IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : APPROUVER LA CRÉATION DES SOCIÉTÉS PUBLIQUES LOCALES EN RENFORÇANT LEUR RÉGIME JURIDIQUE

Les sociétés publiques locales sont des instruments utiles qui doivent offrir toutes garanties aux collectivités locales afin d'exécuter, dans les conditions optimums de rapidité et de sécurité juridique, les missions d'intérêt général relevant de leur stricte compétence.

Le renforcement des moyens d'action des collectivités locales

Votre commission adhère à la démarche des auteurs de la proposition de loi : celle-ci offre aux collectivités territoriales un élément de souplesse susceptible de leur permettre d'exercer leurs compétences avec plus d'efficacité et de rapidité tout en respectant la réglementation communautaire puisque les prestations en cause seront réalisées pour le compte exclusif des collectivités.

La proposition constitue également le moyen de mettre un terme à une situation paradoxale puisqu'une collectivité locale peut créer une SEML pour être son « bras armé » mais doit, dans l'état actuel du droit, engager les procédures de mise en concurrence pour la réalisation des opérations pour lesquelles la SEML a pu être créée.

Il importe de souligner que les Etats-membres de l'Union européenne 5 ( * ) autres que la France se sont déjà dotés de la faculté de créer des sociétés détenues à 100 % par des autorités publiques.

Les sociétés 100 % publiques dans les Etats membres
de l'Union européenne

80 % des entreprises publiques locales européennes sont entièrement détenues par des actionnaires publics, notamment en :

Allemagne : aucune règle de plancher ou de plafond n'est fixée pour la composition du capital

Autriche : système identique à celui de l'Allemagne (le plus souvent, les communes détiennent 100 % du capital)

Belgique : système identique à celui des deux précédents pays. En outre, les communes disposent toujours de la majorité des voix et de la présidence de la société, quelque soit leur participation au capital

Danemark : une seule collectivité locale ne peut détenir plus de 49 % d'une entreprise publique locale sauf pour certaines activités pour lesquelles la collectivité peut être actionnaire à 100 %

Espagne : aucun seuil de participation minimal ou maximal au capital des sociétés (le plus souvent, le capital est 100 % public)

Finlande : système identique mais le plus souvent les collectivités détiennent 100 % du capital des entreprises publiques locales

Grèce : le capital des entreprises publiques locales est le plus souvent détenu à 100 % par des collectivités locales

Irlande : pas de règles spécifiques

Pays-Bas : aucune réglementation (les sociétés mixtes sont rares)

Pologne : pas de règle spécifique

Portugal : seulement un seuil minimal de 50 % fixé (le capital est le plus souvent détenu à 100 % par les collectivités locales)

Suède : aucune réglementation particulière. Le capital des entreprises publiques locales est généralement détenu à 100 % par les collectivités locales

Source : « Les entreprises publiques locales dans les 25 pays de l'Union européenne », Fédération des entreprises publiques locales et Dexia (2004).

Par ailleurs, il s'agit, aujourd'hui, pour le législateur de mettre en place au-delà du seul secteur de l'aménagement l'institution qu'il a créée en 2006 avec les SPLA. Même si elles sont de création trop récente pour procéder à un bilan complet de leur mise en oeuvre, la courte pratique a déjà permis de constater l'utilité de ces structures et permettre une avancée de leur régime par la réduction du nombre minimum de leurs actionnaires.

La modification introduite par la loi du 25 mars dernier répond aux considérations pratiques pouvant fonder la mise en place de telles sociétés.

Le choix d'un statut sécurisé

Votre commission retient l'adoption d'un dispositif qui encadre la création et le fonctionnement de ces nouvelles structures : à cette fin, les procédures de contrôle seront indispensables pour leur permettre de fonctionner en toute transparence et dans un cadre strict.

Ainsi, votre rapporteur approuve le choix de la forme sociétale -la société par actions- : il considère qu'elle permet une information transparente sur la réalité des coûts et des risques.

Complétée par le régime spécifique des SEML, le dispositif proposé offre une palette d'outils susceptibles d'assurer pleinement l'information et le contrôle des collectivités actionnaires :

- représentation dans les organes dirigeants de la société ;

- nomination et révocation des présidents et des directeurs généraux de la société ;

- missions des commissaires aux comptes ;

- intervention des assemblées délibérantes dans la vie sociale ;

- contrôle de légalité des actes principaux affectant l'organisation et le fonctionnement de la SPL ;

- saisine de la Chambre régionale des comptes.

En tout état de cause, il importe que les règles posées par le législateur soient scrupuleusement respectées, tant dans la rédaction des statuts que dans la vie sociale, afin de ne pas enfreindre les règles communautaires édictées pour assurer le jeu de la concurrence.


Des sûretés supplémentaires

Au-delà des dispositifs précédemment rappelés, votre commission a considéré que l'actionnariat unique pouvait présenter un risque de dérive et qu'en conséquence, dans l'intérêt même des collectivités, il était préférable de maintenir la présence obligatoire de deux actionnaires au moins : celle-ci constitue un filtre supplémentaire pour assurer le respect de l'objectif assigné par le législateur à ces sociétés pour servir l'intérêt général.

De même, votre commission considère que la faculté offerte par l'article 2 de la proposition de préférer la forme de la société par actions simplifiées (SAS) à celle de société anonyme pour la constitution de SPLA n'était pas conforme à l'intérêt des collectivités, les dispositions réglementant les SAS ne présentant pas la même protection que celles applicables aux SA. La société par actions simplifiée, en effet, est régie principalement par la liberté contractuelle ; elle est soumise à un minimum de règles impératives qui fixe un capital social minimum, lui interdit de faire publiquement appel à l'épargne, soumet les dirigeants aux mêmes responsabilités que les membres du conseil d'administration et du directoire, institue un contrôle des conventions autres que courantes, impose l'intervention de l'assemblée des actionnaires pour autoriser la modification du capital, la fin de vie de la société, la nomination des commissaires aux comptes, dont la présence est obligatoire, l'approbation des comptes annuels et l'affectation du bénéfice, exige l'unanimité des associés pour modifier les clauses portant atteinte aux droits fondamentaux de l'actionnaire.

Aussi votre commission recommande-t-elle l'abandon de la forme sociétale de la SAS pour la création des sociétés publiques locales d'aménagement.

Enfin, dans l'esprit de la jurisprudence communautaire considérant que l'activité des sociétés publiques locales doit être consacrée principalement à la ou les collectivités actionnaires, votre commission vous propose de préciser que ces sociétés publiques locales doivent impérativement réaliser leurs activités sur le territoire des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités territoriales actionnaires.

La commission des Lois a adopté le texte de la proposition de loi en modifiant l'article premier et en s'en rapportant à son auteur pour les modifications à apporter à l'article 2.

* 5 Dans l'ensemble des 25 Etats-membres de l'Union européenne, les entreprises publiques locales, au nombre de 16.000 tous statuts confondus, emploient 1.125.000 salariés et réalisent un chiffre d'affaires de 140 milliards € .

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