III. DES DÉPENSES FISCALES GLOBALEMENT EFFICACES MAIS UNE RATIONALISATION TOUJOURS EN ATTENTE

Les dépenses fiscales rattachées à la mission « Santé » sont estimées à environ 3,3 milliards d'euros pour 2015 , soit une baisse de 3,7 % par rapport à l'estimation actualisée pour 2014. Cette diminution s'explique principalement par l'extinction de la déduction d'impôt sur les sociétés pour les mutuelles et les institutions de prévoyance effectuant des dotations sur un compte de réserve spéciale de solvabilité 5 ( * ) .

En 2014, la forte progression des dépenses fiscales de la présente mission (+ 36 %) est principalement imputable à l'augmentation des dépenses liées au taux « super-réduit » de 2,1 % de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les médicaments remboursables ou soumis à autorisation temporaire d'utilisation et aux produits sanguins. Cette augmentation du coût de la dépense fiscale est la conséquence directe de la modification des modalités de calcul de la dépense fiscale à la suite de la hausse du taux réduit de TVA sur les médicaments de 7 % à 10 % au 1 er janvier 2014 6 ( * ) . L'accroissement du coût de cette dépense fiscale n'apparaît pas problématique dans la mesure où celle-ci a été jugée efficace par le comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales en 2011 : ce dispositif « permet d'alléger les charges de l'assurance maladie sur les produits remboursés tout en bénéficiant également aux malades les plus modestes qui ne disposent pas d'une complémentaire santé » 7 ( * ) .

Trois autre dépenses fiscales de la mission « Santé » ont reçu le score maximal de 3 - correspondant aux dépenses les plus efficaces et efficientes - par le comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales :

- le taux réduit de 10 % de TVA sur les prestations de soins dispensées par les établissements thermaux autorisés ;

- la déduction forfaitaire d'impôt sur le revenu au titre du groupe III pour inciter les médecins au conventionnement avec la sécurité sociale ;

- l'exonération d'impôt sur le revenu pour les victimes de l'amiante.

Au total, environ 80 % du montant des dépenses fiscales rattachées au programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » ont donc été jugées efficaces (avec un score compris entre 1 et 3).

Tableau n° 4 : Liste des dépenses fiscales rattachées à la mission « Santé » en 2015

(en millions d'euros)

Dépense fiscale sur impôt d'État

Exécution 2013

Chiffrage pour 2014

Chiffrage pour 2015

Évaluation (1)

Taux de 2,1 % sur les médicaments remboursables ou soumis à autorisation temporaire d'utilisation

1 540

2 465

2 455

3

Exonération des indemnités journalières servies au titre des maladies « longues et coûteuses »

350

365

380

0

Taux de 10 % sur les prestations de soins dispensées en établissements thermaux

32

26

26

3

Exonération d'IR de la rémunération perçue au titre de la permanence des soins par les médecins dans certaines zones rurales ou urbaines

16

16

16

1

Déduction forfaitaire au titre du groupe III déclarée par les médecins conventionnés

9

9

9

3

Exonération des plus-values à l'occasion de la reconversion des débits de boissons

2

2

2

-

Exonération de taxe sur la publicité télévisée sur les messages passés pour le compte d'oeuvres d'utilité publique

nc

nc

nc

-

Total dépenses rattachées au programme 204

1 949

2 883

2 888

Exonération totale puis à hauteur de 50 % des indemnités aux victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles

370

370

370

0

Réserve spéciale de solvabilité constituée par les mutuelles et unions

180

130

-

-

Exonération des indemnités versées aux victimes de l'amiante

8

10

9

3

Déduction de l'actif successoral des rentes ou indemnités versées en réparation de dommages corporels liés à un accident ou une maladie

nc

nc

nc

-

Total dépenses rattachées au programme 183

558

510

379

Total dépenses rattachées à la mission

2 507

3 393

3 267

nc : chiffrage non connu

(1) Des scores allant de 0 à 3 sont attribués à chaque dépense fiscale. 0 désigne une dépense inefficace, puis les niches efficaces sont notées de 1 à 3 selon leur efficience, 3 constituant le score maximum. Un tiret (-) indique qu'aucune évaluation n'a été réalisée.

Source : PAP de la mission « Santé » pour 2015

En revanche, d'autres dépenses fiscales de la mission « Santé » avaient été mal notées par le comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales (par exemple l'exonération d'impôt sur le revenu pour les indemnités journalières servies au titre des maladies « longues et coûteuses ») ou bien n'avaient pas fait l'objet d'une évaluation. Pour ces dépenses fiscales considérées comme inefficaces ou non évaluées , aucun examen n'a été effectué . L'article 18 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 fixe pourtant une obligation d'évaluation de 20 % des dépenses fiscales et des niches sociales existantes chaque année.

Des conférences fiscales - rassemblant la direction de la législation fiscale et les ministères concernés - ont certes été mises en place depuis 2013 . Dans les réponses au questionnaire budgétaire relatif à la présente mission, le ministère des affaires sociales, de la santé et du droit des femmes indique avoir « pris pleinement part » à ces conférences, « qui ont donné lieu à des échanges particulièrement intéressants et constructifs » et « ont permis aux différents acteurs de mieux connaître le montant des dépenses fiscales associées aux programmes ainsi que leur efficience ». Toutefois, à l'issue de la conférence fiscale de mai 2014, il a uniquement été proposé de maintenir les dépenses fiscales existantes. Par ailleurs, l'article 23 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 propose uniquement d'évaluer les créations ou extensions de dépenses fiscales introduites à compter du 1 er janvier 2015.

Observation n° 6 : sur les dix dépenses fiscales en vigueur rattachées à la mission, cinq ont été jugées inefficaces ou n'ont fait l'objet d'aucune évaluation, parfois faute de capacité à estimer leurs montants . Le réexamen de ces dépenses fiscales doit constituer une priorité dans les années à venir, conformément aux règles de gouvernance des finances publiques fixées par la future loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 8 ( * ) .


* 5 Cf. article 217 septdecies du code général des impôts prévoyant une déduction à hauteur de 60 % du résultat imposable pour l'exercice ouvert en 2012 et à 40 % pour l'exercice ouvert en 2013.

* 6 Pour calculer la dépense fiscale, il est appliqué à l'assiette hors taxe des médicaments remboursables le différentiel de TVA entre la norme fiscale de référence (soit 10 % au 1 er janvier 2014) et le taux « super-réduit » de 2,1 %.

* 7 Rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, 2011.

* 8 L'article 22 du projet de LPFP pour les années 2014 à 2019 prévoit la mise en place d'une revue de dépenses, intégrant les dépenses budgétaires et les dépenses fiscales ; ce dispositif pourrait constituer un cadre propice de réexamen à ces dépenses fiscales.

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