Article 2 bis (art. L. 226-4 et L. 226-4-1 du code de commerce) - Obligation de représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein du conseil de surveillance d'une société en commandite par actions

L'article 2 bis de la proposition de loi instaure dans les sociétés en commandite par actions la même obligation de représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein du conseil de surveillance. Tout en tenant compte des particularités de cette forme de société, il reprend des dispositions analogues à celles introduites par l'article 1 er pour les sociétés anonymes classiques à conseil d'administration.

Le texte issu des travaux de la commission des lois de l'Assemblée nationale, de même que la proposition de loi initialement déposée par nos collègues députés, ne prenait pas en compte les sociétés en commandite par actions, se limitant aux sociétés anonymes. L'article 2 bis a été introduit par l'Assemblée nationale en séance publique, à l'initiative de notre collègue Marie-Jo Zimmermann, rapporteur de la commission des lois.

Sur un amendement de son rapporteur, votre commission a procédé à une clarification rédactionnelle de ces dispositions, tout en veillant à leur bonne insertion dans le code de commerce et en reprenant les modifications déjà opérées aux articles 1 er et 2 pour les deux formes de sociétés anonymes.

Votre commission a adopté l'article 2 bis ainsi modifié .

Article 3 - Délais d'application de l'obligation de représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les conseils et règles applicables au cours de la période transitoire

L'article 3 de la proposition de loi prévoit la date d'entrée en vigueur de l'obligation de représentation équilibrée et des dispositions applicables au cours de la période transitoire avant cette date d'entrée en vigueur. Du fait de leur caractère transitoire, ces dispositions ne sont pas codifiées dans le code de commerce.

Dans son I , l'article 3 prévoit l'application à la date de publication de la loi des dispositions selon lesquelles, d'une part, le conseil d'administration ou de surveillance est composé en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes et, d'autre part, le rapport du président du conseil d'administration ou de surveillance à l'assemblée générale rend compte de l'application du principe de représentation équilibrée dans la composition du conseil, cette seconde disposition ne concernant que les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé.

L'article 3 prévoit que les autres dispositions entrent en vigueur six ans après la promulgation de la loi. Sont concernés la proportion minimale de 40 % pour chaque sexe, la nullité des nominations contraires, les dispositions concernant les personnes morales membres des conseils et les membres des conseils représentant les salariés.

Soucieuse de l'intelligibilité et de la claire application de la loi, qui prévoit une nouvelle obligation pour les sociétés, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur consistant à fixer l'entrée en vigueur de ces dispositions, ainsi que de la règle de suspension des jetons de présence, à compter du 1 er janvier de la sixième année suivant l'année de publication de la loi - le critère de publication au Journal officiel étant plus simple que celui de promulgation. L'entrée en vigueur coïncidera ainsi avec une date ayant une signification pour les sociétés concernées et un rapport avec le calendrier de la vie des sociétés, celui des exercices comptables et des assemblées générales ordinaires annuelles statuant sur ces exercices. Les sociétés cotées devront être en conformité avec le principe de représentation équilibrée dès le 1 er janvier, tandis que les sociétés remplissant les trois exercices précédents les conditions de seuil de 500 salariés et 50 millions de chiffres d'affaires ou de total de bilan auront jusqu'à l'assemblée générale ordinaire pour être en conformité.

Ainsi, si la loi est définitivement adoptée par le Parlement avant la fin de l'année 2010 et publiée au Journal officiel en 2010, l'entrée en vigueur de l'obligation de respecter une proportion minimale de 40 % de représentants de chaque sexe sera au 1 er janvier 2016. Si la loi est publiée en 2011, l'entrée en vigueur sera au 1 er janvier 2017.

Ces modalités d'entrée en vigueur doivent permettre aux sociétés concernées d'anticiper l'obligation de représentation équilibrée. Le délai de six ans correspond à la durée maximale légale du mandat d'administrateur ou de membre de conseil de surveillance, étant entendu qu'en pratique la durée des mandats est d'environ trois à quatre ans. Toutes les nominations devant intervenir dans cette période de six ans, qu'il s'agisse de renouvellements ou de nominations de nouveaux mandataires, pourront être préparées et soumises à la décision des assemblées générales d'actionnaires en toute connaissance de cause.

Dans ses II et III , l'article 3 prévoit des dispositions transitoires de nature à inciter les sociétés concernées à se rapprocher progressivement de la proportion de 40 % en procédant à des nominations de personnes appartenant au sexe sous-représenté.

En premier lieu, les sociétés entrant dans le champ d'application de la loi et dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé doivent atteindre une proportion minimale de 20 % dans les trois ans suivant la promulgation de la loi. Par coordination, votre commission a adopté un amendement visant à fixer cette échéance intermédiaire au 1 er janvier de la troisième année suivant l'année de la publication de la loi, soit au 1 er janvier 2013 ou 2014.

Votre commission a estimé que cette échéance intermédiaire ne devait concerner que les sociétés cotées, qui font appel public à l'épargne, et non celles entrant dans le périmètre de la loi du fait du franchissement des seuils de 500 salariés et 50 millions d'euros de chiffres d'affaires ou de bilan.

En deuxième lieu, lorsque l'un des deux sexes n'est pas représenté au sein du conseil d'administration ou de surveillance dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, l'article 3 dispose qu'au moins un représentant de ce sexe doit être nommé dès le premier renouvellement de mandat suivant la promulgation. Sauf à ignorer le rythme de la vie des sociétés et le caractère annuel des assemblées générales, le délai de six mois ne paraît pas pertinent. Par souci de clarté, il convient plutôt de prévoir une nomination à la première assemblée générale ordinaire qui suit la publication de la loi, même si cela doit être plus contraignant pour les sociétés dont les assemblées générales auront lieu peu de temps après cette publication. Votre rapporteur tient à préciser que cette obligation ne vaut que lorsque l'assemblée générale doit statuer sur des nominations : il n'est pas question de mettre fin à des mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance avant leur terme normal. Ceci permet également de prendre en compte les cas où le conseil serait au plafond légal du nombre de ses membres au moment de la publication de la loi. Dès lors, si la première assemblée générale ordinaire qui suit la publication de la loi n'a pas à statuer sur des renouvellements ou sur des nominations de nouveaux administrateurs, il n'y a pas lieu de procéder à des nominations concernant le sexe sous-représenté.

Sur la proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement de clarification rédactionnelle de cette disposition.

En troisième lieu, l'article 3 précise que les représentants permanents des personnes morales ayant la qualité d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance sont pris en compte pendant cette période transitoire. Par coordination, votre commission a adopté un amendement rédactionnel concernant ces représentants des personnes morales membres des conseils.

En dernier lieu, l'article 3 traite des sanctions au cours de la période transitoire. Il pose la sanction de nullité des nominations, en cas de violation des règles transitoires prévoyant une proportion de 20 % après trois ans et, s'il y a lieu, la nomination d'un représentant du sexe non représenté.

En revanche, en contradiction avec la règle générale prévue par la proposition de loi, l'article 3 prévoit qu'au cours de la période transitoire la nullité des nominations entraîne la nullité des délibérations auxquelles ont pris part les membres des conseils dont les nominations sont nulles. Cette sanction transitoire, qui figurait dans le texte issu des travaux de la commission des lois de l'Assemblée nationale, a été maintenue par l'Assemblée nationale. Votre commission estime que cette sanction, même transitoire, n'est pas adaptée.

Autant la sanction de nullité des nominations est justifiée, car c'est elle qui figurera in fine dans le texte du code de commerce - et cette sanction est plus lourde qu'il y paraît, puisqu'un conseil peut être composé de plusieurs membres dont la nomination est nulle, au point de ne plus respecter le minimum statutaire voire légal -, autant la sanction de nullité des délibérations paraît disproportionnée et de nature à remettre en cause la sécurité juridique des délibérations des conseils et par conséquent des rapports de la société avec des tiers et la protection de ces derniers. C'est un principe du droit des sociétés que toute irrégularité dans les délibérations des conseils et dans la prise de décision ne peut être opposable aux tiers de bonne foi : actes qui ne relèvent pas de l'objet social, méconnaissance d'une clause statutaire limitant les pouvoirs des dirigeants, actes violant l'intérêt social. Alors qu'une décision qui excède l'objet social engage la société à l'égard des tiers, il serait curieux qu'une simple irrégularité dans la composition de son conseil entraîne la nullité de ses délibérations lorsqu'elles concernent des tiers. Il peut s'agir d'un contrat stratégique pour l'avenir de la société, d'une décision d'acquisition, de la mise en oeuvre d'un plan social ou d'une procédure de redressement judiciaire, autant de décisions fondamentales sur lesquelles le conseil statue. Une telle nullité serait une source d'extrême insécurité dans la vie des affaires, déjà intrinsèquement marquée par l'incertitude.

Ainsi qu'il a été dit plus haut, le premier alinéa de l'article L. 210-9 dispose que « ni la société ni les tiers ne peuvent, pour se soustraire à leurs engagements, se prévaloir d'une irrégularité dans la nomination des personnes chargées de gérer, d'administrer ou de diriger la société, lorsque cette nomination a été régulièrement publiée ». Certes, cette disposition ne vaut que dans les relations avec les tiers et pas pour les délibérations qui ne concernent que les affaires internes de la société, mais elle illustre bien le principe selon lequel la composition irrégulière du conseil ne saurait affecter la régularité de ses décisions.

Dans le code de commerce, la nullité des actes est réservée aux cas les plus graves (articles L. 235-1 à L. 235-14) : nullité des délibérations prises sans respecter les droits de vote, nullité de la société en cas d'incapacité ou de vice du consentement d'un des premiers associés... L'article L. 235-8 dispose que « la nullité d'une opération de fusion ou de scission ne peut résulter que de la nullité de la délibération de l'une des assemblées qui ont décidé l'opération », alors pourquoi une irrégularité dans la composition du conseil pourrait-elle conduire à la nullité dans des décisions d'équivalente importance économique ?

Votre rapporteur s'interroge même sur la constitutionnalité d'une telle sanction, qui pourrait devenir très vite une cible privilégiée pour la nouvelle question prioritaire de constitutionnalité.

En outre, votre rapporteur estime paradoxal de prévoir des sanctions plus lourdes au cours de la période transitoire qu'après l'entrée en vigueur des dispositions définitives de la proposition de loi. Il convient certes d'inciter les sociétés concernées à procéder rapidement aux nominations requises, afin qu'elles puissent atteindre la proportion de 40 % dans les six ans, mais cette période transitoire doit consister en une montée en puissance progressive, qui permette aux sociétés et à leurs conseils de s'adapter et d'anticiper sur leurs obligations futures, de rechercher et de former les futurs administrateurs. C'est pour cette raison même que votre commission ne propose pas la suspension des jetons de présence au cours de la période transitoire. Cette sanction ne s'appliquera qu'à compter de l'entrée en vigueur des dispositions définitives de la loi, constituant ainsi une incitation à rendre conforme la composition des conseils avant cette date.

Sur la proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement consistant à supprimer toute nullité des délibérations.

Par ce même amendement, votre commission corrige une incohérence rédactionnelle selon laquelle les sanctions de la période transitoire demeurent valables lorsque les sociétés ne remplissent pas l'obligation de représentation équilibrée avec la proportion de 40 % à l'entrée en vigueur des dispositions définitives. Ceci aurait signifié la nullité des délibérations également à l'issue de la période transitoire. Des sanctions sont prévues dans le code de commerce à titre définitif, à l'expiration de la période transitoire, nullité des nominations et suspension des jetons de présence, il n'y a donc pas lieu d'étendre les effets des sanctions transitoires à l'entrée en vigueur des dispositions définitives.

Enfin, par souci de lisibilité des dispositions transitoires de l'article 3, il est fait mention des sanctions en complément du II et non au sein d'un III.

Dans son IV , l'article 3 prévoit un délai permanent de six ans pour toute société qui procède à l'avenir, après la promulgation de la proposition de loi, à une admission de ses titres aux négociations sur un marché réglementé, pour mettre en conformité la composition de son conseil d'administration ou de surveillance.

Cette « période transitoire permanente » n'a pas paru pertinente à votre commission. Dès lors que l'obligation de représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les conseils, à hauteur d'une proportion d'au moins 40 %, sera connue des sociétés susceptibles d'être concernées - et les six années de la période transitoire suivant la publication de la loi permettront bien de faire toute la publicité nécessaire -, aucune période d'adaptation ne sera plus nécessaire. Dans six ans, une société qui prépare la cotation de ses titres sur un marché réglementé devra faire en sorte avant la cotation que son conseil soit composé régulièrement, tandis qu'une société qui franchit pendant trois exercices consécutifs les seuils de 500 salariés et de 50 millions de chiffre d'affaires ou de total de bilan devra faire de même lors de l'assemblée générale ordinaire suivante.

Aussi, sur un amendement de son rapporteur, votre commission a-t-elle supprimé cette disposition.

Votre commission a adopté l'article 3 ainsi modifié .

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