B. VERS UNE DIMINUTION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Conformément à l'engagement pris en loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, le taux de prélèvements obligatoires serait réduit à la fin de la période de programmation . En effet, l'ajustement budgétaire cesserait de porter sur les recettes au cours de la deuxième partie de la période et proviendrait exclusivement d'un effort en dépenses conséquent ( cf . infra ).

Aussi, la part des prélèvements obligatoires dans le PIB reviendrait à 45,8 % en 2017 après avoir atteint 46,1 % en 2014 ( cf . tableau ci-après). Cela représenterait une baisse des prélèvements de près de 7 milliards d'euros en 2017.

Il faut noter que le taux de prélèvements obligatoires est toujours resté légèrement inférieur aux prévisions retenues dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques , notamment du fait d'élasticités fiscales moins élevées que prévu en 2013 qui ont limité le rendement des prélèvements.

Tableau n° 22 : Evolution du taux de prélèvements obligatoires

(évolution, en %)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Projet de loi de finances pour 2014

45,0

46,0

46,1

46,1

46,1

45,8

Loi de programmation des finances publiques 2012-2017

44,9

46,3

46,3

46,2

46,2

45,9

Ecart (PLF-LPFP)

0,1

- 0,3

- 0,2

- 0,1

- 0,1

- 0,1

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents mentionnés)

C. UN EFFORT SANS PRÉCÉDENT EN DÉPENSES

Le double objectif de l'atteinte de l'équilibre structurel et de la réduction du taux de prélèvements obligatoires à l'horizon 2017 est servi par un effort sans précédent en dépenses prévu entre 2014 et 2017 . Alors que sur cette même période, la loi de programmation des finances publiques (LPFP) prévoyait une croissance moyenne en volume des dépenses publiques de 0,5 % par an, l'objectif est désormais une croissance moyenne de 0,25 % par an .

Ainsi, la dépense publique devrait évoluer en volume de + 0,2 % par an entre 2015 et 2017 (tableau ci-après). Selon le Gouvernement, cette maîtrise de la dépense serait permise par les efforts des opérateurs de l'Etat et des collectivités territoriales et les réformes structurelles inscrites dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP) ; par ailleurs, celle-ci serait favorisée par les normes de dépenses - qui concernent l'encadrement en valeur des dépenses de l'Etat hors charge de la dette et pensions de même que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) - qui ont pu faire la preuve de leur effet disciplinant au cours des dernières années.

Tableau n° 23 : Les objectifs de croissance en volume de la dépense publique

(évolution, en %)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Projet de loi de finances pour 2014

1,0

1,7

0,4

0,2

0,2

0,2

Loi de programmation des finances publiques 2012-2017

0,4

0,9

0,4

0,2

0,7

0,8

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents mentionnés)

Cela permettrait une forte réduction du ratio de dépenses publiques sur PIB , qui passerait de 56,6 % du PIB en 2012 à 54 % en 2017. La diminution de ce rapport débuterait dès 2014 (cf. graphique ci-après).

Graphique n° 24 : Evolution du ratio de dépenses publiques sur PIB

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014)

Il est absolument essentiel que les objectifs de maîtrise de la dépense publique soient effectivement respectés, sauf à compromettre sérieusement la trajectoire de consolidation des finances publiques . Aussi est-il impératif que l'ensemble des administrations publiques - l'Etat, ses opérateurs, les collectivités territoriales et les administrations de sécurité sociale - réduisent effectivement leurs dépenses tout au long de la période de programmation, en mettant en oeuvre des réformes structurelles.

A cet égard, au début du mois d'octobre 2013, le Président de la République a confié à Martin Malvy et Alain Lambert le soin d'établir des propositions « pour bâtir avec les collectivités [territoriales] un pacte de gouvernance financier durable » ; la lettre de mission invite en particulier ces derniers à explorer « les voies et moyens pour mieux maîtriser les dépenses locales, dans le respect de l'autonomie des collectivités ». Il s'agit donc d'engager une démarche commune avec les collectivités territoriales en faveur d'une meilleure maîtrise de la dépense publique , tout en s'attachant absolument à éviter « une logique d'économies aveugles » qui prévaudrait en l'absence d'une telle démarche.

Afin de mettre en évidence la sensibilité de la trajectoire des finances publiques au respect de l'effort en dépenses programmé, des projections ont été réalisées à partir de deux scénarii :

- un premier scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1,6 % au cours de la période 2014-2017 , ce qui correspond à la moyenne constatée entre 2007 et 2012 (cf. tableau ci-après) ;

- un second scénario dans lequel la croissance des dépenses en volume serait de 1 % entre 2014 et 2017 , soit une progression intermédiaire entre la moyenne 2007-2012 et la prévision du Gouvernement.

Par ailleurs, le niveau de l'effort en recettes et les prévisions relatives à la composante non discrétionnaire de l'ajustement structurel sont supposés être similaires à ceux retenus par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014. En particulier, il est tenu compte de la baisse des prélèvements obligatoires prévue pour la fin de la période de programmation. De cette manière, les projections varient sous l'influence exclusive de l'évolution des dépenses .

Ces dernières hypothèses mettent en évidence le caractère théorique de l'exercice qui est proposé : une déviation de la trajectoire d'économies appellerait, en effet, une augmentation des prélèvements obligatoires pour atteindre l'objectif de moyen terme (OMT) de solde structurel, conformément aux engagements européens de la France .

Tableau n° 25 : Croissance de la dépense publique en volume (2000-2013)

(en %)

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

1,9

2,2

3,8

2,0

2,3

2,7

1,8

2,7

1,0

3,8

0,8

0,0

1,0

1,7

Moyenne constatée entre 2000 et 2012

Moyenne constatée entre 2007 et 2012

2,0

1,6

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'Insee et du RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014)

Les projections réalisées font apparaître que le non-respect de l'objectif d'évolution annuelle de la dépense publique en volume, fixé par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, aurait pour conséquence de dégrader fortement la trajectoire des soldes structurels et effectifs et de la dette publique ( cf . tableau ci-après).

Tableau n° 26 : Sensibilité de la trajectoire des finances publiques à l'évolution des dépenses des administrations publiques

(en % du PIB)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Hypothèses macroéconomiques

Croissance (en %)

0,0

0,1

0,9

1,7

2,0

2,0

Trajectoire présentée par le Gouvernement dans le cadre du PLF pour 2014

Évol. de la dépense en vol.

1,0

1,7

0,4

0,2

0,2

0,2

Solde effectif

- 4,8

- 4,1

- 3,6

- 2,8

- 1,7

- 1,2

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 1,7

- 0,9

- 0,2

0,0

Ajustement structurel

1,1

1,3

0,9

0,9

0,6

0,3

Dette publique

90,2

93,4

95,1

94,7

93,1

91,0

Trajectoire en cas de croissance en volume de la dépense de 1,6 % entre 2014 et 2017

Évol. de la dépense en vol.

1,0

1,7

1,6

1,6

1,6

1,6

Solde effectif

- 4,9

- 4,1

- 4,4

- 4,3

- 4,1

- 4,2

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 2,4

- 2,3

- 2,4

- 2,8

Ajustement structurel

1,1

1,3

0,2

0,1

- 0,1

- 0,4

Dette publique*

90,2

93,4

95,8

96,8

97,3

98,0

Trajectoire en cas de croissance en volume de la dépense de 1 % entre 2014 et 2017

Évol. de la dépense en vol.

1,0

1,7

1,0

1,0

1,0

1,0

Solde effectif

- 4,9

- 4,1

- 4,0

- 3,7

- 3,2

- 2,8

Solde structurel

- 3,9

- 2,6

- 2,1

- 1,6

- 1,4

- 1,5

Ajustement structurel

1,1

1,3

0,5

0,4

0,2

-0,1

Dette publique*

90,2

93,4

95,4

95,8

95,4

94,8

* Il est supposé que seule la variation de la dette imputable au déficit est sensible aux évolutions du PIB (les éléments exogènes, soit ceux non pris en compte dans le calcul du déficit mais comptabilisés dans la dette publique, conformément aux règles européennes - dettes contractées par le FESF, apports au capital du MES, etc. -, sont déterminés en retenant les hypothèses du projet de loi de finances pour 2014).

Source : commission des finances du Sénat (à partir des hypothèses du RESF annexé au projet de loi de finances pour 2014)

Une progression de la dépense publique de 1,6 % par an en volume entre 2014 et 2017 conduirait à ce que le solde structurel s'élève à environ - 2,8 % du PIB en 2017 (soit un niveau plus dégradé que celui de 2014) , contre un objectif de moyen terme (OMT) fixé à l'équilibre structurel. Il faut noter que la dégradation conséquente du solde structurel qui intervient entre 2016 et 2017 s'explique notamment par la baisse des prélèvements obligatoires supposée survenir conformément à l'actuelle programmation. Le déficit effectif resterait, quant à lui, au-dessus de 4 % du PIB tout au long de la période , et ne reviendrait donc pas en deçà du seuil de 3 % du PIB en application du pacte de stabilité et de croissance. Enfin, la dette publique augmenterait continument pour atteindre 98 % du PIB en 2017 .

Si la progression de la dépense publique en volume était de 1 % par an au cours de la période 2014-2017, le solde structurel serait toujours sensiblement supérieur à l'objectif de moyen terme (OMT) en 2017, atteignant - 1,5 % du PIB . Pour ce qui est du déficit effectif, celui-ci ne reviendrait en-dessous du seuil de 3 % du PIB qu'à l'horizon 2017 . La décrue de la dette publique en points de PIB serait retardée d'un an par rapport à la prévision du Gouvernement et serait supérieur de près de 4 points de PIB à l'objectif en 2017.

Ces résultats montrent bien l'absolue nécessité de respecter les objectifs de dépenses arrêtés . Le niveau des économies qui doivent être réalisées à cette fin - soit 15 milliards d'euros en 2014 et environ 17,5 milliards d'euros en 2015 - impliquent que soient engagées des réformes ambitieuses , pouvant au besoin appeler des changements de paradigme, et qui ne peuvent se limiter à de simples mesures d'efficience ou d'économies ponctuelles compte tenu de la nécessité de répondre à un impératif d'économies croissant tout au long de la période de programmation. Aussi y a-t-il lieu de souhaiter que la modernisation de l'action publique (MAP) permettra effectivement d'identifier les leviers d'une transformation en profondeur des administrations publiques , conciliant tout à la fois le maintien d'un service public de qualité et la rationalisation des moyens publics. C'est à cette seule condition que la trajectoire pluriannuelle des finances publiques, dirigée vers l'objectif de moyen terme (OMT), pourra être respectée.

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