Rapport général n° 156 (2013-2014) de MM. Georges PATIENT et Éric DOLIGÉ , fait au nom de la commission des finances, déposé le 21 novembre 2013

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N° 156

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2013

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2014 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. François MARC,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 19

OUTRE-MER

Rapporteurs spéciaux : MM. Georges PATIENT et Éric DOLIGÉ

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Marini , président ; M. François Marc , rapporteur général ; Mme Michèle André , première vice-présidente ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Caffet, Yvon Collin, Jean-Claude Frécon, Mmes Fabienne Keller, Frédérique Espagnac, MM. Albéric de Montgolfier, Aymeri de Montesquiou, Roland du Luart , vice-présidents ; MM. Philippe Dallier, Jean Germain, Claude Haut, François Trucy , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Jean Arthuis, Claude Belot, Michel Berson, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Joël Bourdin, Christian Bourquin, Serge Dassault, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, François Fortassin, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Yves Krattinger, Dominique de Legge, Marc Massion, Gérard Miquel, Georges Patient, François Patriat, Jean-Vincent Placé, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Richard Yung .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 1395, 1428 à 1435 et T.A. 239

Sénat : 155 (2013-2014)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Vos rapporteurs spéciaux se réjouissent que, dans le contexte de redressement des finances publiques, l'effort budgétaire et financier en faveur des outre-mer soit préservé . Ainsi, les crédits de la mission « Outre-mer » sont en hausse de 1 % par rapport à 2013 .

S'agissant de la défiscalisation, vos rapporteurs spéciaux considèrent qu'après la réforme importante prévue par l'article 13 du présent projet de loi de finances, ces dispositifs doivent désormais être stabilisés, que ce soit en ce qui concerne le montant global - l'aide à l'Outre-mer ne doit pas diminuer - ou dans les dispositions juridiques - les investisseurs ont besoin de stabilité et de visibilité.

Ils regrettent que la dette de l'État envers les organismes de sécurité sociale au titre de la compensation des exonérations de charges reparte à la hausse et atteigne près de 80 millions d'euros en fin d'exercice 2012.

Vos rapporteurs spéciaux s'inquiètent également du retour d'une dette de l'État envers les organismes de logement social , du fait d'une sous-budgétisation chronique (en CP) de la LBU, qu'ils n'ont eu de cesse de dénoncer. Après avoir atteint un sommet de 115 millions d'euros en 2006, celle-ci avait été ramenée à 7 millions d'euros fin 2011. Elle atteint fin 2012 plus de 40 millions d'euros et pourrait atteindre 80 millions d'euros en 2013, d'après les informations recueillies.

Ils déplorent également le taux relativement faible d'engagement des contrats de projet État-régions dans les quatre DOM , dont le niveau est bien inférieur à celui de métropole.

Enfin, s'agissant de leur contrôle sur l'aide au fret, vos rapporteurs spéciaux souhaitent que la procédure de guichet unique, mise en place à La Réunion, puisse être étendue, afin d'alléger les procédures administratives applicables et ainsi faciliter le recours à ce dispositif. Ils s'inquiètent également que les crédits inscrits puissent se révéler désormais insuffisants, au regard des besoins.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 48 % des réponses étaient parvenues à vos rapporteurs spéciaux en ce qui concerne la mission « Outre-mer ».

PREMIÈRE PARTIE - LA MISSION « OUTRE-MER »

I. DANS LE CONTEXTE DE REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES, LA PRÉSERVATION DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE ET FINANCIER EN FAVEUR DE L'OUTRE-MER

A. UNE MISSION PRÉSERVÉE

La comparaison, à périmètre courant, des crédits demandés par le présent projet de loi de finances aux crédits votés dans la loi de finances pour 2008, année de stabilisation de la maquette budgétaire de la mission, met en évidence deux périodes distinctes, comme l'illustre le graphique ci-dessous.

Évolution des crédits de paiement de la mission « Outre-mer »

Source : commission des finances

Entre les années 2008 et 2010, le montant des crédits de paiement (CP) de la mission a fortement augmenté (+ 17,7 %), avant de se stabiliser depuis lors.

En 2014, dans le contexte de redressement de nos finances, au nom duquel les dépenses publiques vont diminuer de 15 milliards d'euros, la mission « Outre-mer » se voit préservée, puisque ses crédits sont en augmentation d'un peu plus de 1 %.

Les autorisations d'engagement (AE) connaissent pour leur part une légère baisse de 2 %.

Évolution des crédits des deux programmes de la mission

(en millions d'euros)

AE ouvertes en LFI pour 2013

AE demandées pour 2014

Évolution

CP ouverts en LFI pour 2013

CP demandés pour 2014

Évolution

Programme n° 138 « Emploi outre-mer »

1 404

1 404

+ 0,01 %

1 393

1 388

- 0,40%

Programme n° 123 « Conditions de vie outre-mer »

784

744

- 5,16 %

646

673

+ 4,19 %

Total de la mission « Outre-mer »

2 188

2 148

- 1,84 %

2 039

2 060

+ 1,05%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

On observe que les deux programmes connaissent une évolution différente, avec une stabilisation du programme 138, tandis que les CP du programme 123 connaissent une augmentation significative (+ 4 %) mais une diminution en AE (- 5 %).

B. UNE PROGRAMMATION TRIENNALE 2013-2015 RESPECTÉE

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 a fixé les plafonds des crédits de paiement de la mission « Outre-mer » conformément au tableau ci-dessous.

Plafonds des crédits de paiement* de la mission « Outre-mer »
pour les années 2013 à 2015

(en millions d'euros)

Loi de finances pour 2013

Plafond des CP 2014

Plafond des CP 2015

1 990

2 069

2 144

Source : Projet annuel de performance annexé au présent projet de loi de finances

* Hors contributions de l'État au CAS Pensions

Avec 2 010 millions d'euros en CP - hors contributions de l'État au CAS Pensions et au format LPFP - sur la présente mission, la programmation triennale est respectée.

C. UNE DÉFISCALISATION RÉFORMÉE QU'IL CONVIENT DÉSORMAIS DE STABILISER

Vos rapporteurs spéciaux rappellent que la dépense fiscale est le premier outil de la politique de l'État en faveur des territoires ultramarins . Les 4 milliards d'euros ( cf. tableau) de la dépense fiscale représentent en effet près du double des crédits de la mission budgétaire.

Le coût des principales dépenses fiscales rattachées à la mission « Outre-mer »

(en millions d'euros)

Dispositif

Base légale

Impôt concerné

Chiffrage
pour 2013

Chiffrage pour 2014

Taux de TVA minoré

Art. 296 du code général des impôts (CGI)

TVA

1 160

1 260

Défiscalisation des investissements productifs

Art. 199 undecies B du CGI

IR

380

380

Défiscalisation des investissements en matière de logement

Art. 199 undecies A et 199 undecies D du CGI

IR

280

235

Défiscalisation dans le logement social

Art. 199 undecies C

IR

300

-

Réduction du barème de l'impôt sur le revenu

Art. 197-I-3 du CGI

IR

300

310

Défiscalisation des investissements productifs

Art. 217 undecies et 217 duodecies du CGI

IS

190

190

Exonération de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers

Art. 295 du CGI

TVA

190

195

TVA dite « non perçue récupérable »

Art. 295 A du CGI

TVA

100

100

Exclusion du champ d'application de la TIPP

Art. 267 du code des douanes

TICPE

795

800

Autres dépenses fiscales rattachées à la mission

213

211

Total (en estimant constant, en 2014, le coût de la défiscalisation à l'IR en matière de logement social)

3 908

3 981

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

L'effort fiscal en faveur de l'outre-mer est donc en hausse en 2014 par rapport à 2013, d'après les estimations présentées dans les annexes au présent projet de loi de finances. Ce tableau appelle cependant plusieurs observations.

Tout d'abord, l'on constate que la dépense fiscale au titre des investissements dans le logement libre et intermédiaire (article 199 undecies A) est en baisse (- 45 millions d'euros) après une diminution de 50 millions d'euros l'année précédente. Cette évolution est logique, puisque la LODEOM avait - entre autre - pour objectif de recentrer la dépense fiscale en matière de logement de ce dispositif, pour l'essentiel mis en extinction, vers le logement social.

S'agissant justement du logement social, vos rapporteurs spéciaux notent que pour la deuxième année consécutive, le Gouvernement n'a pu chiffrer le montant prévisionnel de cette dépense , particulièrement dynamique. Ainsi, après avoir atteint 68 millions d'euros en 2011, cette dépense fiscale a progressé jusqu'à 208 millions d'euros en 2012 et 300 millions d'euros en 2014.

Vos rapporteurs spéciaux s'étonnent également qu'aucun impact de la réforme de la défiscalisation outre-mer, qui fait l'objet de l'article 13 du présent projet de loi de finances, ne soit attendu.

Celle-ci propose notamment la mise en place de deux crédits d'impôts - l'un pour les investissements productifs, l'autre pour le logement social - dont la finalité est de capter une partie des investissements aujourd'hui défiscalisés, afin de faire baisser la dépense fiscale. Certes, il est difficile d'évaluer le report des investisseurs sur ces deux dispositifs, qui, de plus, comportent pour l'État un coût de trésorerie les premières années, dans la mesure où le crédit d'impôt est versé en une seule fois. Ainsi, l'étude d'impact de l'article 13 ne prévoit pas d'impact financier pour l'État.

Vos rapporteurs spéciaux considèrent qu'après cette réforme importante, la défiscalisation doit désormais être stabilisée , que ce soit en ce qui concerne ses montants - l'aide à l'Outre-mer ne doit pas diminuer - ou dans ses dispositions juridiques - les investisseurs ont besoin de stabilité et de visibilité.

D. UN EFFORT BUDGÉTAIRE ET FINANCIER GLOBAL CONSACRÉ À L'OUTRE-MER STABILISÉ

Le document de politique transversale (DPT) « Outre-mer » annexé au présent projet de loi de finances fait apparaître une stabilisation des autorisations d'engagement globalement consacrés par l'État à la politique transversale en direction des territoires ultramarins (- 4 millions d'euros), qui atteint 14,3 milliards d'euros.

Cette évolution globale masque des différences importantes selon les territoires, comme le montre le tableau ci-dessous :

Évolution des autorisations d'engagement
de la politique transversale « Outre-mer »

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Évolution

2012

2013

2014

2013/2012

2014/2013

Guadeloupe

2 328

2 362

2 353

1,5 %

-0,4 %

Guyane

1 541

1 554

1 526

0,9 %

-1,8 %

Martinique

2 266

2 163

2 133

-4,5 %

-1,4 %

Saint-Martin

40

51

52

29,0 %

0,4 %

Saint-Barthélemy

2

2

2

-4,1 %

11,7 %

La Réunion

4 493

4 468

4 428

-0,5 %

-0,9 %

Mayotte

731

741

732

1,4 %

-1,2 %

Nouvelle-Calédonie

1 184

1 168

1 223

-1,4 %

4,8 %

Polynésie-française

1 250

1 231

1 220

-1,5 %

-0,9 %

Wallis et Futuna

103

81

80

-21,9 %

-1,3 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

91

76

73

-16,4 %

-4,4 %

TAAF

22

22

21

-2,4 %

-4,1 %

Crédits non répartis

188

360

431

91,5 %

19,9 %

Total

14 239

14 280

14 276

0,3 %

0,0 %

Source : document de politique transversale « Outre-mer » annexé au présent projet de loi de finances

On peut notamment noter une hausse importante des AE à destination de la Nouvelle-Calédonie (+ 55 millions) et des crédits non répartis (+ 71 millions), tandis qu'à l'inverse, connaissent une baisse importante - en montant - les crédits à destination de la Guyane (- 28 millions d'euros), de la Martinique (- 30 millions d'euros) et de La Réunion (- 40 millions d'euros).

Vos rapporteurs spéciaux regrettent que les éléments fournis dans le DPT ne permettent pas d'évaluer les causes des évolutions de crédits les plus importantes en faveur de chaque territoire ultramarin, ce qui rend l'exploitation des données fournies particulièrement difficile.

II. L'ÉVOLUTION DES DEUX PROGRAMMES DE LA MISSION

A. LE PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE-MER »

Répartition des crédits entre les actions du programme n° 138

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagements

Crédits de paiement

LFI 2013

PLF 2014

Évolution

LFI 2013

PLF 2014

Évolution

Action 1 « Soutien aux entreprises »

1 164, 5

1 156,2

- 0,71 %

1 164,5

1 147,7

- 1,44 %

Action 2 « Aide à l'insertion et à la qualification professionnelle »

236,4

244,8

+ 3,56 %

225,8

237,0

+ 4,97 %

Action 3 « Pilotage des politiques des outre-mer »

2,9

2,9

-

2,9

2,9

-

Total

1 403,8

1 403,9

+ 0,01 %

1 393,2

1 387,6

+ 0,40 %

Source : Commission des finances à partir du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

Comme l'indique le tableau ci-dessus, les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » connaissent une stabilisation tant en AE (+ 0,01 %) qu'en CP (+ 0,40 %), entre le présent projet de loi de finances et la loi de finances initiale pour 2013.

Les dotations des actions évoluent toutefois de manière différente. Celles de l'action 01 « Soutien aux entreprises » est en légère diminution en AE (- 0,71 %) et en CP (- 1,44 %) tandis que celles de l'action 02 « Aide à l'insertion et à la qualification professionnelle » connaissent une évolution modérée en AE comme en CP (respectivement + 3,56 % et + 4,97 %). Enfin, l'action 03, « Pilotage des politiques des outre-mer », qui porte les crédits du ministère des Outre-mer, est parfaitement stable.

1. Le soutien aux entreprises
a) La réforme des exonérations de charges

L'article 70 du présent projet de loi de finances, rattaché à la présente mission ( cf. infra ), prévoit une diminution des exonérations de charges pour les entreprises ultramarines , prévues à l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, afin de recentrer cette dépense budgétaire - dont les crédits sont portés par la présente action - sur les bas salaires.

L'économie attendue s'élève à 90 millions d'euros en 2014 , par rapport à l'évolution de la dépense en l'absence de réforme. Par rapport à 2013, le niveau des crédits est en revanche stable.

Il faut souligner que cette réforme s'accompagne de la mise en oeuvre du CICE (les entreprises ultramarines devraient bénéficier de 320 millions d'euros au titre de ce crédit d'impôt).

b) L'augmentation des impayés aux organismes de sécurité sociale

L'action 01 « Soutien aux entreprises » regroupe essentiellement les crédits destinés à compenser aux organismes de sécurité sociale le coût des exonérations de charges sociales spécifiques aux territoires ultramarins.

Ces crédits font traditionnellement l'objet d'une sous budgétisation au sein de la mission « Outre-mer ». Il en est résulté des opérations récurrentes d'abondement de la ligne budgétaire en cours de gestion, afin d'acquitter les impayés résultant de ces sous-budgétisations.

Malgré ces abondements, le total des impayés de l'État aux organismes de sécurité sociale au titre des exonérations spécifiques à l'outre-mer s'élevait, fin 2011, à 56,93 millions d'euros. Si l'on prend en compte les créances disponibles auprès de l'ACOSS et de la CCMSA (34,76 millions d'euros), le montant net la dette s'élève à 22,17 millions d'euros.

Pour 2012, les prévisions des organismes sociaux évaluaient les besoins à 1 083 millions d'euros, mais seulement 1 072 millions d'euros étaient inscrits en loi de finances initiale. Au total, les caisses ont reçu 1 089 millions d'euros, compte tenu du dégel, des ouvertures intervenues en loi de finances rectificative ou des redéploiements.

Cette exécution n'a pas empêché que la dette nette de l'État à l'égard des organismes de sécurité sociale, atteigne 76,9 millions d'euros en fin d'exercice, les prévisions initiales s'étant révélées insuffisantes. Cette croissance résulte de la différence entre les sommes versées aux caisses (1 089 millions d'euros) et les dépenses effectivement effectuées par celles-ci (1 144 millions d'euros), soit 54,7 millions d'euros.

En 2013, comme l'avaient craint l'an dernier vos rapporteurs spéciaux, les chiffres disponibles semblent montrer que cette action a encore été sous-budgétée. Le total prévisionnel des crédits s'élève en gestion à 1 086 millions d'euros pour un total des besoins évalués à 1 187 millions d'euros.

S'agissant du présent projet de loi de finances, vos rapporteurs spéciaux constatent que la baisse des CP (- 1,44 %) rendra encore plus difficile la couverture des dépenses et la diminution de la dette de l'État envers les caisses.

2. Les aides au fret et à la rénovation hôtelière

Vos rapporteurs spéciaux notent avec satisfaction que, conformément à ce qu'ils avaient souhaité l'an dernier, les crédits relevant de l'aide au fret et de l'aide à la rénovation hôtelière font l'objet de sous-actions distinctes.

Le montant global de ces sous-actions est inchangé par rapport à l'an dernier (9 millions d'euros), répartis cette année entre 6 millions d'euros au titre de l'aide au fret et 3 millions d'euros pour la rénovation hôtelière.

a) L'aide au fret

S'agissant de l'aide au fret, les crédits sont stables par rapport à l'an dernier (6 millions d'euros en AE comme en CP).

Ce dispositif a fait l'objet d'un contrôle de vos rapporteurs spéciaux, présenté en seconde partie du présent rapport. Ils s'y inquiètent notamment, au vu de l'exécution de ces dernières années, que les crédits de cette sous-action puissent désormais se révéler insuffisants.

b) L'aide à la rénovation hôtelière

L'aide à la rénovation hôtelière est octroyée aux établissements hôteliers de plus de 15 ans situés dans les départements d'outre-mer, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon afin d'améliorer la qualité et de moderniser l'offre d'hébergement et d'accueil. Cette aide budgétaire peut atteindre un montant maximum de 7 500 € par chambre dans la limite de 100 chambres par établissement ou bien 6 500 € par chambre lorsque l'opération de rénovation n'a pas pour objectif d'améliorer le classement de l'établissement.

Pour répondre à l'objectif de mise à niveau du parc hôtelier ultramarin, trois types de dépenses sont éligibles : les travaux de réhabilitation légère et moyenne, les travaux de rénovation et les travaux d'extension.

En 2012, 11 établissements ont bénéficié de ce dispositif pour un total de 1,8 million d'euros en AE et 2,8 millions d'euros en CP.

Ventilation par territoire de l'aide à la rénovation hôtelière (2012)

(en euros)

AE

CP

Nombre d'hôtels

Nombre de chambres rénovées

Guadeloupe

685 429

242 294

4

160

St Martin

123 060

1 081 811

1

24

Guyane

260 000

269 538

1

39

Martinique

279 500

456 465

2

41

La Réunion

40 000

546 539

1

16

Mayotte

135 000

27 000

1

18

St-Pierre-et-Miquelon

330 000

159 643

1

44

Total

1 852 989

2 783 290

11

342

Source : Réponse au questionnaire budgétaire

3. La poursuite de la montée en puissance du service militaire adapté (SMA)

Le service militaire adapté

Créé en 1961, le service militaire adapté (SMA) est un organisme d'insertion professionnelle relevant du ministère de l'outre-mer. Le SMA participe également, par les chantiers d'application qu'il conduit, à la mise en valeur des collectivités d'outre-mer et, au titre de son statut militaire, à l'exécution des plans d'urgence et de secours en cas de catastrophe naturelle. Il a formé en 2009 2 900 jeunes volontaires (de 18 à 26 ans), répartis en sept corps de troupe outre-mer (Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Mayotte, Nouvelle-Calédonie et Polynésie française).

L'originalité du SMA consiste à associer une formation citoyenne, militaire et professionnelle, en travaillant donc à la fois sur les « savoir », les « savoir-faire » et les « savoir être » de jeunes qui ont été confrontés à l'échec scolaire (recrutement 2007 : 30 % d'illettrés et 60 % de jeunes sans brevet des collèges).

Les douze mois passés au SMA comprennent :

- un mois de formation militaire ;

- 800 heures de formation professionnelle dans l'une des cinquante filières existantes ;

- une remise à niveau scolaire en tant que de besoin ;

- la préparation et le passage du permis de conduire ;

- la préparation et le passage de l'attestation de premiers secours ;

- le cas échéant, un chantier d'application.

Cette action est renforcée par l'accompagnement permanent des volontaires, fondé sur l'internat et un suivi individualisé vers l'emploi. Au terme de leur année au SMA, la quasi-totalité des jeunes obtiennent un diplôme spécifique qui sanctionne leur formation : le Certificat d'aptitude personnelle à l'insertion (CAPI).

Source : « L'insertion professionnelle des jeunes d'outre-mer », ministère de l'outre-mer, 30 avril 2009

L'emploi et la formation des jeunes sont deux engagements majeurs du Président de la République et du Gouvernement, qui s'illustrent, en outre-mer, notamment à travers la montée en puissance du SMA. On rappellera que ce dispositif présente un taux d'insertion dans l'emploi de 74 %.

L'an dernier, vos rapporteurs spéciaux regrettaient que l'objectif de 6 000 bénéficiaires ait été reporté à 2016, du fait des évolutions budgétaires de ces dernières années. Les arbitrages budgétaires sur le triennal 2013-2015 devraient en revanche garantir le respect de cet objectif.

Évolution de la capacité d'accueil du SMA

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

ETPT de volontaires

2 900

2 954

3 238

3 811

4 007

4 204

4 400

4 400

Places de stages ouvertes dans l'année

2 900

3 000

4 100

4 850

5 300

5 500

6 000

6 000

Source : réponse au questionnaire budgétaire

N.B. Les chiffres indiqués dans le tableau sont ceux atteints en fin d'année. L'objectif de 6 000 places sera donc atteint courant 2015, mais 2016 sera la première année pleine à offrir 6 000 places de stages.

On observe que ce doublement du nombre des volontaires par rapport à 2010 ne s'accompagne pas d'une évolution dans les mêmes proportions du nombre d'ETPT. En effet, les nouveaux bénéficiaires appartiennent à un public différent. Alors que les volontaires étaient essentiellement des jeunes ultramarins non diplômés, bénéficiant d'un cursus de formation long (8 à 12 mois), les nouveaux bénéficiaires sont des jeunes diplômés en chômage de longue durée, qui se voient proposer un cursus d'accompagnement court (6 mois).

Ainsi, du fait que certains stagiaires suivent une formation courte et d'autres une formation longue, le nombre de places offertes aux volontaires bénéficiant du dispositif est décorrélé de celui des équivalents temps plein travaillé (ETPT) accordés annuellement : ainsi, entre 2009 et 2013, le nombre de places de stages ouvertes a progressé de 83 % quand le nombre d'ETPT de volontaires évoluait de 38 %.

Les crédits du SMA augmentent de 4 % environ en 2014, notamment du fait des dépenses d'investissement, qui permettront de renforcer les capacités d'accueil et de formation.

Évolution des crédits du SMA depuis 2009

(en millions d'euros)

Total LFI exécuté

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

AE

112

141

195

187

199

208

212

CP

110

127

175

203

203

200

218

Source : Réponse au questionnaire budgétaire

4. La stabilité des crédits consacrés à la formation en mobilité des jeunes ultramarins

Le « passeport-mobilité formation professionnelle », mis en place par l'article 50 de la Lodeom, constitue le dispositif central d'aide aux personnes bénéficiant d'une mesure de formation qualifiante, hors de leur département ou de leur collectivité d'origine. Il permet de pallier les limites de l'offre locale de formation et donc d'améliorer l'employabilité des jeunes ultramarins. En 2014, ses crédits s'élèveront à 20,3 millions d'euros, soit un montant identique à celui de l'an dernier.

Le programme « Cadre avenir », tout comme le programme « 40 cadres des îles Wallis-et-Futuna », tendent à assurer la formation, notamment en métropole, de cadres originaires de ces territoires. Leurs crédits sont également stables, à 6,218 millions d'euros.

Enfin, les crédits des « chantiers de développement local », qui permettent, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie et dans les îles Wallis et Futuna d'assurer aux plus démunis des revenus en échange d'un travail d'intérêt général, et ceux du programme « Jeunes stagiaires du développement », qui fonctionne sur les mêmes principes que le précédent mais réservé aux jeunes de 18 à 26 ans, sont pratiquement stables (- 180 000 euros).

5. La stabilisation des crédits du ministère des Outre-mer

Depuis l'an dernier, le ministère de l'intérieur a transféré au ministère des Outre-mer une partie de ses crédits de fonctionnement, portée jusqu'alors par le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », du ministère de l'intérieur.

Ces crédits s'élèvent à 2,9 millions d'euros, soit un montant identique à celui de 2013. Ils seront consacrés au fonctionnement du cabinet du ministre, de la délégation générale à l'outre-mer et de la délégation interministérielle à l'égalité des chances des Français d'outre-mer. Ils permettront de couvrir les dépenses courantes de fonctionnement - hors personnel -, c'est-à-dire les fournitures et matériels de bureau, déplacements, documentation, frais de communication et de représentations.

Les dépenses lourdes d'infrastructure de réseaux de communication et informatiques, ainsi que les dépenses immobilières, continuent d'être assurées par le ministère de l'intérieur.

B. LE PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER »

L'évolution des crédits du programme

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagements

Crédits de paiement

LFI 2013

PLF 2014

Évolution

LFI 2013

PLF 2014

Évolution

Action 1 « Logement »

272,8

272,8

-

227,0

245,0

+ 7,92 %

Action 2 « Aménagement du territoire »

184,9

146,9

- 20,56%

164,9

164,3

- 0,37 %

Action 3 « Continuité territoriale »

51,5

51,5

-

51,5

51,5

-

Action 4 « Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport »

5,5

4,8

- 12,77%

5,5

5,2

- 5,51 %

Action 6 « Collectivités territoriales »

187,9

186,2

- 0,90%

161,4

171,7

+ 6,36 %

Action 7 « Insertion économique et coopération régionales »

2,0

1,9

- 2,57%

2,0

1,9

- 2,57 %

Action 8 « Fonds exceptionnel d'investissement »

50,0

50,0

-

25,9

25,9

-

Action 9 « Appui à l'accès aux financements bancaires »

30,0

30,0

-

7,5

7,2

- 3,16 %

Total

784,4

744,0

- 5,16%

645,6

672,7

+ 4,19 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

Comme l'indique le tableau ci-dessus, les crédits du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » sont en baisse en ce qui concerne les AE (- 5,2 %) mais en hausse pour les CP (+ 4,2 %).

1. Une situation du logement en outre-mer qui reste très tendue
a) Des réalisations qui représentent moins de la moitié des besoins annuels

Comme l'indique le tableau ci-dessous, le nombre de logements sociaux neufs financés dans les cinq départements d'outre-mer est en augmentation depuis 2007.

En 2012, 8 196 logements ont été financés, dont près de 60 % à La Réunion, soit une hausse de plus de 55 % par rapport à l'année 2007. Cependant, on observe un ralentissement de cette hausse, puisqu'à peine 89 logements supplémentaires ont été financés en 2012 (+ 1,1 %).

Nombre de logements sociaux neufs financés

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Guadeloupe et Saint Martin

1 803

1 577

1 491

1 221

1 589

1 656

1 305

Martinique

597

418

729

701

1 042

1 099

1 012

Guyane

704

1 029

1 027

1 077

1 156

1 261

950

La Réunion

2 761

2 144

2 275

3 031

3 561

3 929

4 846

Mayotte

65

120

136

158

144

162

83

Total

5 930

5 288

5 658

6 188

7 492

8 107

8 196

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Toutefois, au regard des besoins des départements d'outre-mer, ces réalisations s'avèrent très insuffisantes. D'après les informations recueillies par vos rapporteurs spéciaux auprès du ministère chargé de l'outre-mer, le nombre de demandes de logements sociaux en attente s'élevait, pour l'ensemble de ces territoires, à près de 70 000 . Or, la croissance démographique des départements d'outre-mer ne permet pas d'envisager une diminution de cette demande.

La construction de plus de 20 000 logements sociaux par an serait nécessaire, d'ici à 2030, pour répondre aux besoins de la population. Un effort supplémentaire en matière de construction de logement social est donc nécessaire.

Le ministre des Outre-mer, Victorin Lurel, a annoncé en septembre dernier un plan pluriannuel pour le logement social outre-mer, avec un objectif de 10 000 logements locatifs et en accession sociale par an, sur dix ans. Vos rapporteurs spéciaux seront particulièrement attentifs à la mise en oeuvre de ce plan.

Ils s'inquiètent néanmoins que les modifications introduites par le présent projet de loi de finances (article 13) au dispositif de défiscalisation sur le logement social (introduction d'un seuil minimum de LBU), parallèlement à la mise en place d'un crédit d'impôt, puissent avoir un effet négatif sur le nombre de logements construits.

b) Les crédits de paiement de la ligne budgétaire unique (LBU) en hausse

Le montant de la LBU est stable en AE mais connait une hausse significative de 8 % en CP , après une augmentation de 6 % l'an dernier. Ce sont 18 millions d'euros supplémentaires qui bénéficieront à la politique du logement outre-mer. En deux ans, les crédits de paiement de la LBU sont en hausse de 30 millions d'euros. Depuis 2011, cette hausse atteint 25 %.

Montant des crédits consacrés à la ligne budgétaire unique

(en millions d'euros)

Source : projets annuels de performances annexés aux projets de loi de finances

L'augmentation des CP de la LBU n'a cependant pas permis d'éviter le retour à un niveau important des impayés de l'État vis-à-vis des bailleurs sociaux , du fait d'une sous-budgétisation en CP de la LBU.

La dette de l'État s'élevait à 115 millions d'euros en 2006. Le rapprochement des AE et des CP, prôné par votre commission des finances, avait permis de combler en grande partie cette dette, dont le montant était ramené à 7,2 millions d'euros au 31 décembre 2011, ce qui correspond à un volume compatible avec les délais de fin de gestion.

Cependant, en 2012 celle-ci a de nouveau dérapé et s'élève désormais à 40,4 millions d'euros. D'après les informations recueillies par vos rapporteurs spéciaux, elle atteindrait même 80 millions d'euros à la fin de 2013 .

Vos rapporteurs spéciaux s'inquiètent de la réapparition de cette dette vis-à-vis des bailleurs sociaux, à l'heure où il est nécessaire de renforcer les efforts menés en matière de logement social.

2. Le financement de la politique contractuelle de l'État en outre-mer

L'action 02 « Aménagement du territoire » du programme 123 « Conditions de vie en outre-mer » regroupe essentiellement les crédits liés au financement des contrats de projets et des contrats de développement passés entre l'État et les collectivités territoriales d'outre-mer.

Le montant total des contrats de projet des DOM et des contrats de développement des COM représente 1 926,6 millions d'euros dont 1 262 millions d'euros pour l'État, parmi lesquels 854,3 millions d'euros sont portés par la présente action.

Les crédits de cette action s'élèveront, en 2014, à 147 millions d'euros en AE et à 164 millions d'euros en CP, soit une diminution importante en AE (- 20,6 %) et une quasi-stabilisation en CP (- 0,4 %).

La diminution des AE s'explique par le fait que l'on arrive au terme des contrats 2007-2013. L'année 2014 constitue une période de transition afin d'achever les projets concernés, avant de lancer la future « génération » de contrats, portant sur la période 2015-2020.

S'agissant spécifiquement des quatre départements d'outre-mer, le montant initialement pris en charge par le programme 123 était de 268 millions d'euros et s'élève après transfert de crédits issus de quatre autres ministères à 297,9 millions d'euros répartis comme suit :

- Guadeloupe : 66,8 millions d'euros ;

- Guyane : 61,8 millions d'euros ;

- Martinique : 56,4 millions d'euros ;

- Réunion : 112,8 millions d'euros.

Sur les crédits du budget opérationnel du programme 123, le taux d'engagement des contrats pour ces quatre départements s'élève, respectivement, à 73 %, 67 %, 49 % et 57 %. Tous budgets opérationnels de programme confondus et sur l'ensemble des départements, le taux d'engagement était de 54,5 % au 31 décembre 2012, contre 49 % un an plus tôt. Ce taux d'engagement est très inférieur au taux national qui s'élève à 63,5 % et fortement éloigné de l'objectif théorique de 85,7 % correspondant à six annuités.

L'administration a indiqué à vos rapporteurs spéciaux que cette situation s'expliquait par « la signature tardive de ces contrats, leur adossement aux programmes opérationnels européens qui ont également connu des retards en termes de programmation et d'engagement, ainsi que les mouvements sociaux qu'ont connus les régions d'outre-mer au début de l'année 2009, expliquent en partie ces retards d'exécution, qui sont en cours de rattrapage ».

3. La stabilité des crédits du fonds de continuité territoriale

Le dispositif de continuité territoriale a été largement modifié par la Lodeom, dont l'article 50 a prévu la mise en place d'un fonds de continuité territoriale chargé de financer :

- l'aide à la continuité territoriale (ACT) pour tous publics ;

- le passeport-mobilité études (PME) pour les étudiants et les lycéens ;

- le passeport-mobilité formation professionnelle (PMFP) pour les personnes ayant un projet d'insertion professionnelle.

L'action 03 « Continuité territoriale » vise principalement à financer ce fonds de continuité territoriale, à hauteur de 51,45 millions d'euros (AE = CP), en 2014 comme en 2013.

4. Une hausse modérée des crédits en faveurs de la Polynésie française

L'action 06 « Collectivités territoriales » rassemble plusieurs dotations de l'État au profit des collectivités territoriales ultramarines. Elle est dotée, pour l'année 2013, de 186 millions d'euros en AE et de 172 millions d'euros en CP, qui correspondent à 79 % aux enveloppes versées à la Polynésie française.

Ces crédits sont relativement stables en AE (- 1 %) mais en hausse en CP (+ 6 %).

Ces évolutions résultent notamment de la hausse des CP des contrats sur les projets d'investissement prioritaires, conclus entre l'État et la Polynésie française, correspondant aux projets engagés en 2014 mais également en 2013, 2012 et 2011.

Il faut également noter un double changement. D'une part, la dotation de rattrapage et de premier équipement des communes de Mayotte (8,9 millions d'euros en 2013), mise en place pour pallier l'absence de fiscalité locale, est supprimée, dans la mesure où la fiscalité de droit commun va s'appliquer à Mayotte à compter du 1 er janvier. D'autre part, la dotation spéciale de construction et d'équipement des établissements scolaires à Mayotte 1 ( * ) , jusqu'à présent rattachée au programme 122 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », se retrouve désormais rattachée à la présente action.

Il faut également noter que, dans le cadre de la participation des collectivités territoriales à l'effort de redressement des finances publiques, la dotation globale d'autonomie dont bénéficie la Polynésie française diminue de 1,2 million d'euros. En effet, celle-ci est indexée sur la dotation globale de fonctionnement (DGF).

5. La stabilité des crédits consacrés à l'insertion économique et la coopération régionale

L'action 07 « Insertion économique et coopération régionale » du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » vise à favoriser l'intégration et l'insertion économique des départements et collectivités d'outre-mer dans leur environnement régional, tout en affirmant la présence française dans ces zones.

Les crédits de cette action correspondent principalement au financement des quatre fonds de coopération régionale (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion).

Ces crédits ne représentent que 0,1 % des crédits de la mission. Ils sont en baisse de 51 000 euros, pour un montant de 1,92 million d'euros (AE = CP).

6. Le maintien à un niveau important des crédits du fonds exceptionnel d'investissement (FEI)

Le fonds exceptionnel d'investissement (FEI) a été créé par l'article 31 de la Lodeom afin de participer au financement d'équipements structurants, en partenariat avec les collectivités territoriales d'outre-mer. Le FEI a par la suite servi d'outil privilégié pour financer, en 2009, des opérations dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de relance.

Comme l'indique le tableau ci-dessous, les crédits alloués au FEI ont fortement diminué entre 2009 et 2012. Cette baisse s'expliquait essentiellement par la fin des effets du plan de relance de 2009, mais le fonds n'avait pas retrouvé son niveau de la loi de finances initiale pour 2009 (40 millions d'euros en AE), qui précédait pourtant la mise en oeuvre du plan de relance.

Crédits alloués au fonds exceptionnel d'investissement

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

AE

165

40

10

17

50

50

50

50

50

CP

51

17

21,5

19

25,9

25,9

-

-

-

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Le projet de loi de finances pour 2013 prévoyait une relance du fonds, dont les autorisations d'engagement sont passées de 17 millions d'euros en 2012 à 50 millions en 2013 (+ 194 %), et les crédits de paiement de 19 millions d'euros à 25,9 millions.

En 2014, les AE et les CP restent au même montant que l'an dernier. Le montant des AE devrait se maintenir à ce niveau jusqu'en 2017.

Un appel à projet a été lancé en janvier 2013 dans chacun des territoires conduisant à la sélection d'un certain nombre d'opérations d'investissement contribuant de manière déterminante au développement économique, social et énergétique des territoires ultramarins.

Les investissements ont notamment concernés les thèmes suivants :

- adduction d'eau potable et assainissement ;

- gestion des déchets ;

- désenclavement ;

- infrastructures numériques ;

- infrastructures d'accueil des entreprises

- prévention des risques naturels ;

- équipements publics de proximité dans le domaine sanitaire et social ;

- énergies renouvelables et développement durable.

À l'issue de ces appels à projet, des opérations ont été retenues pour un montant total de subventions de 47 millions d'euros générant 118 millions d'euros d'investissements publics.

7. L'appui à l'accès aux financements bancaires

Enfin, l'action 09 « Appui à l'accès aux financements bancaires » du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » vise à favoriser les investissements des acteurs publics en facilitant l'accès au crédit bancaire par une réduction de son coût ou une meilleure couverture des risques. Cette action est mise en oeuvre par l'intermédiaire de l'Agence française pour le développement (AFD).

Les crédits ouverts pour 2014 s'élèvent à 30 millions d'euros en AE, comme l'an dernier, et à 7,2 millions d'euros en CP (- 0,3 million par rapport à l'an dernier).

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 70 (Art. L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale) - Recentrage sur les bas salaires de l'exonération des cotisations employeurs outre-mer

Commentaire : le présent article prévoit une diminution des exonérations de charges sur les salaires supérieurs à 1,9 SMIC.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES EXONÉRATIONS DE COTISATIONS SOCIALES SPÉCIFIQUES À L'OUTRE-MER

Depuis 1994, les entreprises des départements d'outre-mer (Guadeloupe, Martinique, La Réunion, Guyane) ainsi que de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Saint-Martin bénéficient d'exonérations spécifiques de charges sociales, afin de réduire le coût du travail dans le secteur marchand et favoriser la création d'emploi.

Ce dispositif est codifié à l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale. Les pertes de recettes en résultant pour la sécurité sociale sont compensées par le budget général de l'État, en application des articles L. 131-7 et L.O. 111-3 du même code. Ces crédits sont portés par l'action 01 « Soutien aux entreprises » du programme 138 « Emploi outre-mer » de la mission « Outre-mer ».

L'exonération porte sur les cotisations sociales à l'exception de celles dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles et s'applique :

- aux entreprises de dix salariés au plus (au-delà de cet effectif, le bénéfice de l'exonération est maintenu dans la limite de dix salariés) ;

- aux entreprises, quel que soit leur effectif, de certains secteurs : bâtiment et travaux publics, industrie, restauration, énergies renouvelables, pêche, agriculture, tourisme... ;

- aux entreprises de transport aérien assurant la desserte entre la métropole et ces territoires, entre ces territoires entre eux et à l'intérieur de ces territoires ;

- aux entreprises assurant la desserte maritime ou fluviale de plusieurs points de ces territoires ou entre ces territoires.

Pour le calcul de l'exonération, trois cas sont à envisager.

Pour les entreprises de moins de 11 salariés :

- En-deçà de 1,4 SMIC, l'exonération est totale ;

- Entre 1,4 et 2,2 SMIC, le montant de l'exonération est égal à celui d'un salarié à 1,4 SMIC, soit 563 euros ;

- Entre 2,2 et 3,8 SMIC, le montant de l'exonération est dégressif selon une formule fixée au 1° de l'article R. 752-19-1 du même code ;

- À partir de 3,8 SMIC, il n'y a plus d'exonération.

Pour les entreprises de plus de 10 salariés :

- En-deçà de 1,4 SMIC, l'exonération est totale ;

- Entre 1,4 et 3,8 SMIC, le montant de l'exonération est dégressif selon une formule fixée au 2° de l'article R. 752-19-1 du même code ;

- À partir de 3,8 SMIC, il n'y a plus d'exonération.

Il est également prévu un « secteur renforcé », pour les entreprises situées dans les territoires précités, à l'exception de Saint-Pierre-et-Miquelon, remplissant certaines conditions énumérées au IV de l'article L. 752-3-2 et notamment le fait d'employer moins de 250 salariés, de réaliser un chiffre d'affaires inférieur à 50 millions d'euros et d'avoir une activité principale relevant d'un des secteurs éligibles à la défiscalisation sur les investissements productifs (article 199 undecies B du code général des impôts).

Pour ces entreprises, l'exonération est calculée ainsi :

- En-deçà de 1,6 SMIC, l'exonération est totale ;

- Entre 1,6 et 2,5 SMIC, le montant de l'exonération est égal à celui d'un salarié à 1,6 SMIC, soit 643 euros ;

- Entre 2,5 et 4,5 SMIC, le montant de l'exonération est dégressif selon une formule fixée au 3° de l'article R. 752-19-1 du même code ;

- À partir de 4,5 SMIC, il n'y a plus d'exonération.

Au titre de cette mesure, 1,1 milliard d'euros ont été exécutés en 2012 et 1,2 milliard d'euros demandés en loi de finances initiale pour 2013.

B. LES EXONÉRATIONS AU TITRE DU CRÉDIT D'IMPÔT COMPÉTITIVITÉ EMPLOI (CICE)

L'article 244 quater C du code général des impôts a mis en place un crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE). Pour les entreprises qui en bénéficient, ce crédit d'impôt est assis sur les rémunérations de leurs salariés. Son taux est égal à 4 %, pour les salaires n'excédant pas 2,5 SMIC.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. UNE DIMINUTION DES EXONÉRATIONS POUR LES SALAIRES AU-DELÀ DE 1,4 SMIC

Le 1° du I du présent article met en cohérence les règles de décompte des seuils d'effectifs, en remplaçant au I de l'article L. 752-3-2 la notion d'entreprises de « dix salariés au plus » par celle d'entreprises de « moins de onze salariés », qui est utilisée au III de l'article.

Les b et c du 2° et le b du 3° modifient les modalités de calcul de l'exonération, conformément au tableau ci-dessous :

Modification des modalités de calcul de l'exonération

(en multiples du SMIC)

Entreprises
de moins de 11 salariés

Entreprises
de plus de 10 salariés

Entreprises
du secteur renforcé

Droit existant

PLF 2014

Droit existant

PLF 2014

Droit existant

PLF 2014

Seuil en-deçà duquel l'exonération est totale

1,4

1,4

1,4

1,4

1,6

1,6

Seuils entre lesquels l'exonération est fixe
(montant)

1,4 - 2,2
(563 euros)

1,4 - 1,8
(563 euros)

-

-

1,6 - 2,5
(643 euros)

1,6 - 2
(643 euros)

Seuils entre lesquels l'exonération est dégressive

2,2 - 3,8

2,2 - 2,8

1,4 - 3,8

1,4 - 2,6

2,5 - 4,5

2 - 3

Seuil à partir duquel il n'y a plus d'exonération

3,8

2,8

3,8

2,6

4,5

3

Source : Commission des finances du Sénat

Les a et d du 2° et le c du 3° prévoient que ces nouvelles modalités de calcul sont réservées aux entreprises qui bénéficient du CICE. Pour les autres entreprises, les exonérations ne sont pas modifiées.

B. UNE ÉCONOMIE BUDGÉTAIRE À TERME DE PLUS DE 100 MILLIONS D'EUROS

D'après l'étude d'impact, cette diminution des exonérations pour les salaires au-delà de 1,4 SMIC devrait conduire, à partir de 2015, à une économie pour l'État de 108 millions d'euros par an. En 2014, afin de tenir compte des compensations versées au titre d'exonérations constatées en 2013, l'économie attendue est estimée à 90 millions d'euros, par rapport au niveau estimé en l'absence de réforme.

C. LES EFFETS POUR LES ENTREPRISES ULTRAMARINES

Les tableaux ci-dessous retracent l'effet net de la modification du calcul des exonérations et de la mise en place du CICE.

Effets sur les exonérations des entreprises de moins de 11 salariés

(en euros)

Multiple
du SMIC

Salaire mensuel brut

Exonération actuelle

Exonération CICE

Exonération proposée

Différence
(PLF 2014 + CICE - droit existant)

1,0

1 430,22

401,89

57,21

401,89

57,21

1,1

1 573,24

442,08

62,93

442,08

62,93

1,2

1 716,26

482,27

68,65

482,27

68,65

1,3

1 859,29

522,46

74,37

522,46

74,37

1,4

2 002,31

562,65

80,09

562,65

80,09

1,5

2 145,33

562,65

85,81

562,65

85,81

1,6

2 288,35

562,65

91,53

562,65

91,53

1,7

2 431,37

562,65

97,25

562,65

97,25

1,8

2 574,40

562,65

102,98

562,65

102,98

1,9

2 717,42

562,65

108,70

506,38

52,43

2,0

2 860,44

562,65

114,42

450,12

1,89

2,1

3 003,46

562,65

120,14

393,85

-48,66

2,2

3 146,48

562,65

125,86

337,59

-99,20

2,3

3 289,51

527,48

131,58

281,32

-114,58

2,4

3 432,53

492,32

137,30

225,06

-129,96

2,5

3 575,55

457,15

-

168,79

-288,36

2,6

3 718,57

421,99

-

112,53

-309,46

2,7

3 861,59

386,82

-

56,26

-330,56

2,8

4 004,62

351,66

-

-

-351,66

2,9

4 147,64

316,49

-

-

-316,49

3,0

4 290,66

281,32

-

-

-281,32

3,1

4 433,68

246,16

-

-

-246,16

3,2

4 576,70

210,99

-

-

-210,99

3,3

4 719,73

175,83

-

-

-175,83

3,4

4 862,75

140,66

-

-

-140,66

3,5

5 005,77

105,50

-

-

-105,50

3,6

5 148,79

70,33

-

-

-70,33

3,7

5 291,81

35,17

-

-

-35,17

3,8

5 434,84

-

-

-

-

Source : Commission des finances du Sénat

Effets sur les exonérations des entreprises de plus de 10 salariés

(en euros)

Multiple
du SMIC

Salaire mensuel brut

Exonération actuelle

Exonération CICE

Exonération proposée

Différence
(PLF 2014 + CICE - droit existant)

1,0

1 430,22

401,89

57,21

401,89

57,21

1,1

1 573,24

442,08

62,93

442,08

62,93

1,2

1 716,26

482,27

68,65

482,27

68,65

1,3

1 859,29

522,46

74,37

522,46

74,37

1,4

2 002,31

562,65

80,09

562,65

80,09

1,5

2 145,33

539,20

85,81

515,76

62,37

1,6

2 288,35

515,76

91,53

468,87

44,65

1,7

2 431,37

492,32

97,25

421,99

26,92

1,8

2 574,40

468,87

102,98

375,10

9,20

1,9

2 717,42

445,43

108,70

328,21

-8,52

2,0

2 860,44

421,99

114,42

281,32

-26,24

2,1

3 003,46

398,54

120,14

234,44

-43,97

2,2

3 146,48

375,10

125,86

187,55

-61,69

2,3

3 289,51

351,66

131,58

140,66

-79,41

2,4

3 432,53

328,21

137,30

93,77

-97,14

2,5

3 575,55

304,77

-

46,89

- 257,88

2,6

3 718,57

281,32

-

-

- 281,32

2,7

3 861,59

257,88

-

-

- 257,88

2,8

4 004,62

234,44

-

-

- 234,44

2,9

4 147,64

210,99

-

-

- 210,99

3,0

4 290,66

187,55

-

-

- 187,55

3,1

4 433,68

164,11

-

-

- 164,11

3,2

4 576,70

140,66

-

-

- 140,66

3,3

4 719,73

117,22

-

-

- 117,22

3,4

4 862,75

93,77

-

-

-93,77

3,5

5 005,77

70,33

-

-

-70,33

3,6

5 148,79

46,89

-

-

-46,89

3,7

5 291,81

23,44

-

-

-23,44

3,8

5 434,84

-

-

-

-

Source : Commission des finances du Sénat

Effets sur les exonérations des entreprises du secteur renforcé

(en euros)

Multiple
du SMIC

Salaire mensuel brut

Exonération actuelle

Exonération CICE

Exonération proposée

Différence
(PLF 2014 + CICE - droit existant)

1,0

1 430,22

401,89

57,21

401,89

57,21

1,1

1 573,24

442,08

62,93

442,08

62,93

1,2

1 716,26

482,27

68,65

482,27

68,65

1,3

1 859,29

522,46

74,37

522,46

74,37

1,4

2 002,31

562,65

80,09

562,65

80,09

1,5

2 145,33

602,84

85,81

602,84

85,81

1,6

2 288,35

643,03

91,53

643,03

91,53

1,7

2 431,37

643,03

97,25

643,03

97,25

1,8

2 574,40

643,03

102,98

643,03

102,98

1,9

2 717,42

643,03

108,70

643,03

108,70

2,0

2 860,44

643,03

114,42

643,03

114,42

2,1

3 003,46

643,03

120,14

578,72

55,84

2,2

3 146,48

643,03

125,86

514,42

-2,75

2,3

3 289,51

643,03

131,58

450,12

-61,33

2,4

3 432,53

643,03

137,30

385,82

-119,91

2,5

3 575,55

643,03

-

321,51

-321,51

2,6

3 718,57

610,88

-

257,21

-353,66

2,7

3 861,59

578,72

-

192,91

-385,82

2,8

4 004,62

546,57

-

128,61

-417,97

2,9

4 147,64

514,42

-

64,30

-450,12

3,0

4 290,66

482,27

-

-

-482,27

3,1

4 433,68

450,12

-

-

-450,12

3,2

4 576,70

417,97

-

-

-417,97

3,3

4 719,73

385,82

-

-

-385,82

3,4

4 862,75

353,66

-

-

-353,66

3,5

5 005,77

321,51

-

-

-321,51

3,6

5 148,79

289,36

-

-

-289,36

3,7

5 291,81

257,21

-

-

-257,21

3,8

5 434,84

225,06

-

-

-225,06

3,9

5 577,86

192,91

-

-

-192,91

4,0

5 720,88

160,76

-

-

-160,76

4,1

5 863,90

128,61

-

-

-128,61

4,2

6 006,92

96,45

-

-

-96,45

4,3

6 149,95

64,30

-

-

-64,30

4,4

6 292,97

32,15

-

-

-32,15

4,5

6 435,99

-

-

-

-

Source : Commission des finances du Sénat

On observe ainsi que la modification des exonérations et de la mise en place du CICE a pour effet :

- de réduire le coût du travail pour les salaires les plus bas ; cette diminution peut représenter plus de 100 euros par mois pour un salaire brut de 2 SMIC (soit 2 860,44 euros) ;

- d'augmenter le coût du travail pour les salaires à partir de 1,9 SMIC, 2,1 SMIC ou 2,2 SMIC, selon le type d'entreprise ; cette augmentation peut être assez importante : elle représente ainsi près de 500 euros pour un salaire de 4 300 euros brut dans le secteur renforcé.

Il faut néanmoins rappeler que les salaires ultramarins sont particulièrement bas. Ainsi, d'après l'étude d'impact, plus de 80 % des salariés ultramarins concernés par le dispositif verront leur coût du travail diminuer, tandis que pour plus de 7 % le coût demeurera inchangé.

* *

*

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article prévoit certes une diminution du total des exonérations de charges, mais préserve les exonérations touchant les bas salaires et les salaires jusqu'à deux SMIC (environ).

Les salaires réellement impactés par cette mesure dépassent les 3 500 euros bruts mensuels. Or, à ce niveau de salaire, les exonérations de charges sociales jouent un rôle marginal dans la décision d'embaucher. Le recentrage des exonérations sur les bas salaires permet donc d'augmenter l'efficience de ce dispositif.

On observe même que, si l'on conjugue ses effets à ceux du CICE, plus de 80 % des salariés ultramarins verront leur coût du travail diminuer.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

SECONDE PARTIE - L'AIDE AU FRET

L'aide au fret , mise en place en 2009 par la LODEOM, mais qui n'est devenue réellement opérationnelle qu'en 2011, touche à un aspect essentiel des économies ultramarines, à savoir les surcoûts de production qu'elles supportent, du fait de leur éloignement géographique et des normes qui s'imposent à elles .

L'objet de ce dispositif est donc de compenser - en partie - ces surcoûts, afin d'augmenter la compétitivité des productions des territoires d'outre-mer, et donc de créer ou de sauvegarder des emplois.

Ses crédits sont portés par l'action 01 « Soutien aux entreprises » du programme 138 « Emploi outre-mer » de la présente mission « Outre-mer ». Or, l'évolution de ces crédits a montré un écart très important entre les estimations initiales (27 millions d'euros en 2009) et les montants inscrits dans les dernières lois de finances (6 millions d'euros cette année).

C'est pourquoi, dans le cadre de leur mission de contrôle budgétaire, vos rapporteurs spéciaux se sont intéressés cette année à ce dispositif.

I. UNE AIDE JUSTIFIÉE PAR LA PLACE PRÉPONDÉRANTE DE LA MÉTROPOLE DANS LES ÉCHANGES COMMERCIAUX DES TERRITOIRES ULTRAMARINS, SOURCE DE SURCOÛTS IMPORTANTS

A. UNE INSUFFISANTE INTÉGRATION RÉGIONALE DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER

Les territoires ultramarins se trouvent dans une situation particulière du fait de leur éloignement par rapport à la métropole , combiné, la plupart du temps, à leur caractère insulaire. Ainsi, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane sont à près de 7 000 km de Paris, quand Mayotte et La Réunion sont à plus de 9 000 km.

Cet éloignement pourrait conduire ces territoires à privilégier des échanges commerciaux avec les zones géographiques auxquelles ils appartiennent (Amérique, Afrique,...).

Toutefois, des contraintes économiques et juridiques viennent limiter cette intégration régionale .

Tout d'abord, s'agissant des départements d'outre-mer, ils font partie intégrante de l'Union douanière, et sont donc soumis au tarif douanier extérieur commun.

D'autre part, ces territoires sont soumis au respect des normes environnementales, sanitaires et techniques françaises et européennes, ce qui peut entraver leur capacité à exporter vers d'autres marchés.

De même, les territoires ultramarins appliquent des normes, y compris sociales, « de pays riches », alors qu'ils peuvent être entourés de pays à faible revenu. Au-delà du poids de ces normes sur leur productivité, qui nuit à leur compétitivité, ces différences de niveau de vie entre territoires voisins limitent les possibilités d'échange.

Enfin, dans la zone Antilles-Guyane comme dans l'Océan indien, les liaisons maritimes et aériennes sont insuffisantes, comme le notait en particulier le rapport de votre rapporteur spécial Éric Doligé au nom de la mission commune d'information sur l'outre-mer 2 ( * ) .

Il résulte de ces contraintes une structure particulière des échanges des territoires ultramarins, retracés dans le tableau ci-dessous.

Échanges commerciaux de certains territoires ultramarins en 2012

(en millions d'euros)

Guyane

Guadeloupe

Martinique

La Réunion

Mayotte

St-Pierre-et-Miquelon

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Métropole

465,7

124,0

1 464,3

125,7

1 404,3

164,1

2 551,1

129,1

169,0

1,4

25,0

-

Guadeloupe

5,8

7,7

2,1

18,8

0,5

120,3

1,2

0,6

-

-

-

-

Guyane

0,0

2,8

5,8

9,1

6,6

104,0

0,5

0,1

-

-

-

-

Martinique

186,6

8,8

190,1

49,4

9,8

0,0

0,5

0,4

-

-

-

-

La Réunion

0,0

0,4

0,1

1,0

0,4

0,2

0,1

1,0

-

-

-

-

Mayotte

0,4

0,4

0,3

0,3

0,0

0,1

1,8

20,2

-

-

-

-

COM

0,6

0,2

0,1

4,2

0,2

0,4

2,6

1,4

-

-

-

-

UE 27

329,8

36,0

293,0

12,5

337,6

9,5

572,2

63,2

67,2

0,4

1,8

0,8

Europe

37,9

24,0

19,1

0,3

444,0

0,3

47,8

0,9

8,4

-

-

-

Afrique

5,2

0,6

13,9

0,5

8,6

0,2

214,0

30,1

25,0

2,5

-

-

Amérique

156,6

32,0

499,5

7,6

455,0

23,2

51,4

7,2

19,2

-

47,3

0,4

Asie

1 060,5

1,7

186,6

2,0

119,0

1,4

1 175,3

78,9

83,3

0,7

3,1

-

Moyen-Orient

0,5

0,0

2,4

0,1

3,9

0,1

22,8

0,3

9,6

-

-

-

Divers

244,3

-

17,5

2,2

2,1

2,8

57,9

4,0

2,3

-

1,9

-

TOTAL

2 494,1

238,6

2 694,6

233,5

2 791,9

426,6

4 699,1

337,6

384,0

5,0

79,1

1,2

Source : Douanes

N.B. Imp. : importations - Exp. : exportations

On peut relever le faible taux de couverture des importations par les exportations, qui varie de 1,3 % à Mayotte à 15,3 % à La Réunion.

On peut surtout souligner la faible intégration régionale de ces territoires, comme le montre le tableau ci-dessous.

Intégration régionale

Guyane

Guadeloupe

Martinique

La Réunion

Mayotte

St-Pierre-et-Miquelon

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Imp.

Exp.

Métropole

19 %

52 %

54 %

54 %

50 %

38 %

54 %

38 %

44 %

28 %

32 %

-

Europe

33 %

77 %

66 %

59 %

78 %

41 %

67 %

57 %

64 %

36 %

34 %

69 %

Zone géographique

14 %

22 %

26 %

36 %

17 %

58 %

30 %

39 %

28 %

64 %

60 %

31 %

Source : Douanes

N.B. La ligne « Europe » correspond aux échanges commerciaux avec la métropole, l'UE-27 et l'Europe ; la ligne « Zone géographique » correspond aux échanges commerciaux avec la zone à laquelle appartient le territoire. Pour la Guyane, la Guadeloupe et la Martinique, il s'agit de ces territoires et de la zone Amérique, pour La Réunion et Mayotte, il s'agit de ces territoires, de l'Afrique et de l'Asie, et pour Saint-Pierre-et-Miquelon il s'agit de l'Amérique.

La métropole représente, pour la plupart de ces territoires, une part prépondérante de leurs échanges commerciaux , qui peut fréquemment dépasser la moitié. L'Europe représente même près de 80 % des importations de la Martinique et près de 80 % des exportations de la Guyane.

À l'inverse, l'intégration commerciale avec la zone géographique à laquelle ces territoires appartiennent est la plupart du temps faible. À quelques exceptions près, cette part se situe entre le quart et le tiers, avec un minimum de 14 % pour les importations de la Guyane et un maximum de 64 % pour les exportations de Mayotte.

B. DES ÉCHANGES COMMERCIAUX QUI PRIVILÉGIENT LOGIQUEMENT LE TRANSPORT MARITIME

Du fait de leur situation géographique, les échanges commerciaux de ces territoires se font majoritairement par transport maritime .

En Guadeloupe, 86,5 % des importations - en volume financier - empruntent ce moyen de transport.

En Guyane, le transport maritime représente 71 % des déclarations aux douanes et 99,5 % du tonnage des échanges.

En Martinique, d'après la délégation générale à l'outre-mer, « l'immense majorité des échanges s'effectue par le transport maritime, le transport aérien relevant de l'exception ».

À La Réunion, entre 75 % et 80 % des importations arrivent par voie maritime.

À Mayotte, les importations se font presqu'exclusivement par transport maritime, contrairement aux exportations, qui utilisent majoritairement le transport aérien, du fait de la nature des produits exportés (poisson d'aquaculture notamment).

Enfin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, 90 % des importations utilisent la voie maritime.

C. UNE INSUFFISANTE INTÉGRATION RÉGIONALE QUI REPRÉSENTE UN SURCOÛT DE 76 MILLIONS D'EUROS PAR AN

L'éloignement géographique, combiné à la faible possibilité de s'intégrer commercialement aux zones géographiques auxquelles ils appartiennent, conduit ces territoires à devoir fortement recourir au transport - maritime - avec la métropole dans leur processus de production, à la fois pour les importations (intrants) et les exportations.

Ces trajets sont une source importante de surcoût.

Ce surcoût est évalué selon la méthode suivante, validée par la Commission européenne : on calcule la différence entre le prix facturé hors taxe à l'entreprise domienne et le prix d'achat hors taxe de la marchandise à l'entreprise du continent européen ; pour les exportations, on calcule la différence entre le prix de vente de la marchandise à un acheteur européen et son prix de vente à un acheteur local.

D'après les données transmises à vos rapporteurs spéciaux, les surcoûts identifiés en 2005 et 2006 - qui sont les deux années pleines précédents la notification du régime d'aide au fret à la Commission européenne - se répartissaient ainsi :

- à La Réunion : 25 à 30 millions d'euros, dont 15 à 20 millions d'euros d'intrants ;

- à la Martinique : 20 millions d'euros, dont 12 millions d'euros d'intrants ;

- à la Guadeloupe : 18 millions d'euros ;

- en Guyane : 8 millions d'euros.

Soit un coût total estimé à 76 millions d'euros par an , étant entendu que celui-ci peut varier de façon importante, selon notamment les évolutions du prix du pétrole.

Il convient de souligner qu'au-delà des coûts, le secteur des transports entre la métropole et l'outre-mer souffre d'une faible concurrence , qui est également un élément de surcoût. La délégation générale à l'outre-mer indiquait ainsi à vos rapporteurs spéciaux que sur ce marché, « l'offre est en capacité de fixer librement ses prix en contraignant une demande totalement dépendante, qu'il s'agisse d'intrants ou d'extrants ».

II. LE DISPOSITIF D'AIDE AU FRET

Les surcoûts précités font l'objet d'une compensation financière, à travers deux dispositifs, qui peuvent se cumuler :

- au plan communautaire , il s'agit de l'allocation spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques, prévue au titre du Fonds européen de développement régional (Feder) ; ce soutien est plafonné à 50 % des dépenses engagées ;

- au plan national , il s'agit de l'aide au fret, instituée par l'article 24 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodeom), complété par le décret n° 2010-1687 du 29 décembre 2010.

L'aide au fret concerne à la fois les produits, destinés à entrer dans un cycle de production (intrants), provenant de l'Union européenne et à destination des départements ou collectivités ultramarines, que les exportations vers l'Union européenne après un cycle de production dans ces territoires (extrants).

Son bénéfice est ouvert aux entreprises situées dans les DOM, à Saint-Barthélemy et à Saint Martin, sauf pour celles des secteurs de l'industrie automobile, des fibres synthétiques, de la sidérurgie, de l'industrie charbonnière ainsi que du secteur de la pêche. Les entreprises établies à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna peuvent également en bénéficier, quelle que soit leur activité.

Les productions qui ne peuvent pas être délocalisées, comme par exemple les produits d'extraction, ne sont pas éligibles à l'aide au fret. Les produits agricoles en sont également exclus (sucre et banane notamment).

La base éligible de l'aide est égale au coût prévisionnel annuel hors taxes des dépenses de transport maritime ou aérien le plus économique, en incluant les assurances, les frais de manutention et de stockage temporaire avant enlèvement.

L'aide est accordée sur justification des frais effectifs.

Il existe néanmoins une limite à son montant : celui-ci ne peut avoir pour effet de porter le niveau de compensation des coûts de transport au-delà de 75 % de la base éligible , en tenant compte des aides du Feder. En d'autres termes, le soutien de l'État se situe à 25 % maximum.

Les collectivités territoriales, en revanche, peuvent compléter cette aide au-delà de la limite de 75 %, mais seule La Réunion a mis en place une aide complémentaire, qui permet d'atteindre le seuil de 85 %.

III. UN DISPOSITIF QUI N'A PAS ENCORE DONNÉ TOUTE SA MESURE

A. UN DISPOSITIF MOINS UTILISÉ QUE PRÉVU DU FAIT DE LA COMPLEXITÉ DES PROCÉDURES

1. Une exécution largement inférieure aux prévisions de 2009

Avec un surcoût total estimé à 76 millions d'euros, on obtient un « potentiel d'aide étatique » de 19 millions d'euros (25 %). Compte tenu de la croissance économique depuis 2006, on peut estimer que ce montant est même supérieur.

Le tableau ci-dessous retrace les crédits inscrits en loi de finances initiale au titre de l'aide au fret.

Crédits inscrits en LFI (AE = CP)

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

27

27

25

17(*)

6

6

* dont rénovation hôtelière

Source : Documents budgétaires

On observe une baisse très importante, puisqu' en quelques années les crédits ont été divisés par 4,5 .

Interrogée par vos rapporteurs spéciaux sur ce décalage entre les montants initialement prévus et l'exécution, l'administration a expliqué que tout d'abord, la montée en puissance avait été lente .

Il faut en effet rappeler que l'aide, inscrite dans la loi en mai 2009, n'a été opérationnelle qu'en 2011, le décret d'application ayant été publié en décembre 2010.

La première année d'application - 2011 donc - les AE exécutées se sont élevées à 7 millions d'euros environ et les CP à 4 millions d'euros. On reste donc très éloigné des 25 millions d'euros inscrits en loi de finances.

Cependant, en 2012, le montant exécuté n'a pas été sensiblement plus proche du montant initialement prévu (10 millions d'euros en AE et 4,5 millions en CP). La lenteur de la montée en puissance n'explique donc pas à elle seule ce faible montant.

2. La nécessité de mettre en place des procédures simplifiées

Vos rapporteurs spéciaux se sont penchés sur les conditions dans lesquelles est mise en oeuvre l'aide au fret, dans les différents territoires.

En effet, l'une des causes expliquant un recours à cette aide inférieur aux prévisions initiales est la complexité administrative du dispositif.

D'après les informations recueillies par vos rapporteurs spéciaux, plus de la moitié des entreprises ultramarines ont rencontré des difficultés dans la constitution de leur dossier . De même, la délégation générale à l'outre-mer note que « des entreprises ne disposant pas de ressources et de compétences en interne pour monter un dossier de subvention ne font pas l'effort de s'approprier le dispositif et d'en mesurer ses avantages et inconvénients ».

Vos rapporteurs spéciaux ont relevé que La Réunion a mis en place un dispositif de guichet unique : la demande de subvention est déposée auprès de la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIECCTE), qui l'instruit au regard des critères d'éligibilité au Feder (qui sont identiques) avant de l'adresser au préfet de région pour engagement juridique et paiement. Lorsque l'aide est supérieure à 50 000 euros, un visa préalable du contrôleur financier en région est nécessaire.

À titre de comparaison, dans les autres territoires, jusqu'à trois services différents peuvent intervenir dans l'instruction administrative.

Vos rapporteurs spéciaux appellent donc les autorités compétentes à mettre en place des procédures plus simples, pouvant notamment s'inspirer du guichet unique mis en place à La Réunion.

B. UN NIVEAU DES CRÉDITS QUI POURRAIT S'AVÉRER INSUFFISANT

Étant donnée l'évolution des crédits inscrits en loi de finances initiale, vos rapporteurs spéciaux se sont demandés s'il existait, désormais, un risque que ceux-ci soient insuffisants.

Les crédits de l'aide au fret sont portés par l'action 01 « Soutien aux entreprises » du programme 138 « Emploi outre-mer ». Entre 2011 et 2013, ils n'étaient pas distingués de ceux consacrés aux aides à la rénovation hôtelière. La répartition était ensuite décidée en gestion par le responsable de programme, au regard des besoins exprimés par les préfectures. On s'intéressera donc à l'exécution de ces deux aides, retracées dans les tableaux ci-dessous.

Exécution des crédits consacrés à l'aide au fret

(en millions d'euros)

2011

2012

AE

CP

AE

CP

Guadeloupe

2,00

0,37

2,12

1,45

Guyane

0,47

0,00

0,95

0,31

Martinique

0,00

0,00

2,72

1,04

La Réunion

4,46

3,34

3,90

1,56

Mayotte

0,05

0,05

0,17

0,17

Saint-Pierre-et-Miquelon

0,00

0,00

0,03

0,03

Total

6,98

3,76

9,89

4,56

Source : Délégation générale à l'outre-mer

Exécution des crédits consacrés à la rénovation hôtelière

(en millions d'euros)

2011

2012

AE

CP

AE

CP

Total

6,40

1,78

1,86

2,79

Source : Délégation générale à l'outre-mer

On observe donc qu'en 2011, le total des AE consommées sur ces deux aides s'élevait à plus de 13 millions d'euros et à près de 12 millions d'euros en 2012. En CP, ce total s'élevait respectivement à 5,5 millions d'euros et à 7,4 millions d'euros.

Or, en 2013, seulement 9 millions d'euros ont été inscrits en loi de finances (AE = CP), dont 6 millions finalement consacrés à l'aide au fret. Il en est de même pour 2014.

Dès lors, vos rapporteurs spéciaux s'inquiètent que les crédits inscrits puissent se révéler désormais insuffisants, au regard des besoins.

C. UNE AIDE UTILISÉE AVANT TOUT POUR SAUVER DES EMPLOIS PLUTÔT QUE POUR EN CRÉER

Enfin, vos rapporteurs spéciaux se sont intéressés à la façon dont les entreprises utilisaient cette aide. Les données ci-dessous sont issues d'une enquête réalisée auprès des entreprises. Les chiffres correspondent aux pourcentages des réponses, et non aux pourcentages des montants.

Utilisation de l'aide au fret

(pourcentage des utilisateurs)

Investissements productifs

17,5 %

Mise au point de nouveaux produits

4,4 %

Création d'emplois

6,1 %

Baisse ou maintien des prix

37,7 %

Trésorerie

21,1 %

Recherche de nouveaux marchés

10,5 %

Autre

2,6 %

Source : Délégation général à l'outre-mer

Il en ressort que, du fait de la concurrence à laquelle elles sont confrontées, les entreprises bénéficiaires de l'aide au fret privilégient la réduction ou le maintien des prix de leur production (38 %) ou les investissements productifs (18 %) - qui permettent à terme d'abaisser les coûts -, plutôt que la création d'emplois (6 %).

L'aide est également utilisée pour augmenter leur trésorerie (21 %), dans un contexte où les entreprises ultramarines ont traditionnellement des difficultés à accéder au crédit bancaire.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 19 novembre 2013, sous la présidence de Mme Michèle André, vice-présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de MM. Georges Patient et Eric Doligé, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Outre-mer » (et article 70), et a entendu une communication sur leur contrôle budgétaire relatif à l'aide au fret .

Mme Michèle André , vice-présidente . - Je souhaite la bienvenue à Karine Claireaux , rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales sur ces crédits.

M. Georges Patient , rapporteur spécial . - Avec des crédits de paiement en augmentation de 1 %, la mission « Outre-mer » est préservée. Nous nous réjouissons que son caractère prioritaire ait été reconnu.

Les dépenses fiscales représentent le principal outil de l'État pour soutenir les territoires ultramarins. Leur montant devrait être en légère hausse, de 1,9 %, en 2014. Nous regrettons que, pour la deuxième année consécutive, le Gouvernement n'ait pu chiffrer le montant prévisionnel de la dépense fiscale sur le logement social, particulièrement dynamique.

Les dispositifs de défiscalisation outre-mer font l'objet d'une réforme importante dans le présent projet de loi de finances. Deux crédits d'impôts sont mis en place, l'un pour les investissements productifs, l'autre pour le logement social, dont la finalité est de capter une partie des investissements aujourd'hui défiscalisés et de faire baisser la dépense fiscale. Nous nous étonnons cependant que l'étude d'impact n'ait prévu aucune conséquence financière.

Après cette réforme importante, la défiscalisation devra être stabilisée, dans ses montants - l'aide à l'outre-mer ne doit pas diminuer - et dans ses dispositions juridiques - les investisseurs ont besoin de visibilité.

Le programme 138 « Emploi outre-mer » connaît une stabilisation. C'est là que l'on trouve les crédits correspondant aux exonérations de charges à destination des entreprises ultramarines. La réforme inscrite à l'article 70 devrait permettre une économie de 90 millions d'euros par rapport à l'évolution naturelle de la dépense. Nous regrettons, comme chaque année, que ces crédits soient sous-budgétisés. La dette nette de l'État envers les organismes de sécurité sociale s'élevait, fin 2011, à 22 millions d'euros et fin 2012, à 77 millions d'euros. Nous n'avons pas encore les chiffres de l'exécution 2013, mais il est probable qu'elle sera encore en augmentation. La légère baisse des crédits de paiement en 2014 rendra encore plus difficile la couverture des dépenses et la diminution de la dette de l'État envers les caisses.

S'agissant du service militaire adapté (SMA), l'objectif de 6 000 places de volontaires avait dû, l'an dernier, être décalé à 2016 du fait des évolutions budgétaires des dernières années. La programmation des crédits sur 2013-2015 devrait permettre enfin de tenir l'engagement.

Les autorisations d'engagement du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » sont en baisse mais les crédits de paiement en hausse.

Je n'ai pas besoin de rappeler l'importance de la « ligne budgétaire unique » (LBU) pour le financement du logement outre-mer, ni l'ampleur des besoins. La construction de plus de 20 000 logements sociaux par an serait nécessaire, d'ici à 2030. Or on construit environ 8 000 logements par an.

Le montant de la LBU est stable en autorisations d'engagement mais connaît une hausse de 8 % en crédits de paiement, après une augmentation de 6 % l'an dernier. Cela n'a cependant pas évité le retour à un niveau important des impayés de l'État vis-à-vis des bailleurs sociaux : la dette de l'État, de 115 millions d'euros en 2006, avait été ramenée à 7 millions d'euros fin 2011. Or elle est remontée à 40 millions d'euros en 2012 et pourrait atteindre 80 millions fin 2013.

Nous vous proposons d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer ».

M. Éric Doligé , rapporteur spécial . - Venons-en à l'article rattaché. Les entreprises des départements d'outre-mer bénéficient d'exonérations spécifiques de charges sociales, afin de réduire le coût du travail dans le secteur marchand et de favoriser la création d'emplois. Cette exonération est totale jusqu'à 1,4 Smic, puis progressivement décroissante, selon le type d'entreprises, jusqu'à 4,5 Smic au maximum.

L'article 70 prévoit une diminution des exonérations de charges sur les salaires supérieurs à 1,4 Smic. Selon l'étude d'impact, cette diminution devrait conduire, à partir de 2015, à une économie pour l'État de 108 millions d'euros par an. En 2014, l'économie attendue est estimée à 90 millions d'euros, du fait des exonérations afférentes à l'exercice 2013.

Les économies ultramarines bénéficieront également de la mise en place du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE). Au total, 320 millions d'euros devraient bénéficier à l'outre-mer. L'effet combiné de la suppression des charges et de la mise en place du CICE réduira le coût du travail pour 80 % des salariés ultramarins ; pour 7 % d'entre eux, la mesure sera neutre. C'est au-dessus de 3 500 euros bruts mensuels que la réduction des exonérations a un impact. Or, à ce niveau, les exonérations de charges sociales jouent un rôle marginal dans la décision d'embauche. Le recentrage des exonérations sur les bas salaires permet donc d'augmenter l'efficience de ce dispositif. C'est pourquoi nous vous proposons de préconiser au Sénat d'adopter cet article sans modification.

J'en viens à notre mission de contrôle relative à l'aide au fret, mise en place en 2009, qui touche à un aspect essentiel des économies ultramarines : les surcoûts de production qu'elles supportent, du fait de leur éloignement géographique et des normes qui s'imposent à elles.

Les contraintes économiques et juridiques limitent l'intégration de ces territoires à leur propre zone régionale. Ainsi, la métropole représente, pour la plupart d'entre eux, une part prépondérante de leurs échanges commerciaux, souvent plus de la moitié. À l'inverse, l'intégration commerciale avec la zone géographique locale est souvent faible, pour des raisons de concurrence et de différence de coût : il est plus difficile de commercer avec des voisins au niveau de vie plus faible. Les trajets entre ces territoires et la métropole sont une source importante de surcoût, évalué à 76 millions d'euros par an. Il peut faire l'objet d'une compensation financière, à travers une aide européenne jusqu'à 50 %, puis à travers l'aide au fret, jusqu'à 75 %.

Or le recours à cette aide a été beaucoup moins important que prévu, sans doute en raison de la complexité administrative des démarches. La Réunion, elle, a mis en place un guichet unique : la demande de subvention est déposée auprès de la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, qui l'instruit avant de l'adresser au préfet de région pour engagement juridique de paiement. Nous appelons les autorités compétentes à s'inspirer de cet exemple.

Nous nous inquiétons enfin que les crédits inscrits, après avoir été divisés par 4,5 entre 2009 et 2013, puissent se révéler désormais insuffisants : 12 millions d'euros consommés en 2012, mais seulement 6 millions d'euros inscrits en 2013, comme en 2014.

Mme Karine Claireaux , rapporteure pour avis . - La commission des Affaires sociales est en phase avec ce rapport. Il est difficile d'apprécier la politique de l'État envers l'outre-mer à travers cette seule mission, du fait de la dispersion des crédits entre plusieurs ministères. Difficile de s'assurer que les crédits ne diminuent pas trop... Même si l'outre-mer participe à l'effort national de réduction des dépenses publiques, il est préservé et c'est une grande satisfaction.

M. Éric Doligé , rapporteur spécial . - Je vais soutenir ce budget. Avec Marie-Noëlle Lienemann, présidente du groupe de travail commun à la commission des affaires économiques et à la délégation à l'outre-mer, et Serge Larcher, co-rapporteur, nous avions beaucoup de craintes sur les modifications qui allaient être proposées sur la défiscalisation, car la situation outre-mer n'est guère brillante. Le crédit d'impôt prévu à l'article 13 risquait de s'appliquer à la totalité de l'activité outre-mer, où la plupart des entreprises sont toutes petites, au risque de poser des problèmes de financement et de trésorerie. Je rappelle que la BPI n'est pas encore implantée outre-mer. Mais l'essentiel a été sauvé et le Gouvernement nous a écoutés. C'est pourquoi je voterai les crédits.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Outre-mer ».

Elle a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 70.

Elle a donné acte aux rapporteurs spéciaux de leur communication et en a autorisé la publication.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 21 novembre 2013, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et de l'article 70.


* 1 Voir le commentaire de l'article 74, rattaché à la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

* 2 Les DOM, défi pour la République, chance pour la France, 100 propositions pour fonder l'avenir (n° 519, 2008-2009).

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