B. D'IMPORTANTS PROBLÈMES ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX

1. La dépendance économique

Du fait notamment des handicaps structurels décrits ci-dessus, la situation économique des collectivités ultramarines est marquée par une grande dépendance, d'une part, vis-à-vis des économies extérieures et notamment de la métropole et, d'autre part, vis-à-vis des emplois publics .

Outre leur éloignement par rapport à la France, ces territoires peuvent aussi se trouver très éloignés de leurs partenaires économiques importants les plus proches : Papeete est à 5.700 kilomètres de l'Australie et à 6.200 kilomètres des Etats-Unis.

Cette situation géographique a pour conséquence un déséquilibre économique et social important entre les collectivités territoriales d'outre-mer et leurs voisins géographiques directs , qui sont majoritairement des pays en voie de développement, alors que le niveau de vie dans ces collectivités françaises s'approche du niveau de vie moyen de la métropole et a vocation à le rejoindre. Il en résulte une difficile intégration économique des collectivités d'outre-mer dans leur environnement géographique proche : les populations voisines n'ont, en général, que des ressources financières limitées et les conditions de production dans les collectivités d'outre-mer, où les standards économiques et sociaux sont ceux de la métropole, constituent également un obstacle aux échanges de biens et de services avec les économies périphériques.

De ce fait, malgré la distance, la majorité des échanges commerciaux des collectivités territoriales d'outre-mer se fait avec la métropole. D'après les informations transmises à votre commission des finances par le secrétariat d'Etat à l'outre-mer, la métropole représente ainsi 50 % à 60 % des échanges extérieurs des DOM et l'Europe, hors métropole, environ 10 % à 15 %.

S'ajoutent à cette dépendance de faibles taux de couverture 1 ( * ) des collectivités territoriales d'outre-mer , caractéristiques de leurs handicaps économiques.

Taux de couverture en 2007

Taux de couverture

Guadeloupe

6,2 %

Martinique

13,2 %

Guyane

12,4 %

La Réunion

6,7 %

Mayotte

1,8 %

Nouvelle-Calédonie

73,2 %

Polynésie française

10,4 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

10,1 %

Source : secrétariat d'Etat à l'outre-mer

L'agriculture reste, certes, un secteur essentiel de l'activité économique en outre-mer, notamment dans les départements d'outre-mer. Toutefois, les productions sont très spécialisées, d'où il résulte une grande sensibilité aux aléas des marchés agricoles . Par ailleurs, l'agriculture contribue faiblement à la création de valeur ajoutée.

L'ensemble des interlocuteurs rencontrés par vos rapporteurs ont convenu que le secteur des bâtiments et travaux publics (BTP) constitue le principal moteur de l'activité économique des départements d'outre-mer . Ce secteur est traditionnellement alimenté par deux éléments : d'une part, la commande publique et, d'autre part, la construction de logements, dont le rythme s'est accéléré depuis 2003 du fait de la mise en place des dispositifs de défiscalisation en matière de logement par la loi dite « Girardin » 2 ( * ) .

Enfin, le tourisme est, pour une grande partie des collectivités territoriales d'outre-mer, une source d'activités importantes et la perspective de développement la plus sérieuse . Toutefois, en raison de facteurs divers, les années touristiques récentes ont été particulièrement mauvaises pour un certains nombre de collectivités. A titre d'exemple, le nombre de touristes à La Réunion, en 2006, s'est élevé à moins de 280.000, contre plus de 430.000 en 2003, en raison essentiellement de l'épidémie de Chikungunya. En Martinique, la fréquentation touristique a stagné en 2007, du fait à la fois du cyclone Dean, de l'épidémie de dengue et de la polémique autour du chlordécone. Dans d'autres collectivités, comme Mayotte, le tourisme reste encore à un stade embryonnaire.

Plusieurs facteurs expliquent le retard de développement touristique de l'outre-mer français, par rapport au développement d'autres territoires 3 ( * ) : l'éloignement, qui entraîne un surcoût important en matière de transport, les risques naturels, qui fragilisent les équipements et les installations, le déficit d'investissement des entreprises locales, les coûts du crédit plus élevé, l'étroitesse des marchés, un déficit de compétitivité par rapport à la plupart des économies qui leur sont géographiquement proches, ainsi qu'un coût du travail plus important.

Enfin, comme le relevait le rapport de votre commission des finances sur la loi de programme pour l'outre-mer de 2003 4 ( * ) , deux facteurs grèvent la productivité des économies ultramarines : d'une part, des coûts d'acheminement élevés , qui renchérissent les productions locales et, d'autre part, des niveaux de formation initiale et professionnelle inférieurs aux niveaux métropolitains . Votre commission des finances concluait ainsi que « la valeur ajoutée par salarié est donc mécaniquement plus faible. Le rapport avec la métropole varie de 0,42 (Guadeloupe) à 0,61 (La Réunion). Le handicap lié à la faiblesse de la productivité se situe donc entre 30 % et 60 % par rapport à la métropole ».

Outre cette dépendance vis-à-vis des économies extérieures, les collectivités territoriales d'outre-mer sont fortement tributaires de l'emploi public. Ainsi, le secteur public représente, dans les collectivités territoriales d'outre-mer, une part plus importante de l'emploi total que celle qu'il représente en métropole , comme l'indique le tableau ci-après. La commande publique est également un de moteurs essentiels des économies ultramarines.

Part des emplois publics dans l'emploi total

Martinique

43,6 %

Guadeloupe

36,5 %

Guyane

42,0 %

La Réunion

44,4 %

Mayotte

47,4 %

Polynésie française

32,4 %

Nouvelle-Calédonie

39,1 %

Wallis-et-Futuna

65,0 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

33,4 %

Métropole

30,3 %

Source : secrétariat d'Etat à l'outre-mer

L'ensemble de ces éléments permet de conclure à la faiblesse de l'activité économique endogène des économies ultramarines , seule à même de garantir un développement économique pérenne et stable.

* 1 Rapport entre leurs exportations et leurs importations.

* 2 Loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer.

* 3 Voir l'avis du Conseil économique et social, 2007, « Le tourisme, perspective d'avenir de l'outre-mer français », présenté par Mme Cécile Felzines.

* 4 Rapport n° 296 (2002-2003), Loi de programme pour l'outre-mer, Roland du Luart, commission des finances.

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