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Rapport général n° 101 (2009-2010) de M. Pierre BERNARD-REYMOND , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2009

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N° 101

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2009

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2010 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 15

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

Rapporteur spécial : M. Pierre BERNARD-REYMOND

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 1946, 1967 à 1974 et T.A. 360

Sénat : 100 (2009-2010)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » augmentent fortement entre la loi de finances initiale pour 2009 et le présent projet de loi de finances : + 12 % en autorisations d'engagement et + 9,8 % en crédits de paiement. De manière générale, les crédits de la politique transversale d'immigration et d'intégration, retracés dans le document de politique transversale, connaissent également une hausse significative : + 4 %.

2. L'analyse budgétaire des documents annexés au présent projet de loi de finances permet de conclure au caractère majoritairement social des actions menées à la fois au travers de la mission « Immigration, asile et intégration » et au sein de l'ensemble de la politique transversale .

3. Votre rapporteur spécial s'interroge sur la crédibilité des prévisions de flux de demandeurs d'asile à partir desquelles ont été établies les demandes de crédits dans le présent projet de loi de finances. En effet, le projet annuel de performances qui lui est annexé se fonde sur un nombre prévisionnel de demandeurs d'asile de 45.500, en hausse de seulement 6,8 % par rapport aux demandes d'asile de l'année 2008, alors même que le nombre de demandeurs d'asile a progressé de 19,7 % en 2008 et que, d'après les premiers éléments disponibles pour l'année 2009, la hausse s'élève cette année à 16,5 % en rythme annuel. On ne perçoit pas clairement les faits qui pourraient inverser la tendance en 2010.

Le projet annuel de performances prévoit une hausse de 10 % des crédits consacrés aux actions de soutien aux demandeurs d'asile et à l'organisation de la demande d'asile . Il est à craindre que cette augmentation ne soit pas suffisante pour répondre aux besoins réels de l'année 2010 , étant donnée l'évolution actuelle des flux de demandeurs d'asile.

4. L'objectif de doublement du nombre de reconduites à la frontière, fixé en 2003, a été atteint dès 2006. Toutefois, il apparaît que le nombre de retenus dans les centres de rétention administrative effectivement reconduits diminue , un nombre important d'entre eux étant remis en liberté. Ce constat ressort des travaux menés par la Cour des comptes sur la gestion des centres de rétention administrative, à la demande de votre commission des finances.

5. L'Office national de l'immigration et de l'intégration (OFII) retrouve en 2009 une situation financière plus normale , dans la mesure où son fonds de roulement, qui était très important, a diminué.

6. L'organisation interministérielle de la politique de l'immigration rend difficile toute appréhension globale du coût des reconduites à la frontière en France . Les travaux menés par l'Inspection générale de l'administration sur ce sujet, et qui devraient être rendus publics prochainement, permettront d'éclairer la représentation nationale sur ce point.

A la date limite de réponse du 10 octobre, prévue par l'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire avait répondu à 28 des 39 questions formulées par vos rapporteurs spéciaux, soit un taux de réponse de 71,8 %.

I. UNE POLITIQUE INTRINSÈQUEMENT INTERMINISTÉRIELLE

A. UNE MISSION QUI NE REGROUPE QUE 15,6 % DES CRÉDITS DE LA POLITIQUE TRANSVERSALE D'IMMIGRATION ET D'INTÉGRATION

1. Une politique transversale dominée par les crédits de la recherche et de l'enseignement supérieur

La mission « Immigration, asile et intégration » ne représente, selon le présent projet de loi de finances, que 15,6 % des crédits de paiement (CP) consacrés à la politique française de l'immigration et de l'intégration .

Répartition par mission de l'effort financier de l'Etat en faveur de la politique d'immigration et d'intégration

(crédits de paiement, en millions d'euros)

Mission

Loi de finances initiale pour 2009

Projet de loi de finances pour 2010

Evolution

Action extérieure de l'Etat

38,8

38,6

- 0,5 %

Conseil et contrôle de l'Etat

20,7

20,3

- 1,9 %

Culture

7,5

6,7

- 10,7 %

Immigration, asile et intégration

510,6

560,4

+ 9,8 %

Justice

8,9

9,0

+ 1,1 %

Recherche et enseignement supérieur

1.575,2

1.575,2

-

Santé

490,0

535,0

+ 9,2 %

Sécurité

677,6

682,5

+ 0,7 %

Travail et emploi

13,9

16,5

+ 18,7 %

Ville et logement

40,0

60,0

+ 50,0 %

Administration générale et territoriale de l'Etat

96,5

98,1

+ 1,7 %

Total

3.479,6

3.620,3

+ 4 %

Source : commission des finances, à partir du document de politique transversale « Politique française de l'immigration et de l'intégration » annexé au projet de loi de finances pour 2010

Le document de politique transversale (DPT) annexé au présent projet de loi de finances prévoit un effort financier global de 3,62 milliards d'euros en CP en faveur de cette politique, au sein desquels la présente mission ne représente que 560 millions d'euros.

Au total, 15 programmes répartis dans 11 missions et entre 10 périmètres ministériels participent, par leurs actions, à la politique transversale d'immigration et d'intégration .

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de l'analyse du tableau ci-dessus.

a) Les principaux contributeurs à la politique transversale sont les ministères « sociaux »

L'analyse du DPT montre que les principaux contributeurs à la politique d'immigration et d'intégration des étrangers en France sont les ministères « sociaux » .

Ainsi, le ministère en charge de la recherche et de l'enseignement supérieur contribue à hauteur de 43,5 % à l'effort global de l'Etat, soit 1.575 millions d'euros. Cette contribution correspond à la prise en charge des élèves étrangers dans l'enseignement supérieur. Le DPT précise que ce montant est une estimation qui prend en compte les prévisions quant au nombre d'étudiants étrangers en université pour l'année 2010 et au coût moyen par étudiant en université (évalué à 7.710 euros par an pour 2009).

Le ministère en charge de la santé participe pour sa part à hauteur de 535 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour l'année 2010, à rapprocher des 682,5 millions d'euros en provenance du ministère de l'Intérieur et correspondant aux actions de la police et de la gendarmerie nationale dédiées à la surveillance des centres de rétention administrative et au contrôle des flux migratoires.

Il est difficile d'opérer une classification des crédits de la politique transversale entre la politique « répressive » vis-à-vis de l'immigration et les crédits à caractère social, destinés à l'intégration des étrangers en France. Toutefois, on peut relever qu'au total les crédits de la mission « Sécurité » ajoutés à ceux de la mission « Immigration, asile et intégration » qui participent à la politique de lutte contre l'immigration irrégulière ne représentent que 22 % de l'ensemble des crédits de la politique d'immigration et d'intégration des étrangers en France.

Répartition des crédits de paiement de la politique transversale
entre les missions budgétaires en 2010

Source : commission des finances, à partir du projet annuel de performances et du document de politique transversale annexés au projet de loi de finances pour 2010

La politique d'immigration et d'intégration est donc bien, au sens budgétaire, une politique d'accompagnement social .

b) Une hausse de 4 % des crédits consacrés à la politique transversale

L'effort budgétaire global de l'Etat en faveur de la politique d'immigration et d'intégration augmente de 4 % entre les crédits votés en loi de finances initiale pour 2009 et ceux demandés pour 2010.

Cette augmentation globale résulte toutefois d'une évolution hétérogène des contributions des différentes missions à cette politique transversale. Parmi les évolutions significatives, et outre la contribution de la mission « Immigration, asile et intégration », qui fait l'objet du présent rapport, votre rapporteur spécial relève :

- une diminution de plus de 10 % de la contribution de la mission « Culture » , qui résulte directement de la diminution en même proportion des crédits de l'action n° 4 « Actions en faveur de l'accès à la culture » du programme n° 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». En effet, la contribution de la mission « Culture » est calculée en appliquant à certains de ses crédits le taux de 8,2 % correspondant à la part de la population étrangère en France ;

- les crédits en provenance de la mission « Santé » sont en progression de 9,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Ils regroupent notamment les dotations consacrées à l'Aide médicale d'Etat (AME), qui bénéficie, sous conditions de ressources, aux personnes en situation irrégulière résidant en France depuis plus de 3 mois. Cette augmentation de 45 millions d'euros correspond à un réajustement au regard des dépenses effectivement supportées par la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) en 2009 au titre de l'AME ;

- la contribution de la mission « Travail et emploi » augmente de 18,7 % . Ces crédits correspondent au financement des processus de délivrance des autorisations de travail pour les étrangers ainsi qu'aux actions de lutte contre le travail illégal pour sa partie concernant l'emploi d'étrangers sans titre de travail ;

- enfin, la participation de la mission « Ville et logement » augmente fortement, passant de 40 à 60 millions d'euros . Ces crédits correspondent aux moyens consacrés aux actions des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) spécialement ciblées sur des enjeux d'intégration des populations étrangères ou immigrées vivant dans les quartiers prioritaires ainsi qu'aux actions de lutte contre les discriminations et d'accès au droit.

De manière générale, votre rapporteur spécial regrette l'absence de lisibilité de l'évolution des crédits consacrés par chaque mission à la politique transversale . Il serait souhaitable que le DPT indique chaque année les raisons des hausses ou des baisses des contributions de chaque mission à l'effort global de l'Etat.

2. La prépondérance des crédits à vocation sociale au sein de la mission

La mission « Immigration, asile et intégration », qui ne représente que 15,6 % de l'effort budgétaire global en faveur de la politique française d'immigration et d'intégration, correspond aux actions directement sous le contrôle du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Elle n'inclut toutefois pas les crédits destinés à la politique de développement solidaire du ministère. Ces crédits sont en effet regroupés au sein du programme n° 301 « Développement solidaire et migrations » qui fait partie de la mission interministérielle « Aide publique au développement », dont la responsabilité est partagée entre le ministère des affaires étrangères et européennes, le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi et le ministère en charge de l'immigration.

Au sein de cette mission , comme le montre le graphique ci-dessous et à l'instar du constat dressé pour le DPT dans son ensemble, les actions sociales en direction des migrants sont très largement majoritaires .

Répartition des crédits de paiement de la mission « Immigration, asile et intégration »

Source : commission des finances, à partir du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2010

Les crédits correspondant aux actions de soutien aux demandeurs d'asile et à la garantie de l'exercice du droit d'asile sont majoritaires au sein de la mission. Ils correspondent essentiellement au coût de l'hébergement des demandeurs d'asile, au versement de l'allocation temporaire d'attente (ATA) et aux frais de fonctionnement de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

Les crédits destinés aux actions de lutte contre l'immigration irrégulière ne représentent, pour leur part, que 16,8 % des crédits de la mission , soit 94,4 millions d'euros. Ces crédits incluent le coût de mise en oeuvre des éloignements des migrants en situation irrégulière et le fonctionnement courant des centres de rétention administrative. Ils englobent également des actions à caractère non répressif, telles que l'accompagnement social et l'aide à l'exercice des droits dans les CRA et les zones d'attente. Il faut toutefois relever que les dépenses de personnel correspondant aux missions de garde et de gestion des CRA ne font pas partie de la mission mais demeurent inscrites au sein de la mission « Sécurité ».

B. QUELLE LISIBILITÉ BUDGÉTAIRE POUR UNE POLITIQUE INTERMINISTÉRIELLE ?

1. Un ministère largement constitué par regroupement de services préexistants

Le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a été créé par le décret du 19 juin 2007 relatif à la composition du Gouvernement et son champ d'intervention a été précisé par un décret 1 ( * ) et un arrêté du 26 décembre 2007, portant organisation de son administration centrale.

La création du ministère a été permise, en pratique, par la loi de finances pour l'année 2008 2 ( * ) , qui a autorisé le transfert de 509 emplois en provenance des ministères partenaires :

- 140 emplois en équivalent temps plein travaillé (ETPT) du ministère des affaires étrangères et européennes ;

- 110 ETPT du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ;

- 239 ETPT du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports ;

- 20 ETPT du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique .

Cette loi avait également prévu la création de 100 nouveaux emplois pour compléter les effectifs du ministère. Cette redistribution des personnels ne s'est pas accompagnée de la création de corps propres à cette nouvelle administration.

Le choix a été fait de partager la gestion de ces personnels entre les ministères partenaires et le ministère en charge de l'immigration . Les ministères partenaires conservent notamment la compétence des actes de gestion à portée statutaire, les actes de gestion « de proximité » étant délégués au ministère de l'immigration. Quatre conventions générales de délégation de gestion des personnels ont été signées avec les ministères partenaires pour matérialiser ces partages de compétences 3 ( * ) .

Par ailleurs, plusieurs conventions de délégation de gestion ont été signées pour prévoir la mise à disposition de locaux et les soutiens logistique, bureautique et informatique dont bénéficient le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire auprès des divers ministères partenaires.

2. Une organisation qui brouille la lecture globale des crédits de la politique de rétention et des reconduites à la frontière

En octobre 2008, votre commission des finances avait demandé à la Cour des comptes, dans le cadre de la procédure de l'article 58-2° de la loi organique relative aux lois de finances, d'examiner la gestion des centres de rétention administrative (CRA) et notamment la répartition des crédits qui leur sont consacrés entre les différents ministères et les missions budgétaires. Le rapport rendu par la Cour des comptes a fait l'objet, le 1 er juillet dernier, d'une audition de M. Eric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et de la publication d'un rapport d'information 4 ( * ) .

A l'issue de ses travaux, la Cour des comptes a conclu à l'absence de synthèse du coût global de la rétention .

Cette difficulté résulte directement de l'organisation du ministère et des partages de compétences opérés, en particulier avec le ministère en charge de l'intérieur . En effet, si le ministre en charge de l'immigration a autorité conjointe avec le ministre de l'intérieur sur la direction des libertés publiques et des affaires juridiques ainsi que sur la direction générale de la politique nationale, dont la direction centrale de la police aux frontière (DCPAF) fait partie, il ne gère pas directement les services de la PAF. Or, ce sont essentiellement ces services qui prennent directement en charge la gestion des CRA. Des conventions de délégation relatives à la gestion des crédits de rétention administrative et d'éloignement des étrangers en situation irrégulière ont donc dû être signées.

Or, la Cour estime que le partage actuel des rôles en matière de rétention entre le ministère de l'intérieur et le ministère de l'immigration vis-à-vis de la DCPAF n'est pas sans inconvénients . Elle indique que « le schéma retenu, transversal et fonctionnel, aboutit à ce que le ministère de l'immigration fixe les objectifs de reconduites aux frontières alors que la DCPAF est en charge de l'exécution des mesures [...] au risque de conduire à des doublons et à des divergences de vues ou d'analyses. [...] La création du ministère de l'immigration n'a pas conduit à une solution claire relative au rattachement de la police aux frontières. Cette question mérite d'être réexaminée ».

Lors de son audition par votre commission des finances, M. Eric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, a estimé que le rattachement de la PAF au ministère de l'immigration irait à l'encontre des objectifs de la révision générale des politiques publiques (RGPP), qui a, au contraire, préconisé un regroupement de l'ensemble des services de police et de gendarmerie auprès du ministre en charge de l'intérieur.

En matière de coût global des reconduites à la frontière, il a par ailleurs indiqué que « compte tenu des divergences dans les chiffrages jusqu'à présent rendus publics, il [...] a paru indispensable de commander une étude approfondie à l'Inspection générale de l'administration. Nous obtiendrons des conclusions de ce travail, à l'automne ».

Votre rapporteur spécial sollicitera donc le ministre sur ce sujet pour connaître les conclusions du travail mené par l'Inspection générale de l'administration.

II. UN BUDGET 2010 EN FORTE HAUSSE : + 9,8 %

Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » progressent fortement dans le projet de loi de finances pour 2010 : + 12 % en autorisations d'engagement (AE) et + 9,8 % en crédits de paiement (CP) , comme l'indique le tableau ci-dessous. Si l'on retire les 6,8 millions d'euros de crédits transférés, entre 2009 et le présent projet de loi de finances, d'autres missions vers la mission « Immigration, asile et intégration », la hausse effective des CP est toutefois réduite à + 8,4 %.

Evolution des crédits de la mission

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits ouverts en 2009

Projet de loi de finances pour 2010

Evolution

Crédits ouverts en 2009

Projet de loi de finances pour 2010

Evolution

Programme n° 303 « Immigration et asile »

434,7

489,0

+ 12,5 %

437,5

480,6

+ 9,8 %

Programme n° 104 « Intégration et accès à la nationalité française »

73,1

79,8

+ 9,2 %

73,1

79,8

+ 9,2 %

Mission « Immigration, asile et intégration »

507,8

568,8

+ 12 %

510,6

560,4

+ 9,8 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2010

La hausse est répartie de manière relativement équilibrée entre les deux programmes de la mission.

Votre rapporteur spécial relève que cette hausse porte les crédits de la mission à un niveau supérieur aux plafonds pluriannuels prévus par l'article 6 de la loi de programmation des finances publiques 5 ( * ) . Les plafonds sont dépassés à hauteur de 53 millions d'euros en AE et de 34 millions d'euros en CP, ce qui représente respectivement 10,6 % et 6,7 % de taux de dépassement.

Les crédits de la mission par rapport aux plafonds de la loi de programmation des finances publiques

(en millions d'euros)

Plafonds de la loi de programmation des finances publiques pour l'année 2010

(hors CAS Pensions)

Projet de loi de finances pour 2010

(hors CAS Pensions et au format de la loi de programmation des finances publiques)

Taux de dépassement

Autorisations d'engagement

500

553

+ 10,6 %

Crédits de paiement

510

544

+ 6,7 %

Source : projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2010

Ces fonds supplémentaires alloués à la mission proviennent, d'une part, de la réserve de budgétisation prévue par la loi précitée de programmation des finances publiques et, d'autre part, de redéploiements d'économies réalisées par l'Etat, notamment sur les charges de la dette et le compte d'affectation spéciale « Pensions ».

A. LES BESOINS BUDGÉTAIRES DIFFICILEMENT PRÉVISIBLES DU PROGRAMME N°303 « IMMIGRATION ET ASILE »

Le présent programme rassemble quatre actions qui retracent respectivement les crédits destinés :

- au fonctionnement de l'administration des visas ;

- au soutien apporté aux demandeurs d'asile et à l'organisation de la demande d'asile ;

- à la lutte contre l'immigration irrégulière ;

- aux fonctions « soutien » des services du ministère en charge de l'immigration.

Comme l'indique le tableau ci-dessous, la hausse des crédits du programme n° 303 est ciblée sur deux actions : l'action n° 2 « Garantie de l'exercice du droit d'asile » et l'action n° 3 « Lutte contre l'immigration irrégulière » .

Evolution des crédits du programme n° 303

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Votées en 2009

Prévues en 2010

Evolution

Votés en 2009

Prévus en 2010

Evolution

Action n° 1 « Circulation des étrangers et politique des visas »

2,6

2,6

-

2,6

2,6

-

Action n° 2 « Garantie de l'exercice du droit d'asile »

289,1

318,1

+ 10 %

289,1

318,1

+ 10 %

Action n° 3 « Lutte contre l'immigration irrégulière »

80,8

104,4

+ 29,2 %

80,8

94,4

+ 16,8 %

Action n° 4 « Soutien »

62,2

63,9

+ 2,7 %

65,0

65,5

+ 0,8 %

Total

434,7

489,0

+ 12,5 %

437,5

480,6

+ 9,8 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2010

Par ailleurs, le montant total des fonds de concours attendus pour l'année 2010 est de 17,1 millions d'euros. Ils correspondent essentiellement aux fonds européens « retour » et « frontières extérieures ».

1. Le mauvais « calibrage » du budget au regard du nombre de demandes d'asile

a) Une base d'élaboration du budget qui paraît peu réaliste

L'action n° 2 regroupe les crédits destinés à la prise en charge sociale des demandeurs d'asile ainsi qu'à l'instruction et la décision sur les demandes d'asile, qui font intervenir à la fois l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Sur le plan budgétaire, les crédits d'accompagnement social sont très majoritaires au sein de l'action puisqu'ils représentent 286 millions d'euros soit 90 % des crédits de l'action n° 2.

Les dépenses regroupées au sein de cette action sont naturellement imprévisibles . Elles dépendent de facteurs imprévisibles que sont essentiellement le nombre de demandeurs d'asile et les délais de traitement des demandes d'asile devant les juridictions compétentes. En effet, tant que les personnes sont en attente de la décision sur leur demande d'asile, elles n'ont pas l'autorisation de travailler pour subvenir à leurs besoins et bénéficient donc de l'allocation temporaire d'attente (ATA).

Malgré cette imprévisibilité naturelle, votre rapporteur spécial soulignait, dans son rapport budgétaire 6 ( * ) sur le projet de loi de finances pour 2009, le fait que la prévision budgétaire de la prise en charge des demandeurs d'asile ne serait certainement pas soutenable en 2009. Il indiquait ainsi que si le nombre des demandes d'asile se stabilisait, le coût de la prise en charge des demandeurs dépasserait de 75 % la dotation budgétaire initiale et que si le nombre des demandeurs s'accroissait de 10 % en 2009, la dotation budgétaire serait dépassée de 93 %.

Or, d'après les informations transmises par le ministère en charge de l'immigration, le nombre de demandeurs d'asile a progressé de 19,7 % au cours de l'année 2008 et, au 30 juin 2009, la croissance se poursuivait sur un rythme annuel de + 16,5 %.

Evolution des demandes d'asile formulées en France

Année

Premières

demandes

Réexamens

Total demandes hors mineurs accompagnants

Demandes mineurs accompagnants

Total général

2005

42.578

9.488

52.066

7.155

59.221

2006

26.269

8.584

34.853

4.479

39.332

2007

23.804

6.133

29.937

5.583

35.520

2008

27.063

7.195

34.258

8.341

42.599

2009

(données provisoires sur 6 mois)

15.844

2.923

18.767

3.572

22.339

2010

(données prévisionnelles)

28.500

Non précisé

Non précisé

Non précisé

45 500

Source : ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Or, le projet de loi de finances pour 2010 a été élaboré sur la base d'un nombre de demandes d'asile en très faible progression par rapport à l'année 2008, et évalué à 45.500, comme l'indique le tableau ci-dessus.

Malgré l'imprévisibilité intrinsèque de l'évolution des demandes d'asile, votre rapporteur spécial regrette la persistance du Gouvernement à élaborer le budget correspondant aux actions de traitement des dossiers et à la prise en charge des demandeurs d'asile sur la base d'une évolution du nombre de demandes qui paraît peu réaliste . Des explications devront être fournies à ce sujet.

b) Une hausse significative mais insuffisante des crédits

Les crédits dédiés à l'accueil des demandeurs d'asile augmentent de 10 % (AE = CP) dans le présent projet de loi de finances. Toutefois, cette hausse sera probablement insuffisante pour faire face aux dépenses réelles suscitées par les demandeurs d'asile au cours de l'année 2010 , puisque le rythme d'augmentation des demandeurs d'asile est supérieur à 10 % et que les crédits disponibles en 2009 seront vraisemblablement insuffisants pour satisfaire les besoins.

L'essentiel des crédits du programme est affecté aux centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) , qui sont au nombre de 271, pour une capacité d'accueil de 20.689 places. 202,63 millions d'euros seront consacrés aux CADA en 2010, soit une progression de 3,6 % par rapport à l'année 2009. Au cours de l'année 2010, il est par ailleurs prévu de créer 1.000 nouvelles places de CADA . Le coût moyen de l'hébergement de référence est de 26,20 euros par jour.

Les autres crédits d'hébergement, à hauteur de 30 millions d'euros en 2010, seront dédiés aux dispositifs d'hébergement d'urgence , d'une capacité estimée à 5.478 places, qui servent à accueillir à titre transitoire les demandeurs d'asile dans l'attente de leur admission en CADA ou ceux qui n'ont pas droit à l'hébergement dans ces centres. Ces crédits sont stables par rapport à l'année 2009 .

Enfin, cette action regroupe aussi, à hauteur de 53 millions d'euros, les crédits de financement de l'allocation temporaire d'attente (ATA) , créée par la loi de finances initiale pour 2006 7 ( * ) et versée aux demandeurs d'asile pendant toute la durée de la procédure d'instruction de leur demande. Le montant de l'allocation est de 10,57 euros par jour. En raison de l'augmentation du nombre de demandes d'asile et de la non diminution des délais d'instruction de ces demandes, les crédits consacrés à l'ATA augmentent de 76,7 % par rapport à l'année 2009 , ce qui devrait permettre de faire face aux besoins budgétaires de l'année 2010. A posteriori , cette hausse révèle également la sous-budgétisation manifeste des crédits destinés à l'ATA dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2009.

c) Le transfert à l'OFII de l'accompagnement social des demandeurs d'asile

Traditionnellement, l'Etat prenait en charge l'accueil, l'information et le conseil des demandeurs d'asile dans les départements qui en reçoivent un flux significatif.

Depuis 2008, dans la perspective de la régionalisation de l'admission au séjour des demandeurs d'asile, intervenue au 1 er mai 2009, le ministère de l'immigration met en oeuvre une rationalisation de l'organisation du premier accueil. Elle se traduit notamment par le transfert, le 1 er janvier 2010, à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) 8 ( * ) , de la coordination du pilotage, du premier accueil et de l'accompagnement des demandeurs d'asile ainsi que du financement de cette mission .

2. La gestion, par le ministère, des centres de rétention administrative (CRA)

a) Le transfert au ministère en charge de l'immigration des crédits d'investissement des CRA

L'action n° 3 du présent programme regroupe des crédits destinés à la lutte contre l'immigration irrégulière. En raison du partage de compétences entre le ministère en charge de l'immigration et les autres ministères, cette action ne regroupait en 2009 que les crédits de fonctionnement des centres de rétention administrative (CRA) et de soutien aux retenus dans les CRA ainsi que les crédits consacrés à l'éloignement des retenus.

Le rapport précité de votre commission des finances relatif à la gestion des CRA concluait notamment que « la gestion administrative et budgétaire des centres doit [...] être clarifiée afin d'assurer un pilotage plus satisfaisant du dispositif de rétention administrative et de mettre en place un suivi budgétaire des crédits aujourd'hui défaillant ».

Au regard de ces travaux, votre rapporteur spécial est satisfait de constater que le périmètre de la mission « Immigration, asile et intégration » a été, dans le cadre du présent projet de loi de finances, étendu aux crédits d'investissement des CRA, c'est-à-dire aux dépenses de construction et d'entretien de ces centres . Cette configuration paraît en effet plus cohérente qu'un partage entre les crédits de fonctionnement et d'investissement des CRA entre deux ministères et deux missions ministérielles. Ce changement de périmètre se traduit par une augmentation sensible des crédits de l'action n° 3, à hauteur de 24 millions d'euros en AE et de 14 millions d'euros en CP. Au sein des CP, le ministère en charge de l'immigration indique que 6,8 millions proviennent de crédits transférés à partir d'autres missions budgétaires vers la mission « Immigration, asile et intégration ». L'effort supplémentaire mis en oeuvre peut donc être évalué à 7,2 millions d'euros .

D'après le projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances, ces fonds concernent, en 2010, les CRA de Vincennes, du Mesnil-Amelot II, Mesnil-Amelot III et de Mayotte ainsi que la construction des deux salles d'audience du Mesnil-Amelot, à parité par le ministère de l'intérieur et le ministère en charge de l'immigration. Par ailleurs, la reconstruction du CRA de Bordeaux, dont les modalités de financement ne sont pas définitivement arrêtées, est également prévue. Enfin, le programme vise à participer au financement de la zone d'attente d'Orly.

Malgré cette clarification des compétences du ministère en charge de l'immigration quant à la gestion des CRA, d'autres améliorations doivent encore être mises en oeuvre. En effet, l'ensemble des crédits de fonctionnement des CRA n'est pas regroupé au sein de la mission « Immigration, asile et intégration » puisque les dépenses de personnels et de soutien de la police et de la gendarmerie (carburants, véhicules, frais de mission, salaires) restent supportées par les crédits des programmes n° 176 « Police nationale » et n° 152 « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurité ». Par ailleurs, le suivi de la dépense ne permet pas d'estimer convenablement le coût global de la rétention, notamment dans les lieux de rétention administrative (LRA) destinés à héberger les retenus en l'absence de centres de rétention.

b) Des interrogations sur le nombre des retenus effectivement reconduits à la frontière

L'objectif de doublement du nombre d'étrangers reconduits, fixé en 2003, a été atteint dès 2006 , comme l'indique le tableau ci-dessous.

Objectifs chiffrés et reconduites effectuées (chiffres pour la métropole)

Objectif fixé

Mesures d'éloignement exécutées

Dont retours forcés

Dont retours aidés (Anaem)

Taux de réalisation global

Taux de réalisation hors retours aidés

2003

Nd

12 482

12 482

2004

16 843

15 659

15 659

70,3%

70,3%

2005

23 000

19 849

19 849

86,3%

86,3%

2006

25 000

23 843

22 415

1 428

95,4%

89,7%

2007

25 000

23 196

19 885

3 311

92,8%

79,5%

2008

25 000

29 796

19 724

10 072

119,2%

78,9%

Source : Ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Comme l'indiquait votre rapporteur spécial dans son rapport précité sur la gestion des CRA, « les chiffres globaux des mesures d'éloignement exécutées, en apparence satisfaisants, masquent toutefois une diminution du nombre de retours forcés depuis 2006 ainsi qu'un effondrement du taux d'exécution des mesures d'éloignement forcé prononcées, passé de 62,1 % en 2002 (10.067 éloignements forcés effectifs pour 16.406 prononcés) à 19,4 % en 2008 (19.724 éloignements réalisés pour 101.539 prononcés) : moins d'une mesure d'éloignement forcé sur cinq est aujourd'hui effectuée ».

La diminution de ce taux résulte toutefois directement de l'augmentation du nombre d'interpellations.

Votre rapporteur spécial relève également l'évolution à la baisse du nombre de retenus dans les CRA effectivement reconduits , hors retours volontaires. Ce nombre est passé de 16.909 en 2006 à 15.170 en 2007 et 14.411 en 2008. On constate donc que, si le nombre de retenus augmente, leur reconduite effective à la frontière est de moins en moins fréquente , nombre d'entre eux étant remis en liberté.

Les causes de ces remises en liberté sont multiples :

- erreurs de procédure des services interpellateurs ;

- refus du pays d'accueil de délivrer des laissez-passer consulaires ;

- situation où les retenus sont de facto non reconductibles, pour cause notamment d'absence de document justifiant leur identité.

Des solutions doivent être apportées à ces problèmes : les services interpellateurs doivent être mieux formés sur la qualité des procédures, la présence d'un représentant de l'Etat devant les juridictions doit être systématisée, enfin, les relations avec les pays étrangers doivent être renforcées afin d'obtenir plus systématiquement les laissez-passer consulaires nécessaires pour reconduire un étranger dans son pays.

Il reviendra au Gouvernement d'éclairer la représentation nationale sur les actions menées afin de répondre à ce problème.

c) Les autres composantes de l'action n° 3 « Lutte contre l'immigration irrégulière »

Deux éléments peuvent être dégagés de l'analyse des autres composantes de l'action n° 3 « Lutte contre l'immigration irrégulière » :

- les frais d'éloignement des migrants diminuent de 42 à 37,5 millions d'euros sous l'effet combiné d'une hausse modérée de l'objectif des reconduites, qui passe de 26.000 en 2009 à 27.000 en 2010, et d'une diminution du coût moyen de la billetterie, de 1.500 à 1.390 euros. Cette diminution résulte de la passation d'un nouveau marché, plus économique, en matière de titres de transport (avion, train, etc.) pour la mise en oeuvre des reconduites ;

- l'accompagnement social des retenus se voit doté de 6 millions d'euros en 2010 contre 5 millions d'euros en 2009 . Il comprend des actions d'information et d'aide à l'exercice des droits dans les zones d'attente. Ces actions s'inscrivent dans le cadre du nouveau marché d'aide aux droits des étrangers retenus, alloti entre plusieurs titulaires, qui devrait prendre son plein effet en 2010, en se substituant au marché actuel attribué à la CIMADE. L'augmentation des crédits consacrés à ces actions correspond, d'une part, à l'augmentation du nombre de places dans les CRA et, d'autre part, à la demande de nouvelles prestations par l'administration en termes de qualification des personnels intervenants dans les CRA.

3. La consolidation administrative du ministère

Les fonctions de soutien inscrites au programme n° 303 se répartissent entre, d'une part, les dépenses de personnel du ministère en charge de l'immigration et, d'autre part, l'action n° 4 du programme, qui regroupe les autres crédits destinés à la mutualisation et au pilotage des fonctions transversales du ministère. Les crédits de l'action n° 4, en légère augmentation par rapport à l'année dernière (+ 2,7 % en AE et + 0,8 % en CP) n'appellent pas de remarque particulière.

a) Une augmentation justifiée des dépenses de personnel

En termes de dépenses de personnel, votre rapporteur spécial relève que le programme n° 303 regroupe l'ensemble des effectifs du ministère. A ce titre, il comprend 615 ETPT. Ce plafond d'emploi augmente par rapport à l'année 2009, où il était fixé à 613 ETPT .

En effet, malgré la suppression de 8 ETPT, plusieurs mesures de transfert conduisent à une hausse de 10 emplois des effectifs du ministère. Le projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances précise que, « au vu de la situation spécifique des effectifs du ministère, notamment la taille de son plafond d'emploi par rapport à celui d'un ministère classique, les ratios usuels de gestion des ressources humaines ne peuvent s'appliquer qu'avec réserve ». Ainsi, la règle de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux ne trouve notamment pas à s'appliquer au sein du ministère.

Votre rapporteur spécial estime cette dérogation justifiée au regard de deux éléments : d'une part, l'administration du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire est une administration d'état-major, dont le format est relativement réduit, et, d'autre part, sa constitution est récente ce qui explique qu'elle soit moins soumise aux impératifs de rationalisation fixés pour l'ensemble de l'administration d'Etat.

Par conséquent, les dépenses de personnel (dépenses de titre 2) du programme augmentent de 6,9 % entre 2009 et 2010, passant de 36 à 38,5 millions d'euros .

b) Le regroupement des services sur un nombre limité de sites

Votre rapporteur spécial relevait, dans son rapport précité sur la mission « Immigration, asile et intégration » dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour l'année 2009, que les services du ministère en charge de l'immigration étaient répartis sur six sites parisiens, ce qui ne favorisait pas la création d'une culture de travail commune à des agents qui proviennent à l'origine de ministères très différents.

Au regard des préconisations qu'il avait formulées, il est satisfaisant de constater que, depuis fin mai 2009, les services parisiens sont regroupés sur un nombre plus limité de sites . Deux sites accueillent aujourd'hui l'intégralité des services : un immeuble partagé avec les services du Premier ministre au 68, rue de Bellechasse et les anciens locaux occupés auparavant par une direction des finances au 3-5, rue Barbet de Jouy. Ces deux sites se situent par ailleurs à proximité de l'hôtel du ministre, au 101, rue de Grenelle.

D'après les informations transmises par le ministère en charge de l'immigration à votre rapporteur spécial, ces regroupements ont permis de réduire de 1,8 millions d'euros les dépenses de fonctionnement du ministère , correspondant à la fin d'un contrat de location pour des bureaux rue de Rennes.

4. Des délais d'instruction des demandes d'asile toujours insatisfaisants

a) L'Ofpra

La subvention pour charges de service public de l'Ofpra augmente de 10,3 % , passant de 29 à 32 millions d'euros entre 2009 et 2010.

Cette hausse devra servir à améliorer la qualité du traitement des dossiers par l'Ofpra et à poursuivre les efforts déjà fournis pour réduire leur délai d'examen et matérialisés dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens du 9 décembre 2008. Ce délai est ainsi passé de 105 jours en 2007 à 95 jours en 2009 et devra atteindre 90 jours en 2010.

b) La CNDA

Les décisions de l'Ofpra peuvent ensuite être portées devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Votre rapporteur spécial relevait l'année passée que « les délais d'instruction devant la Cour nationale du droit d'asile repartent à la hausse, [...] les délais moyens d'examen des recours étant passés entre 2007 et 2008 de 357 jours à 415 jours » 9 ( * ) .

La CNDA a été rattachée, à partir du 1 er janvier 2009, au Conseil d'Etat. Cette évolution devrait permettre une amélioration des délais de traitement par la Cour . Toutefois, à court terme, votre rapporteur spécial regrette qu'elle rende difficile la lecture de l'évolution des délais d'instruction. En effet, le document de politique transversale ne présente ni délai effectif pour l'année 2008 ni délai actualisé pour l'année 2009, ni prévision pour l'année 2010. Ces lacunes semblent résulter du changement des outils de collecte des données provoquée par l'évolution institutionnelle de la Cour. Le DPT précise ainsi que « les données statistiques jusqu'en 2008 sont établies par le service des études et de la communication de l'Ofpra et consolidées par le Secrétariat général de la CNDA. A partir de 2009, elles devraient être extraites de l'infocentre des juridictions administratives ».

Au regard de la nécessité d'accélérer fortement les délais de traitement des dossiers par la CNDA, votre rapporteur spécial regrette ces lacunes . Les délais de traitement des demandes d'asile sont d'ailleurs l'un des principaux facteurs de coût pour la mission.

B. LE PROGRAMME N° 104 « INTÉGRATION ET ACCÈS À LA NATIONALITÉ FRANÇAISE »

1. Une forte augmentation des crédits destinés à l'intégration et à l'accès à la nationalité française : + 9,2 %

Le second programme de la mission, n° 104, « Intégration et accès à la nationalité française » regroupe les crédits d'intervention consacrés aux actions d'insertion des migrants, la subvention pour charge de service public à l'OFII, les crédits en faveur des aides au retour ou à la réinsertion des étrangers dans leur pays d'origine et les dépenses de fonctionnement de la sous-direction des naturalisations, délocalisée à Rezé depuis 1987.

Ce programme est d'un montant budgétaire plus faible que le premier puisqu'il retrace, en prévision pour 2010, 79,8 millions d'euros (AE = CP), soit 16,6 % des CP du programme n° 303 consacré à l'immigration et l'asile .

Evolution des crédits du programme n° 104 (AE = CP)

(en millions d'euros)

Votées en 2009

Prévues en 2010

Evolution

Action n° 11 « Accueil, intégration des étrangers primo-arrivants et apprentissage de la langue française »

10,3

15,0

+ 45,6 %

Action n° 12 « Autres actions d'intégration des étrangers en situation régulière »

59,5

61,3

+ 3 %

Action n° 13 « Aide au retour et à la réinsertion »

1,5

1,5

-

Action n° 14 « Naturalisation et accès à la nationalité »

1,8

2,0

+ 11 %

Total

73,11

79,8

+ 9,2 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2010

Les crédits qui sont demandés au Parlement pour ce programme augmentent fortement, en 2010, par rapport à la loi de finances initiale pour 2009 , comme l'indique le tableau ci-dessus.

Par ailleurs, 15 millions d'euros de fonds de concours sont attendus pour l'année 2010, au titre du fonds européen d'intégration et du fonds européen pour les réfugiés.

2. Un retour à la normale de la situation financière de l'OFII

L'action n° 1 « Accueil, intégration des étrangers primo-arrivants et apprentissage de la langue française » est celle du programme qui connaît la plus forte hausse. Elle est composée uniquement des subventions pour charges de service public à l'Office national de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui voient leur montant passer de 10 à 15 millions d'euros entre la loi de finances initiale pour 2009 et le présent projet de loi de finances.

Le conseil de modernisation des politiques publiques a décidé, le 4 avril 2008, la création, sur la base de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), d'un nouvel opérateur de l'État en matière d'immigration et d'intégration, l'Office français de l'immigration et de l'intégration (mesure 169 de la RGPP). Ce nouvel opérateur a été mis en place en plusieurs phases successives. Il a été intégralement substitué à l'ANAEM au 25 mars 2009 et a tenu son premier conseil d'administration le 22 avril 2009. D'après les informations recueillies par votre rapporteur spécial auprès du ministère, un contrat d'objectifs et de performance doit par ailleurs être signé avec l'OFII d'ici la fin de l'année 2009.

L'Office national de l'immigration et de l'intégration (OFII)

L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé, sur l'ensemble du territoire, de l'accueil des étrangers titulaires, pour la première fois, d'un titre les autorisant à séjourner en France et, lorsqu'ils se destinent à y séjourner durablement, de les engager dans un parcours d'intégration dans la société française pendant les cinq premières années de leur résidence en France.

L'opérateur a également pour mission de participer à toutes actions administratives, sanitaires et sociales relatives :

1) à l'entrée et au séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois des étrangers ;

2) à l'introduction en France, au titre du regroupement familial ou du mariage avec un Français, d'étrangers ressortissants de pays tiers à l'Union européenne ; pour préparer leur intégration, l'Office sera responsable de l'organisation de tests et, le cas échéant, de formations dès le pays d'origine ;

3) à l'introduction en France, au titre du travail, d'étrangers ressortissants de pays tiers à l'Union européenne et des ressortissants mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 21-2 du code civil ; à ce titre, l'Office facilitera l'action des entreprises à l'étranger ;

4) à l'organisation du contrôle médical des étrangers admis à séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois ;

5) à l'accueil et au suivi des demandeurs d'asile, notamment dans les conditions prévues par le II de l'article L. 348-3 du code de l'action sociale et des familles ;

6) au retour et à la réinsertion des étrangers dans leur pays d'origine ainsi qu'à des actions de développement solidaire.

Dans le cadre du parcours d'intégration, l'Office est chargé de la mise en oeuvre des dispositifs d'apprentissage de la langue française adaptés aux besoins d'intégration des personnes de nationalité étrangère.

Source : ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Votre rapporteur spécial s'était inquiété, l'année dernière, du risque de surbudgétisation de cette subvention . Il relevait en effet que « malgré l'absence de versement des dotations de l'Etat durant trois années consécutives, le fonds de roulement n'a pas été significativement réduit et reste bien au-delà des normes prudentielles applicables aux établissements publics ».

Or, d'après les informations transmises à votre rapporteur spécial par le ministère en charge de l'immigration :

- d'une part, l'année 2009 devrait nécessiter le versement d'une subvention pour charges de service public , dont le montant pourrait, selon les informations recueillies par votre rapporteur spécial, s'approcher de 4 millions d'euros sur les 10 millions prévus en loi de finances initiale pour 2009 ;

- d'autre part, le fonds de roulement décroît nettement et devrait représenter en 2009 environ 20 millions d'euros, soit un montant correspondant à moins de deux mois de budget de fonctionnement de l'opérateur, ce qui le rend plus conforme aux règles prudentielles applicables aux établissements publics.

Evolution du fonds de roulement de l'OFII depuis 2005

(en millions d'euros)

Source : ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

La subvention s'avère donc davantage nécessaire en 2010, étant donnée la situation financière plus saine de l'OFII . Votre rapporteur spécial veillera toutefois à ce que l'accumulation d'un fonds de roulement trop important ne se renouvelle pas et s'interroge, à ce titre, sur la nécessité d'une augmentation de 5 millions d'euros de cette subvention par rapport à l'année dernière.

Au titre du bilan d'activités de l'OFII en matière de contrat d'accueil et d'intégration (CAI), pierre angulaire du dispositif d'intégration des étrangers en France, on relève que 103.952 contrats ont été signés en 2008, en progression de 2,7 % par rapport à l'année 2007. Par ailleurs, 99,6 % des personnes accueillies dans les plates-formes gérées par l'OFII ont signé un CAI.

3. Une hausse de 3 % des crédits de la principale action du programme : « Actions d'intégration des étrangers en situation régulière et des réfugiés »

L'action n° 2 « Actions d'intégration des étrangers en situation régulière et des réfugiés » constitue l'essentiel du programme n° 104 puisqu'elle regroupe près de 77 % de ses crédits de paiement. Elle est dotée par le projet de loi de finances pour l'année 2010 de 61,3 millions d'euros (AE = CP), en progression de 3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009 .

Cette action regroupe des dispositifs divers.

Elle inclut une subvention pour charges de service public de 3 millions d'euros à la Cité nationale de l'histoire de l'immigration (CNHI) , établissement public administratif créé en novembre 2006 et mis sous tutelle des ministères chargés de la culture, de l'intégration, de l'éducation nationale et de la recherche. Le programme chef de file concernant la CNHI fait toutefois partie de la mission « Culture », en raison du caractère principalement culturel des missions de la Cité.

La moitié des crédits de l'action finance des interventions en faveur de la promotion sociale et professionnelle des personnes immigrées :

- des dispositifs nationaux tels que l'aide intitulée « Parcours de réussite professionnelle » (PARP), qui soutient les meilleurs étudiants étrangers, en complément des bourses au mérite, pendant trois ans au cours de leurs études supérieures ;

- des contributions aux dispositifs territoriaux de soutien aux étrangers, tels que les postes d'agents de développement local pour l'intégration (ADLI). Ces dispositifs reçoivent également des contributions des collectivités territoriales et de l'Acsé (Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances).

Le projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances indique que « sans être totalement finalisée, la répartition des financements en l'échelon national [...] et l'échelon territorial devrait être de l'ordre de deux tiers/un tiers ». Ce sont ces dispositifs qui bénéficient, pour l'essentiel, de la hausse de 3 % des crédits du programme .

Cette action comporte également 15,1 millions d'euros (AE = CP) en faveur de l'intégration des réfugiés , qui se répartissent entre, d'une part, des subventions à des associations et, d'autre part, le financement des établissements spécialisés que sont les centres d'hébergement provisoire des réfugiés. Ces centres, d'une capacité de 1.083 places, résultent directement des obligations prévues par la Convention de Genève.

Enfin, 12,7 millions d'euros sont demandés, par le présent projet de loi de finances, pour le financement des foyers de travailleurs migrants (FTM) . Une part importante de ces crédits sera consacrée à la mise en oeuvre du Plan de traitement des foyers des travailleurs migrants, qui vise à transformer ces foyers spécifiques en des résidences sociales de droit commun, ce qui implique d'importants travaux de mise aux normes. Par ailleurs, ces crédits financent également l'accompagnement social des occupants des FTM.

MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE NON RECONDUCTIBLE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à majorer à titre non reconductible de 8.000 euros les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

II. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE RECONDUCTIBLE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement minorant les crédits de 3.834.192 euros en AE et de 2.952.219 en CP, destinés principalement à financer les mesures annoncées par le Président de la République en faveur de l'agriculture et de l'outre-mer.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 28 octobre 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial, sur la mission « Immigration, asile et intégration ».

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a tout d'abord rappelé le caractère intrinsèquement interministériel de la politique d'immigration et d'intégration des étrangers en France. Cette politique transversale représentera, d'après le projet de loi de finances pour 2010, 3,62 milliards d'euros en crédits de paiement, en augmentation de 4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Au total, ce sont quinze programmes répartis dans onze missions et entre dix périmètres ministériels qui contribuent à cette politique transversale. La mission « Immigration, asile et intégration » ne représente que 560 millions d'euros soit 15,6 % des crédits consacrés à cette politique.

Les principales missions contribuant à la politique d'immigration et d'intégration sont les missions à caractère social ou culturel du budget de l'Etat. Ainsi, la mission « Recherche et enseignement supérieur » représente plus de 40 % des crédits de cette politique et la mission « Santé » environ 15 %, soit un taux équivalent à la contribution de la mission « Sécurité ».

Le caractère interministériel de la politique d'immigration et d'intégration rend parfois difficile l'appréhension de ses coûts, par exemple de ceux des reconduites à la frontière des étrangers en situation irrégulière. A ce propos, M. Eric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, avait annoncé lors de son audition devant la commission des finances, le 1 er juillet 2009, qu'une étude de l'inspection générale de l'administration était en cours. M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a indiqué qu'il venait de recevoir le rapport de cette inspection.

La mission « Immigration, asile et intégration » est également, du point de vue budgétaire, une mission à caractère social. En effet, moins de 17 % de ses crédits correspondent à la politique de lutte contre l'immigration clandestine, la majorité des crédits étant consacrée à l'accueil et à l'accompagnement des demandeurs d'asile ainsi qu'au traitement des demandes d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra).

Puis, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a présenté les crédits de la mission proposés pour l'année 2010. Ceux-ci s'élèvent à 570 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 560 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Ils sont en augmentation de respectivement 12 % et 9,8 % par rapport à l'année 2009. La hausse nette des crédits de paiement se réduit toutefois à 8,4 % si l'on neutralise les effets d'une mesure de périmètre mise en oeuvre entre les années 2009 et 2010, à savoir le transfert au ministère de l'immigration des crédits d'investissement relatifs aux centres de rétention administrative (CRA), auparavant gérés par le ministère de l'intérieur.

L'augmentation des crédits est relativement équilibrée entre les deux programmes de la mission : « Immigration et asile » et « Intégration et accès à la nationalité française ».

Le premier de ces programmes est, budgétairement, le plus important, puisqu'il représente plus de 85 % des crédits de la mission.

Il regroupe notamment les crédits destinés à l'accueil des demandeurs d'asile et à l'instruction de leurs demandes. Sur ce point, la prévision qui a servi de base à la construction du projet de budget pour 2010 paraît sous-évaluée. En effet, le nombre prévisionnel de demandeurs d'asile pour 2010 est de 45500, ce qui représente une augmentation de 6,8 % par rapport au nombre effectifs de demandes en 2008. Cette prévision est très optimiste si on la compare au rythme d'augmentation de 19,7 % des demandes en 2008 et de 16,5 % sur les premiers mois de l'année 2009. Le ministère du budget semble prévoir une diminution du nombre de demandes après le pic constaté depuis la fin de l'année 2008. La sous-évaluation des crédits liés aux demandes d'asile n'est pas nouvelle. Un décret d'avance est en effet prévu pour abonder, au titre de l'année 2009, les crédits liés aux demandes d'asile à hauteur de 60 millions d'euros en CP et de 70 millions d'euros en AE.

Il en résulte que les crédits de l'action n° 2 « Garantie de l'exercice du droit d'asile » paraissent, comme en 2009, sous-évalués, malgré une hausse de 10 % par rapport au projet de loi de finances initial pour 2009.

Le programme « Immigration et asile » regroupe également certains crédits de fonctionnement des CRA. Il convient de se réjouir du transfert dans ce programme des crédits d'investissement des CRA, auparavant gérés par le ministère de l'intérieur, qui doit permettre une meilleure appréhension du coût de la rétention. 24 millions d'euros en AE et 14 millions d'euros en CP seront consacrés à la construction et à l'entretien des CRA en 2010, soit une hausse de 7,2 millions d'euros par rapport à l'année 2009.

Le programme intègre également les dépenses de soutien du ministère. A ce sujet, il est satisfaisant de constater que les services parisiens, auparavant dispersés dans six sites, se sont regroupés dans seulement deux sites et qu'une économie de 1,8 million d'euros en a résulté.

Enfin, ce programme comporte 32 millions d'euros de subvention de service public pour l'Ofpra, qui traite les demandes d'asile. La performance de l'Ofpra s'est très nettement améliorée, avec un délai de traitement moyen des demandes d'environ trois mois qui paraît incompressible. En revanche, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui examine les recours contre les décisions de l'Ofpra, présentait des délais de traitement des dossiers de plus de quatorze mois en 2008. Elle a été rattachée au Conseil d'Etat depuis le 1 er janvier 2009 et dix nouveaux postes de magistrats ont été créés. M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, s'est proposé, en 2010, d'examiner le fonctionnement de cette juridiction, qui constitue le principal gisement d'économies budgétaires pour la mission « Immigration, asile et intégration ».

Il a ensuite indiqué que le second programme de la mission, « Intégration et accès à la nationalité française », est de moindre importance puisqu'il regroupe seulement 80 millions d'euros de crédits. Ces crédits augmentent de 9,2 % par rapport à 2009, essentiellement en raison du passage de 10 à 15 millions d'euros de la subvention versée à l'Office national de l'immigration et de l'intégration (Ofii), opérateur qui gère l'accueil et l'intégration des étrangers primo-arrivants.

Il a rappelé avoir relevé, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2009, la surbudgétisation de cette subvention qui n'était, en pratique, jamais versée à l'Office, celui-ci disposant d'un fonds de roulement largement supérieur à ses besoins. Dans le présent projet de loi de finances, le fonds de roulement a décru de manière satisfaisante et la situation financière de l'Office est donc revenue à la normale.

En conclusion, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a estimé que ce projet de budget, en augmentation, peut faire l'objet d'une appréciation positive pour plusieurs raisons : la restructuration immobilière du ministère, le transfert de la gestion des crédits d'investissement des CRA et le retour à une situation financière saine pour l'Ofii. Toutefois, des problèmes persistent quant au caractère réaliste des prévisions en matière de flux des demandeurs d'asile. Bien que ce flux soit imprévisible, l'Ofpra pourrait conduire une analyse plus précise de l'origine et des causes des demandes d'asile et tenter, à partir de ces éléments, d'affiner ses prévisions.

Sous le bénéfice de ces observations, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a préconisé l'adoption sans modification des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

M. Jean Arthuis , président, a estimé que la politique d'immigration est une des plus délicates à mener et qu'elle nécessite beaucoup de tact et d'humanité.

Mme Michèle André s'est interrogée sur la possibilité de financer 1.000 places supplémentaires dans les centres d'accueil des demandeurs d'asile avec une hausse de seulement 3,6 % des crédits qui leur sont consacrés.

En réponse, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a indiqué que les leçons des insuffisances passées ont été tirées et que le projet de budget doit effectivement permettre la création de 1000 places nouvelles.

Mme Michèle André a soulevé la question de la qualité et de l'exhaustivité du document de politique transversale ainsi que des éventuels problèmes liés à l'articulation entre le ministère en charge de l'immigration et ses ministères partenaires, notamment celui de l'intérieur.

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a rappelé les difficultés résultant, en termes de clarté budgétaire, du caractère interministériel de la politique d'immigration et d'intégration, qui associe dix ministères différents. Le document de politique transversale s'est amélioré et le chiffre de 3,62 milliards d'euros paraît réaliste. Toutefois, certains outils manquent pour parvenir à chiffrer, à l'euro près, le coût de cette politique transversale.

M. Jean Arthuis , président, a relevé que de nombreux crédits d'aide sociale à destination des étrangers vivant en France ne sont pas retracés dans le document de politique transversale.

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a confirmé que la contribution de la mission « Santé » correspond essentiellement aux crédits de l'aide médicale d'Etat et que d'autres dépenses sont absentes, telles que celles de l'enseignement primaire et secondaire. Des progrès doivent donc encore être faits. Le travail de l'inspection générale de l'administration sur le coût de la reconduite à la frontière fournira probablement des éléments méthodologiques pertinents pour chiffrer le coût global de la politique d'immigration et d'intégration.

M. Adrien Gouteyron a souhaité pouvoir mieux appréhender les actions menées par le ministère de l'éducation nationale en faveur de l'intégration des jeunes issus de l'immigration. L'ampleur de la tâche est immense au regard des difficultés rencontrées par certains jeunes, notamment en matière de maîtrise de la langue française.

A ce sujet, M. Jean Arthuis , président, a rappelé que la commission des finances organise, le mardi 3 novembre 2009, une audition pour suite à donner à un rapport de la Cour des comptes sur l'articulation entre les dispositifs de la politique de la ville et ceux de l'éducation prioritaire dans les quartiers sensibles, à laquelle participeront notamment des proviseurs et principaux des établissements scolaires concernés.

M. Adrien Gouteyron a fait observer, dans le cadre du débat annoncé sur l'identité nationale, que de nombreux jeunes issus de l'immigration ne se reconnaissent pas comme Français. Par ailleurs, il a souhaité connaître les initiatives européennes en cours sur ce sujet.

En réponse, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a rappelé que M. Brice Hortefeux, alors ministre en charge de l'immigration, a organisé, en novembre 2008, une conférence européenne réunissant, à Vichy, les responsables européens des politiques d'immigration. Un pas a donc été franchi dans la prise de conscience de la nécessité d'une harmonisation des politiques au niveau de l'Union européenne.

Mme Michèle André a jugé qu'il serait utile de former les jeunes migrants à la langue française avant même de les scolariser, afin d'atténuer les problèmes qu'ils rencontrent.

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a distingué deux sujets :

- d'une part, les difficultés d'intégration des jeunes Français issus de l'immigration, évoquées par M. Adrien Gouteyron, qui ne relèvent pas directement de la mission « Immigration, asile et intégration » ;

- d'autre part, la question de la formation, notamment linguistique, des primo-arrivants. En cette matière, le ministère de l'immigration a mis en place des actions de formation, dans les pays d'origine, avant les regroupements familiaux, afin de faciliter en amont l'intégration ultérieure des étrangers. Par ailleurs, un nombre croissant de contrats d'accueil et d'intégration est signé chaque année et ces contrats comportent des actions spécifiques en matière de maîtrise de la langue française.

M. Jean Arthuis , président, a souhaité que l'accent soit mis sur les lacunes du document de politique transversale et sur la difficulté à appréhender l'ensemble de l'effort de l'Etat en matière d'immigration et d'intégration.

A l'invitation du rapporteur spécial, la commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.

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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa position tendant à l'adoption sans modification des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », après avoir pris acte de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale.

* 1 Décret n° 2007-1891 du 26 décembre 2007 portant organisation de l'administration centrale du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

* 2 Loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008.

* 3 Le 10 juillet 2008 avec les ministères sociaux, le 4 février 2008 avec le ministère de l'intérieur, le 21 mai 2008 avec le ministère des affaires étrangères et le 6 janvier 2008 avec les ministères économiques et financiers. Une délégation de gestion concernant 4 agents a par ailleurs été signée le 14 avril 2009 avec l'Institut nationale de la statistique et des études économiques.

* 4 Immigration : la gestion des centres de rétention administrative peut encore être améliorée, rapport d'information n° 516 (2008-2009) de M. Pierre Bernard-Reymond, fait au nom de la commission des finances.

* 5 Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012.

* 6 Rapport spécial n° 99 - Tome III - Annexe 15, loi de finances pour 2009, mission « Immigration, asile et intégration », par M. Pierre Bernard-Reymond, au nom de la commission des finances.

* 7 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 8 L'OFII a succédé à l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) en avril 2009.

* 9 Rapport n° 99 - Tome III - Annexe 15 (2008-2009), loi de finances pour 2009, mission « Immigration, asile et intégration », par M. Pierre Bernard-Reymond, fait au nom de la commission des finances.

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