ARTICLE 40 quinquies (nouveau)

Eligibilité aux attributions du FCTVA des investissements réalisés sur les monuments historiques inscrits ou classés appartenant à des collectivités territoriales

Commentaire : le présent article introduit à l'initiative de notre collègue député Michel Bouvard, propose de rendre éligibles aux attributions du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) les travaux réalisés à compter du 1 er janvier 2004 sur les monuments historiques inscrits ou classés appartenant à des collectivités territoriales, quels que soient l'affectation finale et éventuellement le mode de location ou de mise à disposition de ces édifices.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE FONDS DE COMPENSATION DE LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE (FCTVA)

L'article 13 de la loi de finances rectificative pour 1975 42 ( * ) a créé le fonds d'équipement pour les collectivités locales (FECL), prévu par la loi n° 75-678 du 29 juillet 1975, permettant de compenser une partie de la charge de TVA supportée par les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics bénéficiaires, sur leurs dépenses réelles d'investissement. La loi de finances initiale pour 1978 a renommé le FECL fonds de compensation pour la TVA (FCTVA).

Le FCTVA est présenté plus en détail dans le commentaire de l'article 40 quater du présent projet de loi de finances rectificative.

B. LE CAS DES TRAVAUX RÉALISÉS SUR DES MONUMENTS HISTORIQUES

1. L'inéligibilité des immobilisations cédées ou mises à disposition au profit d'un tiers

L'article L. 1615-7 du code général des collectivités territoriales prévoit que « les immobilisations cédées ou mises à disposition au profit d'un tiers ne figurant pas au nombre des collectivités ou établissements bénéficiaires du [FCTVA] ne peuvent donner lieu à une attribution dudit fonds ».

Comme cela a été indiqué dans le cadre du commentaire de l'article 40 quater du présent projet de loi de finances rectificative, cette règle admet plusieurs dérogations.

2. Le cas des travaux réalisés par l'Etat sur des monuments classés, dans le cadre de fonds de concours

Les monuments historiques sont soumis au droit commun en matière d'éligibilité aux attributions du FCTVA.

Il existe cependant une exception. L'article R. 1615-1 du code général des collectivités territoriales prévoit en effet que figurent parmi les dépenses réelles d'investissement ouvrant droit aux attributions du FCTVA les « fonds de concours versés à l'Etat en sa qualité de maître d'ouvrage des travaux sur les monuments classés ».

II. LA MODIFICATION PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article additionnel résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Michel Bouvard, avec un avis favorable de sa commission des finances et défavorable du gouvernement.

Il propose de rendre éligibles aux attributions du FCTVA les travaux réalisés à compter du 1 er janvier 2004 sur les monuments historiques inscrits ou classés appartenant à des collectivités territoriales.

Cette éligibilité est prévue « quels que soient l'affectation finale et éventuellement le mode de location ou de mise à disposition de ces édifices ».

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN ARTICLE RÉSULTANT D'UN AMENDEMENT ANCIEN, AUQUEL S'EST DÉJÀ OPPOSÉE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'amendement dont résulte le présent article additionnel a été présenté plusieurs fois , à l'Assemblée nationale par notre collègue député Michel Bouvard, généralement avec le soutien de la commission des finances, et même au Sénat, par notre collègue Gérard Miquel, lors de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2003, comme le rappelle le tableau ci-après.

« Historique » de l'amendement dont résulte le présent article additionnel (1)

Assemblée concernée

Auteur

Projet de loi

Position de la commission des finances

Position du gouvernement

Sort de l'amendement

Assemblée nationale

M. Michel Bouvard (2)

PLF 2002

Défavorable

-

Retiré en commission des finances

Assemblée nationale

Deux amendements identiques (2) de la commission des finances et de M. Michel Bouvard

PLF 2003

Favorable

Demande de retrait - engagement de régler le problème par voie réglementaire

Retirés en séance

Sénat

M. Gérard Miquel

PLF 2003

Défavorable

Défavorable

Retiré

Assemblée nationale

Deux amendements identiques de la commission des finances et de M. Michel Bouvard

PLF 2005

Favorable

Demande de retrait - engagement « d'étudier une solution dès que possible »

Retirés en séance

Assemblée nationale

M. Michel Bouvard

PLFR 2004

Favorable

Défavorable

Adopté

(1) Cette liste ne prétend pas à l'exhaustivité.

(2) L'amendement était alors « gagé » par la création d'une taxe additionnelle sur les vins doux (et non par le classique gage créant une taxe additionnelle sur les tabacs).

Cet amendement a toujours reçu un avis défavorable du gouvernement. De même, lors de sa présentation au Sénat à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2003, votre commission des finances a émis un avis défavorable.

B. LE PRÉSENT ARTICLE POSE UN PROBLÈME DE PRINCIPE

Ces avis défavorables du gouvernement et de votre commission des finances s'expliquent par le fait que le présent article, au-delà de son coût, pose un problème de principe.

En effet, il propose une dérogation totale à la règle d'inéligibilité aux attributions du FCTVA des immobilisations cédées ou mises à disposition au profit d'un tiers.

Non seulement il ne prévoit pas qu'une convention doit être conclue entre la collectivité et le tiers disposant du bien sur lequel ont été réalisés les travaux, mais en plus il précise que cette éligibilité s'entend « quels que soient l'affectation finale et éventuellement le mode de location ou de mise à disposition de ces édifices ».

Ainsi, le présent article susciterait le risque que la collectivité territoriale cumule, dans certains cas, le bénéfice d'attributions du FCTVA et celui du droit à récupération de la TVA. En effet, les collectivités territoriales peuvent récupérer la totalité de la TVA ayant grevé le bien donné en location dès lors que le loyer est « normal ». Le loyer « normal » est égal à l'amortissement des biens, déterminé selon les règles en usage pour le calcul de l'amortissement fiscal, soit 4 % du prix de revient hors taxe pour les immeubles à usage commercial 43 ( * ) . Or, on rappelle que le présent article prévoit que l'éligibilité aux attributions du FCTVA s'entend « quels que soient l'affectation finale et éventuellement le mode de location ou de mise à disposition de ces édifices » .

Certes, il est indispensable de permettre aux collectivités territoriales de mieux entretenir les monuments historiques dont elles sont propriétaires. Cependant, le FCTVA ne semble pas être l'instrument approprié pour atteindre cet objectif. Il conviendrait de rechercher par d'autres moyens une formule incitative à l'intervention d'opérateurs privés pour la gestion du patrimoine historique. L'amélioration du statut légal et fiscal des fondations et de leurs donateurs paraît être une meilleure voie.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

* 42 Loi n° 75-853 du 13 septembre 1975.

* 43 A défaut, la collectivité locale doit compléter sa base d'imposition pour que celle-ci atteigne au moins le loyer normal.

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