Article 9 quater
(art. L. 713-7 du code de la propriété intellectuelle)
Apparence et texture des médicaments génériques

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, tend à permettre aux spécialités génériques, pour éviter les erreurs de prise, de se présenter sous des formes pharmaceutiques d'apparence similaire à celle du médicament princeps.

I - Les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale

Cet article, tel qu'adopté en commission des affaires sociales à l'initiative du député Yves Bur, reprenait une disposition adoptée dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 (article 39), mais qui avait été censurée par le Conseil constitutionnel 12 ( * ) .

Il tendait à prévoir une exception très limitée au droit des producteurs de médicaments à protéger les caractéristiques apparentes des spécialités qu'ils commercialisent :

- seul pouvait en effet bénéficier de cette exception, et seulement quand le médicament était devenu généricable, le producteur d'un générique susceptible de lui être substitué dans les conditions prévues par le code de la santé publique ;

- l'exception était limitée aux formes pharmaceutiques orales, les plus susceptibles d'être à l'origine d'erreurs de prise ou d'abandons de traitement par les patients.

Il semblait donc que cette exception aux droits de propriété intellectuelle - parfois mise, dans le secteur de l'industrie pharmaceutique, au service de tactiques commerciales complexes - n'était pas disproportionnée, au regard de l'intérêt qu'elle présentait pour la protection de la santé publique et la sécurité des consommateurs.

Votre commission avait soutenu cette disposition, déjà due à l'initiative du même auteur, et avait été à l'origine de la rédaction dans laquelle l'article correspondant du projet de loi de financement pour 2010 avait été définitivement adopté.

Le texte finalement adopté par l'Assemblée nationale, qui résulte d'un amendement du Gouvernement, a une portée beaucoup plus restreinte que le texte de la commission, puisqu'il n'autorise qu'une exception à la protection assurée par le droit des marques, et non à la protection des dessins et modèles. Il risque donc de ce fait d'être dépourvu de toute portée réelle.

II - Le texte adopté par la commission

On observera tout d'abord que cet article n'a que peu de rapport avec l'objet d'une proposition de loi tendant à modifier les dispositions de la loi HPST.

Sur le fond, cependant, elle ne manque pas d'intérêt, à condition d'être efficace.

Les conditions de cette efficacité avaient, en 2009, fait l'objet d'un débat très nourri au Sénat.

Le Gouvernement avait déjà, à l'époque, défendu, avec les mêmes arguments, la position qu'il a fait prévaloir à l'Assemblée nationale :

- il suffit, pour permettre que le médicament générique puisse se présenter sous un aspect similaire à celui du médicament princeps, de prévoir un assouplissement du droit des marques ;

- cette solution est en outre compatible avec le droit européen car la directive rapprochant la législation européenne sur le droit des marques ne l'interdit pas.

Cette argumentation n'avait pas convaincu le Sénat :

- la présentation des médicaments est généralement protégée à titre de dessin ou modèle 13 ( * ) et une dérogation au seul droit de la protection des marques 14 ( * ) serait donc inefficace ;

- si la législation communautaire ne prévoit pas d'exception à la protection des dessins et modèles, le droit français autorise la limitation du droit de propriété lorsqu'elle est justifiée par l'intérêt général ;

- une exception au droit de propriété intellectuelle protégeant les dessins ou modèles permettant la reproduction de la forme ou de la couleur d'un cachet ou d'une gélule ne paraît pas disproportionnée au regard des enjeux en matière de santé publique et de préventions d'accidents iatrogéniques graves. D'autant plus que la protection des droits de propriété intellectuelle sur les dessins et modèles est sans doute moins vitale pour l'industrie pharmaceutique que pour d'autres secteurs d'activité économique.

Pour votre commission, les motifs qui avaient emporté en 2009 les décisions du Sénat demeurent valables.

Enfin, l'inscription de la disposition proposée dans le code de la santé publique paraît beaucoup plus justifiée, en termes d'accessibilité du droit, que son inscription dans le code de la propriété intellectuelle. Et il ne faudrait de toute façon pas, si elle devait être inscrite dans le code de la propriété intellectuelle, qu'elle ne le soit que dans les dispositions de ce code relatives au droit des marques.

Suivant la proposition de son rapporteur, la commission a adopté un amendement tendant à rétablir la rédaction précédemment retenue par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, puis cet article ainsi modifié.


* 12 Décision n° 2009-596 DC du 22 décembre 2009.

* 13 La protection des dessins ou modèles peut être garantie pendant vingt-cinq ans par période de cinq ans renouvelable.

* 14 La protection des marques a une durée de dix ans, indéfiniment renouvelable.

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