ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 17 bis (nouveau) - Raccourcissement du délai de reprise en matière de droits d'enregistrement

Commentaire : le présent article additionnel propose de réduire le délai de reprise de droit commun de l'administration fiscale applicable aux droits d'enregistrement de dix ans à six ans.

I. LE DROIT EXISTANT

Le chapitre V du livre des procédures fiscales définit les délais de prescription en matière fiscale. Au sein de ce chapitre, l'article L. 186 dispose que le droit de reprise de l'administration fiscale s'exerce pendant dix ans à partir du jour du fait générateur de l'impôt, dans tous les cas où il n'est pas prévu de délai plus court.

Ce délai de prescription décennal ne s'applique plus en réalité qu'en matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, d'impôts de solidarité sur la fortune, de droits de timbre ainsi que de taxes et de redevances assimilées à ces impositions.

Pour un grand nombre d'impositions, et au premier chef pour les impositions annuelles, le délai de reprise est ainsi bien inférieur à dix ans. Il en est ainsi pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, pour lesquels, en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, le droit de reprise de l'administration fiscale s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Ce délai est porté à six ans en cas d'omission des déclarations que le contribuable aurait dû souscrire et s'il n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce.

En ce qui concerne les droits d'enregistrement, il existe certes une « prescription abrégée » de trois ans, prévue par l'article L. 180 du livre des procédures fiscales, pour les cas où « l'exigibilité des droits et taxes a été suffisamment révélée par le document enregistré ou par la déclaration, sans qu'il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures », c'est-à-dire de telle sorte que le service soit mis à même de constater immédiatement, au seul vu du document présenté, l'existence du bien imposable. En pratique, en matière d'ISF, ce délai abrégé a vocation à s'appliquer aux erreurs de calcul ou d'évaluation réalisées par le redevable dans sa déclaration et non en cas d'omission de déclaration.

Le délai de reprise décennal de droit commun a pour point de départ le fait générateur de l'impôt, à savoir pour l'ISF le 1 er janvier de l'année d'imposition ou pour les droits de mutation par décès la date du décès, et plus généralement pour les droits d'enregistrement la date de la mutation.

Au cours de ce délai de reprise, les redevables qui ne s'acquittent pas de leurs obligations déclaratives sont redevables du paiement des intérêts de retard calculés sur le montant de l'impôt dû. Il s'y ajoute une majoration de 10 % pouvant être portée à 40 % ou à 80 % lorsque les mises en demeure de l'administration fiscale n'ont pas été entendues ou en cas de manoeuvres frauduleuses.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES

En matière d'ISF, comme plus généralement en ce qui concerne les droits d'enregistrement, le « délai de prescription » de droit commun de dix ans imposé par l'administration place le contribuable dans une situation de forte incertitude juridique alors que le risque, une reprise sur les dix années antérieures, est très élevé.

En outre, l'impôt de solidarité sur la fortune est un impôt annuel : le rappel des droits par l'administration fiscal peut s'avérer particulièrement lourd pour les redevables . L'augmentation des prix de l'immobilier a fait franchir à certains patrimoines la barre des 732.000 euros, au-delà de laquelle les redevables se trouvent imposés à l'impôt de solidarité sur la fortune, sans que ceux-ci, en toute bonne foi, faute d'intérêt pour la valeur de leur résidence principale et/ou de connaissance fiscale, en aient pris conscience. Leur « réveil », grâce à l'attention de l'administration fiscale, s'est révélé particulièrement douloureux. Il en est ainsi d'habitants de l'Ile de Ré, dont la situation a attiré l'attention de beaucoup d'observateurs, et qui, vivant de revenus limités, n'ont pas perçu dans l'accroissement de la valeur vénale de leurs terres, qu'ils n'envisageaient pas de céder, une obligation de déclaration de leur « fortune » à l'ISF. Certaines de ses personnes, aux revenus très faibles, ont eu à subir un redressement fiscal sur les dix années antérieures.

On est d'ailleurs fondé à s'interroger, par ailleurs, sur les raisons qui ont conduit à assimiler, notamment pour le délai de reprise, l'impôt de solidarité sur la fortune aux droits d'enregistrement : s'ils sont assis sur le patrimoine, ces impositions en diffèrent fortement, l'ISF s'apparentant pour beaucoup de redevables à un supplément d'impôt sur le revenu, dû de manière annuelle. Cette interprétation est d'ailleurs renforcée par l'inclusion de l'ISF parmi les impôts figurant au numérateur de la fraction représentative du futur « bouclier fiscal ».

Il est proposé, en prenant tout particulièrement en considération les risques qu'un délai de reprise de dix ans fait courir sur le droit de propriété des redevables, d'introduire un délai de reprise de droit commun pour les droits d'enregistrement de six ans , comme cela existe pour la plupart des autres impôts. Il aurait vocation à s'appliquer aux omissions de déclarations. Le délai de « prescription abrégée » de trois ans s'appliquerait aux erreurs de déclaration.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

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