Article 4 bis
Dispositions spécifiques au tourisme en Guyane

Cet article, inséré par le Sénat en première lecture sur proposition de notre collègue M. Serge Vinçon et des membres du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, apparentés et rattachés, avec les avis favorables de votre commission des Lois et du Gouvernement, a pour objet d'étendre aux villes ou stations classées de tourisme du département de la Guyane, à compter du 1 er janvier 2005, l'ensemble des dispositions applicables aux stations balnéaires, thermales ou climatiques.

Les deux textes de base concernant les stations classées sont la loi du 24 septembre 1919 et la loi du 3 avril 1942, dont les dispositions ont été codifiées aux articles L. 2231-1 à L. 2231-18 du code général des collectivités territoriales. Ces deux textes ont été complétés par de nombreuses lois, en particulier celle n° 64-698 du 10 juillet 1964 relative à la création d'offices du tourisme dans les stations.

Le classement a pour objet de faciliter la fréquentation de la station, de permettre son développement et, le cas échéant, de faciliter la prise en charge des personnes privées de ressources suffisantes.

Il peut concerner une commune, une fraction de commune ou un groupe de communes 7 ( * ) qui offrent, selon les termes de l'article L. 2231-1 du code général des collectivités territoriales, soit un ensemble de curiosités naturelles, pittoresques, historiques ou artistiques, soit des avantages résultant de leur situation géographique ou hydrominéralogique, de leur climat ou de leur altitude, tels que ressources thermales balnéaires, maritimes, sportives ou uvales.

Le classement requiert la possession d'une « ressource touristique » et d'une capacité d'accueil .

La première condition a conduit le législateur à distinguer six catégories : les stations hydrominérales qui possèdent une ou plusieurs sources minérales ou un établissement exploitant ces sources ; les stations climatiques , qui offrent aux malades des avantages climatiques ; les stations uvales qui possèdent sur leur territoire des cultures de raisins de table aptes à une cure thérapeutique et sont placées dans un centre touristique ; les stations de tourisme , qui offrent aux visiteurs un ensemble de curiosités naturelles ou artistiques ; les stations balnéaires , qui offrent des avantages balnéaires ou maritimes résultant de leur situation géographique ; les stations de sports d'hiver ou d'alpinisme , qui remplissent des conditions d'altitude, d'accessibilité et d'intérêt pour les sports de montagne 8 ( * ) .

Le classement comme station nécessite également l'existence d'une capacité d'accueil en termes sanitaires (alimentation en eau potable suffisante, réseau d'assainissement, ramassage des ordures ménagères, assistance médicale), d'animations (distractions et manifestations) et d'équipements (transports, hébergements, équipements spécifiques à chaque catégorie de station).

En général, les normes exigées ne sont pas précisées par les textes , ce qui laisse aux autorités compétentes un large pouvoir discrétionnaire d'appréciation. Toutefois , des décrets et des arrêtés définissent avec précision des normes de classement particulières à certaines catégories de stations, notamment celles de sports d'hiver et d'alpinisme 9 ( * ) , et le Conseil supérieur de l'hygiène publique de France, le Conseil national du tourisme ou encore le Conseil d'Etat ont établi des directives relativement précises.

En principe , l'initiative du classement appartient aux collectivités locales intéressées 10 ( * ) . La procédure est lourde et complexe . A l'échelon local, elle nécessite la réalisation d'une enquête publique et l'obtention de nombreux avis d'organismes départementaux. Au niveau national, plusieurs avis sont également requis et l'instruction est conduite par des ministres différents suivant le type de stations. Finalement, le classement est prononcé par un décret en Conseil d'Etat .

Le classement impose aux stations quelques obligations, mais il leur offre de nombreux avantages.

Les stations classées se voient ainsi imposer certaines obligations en matière d'hygiène 11 ( * ) et en matière d'urbanisme, puisqu'elles doivent établir un plan local d'urbanisme.

Par ailleurs, la jurisprudence paraît plus exigeante en matière de police administrative, notamment en ce qui concerne la sécurité publique, à l'égard des stations classées qu'à l'égard des autres communes 12 ( * ) .

Les stations classées jouissent de nombreux avantages tant sur le plan administratif que financier. Elles peuvent créer un office municipal du tourisme 13 ( * ) ; certaines d'entre elles 14 ( * ) peuvent voir accorder à des casinos l'autorisation de pratiquer des jeux de hasard, normalement interdits.

Sur le plan financier, elles disposent ou peuvent disposer de ressources particulières : la taxe de séjour (facultative), la taxe additionnelle aux droits d'enregistrement ou à la taxe de publicité foncière exigible sur les mutations à titre onéreux, le prélèvement progressif sur le produit des jeux dans les casinos. Par ailleurs, les conseils municipaux des stations classées peuvent voter des majorations d'indemnité de fonction 15 ( * ) .

Enfin, le classement constitue en lui-même un avantage puisqu'il constitue un instrument de promotion des stations auprès de la clientèle.

Aux termes de l'exposé des motifs de l'amendement, il s'agissait de permettre la création de stations de tourisme en Guyane et de les autoriser à implanter un casino sur leur territoire.

En effet, en vertu de la loi du 15 juin 1907 réglementant le jeu dans les cercles et casinos, les stations balnéaires, thermales ou climatiques bénéficient d'une dérogation à la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard et peuvent disposer de casinos pratiquant des jeux de hasard, sous réserve d'une autorisation préalable délivrée par le ministère de l'intérieur.

Cette disposition dérogatoire a été étendue par l'article 57 de la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988 d'amélioration de la décentralisation aux villes ou stations classées touristiques constituant la ville principale d'une agglomération de plus de 500.000 habitants et participant pour plus de 40 %, le cas échéant avec d'autres collectivités territoriales, au fonctionnement d'un centre dramatique national, d'un orchestre national et d'un théâtre d'opéra présentant en saison une activité régulière d'au moins vingt représentations lyriques.

L'exposé des motifs de l'amendement faisait valoir que cette disposition s'avérait « inopérante pour l'ensemble de l'outre-mer, et par exemple pour la Guyane, dont la population totale est de 160.000 habitants, ces territoires ne pouvant (...) prétendre à la mise en oeuvre de cette procédure, alors même que leur situation géographique rend le plus souvent bien aléatoire, voire impossible, le classement en station thermale, climatique ou balnéaire . »

Même si la possibilité ouverte aux communes concernées restera subordonnée à l'autorisation préalable du ministère de l'intérieur prévue par la loi du 15 juin 1907, l' Assemblée nationale a préféré, sur proposition de sa commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, limiter le bénéfice du régime des stations balnéaires, thermales ou climatiques aux villes et stations classées de tourisme de plus de 15.000 habitants de la Guyane.

Sur les 22 communes que compte la région, seules cinq avaient une population supérieure à ce seuil à l'issue du recensement de 1999 : Cayenne (50.675 habitants), Kourou (19.191 habitants), Matoury (18.049 habitants), Remire-Montjoly (15.565 habitants) et Saint-Laurent-du-Maroni (19.416 habitants).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 bis sans modification .

* 7 Les espaces touristiques ne coïncident pas toujours avec le territoire communal. Les stations d'altitude constituent un exemple caractéristique de cette distinction physique entre les lieux de résidence et les lieux d'accueil des touristes.

* 8 Article L. 2231-3 du code général des collectivités territoriales.

* 9 Décret n° 68-1031 du 14 novembre 1968 et arrêté du 23 mars 1973.

* 10 Le classement peut être prononcé d'office, mais cette possibilité ne semble pas utilisée.

* 11 Cf les articles R. 2231-8 et R. 2231-9 du code général des collectivités territoriales relatifs aux obligations en matière d'hygiène des stations hydrominérales et climatiques.

* 12 Conseil d'Etat, 9 février 1966, Le Touquet-Paris-Plage, à propos de la sécurité de baigneurs.

* 13 Les offices municipaux de tourisme sont des établissements publics industriels et commerciaux. A ce titre, ils sont plus étroitement contrôlés par les conseils municipaux que les offices de tourisme et les syndicats d'initiative, associations de la loi de 1901 créées par les professionnels.

* 14 Les stations balnéaires, thermales ou climatiques.

* 15 Article L. 2123-22 du code général des collectivités territoriales.

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