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Rapport n° 459 (2006-2007) de Mme Catherine PROCACCIA , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 19 septembre 2007

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N° 459

SÉNAT

DEUXIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 septembre 2007

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi ratifiant l' ordonnance 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative),

Par Mme Catherine PROCACCIA,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mme Claire-Lise Campion, MM. Bernard Seillier, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Annie David, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Pierre Bernard-Reymond, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, Muguette Dini, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Annie Jarraud-Vergnolle, Christiane Kammermann, MM. Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, Patricia Schillinger, Esther Sittler, MM. Alain Vasselle, François Vendasi.

Voir le numéro :

Sénat : 293 (2006-2007)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Depuis la création de la commission supérieure de codification (CSC), en 1989, un travail de codification tout à fait considérable a été accompli dans notre pays : plus d'une quinzaine de codes ont été adoptés, certains pour réécrire des codes anciens, comme le code de commerce, d'autres pour codifier des matières nouvelles, comme le code du sport ou le code du tourisme. Cette codification a été réalisée, à de rares exceptions près, à droit constant : elle consiste à actualiser et à moderniser des codes qui ont parfois vieilli, non à procéder à la réforme d'ensemble d'un domaine.

Depuis l'adoption de la loi n° 99-1071 du 16 décembre 1999, portant habilitation du Gouvernement à procéder par ordonnances à l'adoption de la partie législative de certains codes, l'habitude a été prise de promulguer ces nouveaux codes par la voie d'ordonnances, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution. Cette procédure a permis de contourner l'obstacle que constituait l'encombrement de l'ordre du jour des assemblées parlementaires.

Il était naturel que le code du travail soit soumis, à son tour, à cet exercice de recodification. En vigueur depuis 1973, il a été rendu, au fil des ans, sans cesse plus complexe et touffu par l'accumulation de mesures législatives et réglementaires successives. Pour ces raisons, Gérard Larcher, alors ministre en charge du travail, a pris l'initiative, en 2004, de lancer le processus de recodification.

La partie législative du nouveau code du travail est annexée à l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007, publiée au Journal officiel le 13 mars dernier. Ce projet de loi a pour objet de procéder à la ratification de cette ordonnance, ce qui aura pour effet de lui conférer une valeur législative, les ordonnances non ratifiées ayant une simple valeur réglementaire.

Votre commission se félicite que le Gouvernement ait choisi d'inscrire à l'ordre du jour des assemblées l'examen de ce projet de loi de ratification. Rappelons en effet que l'article 38 de la Constitution impose seulement le dépôt d'un projet de loi de ratification, à peine de caducité de l'ordonnance, mais non son adoption.

Elle se réjouit également qu'un projet de loi autonome ait été élaboré - alors que de nombreuses ratifications sont effectuées à l'occasion de l'examen de projets de loi qui poursuivent d'autres objectifs - dans la mesure où cela permettra au débat parlementaire de se dérouler dans de meilleures conditions.

Consciente des limites et des critiques que suscite immanquablement tout exercice de recodification « à droit constant », votre commission porte néanmoins un jugement favorable sur le projet de nouveau code du travail qui lui est soumis. Elle veut croire que ses utilisateurs, après une inévitable phase d'adaptation, sauront également en apprécier les bénéfices.

I. UN IMPORTANT TRAVAIL DE RECODIFICATION

Les travaux de recodification ont été officiellement lancés le 15 février 2005 par le ministre alors en charge du secteur du travail, Gérard Larcher. Plus de deux ans ont été nécessaires pour parvenir à la publication de l'ordonnance relative au nouveau code du travail. Ce délai s'explique, notamment, par l'effort accompli par le ministère pour associer les partenaires sociaux à toutes les étapes du processus de rédaction du nouveau code.

A. POURQUOI RECODIFIER ?

Le code du travail, créé en 1910, a déjà fait l'objet d'une première recodification en 1973. Trente ans plus tard, une refonte de ce code est apparue nécessaire. En effet, comme l'indique le rapport au Président de la République qui accompagne l'ordonnance, le code a « progressivement perdu en cohérence et en clarté » du fait des nombreuses interventions du législateur dans les domaines du travail et de l'emploi.

Dans son rapport public de 2006, le Conseil d'Etat souligne que « le système juridique français n'a pas échappé à la logique de la sédimentation consistant à prendre successivement des textes sur le même sujet sans réévaluation d'ensemble du dispositif et sans abrogation en conséquence de tout ce qui est devenu superfétatoire, redondant ou encore obsolète » . Ce phénomène de « sédimentation » vaut tout particulièrement pour le droit du travail qui fait l'objet de révisions particulièrement fréquentes, comme l'illustrent, par exemple, les modifications répétées des règles relatives à la durée du travail ou au régime des contrats aidés depuis dix ans.

Rendu de plus en plus complexe et foisonnant, le code du travail risquait, à terme, de ne plus satisfaire aux objectifs constitutionnels d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, consacrés par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999. Ce risque était d'autant plus important que le code du travail, outil juridique utilisé au quotidien, doit être compréhensible par des non-juristes (employeurs, salariés, élus du personnel, délégués syndicaux...) pour que les garanties qu'il comporte soient effectives.

Par ailleurs, certains textes importants, comme la loi n° 78-49 du 18 janvier 1978 sur la mensualisation, n'ont jamais été intégrés dans le code du travail, alors qu'ils pouvaient naturellement y trouver leur place.

Ces considérations ont incité le Gouvernement à procéder à une refonte d'ensemble du code du travail, afin de le rendre plus simple et plus lisible.

B. LE PROCESSUS DE RECODIFICATION

1. Les principes directeurs de la recodification

Le travail de recodification a été accompli dans le cadre défini par les deux lois d'habilitation du 9 décembre 2004 et du 30 décembre 2006.

Par l'article 84 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le Gouvernement a été autorisé à adapter, par voie d'ordonnance, la partie législative du code du travail, afin d'y inclure les dispositions de nature législative qui n'avaient pas été codifiées et de remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification. Le Gouvernement disposait d'un délai de dix-huit mois, à compter de la date de publication de la loi, pour publier l'ordonnance.

Ce délai s'étant révélé insuffisant, l'habilitation a été renouvelée par l'article 57 de la loi n° 2006-1770 du 30  décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social. Les termes de cette seconde habilitation sont plus précis que ceux figurant dans la loi de 2004.

Elle indique d'abord que le Gouvernement est autorisé à procéder par ordonnance à l'adaptation des dispositions législatives du code du travail à droit constant, afin d'y inclure les dispositions de nature législative qui n'ont pas été codifiées, d'améliorer le plan du code et de remédier, le cas échéant, aux erreurs ou insuffisances de codification.

Il est ensuite précisé que les dispositions codifiées sont celles en vigueur au moment de la publication de l'ordonnance, sous la seule réserve de modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l'état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions, codifiées ou non, devenues sans objet.

Le Gouvernement a également été autorisé à étendre, le cas échéant, l'application des dispositions codifiées à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux Terres australes et antarctiques françaises et aux îles Wallis-et-Futuna, avec les adaptations nécessaires.

La publication de l'ordonnance devait intervenir dans un délai de neuf mois suivant la publication de la loi et le projet de loi de ratification être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

Les rédacteurs du nouveau code du travail se sont également conformés aux dispositions de la circulaire du Premier ministre du 30 mai 1996, relative à la codification des textes législatifs et réglementaires. Elle affirme le principe d'une codification à droit constant , qui permet d'éviter que le travail de recodification se perde dans les débats qui accompagnent toute réforme de fond. Ce principe n'interdit pas cependant des adaptations, pour veiller par exemple au respect des engagements internationaux de la France, et notamment du droit communautaire, ou au respect du partage entre domaines de la loi et du règlement, défini à l'article 34 de la Constitution.

2. Les acteurs de la recodification

Pilotés par la direction générale du travail (DGT), les travaux de recodification ont associé de multiples intervenants.

Une mission, rattachée au directeur général du travail, Jean-Denis Combrexelle, et composée de six fonctionnaires du ministère, a été chargée d'effectuer le travail de codification proprement dit (restructuration du plan, réécriture des dispositions législatives), avec le concours des services ministériels concernés.

Cette première équipe a oeuvré sous le contrôle permanent des deux rapporteurs auprès de la commission supérieure de codification (CSC), tous deux issus du Conseil d'Etat, qui ont veillé en particulier au respect des principes généraux de recodification.

Un comité d'experts, composé de cinq personnalités aux parcours professionnels diversifiés 1 ( * ) , a par ailleurs été institué ; destinataire de l'ensemble des travaux, il s'est plus particulièrement prononcé sur les questions juridiques complexes soumises à son examen.

Les travaux de codification ont ensuite été présentés à une commission de partenaires sociaux, dont la composition est identique à celle de la commission nationale de la négociation collective 2 ( * ) . La commission s'est réunie à quatorze reprises.

La CSC, placée auprès du Premier ministre, a enfin examiné et validé l'ensemble des travaux. Elle a pu formuler ses remarques et demander les modifications qu'elle jugeait utiles.

L'ordonnance portant le nouveau code du travail a été examinée par le Conseil d'Etat avant son adoption en Conseil des ministres. Outre une analyse critique de la qualité juridique du texte, le Conseil d'Etat a veillé au respect de la loi d'habilitation.

Dans son rapport d'activité pour 2005, la CSC a jugé « exemplaire » le processus de recodification et a recommandé de maintenir la même organisation pour la rédaction de la partie réglementaire du code. Les représentants des organisations syndicales auditionnés par votre rapporteur ont cependant souvent regretté la brièveté des délais qui leur ont été impartis pour examiner les différentes parties du projet de code et ont parfois déploré que leurs remarques les plus importantes n'aient pas été retenues.

Il appartient désormais au Parlement de parachever le processus en approuvant le projet de loi de ratification de l'ordonnance. La partie réglementaire du nouveau code est en cours de finalisation et devrait être publiée d'ici quelques mois.

II. LE NOUVEAU CODE DU TRAVAIL

Le plan du code du travail a été remanié et sa rédaction a fait l'objet de substantielles modifications.

A. UN NOUVEAU PLAN

Le plan du nouveau code se veut « détaillé et didactique » , pour reprendre les termes de Jean-Denis Combrexelle et Hervé Lanouzière 3 ( * ) , qui soulignent également que « le plan du nouveau code n'avait pas vocation à faire preuve d'originalité » et que « le parti pris de la mission de recodification, de systématiquement privilégier le point de vue de l'utilisateur potentiel, a conduit à des solutions résolument pratiques » 4 ( * ) .

Le nouveau code comprend huit parties, contre neuf livres dans le code actuel, divisées en livres, titres, chapitres, sections et sous-sections. Il comprend un nombre de subdivisions beaucoup plus élevé que le code actuel (1 890 contre 271).

Les rédacteurs du code se sont efforcés de rapprocher des dispositions aujourd'hui dispersées en différents points du code, alors qu'elles entretiennent des liens très forts, par exemple les dispositions relatives aux différentes catégories de salariés protégés ou celles relatives à l'apprentissage et à la formation professionnelle.

Ils ont également veillé à ce que les articles prévoyant des sanctions pénales soient rapprochés des dispositions de fond auxquelles ils se rapportent.

Enfin, alors qu'il existe aujourd'hui un livre consacré aux dispositions applicables outre-mer, le choix a été fait, dans le nouveau code, de faire figurer une division consacrée à l'outre-mer à la fin de chacune des huit parties.

Le plan du nouveau code du travail

Le nouveau code est organisé comme suit :

• La première partie porte sur les relations individuelles de travail . Elle comprend les règles relatives aux différents contrats de travail, depuis la formation du contrat jusqu'à sa rupture ; elle inclut donc les règles relatives au licenciement pour motif personnel et au licenciement pour motif économique. Elle comprend également les dispositions relatives au règlement intérieur et au droit disciplinaire, ainsi que les dispositions relatives à la résolution des litiges et au conseil de prud'hommes.

• La deuxième partie porte sur les relations collectives de travail . Elle accueille d'abord les dispositions relatives aux syndicats, puis celles touchant à la négociation collective et aux conventions et accords collectifs et celles traitant des institutions représentatives du personnel. Un livre regroupe les articles relatifs aux salariés protégés (élus du personnel, délégués syndicaux...). Cette partie se termine par les dispositions relatives aux conflits collectifs.

• La troisième partie regroupe les articles portant sur la durée du travail, le salaire, l'intéressement, la participation et l'épargne salariale . Durée du travail, repos et congés figurent dans le livre premier. Les dispositions particulières applicables aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ont été codifiées. Puis apparaissent les dispositions relatives au salaire et aux avantages divers, dont celles issues de la loi de 1978 sur la mensualisation, qui n'étaient jusqu'ici pas codifiées. Les articles traitant de l'intéressement, de la participation et de l'épargne salariale forment un troisième livre.

• La quatrième partie porte sur la santé et la sécurité au travail . Les dispositions s'y rapportant figurent actuellement dans le titre du code du travail consacré aux conditions de travail, aux côtés des articles relatifs à la durée du travail, au repos et au congé. Le choix de faire figurer ces dispositions dans une partie autonome atteste de l'importance accordée à ces questions ces dernières années. Elle regroupe les dispositions relatives à la prévention des risques professionnels, aux lieux de travail, aux équipements de travail et aux moyens de protection, aux risques d'exposition et au contrôle de la réglementation.

• La cinquième partie est consacrée à l'emploi . Elle rassemble d'abord les articles relatifs aux dispositifs en faveur de l'emploi, puis ceux qui concernent des catégories particulières de travailleurs (travailleurs handicapés et étrangers), ceux consacrés au service public de l'emploi et au placement et enfin ceux applicables aux demandeurs d'emploi.

• La sixième partie porte sur la formation professionnelle tout au long de la vie . Elle réunit les dispositions relatives à l'apprentissage, qui figurent en tête du livre premier de l'actuel code du travail, et celles consacrées à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui composent l'actuel livre IX. Elle contient également les articles relatifs à la validation des acquis de l'expérience.

• La septième partie regroupe les dispositions applicables à certaines professions et activités (qui n'ont pu trouver leur place dans un code spécialisé). Sont concernés les journalistes professionnels, les professions du spectacle, de la publicité et de la mode ; les concierges et employés d'immeubles à usage d'habitation, les employés de maison et les activités de service à la personne ; des professions à caractère commercial se caractérisant par un certain degré d'autonomie (voyageurs, représentants ou placiers, gérants de succursales et conjoints salariés du chef d'entreprise) ; les travailleurs à domicile.

• La huitième partie est consacrée au contrôle de l'application de la législation . Elle contient les articles relatifs à l'inspection du travail et à la lutte contre le travail illégal.

B. UN NOUVEAU TEXTE

Les rédacteurs du nouveau code ne se sont pas contentés de réorganiser les articles existants : un important travail de réécriture a été accompli pour rendre le code plus lisible.

1. Les modifications de forme

Certaines modifications ont une portée surtout formelle.

a) Des articles plus courts

La mission de recodification a procédé à de nombreuses scissions d'articles, afin qu'à chaque article corresponde une idée. Les règles de forme ont été distinguées des règles de fond, les règles de principe des exceptions. De ce fait, le nombre d'articles dans le code a considérablement augmenté : alors qu'il est de 1 891 dans le code actuel, il s'élève à 3 652 dans le nouveau code, soit un quasi-doublement. Le nombre de caractères utilisés a en revanche diminué de 10 %, ce qui démontre qu'un effort a été réalisé pour alléger la rédaction du texte.

La CSC recommande, lorsqu'un code comprend 2 000 articles ou plus dans sa partie législative, de retenir une numérotation à quatre chiffres, qui permet d'introduire davantage de subdivisions et d'aboutir à un plan plus fin. La mission de recodification a suivi cette recommandation et opté pour une numérotation à quatre chiffres.

b) Une terminologie harmonisée

Il n'est pas rare que soient utilisés dans le code du travail des termes différents pour désigner une même réalité juridique : « employeur » et « chef d'entreprise » , « préavis » et « délai-congé » , « recrutement » et « embauchage » , « congédiement » et « licenciement » ... Ces variations sont source de confusion pour le lecteur non averti.

Dans le nouveau code, le vocabulaire a été uniformisé, en retenant à chaque fois les termes les plus aisément compréhensibles par l'utilisateur : « préavis » a ainsi été préféré à « délai-congé » , « licenciement » à « congédiement » , etc.

c) La généralisation de l'indicatif présent

Le code du travail contient diverses formulations exprimant le caractère impératif des normes qu'il édicte : l'employeur « doit », « doit obligatoirement », « est tenu de »... Or, le guide de légistique, élaboré conjointement par le Conseil d'Etat et le Secrétariat général du Gouvernement, souligne que l'indicatif présent suffit, en droit, à signifier le caractère impératif d'une disposition. Pour cette raison, l'emploi de l'indicatif présent a été généralisé à l'ensemble du code.

2. Les modifications plus substantielles

a) Les opérations de déclassement

La recodification a fourni l'occasion de faire mieux appliquer le partage entre les domaines de la loi et du règlement. En vertu de l'article 34 de la Constitution, en effet, la loi a vocation à définir seulement les « principes fondamentaux » du droit du travail, tandis que les dispositions plus précises relèvent du domaine règlementaire. Il n'est pourtant pas rare que des dispositions de nature réglementaire, figurant dans un projet de loi ou insérées par voie d'amendement, soient adoptées par le Parlement puis intégrées dans la partie législative du code.

Au total, environ cinq cents opérations de déclassement de la partie législative vers la partie réglementaire ont été effectuées à l'occasion des travaux de recodification. Elles concernent parfois la totalité d'un article (61 reclassements), plus souvent un alinéa, une phrase, un membre de phrase ou un mot.

Ces reclassements ont notamment eu pour effet de renvoyer dans la partie réglementaire les dispositions portant sur :

- la désignation de l'autorité administrative compétente : désormais, la partie législative fait simplement référence à « l'autorité administrative » , qui est identifiée dans la partie réglementaire (par exemple le préfet) ; par exception, les mentions de l'inspecteur du travail et du directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ont été maintenues dans la partie législative lorsqu'ils agissent dans le cadre de leurs pouvoirs propres d'inspection du travail ;

- la désignation de la juridiction compétente : la partie législative fait référence au « juge judiciaire » et la partie réglementaire précise la juridiction concernée (le tribunal d'instance par exemple) ; la désignation du tribunal a parfois été maintenue en partie législative lorsque son déclassement risquait de rendre peu compréhensible l'article dans lequel elle s'insère ; par ailleurs, la référence au conseil de prud'hommes, juridiction spécifique au droit du travail, a été maintenue en partie législative ;

- les règles de procédure : les formalités de dépôt, les délais, les modalités d'information et de communication sont renvoyées en partie règlementaire, sauf lorsqu'elles constituent une garantie essentielle des droits du salarié ou de l'employeur ;

- les mentions chiffrées : les montants, niveaux et pourcentages régulièrement révisés sont déclassés ; en revanche, sont maintenues en partie législative les dispositions qui constituent des garanties pour les salariés ou s'inscrivent de façon pérenne dans le code (la fixation de la durée du travail à trente-cinq heures par semaine par exemple).

b) La définition de notions juridiques et du champ d'application des articles

Pour clarifier la lecture du code, des articles définissent désormais certaines notions. Tel est notamment le cas du travail temporaire, défini à l'article L. 1251-1 5 ( * ) du nouveau code, ou de la notion de « jeune travailleur » pour la législation relative au travail de nuit (article L. 3161-1).

Toujours dans un souci de clarification, des articles définissant le champ d'application du code ont été placés en tête de chaque livre. Le nouveau code du travail s'ouvre ainsi sur un article L. 1111-1, qui indique que « les dispositions du présent livre sont applicables aux employeurs de droit privé ainsi qu'à leurs salariés » . Cette formulation est incontestablement plus lisible que celle figurant à l'actuel article L. 120-1, qui prévoit que « les dispositions des chapitres premier, II (sections I, II, III, IV, IV-I, V, V-I, V-II), III, IV, V, VI du présent titre sont applicables notamment aux salariés des offices publics et ministériels, des professions libérales, des sociétés civiles, des syndicats professionnels, des associations de quelque nature que ce soit » .

c) Les dispositions ajoutées ou supprimées

La recodification a fourni l'occasion de redéfinir le périmètre du code du travail : dans toute la mesure du possible, les dispositions propres à certains secteurs d'activité ou à certaines professions ont été transférées vers les codes spécialisés, à savoir le code de l'action sociale et des familles, pour les assistants maternels et familiaux, le code minier, le code rural, le code de l'éducation ou le code du sport. De surcroît, certaines dispositions relevant du régime des cotisations sociales ont été intégrées dans le code de la sécurité sociale.

Des dispositions qui n'avaient jamais été intégrées au code du travail ont été codifiées : loi du 19 janvier 1978 relative à la mensualisation, ordonnance du 13 octobre 1945 relative aux spectacles, ordonnance du 27 septembre 1967 relative aux titres restaurants, loi du 4 août 1982 relative aux chèques-transports, dispositions de l'ordonnance du 2 août 2005 relatives au contrat « nouvelles embauches », etc. Les dispositions du droit local relatives aux départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ont également été codifiées, dès lors qu'existent déjà dans le code du travail des dispositions de même nature (en matière de jours fériés, par exemple) applicables dans les autres départements métropolitains.

A contrario , des articles figurant dans l'actuel code du travail ont été supprimés, soit parce que l'on a estimé qu'ils étaient tombés en désuétude (suppression de la référence à l'attitude patriotique pendant l'occupation pour déterminer la représentativité syndicale, suppression de l'article L. 121-2 qui prévoit que le contrat de travail est exempt de timbre et d'enregistrement...), soit parce qu'ils étaient incompatibles avec des dispositions de valeur supra-législative, issues notamment du droit communautaire (abrogation des dispositions interdisant le travail de nuit des femmes, en dehors des cas visant à protéger les femmes enceintes et allaitantes). Des dispositions transitoires devenues sans objet ont également été retirées et de multiples erreurs de référence ou de renvoi corrigées.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Respectueuse de l'habilitation votée par le Parlement, l'ordonnance soumise à ratification devrait, sous réserve de certaines corrections, rendre le code du travail plus accessible à ses utilisateurs.

A. LE CONTRÔLE DU RESPECT DE L'HABILITATION PARLEMENTAIRE

Votre commission considère que les termes de la loi d'habilitation ont été respectés et que les auteurs du nouveau code ont fait une application prudente de l'habilitation qui leur a été donnée.

1. Le respect des délais

L'article d'habilitation figurant dans la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 prévoyait que l'ordonnance devait être prise dans un délai de neuf mois suivant la publication de la loi, soit au plus tard à la fin du mois de septembre 2007, et qu'un projet de loi de ratification devrait être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

Ces deux délais ont été respectés :

- l'ordonnance a été publiée le 13 mars 2007, soit bien avant l'expiration du délai autorisé ;

- le projet de loi de ratification a été déposé sur le bureau du Sénat le 18 avril 2007.

2. Le respect du fond de l'habilitation

La question centrale est celle du respect de l'obligation de procéder à une recodification à droit constant. Aux critiques générales qui sont parfois avancées s'ajoutent les contestations touchant à la codification de certaines dispositions du droit d'Alsace-Moselle.

a) Appréciation générale

Une partie de la doctrine 6 ( * ) , et une organisation syndicale au moins - la CGT - ont exprimé des réserves concernant le respect du principe de recodification à droit constant. La CGT a même déposé un recours devant le Conseil d'Etat, en mai 2007, pour obtenir l'annulation de l'ensemble de l'ordonnance, au motif que le déclassement d'articles législatifs en partie réglementaire, la suppression de dispositions, la réécriture et le nouvel ordonnancement des articles changeraient le sens du texte et pourraient conduire à des interprétations différentes, dans un domaine où le rôle de la jurisprudence est particulièrement important.

Leurs critiques reposent principalement sur l'idée que la réorganisation et l'éclatement des articles, leur reformulation, l'ajout d'intitulés, l'insertion de nouvelles dispositions... modifieraient inéluctablement l'interprétation qui en est donnée par les tribunaux. On peut cependant faire valoir que la loi d'habilitation a clairement indiqué que la recodification devait s'effectuer à droit constant, « imposant ainsi un puissant principe d'interprétation » 7 ( * ) aux magistrats. Il est donc peu probable que des tribunaux prennent appui sur l'oeuvre de recodification pour justifier des évolutions jurisprudentielles. La recodification n'aura pas non plus pour effet de faire disparaître de la mémoire des magistrats le souvenir des jurisprudences anciennes.

Il convient par ailleurs de ne pas avoir une lecture trop restrictive des termes de la loi d'habilitation, qui a expressément autorisé le Gouvernement à modifier le droit en vigueur « pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l'état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions, codifiées ou non, devenues sans objet » .

Sous réserve de la rectification par voie d'amendements d'oublis ou d'erreurs, inévitables pour tout travail de cette ampleur, votre commission estime donc que le principe d'une recodification à droit constant a bien été respecté.

b) Le problème particulier posé par la codification du droit d'Alsace-Moselle

L'institut du droit local d'Alsace-Moselle et l'ensemble des syndicats de ces départements ont déposé un recours devant le Conseil d'Etat le 10 mai 2007 au motif que le nouveau code remettrait en cause certaines dispositions propres à ces territoires, concernant notamment l'interdiction du travail dominical, le maintien du salaire en cas d'absence, la durée du préavis en cas de rupture du contrat et la clause de non-concurrence.

Des spécialistes du droit local examinent actuellement les griefs adressés au nouveau code, en concertation avec les parlementaires des départements concernés. Attentive au respect des particularismes de la législation alsacienne et mosellane, votre commission souhaite que les éventuelles erreurs de codification soient corrigées par voie d'amendement lors du débat en séance publique.

B. UNE RECODIFICATION UTILE

Au-delà du respect de la loi d'habilitation, il convient de s'interroger sur l'intérêt même de l'exercice de recodification auquel s'est livré le ministère du travail.

1. Un temps d'adaptation sera nécessaire

Les apports du nouveau code ne seront perceptibles qu'à l'issue d'une phase d'adaptation des usagers du droit du travail, qui vont devoir s'approprier ce nouvel outil.

Il ne faut en effet pas sous-estimer le bouleversement que va entraîner, pour les acteurs et les utilisateurs habituels du code du travail, l'entrée en vigueur du nouveau texte. Plusieurs mois, voire plusieurs années, seront nécessaires avant qu'ils ne retrouvent leurs repères et s'habituent à ce nouvel instrument.

La recodification présente également l'inconvénient de rendre plus difficilement lisibles les ouvrages, articles juridiques, recueils de jurisprudence publiés jusqu'à présent. L'utilisation de tables de concordance, que le ministère devrait veiller à diffuser largement, sera indispensable et compliquera à l'évidence la tâche du lecteur.

Le ministère et ses directions départementales doivent donc accompagner l'entrée en vigueur du nouveau code d'une importante campagne d'information et d'explication à destination de ses usagers.

2. De notables améliorations

Votre commission considère que le nouveau code répond à l'objectif qui lui a été assigné, à savoir rendre la règle de droit plus accessible pour ses utilisateurs.

Tout d'abord, l'élaboration d'un plan plus détaillé devrait faciliter la recherche de la règle de doit applicable.

Le plan retenu n'est certes pas exempt de critiques et d'autres schémas auraient sans doute été concevables. Le professeur Bernard Teyssié s'étonne par exemple que le code n'ait pas été entièrement organisé autour de la distinction entre relations individuelles et collectives de travail, dans la mesure où toute relation de travail s'inscrit dans l'ordre de l'individuel ou du collectif, à titre exclusif ou à titre principal 8 ( * ) .

Les organisations syndicales se sont pour leur part émues que les dispositions relatives au licenciement pour motif économique figurent désormais dans la partie consacrée aux relations individuelles de travail et non plus dans celle relative à l'emploi. Le choix qui a été opéré sur ce point présente cependant l'avantage de rassembler les règles relatives au droit du licenciement dans une même partie consacrée à la rupture du contrat de travail.

La nouvelle rédaction du code contribue également à le rendre plus lisible. L'introduction d'articles de définition d'une notion juridique ou du champ d'application d'un livre constitue, à cet égard, une innovation particulièrement bienvenue. L'harmonisation du vocabulaire juridique paraît également très positive.

Les syndicats ont déploré le choix de généraliser l'usage de l'indicatif présent. Ils considèrent que les formules impératives (« l'employeur doit » ...) sont plus aisément compréhensibles pour un usager du code du travail dépourvu de formation juridique. Cependant, si un travail de pédagogie est certainement indispensable pour lever tout malentendu sur ce point, votre commission souligne que la rédaction actuelle du code présente le sérieux inconvénient de laisser penser, du fait de la variété des formulations utilisées, qu'il existerait une « gradation » des obligations, ce qui ne correspond pas à la réalité. La nouvelle rédaction permet de lever toute ambiguïté.

Au total, même si le nouveau code n'apporte pas de simplification spectaculaire du droit du travail, qui supposerait des modifications du fond du droit, votre commission porte une appréciation globalement positive sur le travail effectué par ses rédacteurs. Il reste à espérer que les réformes annoncées du marché du travail, qui donnent lieu, en ce moment même, à une intense négociation entre les partenaires sociaux, ne remettront pas en cause les progrès réalisés pour concevoir un code plus lisible et cohérent.

*

* *

Votre commission vous propose d'adopter ce projet de loi de ratification, sous réserve des amendements qu'elle vous présente.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier
Ratification de l'ordonnance

Objet : Cet article a pour objet de ratifier l'ordonnance relative à la partie législative du code du travail.

I - Le dispositif proposé

Cet article propose de ratifier l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative), sous réserve des modifications prévues aux articles 2 à 5 du projet de loi, présentés ci-après. La ratification confèrera à l'ordonnance une valeur législative.

L'ordonnance compte quinze articles ainsi que deux annexes.


• Son article premier indique que les dispositions de l'annexe I constituent la partie législative du nouveau code du travail.


• L'article 2
prévoit que la modification des dispositions figurant dans d'autres codes ou dans d'autres textes législatifs et reproduites à l'identique dans le code du travail entraînera automatiquement la modification des articles correspondant du code du travail.

Pour faciliter l'accès à la règle de droit, il arrive en effet que des dispositions qui figurent déjà dans d'autres codes ou dans des lois non codifiées soient reproduites dans le code du travail, qui fait alors office de « code suiveur ».


• De nombreuses dispositions législatives font référence à des articles dont l'ordonnance prévoit l'abrogation, afin de permettre l'entrée en vigueur du nouveau code du travail. L'article 3 indique que ces références sont remplacées par les références aux dispositions correspondantes du nouveau code du travail.


L'article 4 précise les conditions d'application de certaines dispositions du code du travail. Il a été décidé de ne pas codifier ces précisions, en raison notamment de leur caractère transitoire.

Les paragraphes I à VI indiquent ainsi la date d'entrée en vigueur de diverses dispositions du code du travail. Ces dates figurent dans la version actuelle du code du travail, mais n'ont pas été maintenues dans la rédaction du nouveau code afin de ne pas l'alourdir. Le paragraphe VII précise dans quelles conditions le comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics, visé à l'article L. 6331-43 du nouveau code du travail, succédera à l'actuel comité institué par arrêté en 1949. Le paragraphe VIII précise jusqu'à quelle date peut être valablement conclu un accord de branche portant sur la création d'une contribution complémentaire due par les employeurs de moins de dix salariés au titre des contrats et périodes de professionnalisation et du droit individuel à la formation.


L'article 5 insère dans le code de l'action sociale et des familles les dispositions, qui figurent aujourd'hui dans le code du travail, relatives à certaines professions : assistants maternels et familiaux employés par les personnes de droit privé, éducateurs et aides familiaux, personnels pédagogiques occasionnels des accueils collectifs de mineurs (chapitres III et IV du titre VII du livre VII de l'actuel code du travail).

Comme indiqué dans l'exposé général du présent rapport, les rédacteurs du nouveau code ont en effet choisi de maintenir dans le code du travail les dispositions d'application générale et de transférer vers d'autres codes les dispositions propres à certaines professions ou à certains secteurs d'activité.


L'article 6 procède à une opération analogue : il insère dans le code de l'éducation un nouvel article L. 421-24 relatif aux commissions d'hygiène et de sécurité dans les lycées d'enseignement technique et professionnel (qui reprend les dispositions de l'article L. 231-2-2 du code du travail) et un nouvel article L. 731-18 relatif à la conclusion de contrats de travail intermittent par les établissements d'enseignement supérieur privé (actuel article L. 786 du code du travail).


L'article 7 insère dans le code minier des dispositions qui figurent aujourd'hui dans les chapitre I et II du titre premier du livre VII du code du travail, relatives aux conditions de travail et à la santé et la sécurité au travail des mineurs, ainsi qu'aux délégués mineurs, qui sont des élus du personnel chargés d'inspecter les mines ou carrières pour y contrôler les conditions de sécurité et d'hygiène.


L'article 8 insère dans le code rural diverses dispositions applicables aux salariés agricoles, aujourd'hui dispersées en différents points du code du travail. Elles ont trait aux congés payés, à la santé et à la sécurité au travail, au contrat vendanges, aux syndicats professionnels, aux conflits collectifs et à la lutte contre le travail illégal.


L'article 9 insère des dispositions dans le code de la sécurité sociale, relatives à l'exonération de cotisations sociales prévue en cas d'embauche d'un salarié dans une zone de redynamisation urbaine ou de revitalisation rurale (actuel article L. 322-13 du code du travail), au chèque emploi-service universel (article L. 129-5 du code du travail), au chèque-emploi associatif (article L. 128-1), au guichet unique pour le spectacle vivant (article L. 620-9).


L'article 10 insère deux dispositions dans le code du sport : la première relative aux rémunérations perçues par les enfants de moins de seize ans pour l'exercice d'une activité sportive (actuel article L. 211-4 du code du travail), la seconde relative aux sanctions pénales applicables en cas d'infraction à ces règles de rémunération (article L. 261-1).


L'article 11 modifie l'article L. 326 du code du travail applicable à Mayotte, pour indiquer que l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) assure le service public du placement à Mayotte dans les conditions prévues par le code du travail applicable localement.


L'article 12 abroge les dispositions législatives qui ont vocation à être remplacées par celles du nouveau code, à savoir la partie législative de l'actuel code du travail (paragraphe I) mais aussi de nombreuses dispositions législatives, restées jusqu'ici non codifiées, qui ont trouvé leur place dans le nouveau code du travail (paragraphe II).

Le paragraphe III propose d'abroger l'article R. 250-1 et les deux premiers alinéas R. 250-2 du code du travail relatifs aux services sociaux du travail, qui ont été reclassés dans la partie législative du nouveau code (articles L. 4631-1 et L. 4631-2).

Le paragraphe IV, enfin, règle un problème juridique touchant à la date de prise d'effet de ces mesures d'abrogation.

En effet, l'article 14 de l'ordonnance prévoit que ses dispositions entrent en vigueur en même temps que la partie règlementaire du nouveau code et, au plus tard, le 1 er mars 2008. Dans l'hypothèse où la partie règlementaire du nouveau code ne serait pas publiée à cette date, la partie législative du nouveau code devra donc coexister quelques temps avec la partie règlementaire de l'ancien code. Cette perspective soulève cependant une réelle difficulté dans la mesure où de nombreuses dispositions législatives de l'actuel code du travail ont été déclassées en partie règlementaire : supprimées de la partie législative du nouveau code, elles ne figureraient pas non plus dans la partie règlementaire en vigueur et disparaîtraient donc, un temps, de l'ordre juridique, créant un vide juridique tout à fait préjudiciable.

Pour l'éviter, il est proposé que l'abrogation de toutes les mesures législatives ayant fait l'objet d'un déclassement, dont la liste figure dans l'annexe II de l'ordonnance, prenne effet à compter de la date d'entrée en vigueur de la partie règlementaire du nouveau code.


L'article 13 maintient en vigueur certaines dispositions de l'ancien code du travail, qui n'ont pas été insérées dans le nouveau code.

La plupart de ces dispositions s'appliquent seulement à certaines professions ou à certains secteurs d'activité. Elles n'ont pas été intégrées dans le nouveau code dans la mesure où il ne rassemble, comme cela a été indiqué, que les dispositions de portée générale et ont vocation à être intégrées dans d'autres codes en préparation (codes des transports, de la fonction publique...).

Ainsi, les articles du code du travail visés aux 1°, 2°, 3°, 13° et 22° de l'article s'appliquent aux marins. Les dispositions visées aux 4° à 8° et 12° concernent les salariés des entreprises de transport. Celles visées aux 10°, 11° et 21° sont applicables à l'Etat, aux collectivités locales et à leurs établissements publics. Celles visées au 17° concernent les industries électriques et gazières.

D'autres articles n'ont pas été intégrés dans la partie législative du nouveau code parce que leur portée est aujourd'hui réduite. Il en est ainsi des deux articles du code du travail (mentionnés aux 9° et 14°) relatifs à la contribution « Delalande », qui va disparaître à compter du 1 er janvier 2008 en vertu de l'article 50 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social. N'ont pas non plus été codifiés les trois articles du code relatifs aux fonds salariaux (15°) : institués en 1983, ces fonds ne peuvent plus être créés depuis une ordonnance du 21 octobre 1986. De même, n'a pas été maintenu dans le nouveau code l'alinéa qui exclut du décompte des effectifs de l'entreprise les salariés de moins de vingt-six ans. Issue de l'ordonnance n° 2005-892 du 2 août 2005, cette disposition a d'abord été suspendue par le Conseil d'Etat, qui a interrogé la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) sur sa comptabilité avec le droit communautaire. Le 18 janvier 2007, la CJCE a jugé que le droit communautaire s'opposait à ce qu'une certaine catégorie de travailleurs soit exclue, fût-ce temporairement, du décompte des effectifs. Tirant les conséquences de cette décision, le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance par un arrêt en date du 6 juillet 2007.


L'article 14 prévoit que les dispositions de l'ordonnance entrent en vigueur en même temps que la partie règlementaire du nouveau code et, au plus tard, le 1 er mars 2008.


L'article 15 est l'article d'exécution.

L'annexe I constitue la partie législative du nouveau code du travail. L'annexe II présente, sous la forme d'un tableau, la liste des dispositions législatives déclassées dans la partie règlementaire du nouveau code.

II - La position de votre commission

Votre commission confirme le jugement globalement positif que lui inspire le projet de nouveau code du travail. Elle considère que l'ordonnance lui paraît conforme à l'habilitation votée par le législateur.

Pour ces raisons, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 2
(art. L. 433-1 nouveau du code de l'action sociale et des familles)
Codification des dispositions relatives aux permanents des lieux de vie

Objet : Cet article vise à modifier l'ordonnance afin d'insérer dans le code de l'action sociale et des familles des dispositions relatives aux permanents des lieux de vie.

I - Le dispositif proposé

Cet article a pour objet de codifier des dispositions votées par le Parlement voici seulement quelques mois et qui n'ont pu, pour cette raison, être prises en compte au moment de la rédaction de l'ordonnance.

La loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance a introduit dans l'actuel code du travail un nouvel article L. 774-3, qui définit le régime applicable aux permanents des lieux de vie. Ces professionnels accompagnent au quotidien les personnes accueillies dans les lieux de vie et d'accueil. Ils sont soumis à des règles particulières en matière de durée du travail.

Il est proposé d'insérer ces dispositions dans le code de l'action sociale et des familles, où elles figureraient à la suite de celles applicables aux éducateurs et aides familiaux et aux personnels pédagogiques occasionnels des accueils collectifs de mineurs.

II - La position de votre commission

Cet article vise à actualiser le texte de l'ordonnance en y intégrant des dispositions que votre commission avait approuvées très récemment. Elle souhaite toutefois le compléter pour corriger plusieurs erreurs matérielles relevées dans l'ordonnance.

Elle propose également d'amender l'article 14 de l'ordonnance pour prévoir que celle-ci entre en vigueur le 1 er mars 2008 et non au moment de l'entrée en vigueur de la partie règlementaire. De cette façon, les utilisateurs du code du travail disposeront d'un peu plus de temps pour s'approprier le nouveau code.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 3
Corrections apportées à la partie législative du nouveau code du travail

Objet : Cet article propose de corriger des erreurs de recodification et de compléter sur certains points la partie législative du nouveau code.

I - Le dispositif proposé

Cet article modifie l'annexe I de l'ordonnance, qui constitue la partie législative du nouveau code du travail.

Le 1° vise à corriger une petite erreur rédactionnelle en substituant un singulier à un pluriel.

Les 2°, 3° et 4° ont pour objet de compléter les articles L. 1225-17 et L. 1225-19 du nouveau code en y intégrant une disposition adoptée à l'article 30 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, qui permet à la femme enceinte de réduire la durée du congé de maternité qui commence avant la date présumée de l'accouchement afin d'augmenter d'autant la durée du congé postérieur à la naissance.

Le 5° vise à réparer un oubli : le quatrième alinéa de l'article L. 1225-48 du code du travail ne comporte pas le membre de phrase qui précise que le congé parental ou la période d'activité à temps partiel ne peut excéder un an à compter de l'arrivée au foyer « lorsque l'enfant adopté ou confié en vue de son adoption est âgé de plus de trois ans mais n'a pas encore atteint l'âge de la fin de l'obligation scolaire ».

Le 6° modifie l'article L. 1271-1 du nouveau code pour y intégrer une disposition votée à l'article 61 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, qui permet d'utiliser le chèque emploi-service universel pour rémunérer les personnes organisant un accueil des enfants scolarisés en école maternelle ou élémentaire.

Les 7° et 8° apportent des corrections rédactionnelles.

Le 9° vise à réparer un oubli en insérant dans le nouveau code du travail les dispositions relatives aux périodes de suspension du contrat de travail des salariés en réserve dans la sécurité civile ou participant à des opérations de secours, figurant aujourd'hui aux articles L. 122-24-11 et L. 122-24-12 du code en vigueur, qui ont été omises par erreur.

Des corrections rédactionnelles sont apportées au 10° et au 11°.

Les 12° et 14° suppriment une section et une sous-section qui ne contiennent pas de mesures législatives et apparaissent de ce fait inutiles.

Le 13° précise la rédaction de l'article L. 5134-84 relatif au contrat insertion-revenu minimum d'activité (CI-RMA).

Le 15° vise à insérer dans l'article L. 6331-51 du nouveau code une disposition figurant à l'article 54 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, relative à la date de versement de la contribution due par les travailleurs indépendants et les membres des professions libérales au financement de la formation professionnelle continue.

Le 16° complète l'article L. 6332-12 par un point et le 17° apporte une modification rédactionnelle mineure.

Les 18° et 19° ont pour objet de remplacer, dans le texte du nouveau code, les mots « du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle » par les mots « de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ». En optant pour l'ordre alphabétique, les auteurs du nouveau code ont porté atteinte à un usage qui veut que ces départements soient cités dans cet ordre.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve les corrections proposées par cet article et souhaite à son tour qu'il soit procédé à vingt et une améliorations complémentaires :


• en premier lieu, elle regrette que les dispositions relatives à l'obligation de procéder à une concertation avec les partenaires sociaux avant toute modification du code du travail, qui figurent aujourd'hui, symboliquement, en tête du code du travail, aient été rejetées dans le livre II de la deuxième partie, consacré à la négociation collective. Elle propose donc de les faire figurer dans un chapitre préliminaire placé avant la première partie du code ;


• elle souhaite ensuite améliorer la rédaction des 2°, 3° et 4° de l'article, pour préciser le régime applicable lorsqu'une salariée, qui avait précédemment choisi de reporter une partie de son congé maternité après l'accouchement, se voit contrainte d'arrêter le travail plus tôt que prévu pour des raisons médicales. Il convient également de compléter l'article L. 1225-24 du code du travail pour y inclure une disposition qui a été omise, selon laquelle la salariée avertit l'employeur du motif de son absence et de la date à laquelle elle entend mettre fin à son congé de maternité ;


• d'autres erreurs de codification méritent d'être corrigées : à l'article L. 6313-1, les actions de lutte contre l'illettrisme et l'apprentissage de la langue française ont ainsi disparu de la liste des actions entrant dans le champ de la formation professionnelle continue ; le deuxième alinéa de l'article L. 3141-11 doit être réécrit afin de préciser son objet ; il convient de rectifier les articles L. 7124-1 et L. 7124-12 pour préciser que l'obligation de disposer d'une autorisation préfectorale pour embaucher des enfants pour un tournage ou un spectacle s'applique aussi aux enfants de moins de six ans ; certaines dispositions relatives aux gérants salariés de succursales méritent enfin d'être remaniées afin d'en clarifier la rédaction ;


• de manière plus ponctuelle, la terminologie employée dans certains articles du code devrait être harmonisée avec celle utilisée dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;


• concernant les critères de la représentativité syndicale, votre commission souhaite réintroduire dans le code le critère de « l'attitude patriotique pendant l'occupation ». Si nul ne conteste le caractère désuet de cette formulation dépassée, est-il pour autant justifié que ce critère ait été purement et simplement supprimé au moment où une concertation est en cours avec les partenaires sociaux pour procéder à une réforme de fond de la représentativité syndicale ? Il paraît plus légitime de maintenir cette mention dans le code, pour mémoire, afin qu'elle soit éventuellement actualisée ;


• votre commission vous propose enfin d'insérer dans le nouveau code des dispositions issues de textes votés récemment et qui n'ont pas été prises en compte au cours de la recodification :

- en matière de retraite, celles adoptées dans le cadre de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, relatives à la mise à la retraite d'office et à l'indemnité de mise à la retraite (article L. 122-14-13 du code en vigueur) et à l'exercice d'activités de tutorat (article L. 992-9) ;

- en matière d'intéressement, une modification résultant de l'article 14 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, relative au dépôt des accords, qui n'a pas été correctement retranscrite dans le nouveau code ;

- à l'article L. 5424-16, la suppression de la référence aux contrôleurs assermentés des caisses de congés payés, la prestation de serment de ces agents ayant été supprimée par la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit ;

- à l'article L. 6112-2, une disposition de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, relative à l'accès à la formation professionnelle des femmes souhaitant reprendre une activité professionnelle interrompue pour des motifs familiaux ;

- à l'article L. 6325-21, pour indiquer que l'exonération de cotisation à laquelle a droit l'employeur qui embauche un salarié en contrat de professionnalisation est cumulable avec l'exonération des charges sociales sur les heures supplémentaires résultant de l'article premier de la même loi.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 4
Correction d'une erreur à l'annexe II de l'ordonnance

Objet : Cet article vise à corriger une erreur figurant dans l'annexe II de l'ordonnance.

I - Le dispositif proposé

L'annexe II est constituée d'un tableau qui recense les dispositions législatives déclassées dans la partie règlementaire du nouveau code du travail.

Une erreur s'étant glissée dans ce tableau, il est proposé de la corriger en supprimant la ligne : « L. 443-3-1/ premier à septième alinéas ».

II - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5
Application de l'ordonnance dans certains territoires ultramarins

Objet : Cet article précise les conditions d'application de l'ordonnance à Mayotte, en Terres australes et antarctiques françaises et aux îles Wallis-et-Futuna.

I - Le dispositif proposé

L'ordonnance supprime quelques dispositions applicables à Mayotte, en Terres australes et antarctiques françaises et aux îles Wallis-et-Futuna et les remplace par de nouvelles dispositions particulières.

Il est proposé de compléter l'ordonnance par un article 14-1 afin de préciser que l'ordonnance est applicable dans ces collectivités dans la mesure seulement où elle abroge des dispositions qui leur sont applicables. Seul un petit nombre de dispositions du code du travail en vigueur en métropole ont vocation à régir ces territoires.

II - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 19 septembre 2007 , sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Catherine Procaccia sur le projet de loi n° 293 (2006-2007) ratifiant l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail .

Mme Catherine Procaccia, rapporteur , a d'abord indiqué que le projet de loi vise à ratifier une ordonnance du 12 mars 2007, qui a pour objet de promulguer la partie législative du nouveau code du travail. Cette ratification permettra de parachever un processus engagé voici près de trois ans : le Gouvernement a été habilité en 2004, puis en 2006, à procéder à une réécriture, à droit constant, du code du travail car ce code, qui date de 1973 dans sa version actuelle, est devenu, au fil des ans, de moins en moins lisible.

La recodification a été effectuée par une équipe de six personnes, rattachée à la direction générale du travail, oeuvrant sous le contrôle de la commission supérieure de codification. Un comité d'experts a été associé aux travaux, de même qu'une commission des partenaires sociaux, rassemblant représentants des organisations syndicales et patronales.

Quelles sont les principales modifications que la partie législative du nouveau code, publiée en annexe de l'ordonnance, introduit par rapport au code en vigueur ?

D'abord, de nombreux articles du code ont été scindés, afin qu'à chaque article corresponde une idée. En conséquence, les articles du code seront plus courts, et donc plus lisibles, mais aussi plus nombreux : on compte 3 652 articles dans la partie législative du nouveau code, contre 1 891 dans le code en vigueur. Leur numérotation passe de ce fait de trois à quatre chiffres.

Ensuite, la terminologie a été harmonisée : aujourd'hui, il n'est pas rare que des termes différents soient utilisés pour désigner une même réalité juridique, ce qui est source de confusion. C'est pourquoi la rédaction du code a été uniformisée, en retenant à chaque fois l'expression la plus compréhensible.

L'indicatif présent a par ailleurs été généralisé. En effet, le code du travail utilise diverses formulations pour signifier le caractère impératif des normes qu'il édicte, alors que l'emploi de l'indicatif suffit, en droit, à exprimer une obligation.

A ce sujet, Mme Catherine Procaccia, rapporteur , a évoqué les réserves exprimées par les syndicats : ils craignent que, pour le lecteur non averti, l'emploi de l'indicatif soit plus ambigu que les anciennes formules impératives. Pour sa part, elle considère que le code du travail présente, dans sa forme actuelle, l'inconvénient de laisser penser, à tort, qu'il existerait une gradation des niveaux d'obligation. Il est donc souhaitable que le travail d'explication et d'information qui accompagnera l'entrée en vigueur du nouveau code offre l'occasion de lever les incertitudes qu'il pourrait susciter.

Elle a ensuite indiqué que de nouveaux articles ont été introduits pour définir certaines notions juridiques, par exemple la notion de travail temporaire, ou le champ d'application de telle ou telle partie du code.

Le texte procède aussi au déclassement de dispositions législatives vers la partie règlementaire du nouveau code. Bien que l'article 34 de la Constitution prévoie que la loi se contente de déterminer les « principes fondamentaux » du droit du travail, il n'est pas rare, en pratique, que le Parlement adopte des dispositions très détaillées de portée réglementaire. Les déclassements permettent ainsi de mieux faire respecter le partage entre domaines de la loi et du règlement.

Enfin, des dispositions ont été ajoutées dans le code, tandis que d'autres ont été supprimées. Les ajouts résultent de la codification de textes qui, comme la loi de 1978 sur la mensualisation par exemple, n'avaient pas été intégrés, jusqu'à présent, dans le code du travail. Les suppressions concernent des dispositions tombées en désuétude ou contraires à des règles de droit communautaire ou de droit international ; elles résultent aussi du transfert vers d'autres codes de dispositions propres à une profession ou à un secteur d'activité, le code du travail n'ayant vocation à rassembler que les règles de portée générale.

Puis Mme Catherine Procaccia, rapporteur , a présenté le plan du nouveau code, qui sera divisé en huit parties, et non plus en neuf livres. L'augmentation du nombre de subdivisions permettra d'articuler un plan plus fin et les articles ont été réordonnés, afin de former des ensembles plus cohérents. Les dispositions relatives à l'outre-mer, aujourd'hui regroupées dans un livre autonome, seront désormais réparties dans chacune des huit parties du code, soit respectivement :

- relations individuelles de travail (contrats de travail, droit du licenciement, règlement intérieur, droit disciplinaire et conseils de prud'hommes) ;

- relations collectives de travail (dispositions relatives aux syndicats, à la négociation collective, aux accords collectifs, aux institutions représentatives du personnel et aux conflits collectifs) ;

- durée du travail, salaire, intéressement, participation et épargne salariale ;

- santé et sécurité au travail ;

- emploi ;

- formation professionnelle tout au long de la vie ;

- dispositions applicables à certaines professions et activités, notamment les journalistes, les professions du spectacle, les employés de maison ou les travailleurs à domicile ;

- contrôle de l'application de la législation (inspection du travail et lutte contre le travail illégal).

Mme Catherine Procaccia, rapporteur , a porté une appréciation globalement positive sur le nouveau code du travail. L'obligation de procéder à une recodification à droit constant est à son sens correctement respectée et les rédacteurs du nouveau code n'ont pas dépassé les limites de l'habilitation qui leur a été donnée.

Il est vrai qu'une partie de la doctrine, et certains syndicats, redoutent que la recodification ne favorise des évolutions jurisprudentielles inattendues, dans la mesure où l'ordonnancement des articles, leur rédaction, les intitulés des parties dans lesquelles ils s'insèrent, ont été modifiés, mais ce risque est selon elle limité, dans la mesure où le principe de recodification à droit constant devrait guider l'interprétation du nouveau code par les tribunaux et les dissuader de réviser leur jurisprudence à l'occasion de son entrée en vigueur.

Elle a considéré que le nouveau code est plus lisible, mieux organisé, et donc d'un usage plus facile que l'ancien, notamment pour les non-juristes, qu'il s'agisse de salariés, de chefs d'entreprise, d'élus du personnel ou de syndicalistes. Certes, un temps d'adaptation sera nécessaire aux utilisateurs habituels du code du travail pour s'approprier ce nouvel outil, qui va leur faire perdre une partie de leurs repères et qui leur imposera d'utiliser, pendant plusieurs années, des tables de concordance.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur , a ensuite présenté le projet de loi de ratification. L'article premier propose de ratifier l'ordonnance relative à la partie législative du nouveau code du travail, dont l'entrée en vigueur doit intervenir au moment où sera publiée la partie réglementaire du code et ce, au plus tard le 1 er mars 2008. Les articles 2 à 5 proposent de codifier des dispositions législatives votées très peu de temps avant la publication de l'ordonnance et qui n'avaient pu, de ce fait, être prises en compte. Ils corrigent des erreurs rédactionnelles, réparent quelques oublis et précisent l'application de l'ordonnance dans certains territoires ultramarins. Ceci étant, quelques amendements seront présentés pour améliorer ou corriger certaines dispositions du nouveau code.

En conclusion, ce projet de loi, sous des apparences très techniques, aura en réalité un impact important sur la vie quotidienne des nombreux utilisateurs du code du travail. Il appartiendra aussi au législateur de maintenir, sur la durée, la cohérence et la simplicité du nouveau code.

M. Guy Fischer a déclaré ne pas partager le jugement du rapporteur sur le nouveau code du travail. Le groupe CRC votera contre le texte, car cet exercice de réécriture participe au démantèlement du code du travail, dont certains syndicats redoutent la mort programmée. Il a soupçonné le rapporteur d'avoir recueilli les amendements du Gouvernement, voire du Medef, vu la remarquable convergence entre les positions de ladite organisation patronale et le programme de réforme annoncé par le Président de la République en matière sociale.

La méthode retenue pour la recodification est contestable, car le recours à une ordonnance prive le Parlement d'un véritable débat et il n'y a pas eu de véritable négociation avec les partenaires sociaux. Enfin, sur le fond, la recodification n'a pas été effectuée à droit constant selon lui, en raison notamment des nombreuses opérations de déclassement, et elle est porteuse de sérieuses atteintes aux acquis sociaux.

M. Jean-Pierre Godefroy a critiqué le recours à la technique des ordonnances et s'est interrogé sur les raisons qui conduisent le Gouvernement à procéder si rapidement à la ratification de l'ordonnance relative au nouveau code du travail.

Il a contesté le bien-fondé des déclassements, qui ont pour effet de faire disparaître de la partie législative du code des mesures dûment voulues par le Parlement pour préciser des textes de loi et cadrer l'intervention réglementaire éventuelle. Soulignant l'importance de la jurisprudence dans le domaine du droit du travail, il a affirmé que le nouveau code risquait d'entraîner des bouleversements en la matière. Il a enfin invité les sénateurs à la vigilance, dans la perspective des nombreuses réformes annoncées par le Président de la République.

M. Nicolas About, président , s'est étonné qu'un texte plus lisible puisse être considéré comme une menace pour les salariés et a déclaré douter que la jurisprudence évolue au seul motif de l'entrée en vigueur du nouveau code.

Rappelant que l'année 2007 marque le quarantième anniversaire de la participation, Mme Isabelle Debré s'est réjouie de ce que les dispositions y afférentes soient présentées de manière plus claire dans le nouveau code.

M. Jean-Pierre Michel a fait valoir la confiance que lui inspirent a priori les codificateurs, qui sont des techniciens du droit, pour garantir le respect du principe de recodification à droit constant, même s'il convient d'être prudent en la matière. La procédure des déclassements ne lui semble pas choquante, car ils sont conformes à la Constitution qui, dans sa rédaction actuelle, restreint le champ d'intervention de la loi. Cependant, les dispositions déclassées pourront, à l'avenir, être modifiées par décret, ce qui impose d'être vigilant sur les changements qui pourront être apportés.

Il a souhaité que les amendements présentés par le rapporteur soient des amendements de forme et non des modifications de fond, ce qui serait contraire à l'esprit du travail accompli. Il a enfin demandé que l'on interroge le Gouvernement sur ses intentions concernant les mesures d'accompagnement de l'entrée en vigueur du nouveau code, pour faciliter son appropriation par les directeurs des ressources humaines, les syndicalistes, les juges prud'homaux, etc.

M. Nicolas About, président , a souhaité que l'on s'en tienne au principe selon lequel, en droit, l'indicatif suffit à exprimer une obligation. Ce principe est d'ailleurs respecté dans l'ensemble des autres codes.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur , a remercié Jean-Pierre Michel d'avoir rappelé l'importance du travail technique qui a été réalisé et a confirmé que les amendements qu'elle présente ne visent pas à modifier le droit en vigueur. Elle a souhaité que l'entrée en vigueur du nouveau code donne lieu à une campagne d'information et d'explication. Elle a rappelé que les partenaires sociaux ont participé à une quinzaine de réunions au cours desquelles ils ont pu examiner les différentes parties du code du travail.

Répondant à Guy Fischer, elle a souligné que la CGT est la seule organisation syndicale à se plaindre de ne pas avoir été suffisamment associée aux travaux et a estimé que le nouveau code serait plus facile d'usage pour les non-spécialistes. Sur la question des déclassements, elle a approuvé les propos de Jean-Pierre Michel, qui confirment l'analyse qu'elle a elle-même développée.

Elle a indiqué à Jean-Pierre Godefroy que la ratification donnera à l'ordonnance une valeur législative, ce qui est un facteur de sécurité juridique. Elle a souhaité que l'ordonnance entre en vigueur le 1 er mars 2008, et non avant cette date comme le permet le texte actuel, afin que les utilisateurs du code disposent d'un peu plus de temps pour l'étudier. Elle a déclaré ne pas craindre d'évolutions jurisprudentielles, dans la mesure où le code procède à une simple réorganisation des dispositions législatives existantes.

Soulignant que le droit du travail est un droit vivant, elle a précisé que les projets de loi touchant au code du travail dans les prochains mois comporteront des dispositions modifiant l'ancien et le nouveau code.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.

Elle a adopté sans modification l'article premier (ratification de l'ordonnance).

A l'article 2 (codification des dispositions relatives aux permanents des lieux de vie), elle a adopté trois amendements : les deux premiers visent à corriger des erreurs matérielles, le troisième tend à prévoir que l'ordonnance entrera en vigueur le 1 er mars 2008.

A l'article 3 (corrections apportées à la partie législative du nouveau code du travail), elle a adopté vingt et un amendements :

- le premier tend à faire figurer en tête du code du travail les dispositions relatives à la concertation avec les partenaires sociaux préalable à toute réforme du droit du travail ;

- les trois suivants visent à réécrire les 2°, 3° et 4° de l'article, afin de préciser les règles applicables lorsqu'une salariée qui a décidé de reporter une partie de son congé de maternité après la date présumée de l'accouchement se voit prescrire un arrêt de travail ;

- le cinquième complète le premier alinéa de l'article L. 1225-24 du nouveau code pour y faire figurer une disposition omise au cours de la recodification, selon laquelle la salariée doit avertir l'employeur, en cas de congé de maternité, du motif de son absence et de la date à laquelle elle entend y mettre fin ;

- les sixième, septième et huitième amendements tendent à insérer dans le nouveau code des dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, relatives respectivement à la mise à la retraite d'office, à l'indemnité de mise à la retraite et à l'exercice d'activités de tutorat ;

- le neuvième vise à insérer une disposition, issue de la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, relative au dépôt des accords d'intéressement ;

- le dixième a pour objet de supprimer la référence, figurant à l'article L. 5424-16, aux contrôleurs assermentés des caisses de congés payés, la prestation de serment ayant disparu depuis l'entrée en vigueur de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit ;

- les deux suivants tendent à insérer dans le nouveau code des dispositions issues de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, relatives respectivement à l'accès à la formation professionnelle des femmes souhaitant reprendre une activité professionnelle interrompue pour des motifs familiaux et au cumul des exonérations de cotisations sociales consenties au titre de l'embauche d'un salarié en contrat de professionnalisation et au titre des heures supplémentaires ;

- le treizième vise à insérer à l'article L. 6313-1 une disposition, omise au cours des travaux de recodification, relative à la lutte contre l'illettrisme, qui fait partie des actions entrant dans le champ de la formation professionnelle continue ;

- le quatorzième tend à corriger une erreur de codification à l'article L. 3141-11, concernant la date du début de la période de référence retenue pour le calcul des congés payés ;

- le quinzième vise à préciser, aux articles L. 7124-1 et L. 7124-12 du nouveau code, qu'une autorisation préfectorale est requise pour l'embauche d'un enfant de moins de six ans pour participer à un tournage cinématographique ou à un spectacle ;

- les seizième et dix-septième amendements ont pour objet d'harmoniser la terminologie utilisée dans le code du travail avec celle employée dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

- le dix-huitième tend à rétablir, parmi les critères de représentativité syndicale mentionnés à l'article L. 2121-1, l'attitude patriotique pendant l'occupation ;

- les trois derniers amendements visent à améliorer la rédaction de dispositions relatives aux gérants de succursales figurant au titre II du livre III du septième livre.

La commission a adopté sans modification les articles 4 (correction d'une erreur à l'annexe II de l'ordonnance) et 5 (application de l'ordonnance dans certains territoires ultramarins).

Enfin, elle a adopté le texte du projet de loi ainsi modifié .

* 1 Le comité d'experts était composé de : Jacques Barthélémy, avocat en droit social ; Jean-Philippe Bouret, magistrat à la chambre sociale de la Cour de cassation ; Christophe Radé, professeur à l'université de Montesquieu-Bordeaux V ; Laurent Vilboeuf, directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Charente ; Philippe Waquet, conseiller honoraire à la Cour de cassation.

* 2 Composition de la commission (membres titulaires et suppléants) : CFDT : Vanessa Cailly et Michel Mersenne ; CFTC : Gabrielle Simon et Marie Hautefort ; CFE-CGC : Alain Lecanu et Marie-Christine Albaret ; CGT : Philippe Masson et Isabelle Depuydt ; CGT-FO : Véronique Lopez-Rivoire et Ghislaine Ferreira ; CGPME : Jean-François Veysset et Georges Tissié ; FNSEA : Claude Cochonneau et Muriel Caillat ; Medef : Chantal Foulon et Dominique Cazal ; UNAPL : Georges Dercourt et Valérie Ramage ; UPA : Pierre Burban et Marjorie Lechelle.

* 3 Jean-Denis Combrexelle, directeur général du travail et Hervé Lanouzière, en charge de la mission de recodification au sein de la DGT, « Les enjeux de la recodification du code du travail », Droit social n° 5, mai 2007, p. 518.

* 4 Op. cit.

* 5 « Le recours au travail temporaire a pour objet la mise à disposition temporaire d'un salarié par une entreprise de travail temporaire au bénéfice d'un client utilisateur pour l'exécution d'une mission. »

* 6 Cf. Hervé Moysan, « Le droit constant n'existe pas : l'exemple du nouveau code du travail », La semaine juridique-édition sociale, n° 15, 11 avril 2007 ; Bernard Teyssié, « Un nouveau code du travail : quel résultat ? », La semaine juridique-édition sociale, n° 12, 20 mars 2007.

* 7 Cette expression est empruntée à Christophe Radé, « Le nouveau code du travail et la doctrine : l'art et la manière », Droit social, n° 5, mai 2007, p. 515.

* 8 Op. cit.

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