II. ANALYSE PAR PROGRAMME

L'analyse par programme ne procède pas à un recensement exhaustif des crédits demandés pour 2013, dont la justification au premier euro figure au projet annuel de performances. Vos rapporteurs spéciaux ont préféré adopter une approche thématique et décidé de ne mettre en évidence que les éléments présentant un intérêt particulier dans le cadre de la mission au titre de l'exercice 2013.

A. LE PROGRAMME 156 « GESTION FISCALE ET FINANCIÈRE DE L'ÉTAT ET DU SECTEUR PUBLIC LOCAL »

1. Un programme qui porte les crédits d'une administration fiscale unifiée

Le programme 156 « Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public » a été originellement créé afin d'accueillir, au sein d'un programme unique, les dotations budgétaires de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP) .

Cette décision s'inscrivait dans une démarche de rapprochement de ces deux directions qui a abouti, en 2008, à leur fusion et à la création de la direction générale des finances publiques (DGFiP) .

Par conséquent, le programme regroupe aujourd'hui les crédits alloués à la DGFiP. Le responsable du programme est le directeur général des finances publiques.

Le programme 156 a pour principal objet de porter les dotations destinées aux activités de calcul de l'assiette , de recouvrement et de contrôle des recettes de l'Etat et des collectivités territoriales ou versées à l'Union européenne , le paiement des dépenses publiques et la tenue des comptes publics .

2. Des crédits en légère hausse en 2013

8 554,0 millions d'euros en AE et 8 517,4 millions d'euros en CP sont demandés en 2013 , ce qui représente respectivement une hausse de 124,2 millions d'euros en AE (+ 1,5 %) et de 105,4 millions d'euros en CP (+ 1,2 %).

Cette évolution comprend :

- une augmentation des dépenses de personnel de 201,8 millions d'euros en AE et CP (+ 2,9 %) ;

- une baisse des autres dépenses de 77,8 millions d'euros en AE (- 5,7 %) ainsi que de 96,7 millions d'euros en CP (- 7,2 %), et notamment de celles destinées aux investissements en immobilisations corporelles et incorporelles , comme cela a été indiqué précédemment.

Encore une fois, la hausse des crédits de titre 2 est portée par la contribution du programme au CAS « Pensions » , arrêtée à 2 305,9 millions d'euros en 2013, en progression de 8,7 % par rapport à 2012.

Hors contribution au CAS « Pensions », les dépenses de personnel baissent de 0,6 % (- 31,7 millions d'euros). En effet, à lui seul, le programme supporte 2 023 suppressions d'emplois .

Evolution des crédits du programme « Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local », par titre

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2012

Demandées pour 2013

Evolution

Ouverts en LFI pour 2012

Demandés pour 2013

Evolution

Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local

8 429,8

8 554,0

+ 1,5 %

8 412,1

8 517,3

+ 1,3 %

Titre 2. Dépenses de personnel

7 066,2

7 268,0

+ 2,9 %

7 066,2

7 268,0

+ 2,9 %

Autres dépenses :

1363,7

1285,9

- 5,7 %

1346,0

1249,3

- 7,2 %

Titre 3. Dépenses de fonctionnement

1 202,2

1 230,9

+ 2,4 %

1 168,1

1 174,7

+ 0,6 %

Titre 5. Dépenses d'investissement

160,8

54,3

- 66,2 %

177,2

73,9

- 58,3 %

Titre 6. Dépenses d'intervention

0,7

0,7

+ 0,0 %

0,7

0,7

+ 0,0 %

Source : projet annuel de performances de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2013

Evolution des crédits du programme « Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local », par action

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2012

Demandées pour 2013

Evolution

Ouverts en LFI pour 2012

Demandés pour 2013

Evolution

Gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local

8 429,8

8 554,0

+ 1,5 %

8 412,1

8 517,4

+ 1,3 %

Action 01 - Fiscalité des grandes entreprises

74,3

100,9

+ 35,8 %

74,3

100,9

+ 35,8 %

Action 02 - Fiscalité des PME

2 029,8

1 801,5

- 11,2 %

2 030,7

1 802,5

- 11,2 %

Action 03 - Fiscalité des particuliers et fiscalité directe locale

1 954,2

2 293,0

+ 17,3 %

1 956,1

2 294,4

+ 17,3 %

Action 05 - Gestion financière de l'Etat hors fiscalité

590,2

771,2

+ 30,7 %

591,2

770,8

+ 30,4 %

Action 06 - Gestion des pensions

69,6

68,9

- 1,0 %

69,6

68,7

- 1,3 %

Action 07 - Gestion financière du secteur public local hors fiscalité

1 470,3

1 392,9

- 5,3 %

1 472,1

1 395,5

- 5,2 %

Action 08 - Gestion des fonds déposés

73,4

70,1

- 4,5 %

73,4

70,1

- 4,5 %

Action 09 - Soutien

2 168,1

2 055,4

- 5,2 %

2 144,7

2 014,5

- 6,1 %

Source : projet annuel de performances de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2013

Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale ont abouti à une réduction de 3,5 millions d'euros en AE et CP de l'enveloppe du programme 18 ( * ) . Aussi celui-ci devrait-il disposer 8 550,5 millions d'euros en AE et de 8 513,9 millions d'euros en CP au titre de l'exercice 2013.

3. Une « sanctuarisation » du contrôle fiscal ?

Vos rapporteurs spéciaux ont souhaité connaître les conséquences de ces réductions d'emplois sur le contrôle fiscal . Avant la fusion de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP), le Gouvernement s'était engagé à « sanctuariser » le contrôle fiscal : cette activité ne devait, notamment, pas connaître de diminution de ses effectifs.

Toutefois, lors de l'examen de la loi de finances pour 2012, vos rapporteurs spéciaux avaient mis en évidence une forte diminution des contrôles fiscaux sur place à partir 2006, année à partir de laquelle a été engagé la réduction du nombre d'emplois au sein de l'administration fiscale . Cette tendance était particulièrement prononcée pour ce qui est des examens contradictoires de situation fiscale personnelle (ESFP) qui concernent les particuliers ; leur nombre avait chuté de plus de 15 % entre 2006 et 2010.

En 2011, alors que le processus de fusion de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP) était considéré comme achevé, le nombre total des contrôles sur place a encore diminué de 0,3 % , en dépit d'une augmentation des ESFP (+ 3,9 %).

Evolution du nombre de contrôles fiscaux sur place

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Evolution 2011/2006

Vérification de comptabilité

(Contrôle sur place)

46 852

47 267

47 851

47 784

47 844

47 703

47 689

47 408

- 0,9 %

Examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle (ESFP)

5 112

4 959

4 578

4 508

4 166

3 912

3 883

4 033

- 11,9 %

Total des contrôles sur place

51 964

52 226

52 429

52 292

52 010

51 615

51 572

51 441

- 1,9 %

Source : Tome I du fascicule « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2013

Parallèlement à la diminution du nombre de contrôles fiscaux, vos rapporteurs spéciaux ont observé une situation paradoxale . Alors que le montant total des droits rappelés à la suite de contrôles sur place augmente entre 2006 et 2011 (+ 21 %), les pénalités appliquées, quant à elles, accusent une baisse conséquente sur la même période (- 19 %).

Evolution du montant des droits nets rappelés et des pénalités appliquées dans le cadre de contrôles fiscaux sur place

(en millions d'euros)

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Evolution 2011/2006

Vérification de comptabilité

(Contrôle sur place) :

Total des droits simples rappelés

6 343

6 332

6 420

6 579

6 734

7 194

7 485

7 792

+ 21,4 %

Pénalités appliquées (tous impôts)

2 650

2 690

2 764

3 264

2 285

2 184

2 292

2 213

- 19,9 %

Examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle (ESFP) :

Droits simples rappelés

595

524

484

446

384

412

469

557

- 8,9 %

Pénalités appliquées (tous impôts)

326

257

276

229

160

145

154

253

- 8,3 %

Source : Tome I du fascicule « Voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2013

Aussi vos rapporteurs spéciaux se demandent-ils si la réduction des effectifs n'a pas eu pour conséquence de contraindre les vérificateurs à privilégier des dossiers « de rendement », c'est-à-dire à cibler les contribuables pour lesquels les simples erreurs et omissions sont les plus aisément décelables, au détriment des affaires, plus complexes à traiter, de fraude fiscale .

Cette situation serait, en tout état de cause, cohérente avec les informations qui ont été apportées par les représentants syndicaux de l'administration fiscale à vos rapporteurs spéciaux. Il leur a été, en effet, indiqué que si les services de contrôle n'étaient pas directement concernés par la réduction des personnels, la diminution du nombre d'agents des fonctions support (secrétariat, etc.) avait, quant à elle, eu d'importantes conséquences sur la disponibilité effective des vérificateurs .

Toutefois, vos rapporteurs spéciaux manquent de données précises sur ce sujet. C'est pourquoi, dans les mois à venir, ils procéderont à des investigations plus approfondies car ils estiment que la maîtrise des dépenses de l'administration fiscale ne doit pas se faire au détriment de la lutte contre la fraude fiscale dont les moyens doivent être préservés .

Quoi qu'il en soit, ils se réjouissent de l'augmentation du nombre d'agents affectés aux fonctions de contrôle de l'impôt entre 2012 et 2013 , qui passerait de 14 885 à 15 876 (+ 6,2 %). Reste à savoir si cette hausse des moyens humains sera suffisante, notamment pour faire face au surcroît d'activité qui pourrait résulter pour les services du contrôle fiscal du plan de lutte contre la fraude et l'optimisation fiscale excessive annoncée par le ministre délégué en charge du budget dans le cadre du collectif de fin d'année.

4. Une mesure de la performance toujours insuffisante

Dans le cadre d'un récent rapport d'information portant sur le bilan de la fusion de la direction générale des impôts (DGI) et de la direction générale de la comptabilité publique 19 ( * ) , vos rapporteurs spéciaux avaient mis en évidence une mesure lacunaire des gains de productivité au sein de la DGFiP .

En effet, ils ont montré que la direction générale ne dispose que d'un indicateur du taux annuel d'évolution de la productivité globale 20 ( * ) . Cependant, celui-ci ne permet ni de mesurer les évolutions par secteur d'activité , ni de faire le partage entre les gains de productivité qui auraient été réalisés sur les tendances antérieures et ceux qui sont attribuables à la fusion seule. L'absence d'indicateur de gains de productivité par secteur apparaît à vos rapporteur spéciaux d'autant plus problématique qu'il est nécessaire à une répartition efficace des personnels , et ce d'autant plus dans un contexte de diminution des effectifs.

Aussi avaient-ils préconisé, dans le rapport précité, d'« établir des indicateurs permettant de mesurer les gains de productivité réalisés au sein des différents services et pour chaque secteur d'activité de la DGFiP ». Ces derniers regrettent d'autant plus que cette proposition n'ait pas été entendue que la DGFiP, dans ses réponses aux questionnaires budgétaires, a été dans l'incapacité la plus totale de fournir une note détaillée sur les gains de productivité réalisés . Les deux seuls éléments invoqués de manière récurrente sont les « synergies », dont aucune mesure n'est proposée, et les « suppressions d'emplois », qui ne sauraient résumer à elles seules des gains de productivité.

Dès lors, vos rapporteurs spéciaux ne peuvent que recommander à nouveau que les gains de productivité de la DGFiP soient renseignés de manière plus étoffée et précise .


* 18 Cf. supra , « Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale » dans la présentation générale de la mission.

* 19 Rapport n° 60 (2011-2012) sur l'enquête de la Cour des comptes relative au bilan de la fusion de la direction générale de la comptabilité publique (DGCP) et de la direction générale des impôts (DGI), fait par Albéric de Montgolfier et Philippe Dallier au nom de la commission des finances du Sénat, 25 octobre 2011.

* 20 Selon le projet annuel de performances de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » pour 2013, cet indicateur traduit l'évolution annuelle de la productivité de la DGFiP. Cette dernière est mesurée à partir de douze ratios élémentaires correspondant aux missions de la DGFiP (le nombre d'articles d'impôt sur le revenu ou de dossiers professionnels gérés par agent, le nombre de titres de recettes et de mandats du secteur local par agent, etc.).

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