trafic de stupéfiants ou enlèvement crapuleux ;

- leur collaboration les menace de façon grave et réelle, de sorte que les règles générales de protection applicables à tout accusé sont insuffisantes ;

- leurs déclarations, parfaitement fiables, ont un caractère de « nouveauté », d'« exhaustivité » ou revêtent une « importance exceptionnelle », dans le cadre de la procédure pénale les concernant ou d'enquêtes sur des organisations mafieuses ou terroristes.

Ainsi défini, le champ d'application des nouvelles dispositions est limité : il exclut par exemple les membres d'un réseau criminel, mais non juridiquement qualifié de mafieux.

L'octroi des mesures de protection est décidé par une commission ad hoc constituée de professionnels spécialistes de la criminalité organisée (policiers et magistrats, à l'exclusion des membres du parquet) sur proposition du procureur de la République ou du responsable local de la police.

Pour bénéficier de ces mesures, le repenti doit prendre des engagements , et notamment :

- indiquer la composition du patrimoine qu'il détient ou qu'il contrôle, directement ou non ;

- remettre au procureur de la République, dans le délai de six mois après qu'il a fait part de son souhait de collaboration, un document écrit comportant toutes les informations qu'il détient et qui peuvent permettre à la justice de progresser, non seulement sur l'affaire dans laquelle il est impliqué, mais également sur d'autres dossiers majeurs.

L'obligation de respecter un délai de six mois pour fournir ce « procès-verbal de collaboration » vise à empêcher les repentis de différer la fourniture des renseignements et d'en tirer parti au fur et à mesure. Pour inciter au respect de ce délai, les nouvelles dispositions précisent d'ailleurs que les informations fournies ensuite ne peuvent en principe pas être utilisées comme preuves contre des tiers.

Les mesures de protection consistent par exemple en la fourniture de dispositifs techniques de sécurité, en un transfert dans une commune autre que la commune de résidence ou en la détention selon des modalités particulières.

Un programme spécial de protection peut être élaboré dans certains cas particuliers, lorsque l'appréciation concrète de la situation révèle l'insuffisance des mesures de protection habituellement accordées aux repentis. Ce programme peut inclure le transfert des intéressés dans un endroit particulièrement protégé, des mesures d'assistance économique (comprenant par exemple la prise en charge du loyer et le versement d'une allocation plafonnée à cinq fois le montant du minimum vieillesse), la fourniture de papiers d'identité « de couverture », voire un changement d'état civil, mesure exceptionnelle régie par un texte ad hoc et nécessitant un décret du ministre de l'Intérieur.

Après que les mesures de protection ont été accordées, le repenti doit verser au Trésor public les fonds provenant d'activités illicites, l'autorité judiciaire procédant par ailleurs à la mise sous séquestre de tous ses biens.

Les mesures de protection, qu'il s'agisse des mesures habituelles ou qu'elles fassent partie d'un programme spécial de protection, peuvent être accordées aux membres de la famille du repenti, à condition qu'ils soient eux-mêmes exposés à un danger grave et réel, et qu'ils vivent sous le même toit que le repenti.

Les mesures sont prises pour une durée indéterminée . Elles sont rapportées lorsqu'elles ne sont plus justifiées. Elles peuvent également être rapportées en fonction de la conduite de l'intéressé.

Le ministre de l'Intérieur doit fournir tous les six mois au Parlement un rapport sur l'application et l'efficacité des mesures de protection . Ce rapport précise notamment le coût de ces mesures. D'après le dernier rapport disponible, relatif au second semestre de l'année 2001, l'ensemble des dépenses de protection a représenté 33,5 millions d'euros pour cette période. Cette somme inclut les dépenses engagées pour la protection des simples témoins, au nombre d'environ 75.

Depuis 1997, le nombre des repentis bénéficiant de mesures de protection est stable : il oscille entre 1 000 et 1 100. Le nombre des membres de la famille placés sous protection est également stable, variant entre 3 950 et 4 200.

Les mesures de protection prises en faveur des repentis incarcérés consistent principalement en leur détention dans des unités spécialisées.

C. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

Le code de procédure pénale de 1988 consacre l'orientation qu'avait prise la jurisprudence au milieu des années 1980 : l'article consacré à l'évaluation des preuves précise que les informations fournies par les repentis, qu'il s'agisse de coaccusés ou de personnes poursuivies séparément dans le cadre de procédures connexes, « sont évaluées avec les autres éléments de preuve qui en confirment la crédibilité ».

Les déclarations des repentis doivent donc être corroborées sans pouvoir fonder à elles seules une condamnation . La Cour de cassation a précisé la nature de l'évaluation à laquelle doit se livrer le juge. Il doit vérifier la crédibilité personnelle du repenti, notamment à la lumière de sa personnalité et de son passé, ainsi que la valeur de ses déclarations, compte tenu de leur précision, de leur cohérence, de leur constance et de leur spontanéité. Il doit également s'assurer que d'autres éléments les corroborent. Parmi les éléments susceptibles de corroborer les déclarations des repentis, la jurisprudence n'exclut pas les déclarations d'autres repentis.

Aux mesures visant explicitement à récompenser les repentis, il faut ajouter la procédure spéciale du « jugement abrégé » ( 171 ( * ) ) . Prévue par le code de procédure pénale et applicable à n'importe quelle infraction, elle permet à l'accusé qui renonce à l'exercice complet des droits de la défense d'obtenir une réduction de peine d'un tiers. Cette procédure est en effet utilisable pour « récompenser » la collaboration lorsque l'infraction d'origine n'entre pas dans le champ d'application des mesures sur les repentis. Ce peut être le cas par exemple d'un délinquant opérant dans le cadre d'un réseau en cours de constitution.

PAYS-BAS

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Alors que la possibilité d'adopter une loi sur les repentis est évoquée depuis 1993, le ministère de la Justice a déposé en novembre 1998 à la Chambre basse un projet de loi modifiant le code pénal et le code de procédure pénale pour tenir compte des « déclarations des témoins faites en échange d'une promesse du ministère public ».

Après avoir été adopté en première lecture le 5 juillet 2001 , ce projet de loi sur les promesses faites aux témoins dans les affaires pénales a été transmis à la Chambre haute, qui ne peut que l'adopter ou le rejeter en bloc, car elle n'a pas le droit d'amendement.

Le projet vise à ancrer dans la législation une pratique déjà admise par le Collège des procureurs généraux , qui a émis des directives à ce sujet dès 1983. Ces directives ont été renouvelées en 1997, puis en 2001, les dernières reprenant les principales indications du projet de loi. La pratique des accords entre ministère public et accusés, exceptionnelle d'après les indications fournies par le ministre de la Justice lors de la discussion du projet de loi, s'explique par la grande liberté du ministère public, notamment pour exercer les poursuites et pour requérir.

A. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

Il s'agit, d'une part, des infractions les plus graves , qui peuvent entraîner des peines de prison d'au moins huit ans, et d'autre part, de celles qui sont commises par des bandes organisées et qui risquent de porter atteinte à l'ordre public .

2. b) Les personnes concernées

Le projet de loi vise les accusés qui font des déclarations contre d'autres accusés , dans la mesure où ces déclarations constituent une « contribution importante » au déroulement de la procédure pénale.

Les personnes qui ont déjà été condamnées peuvent également bénéficier des dispositions du projet de loi.

B. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

Le repenti (accusé ou déjà condamné) et le procureur concluent un accord écrit . Celui-ci précise les faits reprochés au premier, les infractions sur lesquelles il s'engage à fournir des informations, les conditions qui lui sont imposées et qu'il est prêt à remplir, ainsi que la promesse du procureur.

Le juge d'instruction contrôle le bien-fondé de l'accord . Il doit notamment s'assurer de la crédibilité du repenti, qu'il entend en présence de son avocat, et vérifier que la négociation satisfait au principe de proportionnalité. S'il approuve l'accord, il fait prêter serment au repenti puis recueille ses déclarations. S'il s'y oppose, le parquet peut faire appel, mais pas le repenti.

À la demande du procureur, le juge peut octroyer une remise de peine aux repentis qui ont conclu avec le ministère public un accord qui a été homologué par le juge d'instruction. La remise de peine vaut exclusivement pour la peine principale , mais est sans incidence sur les peines complémentaires. De plus, la Chambre basse s'est opposée à ce qu'un repenti puisse bénéficier de l'impunité.

Le projet de loi prévoit des réductions de peine d'au plus un tiers ( 172 ( * ) ) . Il prévoit aussi la possibilité de transformer une partie (au plus un tiers) des peines inconditionnelles en peines conditionnelles, ainsi que le remplacement d'un tiers de la peine privative de liberté par une amende.

Lorsqu'il accorde la remise de peine, le juge doit tenir compte de la contribution qu'ont représentée les déclarations du repenti.

Le projet de loi présenté par le gouvernement prévoyait que le juge était tenu au respect de l'accord conclu entre le repenti et le ministère public, mais la Chambre basse a voulu laisser au juge sa liberté d'appréciation, de sorte que le texte n'offre aucune garantie au repenti.

2. b) Les mesures de protection

Le projet de loi ne prévoit aucune disposition sur la protection des repentis.

Ceux-ci peuvent bénéficier des mesures de protection prévues pour les témoins menacés. Il n'existe certes pas de véritable programme de protection des témoins, mais certaines mesures peuvent être prises dans le cadre de la procédure pénale (audition du repenti à huis clos ou en dehors de la présence du prévenu, voire de façon anonyme).

C. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

Le projet de loi comporte des dispositions explicites :

- la culpabilité d'un accusé ne peut reposer sur les seules déclarations d'un repenti ;

- tout jugement qui prend en compte de telles déclarations doit être motivé à cet égard.

*

* *

Le 24 septembre 2001, le gouvernement a déposé un projet de loi complémentaire sur les peines dont sont passibles les repentis qui ne remplissent pas les obligations auxquelles ils se sont engagés dans l'accord qu'ils ont conclu avec le ministère public.

La Chambre basse a décidé d'attendre que la Chambre haute ait adopté le projet de loi principal pour examiner le texte complémentaire.

SUISSE

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Dans le rapport intitulé « De 29 à l'unité » ( 173 ( * ) ) , qu'elle a publié en décembre 1997, la commission de réflexion sur l'unification de la procédure pénale , a notamment examiné l'opportunité d'introduire dans le droit suisse de nouveaux dispositifs, comme celui du repenti. Elle s'est prononcée contre une telle réforme.

De l'examen des questions relatives à ce sujet, elle tirait la conclusion suivante :

« Les atteintes portées aux principes juridiques fondamentaux, liées à l'introduction d'une réglementation concernant le témoin dit de la Couronne, ne seraient acceptables que dans l'hypothèse d'un véritable état de nécessité. Malgré les dangers représentés par le crime organisé, une telle situation n'est dans notre pays ni perceptible, ni prévisible à court terme. C'est pourquoi l'on peut renoncer à une réglementation de l'institution du témoin " de la Couronne ". En revanche, une attention accrue doit être portée au concours des coauteurs dans l'établissement des faits. »

Les travaux ultérieurs n'ont pas remis en cause cette prise de position sur les repentis.

La commission s'est également prononcée contre l'adoption de tout programme extra-procédural de protection des témoins.

ÉTATS-UNIS

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Le cinquième amendement de la Constitution des États-Unis permet à tout citoyen américain de refuser de témoigner contre lui-même dans une affaire pénale. Il exclut donc en principe toute collaboration des repentis avec les autorités judiciaires.

Toutefois, pour empêcher que ce privilège constitutionnel ne soit invoqué, et par conséquent pour permettre la collaboration des repentis, le parquet fédéral dispose de deux instruments :

- l'immunité légale (statutory immunity) , prévue par les articles 6001 à 6005 du livre 18 du code des États-Unis et qui vise à contraindre un suspect à collaborer avec la justice sous peine de sanctions ;

- l'accord de renonciation aux poursuites (informal immunity agreement) , qui résulte d'une négociation entre l'accusation et un suspect disposé à collaborer. Bien que non codifié, il est mentionné dans le manuel des procureurs des États-Unis, au chapitre « Les principes régissant les poursuites fédérales ».

Ces deux types de collaboration avec la justice, contrainte ou volontaire, existent également au niveau des États, mais seules les dispositions du droit fédéral sont examinées dans le texte qui suit.

A. 1) LA RECONNAISSANCE JURIDIQUE DES REPENTIS

1. a) Les infractions visées

L'immunité légale ne vise aucune infraction en particulier. De même, les accords de renonciation aux poursuites sont applicables à toutes les infractions fédérales, et notamment celles relatives au crime organisé, au trafic de stupéfiants et au terrorisme.

2. b) Les personnes concernées

Il s'agit des personnes suspectées d'avoir commis une ou plusieurs infractions, qui invoquent le cinquième amendement de la Constitution des États-Unis et qui n'ont pas encore été condamnées.

L'immunité légale prévue aux articles 6001 à 6005 du titre 18 du code des États-Unis ne s'applique qu'aux personnes contraintes de témoigner par une décision de justice.

En pratique, dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, l'accusation accorde fréquemment l'immunité à de petits délinquants, pour les inciter à fournir des informations sur les organisateurs des réseaux dont ils sont membres.

B. 2) LES AVANTAGES ACCORDÉS AUX REPENTIS

1. a) Le traitement pénal

Les repentis bénéficiant de l'immunité légale

S'il estime que le témoignage du suspect est d'intérêt public, le procureur en charge de l'affaire peut, avec l'accord du procureur général des États-Unis (qui est également ministre de la justice) demander à une cour fédérale de rendre une décision contraignant celui-ci à témoigner, sous peine de subir les sanctions applicables pour refus de témoignage (emprisonnement pendant la durée du procès ou de la session du grand jury ( 174 ( * ) ) ) ou pour outrage à la cour (amende ou peine de prison dont le quantum est laissé à la libre appréciation de la cour).

La cour est tenue de faire droit à une telle demande. En principe, l'offre d'immunité légale et l'accord qui en résulte sont écrits.

L'article 6002 du code des États-Unis garantit au repenti que son témoignage ne pourra ultérieurement être utilisé contre lui dans aucun procès pénal , à l'exception d'un procès pour parjure ou pour fausse déclaration.

Le repenti ne bénéficie cependant pas d'une impunité totale ( 175 ( * ) ) : il peut être poursuivi pour l'infraction sur laquelle il a fourni des informations, mais les poursuites doivent reposer sur des éléments autres que ceux qu'il a fournis.

En effet, le ministère public ne peut entamer ou recommander la poursuite des infractions révélées ou évoquées dans ce type de témoignage qu'avec l'autorisation écrite du procureur général des États-Unis. Dans ce cas, en application de la jurisprudence Kastigar de 1972, le procureur doit transmettre au procureur général une demande expliquant comment il établira que les preuves des infractions qu'il entend poursuivre ont été obtenues légalement et n'ont aucun lien avec le témoignage que le suspect a été judiciairement contraint d'effectuer.

Les repentis bénéficiant d'un accord de renonciation aux poursuites

Les principes régissant les poursuites fédérales laissent une grande liberté au procureur . Ils lui permettent en particulier de conclure un accord garantissant à l'accusé repenti qu'il échappera aux poursuites pour les infractions commises. En règle générale, le procureur utilise cette possibilité dans les cas où il n'y a pas d'autre moyen d'obtenir le témoignage recherché et où celui-ci est d'intérêt public.

Au préalable, le procureur doit avoir obtenu l'accord de son supérieur hiérarchique. En outre, lorsque le procès concerne certains domaines du droit pénal (par exemple, le crime organisé ou la sécurité intérieure), il faut qu'il ait l'accord de l'assistant du procureur général des États-Unis compétent.

L'étendue de l'immunité est négociée par les parties . Cependant, le procureur doit éviter d'accorder une impunité totale au repenti. Il doit essayer de restreindre l'immunité aux poursuites fondées directement ou indirectement sur les renseignements fournis. Il doit également la limiter sur le plan géographique à sa juridiction.

Le procureur doit faire figurer au dossier un écrit mentionnant les termes de l'accord et détaillant les obligations réciproques. Ce document doit être signé ou paraphé par le repenti ou par son avocat.

2. b) Les mesures de protection

Le sixième amendement de la Constitution des États-Unis garantit à tout accusé le droit d'être confronté aux témoins à charge.

Toutefois, le repenti peut bénéficier des dispositions introduites par la loi de 1984 portant réforme de la protection des témoins et qui figurent aux articles 3521 à 3528 du titre 18 du code des États-Unis ( 176 ( * ) ) .

L'article 3521 prévoit que le procureur général des États-Unis peut accorder des mesures de protection à un témoin (ou à un témoin potentiel) appelé à témoigner à charge dans un procès relatif à une activité criminelle organisée ou à une autre infraction grave, s'il estime que le témoin risque d'être victime de violences ou de mesures d'intimidation.

Le manuel des procureurs indique qu'une telle protection est réservée aux témoins déposant dans les procès pour crime organisé, pour gangstérisme, pour trafic de drogues et, d'une façon générale, dans les affaires les plus graves.

Avant d'accorder des mesures de protection à un témoin, le procureur général des États-Unis doit vérifier si le programme de protection est adapté, compte tenu notamment des antécédents criminels de l'intéressé et de sa personnalité.

Il doit également évaluer, par écrit, la gravité de l'affaire dans laquelle le témoin est appelé à déposer, ainsi que les dangers que son éventuel déménagement représente. À l'issue de cette évaluation, s'il apparaît que les risques encourus par le nouveau voisinage sont supérieurs à l'utilité du témoignage, la protection doit être refusée.

En pratique, le procureur en charge du dossier transmet au service compétent du ministère de la Justice une demande écrite de protection qui contient les informations permettant de faire les évaluations prescrites :

- une description de l'affaire criminelle, précisant notamment s'il s'agit d'un crime organisé relatif à la drogue ;

- un résumé du témoignage, faisant apparaître son importance et son caractère décisif pour le succès des poursuites ;

- les dangers encourus par le témoin ;

- son dossier pénal ;

- le tableau des autres mesures de protection qui ont été envisagées et qui apparaissent inadéquates.

La gestion proprement dite du programme de protection est assurée par deux services différents, selon que le repenti est ou non incarcéré :

- le Bureau fédéral des prisons (BOP) s'occupe des témoins incarcérés ;

- le U.S. Marshals Service (USMS) est en charge de la sécurité des autres témoins protégés (avant, pendant et après le procès).

En outre, l'article 3521 prévoit que le procureur général des États-Unis doit conclure un accord avec la personne protégée , précisant les obligations de chacune des parties. En pratique, c'est le BOP qui s'en charge pour les témoins incarcérés et l'USMS pour les autres. La personne protégée doit notamment s'engager à témoigner, à ne commettre aucun crime, à remplir ses obligations légales et à exécuter les jugements civils rendus à son encontre.

La protection des repentis qui sont incarcérés est assurée par leur détention dans des unités spéciales, tandis que celle des autres repentis consiste en diverses mesures, et notamment en un changement de résidence.

Il peut être décidé que la personne protégée bénéficiera d'un logement, du déménagement de ses biens, de documents lui fournissant une nouvelle identité, d'une somme d'argent lui permettant de faire face à ses besoins pendant une période en principe limitée à six mois, d'un soutien pour obtenir un emploi à condition qu'il recherche activement du travail et de toute aide de nature à lui permettre de devenir indépendant financièrement. Dans certains cas, la personne protégée peut également recevoir un accompagnement psychologique.

Les mesures de protection sont maintenues aussi longtemps qu'elles restent justifiées et que le repenti respecte ses engagements.

La protection peut être étendue à la famille proche ou à une personne ayant des liens étroits avec le témoin, à condition que ces personnes soient également menacées.

Depuis 1970, plus de 7 000 témoins et plus de 9 000 proches ont bénéficié du programme de protection et ont été déplacés géographiquement.

C. 3) LA VALEUR PROBATOIRE DES DÉCLARATIONS DES REPENTIS

Le droit fédéral ne contient pas de règle exigeant expressément que la condamnation ne se fonde pas sur le seul témoignage du collaborateur de justice. Cependant, la plupart des cours fédérales invitent les jurés à la prudence dans ces circonstances.

Par ailleurs, le parquet fédéral a l'habitude de révéler aux tribunaux les accords conclus avec les collaborateurs de justice.

SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES

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Division des études

de législation comparée

LES DOCUMENTS DE TRAVAIL DU SÉNAT

Série LÉGISLATION COMPARÉE

LE PLAIDER COUPABLE

Ce document constitue un instrument de travail élaboré à l'intention des Sénateurs par la Division des études de législation comparée du Service des Études juridiques. Il a un caractère informatif et ne contient aucune prise de position susceptible d'engager le Sénat.

n° LC 122 Mai 2003

LE PLAIDER COUPABLE

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Le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, présenté en conseil des ministres le 9 avril 2003, vise à introduire dans la procédure pénale française la « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ». Inspirée du « plaider coupable » anglo-saxon, cette procédure permettrait au délinquant qui reconnaîtrait les faits qui lui sont reprochés d'accepter la sanction proposée par le procureur de la République et d'éviter ainsi un procès.

Cette nouvelle procédure ne serait applicable qu'aux infractions les moins graves , punissables d'au plus cinq ans d'emprisonnement, et le procureur ne pourrait pas proposer une peine supérieure à six mois d'emprisonnement ferme.

Le projet prévoit plusieurs garanties procédurales :

- le délinquant disposerait d'un délai de réflexion de dix jours ;

- il donnerait son accord en présence de son avocat, qui aurait pris auparavant connaissance du dossier ;

- l'accord conclu avec le procureur devrait être homologué en audience publique par un juge du siège ;

- le délinquant ainsi condamné pourrait faire appel de la décision d'homologation dans les dix jours.

Par ailleurs, les victimes, prévenues de la mise en oeuvre de la procédure, pourraient demander réparation de leur préjudice.

La réforme envisagée justifie non seulement l'examen des dispositifs anglo-saxons de plaider coupable, mais aussi celui des différentes procédures récemment adoptées dans plusieurs pays d'Europe continentale et qui permettent à un accusé d'obtenir une réduction de peine en échange de sa reconnaissance préalable de culpabilité. En effet, si le développement du plaider coupable est largement lié, d'une part, au caractère essentiellement oral et accusatoire du procès anglo-saxon, qui oppose l'accusation et la défense sans que le juge y joue un rôle actif, et, d'autre part, à la complexité des règles de preuve que cette procédure a engendrée, plusieurs pays de tradition continentale ont récemment introduit des dispositifs comparables.

La présente étude analyse donc les principales caractéristiques des procédures de reconnaissance préalable de culpabilité qui existent actuellement en Allemagne, en Angleterre et au Pays de Galles, en Espagne, en Italie, au Portugal, au Canada et aux États-Unis. Plus précisément, les points suivants ont été examinés :

- les infractions auxquelles ces procédures sont applicables ;

- la partie à l'initiative de laquelle elles sont mises en oeuvre ;

- l'étape de la procédure au cours de laquelle la reconnaissance préalable de culpabilité est admissible ;

- les garanties procédurales ;

- les effets de la reconnaissance préalable de culpabilité pour les différentes parties.

L'analyse ne prend en compte ni les procédures applicables aux délinquants mineurs ni celles qui sont spécifiques aux flagrants délits. Elle permet de mettre en évidence l'opposition entre les pays anglo-saxons, berceau du plaider coupable, et les autres pays qui ont récemment adopté des procédures qui s'en inspirent.

1) En Angleterre et au Pays de Galles, au Canada et aux États-Unis, le plaider coupable, bien que peu codifié, constitue un élément fondamental de la procédure pénale

Dans ces trois pays, toutes les infractions peuvent faire l'objet d'une reconnaissance préalable de culpabilité et, en pratique, l'immense majorité des accusés choisit de plaider coupable, quelle que soit la gravité du fait qui leur est reproché.

Possible à tous les stades de la procédure , la reconnaissance de culpabilité se traduit en général par une réduction de peine de 20 à 30 %. Cependant, plus elle a lieu tôt, plus la réduction de peine est importante. Ce principe, admis dans les trois pays, est même inscrit dans la loi anglaise depuis 1994.

Bien que peu codifié, le plaider coupable anglo-saxon est entouré de certaines garanties.

La jurisprudence anglaise pose des conditions très strictes à l'octroi des réductions de peine , excluant notamment toute pression sur l'accusé pour qu'il plaide coupable. Ainsi, l'indication par le juge de la peine qu'il envisage en cas de plaider non coupable est considérée comme une atteinte à la liberté qu'a l'accusé de plaider ou non coupable.

Au Canada, le code criminel oblige le juge à enregistrer la reconnaissance préalable de culpabilité uniquement si celle-ci ne présente aucune ambiguïté et si l'accusé agit en connaissance de cause.

De même, aux États-Unis , si la négociation consécutive à la reconnaissance de culpabilité se déroule de façon informelle, l'accord qui en résulte doit être présenté en audience publique au juge, qui le contrôle et l'homologue . L'étendue du contrôle du juge varie d'un État à l'autre. Toutefois, au niveau fédéral, les règles de la procédure pénale précisent les obligations du juge : il doit en particulier s'assurer que la reconnaissance de culpabilité est fondée et que l'accusé en comprend toutes les conséquences.

2) Dans les pays d'Europe continentale, les dispositifs inspirés du plaider coupable sont, sauf en Allemagne, codifiés et applicables seulement à des infractions mineures

a) La pratique allemande

Bien que le code de procédure pénale ne comporte aucune disposition sur la reconnaissance préalable de culpabilité, les transactions portant sur des remises de peine en échange d'aveux de culpabilité sont admises par la jurisprudence , dans la mesure où la culpabilité de l'accusé ne fait aucun doute et où les grands principes de la procédure pénale sont respectés. C'est pourquoi, conformément au principe de publicité, il convient notamment que la négociation soit communiquée à toutes les parties prenantes pendant l'audience de jugement et soit consignée par écrit.

b) Les dispositifs portugais, italien et espagnol

Sous la dénomination de « confession », le code de procédure pénale portugais comporte depuis 1987 une disposition sur la reconnaissance préalable de culpabilité. Lorsque la peine encourue ne dépasse pas cinq ans de prison et que l'accusé confesse sans la moindre réserve les faits qui lui sont reprochés, la peine peut être prononcée directement. Le président du tribunal doit alors demander à l'accusé s'il agit de sa propre initiative et indépendamment de toute pression, faute de quoi la procédure peut être annulée. Le code ne donne pas de précision sur l'ampleur de la réduction de peine.

Même s'ils ne requièrent pas de l'accusé une reconnaissance explicite de culpabilité, les dispositifs italien et espagnol équivalents se rapprochent davantage de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité envisagée par le gouvernement français, car leur mise en oeuvre suppose un accord entre le ministère public et l'accusé sur la peine à appliquer.

Le code de procédure pénale italien de 1988 a multiplié les possibilités de recours à des procédures spéciales, parmi lesquelles l'application de la peine sur requête des parties , couramment appelée pattegiamento (marchandage). Le pattegiamento permet au ministère public et à l'accusé de se mettre d'accord sur une peine, qu'ils demandent au juge de prononcer. Cette procédure permet de bénéficier d'une remise de peine d'un tiers . Elle est applicable seulement aux infractions mineures : une fois la réduction opérée, la peine ne doit pas dépasser deux ans de prison. Si le juge ne peut pas prononcer une peine différente de celle convenue par les parties, il peut rejeter l'accord conclu s'il l'estime inadapté.

De même, le dispositif espagnol du « jugement de conformité » , qui a été introduit en Espagne en 1988 et qui peut s'appliquer seulement lorsque la peine encourue ne dépasse pas six ans de prison, permet à l'accusation et à la défense de se mettre d'accord sur une peine, que le juge prononce après avoir procédé à certaines vérifications. Les mesures relatives au jugement de conformité ont été modifiées par une loi d'octobre 2002, qui renforce le contrôle du juge.

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Si la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité est introduite dans le code de procédure pénale français, notre pays rejoindra l'Espagne, l'Italie et le Portugal, où un tel dispositif existe depuis la fin des années 80.

ALLEMAGNE

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Bien que le code de procédure pénale ne comporte aucune disposition sur la reconnaissance préalable de culpabilité, les transactions portant sur des remises de peine en échange d'aveux de culpabilité ne sont pas inconnues. Elles sont même acceptées par la jurisprudence : les différentes chambres pénales de la Cour fédérale de justice ont émis des opinions divergentes à leur sujet et la Cour constitutionnelle a admis ces transactions sous certaines conditions dès 1987.

Actuellement, la jurisprudence reconnaît ces accords, pour autant que la culpabilité de l'accusé ne fasse aucun doute , car personne ne peut renoncer à un juste procès. Il faut aussi que les autres grands principes de la procédure pénale soient respectés : conformément au principe de publicité , il convient notamment que la négociation soit communiquée à toutes les parties prenantes pendant l'audience de jugement et soit consignée par écrit.

L'accord ne peut pas porter sur la détermination précise de la peine, car celle-ci appartient au tribunal, qui doit exercer son pouvoir d'appréciation en fonction des éléments recueillis pendant l'audience. L'accord peut donc seulement mentionner une peine maximale, que le tribunal doit respecter, à moins que des faits nouveaux n'apparaissent pendant l'audience.

ANGLETERRE ET PAYS DE GALLES

La reconnaissance préalable de culpabilité constitue un élément traditionnel et important de la procédure pénale. Même si, depuis quelques années, on observe une diminution du pourcentage des accusés qui plaident coupable, la majorité d'entre eux continue à le faire et il est généralement admis que la reconnaissance préalable de culpabilité conduit le juge à accorder une réduction de peine comprise entre 20 et 30 %.

Sans faire l'objet d'un cadre juridique précis, la reconnaissance de culpabilité devant les juridictions pénales est toutefois encadrée par différentes normes législatives et jurisprudentielles. Les règles législatives qui régissent la procédure pénale , dispersées dans de nombreux textes, ont été profondément modifiées au cours des dernières années, notamment pour inciter les accusés à reconnaître leur culpabilité le plus rapidement possible, afin d'accélérer le traitement des affaires et de limiter le coût du fonctionnement de la justice, tout en ménageant les témoins et les victimes.

1) Les infractions

Qu'elles relèvent de la compétence des magistrates' courts , de celle de la Crown Court ou qu'elles appartiennent à la catégorie intermédiaire et soient, en tant que telles, susceptibles d'être jugées par une juridiction ou par l'autre, toutes les infractions peuvent faire l'objet d'une reconnaissance préalable de culpabilité .

En fonction de leur nature, les infractions sont jugées selon une procédure rapide par des magistrates' courts composées de juges non professionnels ou sur acte d'accusation par la Crown Court , où un jury se prononce sur la culpabilité, tandis que la peine est déterminée par un magistrat professionnel.

Quelle que soit la nature de l'infraction, la procédure commence généralement dans une magistrates' court, les infractions violentes dont sont victimes les enfants constituant la principale exception à cette règle.

Lorsque l'infraction relève de la compétence de la Crown Court (c'est notamment le cas des homicides, des viols et des vols à main armée), la magistrates' court prononce une ordonnance de renvoi après avoir examiné les procès-verbaux des interrogatoires des témoins à charge effectués par la police, car les magistrates ont, au fil du temps, perdu leur rôle consistant à mettre en évidence les indices de culpabilité.

Lorsque l'infraction relève de la compétence d'une juridiction ou de l'autre (cette catégorie comprend surtout des infractions qui peuvent être plus ou moins graves selon les faits : vol, recel, cambriolage, proxénétisme...), traditionnellement, l'accusé pouvait exiger ( 177 ( * ) ) d'être jugé par la Crown Court . Désormais, la procédure varie selon que l'accusé choisit ou non de plaider coupable : c'est seulement s'il plaide non coupable qu'il peut exiger d'être jugé par la Crown Court . L'instauration de cette nouvelle procédure en octobre 1997 visait à désengorger la Crown Court .

2) L'initiative

Elle appartient toujours à l'accusé, la reconnaissance de culpabilité telle qu'elle est prévue par les textes ayant lieu après la mise en accusation .

Lorsque l'infraction relève de la compétence exclusive de la Crown Court

Au cours de l'audience préliminaire ( 178 ( * ) ) , l'acte d'accusation est lu et l'accusé doit, pour chacun des chefs d'accusation, indiquer s'il plaide ou non coupable.

Lorsque l'infraction relève de la compétence exclusive des magistrates' courts

La même procédure a lieu, mais elle se déroule lors de l'audience de jugement.

Pour certaines infractions mineures, qui ne peuvent pas entraîner une peine de prison de plus de trois mois, c'est-à-dire essentiellement pour les infractions routières, l'accusé peut plaider coupable par correspondance . Ceci ne l'empêche pas de pouvoir changer d'avis et de se présenter au tribunal le jour où l'affaire est jugée.

Pour les infractions relevant de l'une ou de l'autre des juridictions

Depuis le 1 er octobre 1997 ( 179 ( * ) ) , l'accusé doit commencer par indiquer à la magistrates' court devant laquelle il comparaît s'il choisit ou non de plaider coupable.

S'il plaide coupable, la magistrates' court procède immédiatement au jugement (à moins qu'elle n'estime que la sanction dépasse ses propres pouvoirs répressifs et ne renvoie l'affaire à la Crown Court , qui se contente alors de déterminer la peine). S'il ne plaide pas coupable, l'affaire se déroule selon la procédure traditionnelle applicable aux infractions relevant de l'une ou de l'autre des juridictions.

3) Le moment de la procédure

Il est possible de reconnaître sa culpabilité à toutes les étapes de la procédure postérieures à la mise en accusation . Toutefois, il est couramment admis que la réduction de peine est d'autant plus importante que l'accusé plaide coupable rapidement.

Ce principe est admis depuis de nombreuses années et encouragé par la juridiction suprême, qui a manifesté à plusieurs reprises son hostilité aux reconnaissances de culpabilité tardives et tactiques.

Depuis 1994, il est même inscrit dans la loi. L'article 48 de la loi de 1994 sur la justice pénale et l'ordre public, depuis lors intégré à la loi de 2000 sur les pouvoirs des cours pénales, dispose en effet que :

« Pour déterminer la peine applicable à un contrevenant qui a plaidé coupable [...] , la cour prendra en compte :

» (a) l'étape de la procédure à laquelle le contrevenant a fait part de son intention de plaider coupable ;

» (b) les circonstances dans lesquelles il a donné cette indication. »

Cette incitation à la reconnaissance précoce de culpabilité vise notamment à empêcher les procès qui tournent court. En effet, dans environ un quart ( 180 ( * ) ) des cas traités par la Crown Court , les accusés plaident coupable seulement lorsque le procès commence, de sorte que le jury, en principe chargé de se prononcer sur la culpabilité en fonction des témoignages oraux, est inutilement désigné. C'est pour cette raison que la Commission royale pour le fonctionnement de la justice pénale ( 181 ( * ) ) avait, dans son rapport de 1993 , recommandé l'élaboration d'un barème des réductions de peine en fonction du moment de la reconnaissance de culpabilité. Elle suggérait en même temps d'officialiser les discussions entre le juge et la défense et de faire enregistrer par un greffier les accords conclus.

Cette proposition, restée sans suite à l'époque, a été récemment reprise, notamment dans le rapport intitulé « Justice pour tous », relatif au fonctionnement de la justice et présenté par le gouvernement au Parlement en juillet 2002.

4) Les garanties procédurales

Toute indication anticipée de la réduction de peine est actuellement exclue, car elle est contraire à la jurisprudence Turner de 1970 .

Dans cette décision, la chambre criminelle de la Court of Appeal a posé des conditions très strictes pour l'octroi des réductions de peine consécutives aux reconnaissances préalables de culpabilité :

- l'avocat de l'accusé doit insister pour que celui-ci ne plaide pas coupable lorsqu'il n'a pas commis les faits qui lui sont reprochés ;

- l'accusé doit être libre de plaider ou non coupable ;

- l'avocat de l'accusé doit révéler à son client toutes les discussions tenues avec le juge sur la peine ;

- les discussions entre l'avocat de l'accusé et le juge doivent avoir lieu en présence d'un représentant de l'autorité chargée des poursuites ;

- le juge peut indiquer le type de peine qu'il envisage en cas de culpabilité prouvée pendant l'audience, mais pas sa teneur précise, car une telle indication constituerait une pression contraire à la liberté qu'a l'accusé de plaider ou non coupable.

Cette jurisprudence, qui limite les discussions entre les juges et les avocats, est critiquée par les professionnels, qui souhaitent sa remise en cause par voie législative. D'après le rapport de 1993 de la Commission royale pour le fonctionnement de la justice pénale, 90 % des avocats et deux tiers des juges souhaitaient l'assouplissement de cette règle.

Lorsqu'une réduction de peine est accordée en échange d'un aveu de culpabilité, la loi de 2000 sur les pouvoirs des cours pénales oblige le tribunal à en faire état publiquement. Cette disposition a été introduite en 1994, mais elle semble appliquée de façon très diverse.

5) Les effets

En règle générale, il est admis que la reconnaissance de culpabilité entraîne une réduction de peine de l'ordre de 20 à 30 % et que l'accusé qui plaide coupable ne peut pas être condamné à la peine maximale prévue pour l'infraction qu'il a commise. La réduction de peine est encore plus importante dans le cas d'une personne qui confesse à la police une infraction alors que sa culpabilité serait particulièrement difficile à prouver.

La réduction de peine est possible même lorsqu'une peine minimale est prévue par la loi . Ainsi, l'article 48 de la loi de 1994 sur la justice pénale et l'ordre public prévoit qu'une remise de peine d'au plus 20 % peut être accordée, d'une part, aux personnes condamnées pour infraction aux dispositions de la loi sur les stupéfiants concernant les drogues dures et, d'autre part, à celles qui sont condamnées pour leur troisième vol avec effraction, alors que les peines minimales sont de respectivement sept et trois ans de prison.

La condamnation consécutive à une reconnaissance préalable de culpabilité a les mêmes effets que la condamnation prononcée par les magistrates ou par un jury. Cependant, alors que la personne condamnée peut, en règle générale, faire appel à la fois de la décision la reconnaissant coupable et de la condamnation, l'appel de celle qui a plaidé coupable ne peut en principe avoir d'autre objet que la peine.

• Devant une magistrates' court , l'accusé qui plaide coupable est en principe condamné dès sa première comparution, sans que les témoins soient convoqués : les juges entendent l'accusation et la défense, puis prononcent la peine. Cependant, lorsque la peine excède la compétence répressive de la magistrates' court , l'affaire est renvoyée à la Crown Court afin que celle-ci prononce la peine.

Les magistrates peuvent refuser la reconnaissance de culpabilité s'ils l'estiment infondée.

Plus de 90 % des accusés plaident coupable devant une magistrates' court.

• Si l'infraction est jugée par la Crown Court , celle-ci se réunit sans jury lorsque l'accusé plaide coupable, puisque la seule tâche du tribunal consiste alors à déterminer la peine.

Un peu moins de 60 % des personnes jugées par la Crown Court plaident coupable. Ce pourcentage a beaucoup baissé au cours des dernières années (il atteignait 67 % en 1997), à la suite de l'entrée en vigueur, le 1 er octobre 1997, de la procédure incitant les accusés d'une infraction susceptible d'être jugée par une juridiction ou par l'autre à plaider coupable et à être jugés par une magistrates' court.

En revanche, si l'accusé ne plaide pas coupable, l'accusation doit prouver l'infraction, en principe uniquement par témoignage oral, que la procédure se déroule devant les magistrates' courts ou devant la Crown Court .

*

* *

Cette forme de reconnaissance de culpabilité, qui conduit le juge à réduire la peine, concerne les seules personnes formellement mises en accusation. Elle résulte de l'usage et a peu à peu été codifiée. Souvent qualifiée de sentence discounting ou de sentence bargaining , elle doit être distinguée du plea bargaining . Dérivé du plaider coupable, le plea bargaining constitue une procédure informelle (mais reconnue par la jurisprudence), aux termes de laquelle l'accusation et la défense se mettent d'accord sur une réduction des charges en échange d'un aveu de culpabilité.

Si le plea bargaining ne revêt pas en Angleterre et au Pays de Galles la même ampleur qu'aux États-Unis, d'une part, à cause du rôle beaucoup plus effacé de l'accusation et, d'autre part, parce que les tribunaux peuvent exiger que les charges relevées correspondent précisément aux faits invoqués, il existe cependant.

ESPAGNE

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La loi organique n° 7 du 28 décembre 1988 relative à la procédure abrégée applicable à certaines infractions a introduit dans le code de procédure pénale une disposition comparable à la reconnaissance préalable de culpabilité.

Cette mesure a été précisée par la récente réforme du code de procédure pénale , objet d'une loi ordinaire et d'une loi organique du 24 octobre 2002. L'entrée en vigueur de cette réforme, initialement prévue pour la fin du mois d'avril 2003, a été retardée pour permettre la mise à disposition des personnels et des moyens matériels nécessaires à son application.

Le dispositif, qui se traduit par un accord entre la défense et l'accusation suivi d'un « jugement de conformité » , n'est applicable que lorsque la peine encourue n'excède pas six ans de prison.

1) Les infractions

La peine encourue pour l'infraction objet de l'acte d'accusation ne doit pas dépasser six ans de prison .

2) L'initiative

C'est l'avocat de l'accusé qui, en accord avec ce dernier , demande au juge d'appliquer la peine proposée par le ministère public. La requête peut être orale ou écrite.

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la réforme d'octobre 2002, l'initiative appartient également au ministère public.

3) Le moment de la procédure

La reconnaissance de culpabilité doit avoir lieu avant le début de la phase orale du jugement , c'est-à-dire avant les séances consacrées aux dépositions des témoins et des experts. Elle peut donc être présentée en même temps que l'acte d'accusation ou plus tard.

4) Les garanties procédurales

Dans la version actuellement en vigueur, le juge vérifie l'existence d'une infraction ainsi que la nécessité de prononcer une peine.

La réforme d'octobre 2002 a multiplié les garanties procédurales . Lorsqu'elle sera appliquée, le juge devra s'assurer de :

- la qualification des faits reprochés à l'accusé ;

- l'adéquation de la peine ;

- l'absence de pression sur l'accusé ;

- la compréhension par l'accusé des implications de sa décision.

Lorsque les deux premières conditions ne seront pas remplies, le juge pourra demander une modification de l'acte d'accusation avant d'homologuer, le cas échéant, l'acte modifié. Lorsque les deux dernières seront absentes, la procédure abrégée sera abandonnée et le procès continuera selon la procédure de droit commun.

5) Les effets

L'accusé renonçant à la production des preuves en audience publique, la peine peut être prononcée directement. Le code ne prévoit pas de réduction de peine , mais la reconnaissance préalable de culpabilité peut être considérée comme une circonstance atténuante .

ITALIE

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Afin de permettre la simplification et l'accélération du traitement des dossiers, le code de procédure pénale de 1988 a élargi les possibilités de recours à des procédures spéciales .

Certaines visent à éliminer l'audience préliminaire, au cours de laquelle le juge qui a conduit l'instruction prend une ordonnance de non-lieu ou une ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement. Elles peuvent être mises en oeuvre sans l'accord de l'inculpé. En revanche, les autres procédures spéciales, qui permettent de supprimer le débat public et de passer directement de l'audience préliminaire au prononcé de la peine, ne sont applicables qu'avec le consentement de l'accusé. Les principales d'entre elles, comparables au plaider-coupable anglo-saxon, sont :

- l'application de la peine sur requête des parties , couramment appelée pattegiamento (marchandage), dans laquelle le ministère public et l'accusé demandent au juge de prononcer la peine sur laquelle ils se sont mis d'accord ;

- le jugement abrégé , qui permet au juge de prononcer son verdict sur la base du dossier du ministère public ( 182 ( * ) ) , puisque l'accusé renonce au débat contradictoire sur la preuve.

Ces dispositions initiales du code de procédure pénale de 1988 relatives à ces deux procédures, en particulier celles qui régissent le jugement abrégé, ont été considérablement modifiées à la suite, d'une part, de plusieurs décisions de la Cour constitutionnelle et, d'autre part, de réformes législatives. Les modifications visent à élargir les possibilités de recours au jugement abrégé.

1) Les infractions

Le pattegiamento

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Le jugement abrégé

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La procédure est applicable aux infractions mineures : une fois la réduction opérée, la peine ne doit pas dépasser deux ans de prison.

La procédure est applicable à toutes les infractions quelle que soit leur gravité .

2) L'initiative

Le pattegiamento

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Le jugement abrégé

---

L'initiative appartient à l'accusé ou au ministère public .

La partie qui n'a pas pris l'initiative doit donner son accord.

Cependant, le juge peut passer outre l'opposition du ministère public lorsqu'il l'estime infondée.

La partie qui prend l'initiative peut assortir sa requête d'une demande de sursis à exécution ( 183 ( * ) ) .

L'initiative est réservée à l'accusé, qui n'a plus besoin de recueillir l'assentiment du ministère public depuis que la procédure a été réformée par voie législative en 2000.

Si elle est présentée pendant l'audience préliminaire, la demande peut être formulée par oral. Dans les autres cas, elle est nécessairement écrite.

3) Le moment de la procédure

Le code de procédure pénale permet aux parties de demander la mise en oeuvre de l'une ou l'autre de ces procédures jusqu'à l'ouverture du débat contradictoire .

4) Les garanties procédurales

Le pattegiamento

---

Le jugement abrégé

---

Le juge vérifie la recevabilité de la demande, ainsi que la qualification juridique de l'infraction. Il vérifie notamment qu'il n'y a pas lieu de prononcer l'acquittement.

Le juge ne peut pas prononcer une peine différente de celle convenue par les parties. Cependant, depuis une décision prise en 1990 par la Cour constitutionnelle, il doit vérifier que la peine est adaptée et, s'il estime que ce n'est pas le cas, il peut rejeter l'accord. Dans ce cas, la procédure normale s'applique.

Le contrôle du juge dépend de la nature de la demande :

- il est purement formel lorsque celle-ci est simple ;

- il porte sur le bien-fondé lorsque la demande est conditionnelle, l'accusé ayant, depuis la réforme législative adoptée en 2000, la possibilité de subordonner sa requête à la prise en compte d'éléments de preuve ( 184 ( * ) ) ne figurant pas dans le dossier du ministère public.

5) Les effets

Le pattegiamento

---

Le jugement abrégé

---

La réduction de peine est d'au plus un tiers.

La personne condamnée est exemptée du paiement des frais de procédure et ne peut faire l'objet d' aucune peine complémentaire .

La condamnation n'est ni publiée, ni inscrite au casier judiciaire.

La décision du juge, qui consiste à accepter l'accord conclu entre l'accusé et le ministère public, n'est pas susceptible d'appel, à moins qu'elle n'ait été prise contre l'avis du ministère public, qui peut alors faire appel. En revanche, elle peut faire l'objet d'un recours en cassation.

Toutes les conséquences de l'infraction sont supprimées si la personne condamnée ne commet pas une infraction de même nature :

- au bout de cinq ans, dans le cas d'un crime ou d'un délit ;

- au bout de deux ans, dans le cas d'une contravention.

La réduction de peine est d'un tiers, et les accusés passibles de la réclusion à perpétuité ne peuvent plus être condamnés qu'à trente ans d'emprisonnement.

Les possibilités d'appel sont limitées : le ministère public ne peut faire appel que si la condamnation a été prononcée pour une infraction autre que celle de la mise en accusation.

*

* *

Contrairement à ce que le législateur avait imaginé, la procédure du jugement abrégé a été très peu utilisée. C'est pourquoi la réforme adoptée en 2000 visait notamment à éliminer les principaux obstacles à son utilisation. Dans le projet de loi d'origine, le gouvernement avait également prévu l'introduction d'une nouvelle procédure simplifiée assimilable au plaider coupable, « la condamnation à une peine fixée », comparable au pattegiamento , mais applicable pour des infractions plus graves et qui n'aurait pas exclu la condamnation à des peines complémentaires.

PORTUGAL

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Le code de procédure pénale actuellement en vigueur, qui date de 1987, comporte une disposition de portée limitée sur la reconnaissance préalable de culpabilité.

Il s'agit de l' article 344 intitulé « Confession » qui permet, dans certaines circonstances, d'écourter le procès, par le passage direct au prononcé de la peine .

1) Les infractions

La procédure de l'article 344 est utilisable pour toutes les infractions, dans la mesure où la sanction applicable est limitée .

Si la peine encourue dépasse cinq ans de prison ( 185 ( * ) ) , le recours à l'article 344 est exclu.

2) L'initiative

C'est l'accusé qui prend l'initiative de reconnaître les faits qui lui sont reprochés.

En l'absence de disposition explicite sur le caractère oral ou écrit de la confession, la doctrine estime que, comme toute déclaration de l'accusé, la confession est orale.

3) Le moment de la procédure

La reconnaissance de culpabilité a lieu au début du jugement , après la phase d'instruction. Aussi longtemps que l'audience n'est pas achevée, l'accusé peut se rétracter.

4) Les garanties procédurales

Le président doit demander à l'accusé s'il agit de sa propre initiative et indépendamment de toute pression . Il lui demande également s'il entend effectuer une confession complète et sans réserves.

Si le président ne pose pas ces questions à l'accusé, la procédure peut être annulée.

5) Les effets

D'après l'article 344 du code de procédure pénale, si l'accusé confesse la totalité des faits qui lui sont reprochés, il renonce à la production des preuves en audience publique et considère les faits reprochés comme prouvés. La peine peut donc être prononcée directement et les frais de justice à la charge de l'accusé sont réduits. En revanche, le code ne prévoit pas de réduction de peine . Celle-ci ne peut donc être accordée qu'au titre des circonstances atténuantes.

En présence de co-accusés, ceux-ci doivent également confesser sans réserves tous les faits reprochés pour que la procédure spéciale de l'article 344 soit applicable.

En cas de confession partielle ou conditionnelle, de même que lorsque l'accusé encourt une peine de prison supérieure à cinq ans, le tribunal décide librement de la production des preuves en audience publique.

La jurisprudence considère que la confession de l'accusé, même totale et inconditionnelle, n'exclut pas la liberté d'appréciation du tribunal et n'empêche pas le déroulement normal du procès.

CANADA

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)

. La reconnaissance préalable de culpabilité est admise à toutes les étapes de la procédure et pour toutes les infractions . Le juge a alors l'obligation d'enregistrer le « plaidoyer de culpabilité » si celui-ci n'est pas équivoque et s'il est manifeste que l'accusé comprend la nature de l'infraction qui lui est reprochée, ainsi que les conséquences de sa décision de plaider coupable. Une telle reconnaissance de culpabilité est retenue par le juge comme justifiant une atténuation de la peine .

Par ailleurs, les négociations entre l'accusation et la défense sur la révision de l'inculpation en échange d'une reconnaissance préalable de culpabilité ( plea bargaining ) constituent une pratique courante, bien qu'elles ne soient ni codifiées ni approuvées par la jurisprudence.

En pratique, dans plus de 90 % des affaires, l'accusé plaide coupable.

Comme le plaidoyer de culpabilité est comparable au plaider coupable à l'anglaise, dans le texte qui suit, on a choisi d'examiner les « mesures de rechange », applicables en cas de reconnaissance préalable de culpabilité pour des infractions mineures . Elles ont été introduites en 1995, sur le modèle des dispositions adoptées précédemment dans le cadre de la loi sur les jeunes contrevenants.

1) Les infractions

Les mesures de rechange s'appliquent à des personnes qui reconnaissent avoir commis des infractions mineures et qui n'ont pas d'antécédents judiciaires graves .

Le législateur a prévu le recours aux mesures de rechange mais a laissé à chaque gouvernement provincial le soin de déterminer les conditions dans lesquelles elles sont applicables, de sorte que les infractions visées varient d'une province à l'autre.

2) L'initiative

C'est le juge qui propose des mesures de rechange, s'il est convaincu « qu'elles sont appropriées compte tenu des besoins du suspect et de l'intérêt de la société et de la victime ».

3) Le moment de la procédure

Dès sa comparution devant le juge, l'accusé est appelé à plaider coupable ou non coupable.

4) Les garanties procédurales

Le juge doit s'assurer que l'accusé comprend la nature de l'infraction qui lui est reprochée ainsi que les conséquences de sa décision de plaider coupable.

Après avoir été informé des mesures de rechange qui lui sont proposées, l'accusé doit manifester librement « sa ferme volonté de collaborer à leur mise en oeuvre ».

5) Les effets

Si l'accusé plaide coupable, le juge, après avoir entendu le procureur et l'accusé, détermine la sanction applicable.

Les mesures proposées doivent faire partie d'un programme de mesures de rechange autorisé par le procureur ou par le gouvernement provincial. Elles peuvent consister en une lettre d'excuses, un don à un organisme de charité, la restitution du bien à la victime, une indemnisation, l'exécution de travaux communautaires au profit de la collectivité, un service personnel à la victime, l'obligation de suivre un traitement...

À titre d'exemple, les dispositions suivantes font partie de différents programmes de mesures de rechange :

- les adultes accusés de petites infractions à la législation sur les stupéfiants suivent un traitement de désintoxication (Alberta) ;

- les femmes coupables de vol à l'étalage participent à des groupes de sensibilisation sur le vol à l'étalage (Québec) ;

- les personnes conduisant en état d'ébriété suivent une thérapie de groupe et une cure de désintoxication (Ontario, Yukon, Québec).

L'accusé qui a reconnu sa culpabilité et exécuté la totalité des mesures de rechange ne peut plus être mis en cause, ni au civil ni au pénal, pour les faits qu'il a reconnus.

La communication du dossier relatif à l'infraction est limitée aux tribunaux, aux policiers et au personnel chargé de l'administration des mesures de rechange. Toute autre personne souhaitant avoir accès au dossier doit convaincre le tribunal qu'elle a « un intérêt valable ».

Aucune information ne peut être produite après un délai de deux ans suivant la fin de l'application des mesures de rechange.

ETATS-UNIS

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Au cours du XX e siècle, la reconnaissance de culpabilité est devenue un élément essentiel de la procédure pénale , aussi bien au niveau fédéral que dans les différents États : plus de 90 % des condamnations pénales résultent d'un aveu de culpabilité.

La reconnaissance de culpabilité entraîne une négociation entre l'accusation et la défense ( plea bargaining ) : en échange de l'aveu de sa culpabilité, l'accusé obtient du procureur une révision de l'inculpation ou la promesse de recommandations de clémence au juge.

Peu codifié, le plea bargaining a été reconnu en 1970 par la Cour suprême comme « une composante essentielle de l'administration de la justice », qui « correctement administrée, devait être encouragée ».

Bien que soumise à des garanties constitutionnelles fédérales, la justice pénale relève principalement des cinquante États, et non du pouvoir fédéral. Même si les règles de procédure varient d'un État à l'autre, les différents systèmes sont suffisamment proches pour qu'il soit possible d'en dégager les principes généraux.

1) Les infractions

Toutes les infractions peuvent faire l'objet d'une reconnaissance de culpabilité. Cependant, certains États refusent à l'accusé le droit de plaider coupable lorsqu'il a commis une infraction particulièrement grave et qu'il encourt la peine capitale ou l'emprisonnement à perpétuité. D'autres excluent le plaider coupable pour quelques infractions considérées comme particulièrement « sensibles ». Ainsi, le code pénal californien interdit explicitement toute transaction entre l'accusation et la défense lorsque l'accusé est suspecté d'avoir utilisé personnellement une arme à feu ou d'avoir conduit sous l'emprise d'alcool ou de produits stupéfiants.

2) L'initiative

L'accusé ou son avocat peuvent prendre l'initiative de la reconnaissance préalable de culpabilité. Cependant, le plus souvent c'est le procureur qui est à l'origine des négociations. Ceci s'explique par le fait qu'il détient l'exercice de l'action publique tout en exerçant les fonctions de juge d'instruction.

3) Le moment de la procédure

En règle générale, la reconnaissance de culpabilité peut avoir lieu à tout moment de la procédure , y compris pendant les délibérations du jury sur la culpabilité, voire après. En effet, si, faute de majorité, le jury ne parvient pas à une décision sur la culpabilité, le procès est en principe annulé et la procédure doit recommencer. En pareil cas, le plea bargaining permet d'éviter un nouveau procès.

Dans certains États, les possibilités de plea bargaining sont limitées à certaines phases de la procédure. De plus, la négociation est généralement d'autant plus avantageuse pour l'accusé qu'elle a lieu tôt , ce qui incite aux reconnaissances de culpabilité précoces.

Le plus souvent, la reconnaissance de culpabilité a lieu :

- lors de la première comparution devant le juge, lorsque l'accusation porte sur une infraction de niveau inférieur ( 187 ( * ) ) ;

- après l'audience préliminaire, qui permet d'apprécier le caractère probable de la culpabilité, pour les infractions plus graves.

4) Les garanties procédurales

La négociation consécutive à la reconnaissance de culpabilité se déroule de façon très informelle, mais l'accord qui en résulte doit être présenté en audience publique au juge, qui le contrôle et l'homologue . L'étendue du contrôle du juge varie d'un État à l'autre, voire d'un tribunal à l'autre.

Cependant, en matière fédérale, les règles de la procédure pénale précisent les obligations du juge :

- il doit vérifier que la reconnaissance de culpabilité est fondée ;

- il doit s'assurer que l'accusé comprend toutes les implications de sa reconnaissance de culpabilité et qu'il n'agit pas sous l'influence de la menace, de la force ou d'une promesse autre que celle qui est contenue dans le plea bargaining ;

- il ne doit pas participer aux négociations entre l'accusé et la poursuite ;

- il n'est pas obligé d'accepter les négociations et, en cas de refus de sa part, la possibilité qu'a l'accusé de revenir sur sa reconnaissance de culpabilité dépend du contenu de l'accord passé avec le procureur.

Les principes applicables dans les différents États divergent parfois : certains permettent, voire imposent, aux juges de participer aux négociations entre la défense et la poursuite. Dans de nombreux cas, les accords lient l'accusé.

Quelle que soit la participation du juge à la négociation, il n'a jamais l'obligation d'en accepter les termes. La plupart du temps, il le fait cependant, à moins que l'accord ne soit particulièrement inéquitable. En moyenne, on estime à moins de 10 % la proportion des accords refusés.

5) Les effets

En reconnaissant sa culpabilité, l'accusé renonce à plusieurs droits garantis par la Constitution :

- le droit de ne pas être obligé de témoigner contre soi-même ;

- le droit d'être mis en présence des témoins à charge et de les soumettre à un contre-interrogatoire ;

- le droit que les preuves irrégulièrement obtenues ne soient pas prises en compte pour la détermination de la culpabilité ;

- le droit que sa culpabilité soit établie par un jury populaire.

En échange de sa reconnaissance de culpabilité, l'accusé peut obtenir du procureur une révision de l'inculpation ou l'engagement de recommandations spéciales au juge .

La révision de l'inculpation peut prendre plusieurs formes :

- abandon de certains chefs d'accusation ;

- déqualification de l'inculpation, l'accusé plaidant coupable pour une infraction moins grave que celle qui avait été retenue à l'origine.

La révision de l'inculpation est facile à mettre en oeuvre, puisque, disposant d'une liberté presque totale, le procureur apprécie en toute opportunité la décision de lancer les poursuites. Une fois qu'elles sont engagées, il peut les abandonner ou les réduire.

Au niveau fédéral, le rôle du procureur est d'autant plus important que, depuis le milieu des années 80, le juge a perdu son pouvoir quasi discrétionnaire de choix de la peine.

Traditionnellement, la loi fixait la peine maximale, et le juge n'était pas tenu de motiver le choix de la peine à laquelle il condamnait un accusé. Devant les inégalités engendrées par le système, le Congrès a adopté en 1984 une loi établissant des peines minimales pour plusieurs infractions et institué une commission chargée de proposer des directives sur les condamnations. Ces directives déterminent, pour chaque infraction, la peine à prononcer en fonction du passé judiciaire du délinquant, et le juge ne peut s'en écarter que de plus ou moins 25 %. A la suite de cette réforme, la peine prononcée par le juge fédéral dépend essentiellement des chefs d'accusation retenus par le procureur.

Le procureur peut également faire des recommandations de clémence au juge (octroi d'un sursis, application de la peine minimale, modalités d'exécution de la peine...), voire s'entendre avec lui sur une condamnation, dans la mesure où aucune règle ne l'en empêche ( 188 ( * ) ) et où le juge a conservé son pouvoir de choix de la peine. De telles recommandations ne lient pas le juge. En contrepartie, les règles fédérales de procédure pénale précisent que ces recommandations ne lient pas non plus l'accusé.

La réduction de peine ne résulte pas nécessairement de la négociation, mais peut être le seul fruit de la reconnaissance préalable de culpabilité : dans certains États, le législateur permet ou impose des peines différentes selon que la culpabilité est établie par le jury ou qu'elle est reconnue par l'accusé, la Cour suprême ayant d'ailleurs validé ce principe.

En règle générale, la réduction de peine consécutive à une reconnaissance préalable de culpabilité devant les juridictions fédérales est de l'ordre de 30 %.

La condamnation consécutive à la reconnaissance préalable de culpabilité a exactement les mêmes conséquences que la condamnation consécutive à l'établissement de la culpabilité par le jury : elle est inscrite au casier judiciaire et, le cas échéant, le condamné perd certains droits (droit de vote ou de port d'armes par exemple). Cependant, les négociations sur la reconnaissance préalable de culpabilité incluent parfois l'abandon par l'accusé de son droit d'appel.

*

* *

Bien que considéré comme un des fondements de la procédure pénale américaine, le dispositif du plea bargaining est critiqué.

S'il permet au procureur de consacrer les moyens dont il dispose aux affaires les plus importantes, d'obtenir une condamnation (alors que celle-ci n'est jamais acquise lorsqu'un jury doit établir la culpabilité d'un accusé) et donc de présenter des statistiques de condamnations flatteuses, il l'incite également à charger l'accusation pour pouvoir négocier.

Certains États ont tenté d'interdire le plea bargaining : l'Alaska en 1975 par exemple, mais sans succès.

Actuellement, les réflexions critiques s'orientent plutôt vers un examen préalable particulièrement approfondi de toutes les affaires, afin de ne faire intervenir les jurys que pour les plus importantes, les autres pouvant continuer à faire l'objet d'une reconnaissance préalable de culpabilité, mais qui ne serait pas suivie d'une négociation avec le procureur. C'est ainsi que fonctionnent les tribunaux de la Nouvelle-Orléans depuis 1974. En effet, plutôt que d'accepter le postulat selon lequel il n'existe pas d'autres solutions que le procès en bonne et due forme, avec tous les risques d'enlisement que les garanties procédurales peuvent susciter, et le plea bargaining , certains refusent ce dilemme et plaident pour rendre au juge son rôle.

ANNEXE 5

ÉTUDE D'IMPACT

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I. IMPACT JURIDIQUE ET ADMINISTRATIF

TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES A LA LUTTE
CONTRE LES FORMES NOUVELLES
DE DÉLINQUANCE ET DE CRIMINALITÉ

Chapitre Ier

Dispositions concernant la lutte

contre la délinquance et la criminalité organisées

Section 1. Dispositions relatives à la procédure particulière applicable à la délinquance et la criminalité organisées

L'article 1er du projet crée dans le code de procédure pénale un titre spécifique relatif à la procédure applicable aux infractions "de délinquance et de criminalité organisées". Le champ d'application des dispositions de ce titre fait l'objet d'une définition en deux nouveaux articles.

Le premier champ, défini par l'article 706-73, concerne la criminalité organisée la plus grave en terme de crimes et délits contre la personne (et les associations de malfaiteurs en vue de les commettre). Il s'agit de retenir les formes de criminalité organisée qui par nature portent l'atteinte la plus grave aux intérêts sociaux les plus importants devant être préservés et qui justifient de recourir à l'ensemble des nouveaux moyens d'investigation (meurtre en bande organisée, torture et actes de barbarie en bande organisée, trafics de stupéfiant, enlèvement et séquestration, traite des êtres humains, proxénétisme, vol en bande organisée, extorsion, actes de terrorisme, infractions à la législation sur les armes en bande organisée, association de malfaiteurs préparant des infractions limitativement et précédemment visées).

Toutes les dispositions de ce nouveau titre sont applicables aux infractions visées dans ce premier champ (compétence des juridictions inter-régionales spécialisées, règles spécifiques sur la surveillance, sur l'infiltration, sur la possibilité de prolongation de la garde à vue jusqu'à 4 jours, sur les perquisitions, notamment de nuit, sur les écoutes téléphoniques au cours de l'enquête initiale, sur la vidéo-conférence pour les prolongations, et sur le gel des avoirs).

Le second champ, défini par l'article 706-74, concerne la criminalité organisée aggravée par la circonstance de bande organisée ainsi que les formes classiques d'association de malfaiteurs. Pour ces infractions, seule une partie des dispositions du nouveau titre sont applicables (compétence de juridictions inter régionales spécialisées, règles spécifiques sur la surveillance et sur le gel des avoirs).

Les règles sur l'infiltration, sur la garde à vue, sur les perquisitions spéciales et sur les écoutes téléphoniques en enquête ne sont pas applicables.

Il peut être remarqué que cette double définition de la notion de délinquance ou de criminalité organisée (référence à une liste ou référence à la circonstance aggravante de bande organisée) figure déjà dans son principe dans l'article 63-4 du code de procédure pénale, prévoyant, pour des infractions relevant de ces deux catégories, une intervention différée de l'avocat à la 36ème heure.

Ce dispositif vise à assurer un juste équilibre entre l'impératif de renforcement de l'efficacité dans la répression de la criminalité organisée et la proportionnalité de l'atteinte aux droits et libertés constitutionnellement protégés.

Il convient de souligner que si les actes de terrorisme sont visés, le dispositif s'articule avec le maintien des règles existantes de procédures pénales spécifiques et de compétence concurrente du tribunal de grande instance de Paris.

Le nouveau champ de définition juridique de la notion de criminalité organisée s'inspire des engagements internationaux de la France comme la convention CTO de Palerme du 12 décembre 2000, tout en retenant un domaine pénal d'infractions très graves puisque punies d'au moins 10 ans d'emprisonnement.

Dispositions portant sur la compétence des juridictions spécialisées

Les articles 706-75 à 706-79 définissent les modalités de facilitation du traitement judiciaire des procédures relatives au nouveau champ de criminalité organisée, associant les domaines relatifs à la matière économique et financière ainsi que la santé publique par la définition d'une compétence concurrente des juridictions pénales inter-régionales spécialisées.

Le principe d'organisation s'articule autour d'une matière pénale pré définie (article 706-73 et 706-74 pour la criminalité organisée) permettant, afin de mieux prendre en compte les bassins de criminalité et d'assurer l'application la plus adaptée des nouvelles techniques d'investigations, l'élargissement de la compétence territoriale au ressort de plusieurs cours d'appel.

La fixation du siège de ces juridictions et de leur ressort ne relève pas du domaine de la loi mais du pouvoir réglementaire qui pourra organiser les choix optimums, en terme d'affectation des ressources idoines (assistants spécialisés, moyens informatiques et d'analyse criminelle, magistrats spécialisés....) en fonction notamment des modalités d'organisation des services d'investigation de police judiciaire. Le Gouvernement envisage ainsi de diviser le territoire métropolitain en 6 ou 7 zones comportant chacune une juridiction inter-régionale.

La saisine de la juridiction spécialisée (parquet, instruction, formation de jugement), consacre un principe de compétence concurrente avec le tribunal bénéficiant d'un critère de compétence de droit commun, à l'instar du dispositif existant en matière d'infractions à caractère terroriste.

Les articles 706-77 à 706-78 organisent des possibilités de regroupement des procédures en permettant le recueil de l'avis des parties et en organisant un processus rapide d'arbitrage d'éventuels conflits de compétence par la chambre de l'instruction et si le dessaisissement concerne une juridiction extérieure à la cour d'appel de référence, par la chambre criminelle de la Cour de cassation.

Dispositions portant sur la procédure et les règles de procédures spécifiques

De nouvelles techniques d'investigation sont définies ou précisées afin de renforcer l'efficacité de la lutte contre les formes de criminalité organisée retenues par les articles 706-73 et 706-74.

Dispositions relatives à la surveillance

Pour l'ensemble du champ de la criminalité organisée, l'article 706-80 permet d'élargir à l'ensemble du territoire national la compétence des officiers de police judiciaire qui procèdent à des surveillances de personnes ou de biens, après l'information par tous moyens du procureur de la République du tribunal de grande instance du lieu du commencement des opérations ou de celui du parquet spécialisé, sauf opposition de ce magistrat. Il convient de souligner que l'intérêt juridique de cette disposition réside dans la simplification résultant de l'extension de compétence territoriale.

Dispositions relatives à l'infiltration

Pour le champ des incriminations de la liste de l'article 706-73, l'article 706-81 définit la possibilité de recourir aux techniques d'infiltration. Le dispositif retenu s'inspire de l'article 706-32 du code de procédure pénale actuel qui est supprimé par coordination.

Cette nouvelle technique d'enquête dont le principe est visé dans de nombreux instruments juridiques internationaux (convention CTO de Palerme du 12 décembre 2000, convention d'entraide pénale européenne du 29 mai 2000...) vise à permettre dans un cadre strictement défini à un officier de police judiciaire de procéder à un certain nombre d'actes limitativement énumérés par l'article 706-82 (utilisation d'une identité d'emprunt, fourniture de moyens, transports de produits illicites....) afin de faciliter la révélation d'infractions, sans les provoquer et bénéficier ainsi d'une immunité pénale pour les actes visés. La mise en oeuvre de cette technique suppose une autorisation écrite, préalable et spécialement motivée du magistrat saisi qui fixe le délai de l'opération (4 mois maximum renouvelables).

L'article 706-84 prévoit la sanction de toute révélation de l'identité réelle de l'agent infiltré et les articles 706-85 et 706-86 permettent d'assurer la sécurité de l'agent aussi bien au stade de la cessation des opérations que de l'éventuelle nécessité de procéder au recueil de son témoignage. Dans cette dernière hypothèse, il est possible de recourir aux modalités de vidéo transmission identiques à celles retenues pour l'audition des témoins protégés et prévues à l'article 706-61 du code de procédure pénale.

L'article 706-87 prévoit également, afin de tenir compte des exigences posées par la Cour européenne des droits de l'Homme, qu'aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement des déclarations faites par les officiers ou agents de police judiciaire ayant procédé à une opération d'infiltration.

Dispositions relatives à la Garde à vue

L'article 706-88 définit la possibilité de prolonger une garde à vue jusqu'à 4 jours maximum pour les formes les plus graves de délinquance ou de criminalité organisée du champ de l'article 706-73.

La personne peut à nouveau s'entretenir avec un avocat à la 48ème puis à la 72ème heure de garde à vue - après avoir bénéficié soit de deux entretiens, à la première puis à la 24ème heure de garde à vue, conformément au droit commun - soit d'un seul entretien à la 36ème heure, conformément à l'alinéa 7, inchangé, de l'article 63-4.

Ces dispositions ne sont pas applicables en matière de terrorisme ou de trafic de stupéfiants, infractions pour lesquelles, comme actuellement en vertu du dernier alinéa de l'article 63-4, l'avocat intervient à la 72ème heure. La décision de prolongation doit être écrite et motivée. Le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction ne peut prolonger la garde à vue que pendant 24 heures et ce à deux reprises, ce qui renforce le contrôle juridictionnel de la mesure.

Dispositions relatives à la perquisition

Les articles 706-89 à 706-95 organisent l'extension des possibilités de perquisitions de nuit en enquête ou à l'instruction, ou des perquisitions en enquête préliminaire sans l'accord de la personne, pour les formes les plus graves de délinquance et de criminalité organisée du champ de l'article 706-73, en s'inspirant notamment des articles 706-24 et 706-24-1 relatif à la lutte contre le terrorisme. Ces dispositions prévoient également la possibilité de perquisitionner sans la présence de l'intéressé qui sera retenu en un autre lieu afin de faciliter dans l'espace et dans le temps des opérations coordonnées.

Le contrôle des opérations est assuré par le magistrat qui a délivré l'autorisation qui peut se transporter sur les lieux.

Dispositions relatives aux interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications

L'article 706-96 organise la possibilité de recourir pendant l'enquête à une brève interception téléphonique dans le champ défini par l'article 706-73, c'est à dire pour les infractions de criminalité organisée les plus graves. Dans ce cas, le juge des libertés et de la détention autorise ou non pour une durée de quinze jours renouvelables une fois la mesure.

Dispositions relatives à l'utilisation de moyens de communication audiovisuelle en cas de prolongation de la détention provisoire

L'article 706-97 prévoit la possibilité pour la prolongation d'une détention provisoire d'une personne mise en examen pour un ou plusieurs des crimes ou délits entrant dans le champ d'application des article 706-73 ou 706-74 la possibilité de recourir à l'utilisation de moyens de communication audiovisuelle.

Dispositions relatives aux mesures conservatoires

Afin de garantir le prononcé de sanctions patrimoniales, dont l'efficacité dans la lutte contre la criminalité organisée mérite d'être renforcée, l'article 706-98 définit une procédure spécifique inspirée du cadre retenu par la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne en matière de saisie des avoirs terroristes, en recourant au juge des libertés et de la détention du siège de la juridiction compétente qui pour l'exécution des mesures conservatoires bénéficie d'une compétence nationale.

Ce dispositif est applicable à l'ensemble des matières définies par les articles 706-73 et 706-74.

Dispositions communes

L'article 706-99 prévoit que le fait, au terme de la procédure, que la circonstance aggravante de bande organisée n'ait pas été retenue, ne constitue pas à lui seul, une cause de nullité des actes accomplis.

L'article 706-100 prévoit que lorsqu'au cours de l'enquête, il a été fait application des dispositions relatives à la surveillance, l'infiltration, la garde à vue de 4 jours et les perquisitions de nuit, le procureur de la République doit, s'il est interrogé par la personne ayant été placée en garde à vue sur les suites données à la procédure, informer le demandeur de sa décision lorsqu'il décide de poursuivre l'enquête préliminaire. Cette disposition prévoit alors la possibilité pour l'avocat de la personne de consulter le dossier de la procédure avant toute nouvelle audition de cette dernière. Bien évidemment, si le procureur de la République estime que la communication du dossier est de nature à nuire au bon déroulement des investigations, il lui suffira de mettre fin à l'enquête préliminaire et d'ouvrir une information. Certes, la personne n'aura alors communication du dossier que si elle est mise en examen, mais elle ne pourra être entendue comme simple témoin s'il existe contre elles des indices graves et concordants de culpabilité, conformément aux dispositions de l'article 105 du code de procédure pénale, qui interdit les mises en examen tardives : l'intérêt des dispositions du nouvel article 706-100 est donc d'apporter aux personnes mises en causes des garanties similaires à celles existant lors de l'information, cette contrepartie étant justifié par la possibilité donnée aux enquêteurs de recourir lors de l'enquête à des moyens d'investigations, comme les écoutes téléphoniques, normalement utilisées lors d'une instruction. Il est également possible au procureur de la République d' informer la personne ayant été gardée à vue que, faute de charge la concernant, l'enquête est classée sans suite à son égard - même si l'enquête continue à l'égard d'autres personnes - et dans ce cas il n'y a pas lieu à communication du dossier.

L'article 706-101 prévoit que l'utilisation des nouveaux moyens d'investigations au cours de l'enquête en matière de délinquance organisée doit avoir pour conséquence de permettre à l'avocat de la personne de formuler ses observations devant le procureur de la République avant que celui-ci ne décide, le cas échéant, d'une procédure de comparution immédiate. L'avocat peut en effet convaincre ce magistrat qu'en raison de la complexité des faits une information doit être ouverte. Il ne faut toutefois pas interdire la procédure de comparution immédiate dans une telle hypothèse, si l'enquête a permis d'élucider les faits.

Cet article prévoit enfin que, dans l'hypothèse où la procédure de comparution immédiate serait mise en oeuvre, le prévenu disposera d'un délai de deux mois, et non de deux semaines, pour préparer sa défense.

Section 2. Dispositions renforçant la répression de la délinquance et de la criminalité organisées

La liste des infractions pour lesquelles la circonstance de bande organisée est prévue est complétée par l'article 2 du projet, permettant l'intégration de diverses infractions dans le champ de la criminalité organisée des articles 706-73 et 706-74 (crime de meurtre (I) , actes de torture et de barbarie (III) corruption de mineurs (V), diffusion d'images pornographiques (VI), évasion (IX), délits en matière d'armes XIII à XVIII ).

Est également créé la provocation au crime d'assassinat (II) afin de combler une lacune législative, dénoncée depuis de longues années par les praticiens, car elle empêche de réprimer celui qui passe un «contrat» afin d'assassiner une personne, lorsque celui désigné pour commettre cet acte n'a aucunement l'intention de le réaliser..

Le champ des infractions susceptibles de faire l'objet de la peine complémentaire de confiscation générale des biens est complété par une extension au délit de «proxénétisme de la drogue» (IV) , au délit d'association de malfaiteurs et pour le proxénétisme de l'association de malfaiteurs prévus aux articles 222-39 alinéa 1, 450-1 et 450-2-1 du code pénal (XII).

Les pénalités pour l'escroquerie en bande organisées sont aggravées (VII)

Le projet de loi s'inspire de l'article 222-34 du code pénal en matière de direction d'un groupe d'importation de stupéfiants pour criminaliser le fait de diriger une association de malfaiteurs terroriste (VIII) .

La transposition de l'article 4 de la décision-cadre 2000/383/JAI du conseil visant à renforcer par des sanctions pénales et autres la protection contre le faux monnayage en vue de la mise en circulation de l'euro, qui fait obligation d'incriminer la fabrication, la mise en circulation, l'importation, l'exportation, le transport de billets de banque ou de pièces de monnaies «fabriqué en utilisant des installations ou du matériel légaux, en violation des droits ou des conditions en vertu desquels les autorités compétentes peuvent mettre de la monnaie en circulation, et sans l'accord de ces autorités», est assurée (X, XI)

L'article 3 du projet de loi précise et complète le régime juridique applicable au repenti, en créant à cette fin un nouvel article 132-78 dans le code pénal.

Ainsi, les conditions générales de mise en oeuvre de ce nouveau dispositif caractérisé par la possibilité soit d'une exemption de peine, soit d'une réduction de peine de moitié (avec adaptation pour la peine de réclusion criminelle à perpétuité) pour les personnes ayant permis soit d'éviter la réalisation d'une infraction, soit de faire cesser l'infraction, d'éviter que l'infraction ne produise un dommage ou d'identifier les auteurs sont fixées par le nouvel article 132-78. Ce dispositif est étendu aux infractions de même nature de la catégorie de l'infraction de référence et les personnes concernées peuvent solliciter le bénéfice d'une protection juridique et de sécurité.

Le champ des infractions pour lesquelles les dispositions sur les repentis sont applicables, de telles dispositions existant déjà notamment en matière de terrorisme, est défini au cas par cas par matières (meurtre, empoisonnement, tortures et actes de barbarie, trafic de stupéfiants, enlèvement et séquestration, détournement d'aéronef, traite des êtres humains, proxénétisme et infractions assimilés, vol en bande organisée, extorsion en bande organisée, trafic d'armes et assimilés).

L'article 4 du projet insère dans le code pénal un nouvel article 434-7-2 sanctionnant la révélation à un tiers, par toute personne qui, à raison de ses fonctions a connaissance en application du code de procédure pénale, d'informations issues d'une enquête ou d'une instruction en cours concernant un crime ou un délit, de nature à entraver le déroulement des investigations, par exemple en prévenant un complice qu'il est recherché par la police, ce qui lui permettra de prendre la fuite ou de faire disparaître des preuves.

De tels faits ne sont actuellement qu'indirectement et insuffisamment réprimés au titre de la violation du secret professionnel, puni d'un an d'emprisonnement.

Enfin, l'article 5 du projet de loi procède à des coordinations diverses et préserve notamment la spécificité du régime de l'avocat à la 72ème heure de garde à vue, applicable en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants.

Par ailleurs, l'article 85 du code de procédure pénale est complété afin d'éviter qu'une juridiction spécialisée puisse être directement saisie par la victime sur plainte avec constitution de partie civile.

Chapitre II

Dispositions concernant la lutte contre la délinquance
et la criminalité internationales

Le chapitre II du projet de loi introduit, en droit interne, les dispositions nécessaires à la transposition de la convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne ainsi que de la décision instituant Eurojust du 28 février 2002.

A cet effet, le titre X relatif à l'entraide judiciaire internationale dans le livre quatrième du code de procédure pénale est réécrit par l'article 6 du projet, les articles 694 à 696-2 du titre actuel étant abrogés. Ce nouveau titre X, dont l'intitulé est conservé, distingue principalement deux régimes d'entraide, qui font l'objet chacun d'un chapitre distinct : le premier, de portée générale, concerne l'entraide pénale avec tout Etat ; le second est spécifique à l'entraide avec les Etats de l'Union européenne.

Par coordination, l'avant-dernier alinéa de l'article 706-71 du code de procédure pénale ainsi que l'article 30 de la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers sont abrogés.

Dispositions générales

Transmission et exécution des demandes d'entraide. L'article 694, relatif à la transmission des demandes d'entraide, modernise le dispositif de l'article 30 de la loi du 10 mars 1927, abrogé par coordination. Il reprend un double régime de transmission des demandes d'entraide, selon que l'urgence est caractérisée ou non, et distingue selon que les demandes d'entraide émanent d'autorités judiciaires françaises ou étrangères.

L'article 694-1 apporte des précisions sur les modalités pratiques de transmission directe des demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères. Notamment, lorsqu'un juge d'instruction est saisi directement d'une demande d'entraide, il doit la communiquer immédiatement pour avis au procureur de la République. Cette obligation, combinée avec la procédure de contrôle prévue à l'article 694-4, permet de concilier la volonté du Gouvernement de favoriser la transmission directe des demandes d'entraide, et la nécessité d'assurer la sauvegarde des intérêts essentiels de la Nation et le respect de l'ordre public.

L'article 694-2 précise les compétences respectives du procureur de la République et du juge d'instruction pour exécuter les demandes d'entraide.

L'article 694-3 maintient la règle selon laquelle une demande d'entraide étrangère doit en principe être exécutée selon la loi française. Cependant, il pose l'obligation d'exécuter cette demande selon les règles de procédure qui auront été, le cas échéant, expressément indiquées par l'autorité étrangère, sous réserve que ces règles ne réduisent pas les droits des parties ou les garanties procédurales prévues par la loi française.

Le projet de loi concilie ainsi le respect des principes généraux du droit interne avec le souci d'efficacité de l'entraide judiciaire, qui suppose notamment de tenir compte de la loi de l'Etat requérant, afin que l'acte que ce dernier demande puisse être utilement invoqué devant ses juridictions ; par ailleurs, il étend ce système, prévu par la convention du 29 mai 2000 entre Etats membres de l'Union européenne, à toute demande d'entraide, quel que soit le pays en cause.

Enfin, l'alinéa 3 précise que l'irrégularité de la transmission de la demande d'entraide ne peut constituer une cause de nullité des actes accomplis en exécution de cette demande.

L'article 694-4 reprend, sous une forme plus précise et plus explicite rendue nécessaire par l'extension du principe de transmission directe des demandes d'entraide, l'actuel article 694-2 relatif à la clause de sauvegarde de l'ordre public et des intérêts essentiels de la Nation.

Lorsque le procureur de la République est saisi directement d'une demande d'entraide ou avisé par un juge d'instruction d'une demande, il doit, si son exécution est de nature à porter atteinte à l'ordre public ou aux intérêts essentiels de la Nation, la transmettre au procureur général qui détermine s'il y a lieu d'en saisir le garde des sceaux.

Le dernier alinéa précise qu'une décision négative du garde des sceaux fait obstacle à l'exécution de la demande d'entraide ou au retour des pièces d'exécution, même si la demande a été adressée directement à un juge d'instruction.

Dispositions applicables à certains types de demande d'entraide.

L'article 694-5 étend aux demandes d'entraide françaises et étrangères (aussi bien des Etats membres de l'Union européenne que de tout autre pays) l'audition à distance prévue à l'article 706-71 du code de procédure pénale. Il prévoit que les poursuites pénales qui pourraient être engagées contre les témoins défaillants dans une procédure française sont applicables aux témoins entendus à distance à la demande d'une juridiction étrangère.

Cette extension vaut transposition en droit interne des articles 10 et 11 de la convention du 29 mai 2000.

L'article 694-6 confirme l'extension de compétence territoriale de la police judiciaire française pour les observations faites à l'étranger.

L'article 694-7 crée la faculté de donner aux agents étrangers le droit de poursuivre en France une opération d'infiltration pour une procédure étrangère (hors équipe commune d'enquête), sous le contrôle d'un officier de police judiciaire français.

Comme pour une opération d'infiltration par des agents français, cette opération doit être autorisée par un juge français et ne peut être confiée qu'à des agents étrangers spécialement habilités. Elle doit en outre être précédée d'une autorisation du ministre de la justice.

Cet article vaut transposition de l'article 14 de la convention du 29 mai 2000 relatif aux « enquêtes discrètes », et de l'article 12 de la même convention relatif aux « livraisons surveillées ».

L'article 694-8 donne à l'autorité judiciaire française la possibilité de recourir à des agents étrangers pour une opération d'infiltration dans le cadre d'une procédure française (hors équipe commune d'enquête). L'autorisation est donnée par l'autorité judiciaire saisie, sous réserve de la même habilitation des agents qu'à l'article précédent. L'accord préalable du ministre de la justice n'est pas requis.

L'article 694-9 désigne les autorités judiciaires françaises compétentes pour communiquer aux autorités judiciaires étrangères des informations, comme des pièces de procédure, issues d'une procédure pénale en cours, et leur donne la faculté de décider si l'information transmise peut être versée ou non dans la procédure étrangère.

Cet article vaut transposition des articles 7 et 13 de la convention du 29 mai 2000.

Dispositions propres à l'entraide entre les Etats membres de l'Union européenne .

Transmission et exécution des demandes d'entraide.

Par renvoi à l'article 694-4 , l'article 695-1 soumet le principe de transmission directe des demandes d'entraide imposé par l'article 6 de la convention du 29 mai 2000 à la procédure de contrôle de la «clause de sauvegarde».

Des équipes communes d'enquête.

L'article 695-2 , relatif aux équipes communes d'enquête instituées par l'article 13 de la convention du 29 mai 2000 (entré en vigueur en vertu de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2002) donne aux agents étrangers détachés en France des pouvoirs de police judiciaire analogues à ceux d'un agent de police judiciaire, et une compétence nationale.

Leurs pouvoirs sont limitativement énumérés : constater des crimes, délits et contraventions et en dresser procès-verbal ; recevoir par procès-verbal les déclarations de témoins; procéder à des surveillances ou à des infiltrations, le tout dans la même subordination aux officiers de police judiciaire et à l'autorité judiciaire français qu'un agent de police judiciaire et « dans la limite des pouvoirs qui leur sont conférés par leur propre statut ».

Aucun pouvoir coercitif n'est donc conféré aux agents étrangers.

Cet article n'exclut pas que soient autorisés à être membre d'une équipe commune d'enquête des agents d'organisations communautaires, comme Europol ou l'OLAF.

L'article 695-3 , relatif aux agents détachés français dans une équipe commune d'enquête, étend leur compétence territoriale à l'Etat dans lequel opère l'équipe commune.

De l'Unité Eurojust

L'article 695-4 définit la nature et les missions de l'Unité Eurojust conformément aux articles 2 et 3 de la Décision du Conseil de l'Union européenne du 28 février 2002 : organe de l'Union européenne, elle est chargée de promouvoir et d'améliorer la coordination et la coopération entre les autorités compétentes des Etats membres dans toutes les enquêtes et poursuites relevant de sa compétence.

L'article 695-5 , qui vaut transposition des articles 6 et 7 de la Décision, définit les pouvoirs de l'Unité Eurojust, qui se limitent au droit de demander d'une part, aux procureurs généraux certains actes d'action publique (procéder à une enquête ou engager des poursuites, dénoncer des infractions aux autorités compétentes d'un autre Etat, mettre en place une équipe commune d'enquête) et d'autre part, aux autorités judiciaires des informations issues de procédures judiciaires.

Conformément à l'article 8 de la Décision, l 'article 695-6 impose à l'autorité judiciaire française saisie d'une demande d'Eurojust l'obligation, sauf cas particulier, d'exposer les motifs d'un refus éventuel de donner suite à la demande.

L'article 695-7 précise que pour remplir sa mission de coordination l'Unité Eurojust peut assurer la transmission des demandes d'entraide, lorsqu'une exécution simultanée est nécessaire dans plusieurs Etats membres -par exemple des perquisitions simultanées.

L'article 695-8 précise le statut du « membre national » : magistrat hors hiérarchie nommé pour trois ans par arrêté du ministre de la justice, il est placé, vis-à-vis de ce dernier, dans la même situation hiérarchique que celle d'un procureur général. Cet article vaut transposition de l'article 2 de la Décision.

L'article 695-9 définit les pouvoirs judiciaires du représentant national, conformément à l'article 9 de la Décision. Il les limite au minimum admis par la Décision : l'accès aux fichiers judiciaires (Casier judiciaire national, au Système de Traitement des Infractions Constatées et au Système d'Information Schengen), et l'accès, sauf application d'un motif de refus, aux informations issues de procédures judiciaires.

Dispositions propres à l'entraide entre la France et certains Etats

L'article 695-10 prévoit la possibilité d'appliquer à d'autres Etats que ceux membres de l'Union européenne les dispositions relatives aux transmissions directes des demandes d'entraide et aux équipes communes d'enquête.

Chapitre III

Dispositions concernant la lutte contre les infractions
en matière économique, financière et douanière
et en matière de santé publique et de pollution maritime

Section 1. Dispositions relatives aux infractions en matière économique et financière

Les juridictions spécialisées en matière économique et financière ont été créées par la loi n 75-701 du 6 août 1975 : elles ont, dans le ressort de la cour d'appel, une compétence concurrente en matière d'enquête, d'instruction et de jugement des procédures complexes concernant les délits prévus par l'article 704 du code de procédure pénale.

L'article 704 du code de procédure pénale est modifié par l'article 7 du projet afin d'actualiser la liste des infractions relevant de ces juridictions, en y ajoutant les atteintes aux fichiers informatiques et le faux monnayage, et en tirant les conséquences des codifications récemment intervenues.

Le paragraphe I d) de ce même article modifie l'article 704 de ce code pour prévoir la création de juridictions inter-régionales connaissant des affaires qui apparaissent d'une très grande complexité , en raison notamment du très grand nombre d'auteurs, de complices ou de victimes ».

En effet, il est apparu que l'échelon de la cour d'appel pouvait s'avérer insuffisant pour ce type d'affaires ; à cette fin, cette nouvelle disposition prévoit des juridictions spécialisées en matière économique et financière ayant une compétence concurrente dans le ressort de plusieurs cours d'appel.

Il est ainsi inséré, après l'article 705 du code de procédure pénale, deux articles 705-1 et 705-2 pour organiser un mécanisme de dessaisissement en faveur de ces juridictions spécialisées en matière financière, proche de celui qui existe en matière de terrorisme et de celui retenu en matière de criminalité organisée.

L'article 706 du code de procédure pénale relatif aux assistants spécialisés est modifié.

La fonction d'assistant spécialisé a été créée par l'article 91-1 de la loi n 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, codifié à l'article 706 du code de procédure pénale. Dans l'esprit du législateur, il s'agissait de mettre à la disposition des magistrats chargés des procédures économiques et financières les plus lourdes une équipe de collaborateurs de haut niveau afin de leur permettre d'exercer plus efficacement leurs pouvoirs en suscitant un travail en équipe. En revanche, il n'était pas dans son intention de faire de ces personnes des acteurs de la procédure pénale.

L'absence de précision dans la loi quant aux missions pouvant leur être confiées a conduit à des interrogations et à des contentieux sur les modalités de leurs interventions. C'est pourquoi il est apparu nécessaire de préciser dans la loi leurs missions, afin principalement de les faire apparaître en procédure.

A cet effet, l'article 706 du code de procédure pénale est modifié pour préciser les attributions des assistants spécialisés. Ils pourront ainsi assister les magistrats et les officiers de police judiciaire agissant sur leur délégation et établir des documents de synthèse ou d'analyses qui seront versés au dossier de la procédure.

Section 2. Dispositions relatives aux infractions en matière de santé publique

L'article 706-2 du code de procédure pénale relatif aux juridictions spécialisées en matière de poursuite, d'instruction et de jugement des infractions en matière sanitaire est modifié par l'article 8 du projet, afin d'aligner le régime des pôles en matière sanitaire sur celui des pôles en matière économique et financière.

La rédaction du II de l'article 706-2 du code de procédure pénale est modifiée afin de doter les assistants spécialisés des pôles en matière sanitaire d'un statut identique à celui des assistants spécialisés des pôles en matière économique et financière. Les conditions d'accès aux fonctions d'assistants spécialisés des pôles sanitaires sont assouplies.

Section 3. Dispositions relatives aux infractions en matière de pollution des eaux maritimes par rejets des navires.

L'article 9 du projet crée dans le code de procédure pénale un titre vingt sixième intitulé «De la procédure applicable en cas de pollution des eaux maritimes par rejets des navires». Ce titre insère dans le code de procédure pénale les dispositions sur les tribunaux spécialisés du littoral maritime, créées par la loi du 3 mai 2001 et prévues à l'article L.218-29 du code de l'environnement. Le code de procédure pénale est désormais le code pilote pour ses dispositions.

Ce titre nouveau crée cinq articles numérotés 706-102 à 706-106.

L'article 706-102 nouveau instaure une compétence concurrente entre les tribunaux spécialisés du littoral maritime et les tribunaux de droit commun à tous les stades de la procédure. Actuellement, l'article L.218-29 du code de l'environnement prévoit une compétence concurrente au stade de l'enquête et de l'instruction et une compétence exclusive des tribunaux spécialisés du littoral maritime pour le jugement des affaires de pollution par rejets polluants des navires. La loi supprime cette particularité procédurale qui n'existait que pour les tribunaux spécialisés du littoral maritime et prévoit un régime procédural pour ces tribunaux spécialisés du littoral maritime identique à celui des autres tribunaux spécialisés.

La loi étend la compétence matérielle des tribunaux spécialisés du littoral maritime à l'ensemble des pollutions maritimes prévues par le code de l'environnement. Actuellement, l'article L.218-29 du code de l'environnement limite la compétence des tribunaux spécialisés du littoral maritime aux infractions de pollutions par rejets des navires.

La loi étend la compétence géographique des tribunaux spécialisés du littoral maritime aux infractions commises en zone économique exclusive française. Actuellement cette compétence ne concerne que les pollutions commises en eaux territoriales et intérieures.

L'article 706-103 nouveau réserve la compétence du tribunal de grande instance de Paris pour les infractions de pollution maritime commises en haute mer par des navires français. Cette disposition reprend l'état du droit positif.

L'article 706-104 nouveau dispose que la compétence territoriale des tribunaux spécialisés du littoral maritime se cumule avec celles des tribunaux appliquant les critères de droit commun (lieu de l'infraction, résidence de l'auteur des faits, lieu d'arrestation...) ainsi que les critères spécifiques résultant de la loi du 5 juillet 1983 sur les pollutions maritimes : lieu d'immatriculation du navire et lieu où le navire peut être trouvé.

Les articles 706-105 et 706-106 nouveaux contiennent des dispositions destinées à faciliter le dessaisissement d'un tribunal non spécialisé au profit d'un tribunal spécialisé du littoral maritime. Ces dispositions sont identiques à celles prévues pour les autres juridictions spécialisées.

Les dispositions du code de l'environnement relatives à la répression des rejets polluants des navires sont modifiées par l'article 10 du projet afin d'augmenter les peines encourues en cas de commission de ces infractions.

La sous-section II de la section I du chapitre VIII du titre I du livre II du code de l'environnement est divisée en deux paragraphes. Le paragraphe premier est intitulé "Incriminations et peines" et le paragraphe II est intitulé "Procédure". Cette modification rédactionnelle est destinée à faciliter la lecture de cette sous-section du code de l'environnement.

Les peines prévues à l'article L.218-10 du code de l'environnement en cas de rejets d'hydrocarbures par les navires d'une jauge supérieure à 150 tonneaux pour les navires citernes et à 500 tonneaux pour les autres navires sont augmentées. Les peines encourues sont portées à dix ans d'emprisonnement et 1 000 000 euros d'amende. Il est également ajouté la possibilité de remplacer la peine d'amende par une amende équivalente aux deux tiers de la valeur de la cargaison transportée ou du fret.

Sont également augmentées les peines prévues à l'article L. 218-11 du code de l'environnement pour les rejets d'hydrocarbures pour les navires de taille inférieure à ceux visés à l'article L.218-10 du code de l'environnement. Les peines encourues sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 500 000 euros d'amende.

De même, les peines prévues à l'article L.218-22 du code de l'environnement qui incrimine le délit de pollution "par imprudence, négligence, ou absence de précaution" consécutif à un accident de mer sont augmentées. Actuellement l'article L.218-22 dispose que cette infraction est réprimée par des peines égales à la moitié de celles prévues en cas de rejets polluants volontaires. La loi supprime cette formule au profit d'une énonciation des montants de peines encourues.

S'agissant des navires d'une jauge supérieure à 150 tonneaux pour les navires citernes et à 500 tonneaux pour les autres navires, la peine encourue en cas de pollution consécutive à un accident de mer est de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 euros d'amende.

S'agissant des navires de taille inférieure à ceux visés à l'article L.218-21 du code de l'environnement, la peine encourue en cas de pollution consécutive à un accident de mer est de trois d'emprisonnement et 200 000 euros d'amende.

S'agissant des navires visés à l'article L.218-13 du code de l'environnement, la peine encourue est de 4000 euros d'amende.

L'article L.218-24 du code de l'environnement est complété afin d'introduire de nouvelles peines complémentaires encourues par les personnes physiques, dont la confiscation du navire et des biens du condamné.

L'article L. 218-25 du code de l'environnement est complété en introduisant de nouvelles peines complémentaires pour les personnes morales, dont la confiscation du navire et des biens de la personne morale condamnée.

Enfin, les dispositions relatives aux tribunaux spécialisés du littoral maritime prévues aux articles 706-102 à 706-106 du code de procédure pénale, code pilote, sont reprises dans le code de l'environnement, qui devient le code suiveur dans ce domaine.

Section 4. Dispositions relatives aux infractions en matière douanière

Diverses dispositions, afin d'améliorer la recherche et la constatation des infractions en matière douanière, sont complétées par l'article 11 du projet de loi.

Les compétences des agents des douanes, habilités à faire des enquêtes judiciaires prévues à l'article 28-1 du code de procédure pénale sont étendues à la recherche et la constatation de l'escroquerie à la TVA. Ils sont dorénavant compétents pour effectuer des enquêtes judiciaires même si les faits ont été préalablement constatés en application du code des douanes. Enfin, les modalités d'exercice de l'action fiscale par le ministère public sont améliorées.

La possibilité d'interception des correspondances téléphoniques ou de s'adjoindre des assistants spécialisés est désormais ouverte tandis que les règles de procédure spécifiques à la délinquance et à la criminalité organisée peuvent être applicables.

Le II modifie l'article 67 bis du code des douanes en rendant applicables aux agents des douanes les règles de procédure spécifiques à la surveillance et à l'infiltration par des officiers de police judiciaire ou des agents de police judiciaire. La surveillance est possible afin de constater les délits douaniers passibles d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à deux ans et l'infiltration pour les infractions douanières d'importation, d'exportation ou de détention de produits stupéfiants, de contrebande et d'infractions prévues par l'article 415 du code des douanes (reprise à l'identique des dispositions des articles 706-81 à 706-87 du chapitre 1er du projet de loi). Il convient cependant de noter que le 8 de l'article 67 bis prévoit que la surveillance engagée sur le territoire français peut être poursuivie dans un Etat étranger ou que des opérations d'infiltration engagées dans un Etat étranger peuvent être poursuivies sur le territoire français, sous la direction d'agents français, sous réserve du respect de certaines conditions.

L'article 343-3 du code des douanes et l'article L. 235 du livre des procédures fiscales sur l'exercice de l'action en paiement des droits et taxes compromis ou éludés par l'administration des douanes sont complétés.

Les pénalités - prévues par l'article L. 152-4 du code monétaire et financier, encourues en cas de méconnaissance de l'obligation de déclaration des transferts de fonds ou valeurs vers ou en provenance de l'étranger prévue par l'article L. 152-1 sont modifiées afin de répondre aux exigences communautaires.

Chapitre IV

Dispositions concernant la lutte contre les discriminations

Section 1. Dispositions relatives à la répression des atteintes aux personnes ou aux biens présentant un caractère raciste ou antisémite

Les articles 12 et 13 du projet étendent aux menaces (nouvel art. 222-18-1 du code pénal), aux vols (art. 311-4) et aux extorsions (art 312-2) , la circonstance aggravante de racisme créé par la loi du 3 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe, renforçant ainsi le dispositif prévu par cette loi.

Les peines des délits de discrimination sont augmentées par l'article 14, avec une aggravation spécifique lorsqu'il s'agit d'un lieu accueillant du public, comme les discothèques.

Les dispositions relatives au droit d'ester en justice des associations de lutte contre le racisme sont complétées par l'article 15 du projet afin de préciser que lorsque l'infraction aura été commise envers une personne considérée individuellement, l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de la personne intéressée ou, si celle-ci est mineure, l'accord du titulaire de l'autorité parentale ou du représentant légal.

Section 2. Dispositions relatives à la répression des messages racistes et xénophobes

La prescription en cas de délit de presse «raciste» prévu par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (provocation à la haine, à la discrimination et à la violence raciale, diffamation et injures racistes, révisionnisme) est élevée de trois mois à un an.

Cette augmentation de la prescription est justifiée à la fois par la gravité de ces infractions - qui sont punies de peines d'emprisonnement, alors que la quasi-totalité des autres délits prévus par la loi de 1881 est punie d'une simple peine d'amende - et par les difficultés particulières rencontrées par les magistrats et les enquêteurs pour réprimer ces délits, souvent commis de façon plus ou moins occulte, notamment par la voie d'internet.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES A L'ACTION PUBLIQUE,
AUX ENQUETES, A L'INSTRUCTION, AU JUGEMENT
ET A L'APPLICATION DES PEINES

Chapitre Ier

Dispositions relatives à l'action publique

Section 1. Dispositions générales

L'article 17 du projet de loi consacre le rôle du ministre de la justice en matière de politique pénale.

Il prévoit ainsi dans un chapitre nouveau relatif aux attributions du ministre de la justice que ce dernier veille à la cohérence de l'application de la loi pénale sur l'ensemble du territoire de la République.

De même, est consacré le rôle des procureurs généraux en matière de politique pénale (art. 18 du projet réécrivant l'article 35 du code de procédure pénale).

Outre la précision selon laquelle le procureur général veille à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du ressort de la cour d'appel, que le code de procédure pénale prévoit déjà, il est précisé qu'il veille au bon fonctionnement des parquets de son ressort, qu'il anime et coordonne l'action des procureurs de la République ainsi que la conduite des différentes politiques publiques et qu'il se fait adresser un rapport annuel sur l'activité et la gestion des parquets ainsi que sur l'application de la loi.

L'article 37 du CPP est complété par l'article 19 du projet afin de préciser que le procureur général peut enjoindre au procureur de la République d'engager des poursuites à la suite d'un recours hiérarchique formé contre une décision de classement.

Un article 40-1 est créé par l'article 21 du projet afin d'inscrire et de définir clairement dans le code de procédure pénale le principe de l'opportunité des poursuites. Ainsi, cette disposition prévoit que lorsque le procureur de la République estime que les faits constituent un délit, il peut soit engager des poursuites, soit mettre en oeuvre une procédure alternative aux poursuites, soit classer la procédure dès lors que les circonstances particulières liées à la commission des faits le justifient.

L'article 40-2 procède à la reformulation et au recadrage des règles actuelles sur l'information des victimes : l'avis de classement doit ainsi être motivé mais cette obligation ne concerne que les affaires dans lesquelles l'auteur est identifié, ce qui est la pratique la plus courante actuellement. Les enquêteurs devront pour leur part aviser la victime qu'en cas de défaut d'élucidation, son affaire sera classée (cf infra la modification de l'article 15-3 du CPP).

Les autorités publiques, au nombre desquelles figurent les maires, qui ont dénoncé des infractions aux parquet, doivent également être informées.

Section 2. Dispositions relatives à la composition pénale et aux autres procédures alternatives aux poursuites

L'article 41-1 du CPP est complété par l'article 22 du projet afin de poser le principe selon lequel en cas d'échec d'une mesure alternative aux poursuites, le parquet doit soit poursuivre, soit mettre en oeuvre une injonction pénale, sauf élément nouveau.

La procédure de la composition pénale des articles 41-2 et 41-3 du CPP est étendue et améliorée par l'article 23 du projet, ce qui prolonge les aménagements déjà apportés par la loi du 9 septembre 2002. Cette procédure est étendue à tous les délits punis de 5 ans d'emprisonnement au plus et à toutes les contraventions de cinquième classe. Les mesures proposées sont plus nombreuses que par le passé (ajout notamment des mesures d'interdiction d'émettre des chèques, de paraître dans le ou les lieux où l'infraction a été commise, de rencontrer ou recevoir la ou les victimes ou le ou les co-auteurs et de quitter le territoire national). Il est précisé qu'en cas d'échec de la composition pénale le parquet doit, sauf élément nouveau, mettre en mouvement l'action publique. La procédure interrompt l'action publique et n'est plus une simple cause de suspension.

L'article L.412-8 du code de la sécurité sociale est complété afin de prévoir la couverture sociale des personnes effectuant un stage ou un travail non rémunéré dans le cadre d'une composition pénale pour les accidents survenus par le fait ou à l'occasion de ce travail ou de ce stage, dans les conditions déterminées par décret.

Section 3. Dispositions diverses et de coordination

Il est rappelé dans le code général des collectivités territoriales dans un nouvel article L.2211-2 créé par l'article 24 du projet l'obligation de signalement qui pèse actuellement sur les maires ainsi que la nouvelle obligation d'avis qui pèse en retour sur les parquets et enfin la possibilité pour le parquet de communiquer sur des affaires en cours.

L'article 40 est par ailleurs modifié par coordination en conséquence des nouveaux articles 40-1 et l'article 40-2.

Chapitre II

Dispositions relatives aux enquêtes

Section 1. Dispositions concernant le dépôt de plainte, la durée ou l'objet des enquêtes(art. 26 du projet)

L'article 15-3 est complété afin de clarifier dans le code de procédure pénale le droit des victimes à avoir copie de leur plainte par les enquêteurs et des conditions dans lesquelles elles sont informées des classements sans suite. Il est ainsi précisé que lorsque la plainte est déposée contre une personne dont l'identité n'est pas connue, la victime est avisée qu'elle ne sera informée par le procureur de la République de la suite réservée à la plainte que dans le cas où l'auteur des faits serait identifié.

L'article 53 est modifié afin de prévoir pour les infractions prévues aux nouveaux articles 706-73 et 706-74, l'allongement de huit à quinze jours de la durée de l'enquête de flagrance, à la condition, ce qui consacre et précise la jurisprudence, que l'enquête se poursuivre sans discontinuer. Le délai de huit jours, qui avait été fixé par la loi du 23 juin 1999, était en effet en deçà de ce qui était auparavant autorisé par la pratique pour les infractions les plus graves.

Le champ de la procédure de recherche des causes de la mort de l'article 74 est étendu au cas de découverte d'une personne grièvement blessée, lorsque la personne est par exemple dans le coma, ou est amnésique après avoir été blessée par une cause inconnue, cette disposition comblant une lacune juridique du code de procédure pénale.

Section 2. Dispositions concernant les perquisitions et les réquisitions

L'article 56 du CPP est complété par l'article 27 du projet afin de permettre de s'assurer de la présence des témoins pendant une perquisition, cette disposition étant applicable par renvoi aux perquisitions régies par les règles particulières des articles 706-24 (en matière de terrorisme) et 706-28 (en matière de stupéfiants).

Le droit des enquêteurs de délivrer des réquisitions judiciaires est complété et étendu par l'article 28.

Il prévoit ainsi au cours de l'enquête de flagrance (article 60-2) et de l'enquête préliminaire (article 77-1-2) la possibilité pour l'enquêteur de requérir de toute personne, tout établissement ou organisme privé ou public ou toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des documents ou des informations intéressant l'enquête, y compris celles figurant dans des fichiers nominatifs, de lui remettre ces documents ou de lui communiquer ces informations, sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret professionnel. Le refus de la personne de remettre ces documents ou informations est sanctionné d'une amende de 3750 euros.

Toutefois, pour tenir compte des règles particulières attachées aux perquisitions effectuées dans certains lieux (cabinet d'avocat, entreprise de presse ou de communication audiovisuelle, cabinet d'un médecin, d'un notaire, d'un avoué ou d'un huissier), il est prévu que dans les cas où les documents ou les informations ne pourraient être saisis que dans les formes prévues aux articles 56-1 à 56-3, le refus de la personne de remettre ces documents ou informations ne peut être sanctionné de cette amende.

Section 3. Dispositions relatives aux personnes convoquées, recherchées ou gardées à vue au cours de l'enquête

L'article 62 du CPP est complété par l'article 29 du projet afin de combler une lacune et une incohérence de la loi en permettant aux enquêteurs - qui peuvent déjà interdire aux témoins se trouvant sur les lieux du crime ou du délit de s'éloigner, et qui peuvent les retenir le temps de leur audition - de les amener de force dans leurs locaux, ce qui n'est en théorie plus possible et oblige à procéder à l'audition sur place.

L'article 63-4 du CPP est modifié afin de renforcer la cohérence des dispositions relatives à l'intervention de l'avocat en garde à vue qui se fera dorénavant au début de la garde à vue et au début de la prolongation. En effet, actuellement, l'avocat peut revenir à la 20ème heures, mais doit ensuite, en cas de prolongation, attendre seize heures, soit la douzième heure de la prolongation de la garde à vue, pour s'entretenir avec la personne.

En pratique, il en résulte à la fois une efficacité moins grande des enquêtes - de nombreuses gardes à vue cessent avant la 20 ème heure, sauf si elles sont prolongées, car les quatre dernière heures de la garde à vue ne peuvent servir qu'à l'intervention de l'avocat - et un affaiblissement du rôle de la défense - la plupart des prolongations cessant à la 36ème heure, ce qui ne permet pas à l'avocat d'être présent lors de la prolongation. Il est donc préférable que l'avocat intervienne dès le début de la prolongation, ce qui conduit à supprimer son intervention à la 20ème heure.

Les articles 62 et 78 du CPP sont modifiés afin de permettre au procureur de la République de donner préalablement l'autorisation d'user de contrainte, pour le cas où l'intéressé refuserait de suivre volontairement les enquêteurs. En effet, actuellement, depuis la loi du 4 janvier 1993, le procureur de la République peut, en enquête préliminaire, autoriser l'officier de police judiciaire d'user de la force publique pour contraindre une personne qui refuse de déférer à une convocation. Mais cette autorisation suppose que la personne a reçu la convocation et n'y a pas fait droit, et l'autorisation du procureur de la République peut arriver trop tard, l'intéressé ayant pris la fuite entre-temps, sachant que la police souhaite procéder à son audition.

Le mandat d'amener du procureur de la République prévu par l'article 70 du CPP, qui est tombé en désuétude, est supprimé par l'article 30 du projet et remplacé par un mandat de recherche. Celui-ci peut être délivré par le procureur de la République au cours d'une enquête portant sur un crime flagrant ou un délit flagrant puni d'au moins trois ans d'emprisonnement contre toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre l'infraction. Ce mandat de recherche permet de placer la personne en garde à vue aux fins d'audition soit par l'officier de police judiciaire du lieu de la découverte de la personne, soit par les enquêteurs déjà saisis des faits.

La délivrance d'un mandat de recherche sera également possible en enquête préliminaire (article 77-4 du CPP, le mandat étant alors délivré, à la demande du procureur de la République), par le juge des libertés et de la détention.

Un article 74-2 est créé dans le CPP par l'article 31 du projet afin de prévoir un cadre d'enquête permettant de rechercher activement une personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, après la clôture de l'information, alors qu'actuellement dans une telle hypothèse, aucun cadre judiciaire ne permet de mener une enquête pour rechercher la personne en fuite, en dehors de l'inscription au fichier des personnes recherchées.

Le procureur de la République pourra dans ces hypothèses ordonner une enquête. Au cours de cette enquête, les officiers de police judiciaire pourront procéder à des auditions, perquisitions et à des examens techniques. Sur autorisation du juge des libertés et de la détention, il sera également possible de procéder à des interceptions téléphoniques.

Cette disposition sera également applicable, lorsqu'une personne a été condamnée à une peine égale ou supérieure à une année d'emprisonnement non assortie du sursis sans qu'un mandat d'arrêt ait été délivré.

Chapitre III

Dispositions relatives l'instruction

Section 1. Dispositions relatives aux droits des victimes

L'article 32 du projet crée un nouvel article 90-1 dans le CPP afin de limiter, aux seuls cas dans lesquels elle est véritablement justifiée, l'obligation pour le juge d'instruction d'aviser la partie civile tous les six mois (prévue, pour toutes les parties civiles, par l'article 175-3 du CPP résultant de la loi du 15 juin 2000), à savoir en matière criminelle ou lorsqu'il s'agit d'un délit contre les personnes. Il est précisé que lorsqu'une association regroupant plusieurs victimes d'accident survenu dans un transport collectif ou dans un local ouvert au public ou dans une propriété privée à usage d'habitation ou à usage professionnel est constituée partie civile en application de l'article 2-15 du CPP, l'avis est donné à cette seule association.

L'article 175-3 relatif à l'information des victimes est abrogé par coordination.

L'article 33 du projet insère dans le CPP un article 91-1 qui étend au cours de l'instruction pour les crimes et les délits contre les personnes, les dispositions des articles 375-1 et 422 qui prévoient respectivement en ce qui concerne la cour d'assises et le tribunal correctionnel que les parties civiles peuvent se voir accordées des indemnités - de comparution, de frais de voyages et de séjour-, comme c'est le cas pour les témoins, lorsqu'elles comparaissent devant la juridiction.

L'article 34 du projet de loi a pour objet de prendre en compte l'intérêt des victimes en cas de mise en liberté de la personne mise en examen ou de contrôle judiciaire, conformément à la décision cadre de l'Union européenne du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre des procédures pénales.

Ainsi, il est prévu dans un nouvel article 138-1 du CPP que la victime doit être informée lorsque la personne mise en examen est, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, soumise à l'interdiction de la recevoir, de la rencontrer ou entrer en relation avec elle.

Il est également prévu dans un nouvel article 144-2 du CPP qu'avant toute décision de mise en liberté, la juridiction saisie doit prendre en considération les intérêts de la victime au regard des conséquences pour celle-ci de cette décision. En cas de risque de pression sur la victime, la juridiction doit alors placer la personne mise en examen sous contrôle judiciaire en la soumettant à l'interdiction de recevoir, rencontrer ou entrer en relation avec la victime.

Enfin, l'article 142 du CPP est modifié par l'article 35 du projet afin de clarifier les dispositions sur la constitution de sûretés au profit des victimes dans le cadre d'un contrôle judiciaire, réparant un oubli de la loi du 15 juin 2000 qui, comme la constaté le Conseil d'Etat, rend impossible l'élaboration d'un décret d'application conforme aux objectifs recherchés.

Section 2. Dispositions relatives aux témoins et aux témoins assistés

L'article 102 du CPP est modifié par l'article 36 du projet afin de préciser les conditions d'audition des témoins qui doivent actuellement, du moins en théorie, toujours être entendus séparément. La nouvelle rédaction prévoit expressément la possibilité de les entendre lors de confrontations réalisées entre eux ou avec l'une ou l'autre des parties.

La cohérence des dispositions sur le témoin assisté est renforcée par l'article 37 du projet afin de favoriser le recours à cette procédure, qui présente l'intérêt d'éviter les mises en examen injustifiées ou précipitées.

L'article 113-1 du CPP est complété afin que les dispositions aux termes desquels la personne visée par un réquisitoire introductif non mise en examen ne peut être entendue que comme témoin assisté soit élargie à la personne visée par un réquisitoire supplétif.

L'article 113-2 est modifié afin de renforcer les droits de la personne visée par une plainte avec constitution de partie civile. Celle-ci devra ainsi être avisée par le juge d'instruction lors de sa comparution de son droit d'être entendue comme témoin assisté.

L'article 113-3 est modifié afin que les droits qui doivent être notifiés au témoin assisté soient précisés dans un alinéa distinct, et d'autre part afin d'y ajouter la notification du droit de formuler des requêtes en annulation sur le fondement de l'article 173.

L'article 113-8 est refondu afin de préciser et d'étendre les formes de mise en examen du témoin assisté.

Le premier alinéa précise ainsi que la mise en examen peut se faire au cours d'un interrogatoire organisé dans les formes prévues à l'article 114 (avocat convoqué cinq jours ouvrables avant l'interrogatoire), le juge d'instruction devant respecter les formes prévues au septième et huitième alinéa de l'article 116 : notification des droits du mis en examen et notification du délai prévisible d'achèvement de la procédure.

Il est par ailleurs prévu que le juge d'instruction puisse, en cours d'information, mettre en examen un témoin assisté par lettre recommandée - actuellement ce n'est possible qu'en fin d'instruction, ce qui ne laisse que vingt jours à l'intéressé pour réagir. Le juge d'instruction devra alors notifier au témoin assisté les droits du mis en examen conformément aux dispositions des alinéas 7 et 8 de l'article 116. Dans ce cas de mise en examen, l'intéressé pourra demander à être entendu par le juge d'instruction, interrogatoire qui sera de droit.

L'article 120 est modifié afin d'y insérer, conformément à ce qui est la pratique, le droit pour l'avocat du témoin assisté de poser des questions et présenter des observations au cours des actes réalisés par le juge d'instruction.

L'article 167 est complété afin de prévoir la possibilité pour le juge d'instruction de notifier au témoin assisté des expertises qui le concernent. Celui-ci bénéficiera alors du droit de formuler des demandes de complément d'expertise ou de contre-expertise, le juge d'instruction n'étant toutefois pas tenu de rendre une ordonnance motivée s'il ne compte pas faire droit à cette demande.

L'article 170 est complété afin d'ouvrir au témoin assisté la possibilité de faire des requêtes en annulation.

Par coordination, les dispositions de l'article 175 relatives à la notification de la fin de l'information et aux délais pour former dans ce cadre une requête en annulation sont étendues au témoin assisté.

Section 3. Dispositions relatives aux mandats

D'une manière générale, les dispositions de cette section renforcent la cohérence et l'efficacité des règles relatives aux mandats délivrés par le juge d'instruction - ou par d'autres juridictions - ce qui rejoint les objectifs ayant conduit à la création d'un office central spécialisé dans la recherche des personnes.

L'article 38 du projet a pour objet la création pour l'instruction du mandat de recherche, moins formaliste que les mandats d'amener et d'arrêt, car permettant le placement en garde à vue - et donc l'audition par les enquêteurs - de la personne découverte.

L'article 122 est modifié afin de créer le mandat de recherche. Celui-ci est ainsi défini comme étant « l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la placer en garde à vue». Ce mandat ne pourra être délivré à l'égard d'une personne ayant fait l'objet d'un réquisitoire nominatif de la part du procureur de la République.

Afin que la distinction entre les effets des différents mandats, notamment la particularité du mandat de recherche, soient claires, il est précisé - ce qui correspond au droit actuel - que le juge d'instruction est tenu d'entendre comme témoins assistés les personnes contre lesquelles ont été délivrés un mandat de comparution, d'amener ou d'arrêt, sauf à les mettre en examen conformément aux dispositions de l'article 116 ; par ailleurs, ces personnes ne peuvent être mises en garde à vue pour les faits ayant donné lieu à la délivrance du mandat. En revanche, la personne contre laquelle sera délivré un mandat de recherche pourra, elle, être entendue comme simple témoin ou être placée en garde-à-vue.

L'article 123, qui précise les formes que doivent revêtir les mandats est modifié par coordination afin que celles du mandat de recherche, similaires à celles des mandats d'amener et d'arrêt soient indiquées dans le texte.

L'article 134 fixant les règles d'exécution des mandats d'amener et d'arrêt, est modifié par coordination, afin que le mandat de recherche emprunte celles-ci.

L'article 135-1 fixe les règles procédurales propres au mandat de recherche. Le juge d'instruction pourra ainsi décerner mandat de recherche contre toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre l'infraction

La personne découverte en vertu d'un mandat de recherche sera placée en garde à vue par l'officier de police judiciaire du lieu de la découverte, suivant les modalités prévues à l'article 154, relatif au placement en garde-à-vue dans le cadre des commissions rogatoires. Le juge d'instruction territorialement compétent sera informé dès le début de la garde à vue, le juge d'instruction saisi des faits devant être averti dans les meilleurs délais. Indépendamment de la possibilité pour l'officier de police judiciaire déjà saisi par commission rogatoire de procéder à l'audition de la personne, l'officier de police judiciaire du lieu où la personne a été découverte pourra également être requis à cette fin par le juge d'instruction, qui pourra en outre le requérir pour l'exécution de tous les actes d'information nécessaires. Pendant la durée de la garde à vue, la personne pourra par ailleurs être conduite dans les locaux du service d'enquête saisi des faits.

L'article 136 fixant les sanctions en cas de non respect des formes des mandats est modifié par coordination.

Les règles relatives à l'exécution des mandats sont modifiées par l'article 39 de la loi. Tout d'abord, les articles 125 et 133 sont en partie réécrits et l'article 132 est supprimé afin de donner un délai de 24 heures aux enquêteurs qui ont arrêté une personne sur mandat d'amener ou d'arrêt pour la présenter au juge d'instruction ou à défaut au président du tribunal ou au juge délégué par lui, lorsque son interrogatoire ne peut être immédiat, afin d'éviter que la personne arrêtée au cours de la nuit ne doive être incarcérée en maison d'arrêt.

Un délai de 24 heures est déjà prévu dans cette hypothèse par l'article 127, mais uniquement en cas de découverte sur mandat d'amener à plus de 200 km du siège du juge d'instruction mandant, ainsi que par l'article 410-1 en cas de mandat d'amener délivré par le tribunal.

Par ailleurs, le deuxième alinéa de l'article 133 est modifié afin de prévoir un délai de 24 heures pour conduire la personne devant le procureur de la République du lieu d'arrestation lorsque la personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt est trouvée à plus de 200 kilomètres du juge d'instruction qui a délivrée le mandat.

Enfin, par cohérence, sont supprimées les dispositions qui permettaient une incarcération de la personne en maison d'arrêt pendant 24 heures, quand sa présentation devant le magistrat ne pouvait avoir lieu immédiatement, puisque cette rétention aura désormais lieu dans les locaux de la police ou de la gendarmerie.

En second lieu, l'article 39 insère dans le CPP un nouvel article 133-1 qui prévoit que, dans tous les cas où la personne arrêtée est retenue par la police avant sa présentation devant le magistrat en application des dispositions existantes de l'article 127 ou des dispositions modifiées, le procureur de la République en sera immédiatement informé et la personne aura le droit de faire prévenir ses proches et d'être examinée par un médecin.

L'article 40 du projet a pour objet de régler le cas dans lequel une personne est arrêtée sur mandat d'arrêt après le règlement de l'information, en simplifiant le droit actuel, qui est à la fois insuffisamment précis et particulièrement complexe, puisqu'il oblige à présenter la personne devant le tribunal correctionnel ou la chambre de l'instruction pour l'incarcérer jusqu'au jugement. Le texte proposé prévoit de donner cette compétence au juge des libertés et de la détention.

Il est à cette fin inséré dans le CPP un nouvel article 135-2.

Aux termes de cet article, lorsque la personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt sera découverte après le règlement de l'information, le procureur de la République du lieu de l'arrestation devra être avisé dès le début de la rétention de celle-ci par les services de police ou de gendarmerie. Pendant cette rétention, qui ne pourra durer plus de vingt-quatre heures, il sera fait application des dispositions des articles 63-2 et 63-3 (droits des personnes gardées-à-vue de faire prévenir un proche et d'être examinées par un médecin).

La personne retenue devra être conduite dans les meilleurs délais et au plus tard dans les vingt-quatre heures de son arrestation devant le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel siège la juridiction de jugement saisie des faits. Après avoir vérifié son identité et lui avoir notifié le mandat, ce magistrat la présentera devant le juge des libertés et de la détention.

Le juge des libertés et de la détention pourra alors, sur les réquisitions du procureur de la République, ordonner le placement en détention provisoire de la personne jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement, par ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 144, rendue à l'issue d'un débat contradictoire. Si la personne est placée en détention, les délais de celle-ci seront ceux existant en cas de renvoi d'un prévenu devant le tribunal correctionnel par le juge d'instruction. Le juge des libertés et de la détention pourra également placer la personne sous contrôle judiciaire. La décision du juge des libertés et de la détention pourra faire, dans les dix jours de sa notification, l'objet d'un appel devant la chambre des appels correctionnels si la personne est renvoyée devant le tribunal correctionnel et devant la chambre de l'instruction si elle est renvoyée devant la cour d'assises.

Dans le cas où la personne ne pourra pas être conduite dans le délai de vingt-quatre heures devant le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel siège la juridiction de jugement saisie des faits, elle sera conduite devant le procureur de la République du lieu de son arrestation. Celui-ci vérifiera son identité, lui notifiera le mandat et recevra ses éventuelles déclarations après l'avoir avertie qu'elle est libre de ne pas en faire.

Ce magistrat mettra alors le mandat à exécution en faisant conduire la personne à la maison d'arrêt et il en avisera le procureur de la République de la juridiction de jugement. Celui-ci ordonnera le transfèrement de la personne, qui devra comparaître devant lui dans les quatre jours de la notification du mandat. Ce délai sera porté à six jours en cas de transfèrement entre un département d'outre-mer et la France métropolitaine ou un autre département d'outre-mer.

Est par ailleurs créé un nouvel article 135-3 précisant que tout mandat d'arrêt ou de recherche est inscrit, à la demande du juge d'instruction ou de celle de l'officier de police judiciaire à qui il a été remis, au fichier des personnes recherchées. En cas de renvoi définitif de la personne devant la juridiction de jugement en application des dispositions des articles 179 ou 181, le gestionnaire du fichier devra en être informé pour qu'il soit le cas échéant fait application, s'il s'agit d'un mandat d'arrêt, des dispositions de l'article 135-2.

L'article 141-2 du CPP est modifié par l'article 41 du projet afin de transférer de la juridiction de jugement au juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République, la possibilité de révoquer le contrôle judiciaire après la clôture de l'information, en délivrant un mandat de recherche, ou en ordonnant le placement en détention provisoire.

L'article 179 est complété afin que le mandat d'arrêt délivré au cours de l'information conserve sa force exécutoire lorsque le juge d'instruction rend une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. En revanche les mandats d'amener ou de recherche perdront toujours leur force exécutoire, le juge d'instruction gardant la possibilité de délivrer un mandat d'arrêt au moment du règlement contre l'intéressé.

Les dispositions suivantes de l'article 41 ont pour principal objet de supprimer la procédure archaïque de l'ordonnance de prise de corps applicable en matière criminelle.

L'article 181 du CPP est modifié à cette fin. Lorsque le juge d'instruction rendra une ordonnance de mise en accusation, le mandat de dépôt décerné contre l'accusé conservera sa force exécutoire, sans qu'il soit besoin de décerner ordonnance de prise de corps. Il en sera de même en cas de contrôle judiciaire ou de mandat d'arrêt (contrairement aux mandats de recherche et d'amener qui cesseront toujours de pouvoir recevoir exécution, le juge d'instruction ayant toutefois la possibilité de délivrer un mandat d'arrêt au moment du règlement contre l'intéressé).

L'article 215 est modifié par coordination, les alinéas relatifs à l'ordonnance de prise de corps et aux formalités de notification étant remplacés par un alinéa unique relatif à la notification qui renvoie aux dispositions de l'article 183 relatif à la notification des ordonnances du juge d'instruction.

L'article 215-2 alinéa 2 relatif à la prolongation de la détention provisoire des accusés est modifié par coordination, les termes «ordonnance de prise de corps» étant remplacés par les mots «détention provisoire».

L'article 272-1 relatif à l'incarcération lors de l'audience de la cour d'assises de l'accusé qui ne se présente pas ou qui se soustrait aux obligations du contrôle judiciaire est modifié par coordination, afin que la cour puisse décerner mandat de dépôt à son encontre au lieu de mettre à exécution l'ordonnance de prise de corps.

Les articles 367 relatif à l'incarcération des condamnés et 380-4 relatif à la détention pendant les délais d'appel et durant l'instance d'appel en matière criminelle sont modifiés par coordination, les références à l'ordonnance de prise de corps étant remplacées par des références au mandat de dépôt.

Section 4. Dispositions relatives aux commissions rogatoires

L'article 152 du CPP est modifié par l'article 42 du projet afin de permettre au juge d'instruction de se déplacer dans les locaux des services de police ou unités de gendarmerie d'une part pour prolonger les gardes à vue mais aussi pour donner ses directives sans qu'il soit nécessaire qu'il soit accompagné par son greffier. Le transport de ce magistrat devra alors être mentionné sur les pièces d'exécution de la commission rogatoire. Ces nouvelles dispositions, qui permettront de résoudre des questions pratiques fréquemment soulevées, renforceront ainsi le contrôle exercé par le magistrat sur les enquêteurs.

L'article 153 est complété afin de supprimer l'obligation de prêter serment pour les gardés à vue sur commission rogatoire, cette obligation n'étant pas compatible avec le fait que seul un suspect peut être placé en garde à vue. Le fait qu'un gardé à vue ait été entendu après avoir prêté serment ne constituera toutefois pas une cause de nullité de la procédure.

L'article 154 est complété afin de permettre au juge d'instruction de se faire déférer la personne gardée à vue à l'issue de cette mesure sans devoir décerner contre elle un mandat d'amener, cette formalité apparaissant comme totalement inutile (dispositions reprenant pour l'instruction les dispositions actuellement en vigueur pour le procureur de la République dans le cadre de l'enquête).

Section 5. Dispositions concernant les expertises

Ces modifications visent à simplifier les dispositions, particulièrement complexes et formalistes, permettant l'audition d'une partie par un expert ; à simplifier la communication des expertises aux enquêteurs ; à clarifier les dispositions sur la notification des expertises.

L'article 163 est modifié afin que soit clairement indiqué que les experts peuvent procéder à l'ouverture des scellés qui leurs sont communiqués, et au reconditionnement de ceux-ci.

L'article 164 est réécrit afin de simplifier les auditions des témoins et des parties par les experts. Les experts pourront ainsi entendre à titre de renseignements, sans formalisme, toute personne à l'exception des parties et des témoins assistés. Toutefois ils pourront recevoir avec leur accord les déclarations des mis en examen, des parties civiles et des témoins assistés, en présence de leurs avocats convoqués dans les délais de l'article 114, ou hors la présence de ces derniers avec une renonciation expresse écrite. Les déclarations des parties et des témoins assistés pourront également être reçues par le juge d'instruction en présence de l'expert. Ces dispositions ne s'appliqueront pas aux experts médecins et psychologues, qui pourront, à l'instar des dispositions actuelles, dans tous les cas entendre les parties hors la présence du juge et des avocats.

L'article 166 est complété afin que les experts puissent avec l'accord du juge d'instruction adresser directement les conclusions de leurs rapports aux officiers de police judiciaire chargés de l'exécution de la commission rogatoire.

L'article 167 est complété sur deux points :

- Le délai fixé par le juge d'instruction aux parties pour formuler leurs demandes à la suite de la notification des conclusions des rapports d'expertise devra être de quinze jours minimum et de un mois pour les expertises comptables ou financières ;

- Passé le délai fixé par le juge d'instruction, les parties ne pourront plus formuler de demande relative à l'expertise notifiée, du moins en l'absence de la survenance d'un élément nouveau.

Section 6. Dispositions concernant la chambre de l'instruction et son président

L'article 186 est modifié afin d'étendre le pouvoir du président de la chambre de l'instruction de filtrer les appels : il pourra ainsi, outre les cas déjà prévus, rendre d'office une ordonnance de non admission en cas de désistement de l'appelant.

L'article 201 relatif au supplément d'information est complété afin que le président de la chambre de l'instruction puisse décerner lui-même des mandats ou ordonner l'incarcération provisoire de la personne pendant quatre jours ouvrables, afin d'attendre la réunion de la chambre. Le premier point est en effet actuellement incertain, le second comblant, quant à lui, une lacune juridique dénoncée par les praticiens, car ce pouvoir n'est actuellement prévu, par l'article 196, qu'en cas de réouverture d'information sur charge nouvelle.

L'article 206 est complété afin que la chambre de l'instruction ne puisse pas examiner la régularité de la procédure quant aux nullités qui ont pu faire l'objet d'une «purge» au cours de l'instruction. Cette clarification est proposée à la demande de la Cour de cassation.

L'article 207 est modifié afin de permettre à la chambre de l'instruction de procéder à des évocations partielles, ce qui répond à une demande ancienne et répétée des praticiens. Il clarifie également la question très complexe de la réserve du contentieux de la détention lorsque la chambre de l'instruction décide de mettre ou de maintenir en détention la personne mise en examen.

1) Le premier alinéa est modifié afin que toutes les décisions relatives à la détention provisoire soient visées par ce texte et non uniquement celles du juge des libertés et de la détention.

2) Le deuxième alinéa est complété afin que soit précisé que lorsque la chambre de l'instruction maintient ou place une personne mise en examen en détention, le juge d'instruction et le juge des libertés et de la détention resteront compétents pour statuer sur les demandes de mise en liberté et prolonger le cas échéant la détention provisoire, sauf mention expresse de la chambre de l'instruction indiquant que ces actes continueront de relever de sa compétence.

3) Il est procédé à une coordination résultant des changement d'ordre des alinéas des articles 81 et 82.

4) Le deuxième alinéa de l'article 207 est complété afin de permettre à la chambre de l'instruction de procéder à une évocation partielle du dossier en ne procédant qu'à certains actes avant de renvoyer le dossier au juge d'instruction.

L'article 221 du CPP est modifié afin de limiter à une fois par semestre, et non plus par trimestre, l'envoi des statistiques des juges d'instruction aux présidents des chambres de l'instruction, ce qui correspond en effet à la pratique suivie dans la plupart des ressorts.

Section 7. Dispositions diverses de simplification

L'article 82 est modifié afin d'une part, ce qui constitue une coordination omise par la loi du 9 septembre 2002, de viser dans le quatrième alinéa l'article 137-4 au lieu du 137, et d'autre part de clarifier les pouvoirs du procureur de la République, en lui permettant de saisir directement la chambre de l'instruction si le juge des libertés et de la détention ne suit pas ses réquisitions.

L'article 83 est modifié afin de simplifier les conditions dans lesquelles, en cours d'information, le président du tribunal peut adjoindre au juge d'instruction d'être assisté d'un ou plusieurs autres juges lorsque la gravité ou la complexité de l'affaire le justifie. Il pourra ainsi le faire non seulement sur sa demande, mais également avec l'accord de celui-ci.

L'article 84 est modifié afin que soit supprimée l'obligation faite à un juge d'instruction qui remplace un collègue en cas d'urgence pour des actes isolés d'en rendre compte immédiatement au président du tribunal. Cette formalité est en effet sans utilité, et elle n'est en pratique pas respectée.

L'article 82-3 est complété afin que soit précisé que le formalisme des demandes d'actes, et de la saisine directe de la chambre de l'instruction, est applicable pour les demandes de constatation de la prescription. Cette précision correspond à une demande de la Cour de cassation.

Il est inséré dans le CPP un article 99-3 consacrant et précisant les conditions dans lesquelles des réquisitions peuvent être délivrées au cours de l'instruction, comme cela a été fait pour l'enquête de flagrance et l'enquête préliminaire. Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire pourra ainsi requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique susceptibles de détenir des documents ou des informations intéressant l'enquête, y compris celles figurant dans des fichiers nominatifs, de lui remettre ces documents ou de lui communiquer ces informations, sans que puisse lui être opposée l'obligation au secret professionnel. En cas de refus de la personne requise, les dispositions du deuxième alinéa du nouvel article 60-3 seront applicables.

L'article 115 est modifié, conformément à une demande de la Cour de cassation figurant dans son rapport annuel de 2001, afin que soient précisées les modalités de désignation d'un avocat au cours de l'instruction. Le formalisme prévu, similaire à celui exigé pour les demandes d'actes, les demandes de nullité ou les demandes de mise en liberté, est en effet essentiel pour éviter des nullités de procédure résultant d'un changement d'avocat intervenu au cours de l'information.

Ainsi, sauf s'il intervient au cours d'un interrogatoire ou d'une audition, le choix d'un avocat effectué par les parties devra faire l'objet d'une déclaration au greffier du juge d'instruction. La déclaration devra être constatée et datée par le greffier et signée par celui-ci et par la partie concernée, une mention devant être faite en cas d'impossibilité pour la partie de signer. Lorsque la partie ne résidera pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffier pourra être faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Lorsque la personne mise en examen sera détenue, le choix d'un avocat par celle-ci pourra également faire l'objet d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire. Cette déclaration constatée et datée par le chef de l'établissement sera signée par celui-ci et par le détenu. Si celui-ci ne peut signer, il en sera fait mention par le chef de l'établissement. Le document sera adressé sans délai, en original ou en copie et par tout moyen, au greffier du juge d'instruction. La désignation de l'avocat prendra effet à compter de la réception du document par le greffier.

Lorsque la personne mise en examen sera détenue, le choix de son avocat pourra toujours résulter d'un courrier adressé par cette personne à celui-ci et le désignant pour assurer sa défense. La déclaration au greffe précitée devra alors être faite par l'avocat désigné ; celui-ci devant remettre au greffier une copie, complète ou partielle, du courrier qui lui aura été adressé, qui sera annexée par le greffier à la déclaration. Les dispositions relatives à la confirmation par le détenu actuellement en vigueur sont maintenues.

Un nouvel article 118 est créé afin de clarifier les règles lorsqu'une qualification criminelle se substitue à une qualification correctionnelle, conformément à une proposition de la Cour de cassation.

Ainsi, lorsqu'il apparaîtra au cours de l'information que les faits reprochés à la personne mise en examen sous une qualification correctionnelle constituent en réalité un crime, le juge d'instruction notifiera à celle-ci, après l'avoir informée de son intention et avoir recueilli ses éventuelles observations et celles de son avocat, qu'une qualification criminelle est substituée à la qualification initialement retenue. A défaut de cette notification, le juge d'instruction ne pourra rendre d'ordonnance de mise en accusation concernant cette personne.

Lorsque la personne à l'encontre de laquelle la qualification retenue sera devenue criminelle aura été placée en détention provisoire, le mandat de dépôt initialement délivré demeurera valable et sera considéré comme un mandat de dépôt criminel. La détention provisoire se trouvera alors soumise aux règles applicables en matière criminelle, les délais prévus pour la prolongation de la mesure étant calculés à compter de la délivrance du mandat.

Lors de la notification de la substitution de qualification, le juge d'instruction pourra faire connaître à la personne un nouveau délai prévisible d'achèvement de l'information, conformément aux dispositions du huitième alinéa de l'article 116, à condition que ce délai n'excède pas dix-huit mois calculés à compter de la mise en examen initiale. A défaut de cette indication par le juge d'instruction la personne ne pourra demander la clôture de la procédure en application des dispositions de l'article 175-1 qu'à l'issue de ce délai de dix-huit mois.

L'article 119 est réécrit afin d'une part de permettre au procureur de la République d'assister aux auditions des témoins assistés ou des témoins, et d'autre part de supprimer l'amende civile de 1,5 euros encourue par le greffier lorsque celui-ci omet de prévenir le procureur de la République qui a indiqué souhaiter assister à ces auditions.

L'article 137-1 est complété afin qu'en cas d'empêchement, le président du tribunal de grande instance puisse désigner tout juge du siège pour remplacer le juge des libertés et de la détention. Ceci permettra d'éviter les difficultés liées aux incompatibilités dans les petites juridictions.

L'article 173-1, est modifié afin de limiter de six à quatre mois le délai impartis aux parties pour soulever des nullités.

Par ailleurs, des dispositions sont prévues afin de consacrer la correctionnalisation judiciaire : si les parties ne la contestent pas au moment du règlement - possibilité qui leur est désormais offerte - elle ne pourra plus être contestée devant le tribunal correctionnel ou, par voie de conséquence, devant la cour d'appel.

En premier lieu, un nouvel article 186-3 complète l'article 186-2 en ouvrant la possibilité pour la personne mise en examen et la partie civile d'interjeter appel des ordonnances de renvoi devant le tribunal correctionnel rendues par le juge d'instruction dans le seul cas où ils estiment que les faits renvoyés devant cette juridiction constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises.

En second lieu, l'article 469 est complété afin que le tribunal correctionnel ne puisse plus, lorsqu'il est saisi par ordonnance de renvoi du juge d'instruction ou par la chambre de l'instruction, d'office ou à la demande des parties, renvoyer le ministère public à mieux se pourvoir lorsque des faits qualifiés de délit lui apparaîtront de nature à entraîner une peine criminelle, si la victime était constituée partie civile et était assistée d'un avocat lorsque cette ordonnance a été rendue. Une exception est prévue lorsque le tribunal saisi d'un délit non intentionnel constate que les faits sont de nature à entraîner une peine criminelle en raison du caractère intentionnel de l'infraction.

Section 8. Dispositions diverses de coordination

L'article 41-4 est modifié afin de répondre à une demande de la Cour de cassation visant à permettre un recours en cas de refus de restitution du bien saisi quel que soit le motif du refus, y compris lorsqu'une disposition particulière prévoit la destruction des objets placés sous main de justice.

L'article 114 est modifié pour procéder à une coordination non effectuée lors de la loi du 15 juin 2000.

L'article 117 est modifié, car l'article 72 auquel il renvoie ne comporte plus qu'un seul alinéa.

Les articles 138, 142 et 142-1 sont modifiés en raison de coordination non effectuées précédemment.

L'article 138 est modifié afin que la référence, juridiquement inexacte, à la récidive soit remplacée par une référence au renouvellement de l'infraction.

L'article 148-1-1 est modifié afin que les mots "la notification de l'ordonnance du procureur de la République" soient remplacés par les mots :"la notification de l'ordonnance au procureur de la République".

L'article 156 est modifié par coordination.

L'article 207-1 est modifié afin que les mots «chambre d'accusation» soient remplacés par les mots «chambre de l'instruction» ;

Le chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la première partie du code de l'organisation judiciaire est modifié à la demande de la Cour de cassation dans la mesure où la loi du 15 juin 2000 a modifié les règles relatives à la réparation des détentions provisoires injustifiée ce qui nécessite des coordinations.

Chapitre IV

Dispositions concernant le jugement

Section 1. Dispositions concernant le jugement des délits

Amélioration des procédures de comparution immédiate et de convocation par procès-verbal

Les dispositions relatives à la comparution immédiate sont améliorées sur plusieurs points par l'article 57 du projet.

L'enquête sociale est étendue. Actuellement prévue avant toute réquisition de placement en détention provisoire en cas de poursuites contre un majeur âgé de moins de vingt-et-un ans et lorsque la peine encourue n'excède pas cinq ans d'emprisonnement, l'obligation d'effectuer une enquête est étendue à la procédure de comparution immédiate et à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Il est prévu également que dans le cadre de la procédure de comparution par procès-verbal, c'est désormais le juge des libertés et de la détention, et non plus le président ou le juge par lui délégué qui sera compétent pour astreindre la personne poursuivie à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire avant sa comparution devant le tribunal. Cette disposition constitue une coordination avec les dispositions de l'article 396 relatives à la comparution immédiate puisque, depuis le 16 juin 2002, en application de la loi du 15 juin 2000, c'est le juge des libertés et de la détention qui décide du placement en détention provisoire de la personne faisant l'objet d'une comparution immédiate lorsque la réunion du tribunal est impossible le jour même.

Une passerelle est créé entre la comparution immédiate et la comparution par procès-verbal lorsque le juge des libertés et de la détention saisi en application de l'article 396 du code de procédure pénale lorsque la réunion du tribunal est impossible, décide de ne pas placer la personne en détention. Dorénavant, il pourra dans cette hypothèse soumettre la personne à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire, le procureur de la République devant notifier alors à l'intéressé la date et l'heure de l'audience selon la procédure de comparution par procès-verbal.

L'article 397-1 est complété afin de renforcer les droits de la défense dans le cadre de la procédure de comparution immédiate, le prévenu ou son avocat pouvant demander au tribunal d'ordonner tout acte d'information qu'il estime nécessaire à la manifestation de la vérité concernant les faits reprochés ou la personnalité de l'intéressé.

Dispositions relatives au jugement d'un prévenu en son absence

L'article 58 du projet de loi prend en compte la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme (Poitrimol c/ France, Van Geysegehem c/ Pays-Bas du 21 janvier 1999 et Van Pelt c/ France du 23 mai 2000), permettant la représentation par un avocat quel que soit la peine encourue, -solution au demeurant partiellement validée par la Cour de cassation - et interdisant qu'une personne soit condamnée à une peine de prison ferme par défaut. En contrepartie, le dispositif prévu permettra au tribunal de rendre un jugement de recherche, accompagné d'un mandat d'arrêt, qui fait courir le délai de prescription de la peine.

La Cour de cassation, par deux arrêts en date du 2 mars et du 16 mai 2001, a en effet modifié sa jurisprudence en matière d'audition devant une juridiction répressive de l'avocat de la personne poursuivie lorsque celle-ci ne comparaît pas. Jusqu'à ces arrêts, la Cour de cassation faisant une application combinée des dispositions des articles 410 et 411 du code de procédure pénale, considérait comme obligatoire la comparution personnelle devant le tribunal correctionnel du prévenu encourant une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à deux ans et, si ce prévenu ne comparaissait pas, interdisait à son avocat d'être entendu ou de déposer des conclusions.

La Cour de cassation a mis fin à cette distinction entre les prévenus passibles d'une peine d'emprisonnement inférieure à deux ans et ceux passibles d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à deux ans, pour considérer que «le droit au procès équitable et le droit de tout accusé à l'assistance d'un défenseur s'opposent à ce que la juridiction juge un prévenu non comparant et non excusé sans entendre l'avocat présent à l'audience pour assurer sa défense ».

Les articles 410 et 412 sont modifiés afin de prévoir qu'en cas de jugement contradictoire à signifier ou par défaut, l'avocat qui se présente doit être entendu obligatoirement, même si celui-ci ne dispose pas d'un mandat écrit, nécessaire pour que le jugement soit pleinement contradictoire.

L'article 410-1 est réécrit afin de permettre au tribunal de faire venir de force un prévenu cité à personne mais non comparant en délivrant à cette fin un mandat d'arrêt, seule la délivrance d'un mandat d'amener étant actuellement possible, ces dispositions étant par ailleurs coordonnées avec les nouvelles règles sur les mandats.

L'article 411 est modifié afin de consacrer la jurisprudence de la Cour de cassation permettant la représentation par un avocat dans tous les cas, sauf si le tribunal exige la comparution du prévenu.

L' article 412-1 qui constitue la disposition principale du dispositif interdit le prononcé d'une peine d'emprisonnement ferme ou une peine d'emprisonnement assortie d'un sursis partiel par défaut, lorsque le prévenu absent et non représenté ou non défendu par un avocat n'était pas informé de la date de l'audience.

Dans cette hypothèse, si une peine d'emprisonnement ferme est susceptible d'être prononcée, le président du tribunal doit renvoyer le jugement de l'affaire au fond à une audience ultérieure.

En l'absence du prévenu et lorsqu'il n'est pas représenté ou défendu, le tribunal peut rendre un jugement de recherche et décerner un mandat d'arrêt, après avoir entendu le cas échéant les témoins, les experts, la partie civile et son avocat. Afin de prendre en compte les intérêts moraux et matériels de la victime, le tribunal peut prononcer des dommages et intérêts provisionnels.

En cas d'arrestation de la personne sur mandat d'arrêt délivré à la suite d'un jugement de recherche, celle-ci est présentée dans les vingt-quatre heures au procureur de la République qui la traduit aussitôt devant le juge des libertés, en vertu du nouvel article 135-2, la personne se trouvant ainsi dans une situation beaucoup plus favorable que lorsque, comme actuellement, elle fait l'objet d'un mandat d'arrêt en application de l'article 465, qui permet une dizaine de jours de détention sans voir une juridiction du siège.

L'article 412-2 ouvre la possibilité , qui est laissée à l'initiative du parquet et qui devrait rester très exceptionnelle, de faire un véritable procès à une personne en fuite - procès qui pourra aboutir à une condamnation à une peine d'emprisonnement - en permettant au procureur de la République de demander la désignation d'un avocat pour assurer la défense des intérêts du prévenu. Ce procès demeurera toutefois symbolique, le jugement étant rendu par défaut.

L'article 498 est modifié compte tenu des règles nouvelles afin de préciser les hypothèses dans lesquelles un jugement est contradictoire à signifier.

Dans la mesure où est maintenue la possibilité de condamner un prévenu non comparant et non représenté, y compris à une peine d'emprisonnement ferme, par jugement contradictoire à signifier -parce que le prévenu avait été cité à personne -, et afin d'éviter que dans une telle hypothèse, le jugement puisse devenir définitif du fait d'une signification à domicile à mairie ou à parquet dont l'intéressé n'aurait pas eu connaissance, l'article 489-1 permet un appel dans un tel cas, de la même façon qu'une opposition est actuellement possible en cas de jugement par défaut en application des dispositions qui ont été transposées de l'article 492 du code de procédure pénale.

L'article 568 relatif au pourvoi en cassation est modifié par coordination.

Juge unique en matière civile et ordonnance pénale

L'article 464 est complété par l'article 59 du projet afin de prévoir la compétence du juge unique pour les audiences concernant les seuls intérêts civils.

L'article 495 est complété par l'article 60 du projet afin de préciser et d'étendre le domaine de la procédure d'ordonnance pénale créé en matière délictuelle, pour les délits prévus par le code de la route, par la loi du 9 septembre 2002 : cette procédure sera ainsi applicable aux contraventions connexes prévues par le code de la route et aux délits en matière de coordination des transports.

L'article 495-3 est modifié, afin de prévoir que l'ordonnance pénale peut être portée à la connaissance du prévenu par le procureur de la République, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée. La notification de la décision par un délégué du procureur - et non uniquement par huissier comme actuellement - peut en effet permettre à ce dernier de convaincre la personne qu'elle n'a pas intérêt à faire opposition devant le tribunal correctionnel.

Procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

L'article 61 du projet de loi créé une nouvelle procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité inspirée des procédures de «plaider coupable» existant dans les droits anglo-saxons, qui est prévue par les nouveaux articles 495-7 et suivants du CPP.

L'article 495-7 fixe le champ d'application de la procédure, qui concerne les délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans, et suppose que la personne est déférée devant le procureur de la République et qu'elle reconnaît les faits qui lui sont reprochés. Ce magistrat peut alors, d'office ou à la demande de la personne ou de son avocat, recourir à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Aux termes du nouvel article 495-8, le procureur de la République peut proposer à l'intéressé d'accepter d'exécuter une ou plusieurs des peines principales ou complémentaires encourues dont il fixe la nature et le quantum. Si le procureur de la République propose une peine d'emprisonnement, celle-ci ne peut être d'une durée supérieure à six mois, cette peine pouvant être assortie en tout ou partie du sursis ou faire l'objet d'aménagement. S'il propose une peine d'amende, qui peut être assortie du sursis, elle ne peut être supérieure à la moitié de l'amende encourue.

L'accord de la personne ne pourra être reçu qu'en présence de son avocat, qui a pu consulter sur le champ le dossier et avec lequel la personne aura pu préalablement librement s'entretenir. La personne peut demander à disposer d'un délai de dix jours avant de faire connaître si elle accepte ou si elle refuse la ou les peines proposées.

L'article 495-9 prévoit qu'en cas d'acceptation de la personne, elle est aussitôt présentée devant le président du tribunal de grande instance, qui, après avoir entendu la personne et son avocat en audience publique ou, si la personne ou son avocat le demande, en chambre du conseil, peut par ordonnance motivée, décider l'homologation de la ou des peines proposées. En cas d'homologation, cette ordonnance est rendue publique.

Aux termes de l'article 495-10, nouveau, la personne peut demander un délai de dix jours avant de faire connaître sa réponse, délai pendant lequel le juge des libertés et de la détention pourra, à la demande du procureur de la République, la placer sous contrôle judiciaire ou à titre exceptionnel si l'une des peines proposées est égale ou supérieure à deux mois d'emprisonnement ferme, en détention provisoire.

L'article 495-11 nouveau précise que l'ordonnance motivée du président du tribunal de grande instance a les mêmes effets qu'un jugement de condamnation de la personne et est immédiatement exécutoire. Toutefois, afin de garantir les droits de la personne, cette ordonnance est susceptible d'appel. A défaut, elle a les effets d'un jugement passé en force de chose jugée.

L'article 495-12 prévoit qu'en cas de refus de la personne des peines proposées ou de la non-homologation de la proposition, la personne fait l'objet d'une procédure de comparution immédiate, d'une convocation par procès-verbal ou d'une citation directe.

L'article 495-13 précise que lorsque la victime est identifiée, et sauf si l'auteur des faits justifie de la réparation du préjudice commis, le procureur de la République doit également proposer à ce dernier de réparer les dommages causés par l'infraction. La victime pourra se constituer partie civile dans le cadre de cette procédure et demander réparation de son préjudice, avec la possibilité de faire appel de l'ordonnance du président du tribunal de grande instance. Il est prévu que si la victime n'a pu faire valoir ses droits devant ce magistrat, elle pourra avoir droit à un procès sur l'action civile, à la diligence du parquet.

L'article 495-14 nouveau prévoit l'établissement d'un procès-verbal dans le cadre de cette procédure. Lorsque la personne n'a pas accepté la ou les peines proposées ou lorsque le président du tribunal de grande instance n'a pas homologué la proposition du procureur, le procès-verbal ne peut être transmis à la juridiction de jugement, et ni le ministère public, ni les parties ne peuvent faire état devant cette juridiction des déclarations faites ou des documents remis au cours de la procédure.

L'article 495-15 nouveau précise que cette procédure pourra également être faite à la demande du prévenu ou de son avocat, y compris en cas de citation directe ou de convocation par officier de police judiciaire.

L'article 495-16 nouveau exclut l'application de cette procédure aux mineurs, en matière de délits de presse, de délits d'homicides involontaires, de délits politiques ou de délits dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale.

Un nouvel article 520-1 prévoit qu'en cas d'appel de l'ordonnance du président du tribunal dans le cadre de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable, la cour ne peut prononcer une peine plus sévère que celle homologuée par le président du tribunal, sauf en cas d'appel incident du procureur de la République. Cette disposition constitue une coordination et reprend les règles déjà existantes en matière d'appel.

Dispositions diverses

Un article 505-1 du code de procédure pénale est créé par l'article 62 du projet afin de prévoir un filtre des appels par le président de la chambre des appels correctionnels.

Les dispositions de l'article 706-71 relatives à l'utilisation des moyens de télécommunication issues de la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne au cours de l'audience de la juridiction de jugement, sont étendues par l'article 63 du projet afin de permettre l'audition des témoins et experts devant la juridiction de jugement : elles ne permettent toutefois pas «un jugement à distance» du prévenu lui-même. Ces dispositions ont déjà été étendues à la prolongation de garde à vue ou de retenue judiciaire par la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la Justice.

Section 2. Dispositions relatives au jugement des crimes

La procédure d'établissement des listes de jurés d'assises est simplifiée. Cette disposition avait déjà été proposée dans le cadre du projet de loi sur la réforme de la procédure criminelle.

Les sanctions encourues par les jurés défaillants sont augmentées, l'amende étant portée à 5000 euros.

L'article 308 du code de procédure pénale est modifié afin de prévoir la possibilité d'un enregistrement audiovisuel de l'audition de la victime devant la cour d'assises, seul actuellement un enregistrement sonore étant possible.

L'article 66 du projet supprime la procédure de la contumace, en donnant la possibilité pour un accusé absent d'être défendu par un avocat et pour la cour d'assises de rendre un arrêt de recherche contre un accusé en fuite, dans des conditions pour partie similaires à celles prévues en matière correctionnelle.

Section 3. Dispositions concernant la Cour de cassation

L'article 586 est modifié afin de supprimer l'amende civile encourue par les greffiers prévue par cet article.

L'article 612-1 est complété conformément à une demande formulée par la Cour de cassation dans ses derniers rapports annuels. Il est ainsi précisé que lorsque la Cour ordonne que dans l'intérêt de l'ordre public ou d'une bonne administration de la justice l'annulation qu'elle prononce aura effet à l'égard des parties qui ne se sont pas pourvues, ces parties ne pourront être condamnées à des peines supérieures à celles prononcées par la juridiction dont la décision a été annulée.

L'article 626-5 est complété afin d'apporter une précision concernant la détention d'une personne dans le cadre de la procédure de réexamen. Le texte actuel issu de la loi du 15 juin 2000 peut en effet conduire à la libération d'individus dangereux dès lors que le réexamen de leur condamnation est ordonnée à la suite d'une condamnation prononcée, pour procès non équitable, par la Cour de Strasbourg - qui veut que le condamné soit rejugé, ce qui n'implique pas nécessairement qu'il soit libéré.

Ainsi, si la commission de réexamen, estimant la demande justifiée, décide soit de renvoyer l'affaire devant l'assemblée plénière de la Cour de cassation, soit devant une nouvelle juridiction de fond, la personne exécutant une peine privative de liberté demeurera détenue, sans que cette détention ne puisse excéder la durée de la peine prononcée, jusqu'à la décision de la juridiction saisie. Cette décision devra toutefois intervenir dans un délai d'un an à compter de la décision de la commission, faute de quoi la personne sera mise en liberté si elle n'est détenue pour autre cause. Pendant ce délai, la personne sera considérée comme placée en détention provisoire, et pourra former des demandes de mise en liberté sur lesquelles il sera statué conformément aux dispositions de l'article 148-2, ou, lorsque l'affaire aura été renvoyée devant l'assemblée plénière, par la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort duquel siège la juridiction ayant condamné l'intéressé.

Chapitre V

Dispositions relatives à l'application des peines

Section 1. Dispositions relatives aux droits des victimes

La décision cadre de l'Union européenne du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre des procédures pénales vise notamment à permettre à la victime d'être entendue et informée et de recevoir les informations pertinentes pour la protection de ses intérêts. Notre droit positif ne répondant que partiellement à ces dispositions entrées en vigueur le 22 mars 2002, il convient d'adapter la procédure pénale.

Un article 718 est créé par l'article 68 du projet afin d'inscrire dans le code de procédure pénale la nécessité de prendre en compte les intérêts des victimes dans le processus d'exécution des peines.

Le premier alinéa de l'article 718 constitue une disposition de principe. Le juge de l'application des peines, qui dispose déjà de pouvoirs réels d'investigation - articles D.116-1 et D.526 du code de procédure pénale - a désormais obligation de prendre en considération les intérêts de la victime ou de la partie civile au regard des conséquences pour celle-ci de toute décision d'aménagement de peine.

L'alinéa 2 précise que la juridiction doit interdire au condamné d'entrer en contact avec la victime de quelque façon que se soit s'il y a une probabilité qu'un tel contact puisse avoir lieu et si ce contact n'apparaît pas opportun. La juridiction doit alors informer la victime de l'interdiction qui est faite au condamné libéré d'entrer en contact avec elle mais peut se dispenser de cette information dans certaines hypothèses limitativement énumérées : la personnalité de la victime, le respect du droit à l'oubli de la victime qui a exprimé le souhait de ne pas avoir d'information sur le processus d'exécution de la peine privative de liberté ou la brièveté de la cessation provisoire de l'incarcération (permission de sortir par exemple) .

Sont complétées les dispositions législatives relatives au fractionnement ou suspension de peine, placement à l'extérieur, semi-liberté, permission de sortir, placement sous surveillance électronique et libération conditionnelle pour permettre au juge de l'application des peines d'assortir ces mesures de l'interdiction au condamné d'entrer en contact avec la victime ou de l'obligation de l'indemniser.

La prise en compte de l'intérêt des victimes en cas de mise en liberté d'un condamné suppose, pour garantir son effectivité, l'institution d'une possibilité de contrôle des condamnés libérés à la suite de réductions de peines, hors l'hypothèse d'un aménagement de peine. Est créé un nouvel article 721-2 qui modifie le régime des réductions de peines. Le juge de l'application des peines pourra ainsi assortir les réductions de peines ordinaires (trois mois par année d'incarcération) et réductions de peines supplémentaires (deux mois ou un mois en cas de récidive légale par année d'incarcération) de certaines obligations ou interdictions destinées à prévenir la récidive et à assurer la sécurité et les droits des victimes après la libération du condamné.

La durée de ces obligations ou interdictions, qui commence à courir à compter de la libération, ne pourra excéder le total des réductions de peines accordées.

L'octroi des réductions de peines assorties de ce type de mesures est juridictionnalisé et les dispositions de l'alinéa 6 de l'article 722 sont alors applicables. Les réductions de peines visées par les articles 721 et 721-1 restent en revanche accordées par le juge de l'application des peines après avis de la commission de l'application des peines.

Le juge de l'application des peines qui constatera la violation du respect des obligations par le condamné pourra ordonner sa réincarcération pour tout ou partie de la durée des réductions de peines accordées.

Section 2. Dispositions relatives à l'exécution des peines privatives de liberté

Les articles 710 et 711 sont complétés afin d'éviter les transfèrements de condamnés en cas de requête relative à un contentieux d'exécution, et notamment de demande de confusion de peines.

Les règles sur les mandats d'amener ou d'arrêt délivrés par le juge de l'application des peines sont simplifiées et modifient en conséquence le dernier alinéa de l'article 722-2 du code de procédure pénale qui ne renvoie plus aux dispositions des articles 122 à 124 et 126 à 134 du code de procédure pénale (mandats délivrés par le juge d'instruction).

Le quatrième alinéa de l'article 763-5 du même code relatif au suivi socio-judiciaire est également modifié, le juge de l'application des peines pouvant délivrer mandat d'amener ou d'arrêt selon la nouvelle procédure de l'article 722-2.

L'article 434-27 du code pénal est modifié afin d'élargir l'incrimination du délit d'évasion. Pour caractériser les éléments constitutifs de l'évasion, il n'est plus nécessaire de rapporter la preuve de la violence, de l'effraction ou de la corruption. Le fait pour un détenu de se soustraire par tous moyens de la garde à laquelle il est soumis est constitutive de l'évasion. Les peines sont aggravées lorsque l'évasion est réalisée par violence, effraction ou corruption ou lorsqu'elle est commise sous la menace d'une arme ou d'une substance explosive, incendiaire ou toxique.

Section 3. Dispositions relatives au recouvrement des peines d'amende

Paiement volontaire de l'amende

L'effectivité des sanctions pécuniaires est renforcé afin de rendre le recouvrement des amendes plus opérationnel. Il crée, à cette fin, l'article 707-1 du code de procédure pénale qui permet le paiement volontaire de l'amende par la personne condamnée avant que la décision ait acquis un caractère définitif. Ce dispositif est incitatif car si le condamné s'acquitte du paiement de l'amende dans un délai de vingt jours à compter de la date à laquelle le jugement a été prononcé, le montant de l'amende est diminué de 10 %, dans la limite de 1000 euros.

Ce dispositif est applicable devant le tribunal correctionnel et le tribunal de police.

Le paiement volontaire de l'amende ne préjuge pas de l'acceptation par le condamné de la sanction, car celui-ci peut, nonobstant ce paiement, exercer les voies de recours qui lui sont offertes. Dans cette hypothèse, le montant de l'amende lui est restitué sur simple demande de sa part et un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application de ces dispositions.

Un article 707-2 du code de procédure pénale est créé afin de prévoir que le président du tribunal correctionnel ou du tribunal de police doit aviser à l'audience le condamné de la possibilité de s'acquitter de l'amende dans ce délai de vingt jours et de la réduction corrélative de son montant de 10 % et que le paiement de l'amende ne fait pas obstacle à l'exercice des voies de recours.

Contrainte judiciaire

La procédure - pour partie contraire à la Convention Européenne des Droits de l'Homme - de contrainte par corps est remplacée par la procédure de "contrainte judiciaire". Le dispositif est maintenu mais la privation de liberté est désormais décidée par un juge. La mise à exécution de la contrainte est en effet juridictionnalisée et confiée au juge de l'application des peines qui décide de la durée de la contrainte sans pouvoir excéder un maximum fixé par la loi (trois mois). L'article 473 du code de procédure pénale est en conséquence abrogé. (Cet article disposait que tout jugement de condamnation se prononçait sur la durée de la contrainte par corps).

L'article 749 du code de procédure pénale est modifié. Le champ d'application de la contrainte judiciaire est plus restreint puisqu'elle n'est désormais possible qu'en matière criminelle ou en matière correctionnelle pour un délit puni d'une peine d'emprisonnement, y compris lorsqu'il s'agit d'amendes fiscales ou douanières.

L'article 750 est modifié et le seuil des amendes à partir duquel elles peuvent être assorties de la contrainte judiciaire est relevé (2000 euros au moins au lieu de 150 euros).

Le seuil à partir duquel la durée maximale de la contrainte aggravée (une année au lieu de trois mois) peut être mise à exécution est également relevé à 100 000 euros au lieu de 75 000 euros en matière d'infractions à la législation sur les stupéfiants, la durée maximale étant par ailleurs réduite d'une année au lieu de deux années (modification de l'article 706-31 du code de procédure pénale).

La procédure de constat de l'insolvabilité du débiteur prévue par l'article 752 du code de procédure pénale est simplifiée. Les pièces justificatives de l'insolvabilité ne sont plus exigées et le débiteur peut donc rapporter la preuve de son insolvabilité par tous moyens. Dans le même sens, l'administration poursuivante peut rapporter la preuve de sa solvabilité par tous moyens. Il est fait une appréciation concrète, au delà des apparences, de la situation financière du condamné.

La procédure de mise à exécution de la contrainte prévue par l'article 754 du code de procédure pénale est profondément modifiée, compte tenu de la juridictionnalisation.

Le Trésor public doit adresser une demande au procureur de la République qui requiert le juge de l'application des peines de prononcer la contrainte judiciaire dans les conditions du sixième alinéa de l'article 722. La décision du juge de l'application des peines est susceptible d'appel mais exécutoire par provision. Il peut en outre accorder des délais de paiement et ajourner sa décision à six mois.

Les articles 755, 756 et 757 du code de procédure pénale ainsi que les articles L. 240, L. 271, L. 272 et L. 272-A du livre des procédures fiscales sont abrogés, compte tenu de la nouvelle rédaction de l'article 722-2 relatif aux mandats applicable en matière de contrainte judiciaire.

Section 4. Dispositions relatives au casier judiciaire

Sont introduites des dispositions, demandées notamment par la Commission Nationale des Droits de l'Homme, permettant d'assurer le respect des interdictions professionnelles découlant des condamnations pénales, notamment pour les auteurs d'infractions sexuelles.

L'article 775-1 du code de procédure pénale qui permet au tribunal d'exclure la mention de la condamnation au bulletin numéro deux du casier judiciaire est ainsi complété. La faculté de non inscription au bulletin numéro deux est expressément exclue en cas de condamnation pour l'une des infractions mentionnées à l'article 706-47 du code (meurtre ou assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie, viol, agression sexuelle, exhibition sexuelle, corruption de mineur, pornographie enfantine et atteintes sexuelles sur mineur).

Cette restriction est logiquement complétée par le mécanisme de délivrance des bulletins numéro deux qui est donc étendu aux administrations ou organismes chargés par la loi ou le règlement du contrôle de l'exercice d'une activité professionnelle ou sociale lorsque cet exercice fait l'objet de restrictions expressément fondées sur l'existence de condamnations pénales (3 de l'article 776 du code de procédure pénale).

TITRE III

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

ET DISPOSITIONS RELATIVES A L'OUTRE-MER

Chapitre 1er

Dispositions transitoires

Le projet de loi prévoit une entrée en vigueur différée le premier jour du quatrième mois suivant la publication de la loi au Journal Officiel , en ce qui concerne les dispositions relatives à l'entretien avec l'avocat en garde à vue, le mandat de recherche, les dispositions relatives à l'avis à la victime suite au prononcé de certaines obligations du contrôle judiciaire, la prise en compte des intérêts de la victime avant toute décision de mise en liberté, les dispositions relatives aux mandats, les modalités de désignation de l'avocat au cours de l'instruction, les dispositions relatives à l'enquête sociale dans le cadre de procédures de comparution immédiate et sur reconnaissance préalable de culpabilité, les dispositions relatives aux jugements rendus par défaut et contradictoires à signifier, la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, les dispositions relatives aux cas de non-comparution de l'accusé, les dispositions relatives aux droits des victimes dans le cadre de l'application des peines et les dispositions relatives à la contrainte judiciaire.

Diverses dispositions transitoires sont également prévues, s'agissant notamment des commission rogatoires émanant d'une autorité étrangère et adressées à la France, des jugements par défaut ayant donné lieu à la délivrance d'un mandat d'arrêt, des personnes condamnées par contumace, des réductions de peine afin d'éviter de remettre en cause le caractère "inconditionnel" des réductions de peine déjà accordées et des contraintes par corps en cours à la date d'entrée en vigueur des dispositions sur la contrainte judiciaire.

Chapitre II

Dispositions étendant certaines dispositions législatives
à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna,
aux Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte

Le projet de loi prévoit diverses dispositions d'applicabilité de ses dispositions à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna, aux Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte.

II. IMPACT SOCIAL, ECONOMIQUE ET BUDGETAIRE

A. IMPACT SOCIAL ET ECONOMIQUE

TITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES A LA LUTTE
CONTRE LES FORMES NOUVELLES
DE DÉLINQUANCE ET DE CRIMINALITÉ

Chapitre Ier

Dispositions concernant la lutte

contre la délinquance et la criminalité organisée

Ces dispositions qui accroissent l'efficacité des enquêtes permettront de lutter plus efficacement contre la grande criminalité en donnant aux enquêteurs sous le contrôle de l'autorité judiciaire, des moyens procéduraux nouveaux et adaptés aux formes nouvelles de la criminalité. Le projet de loi permettra ainsi, dans le prolongement de la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, de renforcer la confiance des citoyens dans le système judiciaire.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre II

Dispositions concernant la lutte
contre la délinquance et la criminalité internationale

Ces dispositions qui permettent de renforcer la coopération internationale et européenne sont de nature à renforcer l'efficacité de la répression dans le cadre notamment de la lutte contre la grande criminalité internationale.

Les dispositions relatives aux transmissions de demandes d'entraide permettront une accélération des enquêtes et des procédures judiciaires, sans affaiblir la protection de l'ordre public et des intérêts essentiels de la nation.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre III

Dispositions concernant la lutte contre les infractions
en matière économique, financière et douanière
et en matière de santé publique et de pollution maritime

Ces dispositions qui renforcent la cohérence des dispositions en matière d'infractions économiques et financières, de santé publique ou de pollution maritime sont de nature à renforcer l'efficacité de la répression dans des domaines pour lesquels les citoyens, s'agissant notamment des pollutions maritimes, sont extrêmement sensibles.

Par ailleurs, le fonctionnement du renforcement de ces juridictions spécialisées sera de nature à accélérer et à améliorer le fonctionnement de la justice pénale dans des matières très spécialisées comme la santé publique et les pollutions maritimes

Sur ce point, il peut être précisé qu'actuellement, le chiffre des condamnations en matière de pollution maritime volontaire (dégazage, déballastage) est de l'ordre de moins d'une dizaine en 2002. Ces dispositions nouvelles permettront de mieux appréhender la délinquance liée à la pollution maritime et d'en accroître ainsi la répression.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre IV

Dispositions concernant la lutte contre les discriminations

Ces dispositions qui s'inscrivent dans le prolongement de la loi n2003-88 du 3 février 2003 visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe permettront de lutter contre des infractions pour lesquelles les citoyens sont extrêmement sensibles et attendent des pouvoirs publics des réponses plus significatives. L'augmentation de la répression et le rallongement de la prescription en assurant une efficacité plus grande de l'action judiciaire permettront de renforcer la confiance des justiciables dans le système judiciaire et dans sa capacité à lutter contre ce type de délinquance.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES A L'ACTION PUBLIQUE,
AUX ENQUETES, A L'INSTRUCTION, AU JUGEMENT,
ET A L'APPLICATION DES PEINES

Chapitre Ier

Dispositions relatives à l'action publique

Dans le prolongement de la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation, ces dispositions permettent, d'un point de vue social, d'accroître l'efficacité des enquêtes.

En inscrivant, en précisant et en clarifiant dans la loi le principe de l'opportunité des poursuites, le projet de loi permet de manière essentielle d'assurer une meilleure acceptation du système judiciaire notamment par les victimes et de renforcer la confiance des citoyens dans la justice.

Par ailleurs, en permettant un recours plus large et plus efficace à la procédure de la composition pénale qui s'inscrit dans les réformes entreprises par la loi du 9 septembre 2002, le présent projet rapproche l'institution judiciaire des justiciables puisque la composition pénale est conditionnée à l'acceptation par l'auteur de faits des mesures auxquelles il sera soumis.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre II

Dispositions relatives aux enquêtes

Dans le prolongement de la loi du 9 septembre 2002, ces dispositions permettent, d'un point de vue social, d'accroître l'efficacité des enquêtes et de manière essentielle de simplifier la procédure pénale, permettant ainsi de lutter de manière plus efficace contre la délinquance.

Le déroulement des enquêtes étant ainsi facilité, la réponse judiciaire pourra alors intervenir plus rapidement.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre III

Dispositions relatives à l'instruction

Ainsi que l'avait fait la loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, les présentes dispositions du projet de loi simplifient grandement les dispositions complexes de l'instruction préparatoire.

Ces simplifications qui permettent de renforcer l'efficacité des investigations effectuées par le juge d'instruction, notamment par la création du mandat de recherche et la clarification et la mise en cohérence des dispositions relatives aux mandats, permettront également de réduire les délais des informations judiciaires. Ces conséquences ne peuvent avoir qu'un impact favorable auprès des justiciables et notamment des victimes.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre IV

Dispositions relatives au jugement

D'un point de vue social, il peut être précisé s'agissant de la mesure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, que l'acceptation de manière expresse et éclairée de la sanction par la personne est de nature à engager un processus favorable de réparation en faveur de la victime et de la société et de réinsertion de l'intéressé.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre V

Dispositions relatives à l'application des peines

D'un point de vue social, la meilleure prise en compte de l'intérêt des victimes et les facilités nouvelles concernant le paiement des amendes devraient être favorablement accueillies par les justiciables.

Les dispositions du projet n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

TITRE III

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

ET DISPOSITIONS RELATIVES A L'OUTRE-MER

Chapitre 1er

Dispositions transitoires

Ces dispositions n'ont pas d'impact social particulier et n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

Chapitre II

Dispositions étendant certaines dispositions législatives
à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna, aux Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte

Ces dispositions n'ont pas d'impact social particulier et n'ont aucune incidence micro-économique ou macro-économique.

B. IMPACT BUDGETAIRE

TITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES A LA LUTTE
CONTRE LES FORMES NOUVELLES
DE DÉLINQUANCE ET DE CRIMINALITÉ

Chapitre Ier

Dispositions concernant la lutte

contre la délinquance et la criminalité organisée

En ce qui concerne la création de juridictions spécialisées, il est évidemment difficile d'évaluer, pour les juridictions existantes, la baisse, en terme de charge de travail, représentée par la réforme, et, pour les nouvelles juridictions inter-régionales, le nombre et la complexité des dossiers dont elles seront saisies.

Il sera donc nécessaire de démarrer avec une épure minimale et de prévoir des indicateurs pour apprécier comment devra s'effectuer la montée en charge des effectifs.

Il apparaît que, dans un premier temps, pourraient être créés dans chaque pôle inter régional quelques postes de juges d'instruction, de magistrats du parquet et de magistrats du siège, ainsi que les postes de fonctionnaires correspondants. Des assistants spécialisés et de justice supplémentaires seront également nécessaires. Ces créations devront être plus nombreuses pour Paris.

D'ores et déjà, il apparaît que la création de ces postes dans les pôles inter régionaux de lutte contre la criminalité organisée est susceptible d'avoir des incidences immobilières et nécessitera de dégager les superficies disponibles pour ces nouveaux magistrats, fonctionnaires et assistants spécialisés.

Ces superficies nouvelles devront éventuellement être trouvées sur la base de restructurations au sein de ces juridictions.

Chapitre II

Dispositions concernant la lutte contre la délinquance
et la criminalité internationale

Ces dispositions n'ont pas d'incidence budgétaire particulière, sauf en ce qui concerne la disposition relative à l'audition des témoins à distance qui sera de nature à faire baisser les charges publiques. En effet, l'audition à distance sera de nature à limiter les frais liés au déplacement des témoins, pris en compte au titre des frais de justice.

Chapitre III

Dispositions concernant la lutte contre les infractions
en matière économique, financière et douanière
et en matière de santé publique et de pollution maritime

S'agissant des tribunaux spécialisés en matière économique et financière, une mutualisation des moyens devra être envisagée avec ceux présentés pour les pôles inter-régionaux précédemment décrits. En effet, même si le texte ne l'impose pas, il est hautement probable qu'en pratique, les juridictions inter-régionales en matière économique et financière pourront correspondre au ressort des juridictions inter-régionales spécialisées en matière de criminalité organisée.

Cette centralisation des moyens permettra de limiter l'impact budgétaire de la création de ces juridictions inter-régionales.

Par ailleurs, il convient de souligner que les juridictions spécialisées en matière de santé publique existent déjà, deux pôles inter-régionaux ayant été créés par le décret du n2002-599 du 22 avril 2002 fixant la liste et le ressort des tribunaux spécialisés en matière sanitaire à Paris et à Marseille.

En matière de pollution marine, le décret n2002-196 du 11 février 2002 relatif aux juridictions compétentes en matière de pollution des eaux de mer par rejet des navires a fixé la liste des tribunaux compétents.

Pour la Métropole, il s'agit des tribunaux de grande instance du Havre (zone Manche-Nord, de Brest (zone Atlantique) et de Marseille (zone Méditerranée).

Pour les D.O.M, il s'agit des tribunaux de Fort-de-France, de Saint-Denis-de-la-Réunion et du tribunal de première instance de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Chapitre IV

Dispositions concernant la lutte contre les discriminations

Ces dispositions n'ont aucune incidence budgétaire.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES A L'ACTION PUBLIQUE,
AUX ENQUETES, A L'INSTRUCTION, AU JUGEMENT,
ET A L'APPLICATION DES PEINES

Chapitre Ier

Dispositions relatives à l'action publique

Ces dispositions auront une incidence limitée liée notamment à l'obligation de motiver les décisions de ne pas engager de poursuites, bien que l'auteur ait été identifié, ce qui est au demeurant souvent le cas en pratique. Par ailleurs, la nouvelle application informatique «Cassiopée», qui sera mise en place en 2005 et 2007, permettra de répondre de manière substantielle à l'impact informatique de cette mesure.

Chapitre II

Dispositions relatives aux enquêtes

Ces dispositions auront une incidence budgétaire limitée liée notamment à la possibilité de procéder à des interceptions de communications au cours de la nouvelle procédure de recherche des personnes en fuite, cette mesure ne pouvant toutefois en l'état être précisément quantifiée.

Chapitre III

Dispositions relatives à l'instruction

Ces dispositions ont une incidence budgétaire en matière de frais de justice liée notamment aux dispositions prévoyant au cours de l'instruction que les parties civiles pourront se voir accorder des indemnités comme c'est le cas pour les témoins. Même si elles ne peuvent en l'état être chiffrée précisément, ces dispositions auront une incidence qui apparaît limitée, dans la mesure où ces dispositions ne revêtent aucun caractère d'automaticité.

Chapitre IV

Dispositions relatives au jugement

Ces dispositions ont une incidence budgétaire limitée liée notamment aux dispositions relatives à l'extension de l'enquête sociale rapide en cas de comparution immédiate.

Ainsi sur la bas des statistiques sur l'année 2001, l'impact sera de 38, 87 euros multiplié par le nombre de procédures concernées, à savoir 31 693, diminué toutefois par le coût des enquêtes sociales déjà ordonnées en cas de comparution immédiate, soit que la loi l'impose au regard de l'âge du prévenu et de la peine encourue, soit que les parquets l'ordonnent alors même que la loi ne l'impose pas, ce qui constitue une pratique courante dans nombre de juridictions. Le nombre de ces enquêtes n'est pas connu, mais il peut être au minimum estimé à 10 000.

Les conséquences budgétaires de la nouvelle procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) sont difficiles à déterminer : le coût de cette procédure, notamment en charge de travail pour les magistrats du parquet et ceux du siège devant procéder aux homologations (plus les charges de secrétariat) devant en effet être compensé par les gains résultant de la diminution des audiences correctionnelles qui, en comparution immédiate, mobilisent trois magistrats du siège, un magistrat du parquet et un greffier. Une évaluation de cette procédure devra nécessairement être effectuée après quelques mois d'application de la loi pour mesurer précisément son impact en terme de transfert de charges au sein du tribunal entre l'audience correctionnelle et la CRPC et entre le siège pénal et le parquet.

Il en est de même des dispositions relatives à la notification par le greffier de la cour d'assises et non plus par le préfet de la liste de session et de la liste des jurés suppléants, l'impact budgétaire étant toutefois sur ce point également limité.

Chapitre V

Dispositions relatives à l'application des peines

Les dispositions permettant d'imposer certaines obligations aux condamnés libérés ont un impact budgétaire qui demeure toutefois limité, dans la mesure où ces obligations ne justifieront pas nécessairement la saisine du service pénitentiaire d'insertion et de probation.

Il peut être précisé toutefois que la modification de l'article 710 permettant d'éviter les transfèrements de condamnés en cas de requête relative à un contentieux d'exécution, et notamment de demande de confusion de peines, sera de nature à limiter les frais de transfèrement des détenus.

Les dispositions sur le paiement volontaire de l'amende à l'audience sont par ailleurs de nature à améliorer le recouvrement des amendes, mais dans des proportions qui ne peuvent être quantifiées dès à présent.

TITRE III

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

ET DISPOSITIONS RELATIVES A L'OUTRE-MER

Chapitre 1er

Dispositions transitoires

Ces dispositions n'ont aucune incidence budgétaire.

Chapitres II et III

Ces dispositions n'ont aucune incidence budgétaire particulière, autre que celles déjà exposées.

SOMMAIRE

Pages

TABLEAU COMPARATIF 5

ANNEXES AU TABLEAU COMPARATIF 443

ANNEXES AU TABLEAU COMPARATIF

Code de l'action sociale et des familles

Art. L. 312-1.

Code des douanes

Art.  377 bis, 399 et 415.

Code général des impôts

Art.  1759 et 1804 B.

Code de l'environnement

Art. L 218-13.

Livre des procédures fiscales

Art. L. 248 et L. 273.

Code monétaire et financier

Art. L. 152-1.

Code pénal

Art. 121-2, 122-1, 131-26, 131-35, 131-38, 131-39, 132-23, 132-24, 222-17, 222-18, 222-34, 222-35, 222-36, 222-37, 222-38, 222-39, 222-39-1, 222-40, 222-41, 222-42, 223-15-2, 224-1, 224-2, 224-3, 224-5, 225-4-2, 225-4-3, 225-4-4, 225-4-5, 225-4-6, 225-4-7, 225-7, 225-7-1, 225-8, 225-9, 225-10,225-10-1, 225-11, 225-12, 311-9, 312-6, 312-7, 313-1, 313-6, 314-2, 321-1, 322-8, 323-1, 323-2, 323-3, 323-4, 324-1, 324-2, 421-1, 421-2-1, 421-2-2, 421-2-3, 421-3, 421-4, 432-10, 432-11, 432-12, 432-13, 432-14, 432-15, 433-1, 433-2, 434-9, 434-13, 434-15-1, 435-1, 435-2, 442-3, 442-4, 442-5, 442-6, 442-7, 442-8, 450-1 et 450-2-1.

Code de procédure pénale

Art. 2-15, 11, 18, 36, 43, 52, 56-1, 56-2, 56-3, 57, 57-1, 58, 59, 60, 60-1, 61, 63-2, 63-3, 73, 77-1-1, 80-2, 81, 82-1, 97, 100, 100-1, 100-2, 100-3, 100-4, 100-5, 100-6, 113-6, 116, 137, 137-4, 139, 140, 141-1, 143-1, 144, 144-1, 145, 145-2, 145-3, 148-1, 148-2, 148-6, 148-7, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 151-1-1, 173, 175-1, 177-2, 270, 320, 322, 382, 389, 390, 390-1, 393, 395, 397, 397-2, 397-3, 397-4, 397-5, 397-6, 420-1, 500, 501, 502, 505, 522, 543, 557, 558, 560, 626-4, 627-21, 628, 629, 630, 631, 632, 633, 634, 635, 636, 637, 638, 639, 640, 641, 663, 706-11, 706-16, 706-17, 706-23, 706-24, 706-24-1, 706-24-3, 706-28, 706-29, 706-42, 706-47, 706-61, 721, 721-1, 707 et 712.

Ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France

Art. 21

Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse

Art. 24, 24 bis, 32, 33 et 65.

Loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution

Art. 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78 et 79.

Loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants des navires

Art. 9.

Loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte

Art. 3

Loi n° 2001-1.168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier

Art. 17 et 18.

Loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 relative à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport, aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre ou aérien et au stockage souterrain de gaz naturel, d'hydrocarbures et de produits chimiques

Art. 12.

Loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice

Art. 33, 34, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46 et 49.

Convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de l'Union européenne

Art. 13.

Code de l'action sociale et des familles

Art. L. 312-1. -- I. --  Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après :

1° Les établissements ou services prenant en charge habituellement, y compris au titre de la prévention, des mineurs et des majeurs de moins de vingt et un ans relevant de l'article L. 222-5 ;

2° Les établissements ou services d'enseignement et d'éducation spéciale qui assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d'adaptation ;

3° Les centres d'action médico-sociale précoce mentionnés à l'article L. 2132-4 du code de la santé publique ;

4° Les établissements ou services mettant en oeuvre les mesures éducatives ordonnées par l'autorité judiciaire en application de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ou des articles 375 à 375-8 du code civil ou concernant des majeurs de moins de vingt et un ans ;

5° Les établissements ou services :

a) D'aide par le travail, à l'exception des structures conventionnées pour les activités visées à l'article L. 322-4-16 du code du travail et des ateliers protégés définis aux articles L. 323-30 et suivants du même code ;

b) De réadaptation, de préorientation et de rééducation professionnelle mentionnés à l'article L. 323-15 du code du travail ;

6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ;

7° Les établissements et les services, y compris les foyers d'accueil médicalisé, qui accueillent des personnes adultes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert ;

8° Les établissements ou services comportant ou non un hébergement, assurant l'accueil, notamment dans les situations d'urgence, le soutien ou l'accompagnement social, l'adaptation à la vie active ou l'insertion sociale et professionnelle des personnes ou des familles en difficulté ou en situation de détresse ;

9° Les établissements ou services qui assurent l'accueil et l'accompagnement de personnes confrontées à des difficultés spécifiques en vue de favoriser l'adaptation à la vie active et l'aide à l'insertion sociale et professionnelle ou d'assurer des prestations de soins et de suivi médical, dont les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie et les appartements de coordination thérapeutique ;

10° Les foyers de jeunes travailleurs qui relèvent des dispositions des articles L. 351-2 et L. 353-2 du code de la construction et de l'habitation ;

11° Les établissements ou services, dénommés selon les cas centres de ressources, centres d'information et de coordination ou centres prestataires de services de proximité, mettant en oeuvre des actions de dépistage, d'aide, de soutien, de formation ou d'information, de conseil, d'expertise ou de coordination au bénéfice d'usagers, ou d'autres établissements et services ;

12° Les établissements ou services à caractère expérimental.

Les établissements et services sociaux et médico-sociaux délivrent des prestations à domicile, en milieu de vie ordinaire, en accueil familial ou dans une structure de prise en charge. Ils assurent l'accueil à titre permanent, temporaire ou selon un mode séquentiel, à temps complet ou partiel, avec ou sans hébergement, en internat, semi-internat ou externat.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Code des douanes

Art. 377 bis. --  1. En sus des pénalités fiscales, les tribunaux ordonnent le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues.

2. Même quand elle ne prononce aucune condamnation, la juridiction répressive est compétente pour se prononcer sur les dispositions du 4 de l'article 369 du présent code.

Art. 399 . --  1. Ceux qui ont participé comme intéressés d'une manière quelconque à un délit de contrebande ou à un délit d'importation ou d'exportation sans déclaration sont passibles des mêmes peines que les auteurs de l'infraction et, en outre, des peines privatives de droits édictées par l'article 432 ci-après.

2. Sont réputés intéressés :

a) les entrepreneurs, membres d'entreprise, assureurs, assurés, bailleurs de fonds, propriétaires de marchandises, et, en général, ceux qui ont un intérêt direct à la fraude ;

b) ceux qui ont coopéré d'une manière quelconque à un ensemble d'actes accomplis par un certain nombre d'individus agissant de concert, d'après un plan de fraude arrêté pour assurer le résultat poursuivi en commun ;

c) ceux qui ont, sciemment, soit couvert les agissements des fraudeurs ou tenté de leur procurer l'impunité, soit acheté ou détenu, même en dehors du rayon, des marchandises provenant d'un délit de contrebande ou d'importation sans déclaration.

3. L'intérêt à la fraude ne peut être imputé à celui qui a agi en état de nécessité ou par suite d'erreur invincible.

Art. 415. --  Seront punis d'un emprisonnement de deux à dix ans, de la confiscation des sommes en infraction ou d'une somme en tenant lieu lorsque la saisie n'a pas pu être prononcée et d'une amende comprise entre une et cinq fois la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction ceux qui auront, par exportation, importation, transfert ou compensation, procédé ou tenté de procéder à une opération financière entre la France et l'étranger portant sur des fonds qu'ils savaient provenir, directement ou indirectement, d'un délit prévu au présent code ou d'une infraction à la législation sur les substances ou plantes vénéneuses classées comme stupéfiants.

Code général des impôts

Art. 1759 . --  En cas d'application des dispositions prévues au troisième alinéa des articles 1649 A et 1649 quater A le montant des droits est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100.

Dans les cas où la méconnaissance des obligations énoncées à l'article 1649 quater A est punie de la sanction prévue au premier alinéa de l'article L152-4 du code monétaire et financier, la majoration prévue au premier alinéa n'est pas mise en oeuvre.

Art. 1804 B . --  En sus des pénalités fiscales prévues aux articles 1791 à 1804 A, le tribunal ordonne le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues à raison de l'infraction.

Code de l'environnement

Art. L. 218-13. -- Est puni de 6 000 euros d'amende et, en outre, en cas de récidive, du double de cette peine et d'un an d'emprisonnement, le fait, pour tout capitaine ou responsable à bord d'un navire français soumis aux dispositions de la convention mentionnée à l'article L. 218-10 n'appartenant pas aux catégories de navires définis aux articles L. 218-10 et L. 218-11, de commettre une des infractions prévues à l'article L. 218-10.

Livre des procédures fiscales

Art. L. 248. --  Les infractions peuvent faire l'objet de transactions avant mise en mouvement d'une action judiciaire ou, dans les conditions fixées à l'article L. 249, avant jugement définitif.

Art. L. 273. - Les sûretés et dispositions spéciales prévues par les articles L. 270 et L. 271 peuvent être appliquées en matière de taxes sur le chiffre d'affaires, sous réserve des adaptations nécessaires.

Code monétaire et financier

Art. L. 152-1 . --  Les personnes physiques qui transfèrent vers l'étranger ou en provenance de l'étranger des sommes, titres ou valeurs, sans l'intermédiaire d'un établissement de crédit, ou d'un organisme ou service mentionné à l'article L. 518-1 doivent en faire la déclaration dans des conditions fixées par décret.

Une déclaration est établie pour chaque transfert à l'exclusion des transferts dont le montant est inférieur à 7 600 euros.

Code pénal

Art. 121-2 . --  Les personnes morales, à l'exclusion de l'État, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.

Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public.

La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3.

Art. 122-1. -- N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.

La personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime.

Art. 131-26 . --  L'interdiction des droits civiques, civils et de famille porte sur :

1° Le droit de vote ;

2° L'éligibilité ;

3° Le droit d'exercer une fonction juridictionnelle ou d'être expert devant une juridiction, de représenter ou d'assister une partie devant la justice ;

4° Le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations ;

5° Le droit d'être tuteur ou curateur ; cette interdiction n'exclut pas le droit, après avis conforme du juge des tutelles, le conseil de famille entendu, d'être tuteur ou curateur de ses propres enfants.

L'interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit.

La juridiction peut prononcer l'interdiction de tout ou partie de ces droits.

L'interdiction du droit de vote ou l'inéligibilité prononcées en application du présent article emportent interdiction ou incapacité d'exercer une fonction publique.

Art. 131-35 . --  La peine d'affichage de la décision prononcée ou de diffusion de celle-ci est à la charge du condamné. Les frais d'affichage ou de diffusion recouvrés contre ce dernier ne peuvent toutefois excéder le maximum de l'amende encourue.

La juridiction peut ordonner l'affichage ou la diffusion de l'intégralité ou d'une partie de la décision, ou d'un communiqué informant le public des motifs et du dispositif de celle-ci. Elle détermine, le cas échéant, les extraits de la décision et les termes du communiqué qui devront être affichés ou diffusés.

L'affichage ou la diffusion de la décision ou du communiqué ne peut comporter l'identité de la victime qu'avec son accord ou celui de son représentant légal ou de ses ayants droit.

La peine d'affichage s'exécute dans les lieux et pour la durée indiqués par la juridiction ; sauf disposition contraire de la loi qui réprime l'infraction, l'affichage ne peut excéder deux mois. En cas de suppression, dissimulation ou lacération des affiches apposées, il est de nouveau procédé à l'affichage aux frais de la personne reconnue coupable de ces faits.

La diffusion de la décision est faite par le Journal officiel de la République française, par une ou plusieurs autres publications de presse, ou par un ou plusieurs services de communication audiovisuelle. Les publications ou les services de communication audiovisuelle chargés de cette diffusion sont désignés par la juridiction. Ils ne peuvent s'opposer à cette diffusion.

Art. 131-38. -- Le taux maximum de l'amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime l'infraction.

Art. 131-39. -- Lorsque la loi le prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou un délit peut être sanctionné d'une ou de plusieurs des peines suivantes :

1° La dissolution, lorsque la personne morale a été créée ou, lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit puni en ce qui concerne les personnes physiques d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, détournée de son objet pour commettre les faits incriminés ;

2° L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ;

3° Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;

4° La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;

5° L'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;

6° L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de faire appel public à l'épargne ;

7° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d'utiliser des cartes de paiement ;

8° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ;

9° L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle.

Les peines définies aux 1° et 3° ci-dessus ne sont pas applicables aux personnes morales de droit public dont la responsabilité pénale est susceptible d'être engagée. Elles ne sont pas non plus applicables aux partis ou groupements politiques ni aux syndicats professionnels. La peine définie au 1° n'est pas applicable aux institutions représentatives du personnel.

Art. 132-23 . --  En cas de condamnation à une peine privative de liberté, non assortie du sursis, dont la durée est égale ou supérieure à dix ans, prononcée pour les infractions spécialement prévues par la loi, le condamné ne peut bénéficier, pendant une période de sûreté, des dispositions concernant la suspension ou le fractionnement de la peine, le placement à l'extérieur, les permissions de sortir, la semi-liberté et la libération conditionnelle.

La durée de la période de sûreté est de la moitié de la peine ou, s'il s'agit d'une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, de dix-huit ans. La cour d'assises ou le tribunal peut toutefois, par décision spéciale, soit porter ces durées jusqu'aux deux tiers de la peine ou, s'il s'agit d'une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, jusqu'à vingt-deux ans, soit décider de réduire ces durées.

Dans les autres cas, lorsqu'elle prononce une peine privative de liberté d'une durée supérieure à cinq ans, non assortie du sursis, la juridiction peut fixer une période de sûreté pendant laquelle le condamné ne peut bénéficier d'aucune des modalités d'exécution de la peine mentionnée au premier alinéa. La durée de cette période de sûreté ne peut excéder les deux tiers de la peine prononcée ou vingt-deux ans en cas de condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité.

Les réductions de peines accordées pendant la période de sûreté ne seront imputées que sur la partie de la peine excédant cette durée.

Art. 132-24. -- Dans les limites fixées par la loi, la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Lorsque la juridiction prononce une peine d'amende, elle détermine son montant en tenant compte également des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction.

Art. 222-17 . --  La menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes dont la tentative est punissable est punie de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende lorsqu'elle est, soit réitérée, soit matérialisée par un écrit, une image ou tout autre objet.

La peine est portée à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 euros d'amende s'il s'agit d'une menace de mort.

Art. 222-18 . --  La menace, par quelque moyen que ce soit, de commettre un crime ou un délit contre les personnes, est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende, lorsqu'elle est faite avec l'ordre de remplir une condition.

La peine est portée à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende s'il s'agit d'une menace de mort.

Art. 222-34 . --  Le fait de diriger ou d'organiser un groupement ayant pour objet la production, la fabrication, l'importation, l'exportation, le transport, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi illicites de stupéfiants est puni de la réclusion criminelle à perpétuité et de 7 500 000 euros d'amende.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par le présent article.

Art. 222-35 . --  La production ou la fabrication illicites de stupéfiants sont punies de vingt ans de réclusion criminelle et de 7 500 000 euros d'amende.

Ces faits sont punis de trente ans de réclusion criminelle et de 7 500 000 euros d'amende lorsqu'ils sont commis en bande organisée.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 222-36 . --  L'importation ou l'exportation illicites de stupéfiants sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 7 500 000 euros d'amende.

Ces faits sont punis de trente ans de réclusion criminelle et de 7 500 000 euros d'amende lorsqu'ils sont commis en bande organisée.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 222-37 . --  Le transport, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi illicites de stupéfiants sont punis de dix ans d'emprisonnement et de 7 500 000 euros d'amende.

Est puni des mêmes peines le fait de faciliter, par quelque moyen que ce soit, l'usage illicite de stupéfiants, de se faire délivrer des stupéfiants au moyen d'ordonnances fictives ou de complaisance, ou de délivrer des stupéfiants sur la présentation de telles ordonnances en connaissant leur caractère fictif ou complaisant.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 222-38 . --  Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 750 000 euros d'amende le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des biens ou des revenus de l'auteur de l'une des infractions mentionnées aux articles 222-34 à 222-37 ou d'apporter son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit de l'une de ces infractions. La peine d'amende peut être élevée jusqu'à la moitié de la valeur des biens ou des fonds sur lesquels ont porté les opérations de blanchiment.

Lorsque l'infraction a porté sur des biens ou des fonds provenant de l'un des crimes mentionnés aux articles 222-34, 222-35 et 222-36, deuxième alinéa, son auteur est puni des peines prévues pour les crimes dont il a eu connaissance.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatifs à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 222-39 . --  La cession ou l'offre illicites de stupéfiants à une personne en vue de sa consommation personnelle sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

La peine d'emprisonnement est portée à dix ans lorsque les stupéfiants sont offerts ou cédés, dans les conditions définies à l'alinéa précédent, à des mineurs ou dans des centres d'enseignement ou d'éducation ou dans les locaux de l'administration.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par l'alinéa précédent.

Art. 222-39-1 . --  Le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à l'une des activités réprimées par la présente section, ou avec plusieurs personnes se livrant à l'usage de stupéfiants, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

La peine d'emprisonnement est portée à dix ans lorsqu'une ou plusieurs des personnes visées à l'alinéa précédent sont mineures.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatifs à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par l'alinéa précédent.

Art. 222-40 . --  La tentative des délits prévus par les articles 222-36 (premier alinéa) à 222-39 est punie des mêmes peines.

Art. 222-41 . --  Constituent des stupéfiants au sens des dispositions de la présente section les substances ou plantes classées comme stupéfiants en application de l'article L. 627 du code de la santé publique.

Art. 222-42 . --  Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies aux articles 222-34 à 222-39.

Les peines encourues par les personnes morales sont :

1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;

2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.

L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

Art. 223-15-2 . --  Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse soit d'un mineur, soit d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente et connue de son auteur, soit d'une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.

Lorsque l'infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende.

Art. 224-1 . --  Le fait, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, d'arrêter, d'enlever, de détenir ou de séquestrer une personne, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à cette infraction.

Toutefois, si la personne détenue ou séquestrée est libérée volontairement avant le septième jour accompli depuis celui de son appréhension, la peine est de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, sauf dans les cas prévus par l'article 224-2.

Art. 224-2 . --  L'infraction prévue à l'article 224-1 est punie de trente ans de réclusion criminelle lorsque la victime a subi une mutilation ou une infirmité permanente provoquée volontairement ou résultant soit des conditions de détention, soit d'une privation d'aliments ou de soins.

Elle est punie de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu'elle est précédée ou accompagnée de tortures ou d'actes de barbarie ou lorsqu'elle est suivie de la mort de la victime.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 224-3 . --  L'infraction prévue par l'article 224-1 est punie de trente ans de réclusion criminelle lorsqu'elle est commise soit en bande organisée, soit à l'égard de plusieurs personnes.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à cette infraction.

Toutefois, si la personne détenue ou séquestrée ou toutes les personnes détenues ou séquestrées sont libérées volontairement dans le délai prévu par le troisième alinéa de l'article 224-1, la peine est de dix ans d'emprisonnement, sauf si la victime ou l'une des victimes a subi l'une des atteintes à son intégrité physique mentionnées à l'article 224-2.

Art. 224-5 . --  Lorsque la victime de l'un des crimes prévus aux articles 224-1 à 224-4 est un mineur de quinze ans, la peine est portée à la réclusion criminelle à perpétuité si l'infraction est punie de trente ans de réclusion criminelle et à trente ans de réclusion criminelle si l'infraction est punie de vingt ans de réclusion criminelle.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables dans les cas prévus par le présent article.

Art. 225-4-2 . --  L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000 euros d'amende lorsqu'elle est commise :

1° A l'égard d'un mineur ;

2° A l'égard d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;

3° A l'égard de plusieurs personnes ;

4° A l'égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;

5° Lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications ;

6° Dans des circonstances qui exposent directement la personne à l'égard de laquelle l'infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;

7° Avec l'emploi de menaces, de contraintes, de violences ou de manoeuvres dolosives visant l'intéressé, sa famille ou une personne étant en relation habituelle avec lui ;

8° Par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la personne victime de l'infraction prévue à l'article 225-4-1 ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

9° Par une personne appelée à participer, par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public.

Art. 225-4-3 . --  L'infraction prévue à l'article 225-4-1 est punie de vingt ans de réclusion criminelle et de 3 000 000 euros d'amende lorsqu'elle est commise en bande organisée.

Art. 225-4-4 . --  L'infraction prévue à l'article 225-4-1 commise en recourant à des tortures ou à des actes de barbarie est punie de la réclusion criminelle à perpétuité et de 4 500 000 euros d'amende.

Art. 225-4-5 . --  Lorsque le crime ou le délit qui a été commis ou qui devait être commis contre la personne victime de l'infraction de traite des êtres humains est puni d'une peine privative de liberté d'une durée supérieure à celle de l'emprisonnement encouru en application des articles 225-4-1 à 225-4-3, l'infraction de traite des êtres humains est punie des peines attachées aux crimes ou aux délits dont son auteur a eu connaissance et, si ce crime ou délit est accompagné de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances aggravantes dont il a eu connaissance.

Art. 225-4-6 . --  Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions prévues à la présente section. Les peines encourues par les personnes morales sont :

1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;

2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.

Art. 225-4-7 . --  La tentative des délits prévus à la présente section est punie des mêmes peines.

Art. 225-7. -- Le proxénétisme est puni de dix ans d'emprisonnement et de 1 500 000 euros d'amende lorsqu'il est commis :

1° A l'égard d'un mineur ;

2° A l'égard d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;

3° A l'égard de plusieurs personnes ;

4° A l'égard d'une personne qui a été incitée à se livrer à la prostitution soit hors du territoire de la République, soit à son arrivée sur le territoire de la République ;

5° Par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la personne qui se prostitue ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

6° Par une personne appelée à participer, de par ses fonctions, à la lutte contre la prostitution, à la protection de la santé ou au maintien de l'ordre public ;

7° Par une personne porteuse d'une arme ;

8° Avec l'emploi de la contrainte, de violences ou de manoeuvres dolosives ;

9° Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice, sans qu'elles constituent une bande organisée ;

10° Grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 225-7-1. -- Le proxénétisme est puni de quinze ans de réclusion criminelle et de 3 000 000 euros d'amende lorsqu'il est commis à l'égard d'un mineur de quinze ans.

Art. 225-8. -- Le proxénétisme prévu à l'article 225-7 est puni de vingt ans de réclusion criminelle et de 3 000 000 euros d'amende lorsqu'il est commis en bande organisée.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par le présent article.

Art. 225-9. -- Le proxénétisme commis en recourant à des tortures ou des actes de barbarie est puni de la réclusion criminelle à perpétuité et de 4 500 000 euros d'amende.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue au présent article.

Art. 225-10. -- Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 750 000 euros d'amende le fait, par quiconque, agissant directement ou par personne interposée :

1° De détenir, gérer, exploiter, diriger, faire fonctionner, financer ou contribuer à financer un établissement de prostitution ;

2° Détenant, gérant, exploitant, dirigeant, faisant fonctionner, finançant ou contribuant à financer un établissement quelconque ouvert au public ou utilisé par le public, d'accepter ou de tolérer habituellement qu'une ou plusieurs personnes se livrent à la prostitution à l'intérieur de l'établissement ou de ses annexes ou y recherchent des clients en vue de la prostitution ;

3° De vendre ou de tenir à la disposition d'une ou de plusieurs personnes des locaux ou emplacements non utilisés par le public, en sachant qu'elles s'y livreront à la prostitution ;

4° De vendre, de louer ou de tenir à la disposition, de quelque manière que ce soit, d'une ou plusieurs personnes, des véhicules de toute nature en sachant qu'elles s'y livreront à la prostitution.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par les 1° et 2° du présent article.

Art. 225-10-1 . --  Le fait, par tout moyen, y compris par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d'autrui en vue de l'inciter à des relations sexuelles en échange d'une rémunération ou d'une promesse de rémunération est puni de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende.

Art. 225-11. -- La tentative des délits prévus par la présente section est punie des mêmes peines.

Art. 225-12. -- Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies aux articles 225-5 à 225-10.

Les peines encourues par les personnes morales sont :

1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;

2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.

Art. 311-9 . --  Le vol en bande organisée est puni de quinze ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende.

Il est puni de vingt ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende lorsqu'il est précédé, accompagné ou suivi de violences sur autrui.

Il est puni de trente ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende lorsqu'il est commis soit avec usage ou menace d'une arme, soit par une personne porteuse d'une arme soumise à autorisation ou dont le port est prohibé.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 312-6 . --  L'extorsion en bande organisée est punie de vingt ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende.

Elle est punie de trente ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende lorsqu'elle est précédée, accompagnée ou suivie de violences sur autrui ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente.

Elle est punie de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu'elle est commise soit avec usage ou menace d'une arme, soit par une personne porteuse d'une arme soumise à autorisation ou dont le port est prohibé.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 312-7 . --  L'extorsion est punie de la réclusion criminelle à perpétuité et de 150 000 euros d'amende lorsqu'elle est précédée, accompagnée ou suivie soit de violences ayant entraîné la mort, soit de tortures ou d'actes de barbarie.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par le présent article.

Art. 313-1 . --  L'escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge.

L'escroquerie est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende.

Art. 313-6 . --   Le fait, dans une adjudication publique, par dons, promesses, ententes ou tout autre moyen frauduleux, d'écarter un enchérisseur ou de limiter les enchères ou les soumissions, est puni de six mois d'emprisonnement et de 22 500 euros d'amende. Est puni des mêmes peines le fait d'accepter de tels dons ou promesses.

Est puni des mêmes peines :

1° Le fait, dans une adjudication publique, d'entraver ou de troubler la liberté des enchères ou des soumissions, par violences, voies de fait ou menaces ;

2° Le fait de procéder ou de participer, après une adjudication publique, à une remise aux enchères sans le concours de l'officier ministériel compétent ou d'une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques agréée.

La tentative des infractions prévues au présent article est punie des mêmes peines.

Art. 314-2 . --  Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende lorsque l'abus de confiance est réalisé :

1° Par une personne qui fait appel au public afin d'obtenir la remise de fonds ou de valeurs soit pour son propre compte, soit comme dirigeant ou préposé de droit ou de fait d'une entreprise industrielle ou commerciale ;

2° Par toute autre personne qui, de manière habituelle, se livre ou prête son concours, même à titre accessoire, à des opérations portant sur les biens des tiers pour le compte desquels elle recouvre des fonds ou des valeurs.

Art. 321-1. -- Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit.

Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit.

Le recel est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende.

Art. 322-8. -- L'infraction définie à l'article 322-6 est punie de vingt ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende :

1° Lorsqu'elle est commise en bande organisée ;

2° Lorsqu'elle a entraîné pour autrui une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours.

3° Lorsqu'elle est commise à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la personne propriétaire ou utilisatrice du bien à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.

Art. 323-1 . --  Le fait d'accéder ou de se maintenir, frauduleusement, dans tout ou partie d'un système de traitement automatisé de données est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Lorsqu'il en est résulté soit la suppression ou la modification de données contenues dans le système, soit une altération du fonctionnement de ce système, la peine est de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.

Art. 323-2 . --  Le fait d'entraver ou de fausser le fonctionnement d'un système de traitement automatisé de données est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Art. 323-3 . --  Le fait d'introduire frauduleusement des données dans un système de traitement automatisé ou de supprimer ou de modifier frauduleusement les données qu'il contient est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Art. 323-4 . --  La participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'une ou de plusieurs des infractions prévues par les articles 323-1 à 323-3 est punie des peines prévues pour l'infraction elle-même ou pour l'infraction la plus sévèrement réprimée.

Art. 324-1 . --  Le blanchiment est le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des biens ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect.

Constitue également un blanchiment le fait d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit.

Le blanchiment est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende.

Art. 324-2 . --  Le blanchiment est puni de dix ans d'emprisonnement et de 750 000 euros d'amende :

1° Lorsqu'il est commis de façon habituelle ou en utilisant les facilités que procure l'exercice d'une activité professionnelle ;

2° Lorsqu'il est commis en bande organisée.

Art. 421-1 . --  Constituent des actes de terrorisme, lorsqu'elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, les infractions suivantes :

1° Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, l'enlèvement et la séquestration ainsi que le détournement d'aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport, définis par le livre II du présent code ;

2° Les vols, les extorsions, les destructions, dégradations et détériorations, ainsi que les infractions en matière informatique définis par le livre III du présent code ;

3° Les infractions en matière de groupes de combat et de mouvements dissous définies par les articles 431-13 à 431-17 et les infractions définies par les articles 434-6 et 441-2 à 441-5 ;

4° La fabrication ou la détention de machines, engins meurtriers ou explosifs, définies à l'article 3 de la loi du 19 juin 1871 qui abroge le décret du 4 septembre 1870 sur la fabrication des armes de guerre ;

- la production, la vente, l'importation ou l'exportation de substances explosives, définies à l'article 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives ;

- l'acquisition, la détention, le transport ou le port illégitime de substances explosives ou d'engins fabriqués à l'aide desdites substances, définis à l'article 38 du décret-loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

- la détention, le port et le transport d'armes et de munitions des première et quatrième catégories, définis aux articles 24, 28, 31 et 32 du décret-loi précité ;

- les infractions définies aux articles 1 er et 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972 interdisant la mise au point, la fabrication, la détention, le stockage, l'acquisition et la cession d'armes biologiques ou à base de toxines.

- les infractions prévues par les articles 58 à 63 de la loi n° 98-467 du 17 juin 1998 relative à l'application de la Convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction ;

5° Le recel du produit de l'une des infractions prévues aux 1° à 4° ci-dessus ;

6° Les infractions de blanchiment prévues au chapitre IV du titre II du livre III du présent code ;

7° Les délits d'initié prévus à l'article L. 465-1 du code monétaire et financier.

Art. 421-2-1. -- Constitue également un acte de terrorisme le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un des actes de terrorisme mentionnés aux articles précédents.

Art. 421-2-2 . --  Constitue également un acte de terrorisme le fait de financer une entreprise terroriste en fournissant, en réunissant ou en gérant des fonds, des valeurs ou des biens quelconques ou en donnant des conseils à cette fin, dans l'intention de voir ces fonds, valeurs ou biens utilisés ou en sachant qu'ils sont destinés à être utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre l'un quelconque des actes de terrorisme prévus au présent chapitre, indépendamment de la survenance éventuelle d'un tel acte.

Art. 421-2-3 . --  Le fait de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant à l'un ou plusieurs des actes visés aux articles 421-1 à 421-2-2, est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende.

Art. 421-3 . --  Le maximum de la peine privative de liberté encourue pour les infractions mentionnées à l'article 421-1 est relevé ainsi qu'il suit lorsque ces infractions constituent des actes de terrorisme :

1° Il est porté à la réclusion criminelle à perpétuité lorsque l'infraction est punie de trente ans de réclusion criminelle ;

2° Il est porté à trente ans de réclusion criminelle lorsque l'infraction est punie de vingt ans de réclusion criminelle ;

3° Il est porté à vingt ans de réclusion criminelle lorsque l'infraction est punie de quinze ans de réclusion criminelle ;

4° Il est porté à quinze ans de réclusion criminelle lorsque l'infraction est punie de dix ans d'emprisonnement ;

5° Il est porté à dix ans d'emprisonnement lorsque l'infraction est punie de sept ans d'emprisonnement ;

6° Il est porté à sept ans d'emprisonnement lorsque l'infraction est punie de cinq ans d'emprisonnement ;

7° Il est porté au double lorsque l'infraction est punie d'un emprisonnement de trois ans au plus.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux crimes, ainsi qu'aux délits punis de dix ans d'emprisonnement, prévus par le présent article.

Art. 421-4 . --  L'acte de terrorisme défini à l'article 421-2 est puni de vingt ans de réclusion criminelle et de 350 000 euros d'amende.

Lorsque cet acte a entraîné la mort d'une ou plusieurs personnes, il est puni de la réclusion criminelle à perpétuité et de 750 000 euros d'amende.

Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables au crime prévu par le présent article.

Art. 432-10. -- Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, de recevoir, exiger ou ordonner de percevoir à titre de droits ou contributions, impôts ou taxes publics, une somme qu'elle sait ne pas être due, ou excéder ce qui est dû, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Est puni des même peines le fait, par les mêmes personnes, d'accorder sous une forme quelconque et pour quelque motif que ce soit une exonération ou franchise des droits, contributions, impôts ou taxes publics en violation des textes légaux ou réglementaires.

La tentative des délits prévus au présent article est punie des mêmes peines.

Art. 432-11. -- Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public, ou investie d'un mandat électif public, de solliciter ou d'agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques :

1° Soit pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat ;

2° Soit pour abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

Art. 432-12. -- Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Toutefois, dans les communes comptant 3 500 habitants au plus, les maires, adjoints ou conseillers municipaux délégués ou agissant en remplacement du maire peuvent chacun traiter avec la commune dont ils sont élus pour le transfert de biens mobiliers ou immobiliers ou la fourniture de services dans la limite d'un montant annuel fixé à 16 000 euros.

En outre, dans ces communes, les maires, adjoints ou conseillers municipaux délégués ou agissant en remplacement du maire peuvent acquérir une parcelle d'un lotissement communal pour y édifier leur habitation personnelle ou conclure des baux d'habitation avec la commune pour leur propre logement. Ces actes doivent être autorisés, après estimation des biens concernés par le service des domaines, par une délibération motivée du conseil municipal.

Dans les mêmes communes, les mêmes élus peuvent acquérir un bien appartenant à la commune pour la création ou le développement de leur activité professionnelle. Le prix ne peut être inférieur à l'évaluation du service des domaines. L'acte doit être autorisé, quelle que soit la valeur des biens concernés, par une délibération motivée du conseil municipal.

Pour l'application des trois alinéas qui précèdent, la commune est représentée dans les conditions prévues par l'article L. 122-12 du code des communes et le maire, l'adjoint ou le conseiller municipal intéressé doit s'abstenir de participer à la délibération du conseil municipal relative à la conclusion ou à l'approbation du contrat. En outre, par dérogation au deuxième alinéa de l'article L. 121-15 du code des communes, le conseil municipal ne peut décider de se réunir à huis clos.

Art. 432-13. -- Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait, par une personne ayant été chargée, en tant que fonctionnaire public ou agent ou préposé d'une administration publique, à raison même de sa fonction, soit d'assurer la surveillance ou le contrôle d'une entreprise privée, soit de conclure des contrats de toute nature avec une entreprise privée, soit d'exprimer son avis sur les opérations effectuées par une entreprise privée, de prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux dans l'une de ces entreprises avant l'expiration d'un délai de cinq ans suivant la cessation de cette fonction.

Est punie des mêmes peines toute participation par travail, conseil ou capitaux, dans une entreprise privée qui possède au moins 30 p. 100 de capital commun ou a conclu un contrat comportant une exclusivité de droit ou de fait avec l'une des entreprises mentionnées à l'alinéa qui précède.

Au sens du présent article, est assimilée à une entreprise privée toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé.

Ces dispositions sont applicables aux agents des établissements publics, des entreprises nationalisées, des sociétés d'économie mixte dans lesquelles l'État ou les collectivités publiques détiennent directement ou indirectement plus de 50 p. 100 du capital et des exploitants publics prévus par la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications.

L'infraction n'est pas constituée en cas de participation au capital de sociétés cotées en bourse ou lorsque les capitaux sont reçus par dévolution successorale.

Art. 432-14. -- Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public ou exerçant les fonctions de représentant, administrateur ou agent de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics, des sociétés d'économie mixte d'intérêt national chargées d'une mission de service public et des sociétés d'économie mixte locales ou par toute personne agissant pour le compte de l'une de celles susmentionnées de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public.

Art. 432-15. -- Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l'un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende.

La tentative du délit prévu à l'alinéa qui précède est punie des mêmes peines.

Art. 433-1 . --  Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende le fait de proposer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour obtenir d'une personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public :

1° Soit qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat ;

2° Soit qu'elle abuse de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

Est puni des mêmes peines le fait de céder à une personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public qui sollicite, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte visé au 1° ou pour abuser de son influence dans les conditions visées au 2°.

Art. 433-2 . --  Est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende le fait, par quiconque, de solliciter ou d'agréer, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

Est puni des mêmes peines le fait, de céder aux sollicitations prévues à l'alinéa précédent, ou de proposer, sans droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour qu'une personne abuse de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

Art. 434-9 . --  Le fait, par un magistrat, un juré ou toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle, un arbitre ou un expert nommé soit par une juridiction, soit par les parties, ou une personne chargée par l'autorité judiciaire d'une mission de conciliation ou de médiation, de solliciter ou d'agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour l'accomplissement ou l'abstention d'un acte de sa fonction, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende.

Le fait, à tout moment, de céder aux sollicitations d'une personne visée à l'alinéa précédent, ou de proposer des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques afin d'obtenir d'une de ces personnes l'accomplissement ou l'abstention d'un acte de sa fonction est puni des mêmes peines.

Lorsque l'infraction définie au premier alinéa est commise par un magistrat au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites criminelles, la peine est portée à quinze ans de réclusion criminelle et à 225 000 euros d'amende.

Art. 434-13. -- Le témoignage mensonger fait sous serment devant toute juridiction ou devant un officier de police judiciaire agissant en exécution d'une commission rogatoire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Toutefois, le faux témoin est exempt de peine s'il a rétracté spontanément son témoignage avant la décision mettant fin à la procédure rendue par la juridiction d'instruction ou par la juridiction de jugement.

Art. 434-15.1. -- Le fait de ne pas comparaître, de ne pas prêter serment ou de ne pas déposer, sans excuse ni justification, devant le juge d'instruction ou devant un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire par une personne qui a été citée par lui pour y être entendue comme témoin est puni de 3 750 euros d'amende.

Art. 435-1 . --  Pour l'application de la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l'Union européenne faite à Bruxelles le 26 mai 1997, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150000 euros d'amende le fait par un fonctionnaire communautaire ou un fonctionnaire national d'un autre État membre de l'Union européenne ou par un membre de la Commission des Communautés européennes, du Parlement européen, de la Cour de justice et de la Cour des comptes des Communautés européennes de solliciter ou d'agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat.

Art. 435-2 . --  Pour l'application de la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l'Union européenne faite à Bruxelles le 26 mai 1997, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende le fait de proposer sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour obtenir d'un fonctionnaire communautaire ou d'un fonctionnaire national d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un membre de la Commission des Communautés européennes, du Parlement européen, de la Cour de justice et de la Cour des comptes des Communautés européennes qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat.

Est puni des mêmes peines le fait de céder à une personne visée à l'alinéa précédent qui sollicite, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte visé audit alinéa.

Art. 442-3 . --  La contrefaçon ou la falsification de pièces de monnaie ou de billets de banque français ou étrangers n'ayant plus cours légal ou n'étant plus autorisés est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Art. 442-4 . --  La mise en circulation de tout signe monétaire non autorisé ayant pour objet de remplacer les pièces de monnaie ou les billets de banque ayant cours légal en France est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Art. 442-5 . --  La fabrication, l'emploi ou la détention sans autorisation des matières, instruments, programmes informatiques ou de tout autre élément spécialement destinés à la fabrication ou à la protection contre la contrefaçon ou la falsification des billets de banque ou des pièces de monnaie sont punis de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.

Art. 442-6 . --  Sont punis d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende la fabrication, la vente, la distribution de tous objets, imprimés ou formules qui présentent avec les signes monétaires visés à l'article 442-1 une ressemblance de nature à faciliter l'acceptation desdits objets, imprimés ou formules au lieu et place des valeurs imitées.

Art. 442-7 . --  Le fait, pour celui qui a reçu les signes monétaires contrefaits ou falsifiés visés à l'article 442-1 en les tenant pour bons, de les remettre en circulation après en avoir découvert les vices est puni de 7 500 euros d'amende.

Art. 442-8. --  La tentative des délits prévus par le premier alinéa de l'article 442-2 et par les articles 442-3 à 442-7 est punie des mêmes peines.

Art. 450-1 . --  Constitue une association de malfaiteurs tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

Lorsque les infractions préparées sont des crimes ou des délits punis de dix ans d'emprisonnement, la participation à une association de malfaiteurs est punie de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende.

Lorsque les infractions préparées sont des délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement, la participation à une association de malfaiteurs est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Art. 450-2-1. --  Le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant aux activités visées à l'article 450-1, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Code de procédure pénale

Art. 2-15 . --  Toute association régulièrement déclarée ayant pour objet statutaire la défense des victimes d'un accident survenu dans les transports collectifs ou dans un lieu ou local ouvert au public ou dans une propriété privée à usage d'habitation ou à usage professionnel et regroupant plusieurs de ces victimes peut, si elle a été agréée à cette fin, exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne cet accident lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée.

Les conditions dans lesquelles les associations visées au premier alinéa peuvent être agréées, après avis du ministère public, compte tenu de leur représentativité, sont fixées par décret.

Art. 11 . --  Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète.

Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du Code pénal.

Toutefois, afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, le procureur de la République peut, d'office et à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause.

Art. 18 . --  Les officiers de police judiciaire ont compétence dans les limites territoriales où ils exercent leurs fonctions habituelles.

Les officiers de police judiciaire, mis temporairement à disposition d'un service autre que celui dans lequel ils sont affectés, ont la même compétence territoriale que celle des officiers de police judiciaire du service d'accueil.

En cas de crime ou délit flagrant, les officiers de police judiciaire peuvent se transporter dans le ressort des tribunaux de grande instance limitrophes du tribunal ou des tribunaux auxquels ils sont rattachés, à l'effet d'y poursuivre leurs investigations et de procéder à des auditions, perquisitions et saisies. Pour l'application du présent alinéa, les ressorts des tribunaux de grande instance situés dans un même département sont considérés comme un seul et même ressort. Les ressorts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil sont considérés comme un seul et même ressort.

Les officiers de police judiciaire peuvent, sur commission rogatoire expresse du juge d'instruction ou sur réquisitions du procureur de la République, prises au cours d'une enquête préliminaire ou d'une enquête de flagrance, procéder aux opérations prescrites par ces magistrats sur toute l'étendue du territoire national. Ils sont tenus d'être assistés d'un officier de police judiciaire territorialement compétent si le magistrat dont ils tiennent la commission ou la réquisition le décide. Le procureur de la République territorialement compétent en est informé par le magistrat ayant prescrit l'opération.

Ils peuvent, sur proposition des autorités administratives dont ils dépendent et par habilitation du procureur général, recevoir compétence dans les mêmes limites de compétence territoriale que celles des officiers de police judiciaire qu'ils sont appelés à suppléer en cas de besoin.

Les officiers ou agents de police judiciaire exerçant habituellement leur mission dans les véhicules affectés au transport collectif de voyageurs ou dans les lieux destinés à l'accès à ces moyens de transport sont compétents pour opérer sur l'étendue de la zone de défense de leur service d'affectation, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'État.

Art. 36 . --  Le ministre de la justice peut dénoncer au procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre, par instructions écrites et versées au dossier de la procédure, d'engager ou de faire engager des poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministre juge opportunes.

Art. 43 . --  Sont compétents le procureur de la République du lieu de l'infraction, celui de la résidence de l'une des personnes soupçonnées d'avoir participé à l'infraction, celui du lieu d'arrestation d'une de ces personnes, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause.

Art. 52 . --  Sont compétents le juge d'instruction du lieu de l'infraction, celui de la résidence de l'une des personnes soupçonnées d'avoir participé à l'infraction, celui du lieu d'arrestation d'une de ces personnes, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause.

Art. 56-1 . --  Les perquisitions dans le cabinet d'un avocat ou à son domicile ne peuvent être effectuées que par un magistrat et en présence du bâtonnier ou de son délégué. Ce magistrat et le bâtonnier ou son délégué ont seuls le droit de prendre connaissance des documents découverts lors de la perquisition préalablement à leur éventuelle saisie.

Le bâtonnier ou son délégué peut s'opposer à la saisie d'un document à laquelle le magistrat a l'intention de procéder s'il estime que cette saisie serait irrégulière. Le document doit alors être placé sous scellé fermé. Ces opérations font l'objet d'un procès-verbal mentionnant les objections du bâtonnier ou de son délégué, qui n'est pas joint au dossier de la procédure. Si d'autres documents ont été saisis au cours de la perquisition sans soulever de contestation, ce procès-verbal est distinct de celui prévu par l'article 57. Ce procès-verbal ainsi que le document placé sous scellé fermé sont transmis sans délai au juge des libertés et de la détention, avec l'original ou une copie du dossier de la procédure.

Dans les cinq jours de la réception de ces pièces, le juge des libertés et de la détention statue sur la contestation par ordonnance motivée non susceptible de recours.

A cette fin, il entend le magistrat qui a procédé à la perquisition et, le cas échéant, le procureur de la République, ainsi que l'avocat au cabinet ou au domicile duquel elle a été effectuée et le bâtonnier ou son délégué. Il peut ouvrir le scellé en présence de ces personnes.

S'il estime qu'il n'y a pas lieu à saisir le document, le juge des libertés et de la détention ordonne sa restitution immédiate, ainsi que la destruction du procès-verbal des opérations et, le cas échéant, la cancellation de toute référence à ce document ou à son contenu qui figurerait dans le dossier de la procédure.

Dans le cas contraire, il ordonne le versement du scellé et du procès-verbal au dossier de la procédure. Cette décision n'exclut pas la possibilité ultérieure pour les parties de demander la nullité de la saisie devant, selon les cas, la juridiction de jugement ou la chambre de l'instruction.

Art. 56-2 . --  Les perquisitions dans les locaux d'une entreprise de presse ou de communication audiovisuelle ne peuvent être effectuées que par un magistrat qui veille à ce que les investigations conduites ne portent pas atteinte au libre exercice de la profession de journaliste et ne constituent pas un obstacle ou n'entraînent pas un retard injustifiés à la diffusion de l'information.

Art. 56-3 . --  Les perquisitions dans le cabinet d'un médecin, d'un notaire, d'un avoué ou d'un huissier sont effectuées par un magistrat et en présence de la personne responsable de l'ordre ou de l'organisation professionnelle à laquelle appartient l'intéressé ou de son représentant.

Art. 57 . --  Sous réserve de ce qui est dit à l'article précédent concernant le respect du secret professionnel et des droits de la défense, les opérations prescrites par ledit article sont faites en présence de la personne au domicile de laquelle la perquisition a lieu.

En cas d'impossibilité, l'officier de police judiciaire aura l'obligation de l'inviter à désigner un représentant de son choix ; à défaut, l'officier de police judiciaire choisira deux témoins requis à cet effet par lui, en dehors des personnes relevant de son autorité administrative.

Le procès-verbal de ces opérations, dressé ainsi qu'il est dit à l'article 66, est signé par les personnes visées au présent article ; au cas de refus, il en est fait mention au procès-verbal.

Art. 57-1 . --  Les officiers de police judiciaire ou, sous leur responsabilité, les agents de police judiciaire peuvent, au cours d'une perquisition effectuée dans les conditions prévues par le présent code, accéder par un système informatique implanté sur les lieux où se déroule la perquisition à des données intéressant l'enquête en cours et stockées dans ledit système ou dans un autre système informatique, dès lors que ces données sont accessibles à partir du système initial ou disponibles pour le système initial.

S'il est préalablement avéré que ces données, accessibles à partir du système initial ou disponibles pour le système initial, sont stockées dans un autre système informatique situé en dehors du territoire national, elles sont recueillies par l'officier de police judiciaire, sous réserve des conditions d'accès prévues par les engagements internationaux en vigueur.

Les données auxquelles il aura été permis d'accéder dans les conditions prévues par le présent article peuvent être copiées sur tout support. Les supports de stockage informatique peuvent être saisis et placés sous scellés dans les conditions prévues par le présent code.

Art. 58 . --  Sous réserve des nécessités des enquêtes, toute communication ou toute divulgation sans l'autorisation de la personne mise en examen ou de ses ayants droit ou du signataire ou du destinataire d'un document provenant d'une perquisition à une personne non qualifiée par la loi pour en prendre connaissance est punie de 4 500 euros d'amende et de deux ans d'emprisonnement.

Art. 59 . --  Sauf réclamation faite de l'intérieur de la maison ou exceptions prévues par la loi, les perquisitions et les visites domiciliaires ne peuvent être commencées avant 6 heures et après 21 heures.

Les formalités mentionnées aux articles 56, 56-1, 57 et au présent article sont prescrites à peine de nullité.

Art. 60 . --  S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, l'officier de police judiciaire a recours à toutes personnes qualifiées.

Sauf si elles sont inscrites sur une des listes prévues à l'article 157, les personnes ainsi appelées prêtent, par écrit, serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et en leur conscience.

Les personnes désignées pour procéder aux examens techniques ou scientifiques peuvent procéder à l'ouverture des scellés. Elles en dressent inventaire et en font mention dans un rapport établi conformément aux dispositions des articles 163 et 166. Elles peuvent communiquer oralement leurs conclusions aux enquêteurs en cas d'urgence.

Sur instructions du procureur de la République, l'officier de police judiciaire donne connaissance des résultats des examens techniques et scientifiques aux personnes à l'encontre desquelles il existe des indices faisant présumer qu'elles ont commis ou tenté de commettre une infraction, ainsi qu'aux victimes.

Art. 60-1 . --  Sur demande de l'officier de police judiciaire, qui peut intervenir par voie télématique ou informatique, les organismes publics ou les personnes morales de droit privé, à l'exception de ceux visés au deuxième alinéa de l'article 31 et à l'article 33 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, mettent à sa disposition les informations utiles à la manifestation de la vérité, à l'exception de celles protégées par un secret prévu par la loi, contenues dans le ou les systèmes informatiques ou traitements de données nominatives qu'ils administrent.

L'officier de police judiciaire, intervenant sur réquisition du procureur de la République préalablement autorisé par ordonnance du juge des libertés et de la détention, peut requérir des opérateurs de télécommunications, et notamment de ceux mentionnés à l'article 43-7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, de prendre, sans délai, toutes mesures propres à assurer la préservation, pour une durée ne pouvant excéder un an, du contenu des informations consultées par les personnes utilisatrices des services fournis par les opérateurs.

Les organismes ou personnes visés au présent article mettent à disposition les informations requises par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais.

Le fait de refuser de répondre sans motif légitime à ces réquisitions est puni d'une amende de 3 750 euros. Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal de l'infraction prévue au présent alinéa. La peine encourue par les personnes morales est l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal.

Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, détermine les catégories d'organismes visés au premier alinéa ainsi que les modalités d'interrogation, de transmission et de traitement des informations requises.

Art. 61 . --  L'officier de police judiciaire peut défendre à toute personne de s'éloigner du lieu de l'infraction jusqu'à la clôture de ses opérations.

Art. 63-2 . --  Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, faire prévenir dans le délai prévu au dernier alinéa de l'article 63-1, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l'un de ses parents en ligne directe, l'un de ses frères et soeurs ou son employeur de la mesure dont elle est l'objet.

Si l'officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités de l'enquête, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au procureur de la République qui décide, s'il y a lieu, d'y faire droit.

Art. 63-3 . --  Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois.

A tout moment, le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut d'office désigner un médecin pour examiner la personne gardée à vue.

En l'absence de demande de la personne gardée à vue, du procureur de la République ou de l'officier de police judiciaire, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande ; le médecin est désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire.

Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue. Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l'aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsqu'il est procédé à un examen médical en application de règles particulières.

Art. 73 . --  Dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l'auteur et le conduire devant l'officier de police judiciaire le plus proche.

Art. 77-1-1. -- Sur autorisation du procureur de la République, l'officier de police judiciaire peut procéder aux réquisitions prévues par le premier alinéa de l'article 60-1.

Sur autorisation du juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par le procureur de la République, l'officier de police peut procéder aux réquisitions prévues par le deuxième alinéa de l'article 60-1.

Les organismes ou personnes concernés mettent à disposition les informations requises par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais.

Le fait de refuser de répondre sans motif légitime à ces réquisitions est puni conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 60-1.

Art. 80-2 . --  Le juge d'instruction peut informer une personne par lettre recommandée qu'elle est convoquée, dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours ni supérieur à deux mois, pour qu'il soit procédé à sa première comparution dans les conditions prévues par l'article 116. Cette lettre indique la date et l'heure de la convocation. Elle donne connaissance à la personne de chacun des faits dont ce magistrat est saisi et pour lesquels la mise en examen est envisagée, tout en précisant leur qualification juridique. Elle fait connaître à la personne qu'elle a le droit de choisir un avocat ou de demander qu'il lui en soit désigné un d'office, ce choix ou cette demande devant être adressé au greffe du juge d'instruction. Elle précise que la mise en examen ne pourra intervenir qu'à l'issue de la première comparution de la personne devant le juge d'instruction.

Le juge d'instruction peut également faire notifier cette convocation par un officier de police judiciaire. Cette notification comprend les mentions prévues à l'alinéa précédent ; elle est constatée par un procès-verbal signé par la personne qui en reçoit copie.

L'avocat choisi ou désigné est convoqué dans les conditions prévues par l'article 114 ; il a accès au dossier de la procédure dans les conditions prévues par cet article.

Art. 81. -- Le juge d'instruction procède, conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité. Il instruit à charge et à décharge.

Il est établi une copie de ces actes ainsi que de toutes les pièces de la procédure ; chaque copie est certifiée conforme par le greffier ou l'officier de police judiciaire commis mentionné à l'alinéa 4. Toutes les pièces du dossier sont cotées par le greffier au fur et à mesure de leur rédaction ou de leur réception par le juge d'instruction.

Toutefois, si les copies peuvent être établies à l'aide de procédés photographiques ou similaires, elles sont exécutées à l'occasion de la transmission du dossier. Il en est alors établi autant d'exemplaires qu'il est nécessaire à l'administration de la justice. Le greffier certifie la conformité du dossier reproduit avec le dossier original. Si le dessaisissement momentané a pour cause l'exercice d'une voie de recours, l'établissement des copies doit être effectué immédiatement pour qu'en aucun cas ne soit retardée la mise en état de l'affaire prévue à l'article 194.

Si le juge d'instruction est dans l'impossibilité de procéder lui-même à tous les actes d'instruction, il peut donner commission rogatoire aux officiers de police judiciaire afin de leur faire exécuter tous les actes d'information nécessaires dans les conditions et sous les réserves prévues aux articles 151 et 152.

Le juge d'instruction doit vérifier les éléments d'information ainsi recueillis.

Le juge d'instruction procède ou fait procéder, soit par des officiers de police judiciaire, conformément à l'alinéa 4, soit par toute personne habilitée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'État, à une enquête sur la personnalité des personnes mises en examen, ainsi que sur leur situation matérielle, familiale ou sociale. Toutefois, en matière de délit, cette enquête est facultative.

Le juge d'instruction peut également commettre, suivant les cas, le service pénitentiaire d'insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou toute association habilitée en application de l'alinéa qui précède à l'effet de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d'une personne mise en examen et de l'informer sur les mesures propres à favoriser l'insertion sociale de l'intéressée. A moins qu'elles n'aient été déjà prescrites par le ministère public, ces diligences doivent être prescrites par le juge d'instruction chaque fois qu'il envisage de placer en détention provisoire un majeur âgé de moins de vingt et un ans au moment de la commission de l'infraction lorsque la peine encourue n'excède pas cinq ans d'emprisonnement.

Le juge d'instruction peut prescrire un examen médical, un examen psychologique ou ordonner toutes mesures utiles.

S'il est saisi par une partie d'une demande écrite et motivée tendant à ce qu'il soit procédé à l'un des examens ou à toutes autres mesures utiles prévus par l'alinéa qui précède, le juge d'instruction doit, s'il n'entend pas y faire droit, rendre une ordonnance motivée au plus tard dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande.

La demande mentionnée à l'alinéa précédent doit faire l'objet d'une déclaration au greffier du juge d'instruction saisi du dossier. Elle est constatée et datée par le greffier qui la signe ainsi que le demandeur ou son avocat. Si le demandeur ne peut signer, il en est fait mention par le greffier. Lorsque le demandeur ou son avocat ne réside pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffier peut être faite au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Lorsque la personne mise en examen est détenue, la demande peut également être faite au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire. Cette déclaration est constatée et datée par le chef de l'établissement pénitentiaire qui la signe, ainsi que le demandeur. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement. Ce document est adressé sans délai, en original ou copie et par tout moyen, au greffier du juge d'instruction.

Faute par le juge d'instruction d'avoir statué dans le délai d'un mois, la partie peut saisir directement le président de la chambre de l'instruction, qui statue et procède conformément aux troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article 186-1.

Art. 82-1 . --  Les parties peuvent, au cours de l'information, saisir le juge d'instruction d'une demande écrite et motivée tendant à ce qu'il soit procédé à leur audition ou à leur interrogatoire, à l'audition d'un témoin, à une confrontation ou à un transport sur les lieux, à ce qu'il soit ordonné la production par l'une d'entre elles d'une pièce utile à l'information, ou à ce qu'il soit procédé à tous autres actes qui leur paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité. A peine de nullité, cette demande doit être formée conformément aux dispositions du dixième alinéa de l'article 81 ; elle doit porter sur des actes déterminés et, lorsqu'elle concerne une audition, préciser l'identité de la personne dont l'audition est souhaitée.

Le juge d'instruction doit, s'il n'entend pas y faire droit, rendre une ordonnance motivée au plus tard dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande. Les dispositions du dernier alinéa de l'article 81 sont applicables.

A l'expiration d'un délai de quatre mois depuis sa dernière comparution, la personne mise en examen qui en fait la demande écrite doit être entendue par le juge d'instruction. Le juge d'instruction procède à son interrogatoire dans les trente jours de la réception de la demande, qui doit être formée conformément aux dispositions du dixième alinéa de l'article 81.

Art. 97. -- Lorsqu'il y a lieu, en cours d'information, de rechercher des documents et sous réserve des nécessités de l'information et du respect, le cas échéant, de l'obligation stipulée par l'alinéa 3 de l'article précédent, le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire par lui commis a seul le droit d'en prendre connaissance avant de procéder à la saisie.

Tous les objets et documents placés sous main de justice sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés. Cependant, si leur inventaire sur place présente des difficultés, l'officier de police judiciaire procède comme il est dit au quatrième alinéa de l'article 56.

Avec l'accord du juge d'instruction, l'officier de police judiciaire ne maintient que la saisie des objets et documents utiles à la manifestation de la vérité.

Lorsque ces scellés sont fermés, ils ne peuvent être ouverts et les documents dépouillés qu'en présence de la personne, assistée de son avocat, ou eux dûment appelés. Le tiers chez lequel la saisie a été faite est également invité à assister à cette opération.

Si les nécessités de l'instruction ne s'y opposent pas, copie ou photocopie des documents placés sous main de justice peuvent être délivrées à leurs frais, dans le plus bref délai, aux intéressés qui en font la demande.

Si la saisie porte sur des espèces, lingots, effets ou valeurs dont la conservation en nature n'est pas nécessaire à la manifestation de la vérité ou à la sauvegarde des droits des parties, il peut autoriser le greffier à en faire le dépôt à la Caisse des dépôts et consignations ou à la Banque de France.

Lorsque la saisie porte sur des billets de banque ou pièces de monnaie libellés en euros contrefaits, le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire par lui commis doit transmettre, pour analyse et identification, au moins un exemplaire de chaque type de billets ou pièces suspectés faux au centre d'analyse national habilité à cette fin. Le centre d'analyse national peut procéder à l'ouverture des scellés. Il en dresse inventaire dans un rapport qui doit mentionner toute ouverture ou réouverture des scellés. Lorsque les opérations sont terminées, le rapport et les scellés sont déposés entre les mains du greffier de la juridiction compétente. Ce dépôt est constaté par procès-verbal.

Les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables lorsqu'il n'existe qu'un seul exemplaire d'un type de billets ou de pièces suspectés faux, tant que celui-ci est nécessaire à la manifestation de la vérité.

Art. 100 . --  En matière criminelle et en matière correctionnelle, si la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement, le juge d'instruction peut, lorsque les nécessités de l'information l'exigent, prescrire l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications. Ces opérations sont effectuées sous son autorité et son contrôle.

La décision d'interception est écrite. Elle n'a pas de caractère juridictionnel et n'est susceptible d'aucun recours.

Art. 100-1 . --  La décision prise en application de l'article 100 doit comporter tous les éléments d'identification de la liaison à intercepter, l'infraction qui motive le recours à l'interception ainsi que la durée de celle-ci.

Art. 100-2. -- Cette décision est prise pour une durée maximum de quatre mois. Elle ne peut être renouvelée que dans les mêmes conditions de forme et de durée.

Art. 100-3 . --  Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui peut requérir tout agent qualifié d'un service ou organisme placé sous l'autorité ou la tutelle du ministre chargé des télécommunications ou tout agent qualifié d'un exploitant de réseau ou fournisseur de services de télécommunications autorisé, en vue de procéder à l'installation d'un dispositif d'interception.

Art. 100-4 . --  Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui dresse procès-verbal de chacune des opérations d'interception et d'enregistrement. Ce procès-verbal mentionne la date et l'heure auxquelles l'opération a commencé et celles auxquelles elle s'est terminée.

Les enregistrements sont placés sous scellés fermés.

Art. 100-5 . --  Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui transcrit la correspondance utile à la manifestation de la vérité. Il en est dressé procès-verbal. Cette transcription est versée au dossier.

Les correspondances en langue étrangère sont transcrites en français avec l'assistance d'un interprète requis à cette fin.

Art. 100-6 . --  Les enregistrements sont détruits, à la diligence du procureur de la République ou du procureur général, à l'expiration du délai de prescription de l'action publique.

Il est dressé procès-verbal de l'opération de destruction.

Art. 113-6 . --  A tout moment de la procédure, le témoin assisté peut, à l'occasion de son audition ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, demander au juge d'instruction à être mis en examen ; la personne est alors considérée comme mise en examen et elle bénéficie de l'ensemble des droits de la défense dès sa demande ou l'envoi de la lettre recommandée avec avis de réception.

Les dispositions de l'article 105 ne sont pas applicables au témoin assisté.

Art. 116 . --  Lorsqu'il envisage de mettre en examen une personne qui n'a pas déjà été entendue comme témoin assisté, le juge d'instruction procède à sa première comparution selon les modalités prévues par le présent article.

Le juge d'instruction constate l'identité de la personne et lui fait connaître expressément, en précisant leur qualification juridique, chacun des faits dont il est saisi et pour lesquels la mise en examen est envisagée. Mention de ces faits et de leur qualification juridique est portée au procès-verbal.

Lorsqu'il a été fait application des dispositions de l'article 80-2 et que la personne est assistée d'un avocat, le juge d'instruction procède à son interrogatoire ; l'avocat de la personne peut présenter ses observations au juge d'instruction.

Dans les autres cas, le juge d'instruction avise la personne de son droit de choisir un avocat ou de demander qu'il lui en soit désigné un d'office. L'avocat choisi ou, dans le cas d'une demande de commission d'office, le bâtonnier de l'ordre des avocats en est informé par tout moyen et sans délai. Si l'avocat choisi ne peut être contacté ou ne peut se déplacer, la personne est avisée de son droit de demander qu'il lui en soit désigné un d'office pour l'assister au cours de la première comparution. L'avocat peut consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec la personne. Le juge d'instruction avertit ensuite la personne qu'elle a le choix soit de se taire, soit de faire des déclarations, soit d'être interrogée. Mention de cet avertissement est faite au procès-verbal. L'accord pour être interrogé ne peut être donné qu'en présence d'un avocat. L'avocat de la personne peut également présenter ses observations au juge d'instruction.

Après avoir, le cas échéant, recueilli les déclarations de la personne ou procédé à son interrogatoire et entendu les observations de son avocat, le juge d'instruction lui notifie :

- soit qu'elle n'est pas mise en examen ; le juge d'instruction informe alors la personne qu'elle bénéficie des droits du témoin assisté ;

- soit qu'elle est mise en examen ; le juge d'instruction porte alors à la connaissance de la personne les faits ou la qualification juridique des faits qui lui sont reprochés, si ces faits ou ces qualifications diffèrent de ceux qui lui ont déjà été notifiés ; il l'informe de ses droits de formuler des demandes d'actes ou des requêtes en annulation sur le fondement des articles 81, 82-1, 82-2, 156 et 173 durant le déroulement de l'information et au plus tard le vingtième jour suivant l'avis prévu par le dernier alinéa de l'article 175, sous réserve des dispositions de l'article 173-1.

S'il estime que le délai prévisible d'achèvement de l'information est inférieur à un an en matière correctionnelle ou à dix-huit mois en matière criminelle, le juge d'instruction donne connaissance de ce délai prévisible à la personne et l'avise qu'à l'expiration dudit délai, elle pourra demander la clôture de la procédure en application des dispositions de l'article 175-1. Dans le cas contraire, il indique à la personne qu'elle pourra demander, en application de ce même article, la clôture de la procédure à l'expiration d'un délai d'un an en matière correctionnelle ou de dix-huit mois en matière criminelle.

A l'issue de la première comparution, la personne doit déclarer au juge d'instruction son adresse personnelle. Elle peut toutefois lui substituer l'adresse d'un tiers chargé de recevoir les actes qui lui sont destinés si elle produit l'accord de ce dernier. L'adresse déclarée doit être située, si l'information se déroule en métropole, dans un département métropolitain ou, si l'information se déroule dans un département d'outre-mer, dans ce département. Cette déclaration est faite devant le juge des libertés et de la détention lorsque ce magistrat, saisi par le juge d'instruction, décide de ne pas placer la personne en détention.

La personne est avisée qu'elle doit signaler au juge d'instruction jusqu'au règlement de l'information, par nouvelle déclaration ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, tout changement de l'adresse déclarée. Elle est également avisée que toute notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne. Mention de cet avis, ainsi que de la déclaration d'adresse, est portée au procès-verbal. Ces avis sont donnés par le juge des libertés et de la détention lorsque celui-ci décide de ne pas placer la personne en détention.

Art. 137 . --  La personne mise en examen, présumée innocente, reste libre. Toutefois, en raison des nécessités de l'instruction ou à titre de mesure de sûreté, elle peut être astreinte à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire. Lorsque celles-ci se révèlent insuffisantes au regard de ces objectifs, elle peut, à titre exceptionnel, être placée en détention provisoire.

Art. 137-4. -- Lorsque, saisi de réquisitions du procureur de la République tendant au placement en détention provisoire, le juge d'instruction estime que cette détention n'est pas justifiée et qu'il décide de ne pas transmettre le dossier de la procédure au juge des libertés et de la détention, il est tenu de statuer sans délai par ordonnance motivée, qui est immédiatement portée à la connaissance du procureur de la République.

Art. 139 . --  La personne mise en examen est placée sous contrôle judiciaire par une ordonnance du juge d'instruction qui peut être prise en tout état de l'instruction.

Le juge d'instruction peut, à tout moment, imposer à la personne placée sous contrôle judiciaire une ou plusieurs obligations nouvelles, supprimer tout ou partie des obligations comprises dans le contrôle, modifier une ou plusieurs de ces obligations ou accorder une dispense occasionnelle ou temporaire d'observer certaines d'entre elles.

Art. 140. -- La mainlevée du contrôle judiciaire peut être ordonnée à tout moment par le juge d'instruction, soit d'office, soit sur les réquisitions du procureur de la République, soit sur la demande de la personne après avis du procureur de la République.

Le juge d'instruction statue sur la demande de la personne dans un délai de cinq jours, par ordonnance motivée.

Faute par le juge d'instruction d'avoir statué dans ce délai, la personne peut saisir directement de sa demande la chambre de l'instruction qui, sur les réquisitions écrites et motivées du procureur général, se prononce dans les vingt jours de sa saisine. A défaut, la mainlevée du contrôle judiciaire est acquise de plein droit, sauf si des vérifications concernant la demande de la personne ont été ordonnées.

Art. 141-1 . --  Les pouvoirs conférés au juge d'instruction par les articles 139 et 140 appartiennent, en tout état de cause, à la juridiction compétente selon les distinctions de l'article 148-1.

Art. 143-1 . --  Sous réserve des dispositions de l'article 137, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que dans l'un des cas ci-après énumérés :

1° La personne mise en examen encourt une peine criminelle ;

2° La personne mise en examen encourt une peine correctionnelle d'une durée égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement.

La détention provisoire peut également être ordonnée dans les conditions prévues à l'article 141-2 lorsque la personne mise en examen se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire.

Art. 144 . --  La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si elle constitue l'unique moyen :

1° De conserver les preuves ou les indices matériels ou d'empêcher soit une pression sur les témoins ou les victimes, soit une concertation frauduleuse entre personnes mises en examen et complices ;

2° De protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement ;

3° De mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé.

Art. 144-1 . --  La détention provisoire ne peut excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité.

Le juge d'instruction ou, s'il est saisi, le juge des libertés et de la détention doit ordonner la mise en liberté immédiate de la personne placée en détention provisoire, selon les modalités prévues par l'article 147, dès que les conditions prévues à l'article 144 et au présent article ne sont plus remplies.

Art. 145 . --  Le juge des libertés et de la détention saisi par une ordonnance du juge d'instruction tendant au placement en détention de la personne mise en examen fait comparaître cette personne devant lui, assistée de son avocat si celui-ci a déjà été désigné, et procède conformément aux dispositions du présent article.

Au vu des éléments du dossier et après avoir, s'il l'estime utile, recueilli les observations de l'intéressé, ce magistrat fait connaître à la personne mise en examen s'il envisage de la placer en détention provisoire.

S'il n'envisage pas de la placer en détention provisoire, ce magistrat, après avoir le cas échéant ordonné le placement de la personne sous contrôle judiciaire, procède conformément aux deux derniers alinéas de l'article 116 relatifs à la déclaration d'adresse.

S'il envisage d'ordonner la détention provisoire de la personne, il l'informe que sa décision ne pourra intervenir qu'à l'issue d'un débat contradictoire et qu'elle a le droit de demander un délai pour préparer sa défense. Si la personne majeure mise en examen ou son avocat en fait la demande dès l'ouverture de l'audience, le débat contradictoire a lieu en audience publique, sauf si la publicité est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le juge des libertés et de la détention statue par ordonnance motivée sur cette demande de publicité après avoir recueilli les observations du ministère public, de la personne mise en examen et de son avocat.

Si cette personne n'est pas déjà assistée d'un avocat, il l'avise qu'elle a droit à l'assistance d'un avocat de son choix ou commis d'office. L'avocat choisi ou, dans le cas d'une demande de commission d'office, le bâtonnier de l'ordre des avocats en est avisé par tout moyen et sans délai ; mention de cette formalité est faite au procès-verbal.

Le juge des libertés et de la détention statue en audience de cabinet, après un débat contradictoire au cours duquel il entend le ministère public qui développe ses réquisitions prises conformément au troisième alinéa de l'article 82 puis les observations de la personne mise en examen et, le cas échéant, celles de son avocat.

Toutefois, le juge des libertés et de la détention ne peut ordonner immédiatement le placement en détention lorsque la personne mise en examen ou son avocat sollicite un délai pour préparer sa défense.

Dans ce cas, il peut, au moyen d'une ordonnance motivée par référence aux dispositions de l'alinéa précédent et non susceptible d'appel, prescrire l'incarcération de la personne pour une durée déterminée qui ne peut en aucun cas excéder quatre jours ouvrables. Dans ce délai, il fait comparaître à nouveau la personne et, que celle-ci soit ou non assistée d'un avocat, procède comme il est dit au sixième alinéa. S'il n'ordonne pas le placement de la personne en détention provisoire, celle-ci est mise en liberté d'office.

L'incarcération provisoire est, le cas échéant, imputée sur la durée de la détention provisoire pour l'application des articles 145-1 et 145-2. Elle est assimilée à une détention provisoire au sens de l'article 149 et 716-4 du code de procédure pénale.

Art. 145-2 . --  En matière criminelle, la personne mise en examen ne peut être maintenue en détention au-delà d'un an. Toutefois, sous réserve des dispositions de l'article 145-3, le juge des libertés et de la détention peut, à l'expiration de ce délai, prolonger la détention pour une durée qui ne peut être supérieure à six mois par une ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 137-3 et rendue après un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145, l'avocat ayant été convoqué conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 114. Cette décision peut être renouvelée selon la même procédure.

La personne mise en examen ne peut être maintenue en détention provisoire au-delà de deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles et au-delà de trois ans dans les autres cas. Les délais sont portés respectivement à trois et quatre ans lorsque l'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis hors du territoire national. Le délai est également de quatre ans lorsque la personne est poursuivie pour plusieurs crimes mentionnés aux livres II et IV du code pénal, ou pour trafic de stupéfiants, terrorisme, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour un crime commis en bande organisée.

A titre exceptionnel, lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes et des biens un risque d'une particulière gravité, la chambre de l'instruction peut prolonger pour une durée de quatre mois les durées prévues au présent article. La chambre de l'instruction, devant laquelle la comparution personnelle du mis en examen est de droit, est saisie par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention selon les modalités prévues par le dernier alinéa de l'article 137-1, et elle statue conformément aux dispositions des articles 144, 144-1, 145-3, 194, 197, 198, 199, 200, 206 et 207. Cette décision peut être renouvelée une fois sous les mêmes conditions et selon les mêmes modalités.

Les dispositions du présent article sont applicables jusqu'à l'ordonnance de règlement.

Art. 145-3 . --  Lorsque la durée de la détention provisoire excède un an en matière criminelle ou huit mois en matière délictuelle, les décisions ordonnant sa prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent aussi comporter les indications particulières qui justifient en l'espèce la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure.

Il n'est toutefois pas nécessaire que l'ordonnance de prolongation indique la nature des investigations auxquelles le juge d'instruction a l'intention de procéder lorsque cette indication risque d'entraver l'accomplissement de ces investigations.

Art. 148-1 . --  La mise en liberté peut aussi être demandée en tout état de cause par toute personne mise en examen, tout prévenu ou accusé, et en toute période de la procédure.

Lorsqu'une juridiction de jugement est saisie, il lui appartient de statuer sur la détention provisoire. Toutefois, en matière criminelle, la cour d'assises n'est compétente que lorsque la demande est formée durant la session au cours de laquelle elle doit juger l'accusé. Dans les autres cas, la demande est examinée par la chambre de l'instruction.

En cas de pourvoi et jusqu'à l'arrêt de la Cour de cassation, il est statué sur la demande de mise en liberté par la juridiction qui a connu en dernier lieu de l'affaire au fond. Si le pourvoi a été formé contre un arrêt de la cour d'assises, il est statué sur la détention par la chambre de l'instruction.

En cas de décision d'incompétence et généralement dans tous les cas où aucune juridiction n'est saisie, la chambre de l'instruction connaît des demandes de mise en liberté.

Art. 148-2 . --  Toute juridiction appelée à statuer, en application des articles 141-1 et 148-1, sur une demande de mainlevée totale ou partielle du contrôle judiciaire ou sur demande de mainlevée totale ou partielle du contrôle judiciaire ou sur une demande de mise en liberté se prononce après audition du ministère public, du prévenu ou de son avocat ; le prévenu non détenu et son avocat sont convoqués, par lettre recommandée, quarante-huit heures au moins avant la date de l'audience.

Lorsque la personne n'a pas encore été jugée en premier ressort, la juridiction saisie statue dans les dix jours ou les vingt jours de la réception de la demande, selon qu'elle est du premier ou du second degré. Lorsque la personne a déjà été jugée en premier ressort et qu'elle est en instance d'appel, la juridiction saisie statue dans les deux mois de la demande. Lorsque la personne a déjà été jugée en second ressort et qu'elle a formé un pourvoi en cassation, la juridiction saisie statue dans les quatre mois de la demande.

Toutefois, lorsqu'au jour de la réception de la demande il n'a pas encore été statué soit sur une précédente demande de mise en liberté ou de mainlevée de contrôle judiciaire, soit sur l'appel d'une précédente décision de refus de mise en liberté ou de mainlevée du contrôle judiciaire, les délais prévus ci-dessus ne commencent à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente. Faute de décision à l'expiration des délais, il est mis fin au contrôle judiciaire ou à la détention provisoire, le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, étant d'office remis en liberté.

La décision du tribunal est immédiatement exécutoire nonobstant appel ; lorsque le prévenu est maintenu en détention, la cour se prononce dans les vingt jours de l'appel, faute de quoi le prévenu, s'il n'est pas détenu pour autre cause, est mis d'office en liberté.

Art. 148-6. -- Toute demande de mainlevée ou de modification du contrôle judiciaire ou de mise en liberté doit faire l'objet d'une déclaration au greffier de la juridiction d'instruction saisie du dossier ou à celui de la juridiction compétente en vertu de l'article 148-1.

Elle doit être constatée et datée par le greffier qui la signe ainsi que le demandeur ou son avocat. Si le demandeur ne peut signer, il en est fait mention par le greffier.

Lorsque la personne ou son avocat ne réside pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffier peut être faite au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Art. 148-7. -- Lorsque la personne mise en examen, le prévenu ou l'accusé est détenu, la demande de mise en liberté peut aussi être faite au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire.

Cette déclaration est constatée et datée par le chef de l'établissement pénitentiaire qui la signe, ainsi que le demandeur. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement.

Ce document est adressé sans délai, en original ou en copie et par tout moyen, soit au greffier de la juridiction saisie du dossier, soit à celui de la juridiction compétente selon les distinctions de l'article 148-1.

Art. 149-1. -- La réparation prévue à l'article précédent est allouée par décision du premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle a été prononcée la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement.

Art. 149-2. -- Le premier président de la cour d'appel, saisi par voie de requête dans le délai de six mois de la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, statue par une décision motivée.

Les débats ont lieu en audience publique, sauf opposition du requérant. A sa demande, celui-ci est entendu personnellement ou par l'intermédiaire de son conseil.

Art. 149-3. -- Les décisions prises par le premier président de la cour d'appel peuvent, dans les dix jours de leur notification, faire l'objet d'un recours devant une commission nationale de réparation des détentions. Cette commission, placée auprès de la Cour de cassation, statue souverainement et ses décisions ne sont susceptibles d'aucun recours, de quelque nature que ce soit.

Le bureau de la Cour de cassation peut décider que la commission nationale comportera plusieurs formations.

La commission nationale, ou le cas échéant chacune des formations qu'elle comporte, est composée du premier président de la Cour de cassation, ou de son représentant, qui la préside, et de deux magistrats du siège de la cour ayant le grade de président de chambre, de conseiller ou de conseiller référendaire, désignés annuellement par le bureau de la cour. Outre ces deux magistrats, ce bureau désigne également, dans les mêmes conditions, trois suppléants.

Les fonctions du ministère public sont remplies par le parquet général près la Cour de cassation.

Les dispositions de l'article 149-2 sont applicables aux décisions rendues par la commission nationale.

Art. 149-4. -- La procédure devant le premier président de la cour d'appel et la commission nationale, qui statuent en tant que juridictions civiles, est fixée par un décret en Conseil d'État.

Art. 151-1-1. -- Pour les nécessités de l'exécution de la commission rogatoire, l'officier de police judiciaire peut procéder aux réquisitions prévues par le premier alinéa de l'article 60-1.

Avec l'autorisation expresse du juge d'instruction, l'officier de police peut procéder aux réquisitions prévues par le deuxième alinéa de l'article 60-1.

Les organismes ou personnes concernés mettent à disposition les informations requises par voie télématique ou informatique dans les meilleurs délais.

Le fait de refuser de répondre sans motif légitime à ces réquisitions est puni conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 60-1.

Art. 173 . --  S'il apparaît au juge d'instruction qu'un acte ou une pièce de la procédure est frappé de nullité, il saisit la chambre de l'instruction aux fins d'annulation, après avoir pris l'avis du procureur de la République et avoir informé les parties.

Si le procureur de la République estime qu'une nullité a été commise, il requiert du juge d'instruction communication de la procédure en vue de sa transmission à la chambre de l'instruction, présente requête aux fins d'annulation à cette chambre et en informe les parties.

Si l'une des parties estime qu'une nullité a été commise, elle saisit la chambre de l'instruction par requête motivée, dont elle adresse copie au juge d'instruction qui transmet le dossier de la procédure au président de la chambre de l'instruction. La requête doit, à peine d'irrecevabilité, faire l'objet d'une déclaration au greffe de la chambre de l'instruction. Elle est constatée et datée par le greffier qui la signe ainsi que le demandeur ou son avocat. Si le demandeur ne peut signer, il en est fait mention par le greffier. Lorsque le demandeur ou son avocat ne réside pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffe peut être faite au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Lorsque la personne mise en examen est détenue, la requête peut également être faite au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire. Cette déclaration est constatée et datée par le chef de l'établissement pénitentiaire qui la signe, ainsi que le demandeur. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement. Ce document est adressé sans délai, en original ou en copie et par tout moyen, au greffe de la chambre de l'instruction.

Les dispositions des trois premiers alinéas ne sont pas applicables aux actes de procédure qui peuvent faire l'objet d'un appel de la part des parties, et notamment des décisions rendues en matière de détention provisoire ou de contrôle judiciaire.

Dans les huit jours de la réception du dossier par le greffe de la chambre de l'instruction, le président peut, par ordonnance non susceptible de recours, constater que la requête est irrecevable en application du présent article, troisième ou quatrième alinéa, de l'article 173-1, des articles 174, premier alinéa, ou 175, deuxième alinéa ; il peut également constater l'irrecevabilité de la requête si celle-ci n'est pas motivée. S'il constate l'irrecevabilité de la requête, le président de la chambre de l'instruction ordonne que le dossier de l'information soit renvoyé au juge d'instruction ; dans les autres cas, il le transmet au procureur général qui procède ainsi qu'il est dit aux articles 194 et suivants.

Art. 175-1 . --  La personne mise en examen, le témoin assisté ou la partie civile peut, à l'expiration du délai qui lui a été indiqué en application du huitième alinéa de l'article 116 ou du deuxième alinéa de l'article 89-1 à compter, respectivement, de la date de la mise en examen, de la première audition ou de la constitution de partie civile, demander au juge d'instruction, selon les modalités prévues au dixième alinéa de l'article 81, de prononcer le renvoi ou la mise en accusation devant la juridiction de jugement ou de déclarer qu'il n'y a pas lieu à suivre, y compris en procédant, le cas échéant, à une disjonction. Cette demande peut également être formée lorsque aucun acte d'instruction n'a été accompli pendant un délai de quatre mois.

Dans le délai d'un mois à compter de la réception de cette demande, le juge d'instruction y fait droit ou déclare, par ordonnance motivée, qu'il y a lieu à poursuivre l'information. Dans le premier cas, il procède selon les modalités prévues à la présente section. Dans le second cas, ou à défaut pour le juge d'avoir statué dans le délai d'un mois, la personne mise en examen, le témoin assisté ou la partie civile peut saisir le président de la chambre de l'instruction en application de l'article 207-1. Cette saisine doit intervenir dans les cinq jours qui suivent la notification de la décision du juge ou l'expiration du délai d'un mois.

Lorsque le juge d'instruction a déclaré qu'il poursuivait son instruction, une nouvelle demande peut être formée à l'expiration d'un délai de six mois.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables après l'envoi de l'avis prévu au premier alinéa de l'article 175.

Art. 177-2. -- Lorsqu'il rend une ordonnance de non-lieu à l'issue d'une information ouverte sur constitution de partie civile, le juge d'instruction peut, sur réquisitions du procureur de la République et par décision motivée, s'il considère que la constitution de partie civile a été abusive ou dilatoire, prononcer contre la partie civile une amende civile dont le montant ne peut excéder 15 000 euros.

Cette décision ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de vingt jours à compter de la communication à la partie civile et à son avocat, par lettre recommandée ou par télécopie avec récépissé, des réquisitions du procureur de la République, afin de permettre à l'intéressé d'adresser des observations écrites au juge d'instruction.

Cette décision peut être frappée d'appel par la partie civile dans les mêmes conditions que l'ordonnance de non-lieu.

Si le juge d'instruction ne suit pas les réquisitions du procureur de la République, ce dernier peut interjeter appel dans les mêmes conditions.

Art. 270. -- Si l'accusé ne peut être saisi ou ne se présente pas, on procède contre lui par contumace

Art. 320 . --  Si l'accusé n'obtempère pas à la sommation, le président peut ordonner qu'il soit amené par la force devant la cour ; il peut également, après lecture faite à l'audience du procès-verbal constatant sa résistance, ordonner que, nonobstant son absence, il soit passé outre aux débats.

Après chaque audience, il est, par le greffier de la cour d'assises, donné lecture à l'accusé qui n'a pas comparu du procès-verbal des débats, et il lui est signifié copie des réquisitions du ministère public ainsi que des arrêts rendus par la cour, qui sont tous réputés contradictoires.

Art. 322 . --  Si l'ordre est troublé par l'accusé lui-même, il lui est fait application des dispositions de l'article 321.

L'accusé, lorsqu'il est expulsé de la salle d'audience, est gardé par la force publique, jusqu'à la fin des débats à la disposition de la cour ; il est, après chaque audience, procédé ainsi qu'il est dit à l'article 320, alinéa 2.

Art. 382 . --  Est compétent le tribunal correctionnel du lieu de l'infraction, celui de la résidence du prévenu ou celui du lieu d'arrestation de ce dernier, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause.

Le tribunal dans le ressort duquel une personne est détenue, n'est compétent que dans les conditions prévues au titre VI du livre IV.

Pour le jugement du délit d'abandon de famille prévu par l'article 227-3 du code pénal, est également compétent le tribunal du domicile ou de la résidence de la personne qui doit recevoir la pension, la contribution, les subsides ou l'une des autres prestations visées par cet article.

La compétence du tribunal correctionnel s'étend aux délits et contraventions qui forment avec l'infraction déférée au tribunal un ensemble indivisible ; elle peut aussi s'étendre aux délits et contraventions connexes, au sens de l'article 203.

Art. 389. -- L'avertissement, délivré par le ministère public, dispense de citation, s'il est suivi de la comparution volontaire de la personne à laquelle il est adressé.

Il indique le délit poursuivi et vise le texte de loi qui le réprime.

Lorsqu'il s'agit d'un prévenu détenu, le jugement doit constater le consentement de l'intéressé à être jugé sans citation préalable.

Art. 390. -- La citation est délivrée dans des délais et formes prévus par les articles 550 et suivants.

Art. 390-1. -- Vaut citation à personne la convocation en justice notifiée au prévenu, sur instructions du procureur de la République et dans les délais prévus par l'article 552, soit par un greffier ou un officier ou agent de police judiciaire, soit, si le prévenu est détenu, par le chef de l'établissement pénitentiaire.

La convocation énonce le fait poursuivi, vise le texte de loi qui le réprime et indique le tribunal saisi, le lieu, la date et l'heure de l'audience. Elle précise, en outre, que le prévenu peut se faire assister d'un avocat.

Elle est constatée par un procès-verbal signé par le prévenu qui en reçoit copie.

Art. 393. -- En matière correctionnelle, après avoir constaté l'identité de la personne qui lui est déférée, lui avoir fait connaître les faits qui lui sont reprochés et avoir recueilli ses déclarations si elle en fait la demande, le procureur de la République peut, s'il estime qu'une information n'est pas nécessaire, procéder comme il est dit aux articles 394 à 396.

Le procureur de la République informe alors la personne déférée devant lui qu'elle a le droit à l'assistance d'un avocat de son choix ou commis d'office. L'avocat choisi ou, dans le cas d'une demande de commission d'office, le bâtonnier de l'Ordre des avocats, en est avisé sans délai.

L'avocat peut consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec le prévenu.

Mention de ces formalités est faite au procès-verbal à peine de nullité de la procédure.

Art. 395 . --  Si le maximum de l'emprisonnement prévu par la loi est au moins égal à deux ans, le procureur de la République, lorsqu'il lui apparaît que les charges réunies sont suffisantes et que l'affaire est en l'état d'être jugée, peut, s'il estime que les éléments de l'espèce justifient une comparution immédiate, traduire le prévenu sur-le-champ devant le tribunal.

En cas de délit flagrant, si le maximum de l'emprisonnement prévu par la loi est au moins égal à six mois, le procureur de la République, s'il estime que les éléments de l'espèce justifient une comparution immédiate, peut traduire le prévenu sur-le-champ devant le tribunal.

Le prévenu est retenu jusqu'à sa comparution qui doit avoir lieu le jour même ; il est conduit sous escorte devant le tribunal.

Art. 397. -- Lorsque le tribunal est saisi en application des articles 395 et 396, troisième alinéa, le président constate l'identité du prévenu, son avocat ayant été avisé. Il avertit le prévenu qu'il ne peut être jugé le jour même qu'avec son accord  ; toutefois, cet accord ne peut être recueilli qu'en présence de son avocat ou, si celui-ci n'est pas présent, d'un avocat désigné d'office sur sa demande par le bâtonnier.

Si le prévenu consent à être jugé séance tenante, mention en est faite dans les notes d'audience.

Art. 397-2. -- A la demande des parties ou d'office, le tribunal peut commettre par jugement l'un de ses membres ou l'un des juges d'instruction de la juridiction désigné dans les conditions de l'article 83, alinéa premier, pour procéder à un supplément d'information ; les dispositions de l'article 463 sont applicables.

Le tribunal peut, dans les mêmes conditions, s'il estime que la complexité de l'affaire nécessite des investigations supplémentaires approfondies, renvoyer le dossier au procureur de la République.

Le tribunal statue au préalable sur le maintien du prévenu en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant un juge d'instruction. Cette comparution doit avoir lieu le jour même, à défaut de quoi le prévenu est remis en liberté d'office.

Art. 397-3. -- Dans tous les cas prévus par le présent paragraphe, le tribunal peut, conformément aux dispositions de l'article 141-1, placer ou maintenir le prévenu sous contrôle judiciaire. Cette décision est exécutoire par provision.

Dans les cas prévus par les articles 395 et suivants, le tribunal peut également placer ou maintenir le prévenu en détention provisoire par décision spécialement motivée. La décision prescrivant la détention est rendue suivant les modalités prévues par les articles 135, 137-3, premier alinéa et 464-1 et est motivée par référence aux dispositions des 1°, 2° et 3° de l'article 144. Elle est exécutoire par provision.

Lorsque le prévenu est en détention provisoire, le jugement au fond doit être rendu dans les deux mois qui suivent le jour de sa première comparution devant le tribunal. Faute de décision au fond à l'expiration de ce délai, il est mis fin à la détention provisoire. Le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté.

Lorsqu'il a été fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 397-1, le délai prévu à l'alinéa précédent est porté à quatre mois.

Art. 397-4. -- Dans le cas où le prévenu est condamné à un emprisonnement sans sursis, le tribunal saisi en application des articles 395 et suivants peut, quelle que soit la durée de la peine, ordonner, d'après les éléments de l'espèce, le placement ou le maintien en détention par décision spécialement motivée . Les dispositions des articles 148-2 et 471, deuxième alinéa, sont applicables.

La cour statue dans les quatre mois de l'appel du jugement rendu sur le fond interjeté par le prévenu détenu, faute de quoi celui-ci, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté.

Si la juridiction estime devoir décerner un mandat d'arrêt, les dispositions de l'article 465 sont applicables, quelle que soit la durée de la peine prononcée.

Art. 397-5. -- Dans tous les cas prévus par le présent paragraphe et par dérogation aux dispositions des articles 550 et suivants, les témoins peuvent être cités sans délai et par tout moyen. Lorsqu'ils sont requis verbalement par un officier de police judiciaire ou un agent de la force publique, ils sont tenus de comparaître sous les sanctions portées aux articles 438 à 441.

Art. 397-6. -- Les dispositions des articles 393 à 397-5 ne sont applicables ni aux mineurs, ni en matière de délits de presse, de délits politiques ou d'infractions dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale.

Art. 420-1. -- Par dérogation aux dispositions qui précèdent, toute personne qui se prétend lésée peut se constituer partie civile, directement ou par son avocat, par lettre recommandée avec avis de réception ou par télécopie parvenue au tribunal vingt-quatre heures au moins avant la date de l'audience, lorsqu'elle demande soit la restitution d'objets saisis, soit des dommages-intérêts ; elle joint à sa demande toutes les pièces justificatives de son préjudice. Ces documents sont immédiatement joints au dossier.

Avec l'accord du procureur de la République, la demande de restitution ou de dommages-intérêts peut également être formulée par la victime, au cours de l'enquête de police, auprès d'un officier ou d'un agent de police judiciaire, qui en dresse procès-verbal. Cette demande vaut constitution de partie civile si l'action publique est mise en mouvement et que le tribunal correctionnel ou de police est directement saisi.

Dans les cas prévus aux deux alinéas précédents, la partie civile n'est pas tenue de comparaître.

En cas de contestation sur la propriété des objets dont la restitution est demandée, ou si le tribunal ne trouve pas dans la demande, dans les pièces jointes à celle-ci et dans le dossier, les motifs suffisants pour statuer, la décision sur les seuls intérêts civils est renvoyée à une audience ultérieure à laquelle toutes les parties sont citées à la diligence du ministère public.

Art. 500 . --  En cas d'appel d'une des parties pendant les délais ci-dessus, les autres parties ont un délai supplémentaire de cinq jours pour interjeter appel.

Art. 501 . --  Lorsque le tribunal statue sur une demande de mise en liberté conformément aux articles 148-1 et 148-2 ainsi que lorsqu'il statue sur une demande de mainlevée ou de modification de contrôle judiciaire, l'appel doit être formé dans un délai de vingt-quatre heures.

Art. 502. -- La déclaration d'appel doit être faite au greffier de la juridiction qui a rendu la décision attaquée.

Elle doit être signée par le greffier et par l'appelant lui-même, ou par un avoué près la juridiction qui a statué, ou par un avocat, ou par un fondé de pouvoir spécial ; dans ce dernier cas, le pouvoir est annexé à l'acte dressé par le greffier. Si l'appelant ne peut signer, il en sera fait mention par le greffier.

Elle est inscrite sur un registre public à ce destiné et toute personne a le droit de s'en faire délivrer une copie.

Art. 505 . --  Le procureur général forme son appel par signification, soit au prévenu, soit à la personne civilement responsable du délit, dans le délai de deux mois à compter du jour du prononcé du jugement.

Art. 522 . --  Est compétent le tribunal de police du lieu de commission ou de constatation de la contravention ou celui de la résidence du prévenu.

Est également compétent le tribunal de police du siège de l'entreprise détentrice du véhicule en cas de contravention, soit aux règles relatives au chargement ou à l'équipement de ce véhicule, soit aux conditions de travail dans les transports routiers, soit à la coordination des transports.

Les articles 383 à 387 sont applicables au jugement des infractions de la compétence du tribunal de police.

Art. 543. - Sont applicables à la procédure devant le tribunal de police les articles 473 à 486 concernant les frais de justice et dépens, la restitution des objets placés sous la main de la justice et la forme des jugements.

Toutefois, les dispositions de l'article 480-1 ne sont applicables qu'aux condamnés pour contraventions de la cinquième classe.

Art. 557 . --  Si la copie a été remise à une personne résidant au domicile de celui que l'exploit concerne , l'huissier informe sans délai l'intéressé de cette remise, par lettre recommandée avec avis de réception . Lorsqu'il résulte de l'avis de réception, signé par l'intéressé, que celui-ci a reçu la lettre recommandée de l'huissier, l'exploit remis à domicile produit les mêmes effets que s'il avait été délivré à personne.

L'huissier peut également envoyer à l'intéressé par lettre simple une copie de l'acte accompagnée d'un récépissé que le destinataire est invité à réexpédier par voie postale ou à déposer à l'étude de l'huissier, revêtu de sa signature. Lorsque ce récépissé signé a été renvoyé, l'exploit remis à domicile produit les mêmes effets que s'il avait été remis à personne.

Le domicile de la personne morale s'entend du lieu de son siège.

Art. 558 . --  Si l'huissier ne trouve personne au domicile de celui que l'exploit concerne, il vérifie immédiatement l'exactitude de ce domicile.

Lorsque le domicile indiqué est bien celui de l'intéressé, l'huissier mentionne dans l'exploit ses diligences et constatations, puis il remet une copie de cet exploit à la mairie, au maire ou, à défaut, à un adjoint ou à un conseiller municipal délégué, ou au secrétaire de mairie.

Il informe sans délai de cette remise l'intéressé, par lettre recommandée avec avis de réception , en lui faisant connaître qu'il doit retirer immédiatement la copie de l'exploit signifié à la mairie indiquée . Si l'exploit est une signification de jugement rendu par itératif défaut, la lettre recommandée mentionne la nature de l'acte signifié et le délai d'appel.

Lorsqu'il résulte de l'avis de réception, signé par l'intéressé, que celui-ci a reçu la lettre recommandée de l'huissier, l'exploit remis à la mairie produit les mêmes effets que s'il avait été délivré à personne.

L'huissier peut également envoyer à l'intéressé par lettre simple une copie de l'acte accompagnée d'un récépissé que le destinataire est invité à réexpédier par voie postale ou à déposer à l'étude de l'huissier, revêtu de sa signature. Lorsque ce récépissé a été renvoyé, l'exploit remis à la mairie produit les mêmes effets que s'il avait été remis à personne.

Si l'exploit est une citation à comparaître, il ne pourra produire les effets visés à l'alinéa précédent que si le délai entre le jour où l'avis de réception est signé par l'intéressé et le jour indiqué pour la comparution devant le tribunal correctionnel ou de police est au moins égal à celui fixé, compte tenu de l'éloignement du domicile de l'intéressé, par l'article 552.

Art. 560 . --  Lorsqu'il n'est pas établi que l'intéressé a reçu la lettre qui lui a été adressée par l'huissier conformément aux dispositions des articles 557 et 558, ou lorsque l'exploit a été délivré au parquet, un officier ou un agent de police judiciaire peut être requis par le procureur de la République à l'effet de procéder à des recherches en vue de découvrir l'adresse de l'intéressé. En cas de découverte de ce dernier, l'officier ou l'agent de police judiciaire lui donne connaissance de l'exploit, qui produit alors les mêmes effets que s'il avait été délivré à personne.

Dans tous les cas, l'officier ou l'agent de police judiciaire dresse procès-verbal de ses recherches et le transmet sans délai au procureur de la République.

Lorsqu'il s'agit d'une citation à prévenu, le procureur de la République peut également donner l'ordre à la force publique de rechercher l'intéressé. En cas de découverte de ce dernier, il en est immédiatement avisé et peut adresser, par tout moyen, une copie de l'exploit pour notification par un officier ou un agent de police judiciaire. Cette notification vaut signification à personne. Lorsqu'un prévenu visé par un acte de citation n'a pu être découvert avant la date fixée pour l'audience, l'ordre de recherche peut être maintenu. En cas de découverte, le procureur de la République peut faire notifier à l'intéressé, en application de l'article 390-1, une convocation en justice.

Le procureur de la République peut également requérir de toute administration, entreprise, établissement ou organisme de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative, sans qu'il soit possible de lui opposer le secret professionnel, de lui communiquer tous renseignements en sa possession aux fins de déterminer l'adresse du domicile ou de la résidence du prévenu.

Art. 626-4 . --  Si elle estime la demande justifiée, la commission procède conformément aux dispositions ci-après :

- Si le réexamen du pourvoi du condamné, dans des conditions conformes aux dispositions de la convention, est de nature à remédier à la violation constatée par la Cour européenne des droits de l'homme, la commission renvoie l'affaire devant la Cour de cassation qui statue en assemblée plénière ;

- Dans les autres cas, la commission renvoie l'affaire devant une juridiction de même ordre et de même degré que celle qui a rendu la décision litigieuse, sous réserve de l'application des dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article 625.

Art. 627-21. -- Lorsque, après une décision de mise en accusation, l'accusé n'a pu être saisi ou ne se représente pas dans les dix jours de la signification qui en a été faite à son domicile, ou lorsque après s'être présenté ou avoir été saisi, il s'est évadé, le président de la cour d'assises ou, en son absence, le président du tribunal du lieu où se tiennent les assises, ou le magistrat qui le remplace, rend une ordonnance portant qu'il est tenu de se représenter dans un nouveau délai de dix jours, sinon, qu'il sera déclaré rebelle à la loi, qu'il sera suspendu de l'exercice de ses droits de citoyen, que ses biens seront séquestrés pendant l'instruction de la contumace, que toute action en justice lui sera interdite pendant le même temps, qu'il sera procédé contre lui et que toute personne est tenue d'indiquer le lieu où il se trouve.

Cette ordonnance fait de plus mention du crime et de l'ordonnance de prise de corps.

Art. 628. -- Dans le délai de huit jours, cette ordonnance est insérée dans l'un des journaux du département et affichée à la porte du domicile de l'accusé, à celle de la mairie de sa commune et à celle de l'auditoire de la cour d'assises.

Le procureur général adresse une expédition de cette ordonnance au directeur des domaines du domicile du contumax.

Art. 629. -- Après un délai de dix jours, il est procédé au jugement de la contumace.

Art. 630. -- Aucun avocat, aucun avoué ne peut se présenter pour l'accusé contumax. Toutefois, si l'accusé est dans l'impossibilité absolue de déférer à l'injonction contenue dans l'ordonnance prévue par l'article 627-21, ses parents ou ses amis peuvent proposer son excuse.

Art. 631. -- Si la cour trouve l'excuse légitime, elle ordonne qu'il soit sursis au jugement de l'accusé et, s'il y a lieu, au séquestre de ses biens pendant un temps qui est fixé eu égard à la nature de l'excuse et à la distance des lieux.

Art. 632. -- Hors ce cas, il est procédé à la lecture de la décision de renvoi à la cour d'assises, de l'exploit de signification de l'ordonnance ayant pour objet la représentation du contumax et des procès-verbaux dressés pour en constater la publication et l'affichage.

Après cette lecture, la cour, sur les réquisitions du procureur général, prononce sur la contumace.

Si l'une des formalités prescrites par les articles 627-21 et 628 a été omise, la cour déclare nulle la procédure de contumace et ordonne qu'elle sera recommencée à partir du plus ancien acte illégal.

Dans le cas contraire, la cour prononce sans l'assistance de jurés sur l'accusation. La cour statue ensuite sur les intérêts civils.

Art. 633. -- Si le contumax est condamné, ses biens, s'ils n'ont pas fait l'objet d'une confiscation , sont maintenus sous séquestre et le compte de séquestre est rendu à qui il appartiendra après que la condamnation est devenue irrévocable par l'expiration du délai donné pour purger la contumace.

Art. 634. -- Extrait de l'arrêt de condamnation est, dans le plus bref délai, à la diligence du procureur général, inséré dans l'un des journaux du département du dernier domicile du condamné.

Il est affiché, en outre, à la porte de ce dernier domicile, à la porte de la mairie de la commune où le crime a été commis et à celle du prétoire de la cour d'assises.

Pareil extrait est adressé au directeur des domaines du domicile du contumax.

Art. 635. -- À partir de l'accomplissement des mesures de publicité prescrites par l'article précédent, le condamné est frappé de toutes les déchéances prévues par la loi.

Art. 636. -- Le pourvoi en cassation n'est pas ouvert au contumax.

Art. 637. -- En aucun cas, la contumace d'un accusé ne suspend ni ne retarde de plein droit l'instruction à l'égard de ses coaccusés présents.

La cour peut ordonner, après le jugement de ceux-ci, la remise des effets déposés au greffe comme pièces à conviction, lorsqu'ils sont réclamés par les propriétaires ou ayants droit. Elle peut, aussi, ne l'ordonner qu'à charge de les représenter s'il y a lieu.

Cette remise est précédée d'un procès-verbal de description, dressé par le greffier.

Art. 638. -- Durant le séquestre, il peut être accordé des secours à la femme, aux enfants, aux ascendants du contumax s'ils sont dans le besoin.

Il est statué par ordonnance du président du tribunal du domicile du contumax, après avis du directeur des domaines.

Art. 639. -- Si le contumax se constitue prisonnier ou s'il est arrêté avant que la peine soit éteinte par prescription , l'arrêt et les procédures faites depuis l'ordonnance de se représenter sont anéantis de plein droit et il est procédé à son égard dans la forme ordinaire.

Dans le cas où l'arrêt de condamnation avait prononcé une confiscation au profit de l'État, les mesures prises pour assurer l'exécution de cette peine restent valables. Si la décision qui intervient après la représentation du contumax ne maintient pas la peine de la confiscation, il est fait restitution à l'intéressé du produit net de la réalisation des biens aliénés et, dans l'état où ils se trouvent, des biens non liquidés.

Art. 640. -- Dans le cas prévu à l'article précédent, si, pour quelque cause que ce soit, des témoins ne peuvent être produits aux débats, leurs dépositions écrites et, s'il est nécessaire, les réponses écrites des autres accusés du même crime sont lues à l'audience ; il en est de même de toutes les autres pièces qui sont jugées, par le président, utiles à la manifestation de la vérité.

Art. 641. -- La cour peut ordonner que les mesures de publicité prescrites par l'article 634 s'appliquent à toute décision de justice rendue au profit du contumax.

Art. 663 . --  Lorsque deux juges d'instruction, appartenant à un même tribunal ou à des tribunaux différents, se trouvent simultanément saisis d'infractions connexes ou d'infractions différentes en raison desquelles une même personne ou les mêmes personnes sont mises en examen, le ministère public peut, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et nonobstant les dispositions des articles 43, 52 et 382, requérir l'un des juges de se dessaisir au profit de l'autre. Le dessaisissement a lieu si les deux juges en sont d'accord. En cas de désaccord, il est fait application, s'il y a lieu, des dispositions de l'article 664.

Lorsqu'un condamné à une peine privative de liberté est détenu au siège de la juridiction qui a prononcé cette condamnation, définitive ou non, le procureur de la République, le juge d'instruction, les tribunaux et les cours d'appel de ce lieu de détention auront compétence, en dehors des règles prescrites par les articles 43, 52 et l'alinéa premier de l'article 382, pour connaître de toutes les infractions qui lui sont imputées.

Art. 706-11. -- Le fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes.

Le fonds peut exercer ses droits par toutes voies utiles, y compris par voie de constitution de partie civile devant la juridiction répressive et ce, même pour la première fois, en cause d'appel. Lorsqu'il se constitue partie civile par lettre recommandée, le fonds peut demander le remboursement des sommes mises à sa charge sans limitation de plafond nonobstant les dispositions de l'article 420-1.

Pour l'application des dispositions de l'article 706-9 et du présent article, le fonds peut demander au procureur de la République de requérir de toute personne ou administration la communication de renseignements sur la situation professionnelle, financière, fiscale ou sociale des personnes ayant à répondre du dommage. Le secret professionnel ne peut être opposé au procureur de la République. Les renseignements ainsi recueillis ne peuvent être utilisés à d'autres fins que celles prévues au présent article ; leur divulgation est interdite.

Art. 706-16 . --  Les actes de terrorisme incriminés par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal, ainsi que les infractions connexes sont poursuivis, instruits et jugés selon les règles du présent code sous réserve des dispositions du présent titre.

Ces dispositions sont également applicables à la poursuite, à l'instruction et au jugement des actes de terrorisme commis à l'étranger lorsque la loi française est applicable en vertu des dispositions de la section 2 du chapitre III du titre I er du livre I er du code pénal.

Art. 706-17. -- Pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-16, le procureur de la République, le juge d'instruction, le tribunal correctionnel et la cour d'assises de Paris exercent une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application des articles 43, 52, 382 et du second alinéa de l'article 663.

En ce qui concerne les mineurs, le procureur de la République, le juge d'instruction, le juge des enfants, le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs de Paris exercent une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application des dispositions de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

Lorsqu'ils sont compétents pour la poursuite et l'instruction des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-16, le procureur de la République et le juge d'instruction de Paris exercent leurs attributions sur toute l'étendue du territoire national.

L'instruction des actes de terrorisme définis aux 5° à 7° de l'article 421-1 du code pénal et à l'article 421-2-2 du même code peut être confiée, le cas échéant dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 83, à un magistrat du tribunal de grande instance de Paris affecté aux formations d'instruction spécialisées en matière économique et financière en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 704.

Art. 706-23 . --  Pour l'application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l'enquête ou de l'instruction relatives à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-16 l'exigent, la garde à vue d'une personne majeure peut faire l'objet d'une prolongation supplémentaire de quarante-huit heures.

Cette prolongation est autorisée soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit, dans les cas prévus par les articles 72 et 154, par le juge d'instruction.

L'intéressé doit être présenté à l'autorité qui statue sur la prolongation préalablement à sa décision.

Dans le cas où la prolongation est décidée, un examen médical est de droit. Le procureur de la République ou, dans les cas prévus par les articles 72 et 154, le juge d'instruction est compétent pour désigner le médecin chargé de cet examen.

Art. 706-24 . --  Par dérogation aux dispositions de l'article 76, si les nécessités de l'enquête relatives à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-16 l'exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la République, décider que les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction pourront être faites sans l'assentiment de la personne chez laquelle elles ont lieu. Si ces opérations ne concernent pas des locaux d'habitation, le juge des libertés et de la détention peut autoriser leur réalisation en dehors des heures prévues à l'article 59.

Si les nécessités de l'enquête de flagrance l'exigent, les visites, perquisitions et saisies peuvent être opérées en dehors des heures prévues par l'article 59.

Les opérations prévues à l'alinéa précédent doivent, à peine de nullité, être autorisées sur requête du procureur de la République par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance, les autorisations sont données pour des perquisitions déterminées. Chaque autorisation fait l'objet d'une décision écrite, précisant la qualification de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être effectuées, et motivée par référence aux éléments de fait justifiant que ces opérations sont nécessaires. Celles-ci sont effectuées sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales.

Ces opérations ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-16.

Pour l'application des dispositions du présent article, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance est le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations sont effectuées ou le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, ce dernier exerçant alors ses attributions sur toute l'étendue du territoire national.

Art. 706-24-1. -- En cas d'urgence, si les nécessités de l'instruction l'exigent, les visites, perquisitions et saisies peuvent être effectuées en dehors des heures prévues par l'article 59, pour la recherche et la constatation des actes de terrorisme prévus par l'article 706-16 et punis d'au moins dix ans d'emprisonnement :

1° Lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit flagrant ;

2° Lorsqu'il existe un risque immédiat de disparition des preuves ou des indices matériels ;

3° Lorsqu'il existe des présomptions qu'une ou plusieurs personnes se trouvant dans les locaux où la perquisition doit avoir lieu se préparent à commettre de nouveaux actes de terrorisme.

A peine de nullité, ces opérations doivent être prescrites par une ordonnance motivée du juge d'instruction précisant la nature de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquelles ces opérations doivent être accomplies, et comportant l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision par référence aux seules conditions prévues par les 1°, 2° et 3° du présent article.

Cette ordonnance est notifiée par tout moyen au procureur de la République. Elle n'est pas susceptible d'appel.

Les dispositions du quatrième alinéa de l'article 706-24 sont applicables.

Art. 706-24-3. -- Pour l'instruction du délit d'association de malfaiteurs prévu par l'article 421-5 du code pénal, la durée totale de la détention provisoire prévue par le deuxième alinéa de l'article 145-1 est portée à trois ans.

Art. 706-28. -- Pour la recherche et la constatation des infractions visées à l'article 706-26, les visites, perquisitions et saisies prévues par l'article 59 peuvent être opérées en dehors des heures prévues par cet article à l'intérieur des locaux où l'on use en société de stupéfiants ou dans lesquels sont fabriqués, transformés ou entreposés illicitement des stupéfiants.

Les opérations prévues à l'alinéa précédent doivent, à peine de nullité, être autorisées, sur requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, lorsqu'il s'agit de les effectuer dans une maison d'habitation ou un appartement, à moins qu'elles ne soient autorisées par le juge d'instruction. Chaque autorisation fait l'objet d'une décision écrite, précisant la qualification de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être effectuées, et motivée par référence aux éléments de fait justifiant que ces opérations sont nécessaires. Celles-ci sont effectuées sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales.

Les actes prévus au présent article ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées à l'article 706-26.

Art. 706-29 . --  Pour l'application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l'enquête ou de l'instruction relative à l'une des infractions visées par l'article 706-26 l'exigent, la garde à vue d'une personne peut faire l'objet d'une prolongation supplémentaire de quarante-huit heures.

Cette prolongation est autorisée soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit, dans les cas prévus par les articles 72 et 154, par le juge d'instruction.

La personne gardée à vue doit être présentée à l'autorité qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. A titre exceptionnel, la prolongation peut être accordée par décision écrite et motivée sans présentation préalable.

Dès le début de la garde à vue, le procureur de la République ou le juge d'instruction doit désigner un médecin expert qui examine toutes les vingt-quatre heures la personne gardée à vue et délivre après chaque examen un certificat médical motivé qui est versé au dossier. La personne retenue est avisée par l'officier de police judiciaire du droit de demander d'autres examens médicaux. Ces examens médicaux sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée, en cas de refus d'émargement, il en est fait mention.

Art. 706-42 . --  Sans préjudice des règles de compétence applicables lorsqu'une personne physique est également soupçonnée ou poursuivie, sont compétents :

1° Le procureur de la République et les juridictions du lieu de l'infraction ;

2° Le procureur de la République et les juridictions du lieu où la personne morale a son siège.

Ces dispositions ne sont pas exclusives de l'application éventuelle des règles particulières de compétence prévues par les articles 705 et 706-17 relatifs aux infractions économiques et financières et aux actes de terrorisme.

Art. 706-47. -- Les personnes poursuivies pour le meurtre ou l'assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie ou pour l'une des infractions visées aux articles 222-23 à 222-32 et 227-22 à 227-27 du code pénal doivent être soumises, avant tout jugement sur le fond, à une expertise médicale. L'expert est interrogé sur l'opportunité d'une injonction de soins dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire.

Cette expertise peut être ordonnée dès le stade de l'enquête par le procureur de la République.

Cette expertise est communiquée à l'administration pénitentiaire en cas de condamnation à une peine privative de liberté, afin de faciliter le suivi médical et psychologique en détention prévu par l'article 718.

Art. 706-61 . --  La personne mise en examen ou renvoyée devant la juridiction de jugement peut demander à être confrontée avec un témoin entendu en application des dispositions de l'article 706-58 par l'intermédiaire d'un dispositif technique permettant l'audition du témoin à distance ou à faire interroger ce témoin par son avocat par ce même moyen. La voix du témoin est alors rendue non identifiable par des procédés techniques appropriés.

Art. 707 . --  Le ministère public et les parties poursuivent l'exécution de la sentence chacun en ce qui le concerne.

Néanmoins, les poursuites pour le recouvrement des amendes et confiscations sont faites au nom du procureur de la République, par le percepteur.

Art. 712 . --  Dans toutes les hypothèses où il paraît nécessaire d'entendre un condamné qui se trouve détenu, la juridiction saisie peut donner commission rogatoire au président du tribunal de grande instance le plus proche du lieu de détention.

Ce magistrat peut déléguer l'un des juges du tribunal qui procède à l'audition du détenu par procès-verbal .

Art. 721. -- Une réduction de peine peut être accordée aux condamnés détenus en exécution d'une ou plusieurs peines privatives de liberté s'ils ont donné des preuves suffisantes de bonne conduite.

Cette réduction est accordée par le juge de l'application des peines après avis de la commission de l'application des peines, sans qu'elle puisse excéder trois mois par année d'incarcération et sept jours par mois pour une durée d'incarcération moindre.

Elle est prononcée en une seule fois si l'incarcération est inférieure à une année et par fractions annuelles dans le cas contraire. Toutefois, pour l'incarcération subie sous le régime de la détention provisoire, elle est prononcée, le cas échéant, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive.

Dans l'année suivant son octroi, et en cas de mauvaise conduite du condamné en détention, la réduction de peine peut être rapportée en tout ou en partie par le juge de l'application des peines après avis de la commission de l'application des peines.

Pour l'application du présent article, la situation de chaque condamné est examinée au moins une fois par an.

Art. 721-1. -- Après un an de détention, une réduction supplémentaire de la peine peut être accordée aux condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale, notamment en passant avec succès un examen scolaire, universitaire ou professionnel traduisant l'acquisition de connaissances nouvelles, en justifiant de progrès réels dans le cadre d'un enseignement ou d'une formation ou en s'efforçant d'indemniser leurs victimes. Sauf décision du juge de l'application des peines, prise après avis de la commission de l'application des peines, les personnes condamnées à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins, et qui refusent de suivre un traitement pendant leur incarcération, ne sont pas considérées comme manifestant des efforts sérieux de réadaptation sociale.

Cette réduction, accordée par le juge de l'application des peines après avis de la commission de l'application des peines, ne peut excéder, si le condamné est en état de récidive légale, un mois par année d'incarcération ou deux jours par mois lorsque la durée d'incarcération restant à subir est inférieure à une année. Si le condamné n'est pas en état de récidive légale, ces limites sont respectivement portées à deux mois et à quatre jours. Les dispositions du troisième alinéa de l'article 721 sont applicables.

Sauf décision du juge de l'application des peines, prise après avis de la commission de l'application des peines, les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux personnes condamnées pour l'une des infractions mentionnées à l'article 706-47 si, lorsque leur condamnation est devenue définitive, le casier judiciaire faisait mention d'une telle condamnation.

Ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945
relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France

Art. 21. -- [ Cet article est modifié par l'article 16 du projet de loi n°  823 en cours de discussion ] I. --  Toute personne qui, alors qu'elle se trouvait en France ou dans l'espace international des zones aéroportuaires situées sur le territoire national, aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d'un étranger en France ou dans l'espace international précité sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30 000 €.

Sera puni des mêmes peines celui qui, quelle que soit sa nationalité, aura commis le délit défini au premier alinéa du présent paragraphe alors qu'il se trouvait sur le territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 autre que la France.

Sera puni des mêmes peines celui qui, alors qu'il se trouvait en France ou dans l'espace international mentionné au premier alinéa, aura facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d'un étranger sur le territoire d'un autre Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990. Les poursuites ne pourront être exercées à son encontre que sur une dénonciation officielle ou sur une attestation des autorités compétentes de l'Etat partie concerné.

Les infractions prévues aux trois premiers alinéas sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 750 000 € d'amende lorsqu'elles sont commises en bande organisée.

Aucune poursuite ne pourra être exercée contre une personne justifiant qu'elle a été jugée définitivement à l'étranger pour les mêmes faits et, en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite.

II. --  En cas de condamnation pour l'une des infractions visées au I, le tribunal pourra en outre prononcer l'interdiction de séjour, ainsi que la suspension du permis de conduire pendant une durée de trois ans au plus. Cette durée pourra être doublée en cas de récidive.

Le tribunal pourra également prononcer le retrait temporaire ou définitif de l'autorisation administrative d'exploiter soit des services occasionnels à la place ou collectifs, soit un service régulier, ou un service de navettes de transports internationaux.

Tout véhicule ayant servi à commettre l'infraction par voie terrestre, fluviale, maritime ou aérienne pourra être confisqué.

Le tribunal pourra également prononcer l'interdiction d'exercer directement ou par personne interposée, pendant une durée maximum de cinq ans, l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise.

Toute violation de cette interdiction sera punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 30 000 €, ou de l'une de ces deux peines seulement.

Le tribunal pourra aussi prononcer la confiscation de tout produit appartenant au condamné et provenant directement ou indirectement de l'infraction.

Les frais résultant des mesures nécessaires à l'exécution de la confiscation seront à la charge du condamné. Ils seront recouvrés comme frais de justice.

Le tribunal pourra également prononcer à l'encontre du condamné étranger l'interdiction du territoire français pour une durée ne pouvant excéder dix ans.

L'interdiction du territoire français entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement.

III. --  Sans préjudice de l'article 19, ne peut donner lieu à des poursuites pénales sur le fondement du présent article l'aide au séjour irrégulier d'un étranger lorsqu'elle est le fait :

1° Des ascendants ou descendants de l'étranger, de leur conjoint, des frères et soeurs de l'étranger ou de leur conjoint ;

2° Du conjoint de l'étranger, ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui.

Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse

Art. 24 . --  Seront punis de cinq ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article précédent, auront directement provoqué, dans le cas où cette provocation n'aurait pas été suivie d'effet, à commettre l'une des infractions suivantes :

1° Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne et les agressions sexuelles, définies par le livre II du code pénal ;

2° Les vols, les extorsions et les destructions, dégradations et détériorations volontaires dangereuses pour les personnes, définis par le livre III du code pénal.

Ceux qui, par les mêmes moyens, auront directement provoqué à l'un des crimes et délits portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation prévus par le titre I er du livre IV du code pénal, seront punis des mêmes peines.

Seront punis de la même peine ceux qui, par l'un des moyens énoncés en l'article 23, auront fait l'apologie des crimes visés au premier alinéa, des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou des crimes et délits de collaboration avec l'ennemi.

Seront punis des peines prévues par l'alinéa 1 er ceux qui, par les mêmes moyens, auront provoqué directement aux actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal, ou qui en auront fait l'apologie.

Tous cris ou chants séditieux proférés dans les lieux ou réunions publics seront punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 5° classe.

Ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, seront punis d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement.

En cas de condamnation pour l'un des faits prévus par l'alinéa précédent, le tribunal pourra en outre ordonner :

1° Sauf lorsque la responsabilité de l'auteur de l'infraction est retenue sur le fondement de l'article 42 et du premier alinéa de l'article 43 de la présente loi ou des trois premiers alinéas de l'article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, la privation des droits énumérés aux 2° et 3° de l'article 131-26 du code pénal pour une durée de cinq ans au plus ;

2° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

Art. 24 bis. --  Seront punis des peines prévues par le sixième alinéa de l'article 24 ceux qui auront contesté, par un des moyens énoncés à l'article 23, l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité tels qu'ils sont définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une organisation déclarée criminelle en application de l'article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale.

Le tribunal pourra en outre ordonner :

1° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

abrogé.

Art. 32 . --  La diffamation commise envers les particuliers par l'un des moyens énoncés en l'article 23 sera punie d'une amende de 12 000 euros.

La diffamation commise par les mêmes moyens envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée sera punie d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement.

En cas de condamnation pour l'un des faits prévus par l'alinéa précédent, le tribunal pourra en outre ordonner :

1° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

abrogé.

Art. 33 . --  L'injure commise par les mêmes moyens envers les corps ou les personnes désignés par les articles 30 et 31 de la présente loi sera punie d'une amende de 12 000 euros.

L'injure commise de la même manière envers les particuliers, lorsqu'elle n'aura pas été précédée de provocations, sera punie d'une amende de 12 000 euros.

Sera punie de six mois d'emprisonnement et de 22 500 euros d'amende l'injure commise, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

En cas de condamnation pour l'un des faits prévus par l'alinéa précédent, le tribunal pourra en outre ordonner :

1° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

abrogé.

Art. 65 . --  L'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescriront après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait.

Toutefois, avant l'engagement des poursuites, seules les réquisitions aux fins d'enquête seront interruptives de prescription. Ces réquisitions devront, à peine de nullité, articuler et qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels l'enquête est ordonnée.

Les prescriptions commencées à l'époque de la publication de la présente loi, et pour lesquelles il faudrait encore, suivant les lois existantes, plus de trois mois à compter de la même époque, seront, par ce laps de trois mois, définitivement accomplies.

Loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution

Art. 67. -- Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement.

La mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire.

Art. 68. -- Une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire ou d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire. Il en est de même en cas de défaut de paiement d'une lettre de change acceptée, d'un billet à ordre, d'un chèque ou d'un loyer resté impayé dès lors qu'il résulte d'un contrat écrit de louage d'immeubles.

Art. 69. --  L'autorisation est donnée par le juge de l'exécution. Toutefois, elle peut être accordée par le président du tribunal de commerce lorsque, demandée avant tout procès, elle tend à la conservation d'une créance relevant de la compétence de la juridiction commerciale.

A peine de nullité, le juge précise l'objet de la mesure autorisée.

En autorisant la mesure conservatoire, le juge peut décider de réexaminer sa décision ou les modalités de son exécution au vu d'un débat contradictoire.

Art. 70. -- A peine de caducité de la mesure conservatoire, le créancier doit, dans les conditions et délais fixés par décret en Conseil d'État, engager ou poursuivre une procédure permettant d'obtenir un titre exécutoire s'il n'en possède pas.

Art. 71. -- La notification au débiteur de l'exécution de la mesure conservatoire interrompt la prescription de la créance cause de cette mesure.

Art. 72. -- Même lorsqu'une autorisation préalable n'est pas requise, le juge peut, à tout moment, au vu des éléments qui sont fournis par le débiteur, le créancier entendu ou appelé, donner mainlevée de la mesure conservatoire s'il apparaît que les conditions prescrites par l'article 67 ne sont pas réunies.

A la demande du débiteur, le juge peut, le créancier entendu ou appelé, substituer à la mesure conservatoire initialement prise toute autre mesure propre à sauvegarder les intérêts des parties.

La constitution d'une caution bancaire irrévocable conforme à la mesure sollicitée dans la saisie entraîne mainlevée de la mesure de sûreté, sous réserve des dispositions de l'article 70.

Art. 73. -- Les frais occasionnés par une mesure conservatoire sont à la charge du débiteur sauf décision contraire du juge à l'issue de la procédure.

Lorsque la mainlevée a été ordonnée par le juge, le créancier peut être condamné à réparer le préjudice causé par la mesure conservatoire.

Art. 74. -- La saisie conservatoire peut porter sur tous les biens mobiliers, corporels ou incorporels, appartenant au débiteur. Elle les rend indisponibles.

Art. 75. -- Lorsque la saisie porte sur une créance ayant pour objet une somme d'argent, l'acte de saisie la rend indisponible à concurrence du montant autorisé par le juge ou, lorsque cette autorisation n'est pas nécessaire, à concurrence du montant pour lequel la saisie est pratiquée. La saisie emporte de plein droit consignation des sommes indisponibles et produit les effets prévus à l'article 2075-1 du code civil.

Sous réserve des dispositions de l'alinéa précédent, un bien peut faire l'objet de plusieurs saisies conservatoires.

Les dispositions de l'article 47 sont applicables en cas de saisie conservatoire pratiquée entre les mains d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôt.

Art. 76. -- Le créancier qui a obtenu ou possède un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la vente des biens qui ont été rendus indisponibles jusqu'à concurrence du montant de sa créance.

Si la saisie conservatoire porte sur une créance, le créancier, muni d'un titre exécutoire, peut en demander le paiement. Cette demande emporte attribution immédiate de la créance saisie jusqu'à concurrence du montant de la condamnation et des sommes dont le tiers saisi s'est reconnu ou a été déclaré débiteur.

Art. 77. -- Une sûreté judiciaire peut être constituée à titre conservatoire sur les immeubles, les fonds de commerce, les actions, parts sociales et valeurs mobilières.

Art. 78. -- Les sûretés judiciaires sont opposables aux tiers du jour de l'accomplissement des formalités de publicité prescrites par décret en Conseil d'Etat.

Cette publicité cesse de produire effet si, dans un délai fixé par le même décret, elle n'a pas été confirmée par une publicité définitive.

Art. 79. -- Les biens grevés d'une sûreté judiciaire demeurent aliénables. Le prix en est payé et distribué dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.

Toutefois, en cas de vente de valeurs mobilières inscrites sur un compte tenu et géré par un intermédiaire habilité, le prix peut être utilisé pour acquérir d'autres valeurs qui sont alors subrogées aux valeurs vendues.

Loi n° 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants des navires

Art. 9. -- Dans l'article 62 du code des douanes, les mots : « en dessous de 1 000 tonneaux de jauge brute » sont supprimés.

Loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte

Art. 3. -- I --  Outre les lois, ordonnances et décrets qui, en raison de leur objet, sont nécessairement destinés à régir l'ensemble du territoire national, sont applicables de plein droit à Mayotte les lois, ordonnances et décrets portant sur les matières suivantes :

1° Nationalité ;

2° État et capacité des personnes ;

3° Régimes matrimoniaux, successions et libéralités ;

4° Droit pénal ;

5° Procédure pénale ;

6° Procédure administrative contentieuse et non contentieuse ;

7° Droit électoral ;

8° Postes et télécommunications.

.........................................................................................................

Loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes
de réformes à caractère économique et financier

Art. 17 . --  I. --  L'article 442-5 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 442-5. -- La fabrication, l'emploi ou la détention sans autorisation des matières, instruments, programmes informatiques ou de tout autre élément spécialement destinés à la fabrication ou à la protection contre la contrefaçon ou la falsification des billets de banque ou des pièces de monnaie sont punis de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende. »

II --  Après l'article 442-14 du même code, il est inséré un article 442-15 ainsi rédigé :

« Art. 442-15. -- Les dispositions des articles 442-1, 442-2 et 442-5 à 442-14 sont applicables lorsque sont en cause les billets de banque et pièces de monnaie qui, bien que destinés à être mis en circulation, n'ont pas été encore émis par les institutions habilitées à cette fin et n'ont pas encore cours légal. »

III. --  A l'article 113-10 du même code, après la référence : « 442-1 », sont insérées les références : « , 442-2, 442-5, 442-15 ».

IV --  Le fait de mettre à disposition des euros sous quelque forme que ce soit, lors d'une opération d'échange de pièces et billets en francs effectuée entre le 1er décembre 2001 et le 30 juin 2002 pour un montant égal ou inférieur à 10 000 €, ne constitue pas, au sens du deuxième alinéa de l'article 324-1 du code pénal, l'apport d'un concours susceptible d'être reproché aux établissements de crédit, aux institutions et services mentionnés à l'article L. 518-1 du code monétaire et financier et aux changeurs manuels mentionnés à l'article L. 520-1 du même code, ainsi qu'à leurs représentants, agents et préposés.

Ces dispositions ne dispensent pas les personnes qui y sont soumises du respect des obligations de vigilance mentionnées au titre VI du livre V du code monétaire et financier.

Art. 18 . --  I. --  L'article 56 du code de procédure pénale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque la saisie porte sur des billets de banque ou pièces de monnaie libellés en euros contrefaits, l'officier de police judiciaire doit transmettre, pour analyse et identification, au moins un exemplaire de chaque type de billets ou pièces suspectés faux au centre d'analyse national habilité à cette fin. Le centre d'analyse national peut procéder à l'ouverture des scellés. Il en dresse inventaire dans un rapport qui doit mentionner toute ouverture ou réouverture des scellés. Lorsque les opérations sont terminées, le rapport et les scellés sont déposés entre les mains du greffier de la juridiction compétente. Ce dépôt est constaté par procès-verbal.

« Les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables lorsqu'il n'existe qu'un seul exemplaire d'un type de billets ou de pièces suspectés faux, tant que celui-ci est nécessaire à la manifestation de la vérité. »

II. -- L'article 97 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque la saisie porte sur des billets de banque ou pièces de monnaie libellés en euros contrefaits, le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire par lui commis doit transmettre, pour analyse et identification, au moins un exemplaire de chaque type de billets ou pièces suspectés faux au centre d'analyse national habilité à cette fin. Le centre d'analyse national peut procéder à l'ouverture des scellés. Il en dresse inventaire dans un rapport qui doit mentionner toute ouverture ou réouverture des scellés. Lorsque les opérations sont terminées, le rapport et les scellés sont déposés entre les mains du greffier de la juridiction compétente. Ce dépôt est constaté par procès-verbal.

« Les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables lorsqu'il n'existe qu'un seul exemplaire d'un type de billets ou de pièces suspectés faux, tant que celui-ci est nécessaire à la manifestation de la vérité. »

Loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 relative à la sécurité des infrastructures
et systèmes de transport, aux enquêtes techniques après événement de mer,
accident ou incident de transport terrestre ou aérien et au stockage souterrain
de gaz naturel, d'hydrocarbures et de produits chimiques

Art. 12 . --  I. --  La loi n° 75-1335 du 31 décembre 1975 relative à la constatation et à la répression des infractions en matière de transports publics et privés est ainsi modifiée :

1° L'avant-dernier alinéa de l'article 3 est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « et aux lieux d'emballage et de remplissage dans les entreprises soumises à l'obligation de désigner un conseiller à la sécurité. Ils peuvent procéder à des contrôles, dans les entreprises, des registres et autres documents afférents au transport, au chargement, à l'emballage et au remplissage de matières dangereuses. » ;

2° Dans le premier alinéa de l'article 4, la somme : « 40 000 F » est remplacée par la somme : « 30 000 euros », et les mots : « ou de l'une de ces deux peines seulement » sont supprimés ;

3° Après le 3° de l'article 4, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« 4° Fait transporter par voie terrestre des marchandises dangereuses sans l'avoir signalé, soit dans le document de transport, soit sur les emballages, récipients ou contenants, lorsque ceci est requis ;

« 5° Transporté par voie terrestre des marchandises dangereuses sans aucune signalisation extérieure, lorsque celle-ci est requise.

« Sera puni des mêmes peines tout responsable d'entreprise qui n'aura pas désigné de conseiller à la sécurité dans une entreprise soumise à cette obligation. »

II. --  Les habilitations des agents de contrôle des transports terrestres dits « contrôleurs des transports terrestres » à constater les infractions prévues par :

- l'article 25 de la loi de finances pour l'exercice 1952 (n° 52-401 du 14 avril 1952) ;

- l'article 4 de la loi n° 92-1445 du 31 décembre 1992 relative aux relations de sous-traitance dans le domaine du transport routier de marchandises ;

- l'article 23-2 de la loi n° 95-96 du 1 er février 1995 concernant les clauses abusives et la présentation des contrats et régissant diverses activités d'ordre économique et commercial, sont dévolues aux autres fonctionnaires ou agents de l'État, qui sont chargés du contrôle des transports terrestres et sont placés sous l'autorité du ministre chargé des transports.

III. --  L'article L. 130-6 du code de la route est ainsi rédigé :

« Art. L. 130-6 . --  Les infractions prévues par les articles L. 224-5, L. 317-1 et L. 413-1 peuvent être constatées par les fonctionnaires ou agents de l'État chargés du contrôle des transports terrestres placés sous l'autorité du ministre chargé des transports lorsqu'elles sont commises au moyen de véhicules affectés au transport routier de voyageurs ou de marchandises.

« Ces fonctionnaires ont accès à l'appareil de contrôle, dit "chronotachygraphe, et à toutes ses composantes afin d'en vérifier l'intégrité, sur les véhicules soumis à l'obligation d'en être équipés. »

IV. --  A. --  Au 6° de l'article L. 130-4 du même code, les mots : « contrôleurs des transports terrestres » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires ou agents de l'État chargés du contrôle des transports terrestres placés sous l'autorité du ministre chargé des transports ».

B. --  Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 324-12 du code du travail, les mots : « les contrôleurs et les adjoints de contrôle des transports terrestres » sont remplacés par les mots : « les fonctionnaires ou agents de l'État chargés du contrôle des transports terrestres placés sous l'autorité du ministre chargé des transports ».

V. --  A. --  Après l'avant-dernier alinéa (9°) de l'article L. 130-4 du code de la route, il est inséré un 10° ainsi rédigé :

« 10° Les agents des exploitants d'aérodromes, assermentés et agréés par le préfet, pour les seules contraventions aux règles de stationnement dans l'emprise de l'aérodrome. »

B. --  Le deuxième alinéa (1°) de l'article 776 du code de procédure pénale est complété par les mots : « , ainsi que de demandes d'agrément destinées à permettre la constatation par procès-verbal d'infractions à la loi pénale ».

Loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice

Art. 33 . --  Au premier alinéa de l'article 2-15 du code de procédure pénale, après les mots : « dans un lieu ou local ouvert au public », sont insérés les mots : « ou dans une propriété privée à usage d'habitation ou à usage professionnel ».

Art. 34 . --  I. --  Les trois derniers alinéas de l'article 77-2 du code de procédure pénale sont supprimés.

II. --  Dans la première phrase de l'article 77-3 du même code, les mots : « au premier alinéa de » sont remplacés par le mot : « à ».

La deuxième phrase du même article est supprimée.

Art. 35 . --  I. --  Après la première phrase du premier alinéa de l'article 706-71 du code de procédure pénale, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Dans les mêmes conditions, la présentation aux fins de prolongation de la garde à vue ou de la retenue judiciaire peut être réalisée par l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle. »

II. --  Dans l'article 22 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, après les mots : « du présent chapitre », sont insérés les mots : « , à l'exception de l'article 32, ».

[ L'article 22 de la loi n° 2001-1062 a été modifié par le loi n° 2003-239 du 19 mars 2003 pour la sécurité intérieure (art. 31) ].

Art. 36 . --  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

I. --  L'article 41-2 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après la référence : « 314-6, », il est inséré la référence : « 321-1, » ;

2° Au 3°, après les mots : « permis de conduire », sont insérés les mots : « , pour une période maximale de six mois, » ;

3° Après le 4°, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° Suivre un stage ou une formation dans un service ou organisme sanitaire, social ou professionnel pour une durée qui ne peut excéder trois mois dans un délai qui ne peut être supérieur à dix-huit mois. » ;

4° La dernière phrase du septième alinéa est supprimée ;

5° La quatrième phrase du dixième alinéa est supprimée ;

6° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les compositions pénales exécutées sont inscrites au bulletin n° 1 du casier judiciaire. »

II. --  Le premier alinéa de l'article 41-3 est complété par les mots : « ainsi que pour les contraventions dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État ».

III. --  L'article 768 est complété par un 9° ainsi rédigé :

« 9° Les compositions pénales, dont l'exécution a été constatée par le procureur de la République. »

IV. --  L'article 769 est complété par un 6° ainsi rédigé :

« 6° Les mentions relatives à la composition pénale, à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où l'exécution de la mesure a été constatée, si la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une nouvelle composition pénale. »

V. --  Après le 13° de l'article 775, il est inséré un 14° ainsi rédigé :

« 14° Les compositions pénales mentionnées à l'article 768. »

Art. 37 . --  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L'article 137-4 est ainsi rédigé :

« Art. 137-4 . --  Lorsque, saisi de réquisitions du procureur de la République tendant au placement en détention provisoire, le juge d'instruction estime que cette détention n'est pas justifiée et qu'il décide de ne pas transmettre le dossier de la procédure au juge des libertés et de la détention, il est tenu de statuer sans délai par ordonnance motivée, qui est immédiatement portée à la connaissance du procureur de la République. » ;

2° L'article 137-5 est abrogé ;

3° Le quatrième alinéa de l'article 143-1 est supprimé ;

4° La deuxième phrase du quatrième alinéa de l'article 144 est supprimée ;

5° L'article 145-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« A titre exceptionnel, lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes et des biens un risque d'une particulière gravité, la chambre de l'instruction peut prolonger pour une durée de quatre mois la durée de deux ans prévue au présent article. La chambre de l'instruction, devant laquelle la comparution personnelle du mis en examen est de droit, est saisie par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention selon les modalités prévues par le dernier alinéa de l'article 137-1, et elle statue conformément aux dispositions des articles 144, 144-1, 145-3, 194, 197, 198, 199, 200, 206 et 207. » ;

6° Après le deuxième alinéa de l'article 145-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« A titre exceptionnel, lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes et des biens un risque d'une particulière gravité, la chambre de l'instruction peut prolonger pour une durée de quatre mois les durées prévues au présent article. La chambre de l'instruction, devant laquelle la comparution personnelle du mis en examen est de droit, est saisie par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention selon les modalités prévues par le dernier alinéa de l'article 137-1, et elle statue conformément aux dispositions des articles 144, 144-1, 145-3, 194, 197, 198, 199, 200, 206 et 207. Cette décision peut être renouvelée une fois sous les mêmes conditions et selon les mêmes modalités. » ;

7° Dans l'article 207, les mots : « formée en application de l'article 137-5 » sont supprimés.

Art. 38 . --  I. --  Après l'article 148-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 148-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 148-1-1 . --  Lorsqu'une ordonnance de mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire est rendue par le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction contrairement aux réquisitions du procureur de la République, cette ordonnance est immédiatement notifiée à ce magistrat. Pendant un délai de quatre heures à compter de la notification de l'ordonnance du procureur de la République, et sous réserve de l'application des dispositions du dernier alinéa du présent article, la personne mise en examen ne peut être remise en liberté et cette décision ne peut être adressée pour exécution au chef de l'établissement pénitentiaire.

« Le procureur de la République peut interjeter appel de l'ordonnance devant le greffier du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction, en saisissant dans le même temps le premier président de la cour d'appel d'un référé-détention, conformément aux dispositions de l'article 187-3 ; l'appel et le référé-détention sont mentionnés sur l'ordonnance. La personne mise en examen et son avocat en sont avisés en même temps que leur est notifiée l'ordonnance, qui ne peut être mise à exécution, la personne restant détenue tant que n'est pas intervenue la décision du premier président de la cour d'appel et, le cas échéant, celle de la chambre de l'instruction. La personne mise en examen et son avocat sont également avisés de leur droit de faire des observations écrites devant le premier président de la cour d'appel. Faute pour le procureur de la République d'avoir formé un référé-détention, dans un délai de quatre heures à compter de la notification de l'ordonnance de mise en liberté, celle-ci, revêtue d'une mention du greffier indiquant l'absence de référé-détention, est adressée au chef d'établissement pénitentiaire et la personne est mise en liberté sauf si elle est détenue pour une autre cause.

« Si le procureur de la République, ayant pris des réquisitions de maintien en détention, estime néanmoins ne pas avoir à s'opposer à la mise en liberté immédiate de la personne, et sans préjudice de son droit de former ultérieurement appel dans le délai prévu par l'article 185, il retourne l'ordonnance au magistrat qui l'a rendue en mentionnant sur celle-ci qu'il ne s'oppose pas à sa mise à exécution. La personne est alors mise en liberté, si elle n'est pas détenue pour une autre cause. »

II. --  Après l'article 187-2 du même code, il est inséré un article 187-3 ainsi rédigé :

« Art. 187-3. -- Dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article 148-1-1, le procureur de la République qui interjette appel d'une ordonnance de mise en liberté contraire à ses réquisitions dans un délai de quatre heures à compter de sa notification doit, à peine d'irrecevabilité, saisir dans le même temps le premier président de la cour d'appel ou, en cas d'empêchement, le magistrat qui le remplace, d'un référé-détention afin de déclarer cet appel suspensif. Le procureur de la République joint à sa demande les observations écrites justifiant le maintien en détention de la personne. La personne mise en examen et son avocat peuvent également présenter les observations écrites qu'ils jugent utiles.

« Le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace statue au plus tard le deuxième jour ouvrable suivant la demande. Pendant cette durée, les effets de l'ordonnance de mise en liberté sont suspendus et la personne reste détenue. A défaut pour le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace de statuer dans ce délai, la personne est remise en liberté, sauf si elle est détenue pour une autre cause.

« Le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace statue, au vu des éléments du dossier de la procédure, par une ordonnance motivée qui n'est pas susceptible de recours. A sa demande, l'avocat de la personne mise en examen peut présenter des observations orales devant ce magistrat, lors d'une audience de cabinet dont le ministère public est avisé pour qu'il y prenne, le cas échéant, ses réquisitions.

« Si le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace estime que le maintien en détention de la personne est manifestement nécessaire au vu d'au moins deux des critères prévus par les dispositions de l'article 144 jusqu'à ce que la chambre de l'instruction statue sur l'appel du ministère public, il ordonne la suspension des effets de l'ordonnance de mise en liberté jusqu'à cette date. La personne mise en examen ne peut alors être mise en liberté jusqu'à l'audience de la chambre de l'instruction devant laquelle sa comparution personnelle est de droit ; la chambre de l'instruction doit se prononcer dans les plus brefs délais et au plus tard dans les dix jours de l'appel, faute de quoi la personne est mise d'office en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause.

« Dans le cas contraire, le premier président de la cour d'appel ou le magistrat qui le remplace ordonne que la personne soit mise en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause.

« A peine de nullité, le magistrat ayant statué sur la demande de référé-détention ne peut faire partie de la composition de la chambre de l'instruction qui statuera sur l'appel du ministère public.

« La transmission du dossier de la procédure au premier président de la cour d'appel ou au magistrat qui le remplace peut être effectuée par télécopie. »

III. --  Les dispositions des I et II entreront en vigueur le 1 er novembre 2002.

IV. --  Le deuxième alinéa de l'article 148-2 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque la personne n'a pas encore été jugée en premier ressort, la juridiction saisie statue dans les dix jours ou les vingt jours de la réception de la demande, selon qu'elle est du premier ou du second degré. Lorsque la personne a déjà été jugée en premier ressort et qu'elle est en instance d'appel, la juridiction saisie statue dans les deux mois de la demande. Lorsque la personne a déjà été jugée en second ressort et qu'elle a formé un pourvoi en cassation, la juridiction saisie statue dans les quatre mois de la demande.

« Toutefois, lorsqu'au jour de la réception de la demande il n'a pas encore été statué soit sur une précédente demande de mise en liberté ou de mainlevée de contrôle judiciaire, soit sur l'appel d'une précédente décision de refus de mise en liberté ou de mainlevée du contrôle judiciaire, les délais prévus ci-dessus ne commencent à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente. Faute de décision à l'expiration des délais, il est mis fin au contrôle judiciaire ou à la détention provisoire, le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, étant d'office remis en liberté. »

V. --  Au début du deuxième alinéa de l'article 183 du même code, la référence : « 145, premier alinéa » est remplacée par la référence : « 137-3, deuxième alinéa ».

VI. --  Le cinquième alinéa de l'article 199 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Si la personne a déjà comparu devant la chambre de l'instruction moins de quatre mois auparavant, le président de cette juridiction peut, en cas d'appel d'une ordonnance rejetant une demande de mise en liberté, refuser la comparution personnelle de l'intéressé par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours. »

Art. 39 . --  I. --  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l'article 80-2, les mots : « un mois » sont remplacés par les mots : « deux mois » ;

2° L'article 86 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le juge d'instruction rend une ordonnance de refus d'informer, il peut faire application des dispositions des articles 177-2 et 177-3. » ;

3° Après l'article 177-2, il est inséré un article 177-3 ainsi rédigé :

« Art. 177-3 . --  Lorsque la partie civile est une personne morale, l'amende civile prévue par l'article 177-2 peut être prononcée contre son représentant légal, si la mauvaise foi de ce dernier est établie. » ;

4° Le dernier alinéa de l'article 186 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il en est de même lorsqu'il est fait appel, après expiration du délai prévu au quatrième alinéa du présent article, de toute ordonnance du juge d'instruction ou lorsque l'appel est devenu sans objet. » ;

5° Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 706-58, les mots : « cinq ans » sont remplacés par les mots : « trois ans ».

II. --  A l'article 434-15-1 du code pénal, après les mots : « devant le juge d'instruction », sont insérés les mots : « ou devant un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire ».

Art. 40 . --  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

I. --  L'article 395 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « sans excéder sept ans » sont supprimés ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « au moins égal à un an sans excéder sept ans » sont remplacés par les mots : « au moins égal à six mois ».

II. --  Au troisième alinéa de l'article 396, les mots : « par les articles 135 et 145-1, quatrième alinéa » sont remplacés par les mots : « par l'article 137-3, premier alinéa ».

III. --  L'article 397-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la peine encourue est supérieure à sept ans d'emprisonnement, le prévenu, informé de l'étendue de ses droits, peut demander que l'affaire soit renvoyée à une audience qui devra avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à deux mois, sans être supérieur à quatre mois. »

IV. --  L'article 397-3 est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les références : « 145, alinéa premier, 145-1, quatrième alinéa, » sont remplacées par la référence : « 137-3, premier alinéa, » ;

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsque le prévenu est en détention provisoire, le jugement au fond doit être rendu dans les deux mois qui suivent le jour de sa première comparution devant le tribunal. Faute de décision au fond à l'expiration de ce délai, il est mis fin à la détention provisoire. Le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté. » ;

3° L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'il a été fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 397-1, le délai prévu à l'alinéa précédent est porté à quatre mois. »

V. --  Le deuxième alinéa de l'article 397-4 est ainsi rédigé :

« La cour statue dans les quatre mois de l'appel du jugement rendu sur le fond interjeté par le prévenu détenu, faute de quoi celui-ci, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, est mis d'office en liberté. »

Art. 41 . --  L'article 398-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 5°, après la référence : « 433-5 », sont insérées les références : « 433-6 à 433-8, premier alinéa, 433-10, premier alinéa, » ;

2° Après le 7°, il est inséré un 8° ainsi rédigé :

« 8° Les délits pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, à l'exception des délits de presse. »

Art. 42 . --  Après l'article 494-1 du code de procédure pénale, il est inséré une section 7 ainsi rédigée :

« Section 7

« De la procédure simplifiée

« Art. 495. -- Peuvent être soumis à la procédure simplifiée prévue à la présente section les délits prévus par le code de la route.

« Cette procédure n'est pas applicable :

« 1° Si le prévenu était âgé de moins de dix-huit ans au jour de l'infraction ;

« 2° Si la victime a formulé, au cours de l'enquête, une demande de dommages et intérêts ou de restitution, ou a fait directement citer le prévenu avant qu'ait été rendue l'ordonnance prévue à l'article 495-1 ;

« 3° Si le délit prévu par le code de la route a été commis en même temps qu'une contravention ou qu'un délit d'homicide involontaire ou d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne.

« Le ministère public ne peut recourir à la procédure simplifiée que lorsqu'il résulte de l'enquête de police judiciaire que les faits reprochés au prévenu sont établis et que les renseignements concernant la personnalité de celui-ci, et notamment ses charges et ses ressources, sont suffisants pour permettre la détermination de la peine.

« Art. 495-1 . --  Le ministère public qui choisit la procédure simplifiée communique au président du tribunal le dossier de la poursuite et ses réquisitions.

« Le président statue sans débat préalable par une ordonnance pénale portant relaxe ou condamnation à une amende ainsi que, le cas échéant, à une ou plusieurs des peines complémentaires encourues, ces peines pouvant être prononcées à titre de peine principale.

« S'il estime qu'un débat contradictoire est utile ou qu'une peine d'emprisonnement devrait être prononcée, le juge renvoie le dossier au ministère public.

« Art. 495-2 . --  L'ordonnance mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance et domicile du prévenu, la qualification légale, la date et le lieu du fait imputé, la mention des textes applicables et, en cas de condamnation, la ou les peines prononcées.

« L'ordonnance pénale doit être motivée, au regard notamment des dispositions du dernier alinéa de l'article 495.

« Art. 495-3 . --  Dès qu'elle est rendue, l'ordonnance pénale est transmise au ministère public qui, dans les dix jours, peut soit former opposition par déclaration au greffe du tribunal, soit en poursuivre l'exécution.

« Cette ordonnance est portée à la connaissance du prévenu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

« Le prévenu est informé qu'il dispose d'un délai de quarante-cinq jours à compter de cette notification pour former opposition à l'ordonnance et que cette opposition permettra que l'affaire fasse l'objet d'un débat contradictoire et public devant le tribunal correctionnel, au cours duquel il pourra être assisté par un avocat, dont il pourra demander la commission d'office. Le prévenu est également informé que le tribunal correctionnel, s'il l'estime coupable des faits qui lui sont reprochés, aura la possibilité de prononcer contre lui une peine d'emprisonnement si celle-ci est encourue pour le délit ayant fait l'objet de l'ordonnance.

« En l'absence d'opposition, l'ordonnance est exécutée suivant les règles prévues par le présent code pour l'exécution des jugements correctionnels.

« Toutefois, s'il ne résulte pas de l'avis de réception que le prévenu a reçu la lettre de notification, l'opposition reste recevable jusqu'à l'expiration d'un délai de trente jours qui court de la date à laquelle l'intéressé a eu connaissance, d'une part, de la condamnation, soit par un acte d'exécution, soit par tout autre moyen, d'autre part, du délai et des formes de l'opposition qui lui sont ouvertes.

« Le comptable du Trésor arrête le recouvrement dès réception de l'avis d'opposition à l'ordonnance pénale établi par le greffe.

« Art. 495-4 . --  En cas d'opposition formée par le ministère public ou par le prévenu, l'affaire est portée à l'audience du tribunal correctionnel. Le jugement rendu par défaut, sur l'opposition du prévenu, n'est pas susceptible d'opposition.

« Jusqu'à l'ouverture des débats, le prévenu peut renoncer expressément à son opposition. L'ordonnance pénale reprend alors sa force exécutoire et une nouvelle opposition n'est pas recevable.

« Art. 495-5 . --  L'ordonnance pénale, à laquelle il n'a pas été formé opposition ou qui n'a pas été portée par le ministère public à l'audience du tribunal correctionnel, a les effets d'un jugement passé en force de chose jugée.

« Cependant, elle n'a pas l'autorité de la chose jugée à l'égard de l'action civile en réparation des dommages causés par l'infraction.

« Art. 495-6 . --  Les dispositions de la présente section ne font pas échec aux droits de la partie lésée de citer l'auteur des faits devant le tribunal correctionnel.

« Le tribunal statue uniquement sur les intérêts civils si l'ordonnance pénale a acquis la force de chose jugée. »

Art. 43 . --  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

I. -- L'article 215 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'arrêt de mise en accusation est notifié à l'accusé conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 183. »

II. --  A l'article 215-2, les mots : « à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive » sont remplacés par les mots : « à compter soit de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive s'il était alors déjà détenu, soit de la date à laquelle il a été ultérieurement placé en détention provisoire ».

III. --  L'article 268 est abrogé.

IV. --  Le deuxième alinéa de l'article 367 est ainsi modifié :

1° La première phrase est complétée par les mots : « , sans préjudice pour l'accusé de son droit à demander sa mise en liberté conformément aux dispositions des articles 148-1 et 148-2 » ;

2° Les trois dernières phrases sont supprimées.

Art. 44 . --  Après le sixième alinéa de l'article 722 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge de l'application des peines peut, avec l'accord du procureur de la République et celui du condamné ou de son avocat, octroyer une des mesures mentionnées à l'alinéa précédent sans procéder à un débat contradictoire. »

Art. 45 . --  Avant le dernier alinéa de l'article 433-5 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'il est adressé à une personne chargée d'une mission de service public et que les faits ont été commis à l'intérieur d'un établissement scolaire ou éducatif, ou, à l'occasion des entrées ou sorties des élèves, aux abords d'un tel établissement, l'outrage est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. »

Art. 46 . --  I. --  Dans le premier alinéa de l'article 421-4 du code pénal, les mots : « quinze ans de réclusion criminelle et de 225 000 euros d'amende » sont remplacés par les mots : « vingt ans de réclusion criminelle et de 350 000 euros d'amende ».

II. --  Il est inséré, après l'article 706-24-2 du code de procédure pénale, un article 706-24-3 ainsi rédigé :

« Art. 706-24-3. --  Pour l'instruction du délit d'association de malfaiteurs prévu par l'article 421-5 du code pénal, la durée totale de la détention provisoire prévue par le deuxième alinéa de l'article 145-1 est portée à trois ans. »

Art. 49 . --  Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

I. --  L'article 138 est ainsi modifié :

1° Après le 16°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L'obligation prévue au 2° peut être exécutée, avec l'accord de l'intéressé recueilli en présence de son avocat, sous le régime du placement sous surveillance électronique, à l'aide du procédé prévu par l'article 723-8. Les articles 723-9 et 723-12 sont applicables, le juge d'instruction exerçant les compétences attribuées au juge de l'application des peines. » ;

2° Dans le dernier alinéa, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « et au placement sous surveillance électronique ».

II. --  L'article 144-2 est abrogé.

III. --  Le dernier alinéa de l'article 723-7 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le placement sous surveillance électronique emporte également pour le condamné l'obligation de répondre aux convocations de toute autorité publique désignée par le juge de l'application des peines. »

IV. -- L'article 723-9 est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La mise en oeuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance peut être confiée à une personne de droit privé habilitée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Dans la limite des périodes fixées dans la décision de placement sous surveillance électronique, les agents de l'administration pénitentiaire chargés du contrôle peuvent se rendre sur le lieu de l'assignation pour demander à rencontrer le condamné. Ils ne peuvent toutefois pénétrer au domicile de la personne chez qui le contrôle est pratiqué sans l'accord de celle-ci. Ces agents font aussitôt rapport au juge de l'application des peines de leurs diligences. »

V. --  Au premier alinéa de l'article 723-13, les mots : « d'inobservation des conditions d'exécution constatée au cours d'un contrôle au lieu d'assignation » sont remplacés par les mots : « d'inobservation des interdictions ou obligations prévues au dernier alinéa de l'article 723-7, d'inconduite notoire, ».

Convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale
entre les États membres de l'Union européenne

Art. 13. -- Équipes communes d'enquête

1. Les autorités compétentes de deux États membres au moins peuvent, d'un commun accord, créer une équipe commune d'enquête, avec un objectif précis et pour une durée limitée pouvant être prolongée avec l'accord de toutes les parties, pour effectuer des enquêtes pénales dans un ou plusieurs des États membres qui créent l'équipe. La composition de l'équipe est arrêtée dans l'accord.

Une équipe commune d'enquête peut notamment être créée lorsque:

a) dans le cadre d'une procédure d'enquête menée par un État membre pour détecter des infractions, il y a lieu d'effectuer des enquêtes difficiles et impliquant la mobilisation d'importants moyens, qui concernent aussi d'autres États membres;

b) plusieurs États membres effectuent des enquêtes concernant des infractions qui, en raison des faits qui sont à l'origine de celles-ci, exigent une action coordonnée et concertée dans les États membres en question.

La demande de création d'une équipe commune d'enquête peut émaner de tout État membre concerné. L'équipe est créée dans l'un des États membres dans lesquels l'enquête doit être effectuée.

2. Outre les indications visées dans les dispositions pertinentes de l'article 14 de la convention européenne d'entraide judiciaire et à l'article 37 du traité Benelux, les demandes de création d'une équipe commune d'enquête comportent des propositions relatives à la composition de l'équipe.

3. L'équipe commune d'enquête intervient sur le territoire des États membres qui la créent dans les conditions générales suivantes:

a) le responsable de l'équipe est un représentant de l'autorité compétente - participant aux enquêtes pénales - de l'État membre sur le territoire duquel l'équipe intervient. Le responsable de l'équipe agit dans les limites des compétences qui sont les siennes au regard du droit national;

b) l'équipe mène ses opérations conformément au droit de l'État membre sur le territoire duquel elle intervient. Les membres de l'équipe exécutent leurs tâches sous la responsabilité de la personne visée au point a), en tenant compte des conditions fixées par leurs propres autorités dans l'accord relatif à la création de l'équipe;

c) l'État membre sur le territoire duquel l'équipe intervient crée les conditions organisationnelles nécessaires pour lui permettre de le faire.

4. Au présent article, des membres de l'équipe commune d'enquête provenant d'États membres autres que celui sur le territoire duquel l'équipe intervient sont désignés comme membres "détachés" auprès de l'équipe.

5. Les membres détachés auprès de l'équipe commune d'enquête sont habilités à être présents lorsque des mesures d'enquête sont prises dans l'État membre d'intervention. Toutefois, le responsable de l'équipe peut, pour des raisons particulières, en décider autrement, dans le respect du droit de l'État membre sur le territoire duquel l'équipe intervient.

6. Les membres détachés de l'équipe commune d'enquête peuvent, conformément au droit de l'État membre d'intervention, se voir confier, par le responsable de l'équipe, la tâche de prendre certaines mesures d'enquête, moyennant le consentement des autorités compétentes de l'État membre d'intervention et de l'État membre qui a procédé au détachement.

7. Lorsque l'équipe commune d'enquête a besoin que des mesures d'enquête soient prises dans un des États membres qui l'ont créée, les membres détachés auprès de l'équipe par ledit État membre peuvent demander à leurs autorités compétentes de prendre ces mesures. Ces mesures sont considérées dans l'État membre en question selon les conditions qui s'appliqueraient si elles étaient demandées dans le cadre d'une enquête nationale.

8. Lorsque l'équipe commune d'enquête a besoin de l'aide d'un État membre autre que ceux qui l'ont créée, ou d'un État tiers, la demande d'entraide peut être adressée par les autorités compétentes de l'État d'intervention à leurs homologues de l'autre État concerné, conformément aux instruments ou arrangements pertinents.

9. Un membre détaché auprès de l'équipe commune d'enquête peut, conformément à son droit national et dans les limites de ses compétences, fournir à l'équipe des informations qui sont disponibles dans l'État membre qui l'a détaché aux fins des enquêtes pénales menées par l'équipe.

10. Les informations obtenues de manière régulière par un membre ou un membre détaché dans le cadre de sa participation à une équipe commune d'enquête, et qui ne peuvent pas être obtenues d'une autre manière par les autorités compétentes de l'État membre concerné, peuvent être utilisées aux fins suivantes:

a) aux fins pour lesquelles l'équipe a été créée;

b) pour détecter, enquêter sur et poursuivre d'autres infractions pénales sous réserve du consentement préalable de l'État membre où l'information a été obtenue. Le consentement ne peut être refusé que dans les cas où une telle utilisation représenterait un danger pour les enquêtes pénales menées dans l'État membre concerné, ou pour lesquels cet État membre pourrait refuser l'entraide;

c) pour la sécurité publique et sans préjudice des dispositions du point b) si, par la suite, une enquête pénale est ouverte;

d) à d'autres fins, pour autant que cela ait été convenu par les États membres qui ont créé l'équipe.

11. Les dispositions du présent article ne portent pas atteinte à d'autres dispositions ou arrangements existants relatifs à la création ou à l'intervention d'équipes communes d'enquêtes.

12. Dans la mesure où le droit des États membres concernés ou les dispositions de tout instrument juridique applicable entre eux le permettent, des arrangements peuvent être conclus pour que des personnes autres que des représentants des autorités compétentes des États membres qui créent l'équipe commune d'enquête prennent part aux activités de l'équipe. Il peut s'agir, par exemple, d'agents d'instances créées en vertu du traité sur l'Union européenne. Les droits conférés aux membres et aux membres détachés auprès de l'équipe en vertu du présent article ne s'appliquent pas à ces personnes, sauf disposition contraire figurant explicitement dans l'accord.

I.

* 1 (86-35 Av J.C).

* 2 M. Jean-Luc Warsmann a été chargé par le garde des Sceaux d'un rapport sur les peines alternatives à la détention, les modalités d'exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison.

* 3 Rapport annuel du 18 décembre 1995.

* 4 Rapport n° 134 (1991-1992).

* 5 JOAN, 1 ère séance du22 mai 2003, p. 4024.

* 6 CEDH Kostovski,25 octobre 1989.

* 7 CEDH Doorson C. Pays-Bas, 20 février 1996.

* 8 JOAN, 1 ère séance du 22 mai 2003, p. 4026.

* 9 CEDH Van Mechelen et autres c. Pays-Bas, 18 mars 1997.

* 10 JOAN, 1 ère séance du 22 mai 2003, p. 4035.

* 11 JOAN, 1 ère séance du 22 mai 2003, p. 4035.

* 12 Votre rapporteur, accompagné de MM. José Balarello et Robert Bret, s'est rendu à Rome les 4 et 5 juin 2003 pour y étudier les règles relatives aux collaborateurs de justice. Accompagné de MM. Robert Bret, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Patrice Gélard et Georges Othily, il s'est rendu à Washington du 9 au 12 septembre 2003.

* 13 En 1995 et 1996,  le Conseil de l'Union européenne a en effet adopté deux conventions respectivement relatives à l'instauration d'une procédure simplifiée d'extradition lorsque la personne réclamée consent à sa remise et à la modification des conditions de fond de l'extradition. Notons toutefois que ces deux conventions ne sont toujours pas entrées en vigueur en raison d'un nombre de ratifications insuffisant.

* 14 La France, précurseur en la matière, a créé des postes de magistrats de liaison dès 1993. Sept magistrats français exercent actuellement ces fonctions non seulement au sein de l'Union européenne mais également au Maroc et aux Etats-Unis.

* 15 Ce réseau est constitué de points de contact nationaux relayés, dans les Etats les plus vastes, par des points de contacts régionaux. En France par exemple, un correspondant nommé par le procureur général est désigné au sein de chaque cour d'appel.

* 16 Contrairement aux conventions, l'entrée en vigueur de ces actes n'est soumise ni à leur approbation ni à leur ratification par les Etats membres. Toutefois, à la différence d'une directive, une décision-cadre n'a pas d'effet direct, mais, comme elle, doit faire l'objet d'une transposition.

* 17 Pour lutter contre la criminalité organisée, cCe protocole, issu d'une proposition déposée par la France, contient des dispositions relatives au recueil d'informations sur les comptes et transactions bancaires et pose le principe de l'inopposabilité du secret bancaire aux demandes d'entraide judiciaire.

* 18 Notons qu'aux termes de la convention du 29 mai 2000 (article 2), certaines dispositions de la convention d'application de Schengen restent en vigueur, tandis que d'autres sont abrogées.

* 19 Qui avaient précédemment adhéré à la convention de Schengen.

* 20 Rapport explicatif concernant la convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne - Journal officiel des Communautés européennes du 29 décembre 2000 - C 379/7.

* 21 Article 27 de cette convention.

* 22 En 2002, le budget d'Eurojust s'est élevé à 3,5 millions d'euros.

* 23 Notons que cette décision-cadre deviendra caduque le jour de l'entrée en vigueur de la convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale dans tous les Etats membres (article 5 de la décision-cadre du 13 juin 2002).

* 24 Il pourra par exemple s'agir en France d'officiers ou d'agents de police judiciaire ou encore d'officiers de douane judiciaire.

* 25 Cette expression désigne un membre d'une équipe commune qui n'intervient pas sur le territoire de l'Etat membre qui l'a détaché.

* 26 Cette Convention composée de représentants des gouvernements des Etats membres, des parlements nationaux et de la Commission européenne a travaillé pendant près d'un an.

* 27 Rapport n° 235 (Sénat, 20020-20031) de M. Pierre Fauchon - p. 16.

* 28 Voir rapport n° 82 (Sénat, 20022001-20032) de M. Pierre Fauchon - p. 18.

* 29 Voir rapport n° 126 (Sénat, 2002-2003) de M. Pierre Fauchon - p. 39.

* 30 La commission rogatoire internationale est une demande adressée par l'autorité judiciaire d'un Etat à celle d'un pays étranger aux fins d'accomplir en son nom et pour son compte une mesure d'instruction en son nom et pour son compte.

* 31 Voir article 694-2 commenté ci-après selon lequel le juge d'instruction exécute les demandes lorsque les actes de procédure sont ordonnés dans le cadre d'une instruction préparatoire, tandis qu'il revient au procureur de la République de répondre aux autres demandes.

* 32 Voir le commentaire de l'article 694-4 (infra) qui prévoit que le procureur de la République sollicité doit dans ce cas faire suivre la demande au procureur général lequel peut, à son tour, saisir le ministère de la justice et en aviser le juge d'instruction.

* 33 « Les autorités de l'Etat membre en informent sans délai les autorités de l'Etat membre requérant et indiquent les conditions dans lesquelles la demande pourrait être exécutée. Les autorités de l'Etat membre requérant et de l'Etat membre requis peuvent ultérieurement s'accorder sur la suite à réserver à la demande, le cas échéant en la subordonnant au respect desdites conditions. »

* 34 Voir supra, commentaire du troisième alinéa de l'article 694-1 créé par le projet de loi.

* 35 Cet article figure au titre XXIII, consacré à l'utilisation de moyens de télécommunications au cours de la procédure du livre IV du code de procédure pénale, relatif à quelques procédures particulières.

* 36 Rapport explicatif précité publié -C 379/1 publié en décembre 2000.

* 37 Par exemple, une infraction susceptible de donner lieu à extradition est une infraction punie par la loi de l'Etat membre requérant d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative de liberté d'un maximum d'au moins un an, et par la loi de l'Etat membre requis d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative d'un maximum d'au moins six mois.

* 38 Voir supra commentaire de l'article premier du projet de loi.

* 39 Voir infra, commentaire des articles 695-2 et 695-3 transposant les dispositions de l'article 13 de la convention du 29 mai 2000 précitée relatif aux équipes communes d'enquête.

* 40 On rappellera qu'il peut s'agir d'officiers et d'agents de police judiciaire ou encore d'officiers de douane judiciaire.

* 41 Selon les informations fournies à votre rapporteur, il semble par exemple qu'au Royaume-Uni, les équipes communes d'enquêtes seront dirigées par la police (Chief Constable).

* 42 Note de réflexion du secrétariat général du Conseil - 14 juin 2002 - document 9404/02 - JAI 107 - Eurojust 16Note du secrétariat général du Conseil de l'Union européenne - 6404/02 - 14 juin 2002..

* 43 Note de réflexion du secrétariat général du Conseil - 14 juin 2002 - document 9404/02 - JAI 107 - Eurojsut 16précitée - p. 8.

* 44 Article 68 de l'ordonnance du 22 décembre 1958.

* 45 Tel est par exemple le cas des magistrats de liaison mis à la disposition du ministère des affaires étrangères.

* 46 Loi n° 93-1013 du 24 août 1993 portant réforme de la procédure pénale.

* 47 Loi n° 86-1020 du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre le terrorisme.

* 48 «  Quels métiers pour quelle justice ? » - Rapport n° 345 (Sénat, 2001-2002) de M. Christian Cointat au nom de la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice présidée par M. Jean-Jacques Hyest - p. 207.

* 49 Infostat justice n° 62 -juin 2002 - Bulletin d'information statistique du ministère de la justice -p. 4.

* 50 La moitié ayant au moins 40 ans.

* 51 Auparavant, deux tribunaux de grande instance spécialisés (TGI) avaient vocation à intervenir en ce domaine, celui de Marseille, compétent dans le ressort des TGI de Marseille, d'Aix-en-Provence et de Tarascon, et celui de Nice, compétent dans le ressort des TGI de Digne, Draguignan, Grasse, Nice, et Toulon. Il s'agissait de prendre en compte la spécificité de cette région qui rassemble de multiples activités économiques, financières et sociales.

* 52 Rapport interne du groupe de travail du tribunal de grande instance de Paris sur le pôle économique et financier - mars 2003 - p. 2.

* 53 On dénombre un assistant spécialisé dans chacune de ces juridictions.

* 54 Ce rapport les décrit comme : « un service (parquet et siège) d'une juridiction spécialisée en application des articles 704 et 705 du code de procédure pénale auprès de laquelle ont été créés des postes d'assistants spécialisés, service doté de moyens informatiques modernes et développant le travail au sein d'équipes pluridisciplinaires (magistrats, assistants spécialisés, assistants de justice) ».

* 55 Voir en annexe la liste des personnes rencontrées par le rapporteur lors de ses déplacements dans ces deux pôles.

* 56 TRACFIN est une cellule spécialisée dans la lutte contre le blanchiment de l'argent sale mise en place en 1990 et dont l'activité a connu une forte progression.

* 57 Journal Officiel - Questions écrites du Sénat - 12 juin 2003 - p. 1919.

* 58 Journal Officiel - Questions écrites de l'Assemblée nationale- 21 avril 2003 - p 3209. Réponse à une question de M. Jean-Marc Nesme (UMP).

* 59 Il s'agissait du a) du paragraphe I du projet de loi initial devenu le 1° de ce paragraphe dans le texte adopté par les députés.

* 60 Il s'agissait des b) et c) du paragraphe I du projet de loi initial, renumérotés 2° et 3° par le texte adopté par les députés.

* 61 Il s'agissait du d) de ce paragraphe dans le projet de loi initial, renuméroté 4°) dans le texte adopté par l'Assemblée nationale.

* 62 A Paris par exemple, jusqu'au récent recentrage du périmètre du pôle, la section financière du parquet du tribunal de grande instance n'était pas distincte du celle du parquet du pôle économique et financier mais se confondait avec elle.

* 63 Ces remarques valent également pour les autres juridictions spécialisées récemment mises en place (pollution maritime, pôle sanitaire) ou appelées à se mettre en place (criminalité organisée).

* 64 Rapport n° 345 (Sénat, 2001-2002) de M. Christian Cointat « Quels métiers pour quelle justice ?» précité - p. 252.

* 65 Rapport n° 345 (Sénat, 2001-2002) précité - p. 250.

* 66 « Sachez en effet que par exemple le règlement, c'est-à-dire la synthèse écrite du dossier Elf Aquitaine, aura mobilisé à temps plein pendant plusieurs mois l'effectif de quatre magistrats et de deux assistants spécialisés. Soit en réalité 40 % de l'effectif de la section F2 du parquet pour un dossier. (...) Pendant tout ce temps, les magistrats et les assistants spécialisés en question n'ont pu évidemment accomplir aucune autre tâche. Les autres dossiers ont dû attendre et les courriers et les procédures habituelles adressées par exemple par les organismes tels que TRACFIN ont dû également être classés en attente.... ». Gazette du palais - 19- 21 janvier 2003 - p. 36.

* 67 Le conflit positif désigne une situation caractérisée par le fait que deux juridictions sont saisies simultanément d'un dossier de procédure concernant les mêmes faits.

* 68 Ils perçoivent des vacations horaires dont le nombre ne peut excéder 80 par mois et 720 par an.

* 69 Rapport n° 345 précité - p. 257.

* 70 Les agents de la banque de France nommés en qualité d'assistants spécialisés sont exclusivement affectés au pôle économique de Paris, qui concentre l'essentiel des activités bancaires et financières.

* 71 Qui pourraient être nommés à Paris (pour 6 d'entre eux), à Bastia (1 assistant supplémentaire), à Lyon (pour 2 d'entre eux), à Marseille (pour 3 d'entre eux), à Lille (pour 4 d'entre eux), à Fort-de-France (1 assistant supplémentaire), à Nanterre (pour 3 d'entre eux), à Toulouse, à Bordeaux et à Rouen (1 assistant spécialisé).

* 72 Article 50 sexies du code de procédure pénale : « Je jure de conserver le secret des informations sur les affaires judiciaires ainsi que sur les actes du parquet et des juridictions d'instruction et de jugement, dont j'aurai eu connaissance à l'occasion de mes travaux au sein des juridictions ».

* 73 Rapport du groupe de suivi sur les pôles économiques et financiers précité - p. 23.

* 74 Journal Officiel des débats du Sénat - Séance du jeudi 25 juillet 2002 - p. 2128.

* 75 Outre qu'il avait été proposé d'étendre au territoire national le champ de leur compétence aux fins de recueillir des éléments utiles à l'exercice de leurs missions et de les rebaptiser « conseillers techniques », le groupe de suivi des pôles avait également préconisé de leur permettre de participer « activement » aux auditions, perquisitions, saisies et interrogatoires. Un amendement reprenant l'ensemble de ces suggestions et déposé lors de l'examen au Sénat le 5 juin 2001 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF) avait été rejeté en raison de l'absence de lien avec le texte en discussion.

* 76 Y compris par voie télématique.

* 77 Ce type de réquisitions « ciblées » effectuées par les officiers de police judiciaire a été créé par l'article 18 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ayant inséré trois articles dans le code de procédure pénale (articles 60-1, 77-1-1 et 151-1-1).

* 78 Il s'agit de trois articles nouveaux insérés dans le code de procédure pénale respectivement pour les deux premiers articles par l'article 28 du projet de loi et pour le troisième par l'article 49 du projet de loi (voir infra).

* 79 Rapport n° 345 précité - p. 257 et 258 : « Une assistante spécialisée rencontrée au pôle de Marseille a expliqué qu'elle disposait de pouvoirs plus étendus dans son administration d'origine (qu'au sein du pôle), citant l'exemple des déclarations FICOBA (fichier des comptes bancaires) qu'elle avait l'habitude de signer elle-même ».

* 80 Voir étude d'impact.

* 81 Rapport n° 42 (Sénat, 1999-2000) de M. José Balarello.

* 82 Notons qu'il existe d'autres dérogations à la prohibition des loteries prévues soit par la loi de 1836 elle-même (loteries proposées au public à l'occasion, pendant la durée et dans l'enceinte des fêtes foraines, loteries proposées au public par les casinos autorisés), soit par d'autres dispositions telles que le décret n° 78-1067 du 9 novembre 1978 ayant confié l'organisation et l'exploitation des loteries à la société anonyme d'économie mixte « la Française des jeux ».

* 83 Journal Officiel - Questions écrites de l'Assemblée nationale - 3 mars 2003 -Réponse à une question posée par M. Jean-Marc Chavanne, UMP - p. 1628.

* 84 Journal officiel des débats du Sénat du 9 octobre 2002 - p. 2666.

* 85 Journal officiel des débats de l'Assemblée nationale - Deuxième séance du 22 mai 2003 - p. 4083 et 4084.

* 86 Résultant de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence et désormais codifiée dans le code de commerce.

* 87 Cette disposition est issue d'un amendement du Gouvernement adopté par le Sénat le 31  janvier 2002. Voir article 33 de la loi du 4 mars 2002 précitée.

* 88 Ce discours est intégralement reproduit dans la gazette du palais n° 67 à 68 - 8 et 9 mars 2002 - p. 46 à 51.

* 89 Une partie du dossier de l'affaire du sang contaminé est instruite depuis 1994 par le tribunal de grande instance de Paris, également chargé depuis 1991 de traiter le dossier de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

* 90 Avis n° 175 (Sénat, 2001-2002) de M. Pierre Fauchon.

* 91 Journal officiel - Questions écrites du Sénat - 28 mars 2002 - p. 934.

* 92 L'article L. 5311-1 du code de la santé publique visé à l'article 706-2 du code de procédure pénale dresse une liste non exhaustive de produits de santé et mentionne notamment les médicaments, les substances stupéfiantes et psychotropes, les produits contraceptifs, les dispositifs médicaux in vitro, les produits sanguins labiles, les organes, les tissus, cellules et produits d'origine humaine.

* 93 Il s'agissait du a) de l'article 8 dans la version initiale du projet de loi.

* 94 Journal officiel des débats de l'Assemblée nationale - Deuxième séance du 22 mai 2002 - p. 4085.

* 95 Il s'agissait du b) du projet de loi initial modifié par les députés.

* 96 Il s'agissait du 1) du projet de loi initial modifié par les députés.

* 97 Cette loi a notamment permis la fouille des véhicules par des officiers et agents de police judiciaire sur réquisitions du procureur de la République ainsi que les autorisations, interrogatoires et confrontations à distance par l'utilisation de moyens de télécommunications adaptés.

* 98 Même si l'affiliation de nombreux armateurs aux P&I Clubs anglo-saxons permet dans une certaine mesure de mutualiser les risques.

* 99 Jusqu'en 1992, les compagnies pétrolières implantées en France étaient tenues en vertu d'une loi du 30 mars 1928 de posséder une flotte pétrolière sous pavillon français proportionnelle aux quantités de pétrole consommées en France. Sous la pression économique, les compagnies ont eu de plus en plus recours à des pavillons de libre immatriculation dits de complaisance qui représentent en 1999 50 % de la flotte mondiale contre 3 % en 1948.

* 100 « Seules des sanctions pécuniaires peuvent être infligées en cas d'infraction aux lois et règlements nationaux ou aux règles et normes applicables visant à prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin qui ont été commises par des navires étrangers au-delà de la mer territoriale ».

* 101 Notamment dans les rails, ces couloirs de navigation très fréquentés.

* 102 De 300 à 1.800 euros H.T s'agissant d'un déballastage moyen de 200 m 3 , auxquels s'ajoute le coût de l'immobilisation du navire en termes de pertes d'exploitation pour l'armateur - le coût d'affrètement étant de 70.000 $ par jour pour un pétrolier de 250.000 tonnes.

* 103 Ainsi, la compagnie de navigation grecque Anax International a dû verser 2,5 millions de dollars pour violation du Clean Water Act, des peines d'interdiction de navigation dans les eaux américaines étant en outre prononcées à l'encontre du capitaine du navire ainsi que du responsable des machines. La société Royal Caribbean Cruises, coupable de fausses déclarations concernant le déversement illégal d'hydrocarbures, a pour sa part payé 27 millions de dollars.

* 104 L'indemnisation de la pollution accidentelle par les hydrocarbures est actuellement réglementée par la convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de 1969 instituant un principe de responsabilité du propriétaire du navire pétrolier objective, mais limitée, pour les dommages consécutifs à la pollution par hydrocarbures survenus dans les eaux territoriales de l'Etat riverain. Le propriétaire doit s'assurer ou souscrire une garantie financière, la convention de 1971 créant un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL). Financé par les contributions des Etats membres importateurs d'hydrocarbures, il assure une indemnisation complémentaire à celle du propriétaire du navire sur le dommage non indemnisé en vertu de la convention de 1969. D'importants protocoles à ces conventions -« conventions de 1992 sur la sécurité civile » et « convention de 1992 portant création du fonds »- sont entrés en vigueur en 1996. Ces conventions instituent donc un système à deux niveaux de responsabilité, reposant sur une responsabilité objective mais limitée, et portant principalement sur l'indemnisation des victimes.

* 105 Outre-mer, il existe un tribunal à Fort-de-France, dont la compétence territoriale s'étend aux ressorts des cours d'appel de Fort-de-France et de Basse-Terre, un à Saint-Denis de la Réunion et un à Saint-Pierre-et-Miquelon.

* 106 Dont la compétence territoriale s'étend aux ressorts des cours d'appel de Douai, Amiens, Rouen et Caen.

* 107 Dont la compétence territoriale s'étend aux ressorts des cours d'appel de Rennes, Poitiers, Bordeaux et Pau.

* 108 Dont la compétence territoriale s'étend aux ressorts des cours d'appel d'Aix-en-Provence, Nîmes, Montpellier et Bastia.

* 109 On rappellera que le capitaine et l'équipage étaient indiens, le propriétaire de la société de gestion italien, l'affréteur suisse, le pavillon maltais et le propriétaire de la cargaison une société française intervenant avec quatre filiales dont deux situées aux Bermudes et à Panama.

* 110 L'article L. 218-22 du code de l'environnement vise l'imprudence, la négligence ou l'inobservation des lois et règlements ayant eu pour conséquence un accident de mer.

* 111 Cette commission composée de trois magistrats de la Cour de cassation ayant le grade de président de chambre ou de conseiller statue par une décision non motivée après un débat oral en chambre du conseil.

* 112 Circulaire CRIM 01-06 G3 du 10 mai 2001 présentant les dispositions de l'article 28-1 du code de procédure pénale et de ses textes d'application relatifs aux missions judiciaires de la douane.

* 113 Alors même que le directeur général des douanes est également le secrétaire général de TRACFIN, la cellule de traitement du renseignement et d'action contre les circuits financiers clandestins. Il analyse les déclarations de soupçon transmises par les organismes financiers et les professions soumises à obligation de déclaration et peut porter à la connaissance du procureur de la République les renseignements recueillis.

* 114 Rapport de M. Jean-Luc Warsmann (n° 856, 2002-2003) au nom de la commission des Lois de l'Assemblée nationale sur le projet de loi (n° 784) portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

* 115 Cass. Crim , 26 septembre 1995.

* 116 Circulaire CRIM 01-06 G3 du 10 mai 2001 présentant les dispositions de l'article 28-1 du code de procédure pénale et de ses textes d'application relatifs aux missions judiciaires de la douane.

* 117 L'article 453 du code des douanes habilite à constater de telles infractions les officiers de police judiciaire, les agents des douanes et les autres agents de l'administration des finances ayant au moins le grade de contrôleur.

* 118 Rapport de l'OCDE sur les incidences économiques de la contrefaçon, 1998.

* 119 « Le crime organisé transnational : une menace croissante pour le marché mondial », OTAN, commission économique, 1998.

* 120 « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »

* 121 dont l'article 13 prévoit que peuvent être prises les « mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle ».

* 122 dont l'article 29 fait de la lutte contre le racisme et la xénophobie l'un des objectifs de l'Union.

* 123 Cass crim, 23 février 1993.

* 124 Article 10 : « (...) L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire. »

* 125 Du 16 mai 2000 au 30 septembre 2002, 50.984 personnes ont appelé le 114 et 12.092 fiches de signalement ont été transmises aux secrétariats des CODAC.

* 126 Circulaire du garde des sceaux aux procureurs généraux près les cours d'appel du 21 mars 2003, CRIM-AP n° 00-1500-A13-A14 : « Réponses judiciaires aux actes à caractère raciste, antisémite ou xénophobe ».

* 127 Rapport de M. Patrice Gélard n° 139 (2002-2003) sur la proposition de loi visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe.

* 128 COM (1) 664 final du 28 novembre 2001.

* 129 En vertu de l'article 225-1, « constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

* 130 Cass. Crim, 11 juin 2002.

* 131 Projet de loi n° 3045 (dixième législature) relatif à la lutte contre le racisme.

* 132 Cass. Crim. 30 janvier, 16 octobre et 27 novembre 2001.

* 133 Rapport n° 11 (1999-2000) présenté par M. Pierre Fauchon, pp. 150-151.

* 134 Rapport de la commission de réflexion sur la justice, La Documentation française, 1997, p. 29.

* 135 Journal Officiel - Assemblée nationale - 3 ème séance du 22 mai 2003, p. 4128.

* 136 Cass. Crim, 9 avril 1991

* 137 Cass. Crim., 22 décembre 1959.

* 138 La décision relève désormais du juge des libertés et de la détention.

* 139 Cass. crim., 24 novembre 1977.

* 140 Dans un tel cas, le juge d'instruction dispose d'un mois pour faire droit à la demande ou déclarer, par ordonnance motivée, qu'il y a lieu à poursuivre l'information. En cas de refus ou en l'absence de réponse, le demandeur peut saisir le président de la chambre de l'instruction.

* 141 Rapport n° 419 (1998-1999).

* 142 Traité de droit criminel - Procédure pénale, Cergas, troisième édition.

* 143 Cass. crim. 9 nomvebre 1955.

* 144 Cass. Crim. : 24 février 1993.

* 145 CEDH - 23 novembre 1993 - Poitrimol c. France.

* 146 CEDH - 23 mai 2000 - Van Pelt c. France

* 147 CEDH - 21 janvier 1998 - Von Geyseghem c. Belgique.

* 148 Cass. crim. - 16 mai 2001.

* 149 Décision n° 2002-461 DC.

* 150 Rapport n° 486 (1997-1998).

* 151 « Quels métiers pour quelle justice ? », rapport n° 345 (2001-2002) présenté par M. Christian Cointat au nom de la mission présidée par M. Jean-Jacques Hyest.

* 152 Devenue loi n° 2002-307 du 4 mars 2002.

* 153 Cass. Crim, 8 janvier 1981.

* 154 CEDH Krombach c/France, 13 février 2001.

* 155 Rapport n° 30 (1994-1995) de M. Pierre Fauchon, 13 octobre 1994.

* 156 CEDH, 8 juin 1995.

* 157 Le casier judiciaire comporte trois bulletins. Le bulletin n° 1 contient l'ensemble des informations inscrites au casier et n'est accessible qu'aux autorités judiciaires. Le bulletin n° 2 est plus largement accessible puisqu'il est transmis par exemple aux administrations publiques saisies de demandes d'emplois. En contrepartie, certaines fiches n'y figurent pas. Enfin, le bulletin n° 3 ne mentionne que les condamnations ayant donné lieu à des peines importantes. Il porte mention des décisions prononçant le suivi socio-judiciaire ou la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec les mineurs. Le bulletin n° 3 ne peut être délivré qu'à la personne qu'il concerne, qui est libre d'en disposer, notamment pour le remettre à un tiers dans le cadre d'une procédure administrative.

* 158 Rappelons qu'en vertu de l'article 27 de cette convention, son entrée en vigueur est fixée au quatre-vingt-dixième jour après sa ratification par l'Etat membre de l'Union européenne qui procède le huitième à sa ratification.

* 159 Parmi ces domaines figurent également la nationalité, l'état et la capacité des personnes, le droit patrimonial de la famille, la procédure administrative contentieuse et non contentieuse, les postes et télécommunications.

* 160 Il s'agit du B du V de l'article 12 de la loi du 3 janvier 2002 relative à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport, aux enquêtes techniques après évènement de mer, accident ou incident de transport terrestre ou aérien et au stockage souterrain de gaz naturel, d'hydrocarbures et de produits chimiques.

* 161 Depuis la visite de votre rapporteur, M. Michel Barrau a été nommé procureur général près la cour d'appel de Toulouse.

* (162) Kleine Kronzeugenregelung.

* ( 163 ) En vertu de l'article 49-2 du code pénal, qui précise que le juge peut réduire la peine en fonction de son appréciation du dossier, mais seulement dans les cas où une disposition législative explicite l'y autorise.

* (164) Il s'agit de l 'Attorney-General , procureur général, qui a rang de ministre et représente la Couronne et l'intérêt général devant les tribunaux, ainsi que du Director of Public Prosecutions , c'est-à-dire du directeur du service national des poursuites, qui est placé sous l'autorité de l 'Attorney-General .

* (165) Voir l'étude de législation comparée LC 122 de mai 2003 sur le plaider coupable.

* ( 166 ) D'après le code pénal, le juge tient compte des circonstances atténuantes et des circonstances aggravantes pour fixer la peine, qui est toujours exprimée sous forme de fourchettes. Le code énumère également les principales circonstances atténuantes et aggravantes.

* (167) Le code pénal belge prévoit une répartition des infractions en trois catégories : les crimes, les délits et les contraventions.

* (168) Cette loi prévoit l'octroi de diverses mesures de protection, parmi lesquelles la fourniture d'une protection rapprochée et la mise à disposition de moyens de communication spécifiques, voire un changement d'identité et un déménagement dans les cas les plus graves.

* (169) Bien que prise pour une durée limitée, la loi de 1982, applicable aux infractions commises avant le 31 janvier 1982, a, d'après une décision prise par la Cour de cassation en 1993, abrogé le texte précédent. Cependant, pour une partie de la doctrine, ce dernier reste ne vigueur.

* (170) C'est-à-dire appartenance ou soutien à une telle association, dans la mesure où elle regroupe au moins trois personnes.

* ( 171 ) Voir l'étude de législation comparée LC 122 de mai 2003 sur le plaider coupable.

* ( 172 ) Comme le code pénal néerlandais ne comporte pas de peine minimale, la réduction est calculée par rapport à la peine envisagée par le juge en l'absence de tout accord.

* ( 173 ) Il existe actuellement 26 procédures pénales cantonales et trois procédures fédérales (la procédure pénale fédérale, qui fixe le cadre général, la procédure pénale militaire et la procédure pénale administrative).

* (174) Le grand jury est un organe populaire chargé de la mise en accusation. Ses membres sont désignés pour dix-huit mois.

* ( 175 ) Contrairement à la situation qui prévalait jusqu'en 1970.

* ( 176 ) Les premières mesures sur la protection des témoins ont été instaurées par la loi de 1970 relative au crime organisé.

* (177) La magistrates' court décidait, en fonction de la gravité de l'infraction, de juger ou non l'affaire. Si elle choisissait de la juger et donc de ne pas la renvoyer à la Crown Court , elle devait préciser à l'accusé qu'il avait la possibilité de choisir d'être jugé par la Crown Court . Si l'accusé acceptait d'être jugé selon une procédure sommaire par la magistrates' court, celle-ci pouvait cependant être conduite à renvoyer le dossier à la Crown Court pour que cette dernière prononce une peine excédant la compétence des magistrates' courts (actuellement, peine de prison d'au plus six mois pour une infraction, avec possibilité de prononcer une peine de douze mois de prison pour plusieurs infractions).

* (178) Cette procédure a été instituée en 1994 par une directive du premier président de la chambre criminelle de la Cour d'appel ( Court of Appeal , qui, en matière pénale, équivaut à notre Cour de cassation).

* (179) En vertu de l'article 49 du Criminal and Procedure Investigations Act de 1996.

* ( 180 ) 22,7 % en 2001 et 24,2 % en 2002, d'après les statistiques du ministère de la Justice.

* ( 181 ) Cette commission, chargée de formuler des propositions pour réformer la justice pénale, a été désignée en 1991 après que plusieurs erreurs judiciaires eurent ébranlé le pays.

* (182) Voir l'étude de législation comparée n° 62 sur la présomption d'innocence (p. 39).

* (183) Le code de procédure pénale prévoit, d'une façon générale, que le juge peut accorder le sursis à exécution lorsque la peine prononcée ne dépasse pas deux ans de prison. L'exécution est alors suspendue pendant deux ou cinq ans, selon que l'infraction constitue une contravention ou revêt un caractère plus grave.

* (184) L'unique différence avec la procédure normale réside alors dans la façon de prendre en compte les preuves : elles ne font pas l'objet d'un débat contradictoire dans le jugement abrégé.

* (185) Depuis une modification introduite en 1998. Auparavant, la limite était de trois ans.

* ( 186 ) Le droit canadien reconnaît deux catégories d'infractions : les « actes criminels » et les « infractions sommaires ». Les actes criminels les plus graves doivent être jugés par un juge et un jury. Pour les autres actes criminels, le code criminel donne le choix à l'accusé : juge et jury après enquête préliminaire déterminant s'il existe assez d'éléments à charge contre le suspect, ou bien juge sans jury après ou sans enquête préliminaire. Les autres infractions relèvent d'une procédure sommaire, conduite par un juge unique.

* ( 187 ) Aussi bien au niveau fédéral que dans les différents États, les infractions sont classées en deux catégories. Les misdemeanors sont susceptibles d'être jugées selon une procédure sommaire par des juges non professionnels, même si l'accusé peut exiger un procès sur la détermination de la culpabilité, tandis que les felonies , font en principe l'objet d'un tel procès.

* (188) Comme l'interdiction de la présence du juge dans les négociations au niveau fédéral.

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