Article 21 A (nouveau)
(art. L. 111-9 du code de la sécurité sociale)
Contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, modifie les modalités de contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Cet article additionnel propose une nouvelle rédaction pour l'article L. 111-9 du code de la sécurité sociale, qui précise le contenu des pouvoirs des « rapporteurs sociaux » , c'est-à-dire des membres du Parlement chargés du contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

Ces dispositions ont été créées par l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 avant d'être codifiées par l'article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Elles visent à doter les rapporteurs du projet de loi de financement de la sécurité sociale des moyens d'exercer des contrôles « sur pièces et sur place » auprès des administrations d'État, établissements publics ou organismes de sécurité sociale. Ils peuvent à ce titre se faire communiquer tout document. Ces pouvoirs sont en pratique identiques à ceux dont disposent les rapporteurs spéciaux de la commission des Finances, à l'exception de la faculté de saisir les juridictions compétentes pour faire cesser d'éventuelles entraves.

Les modifications introduites par cet article sont de deux ordres :

- elles modifient la qualité des parlementaires ayant qualité pour exercer ce contrôle.

Il n'est plus fait référence aux « membres du Parlement qui ont la charge de présenter, au nom de la commission compétente, le rapport sur les projets de loi de financement de la sécurité sociale » mais aux présidents et aux rapporteurs « des commissions compétentes » de chaque assemblée. Cette définition a minima , étend donc les prérogatives de contrôle aux présidents des commissions en charge des affaires sociales.

Demeure une question dont la réponse est incertaine. Le droit en vigueur ne précise pas clairement si les rapporteurs pour avis de la commission des Finances sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale disposent d'un pouvoir identique à celui des rapporteurs de la commission des Affaires sociales. En estimant que la notion de « rapport » diffère de la notion d'« avis », on pouvait légitimement considérer que la réponse était négative par parallélisme avec la situation du contrôle du budget, qui appartient aux seuls rapporteurs spéciaux de la commission des Finances et non aux rapporteurs pour avis des autres commissions.

La nouvelle rédaction n'est pas plus claire car elle fait désormais référence aux « commissions compétentes » . S'agit-il des seules commissions en charge des affaires sociales des deux assemblées, compétentes pour l'examen au fond de la loi de financement, ou des quatre commissions - Affaires sociales et Finances - de chaque assemblée régulièrement saisie des PLFSS ?

Un indice permet toutefois d'éclairer ce point. Le nouveau texte envisage de confier les pouvoirs de contrôle aux rapporteurs et aux présidents des commissions compétentes. Or, l'article 57 de la loi organique, relatif aux lois de finances, dont s'inspire la rédaction du présent article, confie la charge du suivi du budget « au président, au rapporteur général et aux rapporteurs spéciaux » . L'absence de référence au rapporteur général du budget - la commission des Affaires sociales ne disposant pas de rapporteur général - semble exclure la compétence de la commission des Finances en matière de contrôle des lois de financement.

- elles précisent la liste des documents pouvant être communiqués aux rapporteurs, en mentionnant explicitement les rapports des corps d'inspection et de contrôle .

II - La position de votre commission

Votre commission apportera à ce sujet la mise au point suivante :

Sur l'existence d'un contrôle permanent des lois de financement de la sécurité sociale

Plusieurs membres de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, dont son président et son rapporteur, ont avancé que le Parlement ne disposait pas des moyens juridiques permettant un contrôle des lois de financement de la sécurité sociale.

Votre commission ne souscrit pas à cette affirmation : l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 précité confie des pouvoirs étendus aux « rapporteurs sociaux », que les membres de l'Assemblée nationale n'ont jusqu'à présent pas exercés.

Votre commission les a, pour sa part, mis en oeuvre à plusieurs reprises de même qu'elle fait désormais régulièrement appel à l'assistance de la Cour des comptes.

Votre commission estime qu'un contrôle efficace de l'application des lois de financement dépend moins de moyens juridiques, techniques ou humains que de la volonté politique de l'effectuer et de la disponibilité que laisse aux rapporteurs l'ordre du jour parlementaire. Son efficacité dépend également d'une bonne coordination des travaux, laquelle repose sur le rapporteur pour les équilibres financiers dont l'existence institutionnelle n'est pas garantie, contrairement à celle du rapporteur général du budget.

Sur la compétence des commissions des Finances et des Affaires sociales en matière de finances sociales

Votre commission estime que les débats soulevés par cet article - et le suivant - participent du flou qui entoure la compétence relative aux finances sociales.

Les lois de financement ont été créées en 1996 et confiées d'une part, aux ministères sociaux, d'autre part, pour leur examen, aux commissions permanentes des deux assemblées chargées des affaires sociales.

Pour des raisons historiques, institutionnelles ou politiques, les conséquences de cette modification n'ont pas été intégralement tirées, ni dans le pilotage des finances publiques, ni dans l'ordonnancement du travail parlementaire.

Il convient désormais que les pouvoirs publics choisissent clairement entre la pérennisation des lois de financement et leur intégration en loi de finances.

Si la première hypothèse est retenue, il revient alors au Parlement de déterminer la commission permanente à laquelle échoit la compétence exclusive de l'examen et du contrôle de ce texte. De ce choix dépendra la réponse aux questions soulevées par le présent article.

Confier aux seules commissions des Affaires sociales cette prérogative n'aurait rien d'illogique et « ne témoignerait pas d'un corporatisme malvenu et désuet » imaginé par certains 14 ( * ) .

Personne ne taxe d'ailleurs de corporatisme le fait que seuls les rapporteurs spéciaux de la commission des Finances contrôlent l'exécution de la loi de finances, sans que les rapporteurs pour avis des autres commissions permanentes n'apparaissent moins qualifiés pour le faire.

La raison déterminante pour laquelle il convient de réserver à une seule commission le contrôle de l'exécution des lois de financement, comme celle de l'exécution des lois de finances, tient à la crédibilité des assemblées et à la bonne organisation du travail des administrations concernées. Si ces dernières devaient être confrontées à deux contrôles simultanés par deux commissions émanant de la même assemblée, l'autorité du Parlement s'en trouverait affaiblie sans que son information en soit améliorée et le bon fonctionnement de l'administration serait entravé. Des précédents existent et sont regrettables.

Au total, votre commission souhaite que les pouvoirs publics - et au premier chef le Parlement - évitent en cette affaire l'addition et la confusion des compétences.

Elle rappelle que le Gouvernement a réitéré son engagement de réformer les dispositions de la loi organique relatives aux lois de financement de la sécurité sociale. Cette révision offrira l'occasion de préciser la nature et la responsabilité du contrôle des lois de financement, comme l'ont fait les deux assemblées lors de la réforme de la loi organique relative aux lois de finances, en août 2001.

Dans cette attente, et, à titre conservatoire, elle vous demande de supprimer cet article.

* 14 Intervention de Jean-Pierre Brard, membre de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, sur la réforme de l'assurance maladie, compte rendu analytique.

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