EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE PREMIER

Détermination des modalités d'utilisation des surplus non anticipés
de recettes fiscales

Commentaire : le présent article a pour objet de prévoir que la première partie de la loi de finances de l'année devra arrêter les modalités d'utilisation des éventuels surplus, par rapport à ses évaluations, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l'Etat.

Votre rapporteur ne reviendra pas sur les motivations de cet article, déjà développées dans l'exposé général, et se limitera à un bref rappel de ses dispositions

La loi de finances définira les principes généraux d'affectation des surplus (proportion allouée à la réduction du déficit, éventuellement, part utilisée sous forme d'allègements fiscaux non pérennes ou pour des dépenses supplémentaires, en mentionnant les grandes catégories susceptibles d'être majorées).

Concrètement, le calendrier de la mise en oeuvre des règles d'affectation des surplus fiscaux pourrait être le suivant :

- détermination des modalités générales d'affectation d'un éventuel surplus de recettes fiscales de l'année n dans le projet de loi de finances afférent, donc à l'automne de l'année n - 1 ;

- constatation d'un éventuel surplus lors de l'examen de la loi de finances pour l'année n + 1, donc en automne de l'année n. Ce surplus résultera de la différence entre les évaluations de la loi de finances initiale de l'année n et les évaluations révisées de la même année, associées au projet de loi de finances de l'année n + 1 ;

- le débat sur les modalités concrètes d'affectation de ce surplus pourra être conduit dans le cadre du « collectif de fin d'année » de l'exercice n, donc en décembre de l'année n.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2

Réponses ministérielles aux questionnaires budgétaires

Commentaire : le présent article fixe au 10 octobre la date limite des réponses ministérielles aux questionnaires budgétaires.

I. LE DISPOSITIF EN VIGUEUR

L'article 49 de la LOLF fixe au 10 juillet de chaque année la date avant laquelle les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis adressent leurs questionnaires budgétaires aux ministres concernés.

Cet article prescrit, pour la réponse ministérielle, un délai qui, en revanche, n'est pas fixe. En effet, la réponse écrite doit intervenir « au plus tard huit jours francs après la date mentionnée au premier alinéa de l'article 39 » qui est le premier mardi d'octobre (date limite de dépôt et de distribution du projet de loi de finances).

De la sorte, la date limite de réponse n'est pas, à quelques jours près, la même chaque année, puisqu'elle intervient huit jours francs après le premier mardi d'octobre, sans que cette « subtilité » comporte une raison particulière.

II. LES DISPOSITIONS PROPOSÉES

Dans un but très opportun de simplification, il est proposé de prescrire un délai fixe pour les réponses ministérielles, qui serait le 10 octobre .

De la sorte, les ministères disposeraient de très exactement trois mois, de date à date, pour formuler leurs réponses (entre le 10 juillet et le 10 octobre).

Votre commission des finances saisit cette occasion pour que le soin apporté par elle pour respecter le délai de transmission des questions trouve un écho dans la ponctualité des réponses ministérielles . Elle souligne, en outre, que la valeur des réponses ministérielles ne se mesure pas à leur « poids », mais à leur qualité et à leur précision .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Information, dans le projet de loi de finances initiale, sur les emplois rémunérés par les organismes subventionnés

Commentaire : le présent article ajoute à la liste des documents joints au projet de loi de finances de l'année une présentation indicative des emplois rémunérés par les organismes bénéficiaires d'une subvention pour charges de service public, avec la justification des variations par rapport à la situation existante.

I. LE DISPOSITIF PRÉVU PAR LA LOLF

Sous l'empire de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, le vote du Parlement en matière d'emplois publics portait sur une autorisation de dépenses de personnel et donc de flux d'emplois (création ou suppression d'emplois budgétaires).

La LOLF prévoit, pour sa part, que l'autorisation parlementaire portera, à partir de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, sur un plafond exprimé en masse salariale et en stock d'emplois . Les plafonds seront spécialisés par ministère 11 ( * ) , d'une part, au titre des dépenses de personnel (titre 2) et, d'autre part, en termes de nombre d'emplois autorisés.

Chaque emploi sera calculé en équivalent temps plein, indépendamment de la catégorie (A, B ou C) à laquelle il se rattache.

En d'autres termes, l'ouverture de crédits limitatifs pour le personnel sera complétée par une limitation du nombre d'emplois que ces crédits seront autorisés à financer . Le vote du Parlement portera, non plus sur un flux d'emplois théoriques mais sur un stock global d'effectifs réels, indépendamment des statuts (titulaires, contractuels...).

Il en résulte que seuls les emplois juridiquement rémunérés par l'Etat sont inclus dans le champ du plafond d'emplois.

En revanche, les personnels dont la rémunération est couverte par les subventions pour charges de service public ne seront pas compris dans le plafond . Les dépenses correspondantes figureront au titre 3 (dépenses de fonctionnement) 12 ( * ) . Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, seront ainsi « hors plafond » environ 200.000 agents au service de quelque 600 opérateurs (établissements publics administratifs nationaux, certains établissements publics industriels et commerciaux, comme l'Opéra de Paris et quelques associations, comme l'Association pour la formation professionnelle des adultes).

Le risque de cette situation pourrait être que l'Etat soit tenté, pour échapper à l'autorisation parlementaire en matière d'emplois publics, d'encourager la mise en oeuvre de certaines politiques par l'intermédiaire d'opérateurs extérieurs (établissement public ou association bénéficiant d'une subvention de l'Etat).

II. LES DISPOSITIONS PROPOSÉES

Dans un premier temps, notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale constituée à l'Assemblée nationale sur le présent projet de loi organique, a envisagé de compléter le plafond d'emplois rémunérés par un ministère sur le titre 2 par un second plafond pour les emplois d'opérateurs d'un ministère bénéficiant de subventions pour charges de services publics financées sur le titre 3 13 ( * ) .

Le gouvernement a cependant fait valoir des objections sérieuses : « la détermination du plafond des emplois des établissements publics - qui ont pour la plupart , je pense en particulier à ceux du monde des transports, des ressources propres, en plus des subventions d'Etat - relève de la compétence des conseils d'administration. Quand il y a des fonctionnaires affectés à un établissement public, leur rémunération est versée par l'Etat et les crédits correspondants figurent donc au titre 2, comme pour les autres personnels de l'Etat. Vous les retrouvez donc dans les plafonds d'emplois des ministères concernés » 14 ( * ) .

Pour respecter la transparence voulue par la LOLF, il serait peut-être souhaitable que les fonctionnaires affectés à un établissement public soient « facturés » par l'Etat à celui-ci.

L'Assemblée nationale a alors adopté un amendement du gouvernement sous-amendé par la commission spéciale, instituant un dispositif d'information du Parlement.

L'article 3 du présent projet de loi organique complèterait l'article 51 de la LOLF 15 ( * ) relatif aux documents joints aux projets de lois de finances. Les projets annuels de performance déjà prévus au 5° de cet article devraient comporter une présentation indicative des emplois rémunérés par les organismes bénéficiaires d'une subvention pour charges de service public, ainsi que la justification des variations par rapport à la situation existante.

Selon les indications fournies par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, la présentation serait faite par familles d'opérateurs, et non par opérateurs, sauf pour les plus importants.

Le gouvernement a précisé, au cours des débats, que les emplois rémunérés par l'Etat seront soumis au plafond fixé par le Parlement, qu'ils soient exercés dans les administrations, les établissements publics ou les associations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 4

Information, dans le projet de loi de règlement, sur les emplois rémunérés par des organismes subventionnés

Commentaire : dans le prolongement du précédent, le présent article ajoute à la liste des documents joints au projet de loi de règlement la présentation des emplois effectivement rémunérés par les organismes bénéficiaires d'une subvention pour charges de service public.

Après avoir bénéficié, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances, d'une présentation indicative des emplois rémunérés par les organismes bénéficiaires d'une subvention pour charges de service public 16 ( * ) , il est logique que le Parlement reçoive aussi, lors de l'examen du projet de loi de règlement, une présentation des emplois effectivement rémunérés dans les mêmes conditions au cours de l'exercice considéré.

Cette présentation figurera dans les rapports annuels de performances prévus à l'article 54 (4°) de la LOLF, que le présent article complète, à cet effet, par un nouvel alinéa.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5

Pouvoirs de contrôle des membres des commissions des finances
des assemblées

Commentaire : sans préjudice des pouvoirs de contrôle déjà dévolus au président, au rapporteur général et aux rapporteurs spéciaux, le présent article prévoit que la commission des finances, dans chaque assemblée, accordera des pouvoirs de contrôle, chaque année, pour un objet et une durée limités, à un ou plusieurs de ses membres.

I. LA SITUATION EXISTANTE

A. LE DROIT EN VIGUEUR

Le pouvoir de contrôle budgétaire de la commission des finances a été fixé initialement par l'article 164 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959, dont les dispositions sont toujours en vigueur 17 ( * ) , puis renforcé et consacré par l'article 57 de la LOLF.

L'article 164 précité concerne en particulier les pouvoirs de contrôle budgétaire des rapporteurs spéciaux des commissions des finances.

La loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-656 du 13 juillet 2000), a complété l'article 164 précité pour :

- étendre le champ du contrôle des rapporteurs spéciaux relatif aux organismes publics au périmètre du contrôle effectué par la Cour des comptes (article 28) ;

- étendre explicitement le champ du contrôle des rapporteurs spéciaux aux recettes publiques affectées (article 29) ;

- accorder un pouvoir général de contrôle des recettes et des dépenses aux présidents et rapporteurs généraux des commissions des finances (article 30) 18 ( * ) ;

- lever le secret professionnel dans certaines conditions et instaurer une sanction en cas d'entrave à la mission des rapporteurs spéciaux (article 31).

L'article 57 de la LOLF confère aux commissions des finances des assemblées la charge du suivi et du contrôle de l'exécution des lois de finances. Elles « procèdent à l'évaluation de toute question relative aux finances publiques ». Cette mission est confiée au président de la commission des finances, à son rapporteur général et, dans leurs domaines d'attribution, aux rapporteurs spéciaux. « A cet effet, ils procèdent à toutes investigations sur pièces et sur place, et à toutes auditions qu'ils jugent utile ».

Les pouvoirs et moyens juridiques de contrôle dont ils disposent sont très importants et méritent d'être rappelés 19 ( * ) .

« Tous les renseignements et documents d'ordre financier et administratif qu'ils demandent, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l'administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat et du respect du secret de l'instruction et du secret médical, doivent leur être fournis.

« Les personnes dont l'audition est jugée nécessaire par le président et le rapporteur général (...) ont l'obligation de s'y soumettre. Elles sont déliées du secret professionnel sous les réserves prévues à l'alinéa précédent ».

De plus, l'article 59 prévoit que lorsque la communication des renseignements demandés en application de l'article 57 ne peut être obtenue « au terme d'un délai raisonnable, apprécié au regard de la difficulté de les réunir », le président de la commission des finances peut demander à la juridiction compétente, statuant en référé, de faire cesser cette entrave sous astreinte .

Enfin, selon l'article 60 de la LOLF, lorsqu'une mission de contrôle et d'évaluation donne lieu à des observations notifiées au gouvernement, celui-ci y répond, par écrit, dans un délai de deux mois .

La mise en oeuvre effective de ces dispositions, également applicables dans chaque assemblée parlementaire, s'effectue selon des modalités et un contexte différents.

B LA SITUATION À L'ASSEMBLÉE NATIONALE EXPLIQUE, AU MOINS EN PARTIE, LA MODIFICATION PROPOSÉE DE L'ARTICLE 57 DE LA LOLF

Tous les membres de la commission des finances de l'Assemblée nationale ne sont pas rapporteurs spéciaux 20 ( * ) . Certains commissaires de cette commission ne peuvent donc pas exercer les pouvoirs de contrôle dévolus par l'article 57 de la LOLF 21 ( * ) .

Bien que le débat à l'Assemblée nationale ait porté, pour une large part, sur l'accès de nos collègues députés de l'opposition au contrôle budgétaire, ces derniers - du moins certains d'entre eux - peuvent néanmoins l'exercer dans le cadre de leur rapport spécial.

Notre collègue député Michel Bouvard, président de la commission spéciale, a en effet rappelé que la répartition des rapports spéciaux entre la majorité et l'opposition était « grossièrement de trois quarts et un quart » 22 ( * ) .

Il a ajouté que, dans le cadre de la LOLF, « les rapports non essentiels (seraient) moins nombreux. La nouvelle répartition des rapports réservera un rôle plus important à l'opposition ».

Notre collègue député Didier Migaud a cependant estimé que l'opposition ne devait pas dépendre « du bon vouloir du gouvernement et du rapporteur général de la commission des finances pour contrôler et suivre l'exécution du budget ».

C'est donc dans ce contexte que l'Assemblée nationale, en accord avec le gouvernement, a adopté le présent article dans une « rédaction consensuelle ».

C. AU SÉNAT, TOUS LES COMMISSAIRES DES FINANCES SONT DÉJÀ DOTÉS DE POUVOIRS DE CONTRÔLE BUDGÉTAIRE

Au Sénat, les 45 membres de la commission des finances 23 ( * ) disposent tous des pouvoirs de contrôle fixés par l'article 57 de la LOLF. Aucun commissaire n'est donc privé de ces pouvoirs de contrôle dans ses domaines d'attributions.

La composition des commissions étant établie sur la base de la représentation proportionnelle des groupes, il s'en suit, d'une part, que majorité et minorité participent au contrôle budgétaire au titre de l'article 57 de la LOLF et, d'autre part, que la répartition numérique entre les groupes des rapports spéciaux s'effectue inévitablement en proportion de l'effectif de chaque groupe , qu'il appartienne ou non à la majorité sénatoriale.

La répartition des secteurs de contrôle au sein de la commission des finances soulève d'autant moins de problèmes qu'il existe , en son sein, une tradition de souplesse et de convivialité qui permet une harmonieuse distribution des responsabilités . Chaque commissaire, quel que soit son groupe peut donc, s'il le souhaite, effectivement accomplir chaque année une ou plusieurs missions de contrôle .

Ceci provient aussi du travail de méthodologie régulièrement poursuivi au sein de la commission, notamment sous la forme de séminaires 24 ( * ) , à l'occasion desquels les commissaires échangent librement sur les méthodes de contrôle, les moyens de les améliorer et de renforcer leur efficacité. Ces séminaires ont abouti à l'établissement d'un « guide des bonnes pratiques du contrôle budgétaire » à vocation interne, formellement approuvé par la commission le 11 février 2004 .

Enfin, l'article 57 de la LOLF, dans sa rédaction actuelle, n'a fait obstacle, ni au « contrôle bisectoriel » (contrôle conjoint de deux rapporteurs spéciaux sur des questions communes à leurs compétences) 25 ( * ) , ni au contrôle transversal, c'est-à-dire ne portant pas sur un domaine propre à un ou deux, voire trois rapporteurs spéciaux 26 ( * ) .

La volonté d'approfondir le contrôle budgétaire a donc pu, dans le cadre des dispositions en vigueur, se développer sans entrave au sein de la commission des finances du Sénat.

II. LES DISPOSITIONS PROPOSÉES

L'article 5 du présent projet de loi organique, sans rien modifier aux pouvoirs de contrôle actuellement dévolus au président, au rapporteur général et aux rapporteurs spéciaux des commissions des finances « dans leurs domaines d'attributions » , inscrit dans la LOLF une nouvelle formule de contrôle, en complétant à cet effet son article 57. Chaque année, les commissions des finances accorderaient les pouvoirs de contrôle de l'article 57 de la LOLF, pour un objet et une durée limités, à un ou plusieurs de ses membres, obligatoirement désignés à cet effet.

Comme l'a observé le rapporteur de la commission spéciale à l'Assemblée nationale, la commission des finances restera totalement maîtresse de l'organisation de ses travaux . En d'autres termes, les décisions sur l'objet de la mission, sur sa durée et sur les commissaires missionnés seraient prises par la commission des finances. La participation à cette nouvelle formule de commissaires de l'opposition -terme juridiquement non défini de manière certaine-, déjà acquise dans les faits au Sénat, semble constituer, à l'Assemblée nationale un « contrat moral ».

Le président de la commission spéciale de l'Assemblée nationale a précisé qu'il s'agissait « d'un pouvoir d'investigation sur un sujet particulier qui ne coïnciderait pas nécessairement avec le champ des rapports spéciaux » 27 ( * ) . Cette coïncidence ne serait donc pas formellement interdite par le texte : une mission sur un sujet déterminé entrant dans la compétence d'un seul rapporteur spécial pourrait, notamment en raison de son ampleur, être exercée par plusieurs commissaires, le rapporteur spécial gardant la pleine compétence sur l'ensemble de son domaine.

Il semble, en définitive, que cet article souhaité par l'Assemblée nationale conforte, pour une large part, des pratiques déjà mises en place au sein de la commission des finances du Sénat, où le pluralisme est vécu comme une habitude . D'une certaine manière, le texte proposé institutionnalise les contrôles transversaux effectués par une équipe de commissaires, prévus par le guide précité des bonnes pratiques du contrôle budgétaire, que votre commission a formalisé.

Votre commission des finances souligne, pour ce qui la concerne, que, en tout état de cause, la disposition proposée ne peut, en aucune manière, être interprétée comme l'institution « rapporteur général bis » ou de « rapporteurs spéciaux bis ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6

Institution d'un débat sur certains rapports de la Cour des comptes

Commentaire : le présent article prévoit l'organisation de débats parlementaires sur le rapport annuel de la Cour des comptes ou ses autres rapports publics. Il complète la mission d'assistance de la Cour des comptes au Parlement, en prévoyant que celle-ci comportera aussi la préparation de ces débats.

I. LA SITUATION ACTUELLE

Selon le dernier alinéa de l'article 47 de la Constitution, la Cour des comptes assiste le Parlement et le gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances.

Le contenu de cette mission est précisé par l'article 58 de la LOLF tel que « validé » par le Conseil constitutionnel, dont les dispositions sont très largement utilisées par la commission des finances du Sénat (voir infra ).

La Cour des comptes a l'obligation de répondre aux demandes d' assistance émanant du président et du rapporteur général de la commission des finances (art. 58-1°) et doit réaliser toute enquête demandée par une commission des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elle contrôle, dans un délai de huit mois (art. 58-2°).

La procédure mise en place par la commission des finances du Sénat pour la réalisation d'enquête par la Cour des comptes au titre de l'article 58-2° de la LOLF donne satisfaction depuis déjà plus de deux ans . Chaque année, au mois de novembre, le président de la commission demande à chaque rapporteur spécial de lui proposer des sujets. Après vérification de la faisabilité technique, plusieurs enquêtes sont demandées par le président à la Cour des comptes qui, selon l'article 58-2° de la LOLF, dispose d'un délai de huit mois pour communiquer ses conclusions à la commission. Depuis 2002, la commission demande ainsi quatre à cinq enquêtes par an 28 ( * ) .

La mise en oeuvre de la mission d'assistance de la Cour des comptes, telle que prévue par l'article 58-1° de la LOLF est expérimentée pour la première fois en 2004, dans le cadre d'un contrôle en cours de notre collègue Yann Gaillard, rapporteur spécial du budget de la culture, sur l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP). Comme cela est la règle, le magistrat travaille dans le cadre défini par le parlementaire, sous sa seule responsabilité, nonobstant l'aide que continuent de lui fournir les fonctionnaires de la commission chargés du suivi de son secteur d'activité.

En outre, le rapport annuel de la Cour des comptes donne lieu, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, à une remise solennelle en séance publique par son Premier président, suivie, au Sénat, par les interventions des présidents des commissions des finances et des affaires sociales . Celle-ci n'est pas suivie d'un débat .

Le souhait d'un débat sur le rapport annuel correspond au souci que celui-ci connaisse une suite, au lieu de se limiter à un cérémonial dont la presse se fait l'écho de façon éphémère, sans que, trop souvent, le gouvernement se soucie de donner une suite aux observations de la Cour des comptes 29 ( * ) .

II. LES DISPOSITIONS PROPOSÉES

Le texte envisagé initialement par la commission spéciale de l'Assemblée nationale prévoyait une participation de la Cour des comptes au débat parlementaire sur la présentation de son rapport annuel ou de ses autres rapports publics.

Cette formule, dont la conformité à la Constitution prête à discussion, n'a pas été retenue. Il ne convient pas que le rôle du Premier président de la Cour des comptes puisse être confondu, à l'occasion d'un débat en séance publique susceptible de donner lieu à des polémiques, avec celui des parlementaires ou des ministres. Rien n'empêche, en revanche l'audition de magistrats de la Cour des comptes devant des commissions parlementaires, comme cela se pratique régulièrement, notamment par les commissions des finances des deux assemblées.

L'article 6 du projet de loi organique adopté par l'Assemblée nationale complète l'article 58 de la LOLF 30 ( * ) par les deux points ci-après :

- des débats pourront être organisés dans les assemblées à l'occasion de la présentation du rapport annuel de la Cour des comptes ou de ses autres rapports publics . Pour des raisons tenant notamment au respect de l'article 48 de la Constitution, le texte ne formule aucunement l'obligation d'organiser ces débats, notamment pour les « autres rapports publics » ;

- la mission d'assistance au Parlement de la Cour des comptes comprendrait aussi, selon le texte adopté par l'Assemblée nationale, la « préparation » de ces débats . Le contenu de cette préparation, non précisé par le texte, pourrait résulter d'un dialogue entre la Cour des comptes et les assemblées, comme il a été pratiqué par la commission des finances du Sénat pour la mise en place des modalités d'enquête et d'assistance de la Cour des comptes au titre de l'article 58 de la LOLF .

Le président de la commission spéciale a précisé 31 ( * ) qu'il s'agissait « d'une part, d'élargir le débat à la séance publique et donc de lever son confinement aux discussions moins médiatisées des commissions législatives, et, d'autre part, d'assurer un meilleur suivi des observations émises dans ces rapports en renforçant l'attention du Parlement sur les questions qu'elles soulèvent ».

Ce débat pourrait en effet constituer une occasion de faire le point sur la mise en oeuvre des recommandations formulées par la Cour des comptes au cours des exercices précédents . Si tout le monde convient de la grande qualité des travaux de la Cour des comptes, l'on peut regretter l'insuffisance du suivi de ses recommandations par les gouvernements successifs.

Les dispositions proposées pourraient paraître de nature à valoriser comme il se doit les travaux de la Cour des comptes et à développer encore un mouvement de coopération entre cette dernière et le Parlement , largement amorcé depuis quelques années, en particulier par votre commission des finances.

Votre rapporteur ne peut que se réjouir de cette étroite coopération qui a permis incontestablement d'enrichir le travail d'investigation de la commission des finances, au travers, en particulier, des auditions contradictoires et des rapports d'information auxquels ont donnés lieu des enquêtes réalisées par la commission des finances.

Pour autant, le présent article est, sur un plan normatif, superfétatoire . En effet, il comporte deux dispositions :

- il prévoit la possibilité d'organiser des débats parlementaires sur le rapport annuel de la Cour des comptes ou sur ses autres rapports publics. Cette disposition est inutile car les assemblées disposent déjà de la possibilité d'organiser de tels débats, en particulier dans le cadre des « séances mensuelles réservées » prévues au troisième alinéa de l'article 48 de la Constitution ;

- il ajoute à la mission d'assistance de la Cour des comptes la « préparation » des débats, sans en préciser le contenu. La Cour des comptes peut, sans qu'il soit nécessaire de prévoir des dispositions nouvelles, être associée à la préparation de ceux-ci par le biais d'auditions contradictoires en commission des finances (auxquelles participent les personnes et organismes contrôlés), comme cela se fait déjà dans le cadre de l'article 58-2° de la LOLF.

Votre commission, pour l'ensemble de ces raisons, si elle comprend et partage totalement les objectifs poursuivis, estime que d'autres moyens plus adéquats, et qui existent déjà, permettent de les atteindre.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

* 11 La spécialisation par programmes a été écartée, car elle aurait débouché sur un manque de souplesse de nature, en particulier, à gêner la mobilité des fonctionnaires au sein d'un ministère.

* 12 Les dépenses de fonctionnement se décomposent en :

- dépenses de fonctionnement autres que de personnel ;

- subventions pour charges de service public.

* 13 Voir le document Assemblée nationale n° 1926 (XII ème législature), page 46.

* 14 Intervention de M. Dominique Bussereau, alors secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire, à l'Assemblée nationale le 19 novembre 2004.

* 15 Par ajout d'un alinéa f) au 5° de cet article.

* 16 Voir supra, commentaire de l'article 3.

* 17 Et nécessiteraient peut-être d'être coordonnées avec celles des articles 57 à 60 de la LOLF dans le cadre d'une éventuelle codification.

* 18 A l'occasion de l'épisode dit de la « cagnotte » il était apparu que les textes ne donnaient des pouvoirs de contrôle qu'aux seuls rapporteurs spéciaux et pour les seules dépenses relevant du département ministériel de leur compétence. Les commissions ne détenaient pas de pouvoir sur les recettes et les présidents étaient dépourvus de tout pouvoir explicite.

* 19 Deuxième et troisième alinéas de l'article 57 de la LOLF.

* 20 Contrairement à la situation au Sénat, voir infra.

* 21 Toutefois, 10 commissaires n'ayant pas de responsabilités au sein de la commission (comme rapporteurs spéciaux, rapporteur général ou président) participent à une mission d'évaluation et de contrôle composée de 17 membres (MEC).

* 22 Plus précisément, 32 UMP, 3 UDF (dont 1 apparenté), 13 socialistes et 1 communiste.

* 23 Le président, le rapporteur général et les 43 rapporteurs spéciaux.

* 24 Pour s'en tenir à la seule année 2004 : Compiègne, le 2 février et Versailles le 14 octobre.

* 25 Par exemple, contrôle de nos collègues, Joël Bourdin et Marc Massion -l'un appartenant à la majorité et l'autre à l'opposition- sur de nouvelles perspectives pour la Société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires (SOPEXA) ayant donné lieu à la parution d'un rapport d'information. Voir document Sénat n° 25 (2004-2005). On peut aussi citer l'exemple du contrôle de Paul Loridant et Yann Gaillard sur les aides publiques au cinéma. Voir rapport d'information Sénat n° 276 (2002-2003).

* 26 Ainsi en a-t-il été pour la mission, conduite par votre président, sur l'informatisation de l'Etat, ayant débouchée sur un rapport d'information « Pour un Etat en ligne avec tous les citoyens ». Voir document Sénat n° 422 (2003-2004).

* 27 Voir document Assemblée nationale n° 1926 (XII ème législature), page 59.

* 28 L'enquête débouche ensuite sur une audition contradictoire au cours de laquelle la commission des finances entend, outre les magistrats de la Cour des comptes ayant effectué celle-ci, les organismes concernés par le contrôle. L'ensemble de ce travail fait l'objet d'un rapport d'information de la commission des finances sauf délibération contraire de la commission. A ce jour, 9 rapports ont déjà été publiés et 4 devraient l'être au début de l'année 2005.

* 29 L'instauration d'un débat, du moins pour le rapport annuel, a fait l'objet de propositions de loi constitutionnelle ou organique, selon les cas, dans les deux assemblées, par exemple, de nos collègues Bernard Plasait et Henri de Raincourt, Sénat n° 236 (2003-2004) et de notre collègue député Alain Suguenot (document Assemblée nationale n° 1719 - (XII ème législature)).

* 30 En y insérant un nouvel alinéa 7°.

* 31 Op. cit. p. 61.

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