Article 2 bis AA (nouveau) (Articles 17 et 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification  de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986) Renforcement de l'encadrement de l'évolution des loyers

Commentaire : cet article renforce l'encadrement de l'évolution des loyers, notamment à la relocation et particulièrement dans les « zones tendues »

I. Le droit en vigueur

L' article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée porte sur les modalités de fixation des loyers .

Son a dispose que sont fixés librement entre les deux parties :

- le loyer des logements neufs ;

- le loyer des logements vacants ayant fait l'objet de travaux de mise ou de remise en conformité aux caractéristiques du logement décent, caractéristiques définies par décret en Conseil d'État ;

- le loyer des logements conformes aux caractéristiques du logement décent, faisant l'objet d'une première location ou, s'ils sont vacants, ayant fait l'objet depuis moins de six mois de travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes, d'un montant au moins égal à une année du loyer antérieur.

Son b dispose que le loyer des logements vacants ou faisant l'objet d'une première location, qui n'entrent pas dans le champ du a , s'il est supérieur au dernier loyer exigé du précédent locataire , est fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables.

L'article 19 de la même loi précise que :

- les loyers servant de références 43 ( * ) doivent être représentatifs de l'ensemble des loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, situés soit dans le même groupe d'immeubles, soit dans tout autre groupe d'immeubles comportant des caractéristiques similaires et situé dans la même zone géographique ;

- le nombre minimal de références à fournir par le bailleur est de trois, ou de six, dans les communes, dont la liste est fixée par décret, faisant partie d'une agglomération de plus d'un million d'habitants ;

- les références du bailleur doivent comporter, au moins pour les deux tiers, des références de locations pour lesquelles il n'y a pas eu de changement de locataire depuis trois ans.

Ces dispositions ont été applicables jusqu'au 31 juillet 1997. Le Gouvernement devait remettre au Parlement avant cette date, un rapport d'exécution permettant d'établir la comparaison entre l'évolution des loyers des logements vacants selon que leur loyer a été librement fixé ou encadré en application du b 44 ( * ) .

Si le bailleur ne respecte pas les dispositions de l'article 19, le locataire dispose d'un délai de deux mois pour contester le montant du loyer auprès de la commission de conciliation. A défaut d'accord constaté par cette commission, le juge, saisi par l'une des deux parties, fixe le loyer.

Son c dispose que, lors du renouvellement du contrat de location, le loyer n'est réévalué que s'il était manifestement sous-évalué .

Dans ce cas, le bailleur peut proposer au locataire, au moins six mois avant le terme du contrat de location, un nouveau loyer fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, dans les conditions définies à l'article 19 précité.

Il est précisé que :

- le bailleur ne peut donner congé au locataire pour la même échéance du contrat ;

- la notification reproduit intégralement, sous peine de nullité, les dispositions du présent c et mentionne le montant du loyer ainsi que la liste des références ayant servi à le déterminer ;

- en cas de désaccord ou en l'absence de réponse du locataire quatre mois avant le terme du contrat, l'une des deux parties saisit la commission de conciliation ;

- à défaut d'accord constaté par la commission, le juge est saisi avant le terme du contrat. A défaut de saisine, le contrat est reconduit de plein droit aux conditions antérieures du loyer éventuellement révisé. Le contrat dont le loyer est fixé par le juge est réputé renouvelé pour une durée de trois ans si le bailleur est une personne physique et de six ans si le bailleur est une personne morale.

Son d dispose que, lorsque le contrat de location prévoit la révision du loyer , cette dernière intervient annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, au terme de chaque année du contrat. L'évolution du loyer ne peut excéder la variation de l'indice de référence des loyers (IRL).

L' article 18 de la même loi dispose, à son premier alinéa, que dans la zone géographique où le niveau et l'évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l'ensemble du territoire national révèle une situation anormale du marché locatif , un décret en Conseil d'État peut fixer le montant maximum d'évolution des loyers :

- des logements vacants définis au b de l'article 17 précité ;

- des contrats renouvelés définis au c du même article.

Le décret précise sa durée de validité, qui est d'au maximum un an, et peut prévoir des adaptations particulières, notamment en cas de travaux réalisés par les bailleurs ou de loyers manifestement sous-évalués (alinéa 2).

Le décret du 26 août 2011

Le dernier décret publié en application de l'article 18 précité est le décret n° 2011-1017 du 26 août 2011 45 ( * ) . Ce décret prévoit que :

- son champ d'application est limité à un an à compter du 31 août 2011 et à certaines communes d'Île-de-France 46 ( * ) (article 1 er ) ;

- quand le contrat de location est renouvelé, il ne peut y avoir de réévaluation du loyer autre que celle résultant de la révision prévue par le contrat de location, ou d'une clause relative à la révision introduite lors du renouvellement du contrat (1 er alinéa de l'article 2) ;

- cependant, quand le loyer est manifestement sous-évalué et que le bailleur souhaite réévaluer le loyer en application du c de l'article 17 de la loi de 1989, la hausse du loyer ne peut excéder la plus élevée des deux limites suivantes (alinéas 2 à 4 de l'article 2) :

> la moitié de la différence entre le loyer déterminé conformément au c de l'article 17 précité et le loyer à la date du renouvellement ;

> une majoration du loyer annuel égale à 15 % du coût réel des travaux toutes taxes comprises, dans le cas où le bailleur a réalisé, depuis la date d'effet du contrat de location (ou depuis son dernier renouvellement), des travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes d'un montant au moins égal à la dernière année de loyer.

II. Le texte adopté par votre commission

L'accès au logement est une des principales préoccupations des Français. Comme l'a relevé un sondage publié en mai 2011, 76 % d'entre eux estiment que la part de leurs revenus consacrée aux dépenses de logement est importante - 33 % estiment même qu'elle est trop importante - et 82 % d'entre eux estiment qu'il est aujourd'hui difficile de trouver un logement 47 ( * ) .

La hausse des loyers, notamment dans les « zones tendues », rend illusoire le droit au logement , pourtant consacré par l'article 1 er de la loi de 1989 48 ( * ) . Cette hausse s'explique en grande partie par la hausse des loyers à la relocation, qui ne sont plus encadrés depuis 1997 .

Ces graphiques démontrent que « la hausse globale des loyers résulte essentiellement de la hausse moyenne des loyers pratiqués lors de la relocation » 49 ( * ) .

Votre commission estime indispensable d'apporter , dans le cadre d'un projet de loi visant à renforcer les droits des consommateurs, une réponse à cette situation en modifiant la loi de 1989 afin d'encadrer davantage l'évolution des loyers sur l'ensemble du territoire national et d'apporter une réponse spécifique pour les « zones tendues ».

A l'initiative de votre rapporteur, votre commission a donc inséré le présent article afin de renforcer l'encadrement de l'évolution des loyers , notamment à la relocation.

Son modifie l'article 17 de la loi de 1989, supprimant les a et b actuels et les remplaçant par un a qui dispose que :

- le loyer des logements vacants ou faisant l'objet d'une première location est fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, dans les conditions définies par l'article 19. Le dispositif est ainsi adapté aux réalités locales : il ne s'agit pas d'un encadrement uniformément appliqué sur l'ensemble du territoire ;

- si le bailleur ne respecte pas les dispositions de l'article 19, le locataire dispose d'un délai de six mois pour contester le montant du loyer auprès de la commission de conciliation ;

- à défaut d'accord constaté par la commission, le juge, saisi par l'une des deux parties, fixe le loyer.

Son propose une nouvelle rédaction du premier alinéa de l'article 18 :

- le décret en Conseil d'État mentionné à cet alinéa s'appliquera désormais à l'ensemble des zones géographiques où le niveau et l'évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l'ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif, c'est-à-dire à l'ensemble des « zones tendues » ;

- il pourra encadrer l'évolution des loyers des contrats renouvelés, mais également le niveau des loyers des logements vacants ou faisant l'objet d'une première location . Autrement dit, il pourra désormais encadrer le loyer des relocations ;

- s'agissant des logements faisant l'objet d'une première location, le niveau de loyer ne pourra être inférieur à 80 % du loyer moyen constaté pour des logements de caractéristiques comparables par les observatoires de loyers.

Le présent article apporte donc une réponse à la hausse des loyers sur l'ensemble du territoire national (1°), tout en mettant en oeuvre un dispositif plus strict, adapté aux spécificités des « zones tendues » (2°).

Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.


* 43 Les éléments constitutifs de ces références ont été définies par le décret n° 90-780 du 31 août 1990 portant applicable de l'article 19 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

* 44 D'après les informations recueillies par votre rapporteur, ce rapport n'a jamais été remis au Parlement.

* 45 Décret n° 2011-1017 du 26 août 2011 relatif à l'évolution de certains loyers dans l'agglomération de certains loyers dans l'agglomération de Paris, pris en application de l'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

* 46 Les communes auxquelles ce décret s'applique sont énumérées en annexe de ce même décret. Il s'agit de Paris, de l'ensemble des communes des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que de certaines communes des départements de Seine-et-Marne, des Yvelines, de l'Essonne et du Val-d'Oise.

* 47 Sondage TNS Sofres effectué pour les États généraux du logement, mai 2011.

* 48 Cet article dispose : « Le droit au logement est un droit fondamental ; il s'exerce dans le cadre des lois qui le régissent. L'exercice de ce droit implique la liberté de choix pour toute personne de son mode d'habitation grâce au maintien et au développement d'un secteur locatif et d'un secteur d'accession à la propriété ouverts à toutes les catégories sociales ».

* 49 Rapport sur la situation du logement en France, p. 65.

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