2. ... mais difficiles à quantifier

Si personne ne conteste l'existence de ces abus, leur quantification est en revanche sujette à débat. Le collectif « Génération précaire » estime que l'équivalent de 100 000 emplois seraient occupés indûment par des stagiaires mais ce chiffre paraît faiblement étayé. Les représentants du Medef auditionnés par votre rapporteur ont, pour leur part, considéré que la quasi-totalité des stages se passent convenablement et fait valoir que le nombre de signataires de la pétition de « Génération précaire » - de l'ordre de 15 500 - demeure en définitive très faible au regard du nombre d'étudiants qui ont accompli un stage ces dernières années.

Bien que les étudiants saisissent rarement la justice en cas d'abus, la jurisprudence fournit des exemples de requalification d'une convention de stage en contrat de travail. La Cour de cassation a jugé que l'absence de formation par l'entreprise et l'affectation exclusive aux tâches normales d'un emploi dans l'entreprise sont des motifs de requalification (Cass. soc., 27 octobre 1993). La requalification en contrat de travail ouvre droit, pour le salarié, à un rappel de salaires depuis le début du stage, le salaire ne pouvant être inférieur au minimum légal, ainsi qu'au bénéfice de l'ensemble des droits attachés à la qualité de salarié, tel que le droit aux congés payés (Cass. crim., 3 décembre 2002).


Les logiques d'usage des stages étudiants par les entreprises

Une étude, réalisée en 2002 à partir des résultats d'une enquête menée auprès des étudiants en économie de l'université Paris I, apporte un éclairage sur la manière dont les entreprises utilisent les stagiaires. L'auteur de l'étude distingue deux grandes stratégies d'entreprise en la matière :

- certaines entreprises utilisent les stages comme une source de main-d'oeuvre à moindre coût permettant d'ajuster plus facilement les effectifs ; une logique quantitative prévaut dans certains cas : certains services fonctionnent grâce à la présence permanente d'un ou de plusieurs stagiaires qui assistent ou remplacent des salariés permanents ; le stage répond parfois à un besoin plus qualitatif : un stagiaire disposant d'une qualification très pointue peut se voir confier la réalisation d'une étude ou une mission spécialisée, qui aurait pu autrement être confiée à un consultant ;

- d'autres entreprises participent davantage au parcours d'insertion professionnelle des jeunes diplômés ; certaines utilisent le stage comme un outil de prérecrutement, le stage devenant une forme de période d'essai prolongée ; d'autres n'ont pas d'objectif de recrutement particulier mais estiment néanmoins utile de participer à la formation des étudiants, ne serait-ce que pour entretenir leur image vis-à-vis de leur environnement.

Source : « Logiques d'usage des stages sous statut scolaire »,
Formation Emploi n° 79, juillet-septembre 2002, Pauline Domingo.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page