c) La consolidation de tous les « acquis éthiques » européens par la loi Mattei

La loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique ne se contente pas de transposer les aspects les plus difficiles de la directive 98/44. Elle y ajoute aussi des exigences éthiques dépassant la lettre de la directive sur deux points.

Le premier point concerne la transposition de l'article 5 de la directive. En effet, l'article 17 A. II de la loi (nouvel article L611-18 du code de la propriété intellectuelle) ne se contente pas de transcrire la nécessité d'un exposé concret de l'application d'un élément du corps humain pour en assurer la brevetabilité. Il y ajoute aussi que cette application ne peut découler que d'une fonction d'un élément du corps humain. Ceci restreint et précise encore les cas de brevetabilité relatifs au génome humain, sans devoir être pour autant regardé comme nécessairement contraire à la directive. En effet, cette exigence d'identification de la fonction précise du gène considéré figure au considérant 23 de ladite directive 21 ( * ) .

Le deuxième point concerne l'interdiction de toute invention dont l'exploitation commerciale serait contraire non seulement « à l'ordre public ou aux bonnes moeurs » mais aussi contraire « à la dignité de la personne humaine » (article 17 A. I de la loi, nouvel article L. 611-17 du code de la propriété intellectuelle). L'ajout de cette troisième condition à la lettre de la directive ne devrait pas être regardée comme contraire au droit communautaire car elle reprend l'exigence de respect de la dignité humaine posée par la décision de la CJCE du 9 octobre 2001.

La loi Mattei a donc sécurisé le cadre éthique de la transposition de la directive. C'est sans doute ce qui explique que la saisine du Conseil constitutionnel (n° 2004-498 DC du 29 juillet 2004) contre l'article 17 de la loi n'invoquait nullement un risque de violation des principes de la dignité ou de l'intégrité du corps humain 22 ( * ) .

* 21 Il est ainsi remédié à une source de malentendu interne à la directive, qui avait d'ailleurs été pointée par les rapports de M. Alain Claeys de 2001 et 2004.

* 22 Cette saisine par des députés et sénateurs de l'opposition se plaçait sur le terrain de la conformité des règles de la propriété intellectuelle au principe constitutionnel de libre communication des pensées (article 11 de la déclaration du 26 août 1789).

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