Article 18 (art. L. 863-1 du code de la sécurité sociale) Relèvement du plafond annuel de ressources pris en compte pour l'accès à l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé
Objet : Cet article a pour objet de relever en deux étapes, sur les années 2011 et 2012, le plafond de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé (ACS), afin d'élargir l'accès à cette aide et de tenir compte de la revalorisation quinquennale de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), versée aux personnes seules, et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).
I - Le dispositif proposé
Créée par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie 15 ( * ) , l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé (ACS) permet aux personnes à faibles revenus mais dont les ressources excèdent le plafond d'accès à la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) de bénéficier d'une aide venant en déduction du prix d'un « contrat responsable » 16 ( * ) individuel d'assurance complémentaire de santé, qu'elles peuvent souscrire auprès de l'organisme de leur choix.
Le montant de l'aide varie selon le nombre et l'âge des personnes couvertes par le contrat, entre 100 euros pour les enfants de moins de seize ans et 500 euros pour les personnes de soixante ans et plus (alinéa 3 de l'article L. 863-1 du code de la sécurité sociale).
Sa définition a été affinée par la loi HPST, qui a créé une nouvelle tranche d'âge couvrant les personnes de cinquante à cinquante-neuf ans (et revalorisé à 500 euros l'aide annuelle accordée aux personnes de plus de soixante ans) et par la loi de finances pour 2010 17 ( * ) , qui a abaissé de vingt-cinq à seize ans la limite entre les deux premières tranches d'âge et relevé de 100 à 200 euros l'aide bénéficiant aux personnes de seize à quarante-neuf ans, ce qui a permis un doublement de l'aide pour les seize - vingt-cinq ans.
Le tableau ci-après retrace l'évolution, depuis 2005, des montants par tranche d'âge de l'ACS :
Evolution du montant de l'ACS |
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Age |
Montant au 01/01/2005 |
Montant au 01/01/2006 |
Montant au 01/08/2009 |
Montant au 01/01/2010 |
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moins de 16 ans |
75 € |
100 € |
100 € |
100 € |
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de 16 à 24 ans |
75 € |
100 € |
100 € |
200 € |
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de 25 à 49 ans |
150 € |
200 € |
200 € |
200 € |
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de 50 à 59 ans |
150 € |
200 € |
350 € |
350 € |
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à partir de 60 ans |
250 € |
400 € |
500 € |
500 € |
L'aide, concrétisée par une attestation de droits remise au bénéficiaire, est déduite de la prime ou de la cotisation correspondant au contrat par l'organisme d'assurance complémentaire, qui bénéficie alors d'un « crédit d'impôt » de même montant au titre de sa contribution au fonds CMU prévue par l'article L. 862-4 du code de la sécurité sociale.
Fixé originellement à un montant supérieur de 15 % à celui du plafond d'accès à la CMU-c, le plafond de ressources ouvrant droit à l'ACS est fixé depuis le 1 er janvier 2007 18 ( * ) au plafond CMU-c majoré de 20 %.
Il est proposé de relever en deux étapes cette majoration à 30 %.
Le paragraphe I de l'article tend donc à modifier le premier alinéa de l'article L. 863-1 du code de la sécurité sociale pour fixer le plafond de ressources pour l'accès à l'ACS au montant du plafond de la CMU-c majoré de 30 %.
Comme le précisent les paragraphes II et III de l'article, cette hausse sera appliquée en deux étapes , le plafond de ressources ACS devant correspondre, pendant l'année 2011, au plafond CMU-c + 26 % puis, à compter du 1 er janvier 2012, au plafond CMU-c + 30 % .
Le plafond de ressources pour l'accès à l'ACS, revalorisé, comme celui de la CMU-c, en fonction de l'inflation, et calculé par référence aux revenus et ressources totalisés sur les douze mois précédant la date de la demande, était, au 1 er juillet dernier, de 9 134 euros pour une personne seule (ce qui équivaut à un montant mensuel moyen de ressources de 761 euros).
Il passerait, toujours pour une personne seule, à 9 590,30 euros au 1 er janvier 2011 et à 10 072,87 euros au 1 er janvier 2012.
Il en résultera une augmentation du nombre de bénéficiaires potentiels de l'ACS.
Ce nombre était estimé, fin 2009, à un peu moins de deux millions de personnes, dont 30 % environ (un peu plus de 600 000 personnes) avaient effectivement demandé et reçu une attestation 19 ( * ) .
Selon les estimations données par la fiche d'évaluation préalable de cet article, 67 000 personnes supplémentaires, par rapport à 2010, pourraient bénéficier en 2011 de l'aide, et 294 000 à la fin de 2012, ces chiffres étant cependant présentés comme étant des estimations « hautes ».
A partir de 2013, au terme de la montée en charge du dispositif, son coût pourrait représenter 82 millions d'euros de dépenses supplémentaires pour le fonds CMU.
Mais, en dehors de l'élargissement de la « cible » de l'ACS, le relèvement du plafond de ressources doit surtout éviter de faire sortir du dispositif les bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) vivant seules et ceux de l'aide aux adultes handicapés (AAH).
Du fait de la revalorisation quinquennale de ces aides, prévue sur la période 2007-2012, leurs titulaires, qui sont généralement simultanément bénéficiaires du forfait logement, seraient en effet sortis du dispositif.
D'après les chiffres communiqués à votre rapporteur général, au 1 er janvier 2011, et en base annuelle 20 ( * ) , le montant pour une personne seule de l'Aspa et du forfait logement (9 179,95 euros), de l'AAH et du forfait annuel (9 215,86 euros) dépasserait déjà le plafond ACS actuel (9 133,63 euros).
Le paragraphe II de l'article fixe, « par dérogation » , à 26 % la majoration applicable au plafond CMU-c pour calculer le plafond de ressources ouvrant droit à l'ACS jusqu'au 31 décembre 2011.
Enfin, le paragraphe III entend préciser les conditions d'application des deux relèvements successifs du plafond des ressources ouvrant droit à l'ACS.
Il prévoit à cet effet :
- que le paragraphe I de l'article - c'est-à-dire le relèvement à 30 % de la majoration appliquée au plafond CMU-c pour déterminer le plafond ACS - s'applique « aux décisions mentionnées au premier alinéa de l'article 863-3 » du code de la sécurité sociale, c'est-à-dire la décision sur le droit à l'ACS ;
- que le paragraphe II (calcul du plafond de l'ACS par l'application au plafond CMU-c d'un taux de majoration de 26 %) s'appliquera aux décisions sur le droit à l'aide prises entre le 1 er janvier et le 31 décembre 2011.
Ces dispositions ont pour objet de garantir que les nouveaux plafonds seront pris en compte pour apprécier les droits à l'ACS dès leur entrée en vigueur, et bénéficieront donc dès le 1 er janvier 2011 ou le 1 er janvier 2012 aux personnes qui auront présenté leur demande avant ces dates.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de la commission
Si le taux de couverture par l'assurance maladie complémentaire progresse, il demeure inégal en fonction du revenu : 19 % des ménages les plus modestes ne sont pas couverts par une complémentaire santé, contre 4 % des plus aisés 21 ( * ) .
On ne peut donc qu'approuver le relèvement sensible du plafond des ressources prises en compte pour l'ouverture du droit à l'ACS proposé par cet article.
Indispensable pour éviter la sortie de ce dispositif des bénéficiaires de l'Aspa et de l'AAH, ce qui aurait été peu concevable, il élargit aussi l'accès à l'assurance complémentaire.
Cet effort important, faisant suite à ceux déjà consentis depuis 2005 pour relever et diversifier le montant de l'aide et pour faire mieux connaître ce dispositif, devrait favoriser la progression de la proportion de la « population cible » qui bénéficie effectivement de l'ACS.
Cette progression se heurte cependant à certains obstacles.
Comme le souligne le dernier rapport annuel du fonds CMU sur l'évolution du prix et des contenus des contrats ayant ouvert droit à l'ACS en 2009 22 ( * ) , l'aide correspond en moyenne à 375 euros par contrat (couvrant en moyenne 1,62 personne) et correspond à un peu moins de la moitié de la prime ou de la cotisation.
Entre 2008 et 2009, l'aide moyenne par contrat a progressé légèrement plus vite (5 %) que le coût du contrat (4,1 %) et que le « reste à charge » sur la prime, mais ce dernier, dont le montant moyen est de 389 euros, peut néanmoins constituer une dépense importante pour les foyers concernés.
Si l'allégement de la charge de la complémentaire santé résultant de l'ACS est sensible - le rapport du fonds CMU souligne qu'il ramène le taux moyen d'effort des ménages souscripteurs, de 8,3 % à 3,8 % - cette charge représente encore près d'un demi-mois de revenu annuel. De plus, la situation des personnes les plus âgées est la moins favorable, compte tenu du niveau plus élevé de leur prime : les chiffres de 2009 ne permettent toutefois pas d'apprécier l'incidence en année pleine de la revalorisation à 500 euros de l'aide accordée aux plus de soixante ans.
Une autre question qui demeure posée est celle de la couverture offerte par les contrats.
La comparaison opérée par le dernier rapport du fonds CMU, sur la base des enquêtes de la Drees, entre les niveaux de garantie des contrats ACS et ceux des contrats individuels en population générale est « sans ambiguïté » : les contrats ACS offrent globalement des garanties moins élevées.
Votre commission estime, comme la ministre de la santé, qu'un des remèdes à cette situation passe par une plus grande transparence et une meilleure lisibilité des contrats. Elle approuve donc le fait qu'elle ait demandé à l'Unocam de formuler des propositions visant à simplifier la présentation des garanties et à permettre à l'assurer d'identifier les montants de remboursement de la sécurité sociale, de l'assurance complémentaire santé et de son reste à charge.
Il convient enfin de s'inquiéter des hausses des primes ou cotisations d'assurance maladie complémentaire qui, comme le soulignait la ministre devant votre commission, n'apparaissent pas toujours justifiées. Ainsi, une récente étude d'UFC-Que Choisir 23 ( * ) soulignait qu'entre 2001 et 2008, les primes par personne couverte avaient progressé de 44 % et les prestations de remboursements de 27 % seulement.
Au bénéfice des observations qui précèdent, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.
* 15 Loi n° 2004-810 du 13 août 2004 (article 56).
* 16 C'est-à-dire un contrat dont les garanties ne couvrent pas la participation forfaitaire pour chaque acte ou consultation réalisé par un médecin, créée par la loi précitée du 13 août 2004, ni la franchise sur les médicaments, les actes paramédicaux et les transports sanitaires mise en place par l'article 52 de la loi n° 2007-1786 de financement de la sécurité sociale pour 2008 (article L. 863-6 du code de la sécurité sociale).
* 17 Loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009, article 133-I.
* 18 Article 50 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.
* 19 Cf. programmes de qualité et d'efficience « maladie », annexe I au projet de loi de financement.
* 20 C'est-à-dire en multipliant par 12 le montant mensuel de l'allocation, ce qui conduit nécessairement à une certaine approximation, les plafonds ACS étant calculés sur la somme des ressources des douze mois précédents.
* 21 Observatoire des inégalités : « l'inégal accès à la complémentaire santé », décembre 2008.
* 22 Rapport remis en juin 2010 au Gouvernement en application de l'article L. 863-5 du code de la sécurité sociale.
* 23 « Le coût de la couverture santé des ménages », septembre 2010, département des Études.