B. LE RÔLE DU CSA À RENFORCER POUR GARANTIR LA RÉGULATION DE LA PUBLICITÉ DANS LES PROGRAMMES DESTINÉS À LA JEUNESSE

1. Le choix de privilégier une autorégulation par les professionnels

Le CSA considère traditionnellement qu'il relève de la responsabilité des éditeurs de veiller à assurer la promotion d'une bonne alimentation, notamment auprès des plus jeunes. Il considère par ailleurs que l'audiovisuel doit jouer tout son rôle pédagogique pour encourager les bons comportements, en l'occurrence pour ce qui concerne l'alimentation et l'hygiène de vie des plus jeunes .

En 2008, la suppression de la publicité pour les produits alimentaires à destination des enfants a été envisagée par les pouvoirs publics, le Conseil a été amené à promouvoir une solution alternative à une interdiction pure et simple en raison du fort impact d'une telle mesure sur l'ensemble du secteur audiovisuel. En prenant en compte le fait que le surpoids et l'obésité ont des causes multifactorielles, le Conseil a conduit une série de négociations avec l'ensemble des acteurs concernés qui ont abouti à une solution de compromis avec une première charte alimentaire, signée par l'ensemble des éditeurs de télévision le 18 février 2008 , qui vise à promouvoir une alimentation et une activité physique favorables à la santé dans les programmes et les publicités diffusés à la télévision.

Compte tenu du bilan positif de cette première charte arrivée à son terme en 2013, le Conseil a décidé de rédiger une nouvelle charte alimentaire, plus ambitieuse, qui a été signée le 21 novembre 2013 (cf. annexe). Cette nouvelle charte est le fruit d'un dialogue entre les pouvoirs publics (6 ministères : éducation nationale ; affaires sociales et santé ; culture et communication ; agriculture, agroalimentaire et forêt ; outre-mer ; sport, jeunesse, éducation populaire et vie associative) et les professionnels du secteur audiovisuel (chaînes, producteurs, sociétés d'auteurs, annonceurs etc...) qui ont conjointement décidé de mobiliser leurs antennes pour aider à la lutte contre l'obésité en France.

Les évolutions entre les deux chartes alimentaires de 2009 et 2014

La première charte comportait huit engagements, la nouvelle en propose quatorze.

La première charte concernait dix-neuf chaînes, la nouvelle trente-six dont les neuf chaînes Outre-mer 1 res et les six nouvelles chaînes de la TNT qui émettent depuis décembre 2012. Les chaînes locales s'impliquent également sans être tenues à une obligation chiffrée. La première charte ne concernait que la France métropolitaine, la nouvelle est étendue à l'outre-mer.

La première charte prévoyait un volume total d'émissions compris entre 340 et 470 heures, la nouvelle prévoit un volume minimum compris entre 587 et 753 heures.

La première charte était signée par deux ministres, puis un troisième en 2011, la nouvelle est signée par six ministres.

La première charte ne concernait que la télévision linéaire, la nouvelle traite également des sites internet et de la télévision de rattrapage.

La première charte n'avait pas prévu la création d'un comité d'experts, la nouvelle l'inscrit dans un engagement.

La première charte n'avait pas pris en compte les Journées européennes de l'obésité, la nouvelle prévoit que les chaînes relaient ces journées sur leur antenne.

La première charte n'avait pas prévu de faire évaluer l'impact des émissions diffusées par les chaînes, la nouvelle prévoit que le CSA s'y engage au cours des cinq nouvelles années d'application.

Source : CSA

2. Des engagements précis de la part des professionnels

Dans le cadre de cette démarche d'autorégulation, les éditeurs, annonceurs, producteurs et agences ont accepté de respecter les engagements suivants :

- les annonceurs renforcent la démarche responsable de la publicité concernant le contenu des publicités alimentaires ;

- les chaînes de télévision et leurs régies publicitaires accordent des conditions tarifaires adaptées aux campagnes collectives faisant la promotion des produits dont il convient d'augmenter la consommation, afin de leur permettre l'accès aux écrans publicitaires ;

- les chaînes de télévision s'engagent à diffuser, en particulier auprès du jeune public, des programmes faisant la promotion d'une alimentation diversifiée et équilibrée, d'une pratique régulière d'activités physiques et du sommeil. Ces programmes s'inspirent des repères du Programme National Nutrition Santé (PNNS) ;

- l'ensemble de ces diffusions de programmes représente au minimum un volume total compris entre 587 et 753 heures. Pour les chaînes nationales de France Télévisions, le volume horaire annuel minimum est fixé entre 22 et 27 heures par antenne, avec une possibilité de mutualisation pour les cinq chaînes ;

- ces programmes font la promotion du site internet mangerbouger.fr ;

- ces programmes sont, dans la mesure du possible, mis à disposition sur les sites de rattrapage des chaînes ;

- les chaînes s'efforcent de relayer les Journées européennes de l'obésité et de prévoir des programmations spéciales à l'occasion de certains événements (ex : la semaine du goût, etc.) ;

- les chaînes ultramarines se mobilisent également pour proposer des émissions qui visent la promotion d'une alimentation équilibrée (consommation d'eau, limitation du sucre, etc.) et qui sont adaptées aux spécificités locales ;

- les chaînes s'efforcent d'inclure un message sanitaire dans les génériques d'écrans publicitaires comprenant des publicités alimentaires ;

- les producteurs audiovisuels s'engagent à produire des programmes courts visant le jeune public mettant en valeur les bonnes pratiques alimentaires et l'hygiène de vie ;

- les annonceurs ou les groupements d'annonceurs financent des programmes courts d'éducation adaptés au jeune public pour favoriser les bons comportements alimentaires et l'activité physique.

Dans le cadre du bilan de la charte alimentaire pour l'année 2013, rédigé sur la base de la précédente charte, le Conseil a constaté les efforts renouvelés des chaînes de télévision pour mettre à l'antenne des émissions de promotion d'une bonne hygiène de vie.

L'exercice 2013 marque l'aboutissement d'une progression importante du volume de diffusion de ces programmes : 1 223 heures ont été diffusées en 2013 contre 443 heures en 2009 . Il s'agit donc d'une nette progression qui excède largement les engagements pris par les éditeurs dans la charte (fixés entre 587 et 753 heures).

Le Conseil a relevé également la diversification des programmes consacrés à l'hygiène de vie avec l'augmentation du volume d'émissions consacrées à l'exercice physique.

En application des dispositions de la charte, les annonceurs réunis au sein de l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) se sont également engagés à actualiser la recommandation « Comportements alimentaires » visant à encadrer le contenu des messages publicitaires sur l'alimentation à destination des enfants.

Le bilan pour l'année 2014, rédigé sur la base de la nouvelle charte, est en cours de réalisation et en retard sur le calendrier qui incombe au CSA.

3. Les actions du CSA pour protéger les enfants de certains contenus publicitaires

Le CSA, dans le cadre de ses attributions générales, a également pour mission de porter une attention spécifique à la protection des enfants face à la pression et aux contenus publicitaires inadaptés, notamment au travers de ses recommandations. Il lui revient par conséquent de porter une vigilance particulière à l'encadrement des pratiques publicitaires principalement orientées vers les mineurs.

On peut rappeler que le Conseil veille au respect des dispositions de la loi du 30 septembre 1986 et du décret n°92-280 du 27 mars 1992 qui encadre les communications commerciales.

Le Conseil veille en premier lieu au respect des obligations du décret précité qui prévoit notamment aux termes de son article 7 que « la publicité ne doit pas porter un préjudice moral ou physique aux mineurs. À cette fin, elle ne doit pas :

- inciter directement les mineurs à l'achat d'un produit ou d'un service en exploitant leur inexpérience ou leur crédulité ;

- inciter directement les mineurs à persuader leurs parents ou des tiers d'acheter les produits ou services concernés ;

- exploiter ou altérer la confiance particulière que les mineurs ont dans leurs parents, leurs enseignants ou d'autres personnes ;

- présenter sans motif des mineurs en situation dangereuse. »

En outre, l'article 4 dispose que : « La publicité doit être exempte [...] de toute incitation à des comportements préjudiciables à la santé, à la sécurité des personnes et des biens ou à la protection de l'environnement. »

Le Conseil est intervenu à plusieurs reprises sur la base de ces dispositions. Par exemple, le 6 novembre 2008, il a adressé une lettre à l'ARPP en raison d'un message en faveur d'Albal qui mettait en scène un adulte avec un film plastique sur le visage. Il s'agissait d'une plaisanterie d'enfants qui avaient entièrement obstrué le passage d'une porte par du film plastique transparent. Le Conseil a indiqué à l'ARPP qu'il s'était interrogé sur la conformité de ce message à l'article 4 du décret et a souhaité que l'association veille à l'avenir à ce que les messages ne mettent pas en scène des enfants jouant avec des objets qui pourraient s'avérer dangereux s'ils sont utilisés par eux.

Par ailleurs, le Conseil veille à ce que les messages publicitaires diffusés en journée ne soient pas susceptibles d'effrayer les enfants. Ainsi, il est intervenu à différentes reprises sur la base de l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 qui donne compétence au Conseil pour veiller à la protection du jeune public. Par exemple, en 2009, il a demandé à certains services de télévision de ne plus diffuser avant 20h30 deux publicités en faveur des services de vidéo à la demande et des chaînes cinéma d'Orange TV qui mettaient en scène des vampires et des monstres.

Le Conseil a également établi un ensemble de règles dans ses délibérations et ses recommandations afin de définir son propre encadrement des communications commerciales auxquelles les enfants peuvent être particulièrement vulnérables.

Il a ainsi interdit le placement de produits dans les émissions pour enfants (délibération du 16 février 2010) et encadré les messages publicitaires en faveur des jeux d'argent et de hasard (délibération du 22 janvier 2013) et des jeux vidéo, des services téléphoniques, télématiques ou des sites Internet qui font l'objet de restrictions aux mineurs (recommandation du 4 juillet 2006).

Le CSA a également établi des règles permettant d'encadrer les pratiques publicitaires sur les produits dérivés issus d'oeuvres d'animation (recommandation du 7 juin 2006). Ces règles prévoient ainsi qu'une oeuvre d'animation ou de fiction ne peut être interrompue ni précédée ou suivie de messages publicitaires en faveur de produits ou de services dérivés utilisant l'image de ses protagonistes (jouets, jeux vidéo, figurines, matériel scolaire, etc.). Ainsi, le message ne peut être diffusé en dernière position dans l'écran publicitaire précédant le début de l'oeuvre ni en première position dans l'écran suivant la fin de l'oeuvre.

Par ailleurs, une oeuvre mettant en scène des personnages issus d'un produit ou d'un service préexistant ne peut être diffusée pendant le lancement de commercialisation de ce produit ou service. En outre, lorsque cette oeuvre est diffusée, elle ne peut être interrompue ni précédée ou suivie de messages publicitaires en faveur de produits ou de services utilisant l'image de ses protagonistes ; un délai d'au moins quarante-cinq minutes doit s'écouler entre la diffusion des messages publicitaires d'une part, et le début et la fin de l'oeuvre d'autre part.

Le Conseil impose également des stipulations spécifiques dans les conventions des chaînes en matière de communications commerciales à proximité des programmes jeunesse. Afin que les enfants opèrent la différenciation entre le programme et les messages publicitaires, les génériques d'écrans publicitaires jouent un rôle déterminant. Dans les conventions de certaines chaînes, le Conseil impose par conséquent une durée minimale à ce générique. L'article 45 de la Convention de TF1 prévoit ainsi que : « La société veille à une claire identification des écrans publicitaires dans les émissions destinées à la jeunesse. À cette fin, elle utilise pour l'ensemble de ces émissions, des génériques d'écrans publicitaires d'une durée minimale de 4 secondes, composée d'éléments sonores et visuels permettant au jeune public de les identifier aisément » .

Le Conseil, dans un même souci de limiter les liens trop étroits entre une marque et un programme, encadre plus strictement dans certaines conventions les rappels de parrainage dans les émissions jeunesse. À titre d'exemple à nouveau, l'article 46-1 de la Convention de TF1 prévoit que : « Dans les émissions destinées à la jeunesse, ce rappel de parrainage doit être de taille modeste et faire l'objet de mentions n'excédant pas 5 secondes et séparées les unes des autres par une durée raisonnable. Afin d'éviter toute confusion dans l'esprit du jeune téléspectateur, la société veille à ce qu'il n'y ait aucune interférence entre le nom du parrain et celui d'une émission pour jeunesse. »

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