AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le 16 octobre 2003, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance, qui présente diverses dispositions utiles et d'application immédiate dans l'attente de réformes de plus grande ampleur.

Notre Haute Assemblée avait alors souhaité compléter et améliorer les dispositifs figurant dans les trois volets du texte : la protection de l'enfant, l'assouplissement des conditions d'accueil des jeunes enfants par les assistantes maternelles et la mise en place de l'expérimentation d'un nouveau mode de financement des tutelles pour les majeurs protégés.

Examinant à son tour ce projet le 2 décembre dernier, l'Assemblée nationale a adopté conformes la plupart des dispositions ainsi modifiées et en a précisé et ajouté certaines autres, sans pour autant remettre en cause l'économie générale du texte.

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L'objectif central du présent projet de loi se rapporte à la protection de l'enfant dans les différents cas de figure où il peut se trouver en situation de danger : la maltraitance, l'exploitation au travail et les carences éducatives ayant pour conséquence un absentéisme scolaire régulier.

La mesure essentielle de ce premier volet consiste en l'amélioration du système d'information et d'évaluation des phénomènes de maltraitance. Il est prévu de confier cette mission à un observatoire national de l'enfance en danger, afin que les différents acteurs, mieux informés de la situation au niveau national, puissent agir plus efficacement et précocement sur le terrain.

A l'initiative de votre commission des Affaires sociales, et dans un souci, partagé par l'Assemblée nationale, de prise en compte globale de la protection de l'enfant qui ne se limite pas à la seule maltraitance, l'intitulé de cet observatoire est devenu « observatoire de l'enfance en danger ». Les deux assemblées ont, par ailleurs, précisé ses missions pour en faire un instrument opérationnel et qui contribuera efficacement à la protection des enfants.

Le présent projet de loi proposait, en outre, d' accorder aux associations le droit de se constituer partie civile aux procès engagés contre les auteurs présumés d'actes de maltraitance sur mineur, et plus encore de déclencher elles-mêmes l'action publique. Ce point a fait l'objet du débat que justifiait l'organisation d'un dispositif dérogatoire au droit commun de l'action des associations. Votre commission souhait en effet encadrer strictement cette procédure afin d'éviter tout risque d'utilisation abusive. Le Sénat a donc décidé que, si l'action n'a pas été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée, l'association ne pourra agir de son propre fait que pour les infractions relatives au tourisme sexuel et aux images pédo-pornographiques et devra, pour ce faire, être inscrite auprès du ministère de la justice.

L'Assemblée s'est rendue à nos arguments et n'a pas modifié ce dispositif, ce dont on ne peut que se réjouir.

La maltraitance peut également prendre un visage moins reconnaissable, c'est notamment le cas pour certaines formes de travail illégal des mineurs contre lesquelles le présent projet de loi propose de renforcer les sanctions à l'encontre des employeurs. Partageant cette préoccupation, le Sénat comme l'Assemblée nationale ont harmonisé le quantum des sanctions pénales applicables pour les différents types de travail illégal des mineurs, y compris l'incitation à la mendicité.

Le texte prévoit enfin de rénover le dispositif de lutte contre l'absentéisme scolaire en proposant des sanctions mieux adaptées à cette situation, le système de suspension des prestations familiales s'étant révélé particulièrement inefficace, souvent injuste et, partant, rarement appliqué . Cette sanction est donc supprimée au profit de la mise en oeuvre d'un plan d'action gouvernemental en faveur de l'assiduité scolaire et de la responsabilisation des familles. L'Assemblée nationale a adhéré à cette démarche, à laquelle elle n'a apporté qu'une modification de coordination.

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La deuxième priorité du projet de loi porte sur les conditions d'accueil des jeunes enfants par les assistantes maternelles.

La garde par une assistante maternelle est le mode de prise en charge privilégié par 20 % des parents, car il constitue une solution intermédiaire, en termes de coût, de souplesse des horaires et de facilité d'accès entre la crèche et la garde à domicile par une employée. Or, beaucoup d'assistantes maternelles ne peuvent répondre à la demande des parents, en raison de la rigidité de leur agrément qui ne les autorise actuellement à garder qu'un maximum de trois enfants , quelle que soit la durée quotidienne ou hebdomadaire de l'accueil.

C'est la raison pour laquelle le présent projet de loi prévoit l'augmentation des capacités d'accueil des assistantes maternelles à trois enfants gardés simultanément, ce qui autorisera l'accueil en temps partiel d'un nombre plus important d'enfants.

Le Sénat, sur proposition de votre commission, avait jugé utile de fixer un plafond maximal d'enfants pouvant être accueillis globalement afin de préserver le lien affectif privilégié qui unit l'enfant à la personne qui en assure la garde. Il avait également demandé qu'un assouplissement puisse être prévu en faveur de l'accueil périscolaire des fratries. Sur ces deux points, l'Assemblée nationale a souhaité revenir au texte initial, dans le souci de ne pas envoyer de signal négatif aux assistantes maternelles à l'heure où la réforme de leur statut est en négociation. Cette préoccupation apparaît légitime mais il sera sans doute nécessaire d'en discuter plus avant lorsque le Parlement sera saisi de la réforme à venir.

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Le troisième axe de ce projet de loi concerne la réforme du financement du dispositif actuel de protection juridique des majeurs . Il propose la mise en oeuvre, à titre expérimental , pendant deux ans, d'un financement des associations tutélaires par dotation globale , avant une éventuelle généralisation du dispositif par la réforme des tutelles prévue en 2005. Cette disposition a été assortie, par le Sénat, d'une exigence de bilan de la Constitution, à laquelle l'Assemblée nationale a souscrit en y joignant un amendement rédactionnel souhaité par notre commission.

Enfin, lors de son examen par le Sénat, deux dispositifs supplémentaires ont été introduits dans le présent projet de loi :

- à l'initiative de notre collègue, Michel Mercier, un article additionnel permet de simplifier la procédure d'exonération de la dette alimentaire pour les enfants maltraités par leurs parents , pour lesquels, sauf décision contraire du juge, la décharge sera désormais de droit.

L'Assemblée nationale a repris à son compte l'inspiration de cette disposition nouvelle, en y apportant une précision rédactionnelle et en en changeant l'emplacement pour la faire apparaître, plus logiquement, à la fin du texte ;

- le Gouvernement avait également fait adopter par le Sénat un article additionnel visant à renforcer la protection du médecin dans le cadre du signalement d'un acte de maltraitance , en étendant les possibilités d'intervention sans s'exposer à des poursuites pour violation du secret professionnel .

L'Assemblée nationale a adopté cet article avec une précision rédactionnelle et a introduit, à titre complémentaire, deux articles additionnels : le premier met en cohérence le code de la santé publique avec cette disposition et le second prévoit que l'intérêt de l'enfant doit être pris en compte dans toutes les décisions de justice le concernant.

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Le présent projet de loi constitue donc un premier pas vers des réformes à venir de plus grande ampleur, notamment celle du statut des assistantes maternelles et celle du régime des tutelles.

L'examen qui en a été fait au sein des deux Chambres a permis d'améliorer sensiblement les dispositifs prévus en les complétant et en les précisant, dans la recherche commune de solutions immédiatement applicables.

C'est la raison pour laquelle votre commission vous propose d'adopter, sans modification, le texte voté en première lecture par l'Assemblée nationale.

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