EXAMEN DES ARTICLES

Article premier (art. L. 1522-1 du code général des collectivités territoriales) - Création de sociétés publiques locales

L'article premier propose de compléter le livre V du code général des collectivités territoriales consacré aux dispositions économiques par la création d'un nouvel instrument au service de l'interventionnisme économique des collectivités : la société publique locale (SPL).

La proposition de loi détermine sans ambiguïté le rôle de ces entités qui doivent exercer leurs activités pour le compte de leurs seuls actionnaires.

Elles peuvent être mises en place pour réaliser des opérations d'aménagement et de construction ou pour exploiter des services publics à caractère industriel et commercial ou toutes autres activités d'intérêt général.

Ces sociétés sont constituées sous la forme de sociétés anonymes régies par le code de commerce, sous réserve de l'application des dispositions spécifiques prévues par le code général des collectivités territoriales pour les sociétés d'économie mixte locales (SEML).

Le capital social est entièrement public. Il est détenu en totalité par des collectivités territoriales et leurs groupements à moins que ceux-ci s'associent à des établissements publics (chambres de commerce et d'industrie, offices publics d'HLM...) : dans ce cas, les collectivités sont majoritaires dans le capital.

La forme sociale retenue offre un certain nombre de garanties susceptibles de protéger les collectivités territoriales.

Les règles applicables à la SA visent à protéger et prendre en compte les intérêts des actionnaires :

en organisant tout d'abord leur information et en les dotant des moyens nécessaires pour l'exercice d'un contrôle effectif des dirigeants :

- accès aux documents essentiels pour connaitre la vie de la société (comptes annuels, rapports du conseil d'administration ou du directoire et du conseil de surveillance, et du commissaire aux comptes, ...) ;

- détention d'un droit de vote ;

- participation aux assemblées de la société ;

- élection des membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, qui dispose d'un droit d'information et d'un droit d'investigation sur toutes les affaires sociales, détermine les orientations de l'activité de la société et veille à leur mise en oeuvre.

Le conseil d'administration désigne le président et les directeurs généraux qu'il peut révoquer, le conseil de surveillance nomme le directoire.

par la présence de commissaires aux comptes indépendants qui contrôlent la gestion de la société, certifient la régularité et la sincérité des comptes annuels.

Le régime protecteur du code de commerce est renforcé par le particularisme des règles spécifiques applicables aux SEML édictées pour renforcer le cadre juridique de ces structures qui comptent des collectivités locales parmi leurs actionnaires. Elles résultent pour l'essentiel de la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983 qui a conforté la prééminence des collectivités au sein de ces sociétés.

Les spécificités du régime des SEML
(articles L. 1521-1 à L. 1525-3 du code général des collectivités territoriales)

- détention du capital social et des voix dans les organes délibérants par les collectivités territoriales et leurs groupements, séparément ou à plusieurs ;

- transmission au préfet dans les quinze jours de leur adoption des délibérations du conseil d'administration ou du conseil de surveillance et des assemblées générales, ainsi que des comptes annuels et des rapports des commissaires aux comptes ;

- approbation par les assemblées délibérantes des collectivités de toute modification portant sur l'objet social, la composition du capital, les structures des organes dirigeants de la société. Le projet de modification est annexé à la délibération transmise au préfet dans le cadre du contrôle de légalité ;

- saisine de la Chambre régionale des comptes par le préfet dans le cas où celui-ci décèle une augmentation grave de la charge financière d'une collectivité ou un risque encouru par celle qui a apporté sa garantie à un emprunt contracté par la société ;

- établissement d'un rapport spécial annuel par la société qui exerce, pour le compte d'une collectivité, des prérogatives de puissance publique, sur les conditions de leur exercice. Le rapport est présenté à l'organe délibérant de la collectivité et adressé au préfet ;

- réglementation obligatoire de toute collectivité actionnaire au conseil d'administration ou au conseil de surveillance ; le représentant est désigné par l'assemblée délibérante concernée (cependant, si la représentation directe des collectivités détenant une participation réduite excède le nombre maximum des membres du conseil fixé par le code de commerce à 18 6 ( * ) , elles sont réunies en assemblée spéciale qui désigne celui d'entre elles qui siègera au conseil, un siège au moins leur étant réservé) ;

- imputation à la collectivité dont ils sont mandataires, de la responsabilité civile résultant de l'exercice du mandat de ses représentants ;

- décision des assemblées délibérantes des collectivités sur le rapport écrit qui leur est soumis au moins une fois par an par leur représentant au conseil d'administration ou de surveillance.

La position de votre commission des lois

Tout en approuvant l'économie générale de cet article, votre commission estime nécessaire de renforcer la protection des collectivités et de clarifier la rédaction du texte.

Pour les raisons précédemment exposées, votre rapporteur juge préférable de retenir un capital composé d'au moins deux actionnaires, qui en multipliant les acteurs, renforce l'autocontrôle. C'est d'ailleurs le principe adopté pour le régime législatif des SPLA.

Par ailleurs, pour assurer la lisibilité de la loi, il semble préférable d'introduire le dispositif réglementant les SPL dans une nouvelle division du code général des collectivités territoriales, qui pourrait s'insérer après les dispositions consacrées aux SEML.

Dans le même esprit, il serait judicieux de scinder le deuxième alinéa de l'article premier instituant la société publique locale en deux alinéas consacrés respectivement au cas où les collectivités locales détiennent la totalité du capital social et à celui où elles s'associent à des établissements publics ; elles sont alors majoritaires dans la composition du capital.

Dans cette dernière hypothèse, l'introduction d'une garantie supplémentaire apparaît pertinente : lorsqu'elles ont pour partenaires des établissements publics, les collectivités devraient détenir également la majorité des droits de vote.

Il semble également opportun, comme cela est déjà prévu pour les SPLA, de cantonner l'activité des sociétés au territoire des collectivités locales qui en sont membres.

Enfin, mieux vaut préciser que l'application aux sociétés publiques locales du régime des SEML s'exerce sous réserve des dispositions particulières prévues par la présente proposition de loi.

Votre commission a adopté l'article premier ainsi rédigé .

Article 2 (article L. 327-1 du code de l'urbanisme) - Sociétés publiques locales d'aménagement

Cet article modifie sensiblement le régime des sociétés publiques locales d'aménagement.

Il propose :

- de réduire le nombre minimum d'actionnaires exigé pour leur constitution afin de lever le frein à la création de ces entités par l'exigence d'un actionnariat trop nombreux,

- de permettre la création d'une SPLA sous la forme de la société par actions simplifiées,

- d'élargir le champ d'activité des SPLA,

- de permettre la délégation, à leur profit, des droits de préemption et de priorité institués par le code de l'urbanisme.

L'ouverture de l'objet social

Le champ d'intervention des SPLA apparaît trop limité aux yeux des auteurs de la proposition de loi, pour qui les SPLA doivent « devenir de réels outils d'aménagement et de rénovation urbaine ». Aussi, élargissent-ils l'activité de ces sociétés en prévoyant de les doter des pouvoirs institués dans ce cadre au profit des collectivités locales :

- réalisation d'études préalables ;

- acquisition foncière ou immobilière en vue de réaliser des actions ou opérations d'aménagement destinés à mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels, conformément à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;

- aux mêmes fins, toute opération de construction, de réhabilitation immobilière ;

- toute acquisition et cession de baux commerciaux, de fonds de commerce, de fonds artisanaux à l'intérieur d'un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité, délimité par un conseil municipal en application de l'article L. 214-1 du code de l'urbanisme.

Pour la réalisation de leur activité, les SPLA bénéficieraient de prérogatives de puissance publiques en pouvant exercer, par délégation de leurs titulaires, les droits de préemption et de priorité définis par le code de l'urbanisme et recourir à la procédure d'expropriation.

La délégation des droits de préemption et de priorité est déjà prévue par le code de l'urbanisme au profit du titulaire d'une concession d'aménagement, qui peut également recourir à l'expropriation sur la décision du concédant.

La position de votre commission des lois

Précisons tout d'abord que la loi du 25 mars 2009, en abaissant de sept à deux l'effectif minimal des actionnaires, a partiellement satisfait les auteurs de la proposition.

Votre commission approuve le souci de consolidation des SPLA pour qu'elles constituent un outil d'aménagement et de rénovation urbaine efficace, en les dotant des moyens nécessaires à la réalisation de leur activité.

Cependant, le souci qu'elle a exprimé à l'article premier s'avère particulièrement marqué en l'espèce puisque les SPLA pourront exercer, par délégation de leurs titulaires, des prérogatives de puissance publique.

Votre commission est attachée fermement à l'encadrement des SPLA dans le souci de protéger les collectivités contre les risques naturellement encourus par la création de ces sociétés.

En conséquence, elle se déclare réservée sur deux points : l'actionnaire unique et l'introduction de la SAS dans le régime juridique des SPLA. Ces dispositions affaiblissent les contrôles et l'obligation de transparence dont l'importance a été soulignée à l'article premier. Il apparaîtrait pertinent de les supprimer.

Outre des clarifications rédactionnelles, votre commission s'est interrogée sur la nécessité de préciser que le jeu des droits de préemption et de priorité ainsi que le recours à la procédure d'expropriation s'exercent dans le cadre de conventions passées avec la collectivité délégataire.

Ces réflexions sont partagées par l'auteur de l'initiative, notre collègue Daniel Raoul, avec lequel votre rapporteur a mené une concertation approfondie.

Aussi, sur la proposition de ce dernier, votre commission a réservé sa position et s'en remet sur ce point au premier signataire de la proposition de loi sur l'opportunité de présenter ces modifications en séance.

En conséquence, elle a adopté l'article 2 sans modification.

Article 3 - Gage

Cet article vise à compenser à dû concurrence les pertes de recettes éventuelles qui résulteraient pour les collectivités territoriales de l'application de la présente proposition de loi, par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement et une majoration des droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.

Votre commission a adopté l'article 3 sans modification.

* 6 Cf art L. 225-17 et L. 225-69 du code de commerce.

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