EXAMEN EN COMMISSION LE MERCREDI 24 NOVEMBRE 2010

M. Jean-Jacques Hyest , président. - Nous allons examiner le rapport de M. Patrice Gélard sur la proposition de loi constitutionnelle présentée par M. Yvon Collin et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, tendant à renforcer la fonction de représentation par le Sénat des collectivités territoriales de la République.

M. Patrice Gélard , rapporteur. - Cette proposition de loi constitutionnelle ne comprend qu'un seul article : « Les lois concernant l'organisation des collectivités territoriales sont adoptées en termes identiques par les deux assemblées ». Nos collègues du RDSE répondent ainsi à nos collègues députés, qui, dans la réforme des collectivités territoriales, n'ont pas suffisamment tenu compte de la position du Sénat. Jusqu'à présent, seules les lois constitutionnelles et les lois organiques concernant le Sénat sont soumises à cette obligation, mais aucune loi ordinaire ne contredit le principe que le dernier mot revient à l'Assemblée nationale.

On comprend la logique de ce texte, qui complète la réforme de 2003 où le constituant a décidé que les lois concernant l'organisation des collectivités territoriales viendraient sur le bureau du Sénat en premier. En effet, nous examinons ces lois en premier, mais l'Assemblée nationale continue d'avoir le dernier mot.

Cependant, cette proposition aurait peu de chance d'aboutir. D'abord, elle devrait être adoptée en termes identiques par les deux assemblées puis être soumise au référendum par le président de la République, ce qui aurait peu de chance d'être fait sur une question aussi technique.

C'est pourquoi, quel que soit l'intérêt de ce texte, je vous propose en conséquence le renvoi en commission : nous garderions ainsi cette proposition, en attendant un prochain projet de loi de révision constitutionnelle.

M. Jacques Mézard . - Le renvoi en commission ne nous satisfait pas, car nous voulons faire passer le message que vous avez bien reçu. Notre argument est identique à celui que nous avons utilisé pour démontrer l'irrecevabilité de la loi portant réforme des collectivités territoriales.

M. Nicolas Alfonsi . - L'article 89 de la Constitution laisse-t-il le choix au président de la République de soumettre à référendum une proposition de loi constitutionnelle adoptée en termes identiques par les deux assemblées ?

M. Patrice Gélard , rapporteur. - Il doit la soumettre à référendum, mais il est libre du calendrier.

M. Jean-Jacques Hyest , président. - Quand bien même nous adopterions la proposition, nous n'obtiendrions jamais un vote conforme à l'Assemblée nationale. N'oublions pas qu'en 2003, nous avions obtenu de haute lutte la primauté d'examen des lois relatives à l'organisation des collectivités territoriales, grâce à l'engagement sans faille de mon prédécesseur, M. Garrec. Nous voulons donner tout son sens à la mission constitutionnelle du Sénat dans la représentation des collectivités territoriales, mais je crois que nous ne gagnerions pas à l'adopter en séance publique. Mieux vaut, avec le renvoi en commission, garder ce texte pour la prochaine révision constitutionnelle.

M. François Zocchetto . - Cette proposition de loi constitutionnelle est très intéressante, en confirmant le rôle du Sénat, représentant des collectivités territoriales. Elles ont besoin de stabilité et de cette forme de consensus qui s'exprime par l'accord des deux assemblées. Cependant, je comprends les réserves de notre rapporteur. Nous devons faire progresser le débat, d'autant que bien des élus locaux pensent que la Constitution prévoit déjà l'accord des deux assemblées pour tout ce qui touche à l'organisation des collectivités territoriales.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat . - J'accepte le renvoi en commission, tout en étant défavorable à ce texte qui rogne sur la primauté de l'assemblée élue au suffrage universel direct. Si l'on appliquait le principe que vous défendez, les collectivités territoriales devraient se prononcer elles-mêmes sur tous les textes les concernant. Or, les élus n'ont même pas été consultés sur la loi relative aux collectivités territoriales ! La véritable réforme à prendre, ce serait d'élargir la représentativité du Sénat et de renforcer les libertés locales, ainsi que le rôle du Parlement : voilà qui mériterait un vrai débat.

M. Jean-Pierre Sueur . - Nous n'ignorons pas que quand notre commission décide le renvoi, cela signifie généralement...

M. Jean-Jacques Hyest , président. - Ce n'est pas vrai !

M. Jean-Pierre Sueur . - Nous nous abstiendrons à ce stade, car nous considérons devoir débattre de cette question au sein de notre groupe même avant la séance publique.

La motion COM-1 tendant au renvoi en commission de la proposition de loi est adoptée.

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