c) ...doit être contrée par une protection accrue

Un critère souvent évoqué pour caractériser le surendettement est celui du dépassement d'une quotité de charge de remboursement excédant le tiers des ressources disponibles. Le récent rapport de Mme Pierrette Crosemarie consacré au surendettement au nom du Conseil économique et social indique que si 1,135 million de personnes seraient alors concernées, plus de la moitié des ménages ayant un taux d'effort supérieur à 30 % déclarent s'en sortir. Il rappelle en outre que la prise en compte du logement pose problème puisqu'à charge égale, les remboursements d'emprunts des propriétaires sont comptabilisés alors que les loyers des locataires ne le sont pas.

Pour sa part, l' Observatoire de l'endettement des ménages préfère croiser trois critères pour déceler les ménages « fragiles » : le dépôt d'un dossier de surendettement ; une situation telle que les dettes sont inévitables ; des charges trop élevées par rapport aux ressources. Ces ménages représenteraient 4,2 % de l'ensemble des ménages, soit près d'un million .

D'après les derniers chiffres issus des commissions de surendettement (mars 2009), qui constituent une autre source d'information, 726.000 ménages se trouvent en cours de « désendettement » . Mais avec la crise, le phénomène serait entré dans une phase d'expansion nouvelle .

Les dernières statistiques des commissions de surendettement

Le nombre total de dossiers déposés auprès des secrétariats des commissions de surendettement d'avril 2004 à mars 2009 s'est élevé à près de 932.000, soit en moyenne à 186.400 par an. Sur douze mois glissants, le nombre de dossiers déposés est en hausse de 8 %. En données cumulées depuis le début de l'année 2009, le nombre de dépôts s'inscrit en hausse de 16 % par rapport à la période correspondante de l'exercice précédent.

Depuis avril 2004, plus de 784.000 dossiers ont été déclarés éligibles aux procédures légales de traitement du surendettement, c'est-à-dire ont été considérés comme présentant un niveau d'endettement manifestement excessif au regard des capacités de remboursement des ménages considérés. Sur la même période, près de 455.000 plans conventionnels de règlement ont pu être conclus entre les débiteurs et leurs créanciers, tandis que, dans les cas où aucune solution amiable n'a pu être trouvée, près de 158.000 recommandations ont été homologuées par les autorités judiciaires. Plus de 130.000 dossiers ont été orientés vers la procédure de rétablissement personnel avec l'accord des débiteurs concernés ; sur les douze derniers mois, les orientations vers cette procédure représentent environ 22 % des dossiers recevables.

Au total, le nombre de ménages en cours de « désendettement », c'est-à-dire ayant bénéficié ou étant sur le point de bénéficier d'une mesure destinée à remédier à leur état de surendettement, peut être évalué à environ 726.000 à la fin du mois de mars 2009.

L'endettement moyen par dossier est, à la fin mars 2009, de l'ordre de 39.500 euros.

L'endettement résultant de crédits immobiliers, présents dans 9 % des dossiers, est, en moyenne dans ces dossiers, d'environ 80 200 euros. S'agissant des crédits à court terme, les montants moyens des engagements des surendettés s'élèvent à 17.600 euros pour les crédits assortis d'une échéance (prêts personnels, crédits affectés...), qui figurent dans 54 % des dossiers, et à 19.900 euros pour les crédits non assortis d'une échéance (crédits non affectés, renouvelables ou permanents, réserves de crédits...), présents dans 85 % des dossiers.

Source : Banque de France - Baromètre du surendettement - Avril 2009

D'après le cabinet Athling Management , le coût du  « risque client » pourrait augmenter de 50 % en 2009 47 ( * ) en raison d'un relèvement durable du taux de défaut engendré par l'augmentation du chômage.

Quoi qu'il en soit, la faiblesse intrinsèque du nombre de personnes surendettées en France ne doit pas occulter la « zone grise » formée par les ménages qui, sans être forcément confrontés à de graves difficultés, estiment néanmoins leur endettement excessif au regard de leurs ressources , et pourraient juger qu'ils n'ont pas été mis en mesure d'évaluer précisément les implications des obligations contractées.

Si 50,9 % des ménages jugent leurs charges supportables ou très supportables, 15,4 % considèrent ainsi que leurs charges sont trop ou beaucoup trop élevées 48 ( * ) , ce qui constitue une proportion sans commune mesure avec celles avancées pour le surendettement stricto sensu.

En affinant l'analyse, on s'aperçoit que le nombre de ménages estimant que le poids de leurs charges est « beaucoup trop élevé » marque, depuis 20 ans, une forte progression chez les ménages bénéficiant de crédits à la consommation, évolution que souligne le graphe suivant.

Comme le rappelle le rapport du Conseil économique et social précité, « de nombreuses études indiquent clairement que la très grande majorité des personnes qui utilisent le crédit à la consommation à des taux élevés pour faire face à des carences ou des fluctuations de ressources s'acquittent de leur dette, certes au prix fort, mais elles remboursent. Les banques et les établissements financiers ont donc largement intérêt à la distribution de ce type de crédit , même s'ils s'en défendent, arguant d'un taux moyen de refus avoisinant 30 % des cas .

« Si le prêteur n'a en effet aucun intérêt à ce que ses clients se retrouvent en situation de surendettement, l'utilisation de ce type de crédit, dans les cas de difficultés financières, est très rentable ».

Un des objectifs centraux de la directive concernant les contrats de crédit aux consommateurs adoptée le 23 avril 2008, que le présent projet de loi s'attache à transposer, consiste à favoriser une distribution responsable du crédit au travers d'un devoir d'explication et d'évaluation de la solvabilité du consommateur pesant sur le prêteur..

L' assurance pourrait avoir un rôle à jouer dans la prévention des risques qui engendrent les situations d'endettement passif, par exemple en généralisant la couverture du risque de perte d'emploi ou en étendant le champ de l'assurance au « risque » de divorce.

Par ailleurs, un abaissement du taux de l'usure , susceptible de diminuer certaines échéances ou de dissuader les prêteurs sur les dossiers les plus difficiles, pourrait aussi aller dans le sens d'une protection accrue du consommateur, tandis qu'un amortissement minimum redonnerait du sens au crédit, dont l'objet est bien de conférer du pouvoir d'achet et non d'en ôter.

Toutefois, dans l'intérêt du consommateur, une certaine forme de « droit au crédit » devrait être également protégée. Dès lors, il semble que toute réflexion sur l'abaissement du seuil de l'usure devrait logiquement s'accompagner, en parallèle, d'une réflexion sur des formules renouvelées d'accès au crédit telles que le microcrédit personnel , dont l'objectif est précisément de renouer les liens entre la banque et les publics qui en ont été exclus.

* 47 Livre Vert sur le crédit aux particuliers - Avril 2009.

* 48 21 ème rapport annuel de l' Observatoire des crédits aux ménages - 12 mars 2009 - Chiffres de novembre 2008.

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