CHAPITRE II ÉLECTION DES DÉLÉGUÉS COMMUNAUTAIRES

Article 20 (art. L. 273-2 à L. 273-7 [nouveaux] du code électoral) : Modalités de désignation des délégués communautaires

L'article 20 met en oeuvre le principe du fléchage pour l'élection des représentants des communes au sein des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre : communautés de communes, communautés d'agglomération, communautés urbaines et métropoles.

Aujourd'hui, ces délégués sont élus en leur sein par les conseils municipaux des communes membres de l'intercommunalité ( cf . article L. 5211-6 du code général des collectivités territoriales).

1) La novation adoptée en 2010

L'article 8 de la loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 bouleverse le droit existant en prévoyant l'élection au suffrage universel direct dans le cadre de l'élection municipale des délégués des communes pour renforcer leur légitimité démocratique.

Cependant, ainsi que le relevait le rapporteur de la loi du 16 décembre, notre collègue Jean-Patrick Courtois, « afin de ne pas briser les liens entre l'intercommunalité et les communes, et d'éviter de faire des EPCI -qui ne constituent pas, aux termes de l'article 72 de la Constitution, une catégorie de collectivités territoriales- un niveau d'administration distinct du niveau communal » 43 ( * ) , l'élection a lieu dans le cadre du scrutin municipal.

Aux termes de l'article 83-I de la loi du 16 décembre 2010, cette réforme entrera en vigueur à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux, prévu en 2014.

2) La mise en oeuvre du fléchage

Les modalités de l'élection directe des conseillers communautaires étaient prévues à l'article 4 du projet de loi n° 61 (2009-2010) 44 ( * ) déposé sur le bureau du Sénat, le 21 octobre 2009, en même temps que le projet de loi de réforme des collectivités locales. Mais ce texte n'a jamais été examiné.

Le projet de loi aujourd'hui soumis à l'examen du Sénat en reprend les principes au sein d'un titre V nouveau créé au sein du livre premier du code électoral.

a) Dans les communes d'application du scrutin proportionnel de liste

Dans les communes de 1 000 habitants et plus -seuil proposé par les articles 16 et 18 du projet de loi pour le déclenchement du scrutin municipal proportionnel-, les délégués « fléchés » sont élus en même temps que les conseillers municipaux (article L. 273-3 nouveau) selon les règles présidant à l'élection des conseillers municipaux : représentation proportionnelle à la plus forte moyenne après attribution préalable de la moitié des sièges à la liste arrivée en tête.

Le projet de loi précise que « les candidats au mandat de délégué communautaire et de conseiller municipal figureront sur une seule et même liste, les premiers de la liste ayant vocation à siéger au conseil municipal et au conseil communautaire, les suivants de liste ne siégeant qu'au conseil municipal de la commune » ( cf . exposé des motifs).

Règles de répartition des sièges entre les listes
(art. L. 262 du code électoral)

Au premier tour du scrutin ,

- un nombre de sièges égal à la moitié du nombre des sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l'entier supérieur lorsqu'il y a plus de quatre sièges à pourvoir et à l'entier inférieur dans le cas contraire, est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés (sinon un second tour est organisé) ;

- les sièges restants sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.

Au second tour du scrutin ,

- la liste qui a obtenu le plus de voix reçoit un nombre de sièges égal à la moitié du nombre de sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, selon la règle déjà prévue pour le premier tour ;

- en cas d'égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée ;

- les sièges restant sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.

Dans tous les cas,

- seules les listes qui ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés sont admises à répartition des sièges ;

- ceux-ci sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation sur chaque liste ;

- si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à celle qui a obtenu le plus de suffrages ;

- en cas d'égalité du nombre de voix, le siège est attribué au plus âgé des candidats.

Une fois effectuée l'attribution des sièges de conseillers municipaux, les sièges de délégués sont répartis dans ces mêmes conditions entre les listes. Pour chacune d'elles, ils sont aussi attribués dans l'ordre de présentation des candidats sur les listes.

Le conseiller municipal venant sur une liste immédiatement après le dernier élu délégué de la commune est appelé à remplacer le délégué de la commune élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit.

Ce dispositif permettra naturellement une représentation plus équilibrée des deux sexes au sein des intercommunalités -par le double effet du fléchage et de l'abaissement du seuil de la proportionnelle.

Les autres dispositions régissant les élections municipales (durée du mandat, droit de vote des ressortissants communautaires, conditions d'éligibilité et inéligibilité, incompatibilités, propagande, opérations préparatoires au scrutin et de vote, contentieux, déclarations de candidature, remplacement des conseillers, régime spécifique à Lyon et Marseille 45 ( * ) ) sont applicables à l'élection des délégués communautaires 46 ( * ) .


Modalités spécifiques à certaines communes et EPCI

1 - L'article 20 envisage le cas des communes divisées en secteurs municipaux -c'est le cas de Lyon et de Marseille- ou en sections électorales.

Dans ce cas, le nouvel article L. 273-3 précise que le préfet répartit entre les secteurs ou les sections les sièges attribués à la commune au sein de l'assemblée intercommunale, en fonction de leurs populations respectives, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.

2 - Si le sectionnement électoral conduit à l'application du scrutin majoritaire, par l'effet de l'article 18 du présent projet de loi (dans les communes associées peuplées de moins de 1 000 habitants ou, c'est déjà le cas aujourd'hui, dans les sections comptant moins de 1 000 électeurs), les délégués communautaires sont désignés dans l'ordre du tableau ( cf. infra ).

b) La désignation des délégués dans les communes de moins de 1 000 habitants

Dans les communes relevant du scrutin majoritaire -aujourd'hui celles de moins de 3 500 habitants, seuil que les articles 16 et 18 du projet de loi proposent d'abaisser à moins de 1 000 habitants-, la désignation des délégués communautaires s'inspire du fléchage : aux termes de l'article 20, les conseillers seraient désignés dans l'ordre du tableau établi lors de l'élection de la municipalité.

Composition du tableau
( art. R. 2121-2 à R. 2121-4 du code général des collectivités territoriales )

Le tableau s'ordonne comme suit :

1- le maire

2- les adjoints

3- les conseillers municipaux.

Les adjoints sont classés par l'ordre de nomination et, s'ils sont élus sur la même liste, par l'ordre de présentation sur la liste.

Les conseillers s'ordonnent par la date la plus ancienne de nomination intervenue depuis le dernier renouvellement intégral du conseil municipal et, pour les conseillers élus le même jour, par le plus grand nombre de suffrages obtenus. En cas d'égalité de voix, priorité est à l'âge.

Le système proposé permet ainsi de prendre en compte le choix exprimé par les électeurs lors de l'élection municipale qui se traduit dans l'établissement du tableau.

Il trouvera encore à s'appliquer en cas de vacance pour quelque cause que ce soit puisque le nouvel article L. 273-7 prévoit que, dans ce cas, le remplaçant est le conseiller municipal suivant celui dont le siège est vacant dans l'ordre du tableau.


Assouplir les modalités du fléchage

Les auditions auxquelles votre rapporteur, a procédé, ont traduit une opposition générale à la rigidité du dispositif du fléchage tel qu'il est proposé par l'article 20.

A l'instar de notre collègue Raymond Couderc pour la FMVM, notre ancien collègue Dominique Braye, au nom de l'AdCF, souhaite pouvoir « marquer » les candidats à l'intercommunalité sur l'ensemble de la liste afin de répartir les fonctions au sein des deux exécutifs municipal et communautaire.

Or, le bureau de l'AMF note que tel que le fléchage est organisé dans le projet de loi, « ce seront, en principe, les élus de la municipalité, maire et adjoints traditionnellement premiers de liste, qui siègeront à l'intercommunalité ».

C'est aussi la position de l'APVF, portée par notre collègue Virginie Klès qui relève que le projet de loi organise du fait de ce « stockage » des candidats communautaires en tête de liste un cumul des mandats. La sénatrice souligne le poids des fonctions d'adjoint au maire. Elles laisseront peu de disponibilités à leurs titulaires pour siéger à l'organe délibérant de la communauté. A l'inverse, l'AdCF note que « certains élus municipaux ne souhaitent pas disposer d'un mandat d'adjoint mais s'impliquer fortement dans l'exercice d'une compétence communautaire ».

Pour « ouvrir » la composition des listes des candidats, la commission des lois a modifié les modalités du fléchage , sur la proposition de son rapporteur et de notre collègue Alain Richard.

Les candidats communautaires pourraient être désignés au-delà des premiers de liste, selon un ordre encadré pour préserver la sincérité du choix offert aux électeurs :

- la liste des candidats aux sièges de délégué communautaire comporterait un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir, majoré de 30 %, ce dernier nombre étant le cas échéant arrondi à l'unité supérieure ;

- elle serait composée alternativement d'un homme et d'une femme dans l'ordre de présentation de ces candidats sur la liste des candidats au conseil municipal ;

- le premier quart des candidats aux sièges de délégué communautaire devrait être compris parmi le premier cinquième des candidats au conseil municipal et la totalité des candidats comprise dans les trois premiers cinquièmes des candidats au conseil municipal à l'intercommunalité, sauf si le nombre des sièges attribué à la commune était supérieur.

Si un siège de délégué ne pouvait être pourvu dans ces conditions, il serait attribué au conseiller municipal élu sur la même liste, dans l'ordre de présentation, sous réserve que la parité soit respectée.

Ce dispositif serait applicable aux secteurs municipaux et aux sections électorales comptant 1 000 habitants et plus. Toutefois, à Lyon et Marseille, le fléchage des candidats pourrait s'effectuer sur l'ensemble des candidats au conseil municipal et au conseil d'arrondissement.

Dans les secteurs municipaux ou sections électorales de moins de 1 000 habitants, les sièges seraient attribués en priorité au maire délégué puis aux conseillers élus selon le nombre de suffrages recueillis par chacun.

En cas de vacance d'un siège, celui-ci serait pourvu dans l'ordre de la liste ainsi composée et, à défaut, dans celui de la liste générale à condition de respecter la parité. Cependant, en cas de renoncement express d'un délégué à sa fonction, son remplaçant serait élu par le conseil municipal.

La commission des lois a adopté l'article 20 ainsi modifié .


* 43 Rapport n° 169 (2009-2010), consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l09-169/l09-169.html .

* 44 Projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale.

* 45 Paris, qui n'appartient pas à une intercommunalité à fiscalité propre, n'est pas concernée par l'article 20 du projet de loi.

* 46 Cf. chapitres I, III et IV du livre premier du code électoral.

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