II. LE RENFORCEMENT DES MODALITÉS DE COOPÉRATION POLICIÈRE TRANSFRONTALIÈRE

Le traité de Prüm étend aux Etats signataires des formes de coopération déjà expérimentées avec profit par notre pays.

A. UNE EXPÉRIENCE FRANÇAISE POSITIVE DES COOPÉRATIONS POLICIÈRES TRANSFRONTALIÈRES

L'accord de Schengen, en posant le principe du libre franchissement des frontières par tous les ressortissants des Etats membres des Communautés européennes, l'a assorti de modalités nouvelles de contrôle aux frontières intra-communautaires, fondées sur l'article 39 de la convention d'application de l'accord, conclue en 1990.

Cet article impose aux Etats parties un devoir d'assistance entre leurs services de police aux fins de prévention et de recherche des faits punissables. Son paragraphe 4 prévoit la possibilité de conclusion d'arrangements spécifiques entre les ministres chargés de l'ordre public dans les régions frontalières.

Le paragraphe 5 organise la possibilité d'accords bilatéraux plus complets entre les pays ayant une frontière commune.

Pour faciliter et normaliser de tels accords bilatéraux, le Comité de coordination de la politique européenne de sécurité intérieure a établi, en 1996, un modèle de convention transfrontalière dans les domaines de la police et des douanes.

Sur cette base, des accords bilatéraux ont déjà été conclus par la France avec l'Italie, le 3 octobre 1997, l'Allemagne, le 9 octobre 1997, l'Espagne, le 7 septembre 1998, la Belgique, le 5 mars 2001, et le Luxembourg, le 15 octobre 2001.

Outre la suppression des contrôles fixes aux frontières intérieures et le report de ceux-ci aux frontières extérieures, ces textes instaurent un maintien des contrôles, mais sous forme mobile, aux frontières intra-communautaires, ainsi qu'une coopération directe et renforcée entre les services de police et de douane des deux pays frontaliers .

Cette coopération est fondée sur la création de Centres de coopération policière et douanière (CCPD) communs aux Etat signataires d'accords bilatéraux de ce type. Un CCPD a ainsi été créé entre la Belgique et les Pays-Bas , outre ceux instaurés entre notre pays et les partenaires précédemment cités.

Ces accords bilatéraux ont démontré leur utilité, pour les Etats impliqués, de mieux lutter contre des trafics en expansion, menés par des réseaux criminels très organisés et déterminés.

B. LE TRAITÉ GÉNÉRALISE CES FORMES DE COOPÉRATION À L'ENSEMBLE DES ETATS SIGNATAIRES

Les articles 24 à 32 élargissent une forme de soutien entre forces de l'ordre dont la France a déjà pu mesurer le caractère efficace. L'intervention de policiers sur autre territoire national que le leur nécessite un encadrement strict, inspiré de celui qui a été défini dans les accords bilatéraux précités.

Ainsi, cette coopération est-elle régie par les dispositions de la législation nationale de l'Etat dans lequel elle s'exerce, notamment en matière d'usage des armes de service . D'une part, le Traité prévoit que les policiers étrangers ne peuvent exercer de compétences de puissance publique dans l'Etat d'accueil que « sous le commandement et, en règle générale, en présence de fonctionnaires de l'Etat d'accueil ». C'est uniquement en cas de « situation d'urgence » que les fonctionnaires de police peuvent intervenir au-delà de leur territoire national, sans autorisation préalable, pour « prendre les mesures provisoires nécessaires afin d'écarter tout danger pour la vie ou l'intégrité physique de personnes ». Cette situation se présenterait, par exemple, en cas de chute d'un avion dans une zone frontalière : ce sont les forces de police les mieux à même d'intervenir au plus vite qui se porteraient les premières au secours des victimes, tout en prévenant leurs collègues de l'Etat où s'est produit l'accident.

Dans le cas de poursuite de malfaiteurs, l'usage de leurs armes par les forces de police d'un Etat frontalier est soumis aux dispositions de l'Etat dans lequel elles interviennent. En France, cet éventuel usage est ainsi soumis au strict cas de la légitime défense, telle que définie par le code pénal et la jurisprudence.

Le ministère de l'intérieur a précisé à votre rapporteur que :

« Les jurisprudences et avis du Conseil Constitutionnel et du Conseil d'Etat ont défini les limites de l'exercice de compétences de puissance publique par des agents étrangers sur le territoire français : des mesures coercitives entraînant une restriction des libertés fondamentales ne peuvent être exercées que sous le contrôle et en règle générale en présence de l'autorité française compétente.

En cas d'urgence, c'est l'article 73 du code de procédure pénale qui est opérant : toute personne a qualité pour appréhender l'auteur d'un crime ou délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement pour le conduire devant l'autorité de police judiciaire compétente.

Le port des armes de dotation est réglé par deux listes négatives établies par chaque Etat partie au traité et annexées à l'accord d'exécution, fixant les armes dont le port est interdit d'une part, et dont l'usage est interdit d'autre part.

L'usage des armes n`est admis qu'en cas de légitime défense de soi-même et d'autrui, tel qu'il est circonscrit par la jurisprudence. »

Enfin, les articles 32 à 52 établissent les dispositions générales relatives à la protection des données, ainsi que les dispositions d'application et les dispositions finales : le traité est ouvert à tout Etat membre de l'Union européenne, et est conclu pour une durée indéterminée. Il peut être dénoncé par notification adressée au dépositaire (l'Allemagne) par voie diplomatique. Cette dénonciation prend effet six mois après réception de celle-ci.

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