B. PROGRAMME 104 : ACCUEIL DES ÉTRANGERS ET INTÉGRATION

Le programme « Accueil des étrangers et intégration » rassemble environ 455 millions d'euros répartis en quatre actions, ainsi que le montre le tableau suivant :

Le schéma de déversement analytique figurant dans le projet annuel de performances fait apparaître que 52,5 millions d'euros inscrits sur d'autres programmes concourent aux actions menées dans le cadre de ce programme.

1. Les enjeux du programme

a) Le suivi de la démographie et la participation à la régulation des migrations

Les dépenses consacrées au suivi de la population et à la régulation des migrations (14,63 millions d'euros) sont relativement marginales par rapport à l'ensemble du programme.

On relèvera notamment que 5,05 millions d'euros sont consacrés au dispositif d'aide au retour volontaire , dont pourront bénéficier les étrangers en situation irrégulière, notamment les familles déboutées du droit d'asile. Le gouvernement a décidé de généraliser l'expérience menée depuis septembre 2005 dans une vingtaine de départements pilotes et de la rendre éligible à tous les étrangers sous arrêté préfectoral de reconduite à la frontière. Votre rapporteur spécial observe toutefois que le montant de crédits prévus pour cette action reste le même que celui inscrit en loi de finances initiale pour 2006.

En pratique, ces crédits complètent ceux de l'un des trois opérateurs de ce programme, l' Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) .

Le ministère a indiqué à votre rapporteur spécial que, après une phase de démarrage fin 2005 (38 dossiers et 52 départs), ce dispositif est progressivement monté en puissance durant le premier semestre 2006. Au 31 juillet 2006, 1.055 dossiers avaient ainsi été déposés, pour 1.457 personnes. Parmi ces dernières, 919 avaient déjà quitté le territoire, 144 étaient en attente de départ et les dossiers des 345 restantes étaient en cours de traitement.

Le reste des crédits de cette action est consacré à l'assistance sanitaire et sociale apportée aux étrangers retenus en centres de rétention administrative ( CRA ), pour près de 9,36 millions d'euros , ainsi qu'à des subventions accordées à des organismes d'étude et de recherche en démographie (220.490 euros).

b) La prise en charge sociale des demandeurs d'asile

Les crédits relatifs à la prise en charge sociale des demandeurs d'asile, inscrits sur l'action n° 2, s'élèvent en 2007 à 243,97 millions d'euros, en baisse significative par rapport à 2006.

Cette réduction des crédits est permise par la diminution du nombre de demandes d'asile, ainsi que, selon le ministère, par le raccourcissement des délais de traitement de l'OFPRA 3 ( * ) . Le projet annuel de performances indique ainsi que les projections à mi-2006 font état d'une baisse de 40 % de la demande d'asile en 2006 par rapport à 2005 (soit 31.000 demandes contre 52.000 en 2005) et de 10 % en 2007 (soit 28.000 demandes).

Deux types d'actions sont menés à ce titre : le financement de dispositif d'accueil et d'hébergement et celui du dispositif temporaire d'attente.

Le dispositif d'accueil et d'hébergement comprend trois mesures :

- 6 millions d'euros sont prévus au titres d'actions spécifiques de soutien : 5,1 millions d'euros pour la mise en place de plates-formes d'accueil et d'autres prestations d'accueil servies aux demandeurs d'asile ; des subventions sont accordées, à hauteur de 905.000 euros, à certaines associations exerçant une action de portée nationale et répondant à des besoins spécifiques, comme une aide accordée aux victimes de la torture ;

- le dispositif pérenne des centres d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) mobilise près de 163 millions d'euros, auxquels il convient d'ajouter 22 millions d'euros transférés au programme des interventions territoriales de l'Etat au titre de la région Rhône-Alpes. Le nombre de places en CADA a très fortement augmenté au cours des dernières années (il a triplé en quatre ans) : 2.000 nouvelles places ont été créées en 2006, dont 1.000 à mi-année, tandis que le présent projet de loi de finances prévoit la création de 1.000 nouvelles places à mi-année. Le nombre de places en CADA devrait ainsi s'élever à 20.689 places fin 2007, contre 17.710 fin 2005. Compte tenu de la réduction du nombre de demandeurs d'asile, le montant de crédits inscrits au titre des CADA devrait être plus conforme aux besoins que celui inscrit les années précédentes. Votre rapporteur spécial observe toutefois que les objectifs de raccourcissement du délai de traitement des demandes d'asile restent difficiles à atteindre, comme l'a noté notre collègue Adrien Gouteyron dans son rapport spécial sur la mission « Action extérieure de l'Etat ». Celui-ci estime ainsi que les objectifs de délai de traitement des demandes d'asile en 60 jours pour l'OFPRA et de 90 jours pour les recours ne seront pas tenus.

Les remarques de notre collègue Adrien Gouteyron sur la réduction des délais de traitement des demandes d'asile

L'indicateur retenu pour mesurer la performance de l'OFPRA et de la commission de recours des réfugiés est le délai moyen de traitement d'un dossier de demande d'asile ou d'un recours. L'indicateur mesure le nombre de jours écoulés entre le dépôt d'une demande et la prise de décision la concernant.

Objectifs de délai moyen de traitement de dossiers par l'OFPRA et réalités

(en jours)

2005

2006

OFPRA : prévision

101

60

OFPRA : réalisation

108

142

Source : OFPRA

Objectifs de délai moyen de traitement de dossiers par l'OFPRA et réalités

(en jours)

2005

2006

2007

2008

CRR : prévision

284

90

90

90

CRR : réalisation

283

306

206

150

Source : commission de recours des réfugiés

S'agissant de l'OFPRA, il existe trois raisons essentielles pouvant expliquer cette augmentation:

- les dossiers haïtiens entendus lors des missions foraines répétées en 2005 en Guadeloupe, auraient fait en grande partie l'objet d'une décision au cours du premier semestre de l'année 2005, avec donc un certain retard après leur enregistrement ;

- l'office, durant l'été 2006, aurait résorbé pour une grande part ses dossiers les plus anciens. Les dossiers de plus d'un an qui représentaient 6% du stock au 1 er juillet 2006, n'en constituent plus que 2,5% au 30 octobre 2006. Le prix de cette opération certes indispensable a eu un coût très lourd en termes de délais.

- compte tenu de la baisse de la demande d'asile, l'office a réduit son nombre de dossiers en instance de 11.800 au 1 er janvier 2006 à environ 8.000 au 30 octobre 2006, ce qui entraîne une dégradation mécanique de l'indicateur.

Pourtant en termes de délai, il faut rappeler que 53,2 % des décisions prises en 2006 par l'OFPRA concernent des dossiers dont l'ancienneté maximale est de 3 mois.

S'agissant de la commission de recours des réfugiés, le rallongement du délai constaté est lié au type de recours ayant fait l'objet de décisions en 2006. La commission s'est attachée en 2006 à inscrire aux rôles des audiences des recours anciens pour réduire le stock d'anciens dossiers : fatalement, l'indicateur a connu une hausse.

Les deux années à venir devraient permettre une réduction des délais, mais sans jamais pouvoir atteindre le délai moyen de 90 jours. La capacité de jugement en nombre de rapporteurs de la commission de recours des réfugiés, qui était de 69,6 ETPT en début d'année 2006, puis a diminué jusqu'à 65,4 ETPT en milieu de cette même année, est actuellement de 80 ETPT. Un renforcement supplémentaire devrait permettre, en 2007, et dans l'hypothèse d'un nombre de recours en baisse de l'ordre de 10 %, de traiter les dossiers entrants et de résorber une partie du stock.

Dès lors qu'il s'agit d'objectifs politiquement sensibles, votre rapporteur spécial est conduit à s'interroger : faut-il changer les objectifs ? Faut-il modifier les indicateurs ? Faut-il revoir profondément le travail des deux organismes concernés ? Les trois pistes doivent être envisagées de concert.

En tout état de cause, comme votre rapporteur spécial le rappelait dans son rapport d'information précité, les indicateurs décrits plus haut sont insuffisants pour rendre compte de la performance des établissements et de la qualité de leur décision.

Source : rapport spécial de notre collègue Adrien Gouteyron sur la mission « Action extérieure de l'Etat » pour 2007, rapport général n° 78, annexe 1 (2006-2007).

- le dispositif pérenne demeure toutefois insuffisant pour faire face à la totalité des besoins et est complété par un dispositif d'hébergement d'urgence, qui mobilise 37 millions d'euros au total , auxquels il convient d'ajouter 3 millions d'euros transférés au programme des interventions territoriales de l'Etat au titre de la région Rhône-Alpes. Ce dispositif d'hébergement d'urgence, qui mobilise moins de crédits qu'en 2006 (44,5 millions d'euros), s'applique en cas d'absence de places disponibles en CADA et lorsque les demandeurs d'asile ne remplissent pas les conditions requises pour bénéficier de l'accès à un CADA, comme dans le cas des demandeurs d'asile en procédure prioritaire. Votre rapporteur spécial s'interroge sur le montant de crédits inscrits à ce titre. Il observe en effet que 56 millions d'euros ont été redéployés en interne en 2006 au profit de l'hébergement d'urgence, qui fait traditionnellement l'objet de sous-évaluations. Il souhaite donc que le gouvernement justifie plus précisément l'évolution de la dotation au regard des dépenses réellement constatées en 2006.

L' allocation temporaire d'attente , qui succède à l'allocation d'insertion, mobilisera quant à elle 38 millions d'euros . La réduction des moyens nécessaires est très importante, puisque 126 millions d'euros avaient été inscrits en loi de finances initiale pour 2006, correspondant à 42.000 entrées, tandis que la dépense constatée en 2005 au titre de l'allocation d'insertion s'élevait à 154 millions d'euros, pour 34.100 bénéficiaires.

L'allocation temporaire d'attente

Cette allocation est réservée aux ressortissants étrangers ayant atteint l'âge de dix-huit ans révolu, dont le titre de séjour ou le récépissé de demande de titre de séjour mentionne qu'ils ont sollicité l'asile en France et qui ont présenté une demande tendant à bénéficier du statut de réfugié, s'ils satisfont à une condition de ressources. Toutefois, le bénéfice de cette allocation n'est pas ouvert aux personnes demandant à jouir du statut de réfugié, si les circonstances à la suite desquelles elles ont été reconnues comme réfugiées ont cessé d'exister, ainsi qu'aux personnes provenant d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr.

Elle peut également être accordée aux ressortissants étrangers bénéficiaires de la protection temporaire ainsi qu'à certaines catégories de personnes en attente de réinsertion (détenus et salariés expatriés).

Cette allocation ne peut toutefois être accordée aux personnes susmentionnées lorsque leur séjour dans un centre d'hébergement est pris en charge au titre de l'aide sociale ou si elles refusent une offre de prise en charge.

Elle est gérée par l'UNEDIC et versée mensuellement, à terme échu , aux personnes dont la demande d'asile n'a pas fait l'objet d'une décision définitive. Le versement de l'allocation prend fin au terme du mois qui suit celui de la notification de la décision définitive concernant cette demande.

Le projet annuel de performances indique que la dotation prévue pour 2007 permettrait de financer 9.800 allocations en année pleine, soit un versement à 13.066 personnes si la durée de la procédure (OFPRA et CRR) est de 9 mois. Compte tenu de la diminution du nombre de demandes d'asile, de l'objectif affiché de réduire le délai d'instruction de ces demandes à 9 mois et de l'augmentation du nombre de places en CADA, cette donnée semble possible : si l'on compte 28.000 demandes d'asile et 20.000 places en CADA, seuls 8.000 nouveaux demandeurs devraient bénéficier de l'ATA. Votre rapporteur spécial souhaite toutefois que le gouvernement lui apporte des précisions sur une évolution si importante de la dépense.

* 3 Sur ce point, se reporter au rapport d'information n° 401 (2005-2006) de notre collègue Adrien Gouteyron, « L'OFPRA : impératif de performance administrative et exigences du droit d'asile ».

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