Rapport n° 520 (2008-2009) de M. Adrien GOUTEYRON , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 juillet 2009

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N° 520

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2008-2009

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 juillet 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi autorisant l' approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d' Irlande du Nord en vue d' éviter les doubles impositions et de prévenir l' évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur les gains en capital,

Par M. Adrien GOUTEYRON,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Philippe Marini, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, Henri de Raincourt, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

247 et 521 (2008-2009)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Le Sénat est saisi du projet de loi n° 24 7 (2008-2009) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord en vue d' éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur les gains en capital.

La France et le Royaume-Uni sont liés par une convention fiscale en matière d'impôts sur le revenu, signée à Londres, le 22 mai 1968 et modifiée par quatre avenants signés à Londres respectivement le 10 février 1971, le 14 mai 1973, le 12 juin 1986 et le 15 octobre 1987.

Les deux Etats ont néanmoins convenu de réviser cette convention afin d'en actualiser les dispositions par rapport aux évolutions de leur droit interne et de les inscrire également dans les orientations fixées par le modèle de convention fiscale de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). La nouvelle convention est donc le fruit d'un consensus entre les parties contractantes.

Les modalités d'entrée en vigueur des dispositions sont prévues au paragraphe 1 de l'article 31 de la nouvelle convention : « Chacun des Etats contractants notifiera à l'autre l'accomplissement des procédures requises par sa législation pour l'entrée en vigueur de la présente Convention. Celle-ci entrera en vigueur le jour de réception de la dernière de ces notifications . » La convention de 1968 sera donc abrogée.

S'agissant de la ratification britannique, le dépôt du projet de loi (« draft order ») devant la Chambre des Communes  a été effectué le 13 novembre 2008. Le projet a ensuite été présenté au First delegated legislation Committee de la Chambre des Communes, le 19 janvier 2009. Le vote du texte par la Chambre des Communes est intervenu le 20 janvier 2009. Enfin, il a été adopté, le 11 février 2009, par le Conseil privé (Privy Council) de la Reine.

I. UNE NÉGOCIATION ÉQUILIBRÉE, RÉSULTAT D'UN LONG PROCESSUS

Un premier cycle de négociations, engagé en 1990 , avait conduit au paraphe d'un projet de nouvelle convention en mai 1998, signé le 28 janvier 2004.

Cependant, la procédure de ratification a été suspendue , peu de temps après cette signature, en raison des difficultés techniques et des objections soulevées par les praticiens.

En effet, une référence, dans l'article relatif aux « partnerships », à la clause d'élimination des doubles impositions, était erronée. Une articulation imparfaite entre articles 1 ( * ) aboutissait à un résultat non souhaité en cas de mise en oeuvre de l'« exit tax » britannique, taxe de sortie du contribuable en cas de départ du territoire. Par ailleurs, le texte signé permettait à la France d'imposer les revenus d'activité réalisés au Royaume-Uni par les associés d'un « partnership » britannique, par dérogation aux règles de territorialité habituelles.

La révision de la convention de 1968 étant nécessaire , les deux parties ont convenu de mener une négociation plus large, afin d'en adapter la rédaction aux évolutions récentes du modèle de convention de l'OCDE et des droits internes respectifs de chaque Etat.

La négociation s'est achevée à Londres, le 31 août 2007 par le paraphe d'un projet de nouvelle convention se substituant à la convention signée en 2004.

La nouvelle convention fiscale a finalement été signée le 19 juin 2008.

II. LA GESTION DE LA CRISE FINANCIÈRE

Le Royaume-Uni constitue un partenaire économique essentiel. Il est le 4 ème client et le 7 ème fournisseur de la France. Réciproquement, la France est le 3 ème client et le 5 ème fournisseur du Royaume-Uni avec 7 % des parts de marché en 2007.

En matière d'investissements, le Royaume-Uni est la première destination des investissements français à l'étranger (11 % du total) avec 1.900 filiales et 350.000 salariés. Les investissements britanniques en France arrivent au 2 ème rang (15,4% du total).

En 2007, environ 250.000 Français étaient installés au Royaume-Uni et près de 25.000 entreprises françaises y commercialisaient leurs produits , 1.584 y étant, en outre, implantées.

L'économie britannique se place au 7 ème rang mondial. Les services représentent les trois quarts de l'activité avec un poids important des services financiers, des industries pharmaceutique et pétrolière. Les bons résultats du Royaume-Uni dans les années 1990 2 ( * ) ont tenu essentiellement à la réactivité de la politique économique, à la flexibilité du marché du travail et au développement du secteur financier. L'objectif d'un taux d'emploi de 80 % a été fixé par le Premier ministre, Gordon Brown. Cependant, depuis 2007 le retournement économique a mis un point d'arrêt à une longue période de prospérité. Au cours de l'hiver 2008, la situation économique s'est sensiblement dégradée. La croissance a subi un net infléchissement. D'abord estimée à 1,8 %, sa prévision a été ramenée à 0,8 % en 2008, contre 3,1 % en 2007.

La crise financière a touché le Royaume-Uni plus tôt que le continent. En février 2008, la banque Northern Rock a dû être nationalisée. Bradford & Bingley Bank l'a été en septembre, augmentant ainsi la dette publique de sept points. L'effondrement de Lehman Brothers, le 15 septembre a emporté tout un pan de la City.

La crise financière a conduit à une recomposition majeure du paysage bancaire britannique avec la création du géant Hbos-Lloyds ainsi qu'à des suppressions d'emploi massives. Le secteur financier, estimé à 10 % du PIB, ne devrait plus en représenter que 7 % en 2009. La capitalisation boursière des cinq premières banques a été divisée par cinq en un an, soit une perte comparable au produit intérieur brut (PIB) des Pays-Bas. L'économie réelle a été ensuite touchée. Une procédure de déficit public excessif a ainsi été ouverte à l'encontre du Royaume-Uni lors du Conseil Ecofin du 8 juillet 2008, lorsque le besoin de financement public prévu s'est élevé à 3,2 % du PIB.

Face à la pression des marchés, le Gouvernement a présenté le 8 octobre 2008 un plan de soutien massif au système bancaire britannique. Huit banques ont été recapitalisées pour un montant de 65 milliards d'euros (3,4 % du PIB). Un système de garantie sur les émissions de dette a été mis en place.

Un second plan de soutien aux banques a été annoncé le 15 janvier 2009. Il consistait en une stimulation du crédit, toujours bloqué, en créant une garantie publique des actifs toxiques ainsi qu'en un sauvetage de la Royal Bank of Scotland (RBS) qui annonçait des pertes historiques. Le 5 mars 2009, l'Etat a dû se résoudre à prendre le contrôle de RBS après avoir garanti des actifs à risque à hauteur de 22 % du PIB.

Un plan de relance budgétaire a été également annoncé le 24 novembre 2008. Le Gouvernement a mis en place un plan de soutien de l'activité de grande ampleur, à hauteur d'1,5 point de PIB (24 milliards d'euros). La TVA a été abaissée à 15 %. Une série de mesures en faveur des PME ainsi que des salariés modestes ont été prises. Ces décisions ajoutées aux effets de la récession ont conduit à une aggravation des déficits publics qui sont estimés à 8 % en 2009. La récession intervient à un moment où le déficit demeurait élevé et où le Gouvernement tentait de limiter la hausse de la dépense publique (+ 5 points de PIB depuis 2000).

La baisse des taux directeurs de la Bank of England (0,5 % actuellement, soit le plus bas taux de toute l'histoire de la banque) a eu pour but d'endiguer le resserrement du crédit.

III. LA FISCALITÉ BRITANNIQUE VISÉE PAR LA CONVENTION

A. IMPÔT SUR LE REVENU ET IMPÔT SUR LES GAINS EN CAPITAL

Les personnes physiques résidentes du Royaume-Uni sont en principe imposables à raison de leurs revenus de source britannique et étrangère. Les personnes physiques non-résidentes du Royaume-Uni sont imposables à raison de leurs revenus de source britannique.

Le revenu imposable est obtenu par différence entre le revenu brut et les dépenses engagées exclusivement pour l'obtention ou la conservation de ce revenu. Les principales catégories sont les suivantes : revenus fonciers, bénéfices commerciaux, agricoles et non commerciaux, revenus salariaux, revenus du patrimoine mobilier (dividendes, intérêts et redevances) et plus-values.

Pour l'imposition des revenus perçus du 6 avril 2008 au 5 avril 2009, le taux d'imposition est de 20 % de 1 à 34.800 livres sterling, soit 37.441 euros et de 40 % au-delà de 34.801 livres sterling.

Chaque contribuable bénéficie, en outre, d'un abattement personnel de 6.035 livres sterling (6.493 euros) sur son revenu global. Des abattements supplémentaires sont prévus pour tenir compte de la situation personnelle du contribuable (âge, situation conjugale, invalidité éventuelle).

Les intérêts font l'objet d'une retenue à la source non libératoire au taux de 20 %. Les dividendes, imposés au taux de 10 % dans la limite de la première tranche du barème et de 32,5 % au-delà, ouvrent droit à un avoir fiscal égal à un neuvième de leur montant. Cet avoir fiscal est ajouté aux dividendes pour la détermination de leur montant imposable, puis vient en déduction de l'impôt sur le revenu dû par l'actionnaire. Il n'est pas remboursable.

Les plus-values de cession de valeurs mobilières font l'objet d'une imposition séparée au taux de 18 % après un abattement de 9.600 livres sterling (10.324 euros), dont le montant est doublé pour les couples mariés.

Si les dividendes versés à des non-résidents sont exonérés de retenue à la source, les intérêts et redevances sont passibles d'une retenue libératoire au taux de 20 %.

B. IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

Les sociétés résidentes du Royaume-Uni sont passibles de l'impôt sur les sociétés à raison de l'ensemble de leurs bénéfices de sources britannique et étrangère. Les bénéfices de source britannique réalisés par les établissements stables de sociétés non-résidentes sont soumis à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun.

Le bénéfice taxable est déterminé, de manière classique, par différence entre les créances acquises et les charges engagées, à titre exclusif, pour les besoins de l'activité imposable.

Le barème s'établit comme suit :

- 21 % si le bénéfice est compris entre 1 livre sterling et 300.000 livres sterling (de 1,08  euros à 322.771  euros) ;

- taux effectifs de 21 % à 28 % si le bénéfice est compris entre 300 000 livres sterling et 1,5 million de livres sterling (de 322.771 euros à 1,61 million d'euros) ;

- 28 % si le bénéfice est supérieur à 1,5 million de livres sterling (1,61 million d'euros).

Les plus-values sont en principe soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun. Cependant, les plus-values de cession de participations d'au moins 10 % détenues pendant une période continue d'au moins un an au cours des deux années précédant la cession sont exonérées.

Les dividendes reçus par une société mère résidente en provenance d'une filiale également résidente du Royaume-Uni sont exonérés d'impôt sur les sociétés, quel que soit le niveau de la participation.

Les dividendes de source étrangère sont soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun. La retenue à la source prélevée à l'étranger ouvre droit à un crédit d'impôt d'égal montant imputable sur l'impôt sur les sociétés britanniques dû à ce titre. En outre, sous certaines conditions, l'impôt sur les sociétés acquitté par la filiale étrangère, sur les bénéfices à l'origine de la distribution, ouvre droit à un crédit d'impôt « indirect » ( underlying tax credit ).

Les crédits direct et indirect ne peuvent ensemble excéder l'impôt sur les sociétés britannique dû sur les dividendes. La fraction non imputable peut être reportée en arrière sur trois ans ou en avant sans limitation de durée, afin d'être imputée sur l'impôt britannique portant sur cette même catégorie de revenus.

S'agissant des sociétés non résidentes, les bénéfices de source britannique réalisés par leurs établissements stables sont soumis à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun .

En l'absence d'établissement stable, les distributions de dividendes effectuées au profit d'un non résident du Royaume-Uni ne sont soumises, en l'absence de convention fiscale, à aucune retenue à la source. Cette exonération de retenue s'applique quelle que soit l'importance de la participation de l'actionnaire étranger.

Les intérêts et les redevances versés à un non résident du Royaume-Uni sont soumis à une retenue à la source libératoire de 20 %. Toutefois sont exonérés de retenue, les intérêts sur les eurobonds cotés ainsi que les intérêts ou redevances alloués ou attribués entre sociétés associées situées toutes deux dans des Etats membres de l'Union européenne 3 ( * ) .

Fiscalité du Royaume-Uni

Imposition des intérêts, dividendes et plus-values perçus par des sociétés et des personnes physiques

Ø Imposition des résidents

- Sociétés

Taux

- 21 % si le bénéfice est compris entre 1,08 € à 322 771 €
- taux effectifs de 21 % à 28 % si le bénéfice est compris entre 322 771 € à 1,61 M€
- 28 % si le bénéfice est supérieur à 1,61 M€ 4 ( * )

Dividendes

- de source britannique : exonération

- de source étrangère : imposition à l'IS et attribution de crédits d'impôt au titre des impôts étrangers

Plus-values

Exonération (P>10%)

- Personnes physiques

Revenus du capital

Dividendes

IR de droit commun et attribution d'un avoir fiscal égal à 1/9 ème du montant des dividendes

Intérêts

Retenue à la source de 20 % puis imposition à l'IR avec crédit d'impôt au titre de la RAS

Plus-values

Imposition séparée au taux de 18 % après un abattement de 10 324 €

Revenu imposable

Barème progressif d'IR :

20 % (<37 441 €) à 40 % (> 37 442 €)

Ø Imposition des non- résidents

Dividendes

Retenue à la source : Exonération

Intérêts

Retenue à la source : 20 %

Redevances

Retenue à la source : 20 %

Source : Direction générale des finances publiques

IV. LES CARACTÉRISTIQUES DE LA NOUVELLE CONVENTION FISCALE

La convention s'inspire en grande partie du modèle de convention de l'OCDE, sous réserve d'adaptations, correspondant soit à la spécificité des relations franco-britanniques, soit à la politique conventionnelle de la France.

A. UN CADRE CONVENTIONNEL ACTUALISÉ

La nouvelle convention, complétée d'un protocole, tend à préciser ou compléter le champ d'application des relations conventionnelles de 1968 . Ainsi, le point 2 du protocole de la convention précise expressément que ni les Iles anglo-normandes, ni l'Ile de Man, ni Gibraltar, ni les bases militaires britanniques à Chypre, ni aucun pays ou territoire britannique d'outre-mer ne font partie du territoire britannique au sens de la convention. Cette exclusion n'était qu'implicite dans la convention de 1968.

Le champ des impôts visés à l'article 2 par la nouvelle convention est également actualisé.

Pour tenir compte de l'évolution de la doctrine française en faveur d'une pleine reconnaissance de la transparence des sociétés de personnes étrangères, une nouvelle clause relative aux sociétés de personnes, tant translucides que transparentes, inspirée de celle conclue avec le Japon, figure à l'article 4 de la convention.

Elle prévoit que les sociétés de personnes françaises translucides sont résidentes conventionnelles, aussi longtemps que le droit français n'a pas repris le concept de transparence.

Le bénéfice des avantages conventionnels n'est accordé aux associés de sociétés de personnes transparentes que sous réserve de conditions reprises de l'instruction administrative 4 H-5-07 du 29 mars 2007 relative aux sociétés de personnes étrangères. Ainsi, la France peut exiger, lorsque la société de personnes est située dans un Etat tiers, que cet Etat tiers ait conclu avec elle un accord comportant une clause d'échange de renseignement visant à lutter contre l'évasion fiscale.

Afin d'éviter les conflits de qualification, la clause suit les recommandations du rapport de l'OCDE sur les sociétés de personnes transparentes en prévoyant que, lorsque la convention s'applique, la qualification donnée par l'Etat de résidence des associés s'impose.

L'article 3 définit les termes généraux nécessaires à l'interprétation de la convention tandis que les articles 4 et 5 développent respectivement les notions de résidence et d'établissement stable.

L'article 6 prévoit, conformément au modèle de conventions de l'OCDE, l'imposition des revenus des biens immobiliers au lieu de situation des biens.

L'imposition des bénéfices des entreprises à l'article 7 décalque la règle définie par le modèle OCDE alors que l'article 9 précise les règles applicables à la détermination du bénéfice imposable des concessionnaires du tunnel sous la Manche en reprenant les stipulations qui avaient été introduites dans la convention de 1968, par l'avenant du 15 octobre 1987. L'article 8 prévoit le principe de l'imposition exclusive des bénéfices du transport international dans l'Etat de résidence de l'exploitant de l'entreprise.

S'agissant des dividendes dont le régime est fixé à l'article 11 , ils sont imposables à la résidence. Ils peuvent toutefois être imposés par l'Etat de la source à un taux n'excédant pas 15 % de leur montant brut, sauf lorsque la société bénéficiaire détient, directement ou indirectement, au moins 10 % du capital de la société distributrice. Dans ce dernier cas, la retenue à la source est supprimée.

Il convient de souligner que les stipulations figurant à l'article « dividendes » de la convention de 1968, relatives au transfert de l'avoir fiscal aux résidents britanniques et aux fonds de pension britanniques, sont supprimées. Ces stipulations étaient d'ores et déjà caduques depuis la suppression de l'avoir fiscal.

Une clause spécifique vise les structures d'investissement immobilier. Elle reprend le consensus obtenu au sein d'un groupe de travail de l'OCDE associant administrations et fédérations d'entreprises, auquel la France et la Grande-Bretagne ont largement contribué. Ainsi, les « distributions opérées au profit d'un actionnaire non-résident par un organisme de placement à partir de revenus ou gains immobiliers exonérés sont soumises à une retenue à la source au taux conventionnel de 15 % lorsque cet actionnaire détient moins de 10 % du capital, et au taux de droit interne si sa participation dépasse 10 % du capital. L'Etat de résidence de l'actionnaire accorde un crédit d'impôt égal à la retenue, dans la limite de son impôt national . »

En outre, le point 6 du Protocole précise l'application de l'article 11 dans l'hypothèse où un Etat contractant applique à l'établissement stable d'une entité établie dans l'autre Etat contractant son dispositif de droit interne relatif aux fonds immobiliers cotés. Ainsi, aucune disposition de la convention ne peut limiter le droit du premier Etat contractant d'imposer, conformément à sa législation interne, les revenus immobiliers réputés distribués par cet établissement stable 5 ( * ) .

Les intérêts et les redevances sont imposables exclusivement à la résidence selon les articles 12 et 13 , conformément aux stipulations de la convention de 1968.

Il convient de souligner que le point 7 du protocole prévoit que les gérants d'OPCVM des Etats contractants peuvent déposer des demandes en vue d'obtenir les avantages conventionnels en matière de dividendes, intérêts et redevances.

L'article 14 a pour objet le régime applicable aux gains en capital. Toutes les plus-values immobilières seront désormais imposables dans l'Etat de situation des immeubles, alors que, sous l'empire de la convention de 1968, la France ne pouvait pas imposer les plus-values réalisées sur des cessions d'immeubles situés en France par des entreprises britanniques ne disposant pas d'établissement stable en France, en vertu de la jurisprudence Hallminster du Conseil d'Etat en date du 25 février 2004. Cette jurisprudence, en contradiction avec les principes habituels et l'interprétation britannique, était devenue une source d'évasion fiscale.

Les articles 15 et 16 visent, respectivement, l'imposition des salaires et des rémunérations des administrateurs de sociétés. L'article 17 traite, quant à lui, de la situation des artistes en reprenant les stipulations habituelles des conventions conclues par la France.

Aux termes de l'article 18 , les pensions privées ne sont imposables qu'à la résidence, conformément aux règles d'imposition en vigueur.

En revanche, l'article 19 stipule que les rémunérations et pensions publiques sont généralement imposables par l'Etat qui les verse, sauf pour les activités d'entreprise. Le régime fiscal des membres des missions diplomatiques et des postes consulaires, conforme au modèle de convention OCDE, est prévu à l' article 28 .

Les articles 20 et 21 exonèrent, respectivement, sous certaines conditions, les sommes perçues par les professeurs et les étudiants. L'article 22 reprend les stipulations relatives aux activités en mer de la convention de 1968.

L'article 23 relatif à l'imposition des autres revenus, à l'exception des revenus de « trusts », réserve le droit exclusif d'imposer à l'Etat de la résidence.

L'article 24 traite de l'élimination de la double imposition. La clause est conforme à la pratique française . Elle combine deux méthodes d'élimination de la double imposition :

- S'agissant des revenus des sociétés , la convention maintient le principe de l'exonération en France des revenus qui sont imposables ou ne sont imposables qu'au Royaume-Uni, dans la mesure où ils sont exemptés d'impôt sur les sociétés en application de la législation française. La clause française d'élimination des doubles impositions vise à préserver la possibilité d'une évolution vers une territorialité élargie de l'impôt sur les sociétés. En effet, elle prévoit que la France peut, nonobstant les autres stipulations de la convention, imposer les revenus dont l'imposition est attribuée au Royaume-Uni, même en cas d'imposition exclusive dans cet Etat, dès lors que ces revenus ne sont pas exonérés d'impôt sur les sociétés en vertu du droit interne français ;

- dans les autres cas , la double imposition des revenus provenant du Royaume-Uni et perçus par des personnes résidentes de France est éliminée par l'imputation, sur l'impôt français, d'un crédit d'impôt dont le montant dépend du type de revenu considéré (crédit égal au montant de l'impôt français ou au montant de l'impôt britannique suivant la nature du revenu).

L'élimination de la double imposition, du côté britannique , est effectuée par la méthode de l'imputation sur l'impôt britannique d'un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français.

L'article 25 est relatif à la non discrimination.

L'article 26, relatif à la procédure amiable , offre la possibilité pour les contribuables de recourir à une procédure d'arbitrage lorsque les autorités compétentes des deux Etats ne sont pas parvenues à un accord deux ans après l'ouverture d'une procédure amiable.

Introduite en juillet 2008 au modèle de convention fiscale de l'OCDE, cette clause est d'application plus large que la convention européenne d'arbitrage car elle vise tous les cas de doubles impositions de fait et non uniquement ceux qui résultent de prix de transfert. Elle a été adaptée pour permettre l'articulation entre la procédure d'arbitrage conventionnelle et la procédure prévue par la convention européenne d'arbitrage. Ainsi, les deux procédures sont ouvertes aux usagers, en écartant toutefois le risque de décisions arbitrales concurrentes.

Des dispositifs anti-abus sécurisent l'application de la convention.

Chacun des articles relatifs aux dividendes, intérêts, redevances et autres revenus comporte un dispositif anti-abus prévoyant le refus du bénéfice de l'article si le principal objectif, ou l'un des principaux objectifs, du bénéficiaire des revenus a été d'obtenir indûment les avantages conventionnels.

En outre, l'article 29 tend à éviter les doubles exonérations. En effet, afin de tenir compte de l'existence du dispositif britannique de « remittance basis » en vertu duquel certains résidents britanniques ne sont imposés que sur leurs revenus perçus ou transférés au Royaume-Uni, certaines exonérations ou réductions d'impôt à la source prévues par la convention ne s'appliqueront qu'à hauteur des revenus effectivement imposés dans l'Etat de résidence.

Enfin, chaque Etat peut imposer les plus-values réalisées par un ancien résident dans un délai de six ans suivant son départ, conformément au système d'« exit tax » britannique. Si l'absence d'un tel dispositif en droit interne prive cette clause d'intérêt pour la France, son caractère bilatéral préserve néanmoins l'avenir.

L'article 27 traite des échanges de renseignements tandis que l'article 30 subordonne l'application des avantages conventionnels à la présentation de justificatifs.

B. UNE RÉVISION NÉCESSAIRE ET CONFORME AUX INTÉRÊTS DE LA FRANCE

Votre rapporteur a tout d'abord procédé à une comparaison des dispositions de l'accord conclu avec celles de conventions fiscales similaires . Il a noté que si les conventions franco-espagnole et franco-italienne prévoient une retenue à la source de 10 % sur les intérêts et de 5 % sur les redevances, la convention franco-britannique prévoit une imposition exclusive à la résidence de ces types de revenus, conformément à la politique conventionnelle française actuelle.

Contrairement à la convention franco-espagnole, la convention franco-britannique ne prévoit pas l'imposition à la source des gains tirés de la cession d'une participation substantielle d'une société. Une telle clause ne paraît plus nécessaire compte tenu de l'évolution de la fiscalité française des plus-values.

Votre rapporteur se félicite de l'insertion des clauses anti-abus spécifiques. Ainsi, les avantages conventionnels relatifs aux dividendes, intérêts, redevances et autres revenus ne seront pas accordés lorsque le principal objectif, ou l'un des principaux objectifs, du bénéficiaire des revenus a été de les obtenir indûment.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 7 juillet 2009, réunie sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Adrien Gouteyron sur le projet de loi n° 247 (2008-2009) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord en vue d' éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur les gains en capital.

A l'issue de la présentation du rapport, un débat s'est engagé au cours duquel M. Jean Arthuis, président , M. Adrien Gouteyron, rapporteur, et Mme Nicole Bricq ont déploré la brièveté des délais d'examen accordés au Sénat, eu égard à la complexité des dispositions de la convention. Ils ont convenu de l'opportunité de procéder à une étude approfondie du modèle de convention fiscale de l'OCDE, caractérisé par une extrême technicité qui ne facilite pas la transparence dont devrait être entouré l'examen des projets de loi de ratification.

Puis la commission a adopté le projet de loi et proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance publique.

* 1 Les articles 14 et 24 du projet de convention.

* 2 Un taux moyen de croissance annuelle de 3% et un taux moyen de chômage de 4 %.

* 3 Conformément à la directive intérêts redevances 2003/49/CEE .

* 4 Taux applicable à l'ensemble du bénéfice.

* 5 Application en France, de la retenue à la source prévue par l'article 115 quinquies du code général des impôts.

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