E. LES DÉPENSES EN CAPITAL (TITRE VI45 ( * ))

Les dépenses d'investissement sont presque intégralement affectées aux actions de coopération avec les Etats en développement. Tous les chapitres voient leurs crédits de paiement progresser, excepté les subventions d'investissement accordées à des projets de coopération, dont les montants sont il est vrai plus symboliques. Au total, la hausse des crédits de paiement est de 15,7 %, tandis que les autorisations de programme diminuent de 10,5 %. Cette évolution témoigne d'une programmation plus réaliste des crédits comme d'un réel effort de soutien à l'APD.

Evolution des crédits du titre VI

(en millions d'euros)

 

LFI 2003

PLF 2004

Evolution (%)

68-02. Participation de la France au FED

CP

496

565

13,9

68-80. Subventions d'investissement

 

- art. 10 : aide à des projets de coopération

 

AP

0,9

0,3

-66,3

CP

0,7

0,3

-56,6

- art. 40 : établissements culturels et de

 

coopération AP

3

2,8

-5,3

CP

2,8

2,8

-

- art.60 : projets de coopération militaire

 

AP

0,9

1,2

33,3

CP

0,8

1,2

45,9

68-91. Fonds de Solidarité Prioritaire

 

- art. 10 : dons destinés à financer des

 
 
 

projets de développement AP

190

161

-15,3

CP

112

134

19,6

- art. 30 : aide aux pays sortant de conflits

 
 
 

AP

0

10

N.S.

CP

0

6

N.S.

68-93. Dons destinés à financer des projets mis en oeuvre par l'AFD

 

AP

190

169

-11,1

CP

137

158

15,3

Total AP

384,8

344,4

-10,5

CP

749,4

867,4

15,7

Source : « jaune » annexé au PLF 2004

1. La contribution française au Fonds européen de développement : une consommation en progrès réels mais encore insuffisante

a) Origine, fonctionnement et financement du FED

Le FED, prévu dès le Traité de Rome, est le principal instrument financier de la politique communautaire en faveur des 78 pays de la zone Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP). Obéissant à une programmation quinquennale, il est approvisionné par des contributions volontaires des Etats membres, selon des clefs de contribution distinctes de celles appliquées pour le budget général de l'Union. La France est ainsi devenue en 1995 le premier contributeur du FED avec 24,3 % du financement, devant l'Allemagne (23,6 %) et le Royaume-Uni (12,7 %). L'accord signé à Cotonou le 23 juin 2000, après l'expiration de la 4 e convention de Lomé, est entré en vigueur après ratifications le 1 er avril 2003 et détermine les conditions politiques, commerciales et financières du partenariat entre l'Union et les Etats ACP pour les dix prochaines années. Les opérations au titre de cet accord seront financées pour la période 2000/2005 par le 9 e FED, d'un montant de 13,5 milliards d'euros. Les ressources du FED sont mobilisées en deux temps selon une procédure associant la Commission et les Etats ACP bénéficiaires :

- agissant sous sa seule responsabilité en tant qu'ordonnateur principal, la Commission prend en premier lieu des décisions de financement sur avis conforme du Comité du FED, composé des représentants des Etats membres de l'Union ;

- puis, par des conventions de financement, la Commission délègue la mise en oeuvre des décisions à l'ordonnateur national du pays concerné. Ce dernier conclut des contrats et ordonnance les paiements en liaison avec la délégation locale de l'Union européenne.

Le PLF 2002 avait été marqué par le transfert du budget des Charges communes au budget du ministère des affaires étrangères de la participation de la France au FED, mouvement qui avait été préconisé depuis longtemps par votre rapporteur et apporte davantage de cohérence et de lisibilité . Le PLF 2003 avait pris acte d'un décalage entre la contribution budgétée et celle effective et procédé à une « opération vérité » par une inscription de crédits plus conforme à la réalité, de 496 millions d'euros, inférieur au versement « théorique » de 558 millions d'euros, qui correspond à la quote-part de la France mais est chroniquement supérieur aux appels de fonds effectifs. La contribution effective en 2003 pourrait néanmoins être de l'ordre de 547 millions d'euros, selon les données fournies par le ministère des affaires étrangères. Le montant inscrit au chapitre 68-02 pour le budget 2004 est de 565 millions d'euros, soit une hausse de près de 14 % par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2003, qui s'explique par la poursuite de la montée en puissance du 9 e FED 46 ( * ) . Là encore, la dotation inscrite en loi de finances est inférieure aux appels de contributions prévus par la Commission, qui s'élèvent à 622 millions d'euros.

b) Des dysfonctionnements maintes fois dénoncés

Le fonctionnement du FED est notoirement déficient : les lourdeurs procédurales et la méfiance maladive des décideurs conduisent à des décaissements beaucoup trop lents et à l'accumulation de « restes à liquider », que votre rapporteur dénonce inlassablement depuis plusieurs années . Ces dysfonctionnements apparaissent encore plus prononcés que pour l'aide extérieure de l'Union dans son ensemble, qui fait pourtant l'objet de vives critiques tenant à la déconnection entre prévisions et exécution, à l'absence d'évaluation ou au manque de visibilité politique. Ils constituent un des grands motifs d'insatisfaction que nous donne l'Union européenne, et amputent d'autant les efforts d'aide bilatérale de la France.

La grande inertie de l'aide européenne au développement est connue depuis longtemps. Elle suscite désormais l'irritation des plus hautes autorités de l'Etat. Le 23 octobre 2003, à son retour d'une tournée en Afrique de l'Ouest, le Président de la République a ainsi vivement dénoncé les procédures européennes et a souligné les dysfonctionnements du FED, tenant des propos tout à fait analogues à ceux de votre rapporteur :

« Cela fait déjà un certain temps que je demande à la Commission d'améliorer ses procédures. Elle dit avoir fait quelques progrès, il faut bien reconnaître que lorsque l'on va sur le terrain, ces progrès on les cherche en vain quant à leurs résultats. (...) La France ne pourra accepter longtemps d'être un contributeur aussi important d'aide au développement européen si les résultats continuent d'être aussi modestes pour des raisons exclusivement de procédure, d'incapacité à comprendre les réalités du développement ».

De même, votre rapporteur souhaite rappeler ce qu'il relevait dans son rapport budgétaire pour 2003 :

« Votre rapporteur estime que la dramatique situation de l'aide européenne évolue peu, et que la France est aujourd'hui le bailleur d'une vaste « caisse d'épargne » (...) Les interventions du FED sont le résultat de procédures souvent trop technocratiques ou trop rigoureuses, de telle sorte que l'argent abondamment récolté n'est pas dépensé (...), faute de vision communautaire du développement et de responsabilisation des acteurs. Cette situation, qui confine à la gabegie, ampute d'autant l'aide bilatérale et n'empêche pas Bruxelles de manifester une certaine méfiance à l'encontre de l'APD française, alors même que notre pays est de loin le premier contributeur. Si les réformes actuelles ne portent pas leurs fruits, il conviendra de se demander si la France doit à son tour continuer à respecter ses lourdes obligations financières, et songer à une « révision déchirante » de notre participation lors d'un prochain Conseil européen ».

Ainsi que l'indique le tableau ci-après, les fonds des 6 e (entré en vigueur en mai 1986 47 ( * ) ) et 7 e FED (entré en vigueur en septembre 1991) n'ont pas encore été totalement engagés bien qu'ils soient programmés depuis au moins dix ans, et le 8 e FED (1995-2000) l'est à hauteur de 85 %. De même, les contributions des Etats membres appelées en 2002, soit 1.800 millions d'euros au total, l'ont été majoritairement au titre du 7 e FED (1.281 millions d'euros) et pour moins d'un tiers au titre du 8 e (519 millions d'euros). Le 9 e FED n'a encore fait l'objet d'aucun appel à contribution et sa période de référence a donc été corrigée pour se placer sur 2003-2007. Le décalage le plus inquiétant porte cependant sur les paiements, puisque fin 2002, le taux de décaissement du 7 e FED n'était encore que de 80 %, et celui du 8 e FED - qui devrait théoriquement être achevé - de 38 % . Les reliquats sont susceptibles d'être réintégrés parmi les fonds disponibles en cas d'abandon partiel de projets, de suppression de projets approuvés mais non engagés ou encore en raison de l'aide pour les pays ne réunissant plus les conditions requises d'éligibilité au FED. Ces hypothèses n'aboutissent cependant pas à la « libération » de crédits susceptibles de venir en déduction des appels à contribution , soit, par exemple, que le coût de rétablissement de l'Etat de droit soit supérieur au montant dégagé par l'abandon des projets (cas de la RDC), soit que le lancement de projets transversaux (Fonds sida-tubersulose-malaria, initiative en vue de la création d'un Fonds européen de l'eau, soutien à l'initiative PPTE...) conduise à des contributions exceptionnelles réincorporant les sommes non engagées des précédents FED.

Les « restes à liquider » (RAL) ont connu un infléchissement favorable en passant de 4,6 ans en 1999 à 3,8 ans en 2002 . On ne saurait cependant considérer ces chiffres comme satisfaisants et les délais de paiement restent encore importants. D'après le ministère des affaires étrangères, seule une partie du RAL revêt un caractère réellement anormal. Il s'agit des engagements remontant à plus de cinq ans et des engagements « dormants », pour lesquels il n'y a pas eu de décaissement dans les dix-huit derniers mois. L'office EuropeAid a fait de leur réduction une priorité : les engagements antérieurs à 1995 ont ainsi été réduits de 45 % entre fin 1999 et fin 2001.

Etat d'exécution des 6 e , 7 e et 8 e FED au 31 décembre 2002

(en millions d'euros)

 

Montants programmés

Engagements

Paiements

Reliquats

Taux d'engagement

Taux de décaissement

6 e FED

7.829

7.485

7.235

594

95,6 %

91,8 %

7 e FED

11.503

10.929

9.232

2.271

95 %

80,3 %

8 e FED

13.465

11.508

5.069

8.396

85,4 %

37,6 %

Total

32.737

29.922

21.536

11.201

91,4 %

65,8 %

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

c) Les progrès récemment enregistrés n'éludent pas la nécessité d'une budgétisation du FED

Un signe tangible de la relative amélioration de la gestion du FED réside dans la hausse de la contribution française au cours des dernières années, puisque le montant des appels trimestriels à contribution est calculé en fonction des besoins de trésorerie du FED. C'est le rythme des décaissements qui détermine celui des contributions.

La Commission a en outre entendu les critiques des Etats membres et a mis en place une réforme de l'aide extérieure de l'Union, et en particulier du fonctionnement du FED (cf. encadré), qui s'est traduite par des progrès en matière d'exécution 48 ( * ) . En 2001, les engagements avaient fortement diminué de 60 %, mais les paiements avaient progressé d'un tiers, dont une large partie était imputable aux versements exceptionnels liés à la liquidation des mécanismes STABEX et SYSMIN. L'exercice 2002 a permis de nouvelles décisions à hauteur de 1,85 milliard d'euros, en légère baisse par rapport à l'objectif initial de 2 milliards d'euros (conforme à la moyenne annuelle depuis 1989) du fait de la non-sollicitation de la tranche de 150 millions d'euros par la Banque européenne d'investissement au titre de l'initiative PPTE. Les paiements se sont élevés à 1,9 milliard d'euros, alors que la moyenne depuis 1989 n'était que de 1,6 milliard. Les montants prévus pour 2003 et 2004 apparaissent notablement plus élevés que dans le passé 49 ( * ) : ainsi pour l'exercice 2003, l'estimation des paiements faite par la Commission et qualifiée de « prudente » s'établit à 2,1 milliards, dont 60 millions d'euros pour la BEI ; l'exercice prévisionnel 2004 est quant à lui arrêté à 2,6 milliards d'euros de paiements, dont 225 millions d'euros consacrés à la BEI. L'objectif annoncé par le commissaire au développement, M. Poul Nielson, est d'arriver à une moyenne annuelle de 3 à 3,5 milliards d'euros de paiements annuels, ce qui apparaît assez irréaliste au vu du rythme de décaissement de ces dernières années et des réformes déjà accomplies . De manière générale, on constate une certaine accélération dans le décaissement des crédits du FED et une résorption encore trop lente des délais nécessaires à la consommation des dotations , qui s'établirait, selon l'Office EuropeAid, à 4,4 ans pour le FED, 6,6 ans pour ALA et 6,3 ans pour MEDA. Les affamés peuvent attendre !

La décision de la Commission d'apporter des contributions exceptionnelles significatives à certaines grandes opérations transversales , qui constitue originellement une initiative française, devrait contribuer à amplifier ce mouvement dans les années à venir. Outre les contributions précédemment mentionnées, il convient ainsi de relever que Président de la Commission, M. Romano Prodi, a annoncé en juillet dernier que le FED allait débloquer une somme de 250 millions d'euros pour soutenir les opérations de maintien de la paix conduites par les Africains sur leur continent 50 ( * ) . De même, le FED devrait accélérer le déboursement de 170 millions d'euros destinés aux Fonds mondial contre le sida.

Récapitulatif des engagements et paiements annuels du FED (tous protocoles financiers confondus)

(en millions d'euros)

 

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Evolution 1995/2002

Engagements

1.520

965

616

2.296

2.693

3.757

1.554

1.768

16,3 %

Paiements

1.564

1.317

1.213

1.440

1.275

1.548

2.068

1.902

21,6 %

Paiements hors versements exceptionnels (2000 et 2001)

1.564

1.317

1.213

1.440

1.275

1.298

1.315

1.902

 

Source : « La budgétisation du FED », rapport au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - mai 2003

Les nouvelles modalités de gestion de l'aide extérieure et la réforme du FED

1 - La réforme de l'aide budgétaire extérieure

Les critiques récurrentes à l'encontre de la gestion de l'aide extérieure européenne ont incité la Commission à prendre des mesures correctrices. La création en 2001 de l'Office de coopération EuropeAid a ainsi contribué à simplifier les différentes étapes d'élaboration des projets et de leur mise en oeuvre. Préalablement à la réforme de l'aide extérieure, un partage des responsabilités entre différents services de la Commission conduisait en effet à un trop grand émiettement des responsabilités et à une utilisation peu efficace des ressources. L'office EuropeAid, qui ne dispose pas de la personnalité juridique et est placé sous la responsabilité conjointe du commissaire au développement (DG DEV) et du commissaire aux relations extérieures (DG RELEX), est chargé de la mise en oeuvre de l'ensemble des instruments budgétaires d'aide extérieure ainsi que du FED, à l'exception de certaines rubriques (PESC, actions humanitaires, instruments de pré-adhésion). Il est donc responsable de toutes les phases du cycle des opérations, de l'instruction des projets à leur évaluation.

La réforme a également permis de généraliser le recours à la programmation (définition de documents stratégiques) et à la déconcentration de la gestion des projets au sein de plusieurs délégations régionales de la Commission. En outre, le champ d'action a été limité à six thèmes privilégiés : politiques macro-économiques et accès équitable aux services sociaux, sécurité alimentaire et développement rural, transports, commerce et développement, intégration régionale, bonne gouvernance) et trois priorités transversales (démocratie, rôle de la femme et protection de l'environnement.

2 - La réforme du FED

Dans un souci d'efficacité, l'accord de Cotonou qui régit le FED a réduit à deux le nombre d'instruments financiers relevant du Fonds : un instrument pour subventionner l'aide au développement à long terme et une facilité d'investissement afin de promouvoir le développement du secteur privé dans les Etats ACP. Les instruments de stabilisation des recettes d'exportation qu'étaient le STABEX et le SYSMIN n'ont donc pas été maintenus , ce qui a conduit à des opérations de liquidation en 2000 et 2001 et à une hausse conjoncturelle des paiements (la créance française sur le Stabex était ainsi de 471 millions d'euros fin 2000 et a été totalement apurée en début d'année 2002). Le système de programmation a également été modifié selon une logique incitative , puisque l'allocation des ressources aux pays ACP ne se fait plus seulement en fonction de leurs besoins, mais aussi de leurs résultats. Le montant de l'enveloppe pluri-annuelle allouée à un Etat devrait ainsi dépendre étroitement des résultats d'une évaluation périodique. L'accord de Cotonou prévoit une implication plus forte du Conseil des ministres ACP-UE qui examine, au moins une fois par an, si les objectifs assignés à chaque Etat ACP sont effectivement atteints.

Le Comité du FED a essentiellement pour objet la mise en oeuvre de l'enveloppe financière. Conséquence de la décentralisation de la Commission, ce comité, qui se réunit six à huit fois par an, a de moins en moins vocation à se prononcer sur les projets au cas par cas , la Commission ayant obtenu que ses travaux se concentrent sur l'examen des stratégies pays, des programmes indicatifs nationaux et des plans annuels de financement qui les accompagnent. Désormais, ce sont les délégations locales de la Commission qui sont chargées de la mise en oeuvre de la stratégie pays, arrêtée par le Comité du FED, ce qui consiste en l'identification des projets, leur montage, leur mise en oeuvre et le suivi. Ce recentrage peut être l'occasion de donner une réelle inflexion ou impulsion aux activités de la Commission dans les pays concernés.

Le Conseil des ministres a décidé d'appliquer l'accord de Cotonou par anticipation à compter du 2 août 2000, sans attendre son entrée en vigueur le 1 er avril 2003. Lors de cette période de transition, la Commission a affecté 1.200 millions d'euros de la réserve générale du 8 e FED à la programmation du 9 e FED. Enfin, pour éviter les retards de mise en oeuvre qui ont marqué les précédents cycles, la Commission a initié l'adaptation de certains textes d'accompagnement nécessaires à la mise en oeuvre de la convention dès son entrée en vigueur.

Source : « jaune » annexé au PLF 2004 relatif aux relations financières avec l'UE

Il importe toutefois de demeurer lucide quant au niveau des progrès enregistrés : si une évolution favorable est indéniable, il n'y a vraiment pas lieu de s'en contenter, tant le niveau de départ est désastreux. Il importe également de s'interroger sur l'impact d'une hausse des versements sur le terrain : si la volonté d'accélérer les décaissements devait se traduire par une moindre sélectivité des projets et par de nouveaux « éléphants blancs », la gabegie n'aurait fait que changer de localisation. L'efficacité de l'amélioration apparente de la gestion doit donc faire l'objet d'une évaluation approfondie. Les errements des années passées doivent en outre conduire à se poser sérieusement la question de l'ampleur des contributions des Etats membres et de la capacité d'absorption des récipiendaires . S'il faut en moyenne quatre ans pour dépenser les crédits, ne conviendrait-il pas de revoir à la baisse les ambitions quantitatives de la Commission, pour privilégier des projets mieux ciblés ? La croissante « externalisation » de la programmation du FED vers des fonds ad hoc multilatéraux se heurte également à certaines limites conceptuelles , car si elle constitue une solution partielle en matière de gestion des paiements, elle témoigne aussi de la difficulté à bien cerner la vocation du Fonds et d'une insertion croissante de l'aide-programme. Votre rapporteur spécial considère ainsi que si certains projets transversaux méritent d'être soutenus, il est également nécessaire de ne pas faire du FED, à moyen terme, une sorte de « sas » budgétaire vers l'abondement de fonds multilatéraux. Là encore, le problème de la gestion de l'aide communautaire au développement n'aurait fait qu'être déplacé vers les institutions multilatérales, dont la gestion est également loin d'être exempte de toute critique et qui se gardent bien de souligner la participation française pourtant la plus forte !

Dans l'immédiat, la poursuite de la réforme du FED - qu'il ne s'agit pas de faire disparaître mais bien d'améliorer - doit se traduire par une mesure déterminante consistant en son intégration dans le budget communautaire, et partant sa soumission au droit commun de la gestion et du contrôle budgétaires . Les avantages escomptés de cette budgétisation sont grands, à commencer par un meilleur partage de la charge de financement (et donc par une réduction significative de la contribution française), et ses risques mesurés, ainsi que l'explique l'encadré ci-après.

Les perspectives de budgétisation du FED

L'intégration du FED dans le budget communautaire constitue une initiative française, formalisée dans un rapport remis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en mai 2003, et qui reçoit un écho favorable de la Commission. Michaele Schreyer et Poul Nielson, respectivement commissaires chargés du budget et du développement, ont en effet fait des propositions en ce sens début octobre 2003, et ont insisté sur la fenêtre d'opportunité qui s'ouvrait aujourd'hui comme sur les avantages escomptés de la budgétisation en termes d'efficacité, de transparence, de légitimité, de contrôle et de modernisation des relations de l'Union avec les Etats ACP. Il apparaît que la budgétisation, si elle n'est pas la panacée et ne devrait pas résoudre toutes les difficultés, n'en constitue pas moins une nécessité technique d'une grande portée politique .

Le rapport sur la budgétisation du FED considère que la double spécificité institutionnelle et budgétaire du FED constitue aujourd'hui un double archaïsme . La spécificité budgétaire tient en particulier à l'absence d'annualité - alors que ce principe serait compatible avec l'établissement d'une programmation pluri-annuelle - et au relâchement auto-entretenu de la contrainte temporelle, dû en particulier aux ratifications tardives des protocoles quinquennaux successifs et à l'absence d' « échéance couperet » qui conduit à ce que chaque FED puisse demeurer en vie aussi longtemps que les crédits prévus restent non consommés. La liberté de gestion et l'impossibilité de tout transfert de crédits vers le budget communautaire, qui étaient longtemps apparus comme des atouts, sont aujourd'hui des facteurs de vulnérabilité et privent le FED des vertus généralement attachées à la notion de budget, l'obligation de faire des choix comme de respecter des délais, contribuant in fine à la thésaurisation des promesses d'aide .

En outre, l'absence de partage des rôles clair entre autorités d'élaboration et d'exécution et le manque de lisibilité globale de cet instrument rendent le contrôle politique difficile, d'autant que le Parlement européen - et de manière générale toute intervention parlementaire - est exclus du processus.

Cette spécificité, selon le rapport, est devenue une entrave aux réformes . La redéfinition du rôle du Comité du FED, qui depuis le 1 er avril 2003 se recentre sur les orientations stratégiques, témoigne d'un souci d'efficacité mais retire une part de la capacité d'influence des principaux pays contributeurs. L'élargissement de 2004 pose également le problème de la capacité contributive des nouveaux adhérents, et partant le risque de deux catégories d'Etats membres au regard du FED, les donateurs et les non contributeurs. La rénovation du FED à l'intérieur de son statut particulier a été largement explorée, et les marges de manoeuvre de modernisation sans budgétisation semblent épuisées . L'idée de récompenser les pays performants a en particulier été discutée avec les pays ACP et consacrée dans l'accord de Cotonou, mais la persistance des reliquats apporte un démenti aux espérances des signataires . Si un accroissement du volume des décaissements peut être observé depuis trois ans, il a été pour l'essentiel obtenu grâce à d'importantes contributions particulières à des fonds multilatéraux, qui incitent à juger les prévisions de décaissements de la Commission pour la période 2000-2007 comme particulièrement optimistes. On constate enfin une volonté manifeste de rapprocher les règles du FED, tout en maintenant son statut, de celles du budget (notamment par l'insertion d'une « sunset clause » prévoyant l'annulation automatique des engagements non suivis de décaissement, mais cela ne devrait pas suffire à améliorer durablement les décaissements, compte tenu d'autres facteurs de blocage. Ainsi, l'idée de réallocation entre pays se heurte au fait que « les fonds bloqués du fait de pays non performants ou de l'application de sanctions peuvent en pratique être gelés indéfiniment sans préjudice apparent pour le groupe ACP, car sans risque affiché de réaffectation au profit d'une autre région du monde ».

Les rapporteurs considèrent que la notion de partenariat, consubstantielle au FED, ne font pas obstacle à sa budgétisation . La budgétisation, qui ferait du FED une dépense de la rubrique IV, devrait apporter des aménagements tels que le recours à la notion de « crédits d'engagement » dans le cadre des programmes pluriannuels, une possible remise en cause de certains aspects administratifs du système des ordonnateurs nationaux, une meilleure utilisation des complémentarités offertes par les cofinancements, la mise en place de fonds sectoriels, ou l'insertion d'une clause dérogatoire tendant à faciliter les délégations de crédits, sur lesquelles le règlement financier général de la Communauté est actuellement très restrictif. L'automaticité des allocations de fonds, qui a imprégné la « culture » de Lomé, sera d'autant moins prégnante qu'il existe une conditionnalité européenne particulièrement affirmée dans le domaine politique. La budgétisation devrait aussi avoir pour effet de rééquilibrer le « triangle d'incompatibilité du décaissement » entre conditionnalité, allocation automatique et versement rapide, en restaurant l'importance du critère du décaissement. La budgétisation devrait également contribuer à ce que se traduise réellement le choix consistant à favoriser davantage les pays performants, et susciter des évolutions organisationnelles chez les récipiendaires.

La budgétisation devrait en outre présenter les avantages suivants :

- une vision globale et une plus grade lisibilité des actions extérieures et de la politique de coopération de l'Union . La perspective de disposer d'un seul instrument pour financer des actions transversales et sectorielles apparaît également beaucoup plus saine ;

- un gain pour chacune des trois grandes institutions de l'Union : Commission, Parlement et Conseil ;

- une meilleure aptitude de l'Union à faire valoir ses choix . La priorité accordée aux pays ACP devra toutefois être explicitement précisée. En revanche, si la budgétisation devrait pallier le manque d'incitation du système actuel, elle ne résoudra pas par elle-même l'insuffisante capacité d'absorption de certains pays bénéficiaires. En outre, le souci de protéger la ressource, principale préoccupation des pays ACP qui redoutent que la budgétisation n'aboutisse in fine à réduire les montants alloués, doit conduire à prévoir des mécanismes d'alerte en cas de mauvaise consommation des crédits, plutôt qu'à remettre en cause le principe même de la budgétisation.

Source : « La budgétisation du FED, une étape dans la modernisation de l'aide » - Rapport de MM. Dominique Bocquet et Stéphane Viallon au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, mai 2003

Votre rapporteur spécial approuve la fermeté du gouvernement français sur l'utilisation des crédits du FED, après que la France a trop longtemps fait preuve d'une confiance excessive à l'égard de la Commission européenne. En dépit de progrès récents que l'on ne peut nier en matière de consommation des crédits, le niveau de départ est trop insuffisant et la marge d'amélioration trop ténue pour que l'on puisse faire l'économie d'une vraie réforme du fonctionnement du FED. L'alternative est en réalité la suivante :

- constater que la variable d'ajustement réside en réalité dans les montants alloués, et réviser à la baisse les ambitions communautaires en matière de coopération afin d'assurer un meilleur taux de consommation des crédits ;

- intégrer le FED dans le budget général, en tant que levier pour une réforme structurelle de son fonctionnement institutionnel et financier.

Votre rapporteur spécial considère que la seconde option est la meilleure, en ce qu'elle présente le triple avantage de pérenniser le volume d'aide au développement 51 ( * ) (pour autant que la budgétisation soit assortie de garanties suffisantes), de réunir les conditions propices à une gestion plus performante, et de réduire la contribution française par l'application des clefs de répartition du budget général. La France serait en effet le principal bénéficiaire sur le plan budgétaire, puisque sa contribution passerait de 24,5 % à 16,4 % (dans le cadre d'un périmètre de financement non élargi), soit à titre d'exemple une économie de plus d'un milliard d'euros pour l'abondement de l'enveloppe du 9 e FED (13.500 millions d'euros au total).

Impact de la budgétisation du FED sur les taux de contribution dans une Union à 15 membres

 

Clef applicable aux 8 e et 9 e FED (%)

Clef applicable après budgétisation (%)

Impact en part dans le financement

Belgique

3,9

3

-0,9 point

Danemark

2,1

2

-0,1 point

Allemagne

23,4

22,7

-0,7 point

Grèce

1,3

1,6

+0,3 point

Espagne

5,8

7,5

+1,7 point

France

24,3

16,4

-7,9 points

Irlande

0,6

1,2

+0,6 point

Italie

12,5

13,8

+1,3 point

Luxembourg

0,3

0,2

-0,1 point

Pays-Bas

5,2

5

-0,2 point

Autriche

2,7

2,3

-0,4 point

Portugal

1

1,4

-0,4 point

Finlande

1,5

1,5

0 point

Suède

2,7

2,7

0 point

Royaume-Uni

12,7

18,8

+6,1 point

Source : « La budgétisation du FED », rapport au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - mai 2003

2. Le Fonds de Solidarité Prioritaire : l'espoir d'une situation financière normalisée

a) Un effort manifeste de redressement des moyens budgétaires

La quasi euthanasie du FSP que votre rapporteur avait déploré il y a deux ans, en raison de la diminution des autorisations de programme et de la paralysie conjoncturelle née de la régulation budgétaire, a été confirmée en 2002 et en bonne partie en 2003. Si les autorisations de programme avaient en effet été relevées de 26,5 % dans le PLF 2003, les crédits de paiement étaient pour leur part demeurés inchangés, de telle sorte que se créait un décalage préjudiciable à une programmation des crédits digne de ce nom. La régulation budgétaire en 2003, qui s'est finalement traduite par un gel net de 13,7 millions d'euros de crédits de paiement (après déblocage de 11,2 millions d'euros en août) et de 19 millions d'euros d'autorisations de programme, a produit les même effets que l'année précédente : de réelles difficultés de paiement sont apparues dès la fin du premier semestre et la mise en oeuvre des projets comme la crédibilité de la France en ont souffert. A la fin du premier semestre, plus de 80 % des AP avaient été déjà consommées à la suite des décisions prises lors de quatre comités de projets.

Les dotations inscrites dans le PLF 2004 semblent en mesure d'offrir un « ballon d'oxygène » au Fonds, grâce au resserrement bienvenu de l'écart en autorisations de programme et crédits de paiement que permettent la diminution de 10 % des premières (à 171 millions d'euros) et la hausse de 25 % des seconds (à 140 millions d'euros).

Ces crédits incluent l'abondement d'un nouveau chapitre budgétaire, dédié aux programmes d'aide au pays sortant de conflit, pour un montant de 10 millions d'euros en AP et de 6 millions d'euros en CP. Cet article constitue la traduction d'une nouvelle mission attribuée au FSP. En effet, contrairement à sa vocation, le FSP peut désormais intervenir hors de la ZSP , en vertu du décret du 11 septembre 2000. La réunion du CICID du 11 décembre 2002 a ainsi décidé l'engagement du FSP en Afghanistan, dans le cadre des initiatives post-conflit. Un premier projet de 2 millions d'euros a été approuvé par décision ministérielle en juillet 2003, et un projet d'appui à la reconstruction de l'enseignement s'élevant à 3,7 millions d'euros est actuellement en cours d'instruction. Cette extension du périmètre d'intervention du FSP est budgétairement consacrée par l'apparition d'un nouvel article 30 dans la nomenclature, intitulé « Aide aux pays sortant de conflits » et doté de 6 millions d'euros de crédits de paiement en 2004. Les projets ainsi mis en oeuvre restent encore limités, ainsi que l'illustre le tableau ci-après, mais il importe que ces interventions demeurent bel et bien marginales.

AP consacrées à des projets hors ZSP

(en millions d'euros)

 

2002

2003

Total

Serbie-Montenegro

5,5

-

5, 5

Europe du sud-est

1,9

0,3

2,2

Afghanistan

-

2

2

Total

7,4

2,3

9,7

Source : ministère des affaires étrangères

b) Une ventilation géographique et sectorielle appropriée

La ventilation géographique et sectorielle des projets financés en 2002 et 2003 est cohérente avec les priorités affirmées de la France en matière de coopération. Le continent africain a recueilli près de 83 % des nouveaux projets pays au cours des trois premiers trimestres de cette année, et la répartition entre les différents secteurs sur la même période apparaît équilibrée. Votre rapporteur déplore toutefois un recul de l'éducation par rapport à 2002, au profit de projets culturels plus ou moins « vaseux » qui ne contribuent pas le plus directement au développement, si l'on met à part les avantages qu'en tirent ceux qui les proposent ou les réalisent. La promotion de la culture est en effet un « luxe » que la plupart des pays les moins avancés ne peuvent encore se permettre. L'évaluation du Fonds Social de Développement a également été menée par le bureau d'études EVALUA, et une rationalisation de la procédure de validation est amorcée. Depuis fin 2001, la DGCID encourage en effet les services et postes à présenter leurs projets le plus tôt possible en début d'exercice, afin d'éviter les traditionnels engorgements de fin d'année. Enfin la réforme comptable du FAC/FSP s'organise en application de la circulaire interministérielle du 4 janvier 2002, mais ne pourra être achevée que d'ici quelques années.

Répartition sectorielle provisoire

de l'enveloppe d'AP pour 2003

(en millions d'euros)

 

Répartition provisoire par région et par type de projet de l'enveloppe d'AP

(en millions d'euros)

 

AP décidées au 15/09/2003

Part de chaque secteur

Rappel part 2002

 
 

Montant

Part

Institutionnel

32,3

22,9 %

34,7 %

 

Afrique australe et Océan indien

8,2

12,4 %

Société Civile

19,5

13,9 %

13,7 %

 

Afrique centrale

17,3

26,3 %

Santé

10,8

7,7 %

6,5 %

 

Afrique de l'ouest

29

44,1 %

Education

14,4

10,2 %

16,8 %

 

Asie du sud-est

3,2

4,9 %

Culturel

24,3

17,2 %

2,4 %

 

Caraïbes et Pacifique

1,7

2,5 %

Fonds Social de développement

16,8

11,9 %

11,9 %

 

CICID

2

3 %

Recherche

17,3

12,3 %

13,2 %

 

Maghreb

4,5

6,8 %

Inter sectoriel

5,6

3,9 %

0,7 %

 

TOTAL FSP pays

65,9

100 %

 
 

100 %

100 %

 
 
 

46,7 %

Total AP décidées au 15/09/03

141,1

81,5 %

 
 

Projets inter-Etats

4

2,8 %

AP 2003 restantes au 15/09/03

32,1

18,5%

 
 

Projets mobilisateurs

71,2

50,5 %

Source : ministère des affaires étrangères

Conclusions de l'évaluation du Fonds Social de Développement par le bureau d'études EVALUA

La société EVALUA a réalisé une évaluation du dispositif FSD sur la période 1996-2002, qui confirme une nette évolution des interventions des postes en faveur de la société civile, sur le plan quantitatif et qualitatif. Les opérations sont en général - individuellement - de bonne qualité, et la société a formulé les conclusions et recommandations suivantes.

1 - Bilan

- l'orientation « sociale » et « société civile » des FSD est confirmée dans tous les pays : la proportion des fonds consacrée à l'État est en moyenne de 21 %. Les structures associatives et ONG sont les principales organisations bénéficiaires avec 43 % des fonds, alors même que les conseillers de coopération ont une connaissance peu approfondie de ce milieu. Les FSD sont pour les postes davantage un moyen de financer des projets d'une certaine échelle, que l'outil d'une stratégie organisée d'établissement de relations de la France avec la société civile nationale .

- l'utilisation des FSD par les SCAC ne s'inscrit pas non plus dans une stratégie de relation avec les autres bailleurs. La complémentarité qui pourrait exister entre les FSD et les fonds multilatéraux (PAM, UE, BM ...) n'est que très rarement recherchée ;

- apporter une aide à des pauvres est un objectif, au moins implicite, des personnes qui gèrent et attribuent les fonds FSD. Cependant ce n'est pas un critère souvent évoqué de manière explicite ; le ciblage relève parfois d'une logique caritative . Les projets bénéficiant plus aux femmes qu'aux hommes sont très minoritaires ;

- la viabilité des projets financés, ou a minima le fait qu'ils produisent leurs effets sur la durée initialement prévue, est un souci constant des responsables de la coopération française dans chacun des pays étudiés ;

- le dispositif est orienté sur l'investissement physique (constructions, équipements ...). Il ne finance pas explicitement, et ne réalise que rarement, d'accompagnement social auprès des groupes de population visés par les projets ;

- s'agissant de la gestion stricto sensu des enveloppes et des projets FSD, les capacités manifestées par les SCAC apparaissent globalement satisfaisantes. Le recours à du personnel national, en complément du personnel expatrié, est très peu pratiqué. Le souci d'évaluation ex post est en général inexistant ;

- la visibilité des FSD est habituellement nulle. La communication sur ces projets est en général inexistante . L'image positive repose sur l'appropriation des projets par des acteurs nationaux. Elle devrait reposer sur un tissu de relations avec la société civile plutôt humaines que financières. Or le mode de gestion actuel des FSD ne le favorise guère ;

- l'articulation des projets FSD avec le reste de la coopération française, sur les mêmes secteurs, et la capitalisation de l'expérience FSD (par les assistants techniques) ne suffisent pas, de l'avis des évaluateurs, à la valorisation des « bonnes pratiques » sur FSD.

2 - Recommandations

- les évaluateurs recommandent de maintenir le dispositif, de mieux le faire connaître et de consacrer l'appellation « Fonds social de développement » ;

- les évaluateurs proposent de distinguer sept types d'actions finançables sur FSD, regroupés sous trois « guichets » : (1) investissement local, petit projet expérimental, action ciblée en faveur d'un groupe défavorisé, appui aux promoteurs de droit humain et démocratie, (2) capitalisation (sur les projets FSD) et diffusion d'information (sur les droits de l'homme), (3) "État et actions d'urgence" ;

- une cellule de gestion des FSD bien identifiée et chargée de la totalité de ce fonds devrait être mise en place dans chaque pays. Le pouvoir et l'information des partenaires nationaux devraient être accrus dans la phase amont du cycle de projet relative à l'instruction et la sélection des projets ;

- les rapports de présentation au comité des projets FSP de nouveaux projets FSD devraient comporter un rapport final d'exécution sur les enveloppes FSD anciennes, comprenant une auto-évaluation ex post de leurs forces et faiblesses.

Le principe d'une refonte de l'instruction de la circulaire de 1996 relative aux FSD était suspendue aux résultats de l'évaluation. Elle est désormais en chantier.

Source : ministère des affaires étrangères

c) Une gestion perfectible du stock de projets

Le FSD gère un nombre très élevé de projets « vivants », puisque 546 projets sont encore en cours de réalisation, pour un montant global de 843 millions d'euros. Ce « stock » de projets a augmenté de 3,4 %, et le montant correspondant de 11,5 % par rapport à 2002 (528 projets). L'ancienneté du stock a toutefois diminué puisque moins de 28 % des projets vivants datent de plus de quatre ans (pour environ 26 % des crédits), contre près de 31 % en 2002. Le nombre toujours très élevé de projets vivants (plus nombreux qu'en 2002 !) suscite toutefois les inquiétudes de votre rapporteur et témoigne tant d'une certaine dispersion des crédits - ainsi que l'illustre le montant unitaire moyen relativement faible des projets, en particulier ceux initiés entre 1997 et 2000 - que de la lenteur d'exécution et d'une probable léthargie pure et simple d'une part non négligeable du portefeuille de projets. On peut légitimement s'interroger sur la capacité effective de la DGCID à gérer un aussi grand nombre de projets , quand un opérateur tel que l'AFD en gère une centaine de moins avec des moyens humains et techniques bien supérieurs. Il convient néanmoins de souligner une plus grande concentration des projets depuis deux ans et en particulier cette année.

Ventilation des projets vivants (au 30 juin 2003) du Fonds de Solidarité Prioritaire par année

(en millions d'euros)

 

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Total

Nombre de projets

4

5

23

58

62

135

149

89

21

546

Montant global

7,1

8,2

26,7

90,1

86,1

155,7

237

177,6

54,5

843

Montant unitaire

1,8

1,6

1,2

1,5

1,4

1,2

1,6

2

2,6

1,5

Cumul montant en %

0,8 %

1,8 %

5 %

15,7 %

25,9 %

44,4 %

72,5 %

93,5 %

100 %

 

Cumul nombre en %

0,7 %

1,6 %

5,9 %

16,5 %

27,8 %

52,6 %

79,8 %

96,2 %

100 %

 

Source : ministère des affaires étrangères

 
 
 
 
 
 
 
 

Les lacunes du ministère en matière de gestion financière des projets du FSP sont également criantes lorsque l'on considère les deux aspects suivants :

- il a fallu attendre 2002 pour qu'un comité de suivi des projets soit institué, et il ne semble pas que ses effets positifs se soient encore fait sentir sur la composition du portefeuille de projets. Le rapport du cabinet EVALUA souligne en outre que le souci d'évaluation ex post est en général inexistant ;

- le ministère indique que « le taux d'engagement des crédits est une donnée non disponible aujourd'hui, mais le dispositif informatique permettant l'obtention de ces informations est en préparation ». Votre rapporteur spécial est très surpris que les services de la DGCID ne se soient pas attachés à recueillir des informations aussi élémentaires, que n'importe quelle structure de gestion de projets s'oblige habituellement à fournir si elle ne veut pas « aller dans le mur ». Ainsi, la DGCID ne dispose d'aucune vision synthétique de l'exécution réelle des projets les plus anciens.

3. L'Agence française de développement

a) Instruments d'intervention et sources de financement

L'AFD, consacré comme « opérateur-pivot » de l'aide française depuis la réforme du dispositif en 1998, représente plus du quart de l'aide bilatérale et contribue par ses concours financiers (près de 1,2 milliard d'euros d'engagements pour compte propre en 2002, dont 708 millions dans les Etats étrangers) à la réalisation de projets productifs, publics ou privés 52 ( * ) . Elle intervient dans 41 des 48 pays classés par l'ONU comme pays à très faible revenu et emploie 1.371 personnes (dont 700 expatriés dans les Etats étrangers et l'outre-mer), de statut privé depuis 1996. Elle possède 42 agences dans le monde et 9 agences des instituts d'émission.

Principaux instruments d'intervention (hors DOM-TOM)

Conditions

Aide-projet

Dons-projets

Financement de projets relevant des Etats dans les PMA

Concessionnalité de 100 %

Prêts souverains

Prêts accordés dans les PRI (Etat ou secteur para-public).

Durée de 15 à 30 ans dont 3 à 10 de différé. Taux de 1 à 5,5 %. Concessionnalité de 35 %

Prêts très concessionnels

Prêts accordés dans certains PMA (Etat ou para-public)

Concessionnalité de 65 %

Prêts non souverains

Prêts accordés aux entreprises publiques marchandes

Durée de 8 à 20 ans dont 3 à 7 de différé. Taux de 2,5 à 5,5 %. Concessionnalité de 35 ou 50 %

Prêts de marché

Financement de projets rentables économiquement

Durée de 8 à 12 ans dont 2 à 3 de différé. Taux de marché donc concessionnalité nulle

Protocoles du Trésor

Gestion pour le compte de l'Etat

Concessionnalité variable

Ajustement structurel

Subventions d'ajustement

Subventions accordées aux PMA

Concessionnalité de 100 %

Prêts d'ajustement

Prêts accordés aux PRI

35 % d'élément don concessionnel

En 2002, le groupe AFD a assuré 1.652 millions d'euros de financements, dont près des deux tiers dans les Etats étrangers et 36 % dans les DOM-TOM (prêts exclusivement). Les prêts et subventions aux Etats étrangers ont représenté respectivement 708 millions 53 ( * ) (soit une croissance de 43,9 % par rapport à 2001) et 199 millions d'euros, et les prises de participations toutes zones confondues 9 millions d'euros.

Les activités pour compte propre de l'AFD sont financées selon quatre sources : des subventions budgétaires émanant du chapitre 68-93 du budget du ministère des affaires étrangères, des emprunts que l'AFD lève sur le marché et dont les intérêts sont bonifiés par le Trésor (ramenant ainsi leur coût à 0,25 %) au gré des échéances, des emprunts auprès du Trésor d'une durée de 30 ans (dont 10 ans de différé à 0,25 %), et des emprunts levés sur les marchés sans la garantie de l'Etat.

Origine et évolution des ressources de l'AFD depuis 1998

(en millions d'euros)

 

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

Evolution 2000/ 2004

Evolution 2003/ 2004

Ressources bonifiées par le Trésor

327

435

602

463

443

450

450

37,6 %

stable

Emprunts auprès du Trésor à 0,25 %

97

118

136

79

106

100

100

3,1 %

stable

Ressources budgétaires MAE

203

188

177

180

174

152

160

-21,2 %

5,3 %

Ressources à conditions de marché

440

291

242

297

323

300

300

-31,8 %

stable

Total

1.067

1.032

1.157

1.019

1.046

1.002

1.010

-5,3 %

0,8%

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

 
 
 

Les ressources de l'AFD se stabilisent après avoir connu une baisse de 13,4 % entre 2001 et 2003, ce qui contrevenait à la volonté affichée de soutenir l'aide bilatérale , mais il est vrai que l'Agence dispose de certaines marges de manoeuvre financières, en particulier grâce à un ratio de solvabilité élevé (cf. ci-dessous). La part des ressources budgétaires tend à se stabiliser depuis 2001 dans une fourchette de 16 à 18 % après avoir connu une diminution, celle des ressources bonifiées par le Trésor est stabilisée à environ 45 % après avoir connu une forte hausse à partir de 2000.

b) Une situation financière saine mais des risques encore trop concentrés

Le Trésor rappelle que la situation financière du groupe AFD fin 2002 est saine :

- un ratio de solvabilité élevé : 38,64 % à fin 2002 contre 37,33 % fin 2001, le minimum réglementaire posé par le ratio Cooke étant de 8 %. Le ratio relatif au contrôle des grands risques est également respecté par le groupe ;

- le recouvrement de créances est satisfaisant, compte tenu des importants risques inhérents au financement de projets dans les pays en développement. Le taux des impayés s'est toutefois dégradé par rapport à 2001 puisqu'il représentait 12 % de l'encours fin 2002 54 ( * ) , contre 7,3 % fin 2001 ;

- le bilan du groupe AFD est déterminé à 93% par celui de l'Agence et s'élève à 17,5 milliards d'euros . Le total de bilan de la seule Agence est de 16,3 milliards d'euros, soit une baisse de 4,7 % par rapport à 2001. Plus de 60 % du bilan est constitué d'encours de prêts pour compte propre, soit 11,7 milliards d'euros ;

L'encours brut de prêts, de 11,7 milliards d'euros, se décompose de la façon suivante : 8 milliards d'euros pour les risques de l'Agence (4,2 milliards d'euros pour les Etats Etrangers et 4 milliards d'euros pour les DOM-TOM) ; 2 milliards de prêts d'ajustement structurels garantis par l'Etat ; 1,4 milliard d'euros de prêts remis par l'Etat (décisions de Dakar et la Baule) ; 2,2 milliards d'euros de protocoles du Trésor ; 2,1 milliards d'euros au titre de la gestion de la contribution française à la Facilité de réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC) du FMI ; 600 millions d'euros de portefeuille d'investissements et 700 millions d'euros de trésorerie ;

- concernant l'Agence stricto censu , les principaux risques pondérés 55 ( * ) (au sens du Comité de la réglementation bancaire et financière) sur les plus gros emprunteurs concernaient fin 2002 le Maroc avec 558 millions d'euros, la Tunisie avec 457 millions d'euros et le Cameroun avec 361 millions d'euros. Cette relative concentration des risques bancaires sur un petit nombre de pays a motivé la décision du CICID du 11 décembre 2002, consistant à autoriser l'Agence à accorder des prêts à certains pays hors ZSP , jugés importants pour les intérêts géopolitiques de la France et pour la cohérence de l'action de l'AFD. Il s'agit, selon l'Agence « d'une part de développer une approche régionale en Méditerranée pour accompagner le processus de Barcelone, en construisant sur l'expérience acquise au Maghreb, au Liban et dans les Territoires palestiniens et, d'autre part, de développer une approche régionale sur le Bassin du Grand Mékong », en profitant de l'expertise des entreprises françaises dans cette région, notamment dans les domaines de l'eau et des services.

Enfin d'après les données du rapport annuel de l'AFD, le résultat net part du groupe était de 37,5 millions d'euros en 2002, soit une baisse de 32,2 % par rapport à 2001, imputable aux dotations aux provisions qui ont dû être comptabilisées sur l'exercice. Le retour sur fonds propres était quant à lui de 2,9 % , mais ne saurait être comparé aux normes prévalant pour des banques beaucoup plus diversifiées du secteur privé, et en particulier au fameux dogme de 15 %. Le coefficient d'exploitation , calculé en rapportant les charges générales d'exploitation au produit net bancaire, était de 40,2 %, soit un niveau que l'on peut considérer comme très satisfaisant . Le produit net bancaire par salarié s'élevait à 224.463 euros, ce qui constitue également un bon chiffre, notamment si on le compare à celui de banques privées compétitives 56 ( * ) .

c) Les ambiguïtés de la gestion des projets

Le décalage entre autorisations de programme et crédits de paiement, qui s'était aggravé en 2002 et 2003, tend à se réduire puisque les AP s'inscrivent en baisse de 11,1 % et les CP en hausse de 15,3 %. Avec respectivement 169 millions et 158 millions d'euros, cet écart entre AP et CP n'est donc plus que de 11 millions d'euros, contre 53 millions en 2003. Cette prévision paraît à la fois plus réaliste et de nature à donner à l'Agence les moyens de ses ambitions, mais aussi de lui permettre de démarrer les projets qui auront été affectés par la régulation en 2003. Il est ainsi permis d'espérer que les difficultés de paiement en fin d'exercice que l'Agence a connus au cours des exercices récents, et que votre rapporteur avait à juste raison craint pour 2003, s'estompent en 2004.

Un examen rapide de la liste des projets vivants, synthétisé dans le tableau ci-après, révèle que le quart ont été décidé en 1997 ou au cours des exercices précédents 57 ( * ) , et un taux de décaissement moyen assez réduit (36,4 %), quoiqu'en progression par rapport à 2002 (34 %). On constate également que le nombre annuel de projets comme les engagements unitaires ont augmenté au cours de la dernière décennie, mais l'année 2003 et les prochains exercices devraient être marqués par une relative concentration des opérations conformément au repositionnement stratégique de l'AFD. Ces nouvelles orientations, déclinées dans le plan stratégique présenté en mars 2002, devraient se traduire par la confirmation de la priorité accordée à l'Afrique, un positionnement accentué sur les avantages comparatifs de l'Agence, une augmentation des co-financements et un relèvement du montant moyen des prêts, dans le cadre d'une recherche de la taille critique pour une meilleure efficacité sur le terrain. Votre rapporteur spécial tient toutefois à réitérer les réserves qu'il a communiquées au Conseil de surveillance, dont il est membre suppléant, sur le montant élevé de certaines études préparatoires à la mise en oeuvre des C2D.

Dans un courrier adressé fin décembre 2002 à votre rapporteur, l'AFD contestait les données relatives au niveau de décaissement mentionnées dans le rapport budgétaire pour 2003, et faisait état de taux de décaissement de 91 % pour 2000, de 74 % pour 2001 et de 76 % pour 2002. Les chiffres relatifs aux projets vivants avaient pourtant été communiqués par le ministère des finances, si bien que l'important écart constaté entre les deux sources entretient le doute quant à la qualité de la communication entre le Trésor et l'Agence. L'AFD indiquait également qu'à fin 2002, les restes à verser « représenteront moins de cinq années d'engagements, ce qui (la) place en termes de performances parmi les meilleures agences mondiales d'aide au développement ». Votre rapporteur spécial ne demande qu'à croire ces affirmations, mais considère qu'on ne peut pas encore se satisfaire d'un tel niveau d'exécution.

Ventilation des projets vivants de l'AFD (hors Proparco) par année d'octroi

(en millions d'euros)

 

Avt 1995

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Août

2003

Total

Nombre de projets

25

15

31

42

57

67

61

67

61

23

449

Engagements globaux

117,3

115,7

198,9

349,3

368

423,4

418

498,3

533,5

153,8

3.176,2

Montant unitaire moyen

4,7

7,7

6,4

8,3

6,5

6,3

6,8

7,4

8,7

6,7

7,1

Versements effectués

87,5

95,2

105,5

252,9

201,2

200,2

110,5

88,5

15,7

0

1.157,2

Taux de décaissement moyen

74,6 %

82,3 %

53 %

72,4 %

54,7 %

47,3 %

26,4 %

17,8 %

2,9 %

0 %

36,4 %

Cumul montants en %

3,7 %

7,3 %

13,6 %

24,6 %

36,2 %

49,5 %

62,7 %

78,4 %

95,2 %

100 %

 

Cumul nombre en %

5,6 %

8,9 %

15,8 %

25,2 %

37,9 %

52,8 %

66,4 %

81,3 %

94,9 %

100 %

 

Source : calculs d'après les réponses du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

La date retenue pour chaque projet est celle de l'année d'octroi et non celle de la signature de la convention.

Au titre de la régulation budgétaire, qui a affecté en 2001 et 2002 le respect des engagements de l'Agence, le courrier relevait que « ces suspensions de décaissements créent de graves perturbations dans la mise en oeuvre des projets. Elles mettent, de surcroît, l'AFD en risque juridique pour non-respect des conventions de financements signées avec les bénéficiaires des concours. La répercussion est également notable auprès des bénéficiaires eux-mêmes, mis en risque pour non-respect des contrats qui les lient à leurs fournisseurs, notamment français. Enfin, la suspension des décaissements a des effets désastreux au niveau politique et en termes d'image auprès des opinions publiques ». Votre rapporteur spécial partage ce constat, qui traduit bien le fait que la nécessaire régulation procède dans certains cas de décisions « à l'aveuglette », incompatibles avec la mise en oeuvre de projets de long terme et avec la logique de pluri-annualité que comporte l'aide au développement .

Le positionnement de l'Agence à l'égard des pays de la ZSP est soumis à certaines contraintes. L'apparent désengagement de l'Afrique pour l'activité de prêts vient de ce qu'un grand nombre de pays de la ZSP ne soient plus autorisés à emprunter auprès de l'AFD, du fait des décisions successives concernant le traitement de la dette (Dakar 1, Dakar 2, initiative PPTE), qui ont manifesté la baisse de la solvabilité de ces pays. Aussi la ZSP est-elle perçue par l'Agence comme « à la fois trop large pour les subventions et trop étroite pour les prêts » , ce qui l'a conduite à ne pouvoir traduire sa priorité africaine, mise en exergue dans le Plan d'orientation stratégique, que par une concentration des subventions sur ce continent (et en particulier sur les pays avec lesquels la France entretien depuis longtemps des liens privilégiés), et à obtenir de pouvoir intervenir en prêts en dehors de la ZSP, ainsi qu'il a été précédemment évoqué.

Orientations et bilan du nouveau Plan d'orientations stratégiques (POS) de l'AFD

1 - Les grands axes du POS

A la suite de la lettre de mission adressée par les tutelles à son Directeur général en novembre 2001, l'Agence a décliné en mars 2002 ses objectifs et orientations opérationnelles dans un document stratégique global, approuvé par les deux ministères de tutelle.

Le POS dresse d'abord le constat réaliste d'une tendance à la marginalisation croissante de la position financière de l'établissement dans le financement du développement , notamment s'agissant des pays les plus pauvres, et met en évidence de profondes transformations des méthodes de financement du développement, se caractérisant à la fois par de nouvelles approches (programmes plutôt que projets), la tendance à la globalisation des problématiques (notamment les biens publics mondiaux et globaux...) et l'émergence de nouveaux acteurs et méthodes.

Sur la base de ce constat, l'AFD bâtit un scénario stratégique schématiquement articulé autour de trois axes d'action :

- l'amélioration de ses instruments financiers par la promotion d'une politique de prêts plus efficace ;

- le repositionnement de ses actions sur des priorités sectorielles stratégiques à forte « valeur ajoutée », où l'AFD dispose d'un avantage comparatif ;

- la meilleure insertion de l'AFD dans le dialogue global sur les enjeux du développement.

Le premier axe d'action proposé par le POS de l'établissement vise à augmenter, même dans l'hypothèse d'une enveloppe budgétaire constante, le volume d'APD mis en oeuvre en maximisant l'effet de levier , c'est-à-dire le volume d'APD rapporté au coût pour l'Etat, tant interne (optimisation de l'utilisation des ressources budgétaires, développement de nouveaux instruments) qu'externe (développement des partenariats financiers avec les autres bailleurs de fonds). L'Agence a ainsi accordé une attention particulière aux partenariats stratégiques et financiers avec l'ensemble de ses partenaires dans le cadre du « bi-multilatéralisme » : institutions de l'Union européenne, les banques de développement multilatérales et régionales, secteur privé, collectivités locales, société civile, organismes de recherche, organismes financiers spécialisés tels que la BDPME et la Caisse des Dépôts... Elle recherchera davantage encore les synergies et la complémentarité avec les autres bailleurs de fonds dans le but de capitaliser les expériences, de renforcer la cohérence des interventions et des procédures, ou encore de diversifier l'origine des fonds que l'Agence met en oeuvre en recourant le plus possible aux procédures de délégation de crédits, aux co-financements, notamment avec l'Union européenne. Cette volonté s'est concrétisée par une modification de ses statuts pour lui permettre de gérer des fonds d'un bailleur tiers (Union Européenne en particulier).

La recherche de l'effet de levier est en outre appuyée par la mise en oeuvre d'une politique de sélectivité (géographique et sectorielle) accrue, mais concertée et maîtrisée, propice à la lisibilité et à la réalisation d'une masse critique.

Le deuxième axe proposé vise à repositionner les métiers de développeur de l'Agence . A cet effet, l'AFD propose une matrice de positionnement de ses secteurs d'interventions traditionnels ou potentiels classés en fonction de leur « sensibilité stratégique » en termes de développement et des avantages comparatifs supposés de l'Agence dans ces secteurs. A titre d'exemple, on trouve au plus bas de l'échelle (faible/faible) les grands travaux d'infrastructures et au plus haut (fort/fort) l'environnement et la gestion concertée des ressources naturelles ou l'aménagement du territoire. Ce « recentrage » ne figure toutefois pas comme un principe d'action systématique , compte tenu de l'utilité encore largement avérée de projets d'études et de travaux en matière d'infrastructures.

Le troisième et dernier axe stratégique insiste sur l'inscription de l'action de l'Agence dans une perspective stratégique globale, sans toutefois remettre en cause les fondements du dispositif actuel de coopération. La création du « pôle de recherche et de gestion du savoir » et son corollaire, la mise en place de la direction de la stratégie et d'une direction des opérations , sont menés dans le cadre d'une étroite concertation avec les tutelles et sans que l'AFD ne dispose d'une stratégie véritablement autonome.

2 - Un premier bilan positif

Les objectifs quantitatifs de production du POS ont été tenus en 2002 voire même dépassés en raison d'un effet de levier meilleur que prévu . Aussi bien dans les DOM-TOM que dans les Etats Etrangers, les objectifs 2002 de concours annoncés dans le POS sont atteints. 2003 devrait connaître un dépassement substantiel de ces mêmes objectifs. En effet dans les DOM-TOM la cession des filiales courant 2003 conduira l'Agence à pratiquer un refinancement d'un montant égal à une année courante. Dans les Etats Etrangers, en utilisant un effet de levier accru, l'Agence augmenterait sa production en prêts souverains (346 millions d'euros contre 250 millions d'euros en 2002). Enfin en ce qui concerne les garanties, instruments financiers que l'AFD souhaite promouvoir, l'Agence réaliserait ses prévisions avec un volume de 50 millions d'euros.

Les concours se sont davantage concentrés en termes géographiques et en volume . L'Agence a défini clairement des cercles d'intervention parmi les 54 pays de la ZSP : dans une douzaine de pays, elle souhaite jouer le rôle de bailleur bilatéral de référence, ce qui pourrait se traduire en 2003 par un volume vers ces pays de 50% des engagements et de 60% des subventions. Treize autres pays relèveront de la coopération plus ciblée et recevraient environ 40% des engagements. Enfin, hors de ces deux zones, l'AFD interviendra dans une dizaine de pays au coup par coup. L'Afrique subsaharienne est une priorité affichée puisqu'il est prévu qu'elle recevra 80 % du montant des subventions et 55 % des engagements (y compris les contrats de désendettement-développement).Cette concentration des interventions de l'Agence se retrouve dans les choix sectoriels effectués.

Outre les relations permanentes que l'AFD entretient déjà avec le FMI (financement de la FRPC), la Banque mondiale (mise en cohérence des interventions et cofinancements) et les services d'aide extérieure de la Commission, l'Agence intensifie ses partenariats avec la KfW allemande (cofinancements, harmonisations des procédures, programmation, mandats de gestion, évaluations réciproques) et a engagé des travaux communs avec le DFID britannique et la JBIC du Japon (relations intellectuelles permanentes, mais pour le moment aucune opération commune n'a été menée en Afrique, excepté au Maroc, dans la mesure où les Japonais interviennent dans des secteurs différents).

L'AFD met aujourd'hui en oeuvre trois types principaux de cofinancements de projets : des projets clairement identifiés et faisant l'objet d'un financement conjoint de plusieurs bailleurs de fonds, que leurs interventions soient pari passu ou en parallèle ; des projets s'inscrivant dans un plan de développement explicite et cohérent d'une entreprise bénéficiant de l'appui de plusieurs bailleurs de fonds ; et des projets ou programmes s'inscrivant dans une politique sectorielle, et bénéficiant du soutien de plusieurs bailleurs de fonds dans le cadre d'une démarche coordonnée principalement par l'État et/ou les bailleurs de fonds.

En 2002, le montant des concours en cofinancement auxquels l'AFD a participé s'est élevé à 620 millions d'euros et la part moyenne de l'Agence dans les montages était de 38%.

Le suivi du portefeuille et de sa qualité fait l'objet d'un plan d'action volontaire . Au cours de l'année 2002, la direction des opérations des Etats étrangers a mis en place, à titre expérimental, un dispositif d'évaluation de la qualité des projets et des risques de mise en oeuvre qui leur sont associés. Ce dispositif, inspiré de celui de la Banque mondiale, vise à avoir une vision globale du portefeuille et des actions à mener pour l'améliorer. Sur 349 projets vivants, 28 % sont jugés problématiques et 14 % à surveiller, soit une part importante de projets en souffrance (42 %) . En 2003, l'objectif prioritaire est de rendre opérationnel ce dispositif de suivi de la qualité de l'exécution et d'obtenir une amélioration sensible et similaire à celle de la Banque mondiale, qui est passé de 20 % à 10 % de projets à problèmes en cinq ans.

La réorganisation de l'AFD et la mise en place d'une direction stratégique portent leurs premiers effets . Ainsi l'AFD a été particulièrement présente dans le dispositif interministériel de préparation et dans la participation au sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg ainsi qu'à celui sur l'eau à Kyoto. L'AFD a également participé au soutien français à l'initiative NEPAD, dans le cadre de la présidence française du G8, en organisant une rencontre à haut niveau des agences de développement sur ce thème.

Source : réponses du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie au questionnaire budgétaire

* 45 Les crédits du titre V affectés aux actions de coopération ne concernent qu'une fraction minoritaire du chapitre 57-10 « Equipement administratif », déjà mentionnée précédemment.

* 46 Dont les priorités sont l'accès aux services sociaux de base (enseignement, formation, santé), le développement des infrastructures (transports, hydraulique et communications), le soutien aux productions locales (agricoles, industrielles, minières ou énergétiques) et les programmes thématiques liés à la lutte contre la désertification, la sécheresse ou les grandes endémies.

* 47 2002 aura néanmoins été la dernière année de paiements au titre du 6 e FED, qui a été clôturé cette même année et ne fait plus l'objet de versements des Etats membres.

* 48 Il convient de souligner que la mise en place d'outils analytiques par l'Agence EuropeAid permet de disposer d'éléments plus clairs sur les prévisions d'utilisation des ressources du FED, les mouvements intervenus et l'évaluation des crédits en paiement.

* 49 Augmentation que la Commission justifie par une appréciation « de l'exécution prévisible de chaque dossier ».

* 50 On peut toutefois se demander si c'est bien la vocation du FED que de financer de telles opérations, et si elles ne devraient pas plutôt être imputées sur les lignes correspondantes du budget des actions extérieures de l'Union.

* 51 Il convient de rappeler que l'Union européenne contribue, certes en données affichées, à la moitié de l'APD dans le monde.

* 52 En complément de ses interventions directes dans les Etats étrangers, l'AFD compte deux filiales : Proparco (détenu à 68%), établissement de crédit ayant vocation à financer le secteur privé et le Cefeb qui concourt à la formation et au perfectionnement de cadres de pays en développement occupant ou appelés à occuper des postes de responsabilité dans les services publics à vocation économique ou financière, les institutions financières de développement et les entreprises publiques ou privées.

* 53 Dont 152 millions d'euros de prêts octroyés par la filiale Proparco au secteur privé.

* 54 Les impayés non souverains sont provisionnés à 89 % de l'encours douteux au 31 décembre 2002.

* 55 L'impact du prêt au Liban sur le bilan de l'Agence, décidé par la loi de finances rectificative de décembre 2002 , se limite à une augmentation des encours de 500 millions d'euros, mais pas du risque pondéré. Le prêt étant intégralement garanti par l'Etat français (à ce titre, la commission des finances du Sénat avait fait préciser que la garantie portait sur le capital comme sur les intérêts), celui-ci se voit en effet attribuer une pondération égale à zéro dans les calculs de ratio de solvabilité et de division des risques. La première échéance en intérêt à fin août 2003 a été honorée à bonne date.

* 56 Avec 87.685 salariés et un produit net bancaire (PNB) de 16,793 milliards d'euros fin 2002, le groupe BNP-Paribas détenait ainsi un PNB parsalarié d'environ 191.500 euros. Ce niveau doit toutefois être relativisé par des effets de seuil, qui tendent à le rendre dégressif.

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