TROISIÈME PARTIE - DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL POUR 2012
Section 1 - Dispositions relatives aux recettes des régimes obligatoires et des organismes concourant à leur financement

Article additionnel avant l'article 10 A (art. 1001 du code général des impôts, art. L. 137-15 et L. 245-16 du code de la sécurité sociale) - Taxation des contrats solidaires et responsables

Objet : Cet article additionnel a pour objet de revenir à la situation antérieure à la loi de finances rectificative du 19 septembre 2011 en ce qui concerne la taxation des contrats d'assurance maladie solidaires et responsables, afin de maintenir en leur faveur l'application d'un taux réduit de 3,5 % au lieu du taux de 7 %.

Trois raisons au moins militent en faveur de cet article additionnel :

- la hausse de la taxation, intervenue dans la loi de finances rectificative du 19 septembre 2011, ne pourra que contribuer à aggraver les difficultés d'accès aux soins que rencontrent nombre d'assurés, du fait du renchérissement quasi certain des primes qu'ils devront acquitter auprès des organismes d'assurance complémentaire ;

- le rapport du comité d'évaluation des niches fiscales et sociales de juin 2011 a explicitement recommandé le maintien de ce taux réduit de taxation , au motif qu'il permet de « préserver un avantage compétitif sur les contrats moins encadrés et, en conséquence, de ne pas affaiblir l'incitation qu'ils constituent sur le comportement des usagers » ; il serait très regrettable de voir une offre de contrats non responsables se développer à la suite de cette mesure ;

- la taxation de ces contrats responsables a fait l'objet d'une augmentation à deux reprises en moins d'un an, puisqu'avant la loi de finances pour 2011, ces contrats étaient totalement exonérés de la taxe.

Le coût de ce retour à la situation antérieure représente 1,1 milliard d'euros .

Le présent article additionnel propose de le compenser, pour moitié par une hausse du forfait social (compte tenu des évaluations actuelles, elle serait d'un peu moins de trois points ) et pour moitié par une hausse du prélèvement social sur les revenus du capital (soit une hausse de 0,5 point de ce taux qui serait porté à 3,9 %).

La commission vous demande d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article additionnel avant l'article 10 A (art. L. 322-2 du code de la sécurité sociale) - Suppression de la franchise sur les médicaments

Objet : Cet article additionnel a pour objet de supprimer la franchise sur les médicaments.

Depuis le 1 er janvier 2008 10 ( * ) , une franchise a été mise en oeuvre sur :

- les médicaments (50 centimes d'euros par boîte), à l'exception de ceux délivrés pendant une hospitalisation ;

- les actes des auxiliaires médicaux, qui regroupent principalement ceux délivrés par les infirmières et les masseurs-kinésithérapeutes (50 centimes d'euros par acte) ;

- les transports sanitaires (2 euros par transport).

Deux objectifs étaient poursuivis : dégager des ressources pour financer la prise en charge de la maladie d'Alzheimer, la lutte contre le cancer et les soins palliatifs ; responsabiliser les patients sur des postes de dépenses particulièrement dynamiques.

Le rendement de ce dispositif est estimé à 877 millions d'euros pour 2010, dont 85 % au titre des médicaments (744 millions), 13 % des actes d'auxiliaires médicaux (111 millions) et 2 % des transports sanitaires (22 millions).

Les franchises concernent l'ensemble des régimes d'assurance maladie, sauf le régime des mines 11 ( * ) . Tous les assurés y sont assujettis, à l'exception des personnes mineures, des bénéficiaires de la CMU-c et de l'assurance maternité, ainsi que des pensionnés militaires d'invalidité. Au total, près de 19 millions d'assurés, soit 29 % de la population , sont exonérés du paiement des franchises .

Deux limites ont été mises en place : le montant annuel par assuré est plafonné à 50 euros ; la participation journalière maximale est fixée à 2 euros pour les actes d'auxiliaires médicaux et à 4 euros pour les transports. 25 % des assurés atteignent le plafond annuel de 50 euros , ce qui représente en fait 35 % de la population concernée par les franchises en excluant celle qui en est exonérée.

Surtout, la moitié des personnes en affection de longue durée (ALD) atteint le plafond annuel . D'ailleurs, le montant total de franchise à la charge des personnes en ALD est de 352 millions d'euros en 2010, soit 40 % du total.

La mise en oeuvre de la franchise a certainement permis le développement important des grands conditionnements, contenant en général trois mois de traitement, pour les médicaments utilisés dans le cadre de maladies chroniques (diabète, cholestérol, hypertension ou insuffisance cardiaque). Selon le Gouvernement 12 ( * ) , un effet de rattrapage a eu lieu, mais la moindre progression de ces grands conditionnements annonce la fin prochaine de la période de montée en charge rapide du dispositif.

La création des franchises répondait notamment à l'objectif de responsabilisation des patients et des professionnels et passait par l'imposition d'un certain niveau de reste à charge pour les inciter à réguler la consommation médicale. De ce fait, les contrats d'assurance complémentaire ne peuvent bénéficier du label « responsables » et du différentiel de taxation qui y est associé (différentiel en nette réduction) que s'ils ne remboursent pas les franchises.

Or, comme le relève une étude de l'Irdes 13 ( * ) , ce raisonnement suppose que les individus soient des « consommateurs éclairés » qui choisissent leur consommation de médicaments au regard du coût des soins et de leur utilité. Ainsi, 88 % des personnes interrogées dans cette étude ont déclaré ne pas avoir modifié leurs consommations de médicaments, mais les changements sont plus fréquents chez les individus disposant de faibles ressources et ceux en mauvaise santé .

L'étude conclut clairement que, plus le revenu augmente, moins la mise en place de la franchise a affecté le comportement . Un même cumul de franchises représente un effet financier d'autant plus élevé que les individus disposent d'un faible revenu. Les bénéficiaires de la CMU-c étant exonérés des franchises, on peut estimer que les plus touchés sont les assurés éligibles à l'aide à la complémentaire santé (ACS) et ceux dont les revenus sont un peu au-dessus du barème de l'ACS ; en effet, les contrats responsables excluent nécessairement le remboursement des franchises. A cet égard, il est reconnu que l'ACS est loin d'atteindre son public, puisque seulement 26 % de la population éligible en est bénéficiaire.

L'étude publiée par l'Irdes conclut que, « pour ces deux populations [individus disposant de faibles ressources et ceux en mauvaise santé], les franchises représentent une charge financière significative ayant pour effet une perte d'accès aux médicaments » . Ces résultats sont proches d'une enquête réalisée en 2005 sur l'impact de la participation forfaitaire de 1 euro sur les consultations et les actes de biologie.

Enfin, le circuit économique du médicament a été largement remis en cause ces dernières années, tant du fait de crises sanitaires que de l'importance des dépenses qui y sont liées. Les procédures de fixation des prix et des taux de remboursement sont trop complexes et opaques. Certes, le comité économique des produits de santé (Ceps) qui négocie les prix avec les entreprises a réorienté son action, mais il devient urgent d'opérer une remise à plat globale de la politique du médicament en France.

C'est dans ce cadre que doit s'inscrire la suppression de la franchise sur les médicaments.

Pour tous ces motifs, la commission vous demande d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.


* 10 Article 52 de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008.

* 11 Elles n'y ont pas été appliquées, car ce régime se caractérise historiquement par la gratuité des soins pour ses assurés. Dans le cadre du projet de fusion de ce régime avec le régime général, l'article 42 du présent PLFSS prévoit d'ailleurs que « les assurés et leurs ayants droit bénéficient de la gratuité des soins ».

* 12 Rapport du Gouvernement au Parlement « Evaluation de la mise en oeuvre de la franchise sur les médicaments, les actes des auxiliaires médicaux et les transports sanitaires », transmis le 20 octobre 2011.

* 13 « Les franchises ont-elles modifié les comportements d'achats de médicaments ? », par Bidénam Kambia-Chopin et Marc Perronnin, in Questions d'économie de la santé, n° 158, octobre 2010, Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes).

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