Rapport n° 175 (2007-2008) de M. Patrice GÉLARD , fait au nom de la commission des lois, déposé le 23 janvier 2008

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N° 175

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 janvier 2008

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi constitutionnelle, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, modifiant le titre XV de la Constitution ,

Par M. Patrice GÉLARD,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest, président ; MM. Patrice Gélard, Bernard Saugey, Jean-Claude Peyronnet, François Zocchetto, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Georges Othily, vice-présidents ; MM. Christian Cointat, Pierre Jarlier, Jacques Mahéas, Simon Sutour, secrétaires ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Michèle André, M. Philippe Arnaud, Mme Eliane Assassi, MM. Robert Badinter, José Balarello, Laurent Béteille, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. François-Noël Buffet, Marcel-Pierre Cléach, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Yves Détraigne, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Gaston Flosse, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Jacques Gautier, Mme Jacqueline Gourault, M. Jean-René Lecerf, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. François Pillet, Hugues Portelli, Marcel Rainaud, Henri de Richemont, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, MM. Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (13 ème législature ) : 561 rectifié, 568 , 563 et T.A. 80

Sénat : 170 (2007-2008)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Après avoir entendu M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat chargé des affaires européennes, le 17 janvier 2008 et Mme Rachida Dati, garde des Sceaux, ministre de la justice, le 22 janvier 2008, la commission, réunie le mercredi 23 janvier 2008 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président, a examiné en première lecture, sur le rapport de M. Patrice Gélard, le projet de loi constitutionnelle n° 170 (2007-2008) modifiant le titre XV de la Constitution , adopté sans modification par l'Assemblée nationale le 16 janvier 2008.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a rappelé que, sur saisine du Président de la République, le Conseil constitutionnel avait considéré, le 20 décembre 2007, que la ratification de ce traité appelait une révision préalable de la Constitution dans la mesure où :

- certaines de ses clauses affectaient les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale en transférant à l'Union européenne des compétences nouvelles ou en lui permettant d'exercer certaines de ses compétences selon des modalités nouvelles ;

- la mise en oeuvre des nouvelles prérogatives reconnues par le traité au Parlement de s'opposer à la mise en oeuvre de la procédure de révision simplifiée et à chacune des deux assemblées de veiller à ce que les actes législatifs européens respectent le principe de subsidiarité, a priori par un avis motivé adressé aux institutions européennes et a posteriori par un recours formé devant la Cour de justice de l'Union européenne, ne pouvaient être mises en oeuvre dans le cadre des dispositions actuelles de la Constitution.

Il a estimé que le projet de loi constitutionnelle était parfaitement conforme aux exigences posées par le Conseil constitutionnel. Tout en partageant le souci de ratifier rapidement le traité de Lisbonne et de ne pas troubler le processus de ratification par la réouverture de débats annexes, il a regretté que cette révision a minima ne soit pas l'occasion de corriger quelques imperfections rédactionnelles, notamment à l'article 88-3 de la Constitution.

Concernant les nouvelles prérogatives reconnues au Parlement, il a souligné qu'une réforme du règlement du Sénat serait nécessaire et a déclaré que le Parlement pourrait désormais se considérer comme associé à la construction européenne.

M. Patrice Gélard, rapporteur, a préconisé l'adoption sans modification du projet de loi constitutionnelle, tout en appelant de ses voeux une réflexion plus globale sur la place des questions européennes dans notre Constitution à l'occasion de la future réforme des institutions annoncée par le président de la République. Il a notamment souhaité que l'article 88-5 de la Constitution, introduit par la loi du 1 er mars 2005 et qui oblige à soumettre à référendum les traités d'adhésion futurs, ne soit pas maintenu en l'état.

La commission propose d'adopter le projet de loi constitutionnelle sans modification.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est appelé à examiner, en première lecture, le projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution, adopté sans modification par l'Assemblée nationale, en séance publique, le 16 janvier 2008.

La révision de notre Constitution est un préalable indispensable à la ratification du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé par les chefs d'Etat et de Gouvernement des vingt-sept Etats membres le 13 décembre 2007. Dans sa décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007, le Conseil constitutionnel a en effet estimé que ce traité comportait des stipulations qui ne permettaient pas à la France de le ratifier dans l'état actuel de la Constitution du 4 octobre 1958.

Sans doute ce nouveau traité présente-t-il de nombreuses dispositions similaires, voire identiques, à celles du traité établissant une Constitution pour l'Europe, rejeté par nos concitoyens par référendum le 29 mai 2005. Pour autant, le traité établissant une Constitution pour l'Europe et le traité de Lisbonne présentent une différence de nature : si le premier traduisait une démarche de nature constitutionnelle, avec le remplacement des traités européens existants et l'octroi à l'Union européenne des attributs de la souveraineté que sont le drapeau et l'hymne, le second apparaît inscrit dans une démarche classique du droit international public : il modifie les engagements conventionnels préexistants de la France pour leur donner plus d'efficacité mais aussi pour en renforcer la légitimité démocratique.

Prenant en compte cette nature différente, le Conseil constitutionnel a estimé que la révision constitutionnelle opérée par la loi n° 2005-204 du 1 er mars 2005 modifiant le titre XV de la Constitution ne permettait pas d'assurer l'application dans l'ordre constitutionnel français de l'ensemble des stipulations approuvées par les chefs d'Etat et de Gouvernement à Lisbonne.

Tirant également les conséquences de cette différence de nature, le président de la République a, comme l'y autorise l'article 89 de la Constitution, choisi de soumettre la révision constitutionnelle à la procédure parlementaire. En conséquence, le présent projet de loi constitutionnelle devra, après avoir été adopté en termes identiques par l'Assemblée nationale et le Sénat, être soumis au vote du Congrès pour y être adopté à la majorité des trois cinquième des suffrages exprimés.

Une fois la révision intervenue, la ratification du traité deviendra possible. Elle devra être autorisée par le Parlement, en application de l'article 53 de la Constitution, sur la base d'un projet de loi qui devrait lui être soumis dans les jours suivant l'entrée en vigueur de la présente loi constitutionnelle.

I. LA RATIFICATION ET LA MISE EN oeUVRE DU TRAITÉ DE LISBONNE NÉCESSITENT UNE RÉVISION PRÉALABLE DE LA CONSTITUTION

Saisi par le président de la République en application de l'article 54 de la Constitution 1 ( * ) , le Conseil constitutionnel a constaté, dans sa décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007, que le traité de Lisbonne contenait des stipulations nécessitant, préalablement à sa ratification, une révision de la Constitution.

A. UN TRAITÉ DONT CERTAINES STIPULATIONS SONT DE NATURE À PORTER ATTEINTE AUX CONDITIONS ESSENTIELLES D'EXERCICE DE LA SOUVERAINETÉ NATIONALE ET OCTROYANT DE NOUVELLES PRÉROGATIVES AUX PARLEMENTS NATIONAUX

Conformément à sa mission constitutionnelle, le Conseil constitutionnel a examiné si les engagements souscrits par le pouvoir exécutif dans le cadre du traité de Lisbonne comportaient des clauses contraires à la Constitution, remettaient en cause les droits et libertés constitutionnellement garantis ou portaient atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale.

Il a conclu que certaines stipulations du traité, pour la plupart similaires à celles figurant dans le traité établissant une Constitution pour l'Europe 2 ( * ) , portaient atteinte aux conditions essentielles de la souveraineté nationale ou comportaient des prérogatives nouvelles pour le Parlement qui ne pouvaient être exercées dans le cadre constitutionnel actuel.

1. Des stipulations de nature à porter atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale

Le Conseil constitutionnel a jugé que les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale étaient mises en cause par trois catégories de stipulations du traité de Lisbonne.

(1) Des transferts de compétences dans des matières nouvelles

En premier lieu, le Conseil constitutionnel a estimé que mettaient en cause les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale les stipulations du traité ayant pour objet de transférer à l'Union européenne, en les faisant relever de la « procédure législative ordinaire », des compétences inhérentes à l'exercice de cette souveraineté .

La procédure législative ordinaire prévue par le traité de Lisbonne (article 294 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne)

La procédure législative ordinaire suivie dans le cadre de l'Union européenne s'engage par la présentation par la Commission européenne d'une proposition d'acte législatif au Parlement européen et au Conseil.

Première lecture

Le Parlement européen arrête sa position en première lecture et la transmet au Conseil.

Si le Conseil approuve la position du Parlement européen, l'acte concerné est adopté dans la formulation qui correspond à la position du Parlement européen.

Si le Conseil n'approuve pas la position du Parlement européen, il adopte sa position en première lecture et la transmet au Parlement européen.

Le Conseil informe pleinement le Parlement européen des raisons qui l'ont conduit à adopter sa position en première lecture. La Commission informe pleinement le Parlement européen de sa position.

Deuxième lecture

Si, dans un délai de trois mois après cette transmission, le Parlement européen :

- approuve la position du Conseil en première lecture ou ne s'est pas prononcé, l'acte concerné est réputé adopté dans la formulation qui correspond à la position du Conseil ;

- rejette, à la majorité des membres qui le composent, la position du Conseil en première lecture, l'acte proposé est réputé non adopté ;

- propose, à la majorité des membres qui le composent, des amendements à la position du Conseil en première lecture, le texte ainsi amendé est transmis au Conseil et à la Commission, qui émet un avis sur ces amendements.

Si, dans un délai de trois mois après réception des amendements du Parlement européen, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée :

- approuve tous ces amendements, l'acte concerné est réputé adopté ;

- n'approuve pas tous les amendements, le président du Conseil, en accord avec le président du Parlement européen, convoque le comité de conciliation dans un délai de six semaines.

Le Conseil statue à l'unanimité sur les amendements ayant fait l'objet d'un avis négatif de la Commission.

Conciliation

Le comité de conciliation, qui réunit les membres du Conseil ou leurs représentants et autant de membres représentant le Parlement européen, a pour mission d'aboutir à un accord sur un projet commun à la majorité qualifiée des membres du Conseil ou de leurs représentants et à la majorité des membres représentant le Parlement européen dans un délai de six semaines à partir de sa convocation, sur la base des positions du Parlement européen et du Conseil en deuxième lecture.

La Commission participe aux travaux du comité de conciliation et prend toute initiative nécessaire en vue de promouvoir un rapprochement des positions du Parlement européen et du Conseil.

Si, dans un délai de six semaines après sa convocation, le comité de conciliation n'approuve pas de projet commun, l'acte proposé est réputé non adopté.

Troisième lecture

Si, dans ce délai, le comité de conciliation approuve un projet commun, le Parlement européen et le Conseil disposent chacun d'un délai de six semaines à compter de cette approbation pour adopter l'acte concerné conformément à ce projet, le Parlement européen statuant à la majorité des suffrages exprimés et le Conseil à la majorité qualifiée. À défaut, l'acte proposé est réputé non adopté.

Les délais de trois mois et de six semaines visés au présent article sont prolongés respectivement d'un mois et de deux semaines au maximum à l'initiative du Parlement européen ou du Conseil.

Le Conseil constitutionnel a en conséquence jugé que ne pouvaient être mises en oeuvre dans les conditions actuelles de la Constitution les dispositions :

- de l'article 75 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, prévoyant, en ce qui concerne la prévention du terrorisme et des activités connexes, que le Parlement européen et le Conseil peuvent définir un cadre de mesures administratives concernant les mouvements de capitaux et les paiements, telles que le gel des fonds, des avoirs financiers ou des bénéfices économiques qui appartiennent à des personnes physiques ou morales, à des groupes ou à des entités non étatiques, sont en leur possession ou sont détenus par eux ;

- de l'article 77 du même traité, permettant, dans le cadre du contrôle des frontières extérieures , l'adoption par le Parlement européen et le Conseil de mesures relatives à la délivrance de visas, aux contrôles des personnes franchissant les frontières extérieures, à l'établissement d'un système intégré de gestion des frontières extérieures, à la libre circulation des personnes lorsqu'elles ont franchi les frontières intérieures de l'Union ;

- du d) du paragraphe 2 de son article 79, autorisant le Parlement européen et le Conseil à prendre des mesures pour lutter contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants ;

- de son article 81, permettant au Parlement européen et au Conseil 3 ( * ) d'adopter des mesures visant à assurer notamment la reconnaissance mutuelle entre les États membres des décisions judiciaires et extrajudiciaires, et leur exécution, la signification et la notification transfrontières des actes judiciaires et extrajudiciaires, la compatibilité des règles applicables dans les États membres en matière de conflit de lois et de compétence, la coopération en matière d'obtention des preuves, l'élimination des obstacles au bon déroulement des procédures civiles, au besoin en favorisant la compatibilité des règles de procédure civile applicables dans les États membres, le développement de méthodes alternatives de résolution des litiges, un soutien à la formation des magistrats et des personnels de justice ;

- de ses articles 82 et 83, dans le domaine de la coopération judiciaire en matière pénale , pour celles des compétences mentionnées auxdits articles qui n'entrent dans les prévisions ni des stipulations du traité sur l'Union européenne 4 ( * ) et du traité instituant la Communauté européenne 5 ( * ) qui confèrent déjà des compétences aux institutions de l'Union européenne en cette matière.

Il a également relevé que portaient atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale les dispositions de l'article 86 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, prévoyant que le Conseil peut, à l'unanimité, instituer un Parquet européen , habilité à poursuivre les auteurs d'infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union et à exercer devant les juridictions françaises l'action publique relative à ces infractions, et organisant les modalités selon lesquelles, à défaut d'unanimité, une telle création peut avoir lieu.

(2) La modification des conditions d'exercice de compétences déjà transférées à l'Union européenne par les précédents traités

Le Conseil constitutionnel a également jugé que la modification, par le traité de Lisbonne, des conditions d'exercice de compétences déjà transférées à l'Union européenne par les précédents traités ne permettait pas à la France de ratifier le traité sans révision de la Constitution .

Il a établi une distinction entre les modifications de ces conditions d'exercice destinées à prendre effet dès l'entrée en vigueur du traité et celles nécessitant pour ce faire l'adoption d'actes spécifiques par les institutions de l'Union européenne.

? S'agissant des modifications devant prendre effet dès l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne , le Conseil constitutionnel a estimé que la Constitution n'autorisait pas , dans une matière inhérente à l'exercice de la souveraineté nationale mais relevant déjà des compétences de l'Union ou de la Communauté :

- la substitution de la règle de la majorité qualifiée à celle de l'unanimité au sein du Conseil , ce qui a pour effet de priver ainsi la France de tout pouvoir d'opposition ;

- l'octroi d'un pouvoir de décision au Parlement européen , lequel n'est pas l'émanation de la souveraineté nationale ;

- la privation, pour la France, de tout pouvoir propre d'initiative dans le processus d'adoption d'actes de l'Union européenne.

La majorité qualifiée au Conseil

Aux termes du 3 de l'article 16 du traité sur l'Union européenne, le mode normal de décision au Conseil est le vote à la majorité qualifiée. Dans des cas spécifiques, les traités prévoient néanmoins que certaines décisions du Conseil doivent être adoptées à l'unanimité ou à la majorité simple.

La définition de la majorité qualifiée au Conseil fait l'objet d'une réglementation complexe -dans la mesure où elle résulte de la lecture combinée des articles 16 du traité sur l'Union européenne et 238 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ainsi que de l'article 3 du protocole sur les dispositions transitoires, annexé au traité de Lisbonne- et évolutive.

Jusqu'au 31 octobre 2014 :

Jusqu'au 31 octobre 2014, pour les délibérations du Conseil qui requièrent une majorité qualifiée, les voix des membres sont affectées de la pondération suivante :

Belgique 12

Bulgarie 10

République tchèque 12

Danemark 7

Allemagne 29

Estonie 4

Irlande 7

Grèce 12

Espagne 27

France 29

Italie 29

Chypre 4

Lettonie 4

Lituanie 7

Luxembourg 4

Hongrie 12

Malte 3

Pays-Bas 13

Autriche 10

Pologne 27

Portugal 12

Roumanie 14

Slovénie 4

Slovaquie 7

Finlande 7

Suède 10

Royaume-Uni 29

Les délibérations sont acquises si elles ont recueilli au moins 255 voix (sur un total de 345 voix) exprimant le vote favorable de la majorité des membres, lorsque, en vertu des traités, elles doivent être prises sur proposition de la Commission. Dans les autres cas, les délibérations sont acquises si elles ont recueilli au moins 255 voix exprimant le vote favorable d'au moins deux tiers des membres.

Un membre du Conseil peut demander que, lorsqu'un acte est adopté par le Conseil à la majorité qualifiée, il soit vérifié que les États membres constituant cette majorité qualifiée représentent au moins 62 % de la population totale de l'Union. S'il s'avère que cette condition n'est pas remplie, l'acte en cause n'est pas adopté.

Dans les cas où, en application des traités, tous les membres du Conseil ne prennent pas part au vote, la majorité qualifiée se définit comme étant la même proportion des voix pondérées et la même proportion du nombre des membres du Conseil, ainsi que, le cas échéant, le même pourcentage de la population des États membres concernés que ceux fixés dans les paragraphes qui précèdent.

Après le 1 er novembre 2014 :

À partir du 1 er novembre 2014, la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 55 % des membres du Conseil, comprenant au moins quinze d'entre eux et représentant des États membres réunissant au moins 65 % de la population de l'Union.

Une minorité de blocage doit inclure au moins quatre membres du Conseil, faute de quoi la majorité qualifiée est réputée acquise.

Toutefois :

- lorsque le Conseil ne statue pas sur proposition de la Commission ou du haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 72 % des membres du Conseil, représentant des États membres réunissant au moins 65 % de la population de l'Union ;

- lorsque, en application des traités, tous les membres du Conseil ne prennent pas part au vote, la majorité qualifiée se définit comme suit (paragraphe 3 de l'article 238 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne) :

a) la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 55 % des membres du Conseil représentant les États membres participants, réunissant au moins 65 % de la population de ces États. Une minorité de blocage doit alors inclure au moins le nombre minimum de membres du Conseil représentant plus de 35 % de la population des États membres participants, plus un membre, faute de quoi la majorité qualifiée est réputée acquise.

b) par dérogation au point a), lorsque le Conseil ne statue pas sur proposition de la Commission ou du haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 72 % des membres du Conseil représentant les États membres participants, réunissant au moins 65 % de la population de ces États.

En outre, à titre transitoire, entre le 1 er novembre 2014 et le 31 mars 2017, lorsqu'une délibération doit être prise à la majorité qualifiée, un membre du Conseil peut demander que cette délibération soit prise à la majorité qualifiée telle qu'elle était définie jusqu'au 31 octobre 2014 6 ( * ) . .

Aussi le Conseil constitutionnel a-t-il déclaré que n'étaient pas conformes à la Constitution les dispositions suivantes :

- le 2 de l'article 31 du traité sur l'Union européenne, qui permet au Conseil, de manière dérogatoire, d'adopter à la majorité qualifiée, dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune , des décisions définissant une action ou une position de l'Union européenne ou des décisions mettant en oeuvre de telles décisions ;

- l'article 76 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, prévoyant que les actes relevant de la coopération judiciaire en matière pénale ou de la coopération policière ne peuvent être adoptés que sur proposition de la Commission européenne ou à l'initiative d'un quart des Etats membres ;

- l'article 82 du même traité, qui permet au Parlement européen et au Conseil, selon la procédure législative ordinaire, de prendre des mesures relatives à la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires en matière pénale ainsi que des règles minimales en matière de procédure pénale ;

- l'article 83 du même traité, autorisant le Parlement européen et le Conseil à établir, selon la procédure législative ordinaire, des règles minimales relatives à la définition des infractions et des sanctions pénales ;

- l'article 85 du même traité, permettant au Parlement européen et au Conseil, selon la procédure législative ordinaire, de déterminer les tâches, la structure et le fonctionnement d' Eurojust ;

- les articles 87 à 89 du même traité, soumettant l'adoption de mesures dans le domaine de la coopération policière à la procédure législative ordinaire ;

- l'article 133 de ce traité, conférant au Parlement européen et au Conseil, dans le cadre de la procédure législative ordinaire, le pouvoir de décider des mesures nécessaires à l'usage de l' euro en tant que monnaie unique ;

- le v) du a) du 6 de l'article 218 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, étendant le domaine des accords internationaux dont le Conseil ne peut approuver la conclusion qu'après l'approbation du Parlement européen ;

- l'article 329 du même traité, qui soumet la mise en place d'une coopération renforcée entre Etats membres de l'Union à une autorisation du Conseil statuant à la majorité qualifiée, sur proposition de la Commission européenne et après approbation du Parlement européen.

? S'agissant des dispositions permettant, en vertu d'une décision européenne postérieure à l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le passage de la règle de l'unanimité à celle de la majorité qualifiée au sein du Conseil , le Conseil constitutionnel a relevé que certaines d'entre elles « ne nécessiteront, le moment venu, aucun acte de ratification ou d'approbation nationale de nature à permettre un contrôle de constitutionnalité sur le fondement de l'article 54 ou de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution » 7 ( * ) .

Il a considéré, de ce fait, que les dispositions suivantes appelaient une révision de la Constitution :

- le 3 de l'article 31 du traité sur l'Union européenne, donnant au Conseil la possibilité d'étendre, par une décision prise à l'unanimité, le nombre d'hypothèses dans lesquelles il peut, dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune , adopter des décisions à la majorité qualifiée ;

- le 3 de l'article 81 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui permet au Conseil, par une décision prise à l'unanimité et sauf opposition d'un parlement national, de soumettre certains aspects du droit de la famille ayant une incidence transfrontière à la procédure législative ordinaire ;

- le d) du 2 de l'article 82 du même traité, autorisant le Conseil à prévoir, à l'unanimité de ses membres et avec l'approbation du Parlement européen, que des règles minimales de procédure pénale peuvent être adoptées selon la procédure législative ordinaire dans des cas autres que ceux mentionnés dans cet article ;

- le 3 ème alinéa du 1 de l'article 83 du même traité, qui donne compétence au Conseil pour adopter, à l'unanimité et avec l'approbation du Parlement européen, une décision étendant la liste des domaines de criminalité dans lesquels le Parlement européen et le Conseil, statuant selon la procédure législative ordinaire, peuvent définir des infractions et des sanctions pénales.

(3) La révision simplifiée des traités européens

Dans sa décision du 20 décembre 2007, le Conseil constitutionnel a enfin jugé que la ratification du traité de Lisbonne ne pouvait intervenir sans modification préalable de la Constitution, dès lors qu'il comportait des procédures de révision des traités européens n'impliquant pas la mise en oeuvre d'une « procédure nationale de ratification de nature à permettre un contrôle de constitutionnalité . »

C'est la raison pour laquelle il a estimé que les dispositions du 7 de l'article 48 du traité sur l'Union européenne rendaient nécessaire une révision de la Constitution. Celles-ci prévoient en effet que le Conseil européen peut prendre une décision tendant :

- soit à ce que le Conseil statue à la majorité qualifiée pour l'adoption d'un acte pour laquelle le traité requiert en principe l'unanimité ;

- soit à ce qu'un acte soit adopté selon la procédure législative ordinaire lorsque le traité impose le recours à une procédure législative spéciale.

Contrairement à la procédure de révision « ordinaire » prévue par le 2 du même article ou à la procédure de révision « simplifiée » organisée par le 6 de ce même article, la modification ainsi réalisée ne nécessite pas, pour produire ses effets, une « approbation par les Etats membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives ». Cette absence est de nature à empêcher le Conseil constitutionnel d'exercer son office conformément aux dispositions de l'article 53 de la Constitution.

2. Des prérogatives nouvelles accordées aux parlements nationaux dans le cadre du processus de décision de l'Union européenne

Le traité de Lisbonne, soit par la voie de modifications apportées tant au traité sur l'Union européenne qu'au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, soit dans le cadre de protocoles annexes, renforce la participation des parlements des Etats membres à la procédure décisionnelle au sein de l'Union européenne.

Le Conseil constitutionnel a jugé que cette participation ne pouvait être mise en oeuvre dans le cadre des dispositions actuelles de la Constitution.

a) Le contrôle du respect du principe de subsidiarité

L'article 12 du traité sur l'Union européenne ainsi que le protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, annexé au traité de Lisbonne, consacrent désormais un rôle de premier rang aux parlements des Etats membres pour assurer le respect, par les institutions de l'Union européenne, du principe de subsidiarité.

L'intervention des parlements nationaux dans le cadre de ce contrôle peut désormais s'exercer à trois niveaux , selon des procédures quasi-identiques à celles prévues par le traité établissant une Constitution pour l'Europe :

- en premier lieu, par le droit d'obtenir communication de l'ensemble des « projets d'actes législatifs » émanant de la Commission européenne, d'un groupe d'États membres, du Parlement européen, de la Cour de justice, de la Banque centrale européenne ou de la Banque européenne d'investissement ;

- en second lieu, par le droit d'adresser un avis motivé aux institutions de l'Union européenne lorsqu'un projet d'acte législatif européen méconnaît le principe de subsidiarité .

Dans les parlements bicaméraux, cette prérogative appartient à chacune des chambres qui le composent. Elle entraîne les effets suivants, à condition d'être exercée dans un délai de huit semaines à compter de la transmission du projet d'acte concerné :

- de première part, l'obligation pour les institutions de l'Union européenne de « tenir compte » de ces avis afin d'apporter, le cas échéant, les modifications nécessaires pour rendre le projet d'acte législatif conforme au principe de subsidiarité ;

- de seconde part, lorsque les avis motivés représentent au moins un tiers de l'ensemble des voix attribuées aux parlements nationaux 8 ( * ) , le projet doit être réexaminé par l'institution dont il émane. Ce seuil est abaissé à un quart des voix si le projet d'acte législatif relève du domaine de la coopération judiciaire en matière pénale ou de la coopération policière.

A l'issue de ce réexamen, il appartient à l'institution dont émane le projet de décider, par une décision motivée, soit de le maintenir, soit de le modifier, soit de le retirer ;

- de troisième part, lorsque le projet d'acte intervient dans le cadre de la procédure législative ordinaire et que les avis motivés représentent au moins une majorité simple des voix attribuées aux parlements nationaux, la proposition doit être réexaminée par la Commission européenne.

Si, à l'issue de ce réexamen, la Commission décide de maintenir son projet, elle doit, dans un avis motivé, justifier la raison pour laquelle elle estime que la proposition est conforme au principe de subsidiarité. Cet avis motivé ainsi que les avis motivés des parlements nationaux sont alors soumis au Conseil et au Parlement.

Avant d'achever la première lecture, le Conseil et le Parlement européen doivent examiner si la proposition législative est compatible avec le principe de subsidiarité, en tenant compte en particulier des motifs invoqués et partagés par la majorité des parlements nationaux ainsi que de l'avis motivé de la Commission. Si le Conseil, par une majorité de 55 % de ses membres, ou le Parlement, à la majorité des suffrages exprimés, estime que la proposition n'est pas compatible avec le principe de subsidiarité, son examen ne peut être poursuivi ;

- en dernier lieu, par le droit de saisine de la Cour de justice de l'Union européenne aux fins de faire constater la violation par un acte législatif européen du principe de subsidiarité.

Procédure de contrôle a priori du respect du principe de subsidiarité
(article 7 du protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité)

b) Le droit d'opposition à la modification des règles d'adoption des actes de l'Union européenne

La révision du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne obéit en principe à une procédure dite « ordinaire » prévoyant la convocation, par le Conseil européen, d'une conférence intergouvernementale puis la ratification par les Etats membres, selon leurs procédures constitutionnelles respectives, des modifications proposées d'un commun accord par les représentants des Etats membres réunis au sein de cette conférence.

C'est sur la base d'une disposition proche du traité sur l'Union européenne, dans sa version antérieure au traité de Lisbonne, que ce dernier a pu modifier les traités existants. Mais la lourdeur et le formalisme de cette procédure nécessitaient, de l'avis de la majorité des Etats membres, des possibilités d'adaptation mineures des traités européens, selon des modalités plus souples et, en particulier, sans la réunion d'une conférence intergouvernementale et l'approbation de ces modifications par les Etats membres selon leurs règles constitutionnelles.

Concrétisant cette idée, le traité de Lisbonne consacre, aux articles 48 du traité sur l'Union européenne et 81 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, des procédures permettant la modification ponctuelle des modalités d'adoption des actes de l'Union européenne dans lesquelles chacun des parlements nationaux dispose d'un droit d'opposition.

(1) L'opposition à la modification, à l'initiative du Conseil européen, des modalités d'adoption d'un projet d'acte européen

Reprenant sans modification de fond les stipulations qui figuraient à l'article IV-444 du traité établissant une Constitution pour l'Europe, le 7 de l'article 48 du traité sur l'Union européenne confère à tout parlement national un droit d' opposition aux décisions du Conseil européen , statuant à l'unanimité après approbation du Parlement européen à la majorité de ses membres, tendant :

- lorsque le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ou le titre V du traité sur l'Union européenne 9 ( * ) prévoit que le Conseil statue à l'unanimité dans un domaine ou dans un cas déterminé, à autoriser le Conseil à statuer à la majorité qualifiée . Cette possibilité reste cependant exclue pour l'adoption des décisions ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense ;

- lorsque le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit que des actes législatifs sont adoptés par le Conseil conformément à une procédure législative spéciale, à autoriser le recours à la procédure législative ordinaire .

Celle-ci implique l'adoption d'un règlement, d'une directive ou d'une décision conjointement par le Parlement européen et le Conseil, sur proposition de la Commission, selon des modalités complexes définies à l'article 294 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Toutefois, dans des cas précis, le pouvoir de proposition d'un acte législatif européen est conféré par le traité à un groupe d'États membres ou au Parlement européen, sur la recommandation de la Banque centrale européenne ou sur la demande de la Cour de justice ou de la Banque européenne d'investissement.

Si, dans un délai de six mois à compter de la transmission du projet de décision du Conseil européen, un parlement national a notifié son opposition à l'usage de la clause passerelle, celle-ci ne peut être mise en oeuvre.

(2) L'opposition à la mise en oeuvre, par le Conseil, de la clause passerelle prévue pour l'adoption de mesures en matière de droit de la famille

L'une des innovations du traité de Lisbonne par rapport au traité établissant une Constitution pour l'Europe est d'avoir mis en place une clause passerelle spécifique dans le domaine de la coopération judiciaire en matière civile.

Aux termes de l'article 81 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en cette matière s'applique en principe la procédure législative ordinaire prévue à l'article 294 du même traité.

Toutefois, à titre dérogatoire, les mesures relatives au droit de la famille ayant une incidence transfrontière sont établies par le Conseil, statuant à l'unanimité, après consultation du Parlement européen.

Or, une clause permet au Conseil , sur proposition de la Commission, d'adopter une décision déterminant les aspects du droit de la famille ayant une incidence transfrontière susceptibles de faire l'objet d'actes adoptés selon la procédure législative ordinaire . Pour ce faire, le Conseil doit statuer à l'unanimité, après consultation du Parlement européen.

Chaque parlement national dispose, dans ce cadre, d'un droit d'opposition à l'adoption d'une telle décision , qui doit être notifié dans un délai de six mois aux institutions de l'Union européenne.

B. UNE RÉVISION NÉCESSAIRE DU TITRE XV DE LA CONSTITUTION

1. La révision constitutionnelle, préalable à la ratification et à la mise en application d'un traité contraire à la Constitution

Comme l'a réaffirmé le Conseil constitutionnel dans ses décisions n° 2004-505 DC du 19 novembre 2004 sur le traité établissant une Constitution pour l'Europe et n° 2007-560 du 20 décembre 2007 sur le traité de Lisbonne, la Constitution française est au sommet de l'ordre juridique interne.

Si ce principe n'empêche pas la reconnaissance de l'existence d'un ordre juridique communautaire intégré à l'ordre juridique interne et distinct de l'ordre juridique international, le Conseil constitutionnel ayant d'ailleurs admis que l'article 88-1 de la Constitution conférait un fondement constitutionnel au principe de primauté du droit communautaire 10 ( * ) , il n'en reste pas moins que la ratification de traités européens suppose encore et toujours leur conformité à la Constitution.

Ce principe est si fortement établi que les commentaires aux Cahiers du Conseil constitutionnel 11 ( * ) consécutifs à la décision du 19 novembre 2004 précitée précisent que « la révision de la Constitution française ne pourrait à elle seule parvenir à conférer valeur supra-constitutionnelle à la « Constitution pour l'Europe » établie par le traité, car le constituant national ne peut hisser aucun droit au-dessus de celui qu'il proclame ».

En cas de non-conformité, la révision constitutionnelle permet de conserver à la Constitution sa place au sommet de l'ordre juridique interne.

La ratification d'un engagement international nécessite une révision préalable de la Constitution lorsqu'il comporte des clauses qui sont contraires à la loi fondamentale, mettent en cause les droits et libertés constitutionnellement garantis ou portent atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale 12 ( * ) . Encore faut-il qu'il soit soumis au Conseil constitutionnel, soit directement au titre de l'article 54, soit à l'occasion de l'examen de la loi autorisant sa ratification ou son approbation en application de l'article 61.

Le Conseil examine alors chacune des stipulations du traité. Il ne s'estime tenu de motiver que les déclarations de contrariété à la Constitution. Les réserves d'interprétation sont exclues dans la mesure où un engagement international doit faire l'objet d'une application uniforme par les parties. A cet égard, comme votre rapporteur l'a souligné lors de l'audition de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, il est regrettable que le Conseil constitutionnel motive aussi succinctement ses décisions, procédant le plus souvent à des affirmations plutôt qu'à des démonstrations.

Pour des raisons de sécurité juridique et en application de la règle pacta sunt servanda consacrée par le préambule de la Constitution de 1946, la constitutionnalité des stipulations d'un traité ratifié ne peut plus être mise en cause.

Pour autant, le principe d'immunité constitutionnelle des traités ratifiés n'interdit pas l'examen de la constitutionnalité d'un traité modificatif. Dans le cas des traités européens, il n'interdit pas non plus l'examen de la constitutionnalité des mesures de transposition du droit communautaire dérivé dans le cas où ces mesures mettraient en cause des règles ou principes inhérents à l'identité constitutionnelle de la France ou des dispositions expresses et spécifiques de notre Constitution 13 ( * ) .

La Constitution française a ainsi déjà été révisée à cinq reprises :

- le 25 juin 1992 pour permettre la ratification du traité de Maastricht et notamment la participation à l'Union économique et monétaire 14 ( * ) ;

- le 25 novembre 1993 pour la mise en oeuvre des accords de Schengen en matière d'asile 15 ( * ) ;

- le 25 janvier 1999 pour permettre la ratification du traité d'Amsterdam 16 ( * ) ;

- le 25 mars 2003 pour lever les obstacles constitutionnels supposés à la participation de la France au mécanisme du mandat d'arrêt européen, en application de la décision-cadre du 13 juin 2002 17 ( * ) ;

- le 1 er mars 2005 pour permettre la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe 18 ( * ) .

2. La révision opérée par la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 est inopérante malgré la quasi-identité des motifs de contrariété à la constitution

Dans sa décision du 20 décembre 2007, le Conseil constitutionnel n'a reconnu aucune portée utile à la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005, y compris au second alinéa de l'article 88-1, en dépit de la grande proximité sur le fond entre le traité établissant une Constitution pour l'Europe et le traité de Lisbonne.

Comme le souligne M. Bertrand Mathieu, professeur de droit à l'université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne), bien que le Conseil utilise la motivation par référence à la décision du 19 décembre 2004 chaque fois que les dispositions du traité examiné sont identiques à celles du traité établissant une Constitution pour l'Europe ou chaque fois qu'une différence de rédaction est dépourvue d'incidence sur l'appréciation de la conformité à la Constitution, le Conseil considère que le nouveau traité et l'ancien sont de nature différente et formellement distincts. Lors de son audition le 17 janvier 2008 par la commission, M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, a confirmé que cette approche était partagée par l'ensemble des Etats membres.

En conséquence, il était nécessaire de procéder à une nouvelle révision constitutionnelle faisant table rase des dispositions de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 relatives à la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe.

Cette nouvelle révision très similaire à la précédente sur le fond et survenant moins de trois années après ravive nécessairement le débat sur l'opportunité d'insérer dans la Constitution une clause générale autorisant par avance tous les transferts de souveraineté requis par la construction européenne.

En effet, depuis 1992 et la ratification du traité de Maastricht, la technique juridique consistant à n'autoriser que les seuls transferts de compétences induits par la ratification desdits traités est restée inchangée.

L'adoption d'une clause générale aurait pour avantage d'éviter la multiplication des révisions constitutionnelles ponctuelles.

C'est notamment le cas en Allemagne où depuis sa modification du 21 décembre 1992, la Loi fondamentale comporte un article 23 alinéa premier au terme duquel : « Pour l'édification d'une Europe unie, la République fédérale d'Allemagne concourt au développement de l'Union européenne (...). A cet effet, la Fédération peut transférer des droits de souveraineté par une loi approuvée par le Bundesrat... ». La Constitution portugaise prévoit une clause similaire.

Votre rapporteur souhaite à cet égard livrer à la réflexion et aux débats les propositions de M. Joël Rideau, professeur de droit à l'Université de Nice-Sophia-Antipolis. Elles s'inspirent de la loi fondamentale allemande. Outre une clause générale autorisant les développements futurs de l'Union, la loi fondamentale allemande précise les principes sur lesquels est fondée l'Union et que celle-ci doit respecter et elle constitutionnalise la réserve de constitutionnalité, c'est-à-dire quelques grands principes constitutionnels essentiels qui s'imposent irréductiblement aux développements de l'Union (respect du fédéralisme, protection des droits de l'homme).

S'inspirant de ce modèle, M. Joël Rideau propose l'insertion d'une réserve de constitutionnalité qui ferait référence à l'identité constitutionnelle de la France 19 ( * ) . Seule la ratification des engagements européens contraires à cette identité constitutionnelle ne pourraient intervenir qu'après une révision constitutionnelle 20 ( * ) .

Sans trancher ce débat, votre rapporteur étant conscient que la solution d'une clause générale autorisant par avance des transferts de compétences ne fait pas consensus, il faut également noter qu'en l'espèce une telle clause n'aurait pas suffi à éviter une révision de la Constitution. Une nouvelle révision eût en effet été nécessaire pour permettre à l'Assemblée nationale et au Sénat d'exercer leurs nouvelles prérogatives en matière de subsidiarité et de « clauses passerelles ».

II. LE PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE : UNE RÉVISION DE LA CONSTITUTION AYANT POUR UNIQUE OBJET DE LEVER LES OBSTACLES À LA RATIFICATION DU TRAITÉ DE LISBONNE

L'objet du présent projet de loi constitutionnel est limité à la seule révision de la Constitution afin de lever les obstacles juridiques à la ratification du traité de Lisbonne. Il ne reprend pas, à cet égard, les quelques propositions émises par le comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la V ème République, s'agissant du titre XV de la Constitution.

Lors de sa séance du 16 janvier 2008, l'Assemblée nationale , à l'initiative de sa commission des lois 21 ( * ) , saisie au fond, et de sa commission des affaires étrangères 22 ( * ) , saisie pour avis, a adopté le projet de loi sans modification .

A. LE PROJET DE LOI : UNE RÉPONSE POINT PAR POINT À LA DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Le projet de loi constitutionnelle se borne à apporter dans la Constitution les modifications indispensables à la ratification du traité de Lisbonne. Il constitue ainsi une traduction point par point de la décision du Conseil constitutionnel.

Ce choix délibéré opéré par le Gouvernement explique notamment que le projet de loi maintienne , sous réserve d'une modification formelle, les dispositions issues de la loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1 er mars 2005 modifiant le titre XV de la Constitution imposant le recours au référendum pour l'adoption des projets de loi de ratification des accords d'adhésion à l'Union européenne d'Etats candidats pour lesquels la décision de réunir une conférence intergouvernementale a été prise après le 1 er juillet 2004.

Le projet de loi constitutionnelle propose la même méthode de révision que celle utilisée le 1 er mars 2005. Il prévoit comme en 2005 une révision échelonnée dans le temps - une première série de dispositions étant appelée à entrer en vigueur dès la promulgation de la loi constitutionnelle afin de permettre la ratification du nouveau traité européen, une seconde série n'entrant en vigueur que lors de l'entrée en vigueur de ce dernier, c'est-à-dire une fois que tous les Etats membres l'auront ratifié.

A cette identité de méthode, il convient d'ajouter une quasi-paraphrase du texte de la loi du 1 er mars 2005, à quelques exceptions près.

1. L'autorisation expresse de ratifier le traité de Lisbonne

Dans un premier temps, c'est-à-dire à compter de la promulgation de la loi constitutionnelle, l'article 88-1 de la Constitution serait complété afin de prévoir que la République « peut participer à l'Union européenne dans les conditions prévues par le traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 » (article premier) . Ces dispositions se substitueraient à celles insérées par la loi du 1 er mars 2005 pour permettre la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe. La caducité du « traité constitutionnel » rejeté par le référendum le 29 mai 2005 est ainsi entérinée.

Par sa généralité, la rédaction proposée lève les obstacles juridiques à la ratification du traité relevés par le Conseil constitutionnel. En ouvrant une simple faculté, elle évite de préjuger du résultat des procédures de ratification dans chaque Etat membre, car même si la totalité de nos partenaires, à l'exception de l'Irlande, recourront à la voie parlementaire, le résultat ne peut être tenu pour acquis.

Les dispositions proposées devraient être transitoires. Elles sont en effet insuffisantes pour permettre la mise en oeuvre de l'ensemble des clauses du traité, en particulier des prérogatives reconnues au Parlement.

Elles cesseront d'exister lorsque le traité de Lisbonne entrera en vigueur , c'est-à-dire le 1 er janvier 2009 lorsque tous les Etats membres de l'Union européenne l'auront ratifié 23 ( * ) . Sauf incident, ces dispositions seront alors remplacées par celles prévues à l'article 2 du présent projet de loi.

2. L'insertion de dispositions constitutionnelles nouvelles dont l'entrée en vigueur est reportée après l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne

L'article 2 du projet de loi tend à modifier le titre XV de la Constitution afin de lever l'ensemble des motifs de contrariété entre le traité de Lisbonne et la Constitution à compter de l'entrée en vigueur dudit traité.

L'article 3 de la loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1 er mars 2005 prévoyait déjà une réécriture complète du titre XV de la Constitution, mais celle-ci n'est jamais entrée en vigueur en raison du rejet du traité établissant une Constitution pour l'Europe par le référendum du 29 mai 2005. En conséquence, l'article 3 de la loi du 1 er mars 2005 est abrogé par le 1° de l'article 3 du présent projet de loi.

a) Les conditions de la participation de la France à l'Union européenne

Le traité de Lisbonne met fin à la Communauté européenne et à la structure en piliers de l'ordre juridique européen. L'Union européenne désormais dotée de la personnalité juridique s'y substitue.

En conséquence, le projet de loi modifie l'intitulé du titre XV de la Constitution afin de supprimer la référence aux « Communautés européennes ». De la même façon, il supprime cette référence dans l'ensemble du titre XV.

Le projet de loi réécrit ensuite l'article 88-1 de la Constitution . Celui-ci poserait le principe général de la participation de la France à l'Union européenne « constituée d'États qui ont choisi librement d'exercer certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité signé le 13 décembre 2007 ».

En faisant référence au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité de Lisbonne, la rédaction proposée assure la conformité à la Constitution de l'ensemble des clauses de ces textes.

Cette référence rend inutile le maintien des deux premiers alinéas de l'article 88-2 de la Constitution qui autorisent, sous réserve de réciprocité et selon les modalités prévues respectivement par le traité de Maastricht et celui d'Amsterdam, les transferts de compétences nécessaires à l'établissement de l'union économique et monétaire européenne et à la détermination des règles relatives à la libre circulation des personnes.

Le projet de loi tend également à réécrire l'article 88-2 de la Constitution compte tenu des modifications importantes de l'article 88-1 (article 2, 2°) . L'article 88-2 ne comprendrait plus qu'un alinéa, relatif à la mise en oeuvre du mandat d'arrêt européen.

Il semble en effet nécessaire de maintenir une base constitutionnelle aux dispositions législatives prises pour l'application de la décision-cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen dont le Conseil d'Etat a estimé qu'elle méconnaissait le principe à valeur constitutionnelle selon lequel l'Etat doit pouvoir se réserver la possibilité de refuser l'extradition d'une personne poursuivie pour une infraction à caractère politique.

Bien que le risque soit très ténu, la mise en oeuvre du mandat d'arrêt européen pourrait à l'avenir, si elle ne disposait pas d'une base juridique suffisamment solide, s'avérer contraire à des dispositions expresses et spécifiques de la Constitution ou à des règles et principes inhérents à l'identité constitutionnelle de la France.

Enfin, afin de tenir compte de l'introduction par le traité de Lisbonne de la notion d'actes législatifs européens qui n'existe pas dans les traités actuels, le projet de loi modifie, comme le prévoyait déjà la loi du 1 er mars 2005, l'article 88-4 de la Constitution (article 2, 3°) .

L'article 88-4 en vigueur autorise chaque assemblée à adopter des résolutions sur les projets de textes européens qui lui sont soumis par le Gouvernement. Le projet de loi aura pour effet d'élargir le champ des actes transmis obligatoirement au titre de l'article 88-4 et pouvant par voie de conséquence faire l'objet d'une résolution.

En effet, la notion d'actes législatifs européens recouvre des textes relevant aussi bien du domaine réglementaire que du domaine législatif au sens constitutionnel du terme, tel que défini par les articles 34 et 37 de notre Constitution. Or, en droit positif, seuls les projets de textes européens relevant du domaine de la loi sont obligatoirement transmis par le Gouvernement.

En pratique, l'avancée sera moins importante car le Gouvernement transmet d'ores et déjà à titre facultatif des projets d'actes européens relevant du domaine réglementaire.

b) Les prérogatives du Parlement français dans le fonctionnement du processus de décision de l'Union européenne
(1) Le contrôle du respect du principe de subsidiarité

Une nouvelle disposition -l'article 88-6- est insérée au sein de la Constitution afin de déterminer les prérogatives du Parlement dans le contrôle du respect du principe de subsidiarité .

Désormais, l'Assemblée nationale ou le Sénat pourront, grâce à des résolutions, chacun émettre des avis motivés sur le respect par un acte législatif européen du principe de subsidiarité. Ces avis seront directement transmis aux présidents des institutions de l'Union européenne.

En outre, tant l'Assemblée nationale que le Sénat pourra former, devant la Cour de justice de l'Union européenne, un recours en annulation contre un acte législatif européen qui aurait violé le principe de subsidiarité.

(2) Le droit d'opposition du Parlement à la modification des règles d'adoption d'actes européens

L'article 88-7 de la Constitution détermine les conditions d'opposition du Parlement aux modifications des règles d'adoption d'actes européens prévues :

- au titre de la révision simplifiée des traités sur l'Union européenne et sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- au titre de la coopération judiciaire civile en matière de droit de la famille.

A cet effet, l'Assemblée nationale et le Sénat devront adopter une motion en termes identiques .

B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : ADOPTER LE PROJET DE LOI SANS MODIFICATION DANS L'ATTENTE D'UN RENFORCEMENT DES PROCÉDURES D'INTERVENTION DU PARLEMENT À L'OCCASION DE LA RÉFORME DES INSTITUTIONS

1. Un texte à même d'assurer la participation de la France à l'évolution des compétences et des procédures de l'Union européenne

a) Le souci de ne pas mélanger les débats

Le projet de loi constitutionnelle fait le choix d'une révision a minima limitée strictement à ce qui est nécessaire pour permettre la ratification et la mise en oeuvre du traité de Lisbonne.

Cette préoccupation a été scrupuleusement respectée dans le souci de ne pas ouvrir des débats annexes qui pourraient retarder le processus de ratification à quelques mois de la présidence française de l'Union européenne. Notre pays se doit d'être exemplaire à l'approche de cette échéance.

C'est notamment le cas de la disposition introduite par la loi du 1 er mars 2005 et prévoyant le recours obligatoire à un référendum pour autoriser toute nouvelle adhésion à l'Union européenne (article 88-5 de la Constitution en vigueur). Le projet de loi maintient le texte adopté en 2005. Lors de son audition par la commission, M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, a indiqué que cette question pourrait être débattue ultérieurement à l'occasion de la réforme institutionnelle globale annoncée.

D'ailleurs, si l'on fait exception précisément de cette disposition et de l'introduction en 1992 de dispositions relatives au contrôle parlementaire de la politique européenne de la France (article 88-4 de la Constitution), le pouvoir constituant s'est limité au strict nécessaire, se contentant de lever les obstacles juridiques à la ratification des traités européens et à la construction européenne.

Toutefois, tout en approuvant la préoccupation légitime de ne pas troubler le processus de ratification, votre rapporteur estime que le renoncement à de simples améliorations rédactionnelles relève d'une prudence excessive. C'est en particulier le cas à l'article 88-3 de la Constitution relatif au droit de vote aux élections municipales des citoyens de l'Union résidant en France. Alors que la loi du 1 er mars 2005 non entrée en vigueur prévoyait plusieurs améliorations rédactionnelles ou de coordination, le projet de loi y renonce laissant ainsi perdurer, entre autres, une référence au traité de Maastricht.

b) Approuver sans modification le texte proposé

Le projet de loi constitutionnelle répond point par point aux motifs de non-conformité du traité de Lisbonne avec la Constitution. Satisfaisant pleinement aux objectifs qui lui sont assignés, votre commission vous propose d'adopter le texte proposé sans modification. Toutefois, la réflexion doit être poursuivie pour prendre pleinement en compte la spécificité du droit de l'Union européenne et renforcer les pouvoirs du Parlement en matière européenne.

2. Un renforcement des prérogatives du parlement qui devra être examiné à l'occasion de la réforme des institutions voulue par le président de la République

Dans son rapport sur la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005 24 ( * ) , votre rapporteur évoquait déjà plusieurs pistes de réformes. Parmi celles-ci figuraient :

- l'organisation d'un contrôle de constitutionnalité des actes de droit dérivé, en particulier des directives ;

- les moyens d'associer davantage encore le Parlement à l'élaboration du droit de l'Union européenne, par exemple un instituant un délai minimal pour permettre aux assemblées de se prononcer sur un projet de texte européen et obliger le gouvernement à prendre en considération les résolutions parlementaires ;

- l'instauration d'une séance mensuelle réservée à la transposition des directives et à l'autorisation de ratification des conventions internationales.

Votre rapporteur concluait que toutes ces questions nécessiteraient « d'être examinées avec la plus grande prudence et dans le cadre d'une réflexion plus globale sur l'équilibre des institutions de la V ème République ».

Le sentiment de votre rapporteur est que l'ensemble du titre XV de la Constitution devrait faire l'objet d'une refonte afin de tirer les conséquences, d'une part, de l'intégration complète de l'ordre juridique communautaire dans l'ordre juridique interne et, d'autre part, de sa place prépondérante dans la production normative.

A cet égard, votre commission a engagé depuis deux ans une réflexion sur la modernisation du travail parlementaire et notamment le renforcement du suivi des affaires européennes. Elle a ainsi noué des contacts directs avec treize parlements nationaux, et en particulier avec leurs commissions homologues, dans le cadre de sa mission d'information sur les Parlements de pays européens 25 ( * ) . Votre commission a pris conscience de son retard et de la nécessité de mettre en oeuvre de nouvelles stratégies d'influence, en anticipant davantage la discussion des projets de textes européens et en développant un réflexe européen dans l'activité normative.

Parmi les propositions de la mission d'information dans le domaine européen, on citera les suivantes :

- dénommer la délégation pour l'Union européenne « comité pour l'Union européenne » ;

- fixer un délai, éventuellement reconductible, pour l'examen par la commission compétente de la résolution présentée par la délégation pour l'Union européenne ;

- consacrer et étendre le principe de la réserve d'examen parlementaire impliquant que le Gouvernement ne peut prendre position sur un projet d'acte communautaire avant de connaître la position du Parlement ;

- désigner au sein de chaque commission permanente deux membres de la délégation pour l'Union européenne, appartenant respectivement à la majorité et à la minorité, chargés du suivi des projets de l'Union européenne intéressant les compétences de la commission.

Cette dernière proposition a d'ailleurs été mise en application avec la nomination au sein de la commission de trois co-rapporteurs -MM. Jean-René Lecerf, Pierre Fauchon et Jean-Claude Peyronnet- le 12 décembre 2007.

Cette nécessité d'une réforme du titre XV de la Constitution le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Vème République, présidé par M. Edouard Balladur, l'a intégrée dans son rapport. Celui-ci devrait servir de fil directeur à la future réforme institutionnelle initiée par le Président de la République et qui devrait être débattu au printemps prochain. Votre rapporteur se félicite à cet égard que plusieurs des propositions du Comité s'inspirent des travaux de votre commission sur les parlements européens.

Parmi les propositions du Comité -toutes ne nécessitent pas une révision constitutionnelle- on relèvera les principales :

- constitutionnaliser des délégations parlementaires pour l'Union européenne qui seraient renommées « Comité des affaires européennes » ;

- modifier l'article 88-5 de la Constitution de telle sorte que le Président de la République ait la possibilité, par parallélisme avec la procédure de l'article 89 de la Constitution, de faire autoriser la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne soit par référendum, soit par la voie du Congrès, et non plus obligatoirement par voie de référendum comme le prévoit la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005 ;

- permettre au Parlement d'adopter des résolutions sur tout sujet européen, sans distinguer entre ce qui relève du domaine de la loi ou du domaine du règlement ;

- moderniser les procédures de transposition de directives, notamment en permettant aux commissions permanentes d'examiner en procédure simplifiée les textes de transposition ne posant pas de difficultés particulières.

Votre rapporteur souhaiterait également que soit étudiée la possibilité d'une clause générale autorisant par avance des transferts de compétences afin de limiter la multiplication des révisions constitutionnelles ponctuelles à chaque avancée de la construction européenne. A cet égard, les propositions précitées de M. Joël Rideau, professeur de droit à l'Université de Nice- Sophia Antipolis sont originales. De manière générale, votre rapporteur regrette que la Constitution continue de considérer les traités européens selon les règles classiques du droit international public.

*

* *

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission des Lois vous propose d'adopter le projet de loi constitutionnelle sans modification.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier (art. 88-1 de la Constitution) Autorisation de ratifier le traité de Lisbonne

Cet article tend à modifier l'article 88-1 de la Constitution afin de rendre possible la ratification du traité de Lisbonne qui modifie le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne.

Ces dispositions sont appelées à entrer en vigueur dès le lendemain de la publication de la future loi constitutionnelle, permettant ainsi à la procédure d'autorisation de ratification du traité d'être menée à son terme conformément aux articles 53 et 54 de la Constitution 26 ( * ) . Toutefois, elles cesseront d'exister lorsque le traité de Lisbonne entrera en vigueur , c'est-à-dire le 1 er janvier 2009 lorsque tous les Etats membres de l'Union européenne l'auront ratifié 27 ( * ) . Ces dispositions seront alors remplacées par celles prévues à l'article 2 du présent projet de loi.

Ce mécanisme à double détente est identique à celui qui avait déjà été retenu par la loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1er mars 2005.

L'article 1 er de cette loi a en effet complété l'article 88-1 de la Constitution par un second alinéa prévoyant que la République « peut participer à l'Union européenne dans les conditions prévues par le traité établissant une Constitution pour l'Europe signé le 29 octobre 2004 ».

Le caractère très général de cette formule permettait de lever l'ensemble des obstacles juridiques à la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe. En outre, en ouvrant une simple faculté, cette formule évitait judicieusement de préjuger de l'issue du référendum français du 29 mai 2005 ainsi que des procédures de ratification engagées dans les autres Etats membres.

Ces dispositions devaient être transitoires car insuffisantes à la mise en oeuvre de l'ensemble des dispositions du traité, une fois celui-ci entré en vigueur, en particulier les dispositions relatives aux nouvelles prérogatives reconnues au Parlement. En conséquence, l'article 3 de la loi du 1 er mars 2005 prévoyait une réécriture complète du titre XV de la Constitution qui serait entrée en vigueur en même temps que le traité établissant une Constitution pour l'Europe.

Du fait du rejet du traité constitutionnel par le référendum du 29 mai 2005, ces dispositions transitoires demeurent inscrites dans la Constitution.

Saisi par le Président de la République le 13 décembre 2007 afin de se prononcer sur la contrariété ou non du traité de Lisbonne avec la Constitution, le Conseil constitutionnel 28 ( * ) n'a reconnu aucune portée utile au second alinéa de l'article 88-1, scorie de la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005, en dépit de la proximité sur le fond de certaines dispositions des deux traités.

Le présent article, qui modifie le second alinéa de l'article 88-1 de la Constitution, reprend par conséquent la même méthode en prévoyant que la République « peut participer à l'Union européenne dans les conditions prévues par le traité de Lisbonne [...] signé le 13 décembre 2007 ».

Elle évite à nouveau de préjuger du résultat des procédures de ratification dans chaque Etat membre. La totalité de nos partenaires, à l'exception de l'Irlande, recourront à la voie parlementaire. Dans cet Etat, la ratification du traité suppose une révision de la Constitution laquelle ne peut se faire que par référendum 29 ( * ) .

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier sans modification .

Article 2 (art. 88-1, 88-2, 88-4, 88-5 et 88-6 à 88-7 [nouveaux] de la Constitution) Modification du titre XV de la Constitution relatif aux Communautés européennes et à l'Union européenne

Cet article est le second volet de la révision constitutionnelle, le premier volet étant constitué de l'article premier du présent projet de loi qui se limite à rendre possible la ratification du traité de Lisbonne par la France dans l'attente de son entrée en vigueur .

En effet, le présent article tend à modifier le titre XV de la Constitution afin de lever l'ensemble des motifs de contrariété entre le traité de Lisbonne et la Constitution à compter de l'entrée en vigueur dudit traité 30 ( * ) . En particulier, il autorise la mise en oeuvre des nouvelles prérogatives reconnues au Parlement par le traité de Lisbonne, la révision transitoire et a minima prévue par l'article premier du projet de loi ne suffisant pas.

L'article 3 de la loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1 er mars 2005 prévoyait déjà une refonte complète du titre XV de la Constitution, mais celle-ci n'est jamais entrée en vigueur en raison du rejet du traité établissant une Constitution pour l'Europe par le référendum du 29 mai 2005. Il tendait à réécrire l'ensemble des articles 88-1 à 88-4 de la Constitution et y adjoignait trois nouveaux articles 88-5 à 88-7. Outre la mise en conformité de la Constitution avec le traité établissant une Constitution pour l'Europe, la loi du 1 er mars 2005 procédait à diverses améliorations rédactionnelles.

Le présent article, s'il reprend pour l'essentiel les dispositions de l'article 3 de la loi du 1 er mars 2005, ne procède pas à une réécriture intégrale du titre XV de la Constitution. Il se cantonne rigoureusement à ce qui est nécessaire pour permettre l'entrée en vigueur et la mise en oeuvre du traité de Lisbonne en répondant strictement aux exigences posées par la décision du Conseil constitutionnel du 20 décembre 2007.

Ainsi, le présent article ne rouvre pas le débat sur la disposition introduite par l'article 2 de la loi du 1 er mars 2005 qui prévoit que « tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne et aux Communautés européennes est soumis au référendum par le Président de la République ». Cette question est renvoyée au débat plus global qui aura lieu à l'occasion du futur projet de loi constitutionnelle sur la réforme des institutions.

De la même façon mais sur un sujet de bien plus faible importance, si la révision constitutionnelle désormais caduque du 1 er mars 2005 toilettait et améliorait la rédaction de l'article 88-3 de la Constitution relatif aux droits de vote et d'éligibilité aux élections municipales des citoyens de l'Union résidant en France, le présent article n'en fait rien, ce qui a pour effet de maintenir, entre autres, une référence au traité de Maastricht signé le 7 février 1992.

Le souci du Gouvernement de ne pas mélanger les débats à l'occasion de cette révision constitutionnelle est légitime. Il convient en effet de ne pas troubler par des questions annexes le processus de ratification du traité de Lisbonne. Toutefois, le renoncement à de simples améliorations rédactionnelles témoigne sans doute d'une prudence excessive.

1. Supprimer les références aux Communautés européennes

Le traité de Lisbonne met fin à la Communauté européenne et à la structure en piliers de l'ordre juridique européen. L'Union européenne désormais dotée de la personnalité juridique s'y substitue. Quant au traité instituant la communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), il est échu depuis le 22 juillet 2002.

En conséquence, le du présent article modifie l'intitulé du titre XV de la Constitution afin de supprimer la référence aux « Communautés européennes ». De la même façon, le présent article supprime cette référence dans l'ensemble du titre XV.

Certes, la Communauté européenne de l'énergie atomique (CEEA ou « Euratom ») subsiste. Mais le protocole (n° 13) modifiant le traité instituant la CEEA et annexé au traité de Lisbonne prévoit l'assimilation des références à l'Union, au « traité sur l'Union européenne » et au « traité sur le fonctionnement de l'Union européenne » aux références à la Communauté européenne de l'énergie atomique et à son traité constitutif.

2. Autoriser la participation de la France à l'Union européenne dans les conditions fixées par le traité de Lisbonne

Le du présent article réécrit l'article 88-1 de la Constitution. Celui-ci poserait le principe général de la participation de la France à l'Union européenne « constituée d'États qui ont choisi librement d'exercer certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité signé le 13 décembre 2007 ».

En faisant référence au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité de Lisbonne, la rédaction proposée assure la conformité à la Constitution de l'ensemble des clauses de ces textes 31 ( * ) . En revanche, les modifications qui leurs seraient apportées ultérieurement pourraient être jugées contraires à la Constitution et appeler en conséquence une nouvelle révision constitutionnelle 32 ( * ) .

De ce point de vue, la rédaction proposée pour l'article 88-1 ne rompt pas avec la technique juridique employée lors des révisions constitutionnelles préalables aux ratifications des traités de Maastricht et d'Amsterdam consistant à n'autoriser que les seuls transferts de compétences induits par la ratification desdits traités.

L'autre solution, souvent réclamée pour éviter la multiplication des révisions constitutionnelles ponctuelles, aurait consisté à prévoir une clause générale autorisant par avance tous les transferts de souveraineté requis par la construction européenne 33 ( * ) .

Bien que classique par sa technique, la rédaction proposée pour l'article 88-1 n'en est pas moins innovante. En effet, comme l'a souligné M. Bertrand Mathieu, professeur à l'Université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne), elle tend à synthétiser en une seule phrase le principe de la participation de la France à l'Union européenne. Cette solution permet d'alléger le texte constitutionnel et de couvrir l'ensemble des transferts de compétence opérés antérieurement au traité de Lisbonne et par ce dernier traité. L'article 3 de la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005 prévoyait une solution similaire.

Depuis le traité de Maastricht, la pratique a en effet consisté lors de chaque révision constitutionnelle préalable à la ratification d'un traité européen à énumérer les domaines dans lesquels des transferts de compétences étaient autorisés.

La rédaction proposée pour l'article 88-1 se substituerait par conséquent :

- d'une part, à l'article 88-1 tel qu'il résulterait de l'article 1 er du présent projet de loi constitutionnelle et qui proclame déjà en son premier alinéa que « la République participe aux Communautés européennes et à l'Union européenne, constituées d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences » ;

- d'autre part, aux deux premiers alinéas de l'article 88-2 qui disposent que la France consent aux transferts de compétences nécessaires à l'établissement de l'union économique et monétaire selon les modalités prévues par le traité de Maastricht ainsi qu'aux transferts de compétences nécessaires à la détermination des règles relatives à la libre circulation des personnes et aux domaines qui lui sont liés selon les modalités prévues par le traité d'Amsterdam.

Dans l'avenir, si de nouveaux transferts de compétences étaient décidés, il suffirait de remplacer à l'article 88-1 la référence au traité de Lisbonne par la référence au nouveau traité.

La rédaction proposée appelle quelques précisions complémentaires.

En premier lieu, les deux premiers alinéas de l'article 88-2 de la Constitution en vigueur disposent que la France consent aux transferts de compétences nécessaires « sous réserve de réciprocité ». Cette condition de réciprocité est abandonnée par la nouvelle rédaction proposée. Elle s'avère en effet inutile en l'espèce puisque l'entrée en vigueur de cette rédaction est elle-même subordonnée à la ratification du traité de Lisbonne par l'ensemble des Etats membres. Donc, il ne pourra entrer en vigueur que si la clause de réciprocité est préalablement satisfaite.

En second lieu, la reprise par la rédaction proposée de la formule selon laquelle l'Union européenne est « constituée d'Etats qui ont choisi librement d'exercer en commun certaines de leurs compétences » est destinée à faire obstacle à ce que l'Union devienne une fédération sans une nouvelle révision constitutionnelle. Elle est issue de la révision constitutionnelle du 25 juin 1992 préalable à la ratification du traité de Maastricht.

3. La mise en oeuvre des règles relatives au mandat d'arrêt européen

Le du présent article tend également à réécrire l'article 88-2 de la Constitution compte tenu des modifications importantes de l'article 88-1 de la Constitution. Seul le dernier alinéa de l'article 88-2 en vigueur, relatif au mandat d'arrêt européen, serait maintenu. Sur ce point, la rédaction proposée pour l'article 88-2 est rigoureusement identique à celle que prévoyait la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005 non entrée en vigueur.

Le droit en vigueur

Le dernier alinéa de l'article 88-2 de la Constitution en vigueur dispose que « la loi fixe les règles relatives au mandat d'arrêt européen en application des actes pris sur le fondement du Traité sur l'Union européenne ».

Ces dispositions ont été insérées par la loi constitutionnelle n° 2003-267 du 25 mars 2003 relative au mandat d'arrêt européen, le Conseil d'Etat ayant estimé 34 ( * ) que la décision-cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen 35 ( * ) méconnaissait le « principe fondamental reconnu par les lois de la République », à valeur constitutionnelle, selon lequel l'État doit pouvoir se réserver la possibilité de refuser l'extradition d'une personne poursuivie pour une infraction à caractère politique 36 ( * ) . Il a donc été jugé plus prudent de procéder à la révision de la Constitution avant de transposer la décision-cadre en droit interne.

En effet, le premier alinéa de l'article 88-1 de la Constitution en vigueur qui dispose que « la République participe aux Communautés européennes et à l'Union européenne, constituées d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences », n'a pour effet ni de conférer une valeur constitutionnelle aux traités, ni de faire bénéficier d'une clause générale d'immunité constitutionnelle les actes pris en application de ceux-ci. Le droit dérivé européen n'est pas automatiquement et nécessairement conforme à la Constitution, même si à l'inverse la Cour de justice des Communautés européennes considère qu'un Etat membre ne peut se prévaloir de son droit interne pour faire obstacle à la mise en oeuvre du droit de l'Union.

Toutefois, les hypothèses dans lesquelles la transposition d'une directive ou d'une décision-cadre serait écartée en raison d'une contrariété avec la Constitution sont très réduites.

En effet, dans trois décisions de 2004 37 ( * ) , le Conseil constitutionnel a précisé que la transposition en droit interne d'une directive communautaire résultait d'une exigence constitutionnelle posée par l'article 88-1 de la Constitution. Seule pourrait y faire obstacle une disposition expresse et spécifique de la Constitution contraire à la directive. Sous réserve de cette exception, le Conseil constitutionnel se refuse à contrôler la conformité à la Constitution des actes pris par les institutions de l'Union européenne et va même jusqu'à reconnaître une primauté atténuée de la Constitution sur le droit communautaire.

Dans sa décision n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006 sur la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, le Conseil a précisé cette jurisprudence en considérant que « la transposition d'une directive ne saurait aller à l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France, sauf à ce que le constituant y ait consenti ».

Cette jurisprudence est postérieure à l'avis du Conseil d'Etat du 26 septembre 2002 qui avait conduit à réviser la Constitution pour permettre la transposition de la décision-cadre sur le mandat d'arrêt européen.

Plusieurs professeurs de droit entendus par votre rapporteur à l'occasion de la loi du 1 er mars 2005 ainsi que sur le présent projet de loi ont estimé que la jurisprudence du Conseil constitutionnel rendrait inopposable à une loi de transposition un simple principe fondamental reconnu par les lois de la République, sauf à considérer qu'il s'agit d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France.

Dans ces conditions se pose la question de l'utilité de maintenir des dispositions spécifiques assurant la conformité à la Constitution du mandat d'arrêt européen et de ses développements futurs.

Un maintien utile malgré tout

En dépit des aspects contestables ou dépassés de l'avis du Conseil d'Etat du 26 septembre 2002, votre rapporteur estime plus prudent de ne pas prendre le risque de supprimer à ce stade la référence constitutionnelle au mandat d'arrêt européen en raison, d'une part, des incertitudes entourant la jurisprudence récente du Conseil constitutionnel et, d'autre part, du caractère limité de la révision constitutionnelle proposée qui se refuse encore à franchir le pas d'une clause générale de conformité à la Constitution des évolutions futures de la construction européenne.

Le traité de Lisbonne ne consacre pas directement dans le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne le mandat d'arrêt européen. Celui-ci n'y trouvera, comme c'est déjà le cas dans le traité instituant les Communautés européennes, qu'une base juridique. Le futur article 82 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit que « la coopération judiciaire en matière pénale dans l'Union est fondée sur le principe de la reconnaissance mutuelle des jugements et décisions judiciaires » et que le Parlement européen et le Conseil adoptent les mesures visant à « établir des règles et des procédures pour assurer la reconnaissance de toutes les formes de jugements et de décisions judiciaires ». Le mandat d'arrêt européen continuera à ne relever que du droit dérivé.

Or, à l'occasion de la transposition d'une future directive relative au mandat d'arrêt européen, il n'est pas possible de prédire, en l'état de sa jurisprudence, si le Conseil constitutionnel jugerait la règle selon laquelle l'Etat doit refuser l'extradition lorsqu'elle est demandée dans un but politique comme étant un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France.

En conséquence, l'article 88-1 ne suffit pas à garantir avec certitude la conformité à la Constitution du mandat d'arrêt européen. Les dispositions spécifiques de l'article 88-2 conservent une utilité, même si les risques de contrariété avec la Constitution sont très réduits. Lors de son audition par votre commission, le 17 janvier 2008, M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat chargé des affaires européennes, a estimé qu'un risque d'insécurité juridique demeurait et qu'il convenait par précaution de ne pas abroger ces dispositions introduites par la loi constitutionnelle du 25 mars 2003.

En outre, hypothétiquement, les développements du mandat d'arrêt européen pourraient à l'avenir, faute d'une base juridique suffisamment solide, s'avérer contraires à des dispositions expresses et spécifiques de la Constitution. En dépit des doutes émis par plusieurs professeurs de droit, la rédaction proposée par le présent projet de loi permet de couvrir ce risque puisqu'elle garantit la constitutionnalité des règles relatives au mandat d'arrêt européen « en application des actes pris par les institutions de l'Union européenne ». Cette référence très large, sans renvoi à un texte précis et daté comme peut le faire l'article 88-1 de la Constitution, vaut pour des directives futures.

En conclusion, bien que votre rapporteur soit conscient du caractère extrêmement ténu du risque de censure par le Conseil constitutionnel d'un texte de transposition relatif au mandat d'arrêt européen, il est préférable de maintenir ces dispositions.

4. La définition des projets de textes européens soumis au Parlement par le Gouvernement

L'article 88-4 a été inséré dans la Constitution par la révision constitutionnelle du 25 juin 1992, afin de permettre aux assemblées parlementaires d'adopter des résolutions sur les textes européens qui leur sont soumis par le Gouvernement.

Le droit en vigueur, fruit d'évolutions successives

Le premier alinéa de l'article 88-4 de la Constitution dispose que « le Gouvernement soumet à l'Assemblée nationale et au Sénat, dès leur transmission au Conseil de l'Union européenne, les projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne comportant des dispositions de nature législative. Il peut également leur soumettre les autres projets ou propositions d'actes ainsi que tout document émanant d'une institution de l'Union européenne ».

Le tri des textes comportant des dispositions de nature législative est effectué par le Conseil d'Etat. En cas de divergence d'appréciation, chaque assemblée peut simplement lui demander de reconsidérer sa position.

Toutefois, depuis la révision constitutionnelle du 25 janvier 1999, le Gouvernement peut transmettre tout document qu'il estime être d'un intérêt particulier pour le Parlement, qu'il s'agisse d'un acte normatif de nature réglementaire ou d'un acte non normatif.

La circulaire du Premier ministre du 22 novembre 2005 prévoit ainsi la transmission systématique des livres verts, des livres blancs et du programme annuel de travail de la Commission. Elle prévoit en outre la transmission systématique des projets d'actes relevant de la codécision, indépendamment de l'avis rendu par le Conseil d'Etat sur la nature législative ou réglementaire de ces actes. Enfin, allant encore au-delà des prescriptions constitutionnelles, elle prévoit également que les présidents des délégations parlementaires pour l'Union européenne et les présidents des commissions des affaires étrangères peuvent solliciter auprès du Gouvernement la transmission d'un texte au titre de la clause facultative.

De fait, la circulaire du 22 novembre 2005 donne pratiquement gain de cause aux députés qui, lors des débats sur la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005, souhaitaient l'adoption d'un amendement tendant à permettre aux présidents des deux assemblées, à ceux de leurs commissions permanentes, à soixante députés ou soixante sénateurs d'obtenir la soumission au Parlement d'un projet ou d'une proposition d'acte de l'Union européenne ne comportant pas de dispositions législatives ou de tout autre document émanant d'une institution européenne 38 ( * ) .

Au total, 300 à 350 textes relevant des premier et troisième piliers sont soumis chaque année au Parlement au titre de l'article 88-4 39 ( * ) .

La définition des projets ou propositions d'actes transmis officiellement au Parlement par le gouvernement, à titre facultatif ou obligatoire, est essentielle puisque seuls ces textes peuvent faire l'objet d'une résolution par chacune des assemblées conformément au deuxième alinéa de l'article 88-4. Les résolutions sont adoptées selon les règles propres à chaque assemblée.

Le projet de loi : une adaptation a minima

Le 3° du présent article tend à adapter la rédaction du premier alinéa de l'article 88-4 de la Constitution aux stipulations du traité de Lisbonne en substituant à la notion de « projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne comportant des dispositions de nature législative » les notions de « projets d'actes législatifs européens » et d'« autres projets ou propositions d'actes de l'Union européenne comportant des dispositions qui sont du domaine de la loi ». Ces modifications reprennent exactement celles demeurées lettre morte de la loi du 1 er mars 2005.

Elles tiennent compte :

- de la substitution de l'Union européenne à la Communauté européenne ;

- de l'introduction par le traité de Lisbonne de la notion d'actes législatifs européens qui n'existe pas dans les traités actuels.

L'acte législatif européen

La notion d'« acte législatif européen » est définie par le traité de Lisbonne aux articles 289 et 294 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

L'acte législatif européen résulte d'un critère purement formel .

Aux termes du 3 de l'article 289 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, constituent des actes législatifs « les actes juridiques adoptés par procédure législative ».

En conséquence, ces actes peuvent être tant des règlements ou des directives que des décisions.

A cet égard, l'article 289 du traité de Lisbonne définit deux types de procédures législatives :

- la procédure législative « ordinaire ». Celle-ci implique l'adoption d'un règlement, d'une directive ou d'une décision conjointement par le Parlement européen et le Conseil, sur proposition de la Commission, selon des modalités complexes définies à l'article 294 du traité. Toutefois, dans des cas précis, le pouvoir de proposition d'un acte législatif européen est conféré par le traité à un groupe d'États membres ou au Parlement européen, sur la recommandation de la Banque centrale européenne ou sur la demande de la Cour de justice ou de la Banque européenne d'investissement ;

- les procédures législatives « spéciales ». Le traité prévoit, dans certaines hypothèses, l'adoption d'un règlement, d'une directive ou d'une décision par le Parlement européen avec la participation du Conseil ou, à l'inverse, par celui-ci avec la participation du Parlement européen.

Les actes législatifs européens s'opposent par leur nature aux actes « non législatifs » qui, selon l'article 290 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, sont adoptés par la Commission européenne sur délégation d'un acte législatif. De portée générale, ces actes ont pour objet de compléter ou de modifier « certains éléments non essentiels » de l'acte législatif concerné.

Ces dispositions auront pour effet d'élargir le champ des actes transmis au titre de l'article 88-4 et pouvant par voie de conséquence faire l'objet d'une résolution.

En effet, la notion d'actes législatifs européens recouvre des textes relevant aussi bien du domaine réglementaire que du domaine législatif au sens constitutionnel du terme, tels que définis par les articles 34 et 37 de notre Constitution. En outre, même au regard de la circulaire du 22 novembre 2005 qui prévoit la transmission systématique des textes européens relevant de la codécision, le champ des textes transmis serait plus large puisque les actes législatifs européens peuvent être adoptés dans certains cas selon une procédure législative spéciale sans codécision.

Le Parlement pourra adopter des résolutions sur le bien fondé des projets d'actes législatifs européens concernant des domaines relevant du pouvoir exécutif français, de la même façon qu'il pourra se prononcer sur leur conformité au principe de subsidiarité 40 ( * ) .

L'argument selon lequel la séparation des domaines de la loi et du règlement opérée par les articles 34 et 37 de la Constitution interdirait le vote de résolutions parlementaires sur des textes relevant du domaine réglementaire sous peine de leur donner un droit de regard sur des matières que le Constituant a entendu réserver à l'exécutif ne semble guère recevable dans la mesure où l'article 88-4 relève davantage de la fonction de contrôle du Parlement que de sa fonction législative. En outre, le Constituant est libre de modifier certains équilibres.

Tout en approuvant ces dispositions nécessaires, votre rapporteur exprime un regret et un souhait.

Un regret tout d'abord sur la confusion possible entre la notion d'actes législatifs européens et celle de loi au sens de la Constitution. La lisibilité et la clarté de notre loi fondamentale n'en seront pas renforcées.

Un souhait ensuite que cette révision a minima , nécessaire pour une ratification dans les meilleurs délais du traité de Lisbonne, soit le prélude à une réforme plus ambitieuse de l'article 88-4 de la Constitution.

En effet, il conviendra de mieux coordonner ce mécanisme de transmission des textes européens par le Gouvernement au Parlement avec le protocole n° 1 sur le rôle des Parlements nationaux dans l'Union européenne, accompagnant le traité de Lisbonne. Ce protocole prévoit la transmission directe des projets d'actes législatifs européens par la Commission, le Conseil ou le Parlement européen ainsi que de la plupart des actes non normatifs (livres blancs, livres verts, communications) aux parlements nationaux.

Le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Vème République, présidé par M. Édouard Balladur, a également fait plusieurs propositions intéressantes. Il suggère notamment de supprimer des dispositions qui limitent l'obligation faite au Gouvernement de transmettre l'ensemble des documents européens et de donner la faculté au Parlement d'adopter des résolutions sur toutes les questions européennes.

5. Le maintien de l'obligation de soumettre à référendum les projets de loi autorisant la ratification d'un traité d'adhésion à l'Union européenne

Le du présent article apporte une correction formelle à l'article 88-5 de la Constitution , tel qu'il résulte de la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005.

Comme votre rapporteur l'avait souligné en 2005, l'article 88-5 rend obligatoire l'adoption par la voie référendaire de tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un Etat à l'Union européenne et aux Communautés européennes. Cette disposition est la transcription constitutionnelle de l'engagement pris par M. Jacques Chirac, alors président de la République, « de garantir qu'à partir d'une certaine date, c'est-à-dire avant l'entrée éventuelle, ou la question de l'entrée éventuelle de la Turquie, les Français soient interrogés non pas par le biais de la procédure parlementaire, mais obligatoirement pour cet élargissement et d'éventuels autres élargissements par le biais du référendum . » 41 ( * )

Cet article n'a ni pour objet ni pour effet de contraindre le président de la République à organiser un référendum pour l'adhésion d'un pays candidat à l'Union européenne, mais il interdit l'adoption par la voie parlementaire de tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité d'adhésion.

L'obligation posée par cette disposition n'en comporte pas moins certaines limites :

- d'une part, elle ne s'applique qu'aux projets de loi de ratification, alors même qu'il est juridiquement possible que la ratification d'un traité d'adhésion puisse résulter d'une proposition de loi ;

- d'autre part, compte tenu de la réserve posée par l'article 4 de la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005 42 ( * ) , l'obligation référendaire découlant de l'article 88-5 n'est pas applicable aux traités d'adhésion faisant suite à des conférences intergouvernementales dont la convocation a été décidée avant le 1er juillet 2004 43 ( * ) .

L'unique modification apportée à cette disposition par le présent projet de loi tend à supprimer la référence à une adhésion « aux Communautés européennes » afin de tenir compte de la fusion des trois piliers de l'Union européenne opérée par le traité de Lisbonne et la disparition des Communautés européennes .

Votre rapporteur estime qu'à l'occasion de la présente révision constitutionnelle, la pertinence du maintien de l'obligation référendaire -dont l'introduction pouvait s'expliquer en 2005 par le débat politique entourant la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe- pour la ratification des traités d'adhésion aurait pu être posée .

Le dispositif adopté en 2005, examiné à l'aune des résultats de la consultation référendaire du 29 mai 2005 ayant conduit au rejet du traité établissant une Constitution pour l'Europe, semble en effet trop lourd à mettre en oeuvre et peu adapté.

Il conviendrait de réfléchir à un dispositif qui permettrait de mieux associer les citoyens, sans présenter la lourdeur d'un mécanisme référendaire automatique.

Du reste, dans son rapport remis au président de la République, le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la V ème République, présidé par M. Édouard Balladur, a estimé que « ces dispositions circonstancielles » devraient être « modifié[es] de telle sorte que le Président de la République ait la possibilité, par parallélisme avec la procédure de l'article 89 de la Constitution, de faire autoriser la ratification d'un tel traité soit par référendum, soit par la voie du Congrès (...). Ainsi le Parlement serait-il susceptible de retrouver en cette matière, une compétence dont la révision constitutionnelle du 1 er mars 2005 l'avait privé. La procédure du Congrès, avec une majorité requise des trois cinquièmes, apporte des garanties très fortes sur le sérieux et le caractère approfondi du débat qui précèderait cette éventuelle ratification . » 44 ( * )

En outre, lors de son audition par votre commission, le 17 janvier 2008, M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat chargé des affaires européennes, s'est déclaré favorable, à titre personnel, à la suppression de ce dispositif, rappelant que l'article 11 de la Constitution permettait déjà au président de la République, s'il le souhaitait, de soumettre à référendum tout projet de loi de ratification d'un traité d'adhésion. C'est d'ailleurs sur ce fondement que le président Georges Pompidou avait consulté le peuple français sur l'adhésion du Royaume-Uni, de l'Irlande, du Danemark et de la Norvège aux Communautés européennes en 1972.

Votre commission souhaite en conséquence que la révision annoncée de la Constitution sur la base des propositions des travaux de ce Comité puisse donner lieu à la remise à plat de cette disposition, dans une réflexion plus large sur les moyens de démocratie directe efficaces qui pourraient être offerts aux citoyens français.

A cette occasion, il pourrait sans doute être opportun d'examiner la possibilité de fixer un seuil de participation minimum pour donner à la consultation référendaire une légitimité réelle.

6. Les modalités d'intervention du Parlement dans le processus d'adoption des actes de l'Union européenne

Le du présent article ajoute deux nouveaux articles à la Constitution -les articles 88-6 et 88-7- afin de définir les modalités d'intervention du Parlement dans le processus d'adoption des actes de l'Union européenne.

Comme l'a souligné M. Joël Rideau, professeur de droit à l'Université de Nice-Sophia-Antipolis, lors de son audition par votre rapporteur, il eût sans doute été possible de rassembler ces deux dispositifs au sein d'un article unique de la Constitution qui se serait borné à préciser que le Parlement exerce les prérogatives qui lui sont conférées par le traité de l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ainsi que les protocoles annexés au traité de Lisbonne 45 ( * ) .

Pour autant, la création de deux dispositions constitutionnelles distinctes peut présenter l'avantage de mieux distinguer les deux hypothèses d'intervention du Parlement français : d'une part, la violation du principe de subsidiarité ; d'autre part, la mise en oeuvre d'une procédure de révision simplifiée des traités.

Article 88-6 (nouveau) de la Constitution Contrôle par le Parlement du respect du principe de subsidiarité

L'article 88-6 de la Constitution a pour objet de mettre en oeuvre, dans l'ordre constitutionnel français, le pouvoir de contrôle reconnu au Parlement sur le respect du principe de subsidiarité lors de l'adoption d'actes législatifs européens par l'article 12 du traité sur l'Union européenne ainsi que par le protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

La question du contrôle du respect du principe de subsidiarité dans le cadre du processus de décision de l'Union européenne a été récurrente depuis l'entrée en vigueur du traité de Maastricht. Le protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité tranche désormais le débat en mettant en place une véritable procédure de contrôle de ce principe :

- au niveau des institutions de l'Union européenne elles-mêmes, d'une part, tenues de veiller « de manière continue » au respect du principe de subsidiarité 46 ( * ) , en motivant en particulier leurs projets d'actes législatifs au regard de ce principe 47 ( * ) ;

- au niveau des parlements nationaux, d'autre part, soit au cours du processus d'adoption d'un texte européen, soit une fois un texte européen adopté.

Le principe de subsidiarité

Inscrit formellement depuis le traité de Maastricht au sein des traités européens, le principe de subsidiarité a vocation à réguler l'exercice des compétences partagées entre l'Union européenne et les Etats membres. Il implique, selon les termes du deuxième alinéa de l'article 5 du traité instituant la Communauté européenne, que « [d]ans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, la Communauté n'intervient, conformément au principe de subsidiarité, que si et dans la mesure où les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire. »

Le 3 de l'article 5 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tel qu'issu du traité de Lisbonne, conserve une définition similaire en indiquant que « [e]n vertu du principe de subsidiarité, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l'Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu'au niveau régional et local, mais peuvent l'être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, au niveau de l'Union. »

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007, a en effet estimé qu'une révision de la Constitution était nécessaire pour assurer la mise en oeuvre en droit français de ces stipulations.

Lors de son audition par votre commission, M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, a rappelé que cette position pouvait s'appuyer sur la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel depuis sa décision n° 59-2 DC des 17, 18 et 24 juin 1959, selon laquelle le Parlement ne pouvait procéder qu'aux votes expressément prévus par la Constitution.

De fait, le silence actuel de la Constitution doit s'interpréter comme faisant obstacle à l'exercice, par le Parlement français, des compétences découlant directement du traité de Lisbonne et de ses protocoles. Il impose donc une mention expresse dans notre loi fondamentale des conditions de la participation de l'Assemblée nationale et du Sénat au contrôle de la subsidiarité des actes de l'Union.

Pour autant, comme l'a souligné M. Joël Rideau, professeur de droit à l'Université de Nice-Sophia Antipolis, lors de son audition par votre rapporteur, le choix fait par le Conseil constitutionnel, peu motivé dans sa décision, peut être discuté, d'autant que les autres Etats membres de l'Union européenne n'ont pas conclu à la nécessité d'une modification de leur texte constitutionnel à cette fin.

Une fois encore, votre rapporteur souhaite que la réforme annoncée de nos institutions puisse être l'occasion de réexaminer la pertinence d'un tel choix.

En tout état de cause, compte de la très forte similitude de ce protocole avec celui initialement prévu par le traité établissant une Constitution pour l'Europe 48 ( * ) , les dispositions de ce nouvel article 88-6 sont similaires à celles de l'article 88-5 de la Constitution, tel qu'il résulte de l'article 3 de la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005, abrogé par l'article 4 du présent projet de loi.

a. Le contrôle a priori du respect du principe de subsidiarité : l'avis motivé

Afin de mettre le Parlement à même d'exercer les pouvoirs d'opposition à l'adoption d'actes législatifs européens, tels qu'ils résultent de l'article 6 du protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, l'article 88-6 donne tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat la faculté d'émettre un avis motivé sur la conformité d'un projet d'acte législatif européen au principe de subsidiarité.

Les textes européens sur lesquels les deux chambres du Parlement pourront se prononcer ne pourront donc être que des projets d'« actes législatifs ». Cette restriction résulte du texte même de l'article 6 du protocole.

Dans le cadre de l'application du principe de subsidiarité, la notion d'acte législatif est définie par l'article 3 du protocole comme « les propositions de la Commission, les initiatives du Parlement européen, les demandes de la Cour de justice, les recommandations de la Banque centrale européenne et les demandes de la Banque européenne d'investissement, visant à l'adoption d'un acte législatif ». Cette définition doit être lue en combinaison avec celle retenue par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui qualifie d'« acte législatif européen » tout acte devant être adopté par les institutions de l'Union européenne dans le cadre d'une procédure législative -normale ou spéciale- prévue à l'article 289 du même traité.

En conséquence, le contrôle de subsidiarité incombant au Parlement ne pourra pas s'exercer sur les actes non législatifs européens, quand bien même ceux-ci seraient de portée générale.

En revanche, compte tenu de l'absence d'identité entre actes législatifs au sens du traité de Lisbonne et actes législatifs au sens du droit français, le Parlement pourra être amené à contrôler le respect du principe de subsidiarité à l'égard de textes qui pourront avoir un caractère réglementaire au sens du droit français .

Dans le cadre de la mise en oeuvre de ce contrôle, l'Assemblée nationale et le Sénat disposeront, chacun pour ce qui le concerne, d'une totale autonomie tant pour juger du respect du principe de subsidiarité que pour initier en conséquence la procédure d'avis motivé .

Selon le texte proposé, cet avis motivé prendra, dans chaque assemblée, la forme d'une résolution . Celle-ci pourra être adoptée à tout moment, même hors des sessions .

Cette précision est importante dans la mesure où, en vertu de l'article 6 du protocole, pour produire un effet juridique dans le cadre de la procédure d'adoption d'un acte législatif européen, l'avis motivé devra être adressé aux présidents des institutions de l'Union dont émane l'acte dans un délai de huit semaines à compter de la date à laquelle le projet d'acte européen a été transmis. Par rapport au protocole annexé au traité établissant une Constitution pour l'Europe, le délai laissé aux parlements nationaux a ainsi été accru de deux semaines, ce qui favorisera un examen des projets de textes européens dans des conditions plus satisfaisantes.

C'est seulement si ce délai est respecté par le Parlement français que les institutions de l'Union devront juridiquement « tenir compte » de la position exprimée par le Sénat ou l'Assemblée nationale. En outre, seuls les avis motivés adressés dans ce même délai seront pris en compte pour la détermination de la proportion des parlements nationaux permettant :

- soit le réexamen du projet d'acte législatif européen, lorsqu'un tiers des parlements nationaux a adressé un avis motivé -voire lorsqu'un quart d'entre eux a adressé un avis si le projet d'acte relève de la coopération judiciaire en matière pénale ou de la coopération policière ;

- soit, lorsque le projet d'acte législatif est soumis à la procédure législative ordinaire, une prise de décision du Conseil et du Parlement européen sur le respect du principe de subsidiarité, si, à la majorité simple, les parlements nationaux ont adressé un avis motivé et que la Commission européenne maintient son projet.

Conformément à la procédure fixée par le protocole, le texte proposé par le présent projet de loi prévoit qu'il appartiendra au président de chaque assemblée concernée de transmettre l'avis motivé adopté dans le cadre de la résolution aux présidents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission européenne . Cette transmission concernera tant les projets d'actes émanant de l'une de ces institutions que ceux émanant d'un Etat membre ou d'autres institutions de l'Union, le protocole imposant au président du Conseil de transmettre les avis motivés reçus des parlements nationaux à l'institution dont émane le projet d'acte contesté.

Pour assurer la bonne information du pouvoir exécutif, il est prévu que le Gouvernement sera informé de l'avis motivé transmis par l'Assemblée nationale ou le Sénat.

La mise en application de ces dispositions nécessitera, comme le prévoit le texte proposé, une adaptation du règlement de l'Assemblée nationale et du Sénat qui devront prévoir les modalités d'initiative et de discussion de la résolution tendant à l'adoption de l'avis motivé. Il reviendra ainsi à chaque chambre de déterminer, en particulier, les compétences respectives de sa délégation pour l'Union européenne et, le cas échéant, de ses commissions permanentes.

A cet égard, il convient de rappeler que, au regard du règlement du Sénat 49 ( * ) , si les propositions de résolutions européennes peuvent émaner de la délégation pour l'Union européenne, il appartient aux commissions permanentes, compétentes au fond, de les examiner, les propositions de résolutions devenant résolutions du Sénat au terme d'un délai de dix jours francs suivant la date de la distribution du rapport de la commission sauf si, dans ce délai, le président du Sénat, le président d'un groupe, le président de la commission compétente ou d'une commission saisie pour avis, le président de la délégation pour l'Union européenne ou le Gouvernement demande qu'elle soit examinée par le Sénat.

Il y aura donc lieu de s'interroger sur l'application de telles dispositions aux résolutions portant avis motivé au sens du nouvel article 88-6 de la Constitution, notamment au vu du délai d'examen de huit semaines imparti par le protocole annexé au traité de Lisbonne.

Votre commission souligne néanmoins que l'institution de cette procédure formelle de contrôle de la subsidiarité ne doit pas entraîner la disparition des échanges informels préexistant entre les parlements nationaux et la Commission européenne sur la question de la subsidiarité.

En effet, sur la proposition du président de la Commission européenne, entérinée par le Conseil européen réuni les 15 et 16 juin 2006, un dialogue direct s'est engagé sur la subsidiarité entre les organes spécialisés dans les affaires de l'Union européenne -telles les délégations de l'Assemblée nationale et du Sénat pour l'Union européenne- et la Commission européenne, quoique ses résultats paraissent assez mitigés, ainsi que le relève notre collègue Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne : « le bilan du dialogue avec la Commission se ramène à un plus grand effort de justification de ses propositions, en recourant à des arguments qui peuvent paraître de valeur inégale, certains emportant l'approbation, d'autres suscitant l'étonnement. La minceur de ce résultat peut d'autant plus décevoir que les préoccupations exprimées par la délégation, au moins dans certains cas, n'étaient manifestement pas sans fondement, puisque certains des textes en cause ont suscité un débat sur la subsidiarité au sein du Parlement européen ou du Conseil. » 50 ( * )

Les deux procédures -informelle, préexistante, et formelle, instituée par le traité de Lisbonne- s'avèreront en tout état de cause complémentaires.

b. Le contrôle a posteriori : la saisine de la Cour de justice de l'Union européenne

A l'instar de l'article 88-5 de la Constitution, tel que rédigé par la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005, l'article 88-6 proposé par le présent projet de loi offre à l'Assemblée nationale et au Sénat la faculté de saisir de la Cour de justice de l'Union européenne .

Cette mesure permet de sanctionner juridiquement les actes législatifs adoptés par les institutions de l'Union européenne selon les procédures prévues par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qui, par leur objet , auraient contrevenu au principe de subsidiarité . Sur le fondement de l'article 263 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, la Cour de justice sera amenée à juger de la légalité d'un acte législatif européen au regard de ce principe. Dans l'éventualité où sa méconnaissance serait avérée, la Cour de justice déclarera alors l'acte concerné nul et non avenu. 51 ( * )

Sous l'empire du traité instituant la Communauté européenne, la juridiction de Luxembourg a déjà eu à connaître de recours en annulation fondés sur la violation du principe de subsidiarité et a pu examiner la validité d'un acte des institutions communautaires au regard de ce principe, dans le cadre d'un contrôle qui semble limité à l'erreur manifeste d'appréciation 52 ( * ) .

La grande innovation du traité de Lisbonne -qui figurait déjà dans le protocole n° 2 annexé au traité établissant une Constitution pour l'Europe- apparaît néanmoins dans le fait que, pour la première fois, les parlements des Etats membres se voient reconnaître la qualité de requérants devant la Cour de justice. Une telle prérogative découle du premier alinéa de l'article 8 du protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, annexé au traité.

Selon le texte proposé, le droit de former un recours en annulation devant la Cour de justice appartiendra tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, chacune des deux assemblées agissant de manière autonome .

Ce recours en annulation ne pourra néanmoins se fonder que sur le moyen unique de la violation du principe de subsidiarité.

Pour autant, le recours ne sera pas présenté directement par le Sénat ou l'Assemblée nationale devant la Cour de justice. La transmission du recours au greffe de la Cour incombera au Gouvernement, comme le prévoit expressément le protocole annexé au traité de Lisbonne.

Conformément à l'article 263 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, il conviendra, sous peine d'irrecevabilité, que la Cour de justice soit saisie d'un recours en annulation de l'acte contesté dans un délai de deux mois à compter de sa publication, de sa notification ou de la date à laquelle le Parlement en a eu connaissance.

La décision de chacune des assemblées du Parlement de saisir la Cour de justice prendra la forme d'une résolution .

Tout comme dans le cadre du contrôle a priori du respect du principe de subsidiarité, il reviendra au règlement de chaque assemblée de déterminer les modalités d'initiative et de discussion de ces résolutions. Là encore, il conviendra de prendre en compte la très grande brièveté du délai de saisine de la Cour de justice pour déterminer la procédure idoine au sein du Sénat et de l'Assemblée nationale.

Article 88-7 (nouveau) de la Constitution Droit d'opposition du Parlement à la modification des règles d'adoption de certains actes de l'Union européenne

L'article 88-7 nouvellement introduit dans la Constitution a pour objet de permettre l'application en droit français du droit d'opposition reconnu aux parlements nationaux par l'article 48 du traité sur l'Union européenne et l'article 81 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

La nécessité d'une disposition constitutionnelle spécifique découle de la décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007 du Conseil constitutionnel qui a estimé, par référence à sa décision n° 2004-505 DC relative au traité établissant une Constitution pour l'Europe, que le droit d'opposition à l'adoption d'actes de l'Union européenne par suite d'une révision simplifiée du traité nécessitait une disposition expresse de la Constitution en ce sens 53 ( * ) .

a. Un droit d'opposition restreint à deux hypothèses

Conformément aux stipulations du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le texte proposé pour l'article 88-7 de la Constitution instaure un droit d'opposition du Parlement français dans deux circonstances .

- La mise en oeuvre d'une procédure de révision simplifiée des traités européens

La première hypothèse dans laquelle le droit d'opposition du Parlement trouvera à s'appliquer est la modification des règles d'adoption d'actes « au titre de la révision simplifiée des traités ».

L'article 48 du traité sur l'Union européenne prévoit en effet, à côté de la procédure de révision « ordinaire » des traités européens, deux procédures de révision « simplifiée » ne comportant pas la réunion d'une conférence intergouvernementale. L'une de ces procédures, couramment appelée « clause passerelle », confère expressément un droit d'opposition aux parlements des Etats membres.

Cette clause passerelle -semblable à celle qui figurait à l'article IV-444 du traité établissant une Constitution pour l'Europe- peut jouer à deux égards :

- d'une part, pour autoriser le Conseil à statuer à la majorité qualifiée lorsque le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ou le titre V du traité sur l'Union européenne prévoit que le Conseil statue à l'unanimité . Une telle modification du processus de décision est cependant exclue pour les décisions ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense ;

- d'autre part, pour autoriser l'adoption d'un acte législatif européen selon la procédure législative normale -c'est-à-dire dans le cadre d'une procédure de codécision entre le Parlement européen et le Conseil, statuant à la majorité qualifiée-, lorsque le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit l'usage d'une procédure législative spéciale 54 ( * ) .

Ces clauses passerelles ne peuvent être mises en oeuvre que par une décision du Conseil européen statuant à l'unanimité , après approbation du Parlement européen, ce dernier se prononçant à la majorité de ses membres.

Or, le troisième alinéa du 7 de l'article 48 du traité sur l'Union européenne permet à tout parlement national de s'opposer à l'adoption par le Conseil européen d'une telle décision .

A cet effet, toute initiative prise par le Conseil européen visant à prévoir l'utilisation d'une clause passerelle doit être transmise aux parlements nationaux 55 ( * ) . Ceux-ci disposent alors d'un délai de six mois à compter de cette transmission pour signifier leur éventuelle opposition au recours à cette clause.

En cas d'opposition d'un seul parlement national, le Conseil européen ne peut adopter de décision mettant en oeuvre la clause passerelle . A l'inverse, en l'absence d'opposition, le Conseil européen peut adopter ladite décision.

- La détermination des matières relevant du droit de la famille dans lesquelles l'Union européenne peut légiférer selon la procédure législative ordinaire

Le second cas d'opposition reconnu au Parlement par l'article 88-7 de la Constitution concerne la modification des règles d'adoption des actes relevant de la « coopération judiciaire civile ».

L'article 81 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui vise à développer la coopération judiciaire civile entre les Etats membres, comporte également une « clause passerelle ».

Si cette disposition prévoit que, dans les domaines ayant une incidence transfrontalière, les actes concernant la coopération judiciaire civile sont en principe adoptés selon la procédure législative « ordinaire », en revanche les mesures relatives au droit de la famille ayant une incidence transfrontière sont établies par le Conseil, statuant à l'unanimité, après consultation du Parlement européen.

Néanmoins, le deuxième alinéa du 3 de l'article 81 du même traité autorise le Conseil, sur proposition de la Commission européenne, à adopter une décision déterminant les aspects du droit de la famille ayant une incidence transfrontière susceptibles de faire l'objet d'actes adoptés selon la procédure législative ordinaire, c'est-à-dire selon la règle de la majorité qualifiée et en codécision avec le Parlement européen. Cette décision du Conseil doit être adoptée à l'unanimité , après consultation du Parlement européen.

L'utilisation de cette clause est cependant soumise à l'aval de chacun des parlements des Etats membres de l'Union européenne.

Ainsi, en cas d'opposition d'un parlement national notifiée dans un délai de six mois après la transmission la proposition de décision du Conseil, cette décision ne peut être adoptée. En l'absence d'opposition, le Conseil peut adopter ladite décision

b. La procédure requise : l'exigence d'une motion adoptée en termes identiques

Dans la mesure où les articles 48 du traité sur l'Union européenne et 81 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoient un droit d'opposition à tout parlement national, le texte proposé pour l'article 88-7 de la Constitution placent l'Assemblée nationale et le Sénat sur un pied d'égalité en requérant le vote par les deux assemblées d'une motion en termes identiques.

Sur ce point, le dispositif proposé est identique à celui prévu par la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005. Il appelle donc les mêmes remarques que celles faites par votre rapporteur lors de son examen 56 ( * ) :

- la rédaction retenue implique nécessairement un vote en séance plénière ;

- ayant pour objet exclusif de marquer un refus et étant dispensée de toute obligation de motivation, la motion a vocation à être approuvée ou rejetée « en bloc » et ne devrait donc pas pouvoir faire l'objet d'amendements ; elle ne donnera donc pas lieu à une véritable « navette » entre les deux assemblées.

En tout état de cause, bien que le projet de loi constitutionnelle ne le précise pas, les modalités d'initiative et de discussion de ce type de motion devront être déterminées par le règlement de chaque assemblée .

Dans le cadre de l'adaptation de ce règlement, il pourrait ainsi être envisagé d'appliquer à cette motion la procédure prévue pour l'adoption d'une motion permettant, en application de l'article 11 de la Constitution, de demander au Président de la République, par une proposition conjointe, la soumission au référendum d'un projet de loi 57 ( * ) .

Les rôles respectifs des délégations pour l'Union européenne et des commissions permanentes de chacune des assemblées devront être définis à cette occasion.

En outre, dans la mesure où, contrairement à l'article 88-6 de la Constitution, le texte de l'article 88-7 ne définit pas les conditions dans lesquelles la motion adoptée par l'Assemblée nationale et le Sénat sera portée à la connaissance des institutions de l'Union européenne 58 ( * ) , il reviendra aux règlements des assemblées de déterminer la procédure à suivre.

On peut s'interroger sur le fait de savoir si l'absence de dispositions similaires à celles prévues pour l'article 88-6 pourra permettre aux règlements des assemblées de prévoir que la motion sera adressée par le président de la seconde assemblée saisie soit au président du Conseil européen 59 ( * ) , soit au président du Conseil de l'Union européenne 60 ( * ) .

A défaut, les règlements des assemblées pourront prévoir que la motion adoptée en termes identiques sera adressée au Gouvernement à charge pour ce dernier de la transmettre au président du Conseil européen ou du Conseil, selon le cas.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 sans modification.

Article 3 (art. 3 et 4 de la loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1er mars 2005 modifiant le titre XV de la Constitution) Abrogation des dispositions constitutionnelles liées à l'entrée en vigueur du traité établissant une constitution pour l'Europe - Maintien du recours au référendum pour les futures adhésions à l'Union européenne

Cet article tend à modifier deux dispositions de la loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1 er mars 2005 modifiant le titre XV de la Constitution. En l'absence de règle spéciale dans le projet de loi, ses dispositions entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi constitutionnelle au Journal officiel.

1. L'abrogation des dispositions constitutionnelles liées à l'entrée en vigueur du traité établissant une Constitution pour l'Europe

Le de l'article 3 du présent projet de loi procède à l'abrogation de l'article 3 de la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005.

Ce dernier article, qui prévoit la réécriture complète du titre XV de la Constitution, n'est actuellement pas applicable dans la mesure où son entrée en vigueur avait été différée à la date d'entrée en vigueur du traité établissant une Constitution pour l'Europe.

L'absence de ratification de ce traité par plusieurs Etats membres de l'Union européenne, dont la France, a rendu ces dispositions caduques .

Comme l'a souligné M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat chargé des affaires européennes, lors de son audition par votre commission, cette disposition concrétise juridiquement l'abandon, lors du Conseil européen de juin 2007, de la démarche constitutionnelle européenne .

En outre, dans la mesure où l'article 2 du présent projet de loi procède lui-même à une réécriture d'une partie importante du titre XV de la Constitution en prévision de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l'abrogation pure et simple des dispositions de l'article 3 de la loi du 1 er mars 2005 constitue une mesure de bonne technique législative.

2. Le maintien de la neutralisation temporaire de l'obligation de recourir au référendum pour les nouvelles adhésions à l'Union européenne

Le de cet article procède à des modifications de coordination à l'article 4 de la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005.

Ce dernier a en effet prévu -sans que ces dispositions soient inscrites dans le corps même de la Constitution- que l'obligation pour le président de la République de soumettre à référendum tout projet de loi autorisant la ratification d'un nouveau traité d'adhésion à l'Union européenne ou aux Communautés européennes ne sera pas applicable aux adhésions faisant suite à une conférence intergouvernementale dont la convocation a été décidée par le Conseil européen avant le 1 er juillet 2004.

Ainsi que votre rapporteur avait eu l'occasion de le préciser en 2005, cette neutralisation temporaire de l'obligation référendaire avait pour but de permettre l'adoption par la voie parlementaire des projets de loi autorisant la ratification des traités d'adhésion à l'Union européenne de la Roumanie, de la Bulgarie et de la Croatie, pour lesquelles des conférences inter-gouvernementales avaient été convoquées par le Conseil européen avant le 1 er juillet 2004.

En revanche, en cas d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, le recours au référendum est obligatoire puisque la décision d'organiser une conférence intergouvernementale n'a été prise par le Conseil européen que les 15 et 16 décembre 2004, soit après le 1 er juillet 2004.

Il en est de même en cas d'adhésion de la République de Macédoine, dont le statut de pays candidat à l'adhésion n'a été reconnu par le Conseil européen que le 16 décembre 2004.

Depuis la promulgation de la loi du 1 er mars 2005, la Roumanie et la Bulgarie ont adhéré à l'Union européenne, le projet de loi de ratification du traité d'adhésion de ces deux Etats étant été adopté par la voie parlementaire 61 ( * ) . Seule l'adhésion de la Croatie pourrait donc, à l'avenir, être soustraite à l'obligation référendaire .

La modification proposée par le présent article se borne à supprimer la référence à l'entrée en vigueur du traité établissant une Constitution pour l'Europe, qui n'a plus lieu d'être, ainsi qu'à l'article 88-7 de la Constitution dans sa version issue de la loi du 1 er mars 2005 .

Dans la contribution écrite qu'il a adressée à votre rapporteur, M. Bertrand Mathieu, professeur à l'Université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne), a estimé que, d'un point de vue politique, il était vraisemblablement préférable de laisser épuiser les effets de l'article 88-5, qui deviendront ainsi caduques, mais que, du point de vue de la cohérence du travail législatif, il était regrettable de différer l'examen de la pertinence de cette disposition à une révision ultérieure de la Constitution.

Comme elle l'a souligné au sujet du maintien de l'article 88-5 de la Constitution 62 ( * ) , votre commission estime qu'il conviendra que la prochaine révision de la Constitution sur la base des travaux du Comité de réflexion et de proposition pour la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la V ème République envisage la suppression de ce dispositif.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 sans modification.

*

* *

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, votre commission vous propose d'adopter sans modification le projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution.

* 1 Article 54 de la Constitution : « Si le Conseil constitutionnel, saisi par le Président de la République, par le Premier ministre, par le président de l'une ou l'autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs, a déclaré qu'un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de ratifier ou d'approuver l'engagement international en cause ne peut intervenir qu'après la révision de la Constitution ».

* 2 De ce fait, la décision du 20 décembre 2007 procède à plusieurs reprises par référence à la décision n° 2004-505 du 19 novembre 2004.

* 3 Selon la procédure législative ordinaire, à l'exception des mesures relatives au droit de la famille ayant une incidence transfrontière pour lesquelles le Conseil statue en principe à l'unanimité après consultation du Parlement européen.

* 4 Voir les articles 31 et 34 du traité sur l'Union européenne, dans leur version antérieure au traité de Lisbonne.

* 5 Voir les articles 62 et 65 du traité instituant la Communauté européenne, dans leur version antérieure au traité de Lisbonne.

* 6 Par ailleurs, la déclaration n° 4 annexée traité de Lisbonne prévoit l'adoption par le Conseil, lors de l'entrée en vigueur du traité, d'une décision réactivant le « compromis de Ionanina » afin d'atténuer l'effet couperet de la règle de la double majorité. Ce compromis implique que, lorsque lors de votes au Conseil, une minorité de blocage tend à se dégager, ses membres cherchent à obtenir, « dans un délai raisonnable », une majorité qualifiée supérieure à celle en principe nécessaire pour adopter une décision.

* 7 Premier et deuxième alinéas de l'article 61 de la Constitution : « Les lois organiques, avant leur promulgation, et les règlements des assemblées parlementaires, avant leur mise en application, doivent être soumis au Conseil constitutionnel qui se prononce sur leur conformité à la Constitution.

« Aux mêmes fins, les lois peuvent être déférées au Conseil constitutionnel, avant leur promulgation, par le Président de la République, le Premier ministre, le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat ou soixante députés ou soixante sénateurs ».

* 8 Chaque parlement national dispose de deux voix. Lorsqu'il s'agit d'un parlement bicaméral, comme en France, chaque chambre dispose d'une voix.

* 9 C'est-à-dire les dispositions relatives à l'action extérieure de l'Union européenne et à la politique étrangère et de sécurité commune.

* 10 Voir en particulier les décisions n° s 2004-496 DC du 10 juin 2004, 2004-497 DC du 1 er juillet 2004 et 2004-498 DC du 29 juillet 2004.

* 11 n° 18.

* 12 Décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007, considérant n° 9.

* 13 Voir les décisions n° s 2004-496 DC du 10 juin 2004, 2004-497 DC du 1 er juillet 2004 et 2004-498 DC du 29 juillet 2004 ainsi que la décision n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006.

* 14 Décisions n° s 92-308 DC du 9 avril 1992 et n° 92-312 du 2 septembre 1992 et loi constitutionnelle n° 92-554 du 25 juin 1992.

* 15 Décision n° 93-325 DC du 13 août 1993 et loi constitutionnelle n° 93-1256 du 25 novembre 1993.

* 16 Décision n° 97-394 DC du 31 décembre 1997 et loi constitutionnelle n° 99-49 du 25 janvier 1999.

* 17 Avis du Conseil d'Etat rendu le 26 septembre 2002 sur saisine du Premier ministre en application de l'article 23 de l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945 et loi constitutionnelle n° 2003-267 du 25 mars 2003. Voir également le commentaire de l'article 2 du projet de loi.

* 18 Décision° 2004-505 DC du 19 novembre 2004 et loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1 er mars 2005.

* 19 Rédaction proposée pour les articles 88-1 et 88-2 de la Constitution :

« Art. 88-1.- La République participe à l'Union européenne constituée d'Etats qui ont choisi librement d'exercer en commun certaines de leurs compétences dans le cadre des traités sur lesquels repose l'Union européenne et de leurs modifications. »

« Art. 88-2.- Si le Conseil Constitutionnel, saisi par le Président de la République, par le Premier Ministre, par le Président de l'une ou l'autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs, a déclaré qu'un nouvel engagement pris dans le cadre de l'Union européenne comporte une clause contraire à l'identité constitutionnelle, la ratification ou l'approbation de l'engagement en cause ne peut intervenir qu'en vertu d'une loi constitutionnelle autorisant la ratification et procédant en cas de besoin à la révision de la Constitution. »

* 20 La notion d'identité constitutionnelle reste floue. Toutefois, le Conseil constitutionnel a consacré cette notion, sans la définir, dans sa décision n° 2006-540 du 27 juillet 2006. Il y affirme qu'il censurerait une loi de transposition d'une directive si elle allait à l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France. Cette notion fait également écho aux formules mêmes employées par le droit de l'Union européenne, l'article 6, paragraphe 3, du traité sur l'Union européenne dans sa rédaction issue du traité d'Amsterdam stipulant, par exemple, que « l'Union respecte l'identité nationale de ses États membres ». En outre, le paragraphe 2 de l'article 4 du traité sur l'Union européenne dans sa rédaction issue du traité de Lisbonne stipulera que « l'Union respecte l'égalité des États membres devant les traités ainsi que leur identité nationale, inhérente à leurs structures fondamentales politiques et constitutionnelles ».

* 21 Voir le rapport n° 568 (Assemblée nationale - XIIIème lég.) de M. Jean-Luc Warsmann au nom de la commission des Lois.

* 22 Voir l'avis n° 563 (Assemblée nationale - XIIIème lég.) de M. Hervé de Charette au nom de la commission des Affaires étrangères.

* 23 Si au 1 er janvier 2009 tous les Etats membres n'ont pas ratifié le traité de Lisbonne, celui-ci entrera en vigueur le premier jour du mois suivant la dernière ratification.

* 24 Rapport n° 180 (2004-2005) fait au nom de la commission des lois du Sénat, disponible à l'adresse : http://www.senat.fr/rap/l04-180/l04-180.html

* 25 Voir le rapport d'information n° 43 (Sénat, 2006-2007), disponible à l'adresse : http://www.senat.fr/noticerap/2006/r06-043-notice.html

Voir également le rapport d'information n° 418 (Sénat, 2006-2007), disponible à l'adresse : http://www.senat.fr/noticerap/2006/r06-418-notice.html

* 26 La ratification d'un traité nécessite une révision préalable de la Constitution lorsqu'il comporte des clauses qui sont contraires à la loi fondamentale, mettent en cause les droits et libertés constitutionnellement garantis ou portent atteintes aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale. Voir notamment la décision n° 98-408 DC du 22 janvier 1999 sur le traité portant statut de la Cour pénale internationale ainsi que le considérant n° 9 de la décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007.

* 27 Si au 1 er janvier 2009 tous les Etats membres n'ont pas ratifié le traité de Lisbonne, celui-ci entrera en vigueur le premier jour du mois suivant la dernière ratification.

* 28 Décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007, considérant n° 7.

* 29 En 2001, le traité de Nice avait été rejeté par une majorité d'électeurs irlandais.

* 30 Le 1 er janvier 2009 au plus tôt ou le premier jour du mois suivant la dernière ratification.

* 31 Les clauses du traité de Lisbonne identifiées comme contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 mars 2007 figurent au I A de l'exposé général.

* 32 A l'exception des modifications résultant de l'exercice des « clauses passerelles » prévues par le traité de Lisbonne. Voir le commentaire pages 54 et suivantes.

* 33 Voir l'exposé général, pages 24 et 25.

* 34 Avis rendu le 26 septembre 2002 sur saisine du Premier ministre en application de l'article 23 de l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945.

* 35 Prise sur le fondement de l'article 31 (ex-article K 3) du traité sur l'Union européenne, relatif à la coopération judiciaire en matière pénale, cette décision-cadre a pour objet de faire disparaître entre les Etats membres la procédure traditionnelle d'extradition, qui implique l'intervention du pouvoir exécutif, au profit d'un mandat d'arrêt directement transmis d'autorité judiciaire à autorité judiciaire. Elle repose sur le principe de reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires.

* 36 Ce principe a été dégagé par le Conseil d'Etat dans son avis n° 357-344 du 9 novembre 1995 et dans un arrêt du 3 juillet 1996, Moussa Koné.

* 37 Décisions n° s 2004-496 DC du 10 juin 2004, 2004-497 DC du 1 er juillet 2004 et 2004-498 DC du 29 juillet 2004.

* 38 Le gouvernement ainsi que le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale s'étaient opposés à l'amendement de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale présenté sur proposition de MM. Roland Blum, Édouard Balladur et Hervé de Charrette au motif qu'il remettait en cause la séparation des pouvoirs qui passe notamment par la séparation des domaines législatifs et réglementaires.

* 39 Les documents transmis pour simple information, en dehors du cadre de l'article 88-4, s'élèvent à plus d'un millier par an.

* 40 Voir ci-après, pages 48 et suivantes.

* 41 Conférence de presse à l'occasion du sommet franco-allemand du 1 er octobre 2004.

* 42 Réserve maintenue par l'article 3 du présent projet de loi.

* 43 Voir infra, le commentaire de l'article 3 du présent projet de loi.

* 44 « Une V ème République plus démocratique », rapport remis au président de la République le 24 octobre 2007.

* 45 M. Joël Rideau a ainsi proposé la rédaction suivante : « Le Parlement peut exercer les prérogatives reconnues aux parlements nationaux par les traités relatifs à l'Union européenne.

« Les prérogatives reconnues à chacune des assemblées composant les Parlements nationaux sont exercées par des résolutions pouvant être adoptées, le cas échéant en dehors des sessions, selon des modalités d'initiative et de discussion fixées par le règlement de chaque assemblée.

« Les prérogatives reconnues aux Parlements nationaux sont exercées par le vote d'une motion en termes identiques par les deux assemblées. »

* 46 Article premier du protocole.

* 47 Article 2 du protocole.

* 48 Protocole n° 2 sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, annexé au traité établissant une Constitution pour l'Europe.

* 49 Article 73 bis du règlement.

* 50 « Dialogue avec la Commission européenne sur la subsidiarité », rapport d'information n° 88 (Sénat, 2007-2008) de M. Hubert Haenel au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, p. 27., disponible à l'adresse : http://www.senat.fr/noticerap/2007/r07-088-notice.html

* 51 Article 264 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

* 52 Voir notamment l'arrêt du 12 novembre 1996, Royaume-Uni contre Conseil de l'Union européenne, affaire C-84/94, conclusions Léger.

* 53 Considérant n° 29 de la décision n° 2007-560 DC.

* 54 Par exemple, la simple consultation du Parlement européen.

* 55 Aux termes de l'article 6 du protocole sur le rôle des parlements nationaux dans l'Union européenne : « lorsque le Conseil envisage de recourir à l'article 48, paragraphe 1 ou 2, du traité sur l'Union européenne, les parlements nationaux sont informés de l'initiative du Conseil européen au moins six mois avant qu'une décision ne soit adoptée. »

* 56 Rapport n° 180 (Sénat, 2004-2005), pp. 58-59.

* 57 Articles 67 à 69 du règlement du Sénat.

* 58 Le traité de Lisbonne n'évoque pas davantage cette question.

* 59 Si la motion concerne une clause passerelle prévue à l'article 48 du traité sur l'Union européenne, dans la mesure où la mise en oeuvre de cette clause relève d'une décision du Conseil européen.

* 60 Si la motion est relative à la clause passerelle de l'article 81 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, dès lors que sa mise en oeuvre découle d'une décision du Conseil de l'Union européenne.

* 61 Loi n° 2006-1254 du 13 octobre 2006 autorisant la ratification du traité relatif à l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne. Voir le rapport n° 489 (Sénat, 2005-2006) de M. Jacques Blanc , fait au nom de la commission des affaires étrangères ; consultable à l'adresse : http://www.senat.fr/rap/l05-489/l05-489.html

* 62 Voir supra, le commentaire de l'article 2 du présent projet de loi constitutionnelle.

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