B. LA CRÉATION D'UNE COMMISSION CONSULTATIVE D'EXPERTS

Un autre point de blocage résidait, à l' article 3 du projet de loi organique, dans la création d'une commission consultative d'experts. Pour le Gouvernement, cette instance consultative, présidée par un magistrat administratif ou un membre du Conseil d'État, aurait pour mission, par les avis qu'elle rend, d'harmoniser l'interprétation des notions juridiques employées et le traitement des questions de droit soulevées à l'occasion de la constitution de la liste électorale spéciale pour la consultation.

Les partenaires locaux se sont accordés sur une composition élargie qui comprendraient des représentants des formations politiques locales, dans le respect du pluralisme et de la parité entre les deux camps indépendantistes et non-indépendantistes.

Cette commission consultative d'experts rendrait des avis sur la condition liée au « centre des intérêts matériels et moraux », sans porter atteinte à la compétence décisionnelle des commissions administratives spéciales. Elle pourrait être saisie par le président ou un membre d'une commission administrative spéciale.

C. L'INSCRIPTION D'OFFICE DE CATÉGORIES D'ÉLECTEURS

Enfin, l'article 3 du projet de loi organique abordait une question épineuse pour les partenaires, tant sur le plan symbolique que pratique, celle des modalités d'inscription sur la liste électorale spéciale. Le principe d'une inscription sur la base d'une démarche volontaire a été maintenu en conformité avec le principe applicable en matière électorale. Cependant, cette règle, aussi fondée soit-elle, convenait difficilement à la situation particulière de la consultation. D'une part, parce qu'il existe déjà en Nouvelle-Calédonie deux listes électorales - l'une spéciale pour les élections des membres du congrès et des assemblées de province, l'autre générale pour les autres élections - auxquelles s'ajoutera cette troisième liste aux contours encore différents. D'autre part, parce que certains électeurs, peu au fait de la nécessité de s'inscrire, pourraient ne pas être en mesure de participer à la consultation alors qu'ils en auraient le droit.

Lors du XII ème comité des signataires du 3 octobre 2014, les partenaires avaient exprimé le voeu unanime de faciliter les inscriptions sur la liste électorale spéciale en vue de la consultation en dispensant de démarches et formalités d'inscription certaines catégories d'électeurs.

Le principe d'inscription d'office sur la liste électorale spéciale ne soulève pas, pour la consultation sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté, d'obstacle constitutionnel. Toutefois, contrairement à ce que la formulation couramment utilisées d'« inscriptions automatiques » pourraient laisser penser, il s'agit bien de mettre à la charge de l'administration l'obligation de soumettre, en lieu et place de l'électeur concerné, une demande d'inscription accompagnée des pièces justificatives à la commission administrative spéciale compétente. Cependant, la commission administrative spéciale resterait compétente pour statuer, sous le contrôle du juge. Dès lors, les inscriptions d'office ne sont envisageables que si la commission administrative spéciale peut s'appuyer, pour y procéder, sur des données objectives à sa disposition.

Tel est le sens de l'avis du Conseil d'État rendu le 29 janvier 2015 à la demande du Gouvernement. C'est pourquoi, suivant cet avis, le projet de loi organique déposé sur le bureau de notre assemblée n'a retenu que deux catégories d'électeurs pouvant bénéficier d'inscriptions d'office :

- les électeurs admis à participer à la consultation du 8 novembre 1998 approuvant l'accord de Nouméa et figurant ainsi sur la liste électorale spécialement dressée en 1998 ;

- les électeurs relevant du statut civil coutumier, inscrits à ce titre sur le fichier informatique établi par la Nouvelle-Calédonie à partir des registres de l'état civil coutumier.

S'il reposait sur des considérations juridiques, ce choix a suscité des critiques légitimes sur la différence de traitement inéquitable qu'elle induisait. Comme plusieurs personnes entendues par votre rapporteur l'ont soulevé, l'inscription d'office de certains électeurs pouvait laisser à penser aux autres électeurs, par l'effet d'une confusion entre inscription et inscription facilitée, qu'ils n'avaient pas le droit de voter.

Au terme de l'accord intervenu le 5 juin dernier entre les partenaires, le comité des signataires a souhaité que quatre catégories d'électeurs bénéficient de l'inscription d'office, comme il l'avait souhaité en octobre 2014. Outre les deux déjà retenues par le projet de loi organique, s'ajouteraient deux catégories :

- les électeurs qui sont nés à compter du 1 er janvier 1989, qui ont fait l'objet d'une inscription d'office sur la liste électorale pour l'élection des membres du congrès et des assemblées de province et dont un des parents a été admis à participer à la consultation du 8 novembre 1998 ;

- les natifs de la Nouvelle-Calédonie qui seraient inscrits sur la liste électorale spéciale des membres du congrès et des assemblées de province.

Pour ces derniers, le comité des signataires a estimé que la qualité de citoyen calédonien résultant du fait d'appartenir au corps électoral restreint pour l'élection des membres du congrès et des assemblées de province présumait de manière incontestable que l'électeur avait le centre de ses intérêts matériels et moraux en Nouvelle-Calédonie. Une passerelle serait ainsi créée entre les deux listes électorales spéciales.

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