CHAPITRE II - Promotion de la prévention et les parcours de prise en charge coordonnée

Article 42 (art. L. 162-12-21 du code de la sécurité sociale) - Contrats de coopération pour les soins visuels

Objet : Cet article tend à mettre en place deux types de contrats de coopération entre médecins ophtalmologistes et auxiliaires de la filière visuelle, dans le cadre de l'exercice en cabinet individuel et dans celui de l'exercice regroupé au sein de structures pluri-professionnelles.

I - Le dispositif proposé


Face à la situation alarmante de la filière visuelle, une urgente nécessité de renforcer les coopérations pour faire face aux besoins

L'organisation et le fonctionnement de la filière visuelle font aujourd'hui l'objet de très fortes préoccupations. Alors que le constat alarmant dressé par le rapport d'information de la commission des affaires sociales sur la coopération entre professionnels de santé ( voir encadré ci-après ) reste d'actualité, ces premières constatations ont été confirmées et complétées par le très récent rapport d'information de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) sur la restructuration de la filière visuelle.

Ces préoccupations se sont traduites, au cours de l'examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé, par l'adoption d'une première série d'aménagements, au travers de deux amendements gouvernementaux portant respectivement sur les compétences des orthoptistes et sur celles des opticiens-lunetiers.

Le rapport de l'Igas relève ainsi que « la filière de santé visuelle est marquée par d'importantes difficultés d'accès , avec des délais d'attente qui peuvent dans certaines régions atteindre ou dépasser 6 à 9 mois , des coûts élevés liés à d'importants dépassements d'honoraires, et une prise en charge insatisfaisante des urgences ».

Ces difficultés d'accès s'expliquent notamment par la démographie défavorable des médecins ophtalmologistes : en raison de la baisse du numerus clausus au cours de la dernière décennie, les professionnels sont trop peu nombreux pour répondre aux besoins ; en outre, en raison de leur âge moyen élevé, de nombreux départs à la retraite devraient intervenir entre 2015 et 2025, ce qui pourrait encore aggraver la situation. Par ailleurs, selon l'évaluation préalable annexée au présent article, plus d'un ophtalmologiste sur deux est installé en secteur 2 : cette situation concernait 2 694 ophtalmologistes à la fin de l'année 2013, pour 2 080 ophtalmologistes installés en secteur 1.

Le rapport de M. Alain Milon et Mme Catherine Génisson sur les coopérations entre professionnels de santé notait que la résolution de ces difficultés était encore compliquée par l'organisation de la filière visuelle , qui se caractérise par l'existence d' un véritable millefeuille de professions , qui se sont développées parallèlement et sans véritable cohérence d'ensemble .

La filière visuelle : des compétences éclatées, une organisation à clarifier

Extrait du rapport d'information n° 318 (2013-2014) du 28 janvier 2014,
fait par M. Alain Milon et Mme Catherine Génisson
au nom de la commission des affaires sociales du Sénat

Les compétences en matière de santé oculaire et visuelle font l'objet d'une répartition particulièrement complexe entre :

- les médecins spécialistes en ophtalmologie , qui disposent d'une compétence générale d'intervention au terme d'une formation d'une durée de 10 ans ;

- les orthoptistes , professionnels de santé reconnus par le code de la santé publique, qui bénéficient d'une formation d'une durée de 3 ans dans les facultés de médecine, sanctionnée par un certificat de capacité d'orthoptiste. Ils assurent le dépistage, la rééducation, la réadaptation et l'exploration fonctionnelle des troubles de la vision , et peuvent coter les actes ainsi réalisés. Ils peuvent également, sous la responsabilité d'un médecin, réaliser diverses techniques d'imagerie du fond d'oeil, les électrorétinogrammes, les OCT et les échographies ;

- les optométristes , dont la profession n'est pas à l'heure actuelle reconnue par les textes. La qualité d'optométriste s'acquiert après un double cursus comprenant l'obtention du BTS opticien-lunetier (2 ans) puis d'un master biologie santé, spécialité sciences de la vision (3 ans de la licence au master 2) dans une faculté de sciences, sanctionné par un diplôme d'Etat délivré par le ministère de l'éducation. Selon les informations fournies à vos rapporteurs, on dénombrerait environ 2 000 titulaires de cette formation de niveau master. La profession telle qu'elle existe actuellement en France, formée dans les facultés de sciences et non de médecine, est compétente sur la seule partie fonctionnelle de la vision , et non sur le dépistage pathologique. A l'heure actuelle, les actes pratiqués ne peuvent l'être que sous le contrôle d'un médecin et ne font pas l'objet d'une cotation dans la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). De ce fait, les optométristes sont soit salariés au sein de cabinets ou de services d'ophtalmologie, où ils effectuent le plus souvent des examens préparatoires à la consultation médicale, soit, pour la majorité d'entre eux, opticiens-optométristes ;

- les opticiens , titulaires du BTS opticien-lunetier au terme d'un cursus de deux ans, avec la possibilité d'opter pour une licence professionnelle permettant d'acquérir une compétence particulière en réfraction, contactologie, basse vision ou pathologie. Il est à noter qu'en application de l'article L. 4362-10 du code de la santé publique, les opticiens sont depuis 2006 autorisés à adapter une prescription médicale de verres correcteurs datant de moins de 3 ans, dans le cadre d'un renouvellement, pour les personnes âgées de plus de 16 ans.

Dans un contexte de difficultés croissantes d'accès aux soins d'ophtalmologie dans plusieurs régions, et alors que les jeunes professionnels formés en orthoptie et en optométrie aspirent à davantage de reconnaissance, l'organisation de la filière doit impérativement être clarifiée .

La filière visuelle fait face à un important problème démographique . Certaines régions souffrent d'un manque criant de professionnels - notamment en secteur 1 - et il arrive que les délais de rendez-vous atteignent 18 mois, pour un délai moyen de 4 à 8 mois.

Cette situation pose la question de l'accès aux soins, alors que le vieillissement de la population devrait mécaniquement entraîner une augmentation des pathologies oculaires liées à l'âge (glaucome, rétinopathie diabétique, dégénérescence maculaire...).

Pyramide des âges des médecins ophtalmologistes au 1 er janvier 2013

Densité des médecins ophtalmologistes en 2013
(nombre de médecins pour 100 000 habitants)

Plusieurs systèmes de santé étrangers offrent l'exemple d'une organisation différente. Au Royaume-Uni, aux Pays-Bas ou encore au Canada, les médecins spécialistes en ophtalmologie sont très peu nombreux et leur activité est concentrée sur les cas pathologiques et la chirurgie. La mesure de la réfraction et plusieurs examens de dépistage relèvent en revanche des orthoptistes ou optométristes, dont la compétence varie selon les pays.

Face à cette situation, le rapport de l'Igas recommande en particulier de « simplifier et élargir le champ des coopérations conduites au titre de l'article 51 de la loi HPST ». C'est l'objet du présent article, qui propose la mise en place d'un contrat de coopération pour les soins visuels.


Un recours croissant des professionnels aux formules de coopération, dont la diffusion reste cependant contrainte

Plusieurs expériences de coopération entre ophtalmologistes et auxiliaires de la filière visuelle (notamment des orthoptistes) ont déjà montré des résultats encourageants, notamment par le gain de temps médical qu'elles permettent. La pratique des médecins ophtalmologistes est ainsi orientée vers les actes sur lesquels leur compétence est véritablement nécessaire, tandis que les autres professions de la filière visuelle peuvent voir leur pratique enrichie et, à terme, leur attractivité renforcée.

Par ailleurs, selon l'évaluation préalable annexée au présent projet de loi, le mode de pratique des ophtalmologistes qui salarient un orthoptiste, qui concernerait 15 % des ophtalmologistes libéraux, permettrait d'accroître jusqu'à 35 % le nombre de consultations effectués par un ophtalmologiste.

Selon les informations transmises à votre rapporteur général, les protocoles de coopération en matière visuelle, qui interviennent depuis 2012, concernent en majorité le secteur libéral. Deux d'entre eux, autorisés par plusieurs ARS, connaissent un engouement particulier de la part des professionnels de santé et ont reçu un avis favorable 43 ( * ) du collège des financeurs quant au financement dérogatoire des actes concernés. Un protocole relatif à la réalisation d'examens par un orthoptiste en première intention, afin d'optimiser la prise en charge de patients en consultation d'ophtalmologie à l'hôpital, est cependant en cours d'instruction par l'ARS d'Ile-de-France.

Principaux protocoles de coopération autorisés par les ARS
dans le cadre de la filière visuelle

Protocoles autorisés

Nombre d'ARS concernées

Nombre de professionnels
de santé engagés

Dépistage itinérant rétinopathie diabétique

6

2

(Bourgogne)

Réalisation d'actes par orthoptiste sans prescription médicale

14

30

(répartis dans 26 équipes)

Réalisation d'un bilan visuel par l'orthoptiste Renouvellement/adaptation des corrections optiques chez l'enfant (6 à 15 ans) en cabinet de ville

Avis favorable du collège des financeurs

17

90

(répartis dans 29 équipes)

Réalisation d'un bilan visuel par l'orthoptiste Renouvellement/adaptation des corrections optiques chez l'adulte (16 à 50 ans) en cabinet de ville

Avis favorable du collège des financeurs

18

une centaine

Réalisation de photographies du fond d'oeil dans le cadre du dépistage de la rétinopathie diabétique par un(e) orthoptiste et/ou un(e) infirmier(e)

11

30

(répartis dans 3 équipes)

En milieu hospitalier :

chez les enfants de 6 à 15 ans : Réalisation d'un bilan visuel par un orthoptiste dans le cadre du renouvellement/adaptation des corrections optiques et analysé via télémédecine par un ophtalmologiste

1

(Haute Normandie
en 2015)

5

(CHU de Rouen)

chez les adultes de 16 à 50 ans : idem ci-dessus

1

(Haute Normandie
en 2015)

5

(CHU de Rouen)

Source : Informations transmises par la DGOS

Selon les informations fournies par la DGOS, « l'existence de plusieurs protocoles de coopération entre les orthoptistes et les ophtalmologistes permet de considérer qu'un certain nombre d'actes peuvent être délégués aux orthoptistes et que ces derniers sont en mesure d'en assumer la charge ».

Ainsi que le relevait le rapport précité de la commission des affaires sociales, plusieurs éléments font cependant obstacle à leur diffusion, notamment le cadre contraignant des protocoles de l'article 51 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), ainsi que les modalités de financement.

Extrait du rapport d'information n° 318 (2013-2014) du 28 janvier 2014,
fait par M. Alain Milon et Mme Catherine Génisson
au nom de la commission des affaires sociales du Sénat

Un exemple encourageant de coopération entre médecin ophtalmologiste et orthoptistes dans la région Nord-Pas-de-Calais

Lors de leur déplacement à l'ARS du Nord-Pas-de-Calais, vos rapporteurs ont rencontré un médecin ophtalmologiste dont une partie de l'activité est organisée en coopération avec des orthoptistes, au sein d'un centre médical pratiquant tous les actes d'ophtalmologie (traitement du glaucome, de la DMLA...), à l'exception des actes chirurgicaux.

Dans ce cadre, les patients sont tout d'abord reçus par un orthoptiste pour un premier examen approfondi de 30 minutes comprenant la réalisation de mesures à l'autoréfractomètre, de la tonométrie à air pulsé sans contact, d'un bilan orthoptique moteur et sensoriel, la mesure de la réfraction subjective et objective, la kératométrie, la prise de photos non mydriatiques du fond de l'oeil, l'examen par OCT des fibres visuelles et de l'épaisseur maculaire, un examen du champ visuel automatisé et manuel et de la vision des couleurs.

Ce premier examen, qui permet d'effectuer un dépistage de certaines affections ophtalmologiques, permet de faire gagner un temps précieux pour l'examen pratiqué dans un second temps, si nécessaire, par le médecin . Celui-ci peut ainsi recevoir 5 à 6 patients par heure et concentrer son attention sur les cas pathologiques. Les patients se déclarent très satisfaits de ce mode de fonctionnement, et notamment du temps qui leur est consacré par l'orthoptiste.

Le développement et la pérennité de cette forme de coopération sont cependant limités par les modalités de son financement . Dans certains cas, les actes effectivement pratiqués par l'orthoptiste ne correspondent à aucune cotation de l'assurance maladie. Alors que l'examen classiquement pratiqué dans ce cadre comprend à la fois un examen de la réfraction et un dépistage de certaines pathologies, il est ainsi nécessaire de recourir à l'indication « bilan orthoptique », dont la sincérité n'est que partiellement satisfaisante.

Ainsi que le médecin auditionné par vos rapporteurs l'a relevé, la nomenclature générale des actes professionnels comprend très peu d'actes orthoptiques, la liste de ceux-ci n'ayant pas évolué en même temps que le décret de compétences de la profession en 2007. De ce fait, la nomenclature ne reflète pas nécessairement la réalité des actes pratiqués . Cette situation est problématique quant à la rémunération des professionnels libéraux , d'autant que leur activité nécessite l'achat d'un matériel très coûteux, qui représenterait environ un an de rémunération.

Il est à noter qu'il existe plusieurs exemples de fonctionnement coopératif avec des optométristes, tant en secteur hospitalier qu'en cabinet libéral, dans lesquels le salariat permet de lever ces problèmes.

Vos rapporteurs ont également eu connaissance d'un protocole autorisé par l'ARS de Bourgogne entre un médecin et un orthoptiste libéral portant sur la prise de clichés à distance à l'aide d'un rétinographe non mydriatique et la dilatation mydriatique.

Deux outils contractuels visant à encourager le travail en coopération au sein de la filière visuelle

Le présent article propose de modifier l'article L. 162-12-21 du code de la sécurité sociale pour créer deux outils contractuels visant à encourager, de manière plus pérenne que les protocoles de l'article 51, le partage des tâches et le travail en coopération entre les médecins ophtalmologistes et les auxiliaires médicaux de la filière visuelle. Selon l'évaluation préalable, il s'agit ainsi d' « accélérer le changement des modalités de travail des ophtalmologistes »  et de remédier au « coût d'entrée associé à l'organisation d'un travail pluri-professionnel ».

Il est à noter que ces dispositions viennent se substituer à celles relatives au contrat d'amélioration des pratiques individuelles (CAPI). L'évaluation préalable indique qu'elles étaient devenues obsolètes dans la mesure où le CAPI a été remplacé, dans le cadre de la convention médicale de 2011, par le mécanisme de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP), et où les derniers CAPI en vigueur sont arrivés à échéance au 1 er janvier 2015.

- Le premier de ces outils, prévu par le I de cet article, concerne les médecins ophtalmologistes exerçant en libéral et conventionnés avec l'assurance maladie : il s'agit d'un contrat individuel de coopération pour les soins visuels .

Ce contrat, conclu entre les médecins exerçant en secteur 1 et l'assurance maladie, aura pour objet d'inciter au recrutement ou à la formation d'un auxiliaire médical , qui pourrait être un orthoptiste, un opticien-lunetier ou encore un infirmier. A ce titre, les informations transmises par la DGOS indiquent clairement que les orthoptistes seront prioritairement concernés par cette mesure , à l'exception des optométristes - qui, du reste, ne sont pas reconnus comme auxiliaires médicaux par le code de la santé publique. Les éléments fournis précisent en effet que, dès lors que « la mesure ne [vise] pas à déroger aux règles définissant l'exercice des auxiliaires médicaux, elle concerne donc ceux qui sont aujourd'hui autorisés par la législation à pratiquer les actes de soins oculaires (examens de dépistage, rééducation, examen de l'acuité visuelle...) ».

Le contrat sera conclu pour une durée de trois ans non renouvelable . L'outil est ainsi conçu comme une aide de départ , visant à inciter à la mise en place d'un mode de pratique reposant sur le partage des tâches ; celui-ci deviendrait pérenne en dehors de toute aide contractuelle dès lors que la montée en charge du dispositif aura permis d'améliorer l'activité du cabinet grâce à un accroissement du nombre de consultations.

Il contiendra des engagements individualisés de la part du médecin, dont une liste non exhaustive est prévue par le texte de l'article : il pourra s'agir du nombre de patients uniques reçus en consultation 44 ( * ) , du respect des tarifs conventionnels, ou encore de la mise en place d'actions spécifiquement destinées à favoriser la continuité des soins. Ces engagements seront assortis de plusieurs « objectifs en matière d'organisation des soins » , également définis de manière non exhaustive, et portant notamment sur la formation ou le recrutement d'un auxiliaire médical et la participation à des actions de dépistage et de prévention 45 ( * ) . Les modalités d'évaluation de ces objectifs seront également prévues dans le cadre du contrat.

Contrepartie de ces différents engagements, des contreparties financières , dont le montant dépendra de l'atteinte des objectifs fixés, seront prévues par le contrat. L'évaluation préalable précise que le niveau maximal de cette aide serait fixé, par voie réglementaire, à hauteur maximale de 10 000 euros annuels, et avec une moyenne de 6 500 euros par professionnel et par an. Le III de l'article précise que le financement de cette aide s'imputera sur l'Ondam soins de ville.

Il est enfin précisé que les « conditions particulières » relatives à la conclusion d'un contrat individuel de coopération pour les soins visuels seront précisées par décret en Conseil d'Etat . Ces précisions porteront notamment sur la profession de l'auxiliaire médical et sur les modalités de son recrutement.

- Le second de ces outils, prévu par le II de la rédaction proposée pour l'article L. 162-12-21, concerne les professionnels exerçant en maisons de santé et en centres de santé pluri-professionnels : il s'agit du contrat collectif pour les soins visuels .

Ce contrat, conclu entre ces structures d'exercice collectif et l'agence régionale de santé (ARS) ou un organisme local d'assurance maladie, aura pour objet d' « inciter au développement de coopérations entre les professionnels de santé pour la réalisation de consultations ophtalmologiques au sein de ces structures ». Selon l'évaluation préalable, il s'agirait de mettre en place des coopérations à temps partiel entre orthoptistes et ophtalmologistes dans le cadre d'une structure d'exercice collectif , les professionnels concernés pouvant conserver une activité à titre principal en ville ou en établissement.

Contrairement au contrat individuel, le contrat sera conclu pour une durée de trois ans qui pourra être renouvelée : il s'agirait donc, dans le cas des structures collectives, d'une aide potentiellement pérenne.

Comme le contrat individuel, ce contrat collectif comportera des engagements de la part de chacune des parties au contrat - l'article, plus succinct sur ce point que pour les contrats individuels, ne mentionne à ce titre que le « respect des tarifs conventionnels et l'organisation des soins ». L'aide versée, estimée par l'étude d'impact à 15 000 euros par structure, pourrait être intégrée dans les dispositions du prochain accord conventionnel interprofessionnel 46 ( * ) portant sur la rémunération des structures pluri-professionnelles de proximité, soit à compter du 1 er janvier 2018. Comme pour le contrat individuel, cette aide s'imputera sur l'Ondam soins de ville.

Cette intégration sera réalisée sur le foncement d'une évaluation des contrats collectifs réalisée par les ARS et les organismes locaux d'assurance maladie, et transmise au Parlement.

- Ces deux types de contrats seront définis à partir de contrats-types déterminés selon des modalités spécifiques à chacun d'entre eux.

S'agissant du contrat individuel de coopération, la compétence de droit commun pour la définition du contrat-type reviendra aux partenaires conventionnels dans le cadre de la convention médicale. Si aucun accord n'est trouvé sur ce point lors des négociations avant le 1 er septembre 2016, il reviendra cependant aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale et à l'Uncam de déterminer, par voie conjointe et après avis des organisations syndicales représentatives des professionnels concernés et de l'Unocam, de déterminer le contenu de ce contrat.

S'agissant du contrat collectif, le contrat-type sera déterminé, pour une durée de trois ans, par décision conjointe de l'Uncam et des ministres en charge de la santé et de la sécurité sociale, après avis des organisations syndicales représentatives des professionnels concernés, des organisations représentatives des centres de santé et de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire. L'étude d'impact précise que le contenu de ce contrat-type pourrait être intégré dans l'accord interprofessionnel à l'issue du délai de trois ans.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements à cet article.

Deux d'entre eux, adoptés sur proposition de la rapporteure, Mme Michèle Delaunay, sont d'ordre rédactionnel.

Le troisième, présenté par plusieurs membres du groupe RRDP, visait à intégrer les organisations représentatives des centres de santé parmi les structures dont l'avis est requis pour la définition du contrat-type collectif pour les soins visuels.

III - La position de la commission


• Votre rapporteur général salue la mise en place de ces dispositions, qui constituent, après le vote par le Sénat des dispositions relatives aux compétences des orthoptistes et des opticiens-lunetiers dans le cadre du projet de loi de modernisation du système de santé, une nouvelle étape dans la traduction des préconisations du rapport sénatorial sur les coopérations ainsi que de celles formulées par le récent rapport de l'Igas. Face aux difficultés structurelles rencontrées par la filière visuelle, il apparaît en effet indispensable d'apporter des aménagements rapides aux insuffisances de l'organisation actuelle.

Il souligne que le dispositif proposé pourra être utilement articulé, dans le cadre de sa mise en oeuvre, avec l'exercice en pratique avancée prévue par l'article 30 du même projet de loi de modernisation du système de santé.

Il relève que les objectifs fixés par le Gouvernement sont très ambitieux : selon l'étude d'impact, 600 ophtalmologistes sur les 2 056 exerçant en secteur 1 pourraient conclure un contrat individuel d'ici à 2017, soit 30 % d'entre eux.


Votre rapporteur général s'interroge sur la place des optométristes au sein de la filière visuelle . Si la rédaction de l'article a retenu la formulation large d'« auxiliaire médical », les éléments transmis par la DGOS laissent transparaître que les orthoptistes sont en fait les seuls professionnels visés. Or, le partage des tâches entre médecins ophtalmologistes et optométristes salariés existe déjà non seulement au sein de cabinets libéraux, mais également dans certains services hospitaliers - les optométristes pouvant fournir une aide non négligeable à la mesure de la réfraction. L'on se trouve donc bien, ici encore, dans la situation décrite comme « ubuesque » par le rapport de l'Igas précité, qui relève que « l'optométrie existe, mais l'optométriste non ! Ou plutôt, l'optométriste n'est pas autorisé à pratiquer le métier pour lequel il a été formé ».

Sans se prononcer sur l'opportunité de la reconnaissance d'une quatrième profession au sein de la filière visuelle, votre rapporteur général estime, à la suite du rapport de l'Igas, qu'« il n'est pas acceptable que des centaines de jeunes formés soient voués à l'expatriation ou à des subterfuges variés permettant leur exercice sous des montages divers » - d'autant que les compétences de ces professionnels pourraient être tout à fait profitables à la filière visuelle. Si le choix de maintenir le statu quo sur l'organisation de la filière est maintenu, il est indispensable de clarifier en conséquence la formation des optométristes, qui, en l'état actuel, ne peut leur offrir que des débouchés partiellement insatisfaisants.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 43 - Expérimentation d'un dispositif de prévention de l'obésité chez les jeunes enfants

Objet : Cet article permet la mise en place d'un dispositif expérimental de prévention de l'obésité chez les enfants âgés de trois à huit ans, financé par un forfait annuel versé par les caisses primaires d'assurance maladie à partir du fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires.

I - Le dispositif proposé

Le présent article prévoit la possibilité de mener des expérimentations pour « améliorer la prise en charge et le suivi d'enfants de trois à huit ans chez lesquels le médecin traitant a décelé un risque d'obésité défini par les recommandations élaborées par la Haute Autorité de santé ».

Pour rappel, la création du médecin traitant de l'enfant est prévue par le projet de loi de « modernisation de notre système de santé » en cours d'examen parlementaire.

L'expérimentation consiste en la réalisation, sur prescription du médecin traitant de l'enfant, de consultations en diététique et psychologie ainsi que d'un bilan d'activité physique par des professionnels de santé ou des psychologues exerçant dans des structures « disposant de compétences particulières en ce domaine ». Sont notamment visés les centres de santé et les maisons de santé. Les structures seraient sélectionnées par les caisses primaires d'assurance maladie (Cpam) et les agences régionales de santé (ARS).

Le financement des consultations et bilans s'effectuera par un forfait annuel par enfant versé par la Cpam au titre de ses actions de prévention. L'étude d'impact annexée au projet de loi précise que ce forfait sera financé sur les crédits du fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires .

La liste des territoires retenus pour l'expérimentation ainsi que le cahier des charges du dispositif seront définis par arrêté des ministres de la santé et de la sécurité sociale. L'étude d'impact précise que les expérimentations seraient menées « sur des territoires (départements ou bassins de vie) à forte prévalence et à faible niveau socio-économique ». Les structures seront sélectionnées au terme d'un appel à projets sur les critères définis dans le cahier des charges qui devrait être élaboré d'ici la fin 2015.

Les modalités de mise en oeuvre de l'expérimentation seront fixées par décret.

La période d'expérimentation s'étend du 1 er juillet 2016 au 31 décembre 2019. La Cnam est chargée de réaliser un rapport permettant d'évaluer l'efficacité du dispositif. Ce rapport doit être transmis au Parlement avant le 30 septembre 2019.

Selon les informations fournies par l'étude d'impact, la mise en place de l'expérimentation est envisagée dans trois territoires avec une enveloppe de 0,5 million d'euros en 2016 , portée à 1,5 million d'euros en 2017 et à 2 millions d'euros pour chacune des deux années suivantes. Le Gouvernement entend cibler a minima 1000 enfants par territoire la première année.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

III - La position de la commission

A l'initiative du rapporteur général, votre commission a adopté un amendement n° 58 qui supprime la mention des centres de santé et des maisons de santé car la liste proposée au présent article n'a pas vocation à être exclusive. Il appartiendra aux Cpam et aux ARS, sur le fondement du cahier des charges, de sélectionner les structures les plus adéquates, y compris le cas échéant celles regroupant des professionnels de santé libéraux.

La commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 44 (art. L. 162-5-14 du code de la sécurité sociale, art. L. 1435-5 du code de la santé publique, art. 44 de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007) - Financement global par les agences régionales de santé volontaires de la permanence des soins ambulatoires

Objet : Cet article tend à pérenniser l'expérimentation conduite par les agences régionales de santé (ARS) Pays de Loire en matière de permanence des soins ambulatoires (PDSA) et à permettre son extension aux territoires des ARS volontaires.

I - Le dispositif proposé

Le bilan positif de l'expérimentation menée par l'ARS Pays de la Loire : responsabilisation et participation accrues des médecins, maîtrise du nombre d'actes réalisés dans le cadre de la permanence des soins

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a prévu la possibilité de confier aux ARS, à titre expérimental, une compétence élargie en matière d'organisation et de financement de la permanence des soins ambulatoires (PDSA) dans le cadre d'une enveloppe financière déterminée.

Ces expérimentations, qui entraient en vigueur à compter du 1 er janvier 2008, devaient initialement durer cinq ans au maximum, soit jusqu'au 1 er janvier 2013. L'article 43 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a cependant prolongé leur durée jusqu'au 1 er janvier 2016.

Il est à noter que la mise en oeuvre de la loi hôpital, patients, santé, territoires (HPST) du 21 juillet 2009 est venue restreindre le champ initial de l'expérimentation, en confiant l'organisation de la PDSA aux ARS. Le financement de la permanence des soins ressort en effet partiellement, depuis lors, de la compétence des ARS : les indemnités d'astreinte et de régulation des médecins participant à la PDSA, soit comme régulateurs, soit comme effecteurs, sont déterminées et versées par les ARS sur les crédits du Fonds d'intervention régional (FIR) -ce qui était initialement prévu dans le seul cadre de l'expérimentation est ainsi devenu le droit commun pour l'ensemble du territoire-. En revanche, les actes (et les majorations afférentes) réalisés par les médecins dans le cadre de la PDSA restent, dans le droit commun, financés par l'assurance maladie.

Deux régions se sont engagées dans cette expérimentation : en premier lieu, le Limousin (pour le seul département de la Haute-Vienne) qui a cependant réintégré le droit commun une fois la loi HPST mise en oeuvre ; en second lieu, la région des Pays de la Loire, depuis le mois d'avril 2011.

L'ARS Pays de la Loire s'est ainsi vu confier la gestion d'une enveloppe globale de financement incluant, non seulement les forfaits d'astreinte et de régulation, mais également l'activité réalisée par les médecins lors des permanences avec un financement global sur le FIR. L'expérimentation prévoit la possibilité pour l'ARS de moduler le montant des forfaits de régulation et d'astreinte, dès lors que les dépenses liées aux visites et consultations diminuent.


L'expérimentation conduite dans les Pays de la Loire : contenu et bilan

Les Pays de la Loire dérogent actuellement au cadre national en ce que l'ARS dispose, au titre des missions financées par le FIR, d' une enveloppe de PDSA globale intégrant, non seulement les forfaits de régulation et d'astreinte (droit commun depuis HPST), mais également les honoraires des actes et majorations afférentes (financés sur le risque dans le droit commun). A ce titre, l'ARS s'est vu confier une enveloppe annuelle globale de 16,3 millions d'euros afin de couvrir l'ensemble des dépenses sur son territoire (à l'exception des agglomérations de Nantes et Saint-Nazaire).

Cette enveloppe globale lui a permis de mettre en place :

- un mécanisme d'intéressement des professionnels de santé à la maîtrise du nombre d'actes réalisés dans le cadre de la PDSA, sur proposition des associations départementales d'organisation de la PDS (ADOPS), via un redéploiement des crédits afférents aux actes vers les dépenses liées aux forfaits de régulation et d'astreinte des professionnels. Les forfaits sont modulés en fonction de la consommation constatée des dépenses liées aux actes dans des limites fixées par arrêté ;

- une garantie de rémunération globale (intégrant actes et forfaits) pour les médecins inscrits dans le dispositif de médecins mobiles (activité effectuée sur de larges secteurs par des médecins n'effectuant que des visites) ;

L'évaluation de l'ARS Pays de la Loire a principalement porté sur l'impact de l'expérimentation sur le fonctionnement et le bon usage du dispositif de PDSA lui-même.

- Grâce à ces outils ainsi qu'au travail de co-construction engagé par l'ARS avec les acteurs, l'expérimentation a contribué à renforcer le taux de participation des médecins généralistes à la PDSA, tant aux activités de régulation (+ 9% de médecins) que de permanence (+ 8%) et à maîtriser les dépenses via une diminution du nombre global d'actes effectués dans la région.

- S'agissant de l'impact sur l'engorgement des urgences , plusieurs précisions peuvent être apportées. En premier lieu, les plages de régulation ont été renforcées afin de couvrir les périodes de tension, identifiées par les ADOPS et le SAMU (+ 15% en Loire Atlantique, + 52% en Maine et Loire avec une moyenne de + 10% environ au niveau régional entre 2011 et 2014). Par ailleurs, six maisons médicales de garde ont été créées en zones expérimentales durant les quatre années de l'expérimentation. Elles assurent des consultations jusqu'à minuit en soirée.

- L'expérimentation aurait enfin permis de fluidifier les relations et d'instaurer un dialogue collectif entre les différents acteurs de la PDSA sur le territoire de l'ARS (médecins volontaires, associations de permanence des soins et services d'urgences des établissements de santé).

Source : Eléments communiqués par la DGOS

Une pérennisation du dispositif sur la base du volontariat

Le présent article vise à pérenniser le dispositif expérimental dans la région Pays de la Loire et à permettre son extension aux territoires des ARS qui en feraient la demande.

Le paragraphe II procède ainsi à trois modifications dans l'article L. 1435-5 du code de la santé publique , qui prévoit l'organisation, par les ARS, de la mission de service public de la permanence des soins.

Il procède tout d'abord ( 1° et 3° ) à une numérotation des différents paragraphes qui composent cet article.

Il précise ensuite ( ) que la rémunération des professionnels de santé, pour leur participation à la permanence des soins, c'est-à-dire la rémunération de l'astreinte et de la régulation, est une rémunération forfaitaire.

Il prévoit enfin et surtout ( ) la possibilité pour les ARS volontaires de s'inscrire dans l'organisation dérogatoire mise en oeuvre dans les Pays de la Loire, par autorisation accordée par voie d'arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Cette autorisation vaudra pour une durée de trois ans avec une possibilité de renouvellement en cas de bilan positif.

Les ARS concernées se verront attribuer une enveloppe globale sur le FIR, qui leur permettra de financer à la fois les forfaits d'astreinte et de régulation (rémunération forfaitaire prévue par l'article L. 1435-5 du code de la santé publique) et les actes réalisés sans le cadre de la permanence des soins (rémunération à l'acte prévue par l'article L. 162-5-14 du code de la sécurité sociale). Il est précisé que la rémunération de ces actes ne pourra, dans ce cas, être mise à la charge de l'assurance maladie.

Le paragraphe I procède à une modification de coordination dans l'article L. 162-14-5 du code de la sécurité sociale , qui porte sur la prise en charge par l'assurance maladie des actes effectués dans le cadre de la PDSA. Il est précisé que les tarifs conventionnels définis aux articles L. 162-5 et L.162-14-1 du code de la sécurité sociale continueront de s'appliquer.

Le paragraphe III prolonge l'expérimentation prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, pour la seule ARS des Pays de la Loire, jusqu'au 31 décembre 2016.

Selon les informations complémentaires transmises à votre rapporteur par la Cnam et la DGOS, les ARS pourront avoir, comme c'est le cas dans le cadre de l'expérimentation, la possibilité de moduler le montant des forfaits de régulation et d'astreinte en fonction de la maîtrise des dépenses liées aux visites et consultations. En outre, si les dépenses relatives aux actes et majorations sont inférieures au montant attribué à l'ARS sur le FIR, elles pourront être utilisées pour financer des actions liées à l'organisation de la PDSA, comme par exemple la formation de régulateurs ou encore la réévaluation des forfaits.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

A l'initiative de sa rapporteure pour l'assurance maladie, notre collègue députée Michèle Delaunay, l'Assemblée nationale a adopté quatre amendements rédactionnels à cet article.

III - La position de la commission

Votre rapporteur général se félicite de l'attention portée par les textes législatifs récents au problème de la PDSA, qui représente un enjeu majeur tant pour la continuité des soins sur l'ensemble du territoire national que pour lutter contre l'engorgement des urgences.

Si l'on ne peut que saluer le bilan positif de l'expérimentation menée par l'ARS des Pays de la Loire, plusieurs points ont cependant retenu la vigilance de votre commission des affaires sociales.

En premier lieu, votre commission rappelle - comme elle a eu l'occasion de l'exprimer lors de l'examen du projet de loi de modernisation du système de santé - son attachement à la place des médecins libéraux dans l'organisation de la PDSA . Il apparaît en effet que certaines ARS ont décidé de supprimer la PDSA entre minuit et huit heures du matin ; ces décisions, qui contreviennent à l'esprit du dispositif prévu par l'article L. 6314-1 du code de la santé publique, ont pour effet de limiter les solutions qui peuvent être proposées au public, soit à un conseil médical par téléphone, sans visite à domicile, soit à une prise en charge hospitalière, dont les coûts sont très élevés. Elle souligne ainsi que la plus grande latitude donnée aux ARS dans l'organisation de la PDSA ne doit pas aboutir à la généralisation de telles solutions au détriment de la prise en charge des patients et de son uniformité sur l'ensemble du territoire national .

Elle fait par ailleurs siennes les observations formulées par la Cnam qui recommandait de porter une attention particulière au risque que pourrait représenter la mise en place d'organisations différentes selon les régions, au bon calibrage de l'enveloppe globale dévolue à chaque ARS, ou encore à la possibilité de moduler le forfait de régulation et d'astreinte, également à la baisse (et non pas seulement à la hausse).

Elle portera enfin une attention particulière à l'effet de la mise en place de cette possibilité sur l'activité des services d'urgence.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 44 bis (nouveau) (art. L. 165-5-14-2 [nouveau] du code de la sécurité sociale) - Prise en charge des frais relatifs à l'établissement du certificat de décès intervenu dans le cadre de la permanence des soins

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, met en place un forfait versé par l'assurance maladie aux médecins assurant la délivrance des certificats de décès aux horaires de la permanence des soins.

I - Le dispositif proposé

La délivrance d'un certificat de décès , acte d'état civil prévu par l'article L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales (CGCT) et légalement indispensable pour procéder aux opérations funéraires, constitue une obligation déontologique incombant aux médecins 47 ( * ) .

Si, en journée et en semaine, c'est au médecin traitant qu'il appartient en pratique de constater le décès de ses patients, rien n'est prévu dans le cadre de la permanence des soins . Une réponse 48 ( * ) à une question parlementaire posée le 5 juin 2013 par notre collègue sénatrice Catherine Procaccia indiquait ainsi très clairement que « la réalisation des certificats de décès, la nuit et le week-end, ne fait pas explicitement partie de la mission des médecins de garde dans le cadre de la permanence des soins » et que « par ailleurs , cet acte ne fait l'objet d'aucune rémunération ou indemnisation ».

En l'absence d'encadrement législatif de cette question, il revient à chaque agence régionale de santé (ARS) de traiter le problème dans le cadre de l'élaboration des cahiers des charges régionaux relatifs à la permanence des soins. Or, le récent rapport 49 ( * ) de notre collègue députée Mme Catherine Lemorton sur l'organisation de la permanence des soins relevait que le problème était diversement abordée par les différentes ARS, il en résulte une différence de régime dommageable sur l'ensemble du territoire national.

Le même rapport relève par ailleurs que « la complexité du sujet est accrue par l'absence de prise en charge de l'acte par l'assurance maladie », l'Ordre des médecins indiquant que, dans de nombreux départements, les certificats sont établis par les médecins de garde, sans prise en charge par l'assurance maladie.

La mission préconise, en conséquence, notamment, de « prévoir explicitement l'indemnisation de l'établissement d'un certificat par un médecin effecteur lorsque le décès intervient aux heures de la PDSA », précisant que « cette question nécessite par ailleurs que la prise en charge de cet acte par l'assurance maladie soit effective ».

C'est à ce problème que le présent article, introduit par voie d'amendement gouvernemental lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, entend répondre. L'objet de l'amendement indique qu'il s'agit de faciliter la mobilisation des médecins aux horaires de la PDSA, notamment dans le but d'éviter aux familles qui se trouvent déjà dans une situation pénible, d'avoir à faire face à des tracasseries administratives et à des délais d'attente inutilement longs pour obtenir le certificat de décès. Il s'agit également de « proposer une solution pérenne et uniformisée qui encadre cette prise en charge sur l'ensemble du territoire ».

La rédaction proposée introduit dans le code de la sécurité sociale un nouvel article L. 162-5-14-2 prévoyant la prise en charge par l'assurance maladie des frais relatifs à l'examen nécessaire à l'établissement du certificat de décès lorsque celui-ci est réalisé au domicile du patient, d'une part, et dans des horaires et selon des conditions qui seront fixés par décret, d'autre part.

Cette prise en charge interviendra sur la base d'un forfait déterminé par arrêté des ministres en charge de la santé et de la sécurité sociale, étant précisé que les médecins concernés seront tenus de respecter le tarif ainsi fixé. L'objet de l'amendement indique que ce forfait sera versé directement au médecin par l'assurance maladie.

II - La position de la commission

Votre commission estime que cet article apporte une réponse depuis longtemps attendue au problème récurrent de l'absence de praticiens médicaux pour dresser le constat de décès et signer le certificat, ce qui peut inutilement ajouter à la détresse des familles.

Elle vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 45 (art. L. 4011-2-3 du code de la santé publique, art. L. 161-37, L. 162-1-7-1, L. 162-1-8 du code de la sécurité sociale) - Pérennisation des actes prévus par les protocoles de coopération

Objet : Cet article tend à définir les conditions dans lesquelles les protocoles de coopération entre professionnels de santé peuvent être pérennisés.

I - Le dispositif proposé

Cet article se compose de deux parties.

Le I propose de modifier l'article L. 4011-2-3 du code de la santé publique relatif aux conditions d'évaluation et d'extension des protocoles de coopération entre professionnels de santé prévus par l'article L. 4011-1.

Il prévoit que la Haute Autorité de santé (HAS) conduit non seulement l'évaluation du protocole mais rend également son avis sur l'inscription de chacun des actes que comprend le protocole à la nomenclature des actes remboursables. Cet avis, prévu par l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, permettra au ministre en charge de la santé de procéder d'office à l'inscription sans attendre la décision de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie.

La possibilité pour le directeur général de l'ARS de maintenir les protocoles qui ont obtenu un avis favorable du collège des financeurs pour une durée qu'il fixe est supprimée.

La procédure en cas d'avis favorable du collège des financeurs sur un protocole est modifiée. La possibilité pour la HAS d'étendre un protocole à l'ensemble du territoire est supprimée. L'Académie de médecine est saisie des textes réglementaires permettant d'inscrire les actes parmi les compétences des professionnels de santé et se prononce dans un délai de deux mois. Le protocole est maintenu en place jusqu'à la parution des textes réglementaires et les actes sont intégrés à la formation initiale et continue des professionnels de santé.

Si le collège des financeurs s'est prononcé pour le financement pérenne d'un protocole, le ministre en charge de la santé peut prolonger son financement jusqu'à ce que les actes concernés deviennent remboursables.

Le II modifie le code de la sécurité sociale.

Les missions de la Haute Autorité de santé sont complétées pour prévoir les différents avis prévus pour l'évaluation des protocoles.

L'article L. 162-1-7-1 relatif aux règles de hiérarchisation des actes remboursables est complété pour les actes inscrits dans un protocole de coopération et ayant reçu un avis favorable du collège des financeurs.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel de la rapporteure.

III - La position de la commission

Votre commission est favorable à cet article qui permettra de faciliter la diffusion des acquis issus des protocoles de coopération entre professionnels de santé.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 45 bis (nouveau) (art. L. 162-9 et L. 162-12-9 du code de la sécurité sociale) - Conditions relatives à l'installation pour le conventionnement des sages-femmes, des chirurgiens-dentistes et des masseurs-kinésithérapeutes

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, tend à habiliter les partenaires conventionnels des masseurs-kinésithérapeutes, des sages-femmes et des chirurgiens-dentistes à procéder à une régulation du conventionnement fondée sur des critères géographiques.

I - Le dispositif proposé

Cet article, qui résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa rapporteure, Mme Michèle Delaunay, vise à habiliter expressément les masseurs-kinésithérapeutes, les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes à procéder à une régulation du conventionnement fondée sur des critères géographiques, dans le but d'inciter les professionnels à s'installer dans les zones sous-dotées en professionnels de santé.

Son modifie ainsi l'article L. 162-9 du code de la sécurité sociale 50 ( * ) en faisant figurer, parmi la liste des matières réglées par ces conventions, les conditions du conventionnement avec l'assurance maladie des sages-femmes et des chirurgiens-dentistes.

Ces conditions - qui ne sont pas énumérées de manière exhaustive par la rédaction proposée - portent, d'une part, sur les modalités de l'exercice et de la formation de ces professionnels, et, d'autre part, sur leur établissement dans les zones d'exercice définies par l'ARS pour la mise en oeuvre des mesures destinées à favoriser une meilleure répartition géographique des professionnels de santé.

Son effectue une modification symétrique à l'article L. 162-12-9 du code de la sécurité sociale, qui porte spécifiquement sur la convention passée entre les organismes d'assurance maladie et les représentants des masseurs-kinésithérapeutes.

L'objet de l'amendement précise qu'il s'agit ainsi de sécuriser juridiquement, en leur donnant une base légale, les démarches conventionnelles déjà mises en place par les infirmiers libéraux 51 ( * ) , les masseurs-kinésithérapeutes 52 ( * ) et les sages-femmes 53 ( * ) .

Il indique par ailleurs que seuls les masseurs-kinésithérapeutes, les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes sont visés par le présent article dans la mesure où seuls ces professionnels ont déjà négocié des dispositions conventionnelles relatives à l'installation dans les zones sur-denses.

II - La position de la commission

Votre commission des affaires sociales rappelle sa préoccupation face au problème des déserts médicaux et son attachement à la mise en place de solutions négociées par la voie conventionnelle. Le Sénat a d'ailleurs adopté, dans le cadre de l'examen du projet de loi de modernisation du système de santé, à l'initiative des rapporteurs de la commission, un article 12 quater A prévoyant une obligation de négocier sur le conventionnement des médecins souhaitant s'installer en zones sous-denses ou sur-denses.

Elle salue l'équilibre de la rédaction proposée, qui consacre l'initiative des professionnels en instituant la régulation de l'installation par voie conventionnelle pour les seuls professionnels ayant déjà engagé des négociations sur ce point. Elle relève que cette rédaction n'oblige en rien les partenaires conventionnels à définir des conditions d'installation reposant sur un zonage géographique pour les professionnels considérés, mais se borne à en ouvrir la possibilité pour assurer la sécurité juridique des outils conventionnels qui pourraient être adoptés en cette matière.

La commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 45 ter (nouveau) (art. L. 162-17-3, L. 165-3 et L. 165-4-1 [nouveau] du code de la sécurité sociale) - Régulation des dépenses

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, tend à mettre en place un mécanisme de régulation unifié des dépenses de dispositifs médicaux par le comité économique des produits de santé.

I - Le dispositif proposé

Cet article, issu d'un amendement adopté à l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Bapt, tend à compléter les missions confiées au comité économique des produits de santé (Ceps) par l'article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale pour prévoir qu'il contribue à l'élaboration de la politique économique des dispositifs médicaux et des autres produits visés à l'article L. 165-1.

Il tend à insérer un nouvel article L. 165-4-1 qui regroupe sous un seul accord-cadre les conventions que le Ceps peut signer avec les entreprises du secteur s'agissant :

- du tarif de responsabilité sur le fondement de l'article L. 165-2 ;

- des prix des tarifs et prestations sur le fondement de l'article L. 165-3 ;

- des volumes des ventes sur le fondement de l'article L. 165-4.

Le contenu prévu pour l'accord-cadre reprend les dispositions et sanctions déjà prévues par l'article L. 165-2. Est cependant ajoutée l'obligation pour l'accord-cadre de prévoir les conditions dans lesquelles le comité met en oeuvre une réduction des tarifs de responsabilité et, le cas échéant, des prix de certaines catégories de produits et prestations mentionnés à l'article L. 165-1 pour garantir la compatibilité du taux d'évolution prévisionnel des dépenses correspondantes avec l'objectif national de dépenses d'assurance maladie mentionné.

II - La position de la commission

Votre commission relève que la dépense liée aux dispositifs médicaux, 7,4 milliards d'euros en 2014, augmente nécessairement avec la mise en oeuvre du « virage ambulatoire » souhaitée par le Gouvernement et le développement de l'hospitalisation à domicile qui, tous deux, nécessitent le recours à des dispositifs médicaux à usage individuel. Leur part croissante au sein de l'Ondam n'est donc pas en soi signe d'une dérive des dépenses mais peut marquer une mutation des mode de prise en charge des malades qui semble correspondre aux progrès de la médecine, aux aspirations de la population et à la double nécessité de soulager les hôpitaux et de réduire le niveau des dépenses d'assurance maladie.

L'apport essentiel de cet article est l'obligation pour le Ceps de « garantir la compatibilité du taux d'évolution prévisionnel des dépenses correspondantes avec l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ».

En cela il rejoint les préconisations de la Cour des comptes qui dans son rapport sur l'application de la loi de financement pour 2014 souhaitait la mise en place d'un système de régulation pour les dispositifs médicaux analogue à celui existant sur le médicament 54 ( * ) .

L'accord entre les industriels du secteur et le Ceps, conclu avec les organisations professionnelles du secteur le 16 décembre 2011 sur le fondement de l'article L. 165-2, prévoit dans ses articles 27 et 28 des mécanismes de révision des tarifs et des prix ainsi que des clauses prix volumes.

Même si cela n'est pas prévu explicitement il y a donc bien un mécanisme de régulation des produits de santé par le Ceps lequel prend nécessairement en compte l'objectif des dépenses d'assurance maladie. Cet article ne fait donc que lui donner une base légale mieux établie.

Dès lors les relations conventionnelles entre les industriels du secteur et le Ceps pourront continuer sur les bases actuelles. En dehors d'un amendement de coordination n° 59 adopté à l'initiative du rapport général votre commission est donc favorable à cet article.

La commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 46 (art. L. 121-7, L. 313-3, L. 314-3-1, L. 314-4, L. 344-4 et L. 345-3 du code de la sécurité sociale, art. L. 160-8 et L. 412-8 du code de la sécurité sociale) - Transfert du financement des établissements et services d'aide par le travail vers l'assurance maladie

Objet : Cet article prévoit le transfert, au 1 er janvier 2017, du financement des dépenses de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail vers l'assurance maladie.

I - Le dispositif proposé


Le mode de financement actuel des dépenses de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail

Les établissements et services d'aide par le travail (Esat) sont des structures médico-sociales au sens de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles. Leurs missions sont définies à l'article L. 344-2 du même code qui prévoit que les Esat accueillent les personnes dont la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) « a constaté que les capacités de travail ne leur permettent, momentanément ou durablement, à temps plein ou à temps partiel, ni de travailler dans une entreprise ordinaire ou dans une entreprise adaptée ou pour le compte d'un centre de distribution de travail à domicile, ni d'exercer une activité professionnelle indépendante. Ils leur offrent des possibilités d'activités diverses à caractère professionnel, ainsi qu'un soutien médico-social et éducatif, en vue de favoriser leur épanouissement personnel et social » .

Les dépenses de fonctionnement des Esat sont prises en charge par le programme 157 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du budget de l'Etat. En 2015, 1,46 milliard d'euros doit y être consacré. S'y ajoute 1,84 million d'euros destiné à financer un plan d'aide à l'investissement (PAI) dans ces structures. L'Etat participe également à la rémunération des travailleurs handicapés accueillis en Esat à travers une aide au poste d'un niveau de 1,3 milliard d'euros en 2015.

Les dotations sont actuellement versées par l'agence de services de paiement (ASP) pour le compte des agences régionales de santé (ARS) qui décident de l'allocation des crédits entre les Esat, sur la base des dotations régionales limitatives définies chaque année par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS).


Le transfert vers l'assurance maladie des dépenses de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail

Le présent article propose de transférer vers l'assurance maladie le financement des dépenses de fonctionnement des Esat. L'objectif est d'assurer plus de cohérence dans le financement des établissements et services pour personnes handicapées et de laisser davantage de marges de manoeuvre aux ARS pour assurer la gestion des crédits.

Le du I supprime ainsi les dépenses de fonctionnement des Esat de la liste, fixée à l'article L. 121-7 du code de l'action sociale et des familles, des dépenses prises en charge par l'Etat au titre de l'aide sociale. Le du I procède de même à l'article L. 314-4 qui définit les modalités de financement des établissements et services sociaux et médico-sociaux qui sont à la charge de l'Etat. Toute référence aux « centres d'aide par le travail » est également supprimée par le du I à l'article L. 345-3 qui prévoit les conditions d'accès à l'aide sociale. Le du I procède également, par coordination, à la suppression de la référence au financement par l'Etat des « centres d'aide par le travail » à l'article L. 344-4. Ce même 6° prévoit que leurs « charges de fonctionnement de l'activité sociale » sont financées par l'assurance maladie. Il substitue par ailleurs aux termes « centres d'aide par le travail » une référence au a) du 5° du I de l'article L. 312-1.

Le du I intègre les Esat dans la liste des établissements et services médico-sociaux qui relèvent de l'Objectif global de dépenses (OGD) géré par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Le du II prévoit, à l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, que les frais de fonctionnement liés à l'activité sociale ou médico-sociale des Esat sont pris en charge par l'assurance maladie, au même titre que les frais des établissements et services pour enfants et adolescents handicapés. Ce changement emporte une conséquence pratique : la compétence du versement des dotations aux Esat est transférée de l'ASP vers les caisses primaires d'assurance maladie (Cpam), ce qui va augmenter la charge de travail qui pèse sur ces dernières.

Enfin, le du I opère un toilettage rédactionnel à l'article L. 313-3 qui dispose que c'est le directeur général de l'ARS qui est compétent pour autoriser les Esat.

Le III du présent article précise que le transfert du financement des Esat de l'Etat vers l'assurance maladie intervient le 1 er janvier 2017.


La couverture des mises en situation des travailleurs en Esat au titre des accidents du travail et maladies professionnelles

Le du II doit quant à lui permettre de sécuriser les périodes de mise en situation des travailleurs en Esat en prévoyant que les travailleurs concernés par ces mises en situation sont couverts au titre des accidents du travail et maladies professionnelles.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Sur proposition de sa rapporteure Joëlle Huillier, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels.

III - La position de la commission

Votre commission n'a pas d'opposition de principe au transfert vers l'assurance maladie des dépenses de fonctionnement des Esat. Elle estime au contraire qu'une telle mesure, si elle permet véritablement d'assurer davantage de souplesse aux organismes gestionnaires ainsi qu'aux ARS, mérite d'être soutenue.

Votre commission est en revanche inquiète quant aux modalités concrètes de mise en oeuvre de la réforme et aux effets indésirables qui pourraient apparaître au cours des exercices à venir.

En premier lieu, votre commission juge regrettable que le Parlement soit obligé de se prononcer à l'automne 2015 sur le principe d'une réforme dont les contours financiers restent entièrement à définir. Seules des hypothèses peuvent, pour le moment, être formulées. La plus probable voudrait qu'en 2017, l'Ondam médico-social soit abondé à hauteur d'environ 1,5 milliard d'euros, somme qui correspond aux financements qui sont aujourd'hui alloués par l'Etat pour le fonctionnement des Esat. Cela correspondrait à une augmentation d'environ 8 % du niveau de l'enveloppe. Comme le souligne la fiche d'évaluation préalable du présent article, « il faudrait donc imaginer le transfert d'une recette actuelle de l'Etat » dont « le volume et la dynamique soi[e]nt en phase avec le rythme de progression des besoins de cette catégorie d'établissements ».

D'ici 2017, le Gouvernement devra donc « imaginer » quelle recette pourrait être transférée à l'assurance maladie et travailler à une correcte prise en compte des besoins de fonctionnement des Esat pour que la recette ainsi transférée soit suffisamment « dynamique » .

Si tel n'était pas le cas, un deuxième scénario, plus problématique, consisterait à faire appel aux ressources propres de la CNSA de façon à augmenter l'OGD. Une telle solution risquerait de poser problème si elle se faisait au détriment de la compensation, par la CNSA, des dépenses relatives à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et à la prestation de compensation du handicap (PCH).

Le Gouvernement indique vouloir prendre en compte « le rythme de progression des besoins de cette catégorie d'établissements » . Il est regrettable qu'il ne le fasse pas dès le projet de loi de finances pour 2016 afin que l'enveloppe qui sera transférée en 2017 corresponde aux besoins de fonctionnement mais également d'investissement qui sont effectivement constatés dans les Esat.

Votre commission s'interroge en second lieu sur la cohérence, à terme, de la réforme proposée. Les Esat occupent une place à part dans le secteur médico-social. Si l'Etat finance leurs dépenses de fonctionnement, il contribue également à garantir un niveau minimum de rémunération aux travailleurs concernés à travers l'aide au poste. Comme le souligne la fiche d'évaluation préalable, transférer cette enveloppe à l'assurance maladie n'aurait pas de sens dans la mesure où l'aide au poste n'est pas un élément de la tarification des Esat. Pour autant, le niveau de l'aide au poste est directement lié au nombre de places en Esat et, par conséquent, à leurs dépenses de fonctionnement. Or, dès 2017, les deux enveloppes - dépenses de fonctionnement et aide au poste - seront placées sous la responsabilité de deux financeurs différents - assurance maladie et Etat. Or rien ne garantit qu'elles évoluent, à l'avenir, dans les mêmes proportions.

Sous ces réserves, la commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 47 (art. L. 313-12-2 et L. 314-7 du code de l'action sociale et des familles, art. L. 162-24-2 [nouveau] du code de la sécurité sociale) - Généralisation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens dans les établissements et services pour personnes handicapées

Objet : Cet article rend obligatoire la conclusion de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens par les gestionnaires d'établissements et services pour personnes handicapées, lorsque ces derniers relèvent de la compétence tarifaire du directeur général de l'ARS, et fixe à un an le délai de prescription de l'action en paiement des prestations et soins médicaux délivrés dans ces services.

I - Le dispositif proposé


La généralisation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens pour certains types d'établissements et services pour personnes handicapées

Créé par la loi « HPST » du 21 juillet 2009 55 ( * ) , l'article L. 232-12-2 du code de l'action sociale et des familles rend obligatoire la signature de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom) par les établissements et services relevant de la compétence tarifaire exclusive du directeur général de l'ARS ou du représentant de l'Etat dans la région, lorsqu'ils atteignent un seuil d'activité devant être fixé par arrêté ministériel. La définition du seuil d'activité pertinent s'étant avérée particulièrement complexe, cet arrêté n'a jamais été publié.

Le du I du présent article propose une nouvelle rédaction du premier alinéa de cet article L. 232-12-2. La conclusion d'un Cpom sera obligatoire quelle que soit la taille de la structure concernée. Le champ de l'article est cependant réduit aux seuls établissements et services intervenant auprès des personnes handicapées et relevant de la compétence tarifaire exclusive du directeur général de l'ARS.

Un renvoi à l'article L. 313-11 du code de l'action sociale et des familles permet de faire entrer ces contrats dans le droit commun des Cpom. Il est également précisé que les contrats devront définir « des objectifs en matière d'activité et de qualité de prise en charge » et que leur conclusion entraînera « l'application d'une tarification selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat » . Cette formule, particulièrement large, doit être comprise comme signifiant que les structures ayant conclu un Cpom basculeront automatiquement vers un financement par dotation globale.

Sont concernés, dans le texte initial :

- les instituts médico-éducatifs (IME), instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (Itep), centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP), services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad), qui relèvent du 2° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ;

- les établissements ou services de réadaptation, de préorientation et de rééducation professionnelle qui relèvent du b) du 5° de ce même I ;

- les foyers d'accueil médicalisé (FAM), services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah), services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), maisons d'accueil spécialisé (MAS), qui relèvent du 7° de ce I.

Les directeurs généraux d'ARS auront à établir la liste des établissements et services avec lesquels ils doivent contractualiser ainsi qu'un calendrier de signature des Cpom. Ce calendrier, qui devra être mis à jour chaque année, a vocation à porter sur une période de six ans à compter du 1 er janvier 2016.


L'évolution des règles de tarification des établissements et services soumis à autorisation

Le du I modifie l'article L. 314-7 du code de l'action sociale et des familles afin d'indiquer que la décision de tarification prise au titre d'une année doit fixer des tarifs de reconduction provisoires applicables au 1 er janvier de l'année qui suit. Si aucun tarif de reconduction n'a été fixé et si les tarifs n'ont pas été arrêtés au 1 er janvier, alors les recettes relatives à la facturation de ces tarifs sont liquidées et perçues dans les conditions en vigueur au cours de l'exercice précédent, jusqu'à ce qu'intervienne la décision devant fixer le montant de ces tarifs.

En d'autres termes, chaque décision de tarification devra prévoir, dans des conditions précisées par décret, un tarif de reconduction provisoire destiné à couvrir la période au cours de laquelle ne s'appliquent plus les tarifs de l'exercice précédent sans qu'ait été prise la décision de tarification pour l'exercice en cours. Selon la fiche d'évaluation préalable du présent article, cette mesure doit permettre d'éviter des avances de trésorerie de la part de l'assurance maladie de l'ordre de 100 millions d'euros chaque année. Elle est également présentée comme susceptible de contribuer à un meilleur pilotage des établissements et services eux-mêmes.

Sont visés, en premier lieu, les établissements et services pour personnes handicapés auxquels va s'appliquer la nouvelle rédaction de l'article L. 232-12-2 du code de l'action sociale et des familles, dans l'attente de la signature des Cpom. Dans la mesure où l'article L. 314-7 du même code concerne l'ensemble des établissements et services autorisés, tous ceux qui font aujourd'hui l'objet d'une tarification au prix de journée sont concernés.


Les règles de prescription de l'action en paiement

Le II du présent article prévoit, enfin, l'introduction dans le code de la sécurité sociale d'un article L. 162-24-2 [nouveau] disposant que l'action exercée par les structures mentionnées aux 2°, b) du 5° et 7° du I de l'article L. 312-1 pour le paiement des prestations et soins médicaux à la charge de l'assurance maladie se prescrit une fois passé un délai d'un an suivant le premier jour du mois suivant celui auquel se rapporte la prestation facturée.

Ce délai s'applique également aux actions intentées par l'organisme payeur pour les prestations indues, à compter de la date de paiement des sommes indues. Ces dispositions ne sont pas applicables en cas de fraude ou de fausse déclaration.

Un décret devra venir préciser les modalités de reversement des sommes payées par la caisse de rattachement aux organismes d'assurance maladie ainsi que indus récupérés.

La commission de recours amiable de la caisse de rattachement est indiquée comme compétente pour traiter des réclamations relatives à ces sommes.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Outre quatre amendements rédactionnels, l'Assemblée nationale a adopté six amendements visant à :

- inclure les établissements et services d'aide par le travail (Esat) dans le champ de la contractualisation, mesure cohérente avec le transfert à l'assurance maladie du financement de ces structures, prévu à l'article 46 ; il est dès lors fait mention de l'ensemble des établissements et services mentionnés aux 5° du I de l'article L. 312-1 et non des seuls établissements et services mentionnés au b) de ce 5° ;

- préciser que les établissements concernés par les Cpom relèvent de la tarification « exclusive ou conjointe » du directeur général de l'ARS et indiquer que, le cas échéant, l'arrêté fixant le calendrier de signature des Cpom est pris de façon conjointe avec le président du conseil départemental ; il s'agit de prévoir explicitement le cas de structures telles que les FAM et les Samsah dont le financement est partagé entre l'assurance maladie et les départements ;

- prévoir l'utilisation de l'état des prévisions de recettes et de dépenses (EPRD) par les établissements et services signataires des Cpom, à compter du 1 er janvier 2017 ;

- s'agissant de la prescription de l'action en paiement, prévoir que celle-ci intervient trois mois après la notification de la décision d'orientation de la MDPH lorsque cette échéance est plus tardive.

III - La position de la commission

Votre commission ne s'oppose pas à la généralisation de la signature de Cpom proposée par le présent article pour les établissements et services accueillant des personnes handicapées. Elle estime cette mesure cohérente avec les dispositions de l'article 40 bis du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement qui concerne les Cpom signés par les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Votre commission demeure cependant attentive à la façon dont ces deux dispositifs s'articuleront in fine , l'article 40 bis disposant qu'un même Cpom peut être commun à plusieurs établissements et services placés sous la responsabilité d'un même gestionnaire. Elle note également que si les Ssiad intervenant auprès des personnes handicapées auront l'obligation de signer un Cpom, tel n'est pas le cas des Ssiad intervenant auprès des personnes âgées, ce qui risque de poser difficulté dans les cas où une même structure intervient dans les deux champs. Votre commission estime par ailleurs nécessaire d'envisager, à terme, l'intégration des centres d'action médico-sociale précoce (Camsp) dans le champ de la contractualisation obligatoire.

Elle note également qu'aucun accompagnement financier spécifique n'est prévu pour la mise en oeuvre de la réforme, ce qui risque de limiter les marges de manoeuvre des contractants pour définir ensemble des objectifs de qualité et d'amélioration de la prise en charge.

S'agissant des dispositions relatives à la mise en place d'un tarif de reconduction provisoire ainsi qu'à la prescription de l'action en paiement, qui doivent permettre une meilleure maîtrise des dépenses d'assurance maladie, votre commission note qu'elles auraient pu être aisément détachées de ce qui constitue le coeur du présent article - la généralisation des Cpom - et que l'une d'entre elles a été censurée pour des raisons de forme par le Conseil constitutionnel dans une précédente loi de financement de la sécurité sociale.

Sur proposition de son rapporteur pour le secteur médico-social, votre commission a adopté trois amendements rédactionnels n° 60, 61 et 62 .

La commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 47 bis (nouveau) - Demande de rapport sur la continuité des soins entre le domicile et les établissements ou services médico-sociaux pour personnes âgées

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, demande au Gouvernement un rapport sur la continuité des soins entre le domicile et les établissements ou services médico-sociaux pour personnes âgées.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article, inséré à l'initiative de Joëlle Huillier, rapporteure pour le secteur médico-social, demande au Gouvernement un rapport sur la continuité des soins entre le domicile et les établissements et services médico-sociaux pour personnes âgées. Le rapport doit être remis au Parlement dans un délai d'un an suivant la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale.

L'objectif est notamment d'étudier la possibilité d'une intégration dans le forfait soins des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) de certains dispositifs médicaux. Le niveau de celui-ci s'avèrerait en effet insuffisants pour que des dispositifs de traitement de la douleur tels que les pompes à morphine puissent y être intégrés. Près de 200 personnes se verraient ainsi contraintes d'arrêter leur traitement en Ehpad ou de le continuer à l'hôpital ou à domicile, solution qui nuit à la continuité des soins et s'avère coûteuse pour l'assurance maladie.

II - La position de la commission

Votre commission prend acte de la présente demande de rapport.

Elle vous demande d'adopter cet article sans modification.


* 43 Par arrêté en date du 12 janvier 2015.

* 44 L'évaluation préalable indique que le niveau moyen de l'augmentation du nombre de consultations permise par la présence d'un auxiliaire médical est estimé à 30 % « pour un cabinet organisé de façon satisfaisante ».

* 45 Par exemple, le dépistage de la rétinopathie diabétique.

* 46 Prévu par le II de l'article L. 162-14-1.

* 47 En application de l'article R. 4127-76 du code de la santé publique.

* 48 Réponse du ministère chargé des personnes âgées et de l'autonomie à une question orale sans débat,

posée par Mme Catherine Proraccia, sénatrice du Val-de-Marne (n° 0421S, JO Sénat du 5 juin 2013, page 5337).

* 49 Rapport d'information n° 2837, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 juin 2015, fait par Mme Catherine Lemorton, au nom de la commission des affaires sociales, en conclusion des travaux de la mission sur l'organisation de la permanence des soins.

* 50 Cet article prévoit les conventions passées entre l'union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) et les représentants des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux.

* 51 Avenant n° 1 à la convention nationale des infirmiers libéraux, conclu le 4 septembre 2008.

* 52 Avenant n° 3 à la convention nationale entre l'Uncam et la fédération française des masseurs-rééducateurs, conclu le 30 novembre 2011 et approuvé par un arrêté du 10 janvier 2012.

* 53 Avenant n° 1 à la convention nationale entre l'Uncam, l'organisation nationale des syndicats de sages-femmes et l'union nationale et syndicale des sages-femmes, conclu le 9 janvier 2012 et approuvé par un arrêté du 12 mars 2012.

* 54 « Les dispositifs médicaux une dépense non maîtrisée », chapitre X du rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2014.

* 55 Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

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