ARTICLE 23

Ouverture du plan d'épargne en actions (PEA) aux titres de sociétés ou d'OPCVM situés dans les Etats membres de l'Espace Economique Européen

Commentaire : le présent article vise à étendre le PEA aux investissements directs et intermédiés situés dans les Etats membres de l'Espace Economique Européen, non membres de la Communauté européenne, ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale, afin de le rendre conforme au droit communautaire.

I. LE PEA ET LES RÈGLES COMMUNAUTAIRES

La loi n° 92-666 du 16 juillet 1992 a créé les plans d'épargne en actions. Le titulaire d'un plan peut effectuer des versements en numéraire dans la limite de 132.000 euros. Si l'épargne a été conservée pendant au moins cinq ans à compter du premier versement, les plus-values procurées par les placements sont exonérées d'impôt sur le revenu.

Jusqu'à l'intervention de l'article 79 de la loi de finances initiale pour 2002 174 ( * ) , les sommes versées dans les plans d'épargne en actions devaient être investies en « valeurs éligibles au PEA », c'est-à-dire :

- soit des actions françaises ;

- soit des bons de souscription et droits d'attribution attachés à ces actions ;

- soit des actions de sociétés d'investissement à capital variable détenant au moins 60 % d'actions françaises ;

- soit des parts de fonds communs de placement dont l'actif est composé au minimum à 75 % d'actions françaises.

Jusqu'alors, les émetteurs des titres éligibles dans un PEA devaient avoir leur siège en France et être soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun au taux normal.

Le dispositif du PEA, qui conditionnait l'éligibilité des titres à leur nationalité française, est apparu contraire à la réglementation européenne car il introduisait une discrimination entre les sociétés françaises et les autres sociétés européennes.

Le 23 mai 2001, la Commission européenne a adressé un avis motivé à la France estimant que la législation sur le PEA constituait une restriction à la libre circulation des capitaux au sein de l'Union qu'interdit l'article 1 er de la directive 88/361 du 24 juin 1988 sur la libéralisation des capitaux.

En conséquence, l'article 79 de la loi de finances pour 2002 a rendu éligible au PEA les titres dont les émetteurs ont leur siège dans un Etat membre de la Communauté européenne , qui sont soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou à un impôt équivalent. Par cohérence avec la disposition rendant éligibles aux PEA les parts de sociétés à responsabilité limitée, le même article a élargi l'éligibilité aux sociétés dotées d'un statut équivalent dans d'autres Etats membres de la Communauté européenne.

La disposition est entrée en vigueur le 1 er janvier 2002 en ce qui concerne l'investissement direct dans des actions émises par des sociétés ayant leur siège social dans un Etat membre de la Communauté européenne et le 1 er janvier 2003 en ce qui concerne l'ouverture du quota minimum d'investissement des OPCVM aux titres émis par des sociétés ayant leur siège social dans un Etat membre de la Communauté européenne.

Cette ouverture n'apparaît toujours pas suffisante pour la Commission européenne. Le 7 juillet 2004, elle a demandé par avis motivé 175 ( * ) la modification du régime du PEA, considérant que le régime en vigueur depuis le 1 er janvier 2003 maintenait l'exclusion du PEA aux investissements directs et indirects, via des OPCVM, en actions de sociétés établies dans les pays faisant partie de l'Espace Economique Européen (EEE), c'est à dire l'Islande, le Liechtenstein et la Norvège. Elle juge qu'une telle exclusion est contraire à la libre prestation de services et à la libre circulation des capitaux telle qu'elle résulte des articles 36 et 40 de l'accord EEE.

Il convient de rappeler que l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne prévoit que « les restrictions tant aux mouvements de capitaux qu'aux paiements entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdites ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose d'étendre le dispositif du PEA aux investissements directs et intermédiés, via OPCVM, aux Etats parties à l'accord sur l'espace économique européen, non membres de la Communauté européenne, ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale . La disposition est applicable au 1 er janvier 2005. En pratique, la disposition permet d'inclure l'Islande et la Norvège dans le champ du PEA, mais non le Liechtenstein.

La Norvège a conclu le 19 décembre 1980 une convention fiscale prévoyant une assistance administrative par l'échange de renseignements et l'assistance au recouvrement en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur la fortune.

L'Islande a conclu le 29 septembre 1990 une convention fiscale prévoyant une assistance administrative par l'échange de renseignements et l'assistance au recouvrement en matière d'impôt sur le revenu.

Le Liechtenstein n'a pas conclu de convention fiscale avec la France.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général est très attaché à un produit d'épargne qui permet d'inciter fiscalement à la détention d'épargne de longue durée investie dans les fonds propres des entreprises. Il s'agit d'un produit d'épargne très populaire chez les Français, malgré la disparition programmée de l'avoir fiscal, puisque l'on dénombrait fin juin 2004 7,415 millions de PEA, composés à 62 % de titres d'OPCVM et à 38 % d'actions. La valeur moyenne des PEA s'élevait au 30 juin 2004 à 11.954 euros 176 ( * ) .

A la fin juin 2004, la part des actions européennes représentait 5,9 % des actions détenues dans les PEA. L'inclusion de l'Islande et de la Norvège ne devrait pas changer fondamentalement la donne.

Votre rapporteur général s'est interrogé sur la compatibilité de l'exclusion du Liechtenstein du champ du présent article avec les normes communautaires.

Il a tout d'abord considéré que le dispositif proposé ne visait pas à exclure expressément le Liechtenstein mais les pays n'ayant pas conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. Dans son avis motivé, la commission européenne reconnaît qu'il n'est pas impossible à un Etat membre d'adopter des mesures de sauvegarde contre l'évasion ou la fraude fiscale à condition que celles-ci respectent les principes établis en la matière par la jurisprudence de la Cour de justice, notamment en ce qui concerne la proportionnalité et la justification de telles mesures.

Il constate que l'article 58 du traité instituant la communauté européenne n'empêche pas un Etat membre, dans le respect du principe de liberté de mouvement des capitaux, « de prendre toutes les mesures indispensables pour faire échec aux infractions à leurs lois et règlements, notamment en matière fiscale ou en matière de contrôle prudentiel des établissements financiers, de prévoir des procédures de déclaration des mouvements de capitaux à des fins d'information administrative ou statistique ou de prendre des mesures justifiées par des motifs liés à l'ordre public ou à la sécurité publique ».

Il souligne enfin que le Liechtenstein est inscrit est inscrit par l'OCDE sur la liste des paradis fiscaux non coopératifs (avec Andorre, le Liberia, les îles Marshall et Monaco).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 174 Loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001.

* 175 En l'absence de réponse à un avis motivé constatant un manquement aux règles du traité instituant la commission européenne, la commission peut saisir la cour de justice des communautés européennes.

* 176 A la même date, la valeur moyenne des comptes-titres était de 19.639 euros.

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