TITRE II
DISPOSITIONS RENFORÇANT
LES GARANTIES DE LA PROCÉDURE PÉNALE
ET SIMPLIFIANT SON DÉROULEMENT
CHAPITRE IER
Dispositions renforçant
les garanties de la procédure pénale

Article 22 (art. 39-3 [nouveau] du code de procédure pénale) - Missions du procureur de la République en sa qualité de directeur de la police judiciaire

L'article 22 crée un article 39-3 au sein du code de procédure pénale 231 ( * ) afin de préciser le cadre général dans lequel le procureur de la République exerce ses attributions de direction de la police judiciaire.

Alors que l'article 12 du même code confie explicitement cette mission de direction de la police judiciaire au procureur de la République 232 ( * ) et que l'article 41 apporte des précisions sur les conditions dans lesquelles il « procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale », aucune disposition spécifique 233 ( * ) ne détaille le cadre général de cette mission de direction de la police judiciaire.

Le premier alinéa de l'article 39-3, qui n'a fait l'objet que de modifications rédactionnelles de la part de l'Assemblée nationale, précise que, dans le cadre de ses attributions de direction de la police judiciaire, le procureur de la République, « sans préjudice des instructions générales ou particulières qu'il adresse aux enquêteurs », contrôle :

- la légalité des moyens mis en oeuvre par ces enquêteurs ;

- la proportionnalité des actes d'investigation au regard de la nature et de la gravité des faits ;

- l'orientation donnée à l'enquête ;

- la qualité de l'enquête.

Son deuxième alinéa dispose que le procureur veille par ailleurs à ce que les investigations :

- tendent à la manifestation de la vérité ;

- soient accomplies à charge et à décharge dans le respect des droits de la victime, du plaignant selon un ajout issu d'un amendement adopté par la commission des lois à l'initiative de sa rapporteure, et de la personne suspectée.

Pour utiles que puissent être de telles dispositions, dont la portée est essentiellement symbolique 234 ( * ) , votre rapporteur n'en relève pas moins qu'elles ne sauraient faire oublier le fait que l'enjeu principal pour le ministère public réside aujourd'hui dans le manque de garanties d'indépendance dont il dispose à l'heure actuelle au regard des exigences de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme 235 ( * ) . Dans ces conditions, votre rapporteur rappelle la nécessité pour l'Assemblée nationale, de reprendre le cours de la discussion sur la réforme du Conseil supérieur de la magistrature 236 ( * ) dont l'un des objectifs est de donner au parquet de véritables garanties d'indépendance en prévoyant la nomination des parquetiers et l'exercice du pouvoir disciplinaire sur son avis conforme. À cet égard, il se félicite que le Gouvernement ait enfin décidé d'inscrire la deuxième lecture de ce texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le 6 avril prochain.

Sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement rédactionnel COM-108 sur cet article.

Votre commission a adopté l'article 22 ainsi modifié.

Article 23 (art. 229-1 [nouveau] du code de procédure pénale) - Procédure disciplinaire d'urgence applicable aux officiers de police judiciaire

L'article 23 propose la création d'une procédure disciplinaire d'urgence à l'encontre d'un officier ou agent de police judiciaire en cas de manquement professionnel grave ou d'atteinte grave à l'honneur ou à la probité ayant une incidence sur la capacité d'exercice des missions de police judiciaire. À cet effet, il insère un nouvel article 229-1 dans le code de procédure pénale.

Parmi les personnes exerçant des missions de police judiciaire, il convient de distinguer :

- les officiers de police judiciaire, définis à l'article 16 du code de procédure pénale ;

- les agents de police judiciaire, définis aux articles 20 et 20-1 du même code ;

- les agents de police judiciaire adjoints, régis par l'article 21 du code de procédure pénale ;

- les fonctionnaires et agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire (articles 22 à 29-1 du code de procédure pénale).

Alors que la qualité d'agent de police judiciaire est attribuée, de par la loi, aux fonctionnaires cités par les articles 20 et 20-1, les fonctionnaires mentionnés à l'article 16 ne peuvent « exercer effectivement les attributions attachées à leur qualité d'officier de police judiciaire ni se prévaloir de cette qualité que s'ils sont affectés à un emploi comportant cet exercice et en vertu d'une décision du procureur général près la cour d'appel les y habilitant personnellement ».

En application des articles 13 et 38 du code de procédure pénale qui placent la police judiciaire sous la surveillance du procureur général, ce dernier peut, dans les conditions fixées aux articles R. 15-2 et R. 15-6, retirer ou suspendre l'habilitation d'officier de police judiciaire .

Ce retrait ou cette suspension d'une durée maximale de deux ans est décidé par arrêté du procureur général pris soit d'office, soit sur la proposition du chef de service. Avant de prendre sa décision, le procureur général est tenu d'entendre préalablement l'officier de police judiciaire qui peut prendre connaissance du dossier relatif aux faits qui lui sont reprochés et se faire assister d'un conseil de son choix.

En outre, le code de procédure pénale ouvre deux voies de recours à l'encontre d'une telle décision 237 ( * ) :

- dans le mois qui suit la notification de la décision de suspension ou de retrait d'habilitation, l'officier de police judiciaire peut demander au procureur général de rapporter cette décision. Le procureur général doit statuer dans un délai d'un mois et, à défaut, son silence vaut rejet de la demande (article 16-1) ;

- dans le délai d'un mois à partir du rejet explicite ou implicite de la demande auprès du procureur général, l'officier de police judiciaire peut former un recours devant une commission composée de trois magistrats du siège de la Cour de cassation ayant le grade de président de chambre ou de conseiller (article 16-2).

Le contrôle de la police judiciaire relève pour sa part de la chambre de l'instruction, dans les conditions prévues aux articles 224 à 230 du code de procédure pénale. Les procédures qui y sont définies sont applicables à tous les fonctionnaires civils ou militaires ayant la qualité d'officier ou d'agent de police judiciaire, mais également aux agents de police judiciaire adjoints ainsi qu'aux fonctionnaires et agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire.

En vertu de ces dispositions, la chambre de l'instruction - qui peut être saisie par le procureur général, par son président ou d'office à l'occasion de l'examen d'une procédure qui lui est soumise - peut avoir à connaître des manquements déontologiques ou professionnels des fonctionnaires et agents exerçant des fonctions de police judiciaire.

Une fois saisie, la chambre de l'instruction fait procéder à une enquête et entend le procureur général ainsi que le fonctionnaire en cause. Celui-ci doit avoir été préalablement mis à même de prendre connaissance de son dossier de police judiciaire tenu au parquet général de la cour d'appel et peut se faire assister par un avocat.

Sans préjudice des sanctions disciplinaires, la chambre de l'instruction peut adresser à la personne mise en cause des observations ou décider qu'il ne pourra, temporairement ou définitivement , exercer, soit dans le ressort de la cour d'appel, soit sur tout l'ensemble du territoire, ses fonctions d'officier de police judiciaire et de délégué du juge d'instruction ou ses fonctions d'agent de police judiciaire. Cette décision prend effet immédiatement. Les décisions prises par la chambre de l'instruction contre les officiers ou agents de police judiciaire sont notifiées, à la diligence du procureur général, aux autorités dont ils dépendent.

Enfin, si la chambre de l'instruction estime que la personne a commis une infraction à la loi pénale, elle ordonne en outre la transmission du dossier au procureur général à toutes fins qu'il lui appartiendra d'apprécier.


La création d'une procédure de suspension d'urgence

En complément des procédures décrites ci-dessus, le projet de loi propose de créer une nouvelle procédure de suspension d'urgence applicable à l'encontre des fonctionnaires ayant la qualité d'officier ou d'agent de police judiciaire en cas de « manquement professionnel grave ou d'atteinte grave à l'honneur ou à la probité » ayant une incidence sur la capacité d'exercice des missions de police judiciaire.

Cette procédure permettrait ainsi au président de la chambre de l'instruction, saisi par le procureur général compétent, de suspendre immédiatement, pour une durée maximale d'un mois, la personne de sa capacité d'exercer des fonctions de police judiciaire. Cette décision serait d'effet immédiat sans procédure contradictoire. Elle serait ainsi notifiée, à la diligence du procureur général, aux autorités dont dépend l'intéressé.

L'utilisation de cette procédure d'urgence vaudrait saisine de la chambre de l'instruction au titre de la procédure prévue par les articles 224 et suivants du code de procédure pénale.

D'après les précisions fournies dans l'étude d'impact du projet de loi, de tels compléments à la législation seraient justifiés par le fait que la procédure disciplinaire relevant de la chambre de l'instruction serait peu mise en oeuvre tant à l'encontre des officiers que des agents de police judiciaire. Cette procédure se juxtaposerait souvent aux procédures judiciaires relevant du procureur de la République et disciplinaires relevant de l'autorité administrative. Dans ces conditions, l'étude d'impact souligne qu'il n'est pas « rare d'observer un décalage temporel, parfois regrettable entre la mise en cause d'un officier ou d'un agent de police judiciaire pour des manquements professionnels ou des atteintes à l'honneur ou à la probité et la sanction prononcée par la chambre de l'instruction ».

Par ailleurs, il est fait valoir qu'il n'existe que cette procédure lourde pour les agents de police judiciaire et que le procureur général ne peut exercer ses missions de surveillance à leur égard.

Votre rapporteur s'est interrogé sur l'opportunité de confier au procureur général, et non au président de la chambre de l'instruction, cette possibilité de suspension temporaire. Toutefois, comme le souligne l'étude d'impact du projet de loi, il n'existe pas à l'heure actuelle de procédure d'habilitation pour exercer les fonctions d'agent de police judiciaire. Une telle création aurait au demeurant constitué un alourdissement substantiel des tâches administratives confiées aux parquets généraux. Dès lors, il apparaît cohérent que les procureurs généraux demeurent compétents pour les habilitations qu'ils délivrent aux officiers de police judiciaire. Dans le cas de figure où un procureur général exerce ses prérogatives en la matière, qu'il s'agisse d'un retrait ou d'une suspension, l'officier conserve au demeurant la capacité d'exercer des fonctions judiciaires puisqu'il demeure agent de police judiciaire. Pour les cas les plus graves, qui peuvent mener à la suspension voire au retrait définitif de toute fonction de police judiciaire (y compris donc de la qualité d'agent de police judiciaire), il apparaît en conséquence logique que cette compétence demeure du ressort de la chambre de l'instruction.

Après avoir adopté un amendement rédactionnel COM-109 de son rapporteur, votre commission a adopté l'article 23 ainsi modifié.

Article 24 (art. 77-2, 77-3 et 393 du code de procédure pénale) - Introduction d'une procédure contradictoire au sein de l'enquête préliminaire

L'article 24 du projet de loi propose d'introduire une procédure contradictoire au sein des enquêtes préliminaires. Le texte du projet de loi initial avait, dans un premier temps, été profondément modifié par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de sa rapporteure. Le Gouvernement s'étant opposé aux modifications proposées, les députés ont en définitive adopté un amendement de rédaction globale de l'article présenté par ce dernier, revenant à une version du texte plus proche de celle d'origine.

Dans sa version initiale, l'article 24 institue une procédure contradictoire dans les enquêtes durant plus d'un an, sur demande des personnes qui ont fait l'objet d'une mesure d'audition libre, de garde à vue, ou de saisie de leurs biens, ou sur demande de leurs avocats, cette demande pouvant être faite au procureur de la République six mois après cette mesure.

Avant de prendre sa décision sur l'action publique, à moins qu'il ne décide d'un classement sans suite ou de l'ouverture d'une information, ce magistrat serait alors tenu de communiquer à ces personnes, ainsi qu'à la victime l'intégralité du dossier de la procédure, pour recevoir leurs observations et leurs éventuelles demandes d'actes.

Cette communication du dossier et ce recueil d'observations pourrait également intervenir à tout moment en cours de procédure, même en l'absence de demande, à l'initiative du procureur.

Le procureur apprécierait les suites à apporter aux observations et demandes d'actes, étant précisé qu'il en informe les intéressés et que sa décision est insusceptible de recours.

• Les modifications initialement envisagées par la commission des lois de l'Assemblée nationale

Sur proposition de sa rapporteure, la commission des lois avait adopté un amendement modifiant profondément le dispositif envisagé par le Gouvernement.

Dans son rapport, Mme Colette Capdevielle a ainsi considéré que, bien que nécessaire, l'introduction du contradictoire au cours de l'enquête préliminaire selon les modalités proposées par le Gouvernement soulevait plusieurs interrogations.

Les interrogations de la commission des lois de l'Assemblée nationale

- Comment une personne apprend-elle qu'elle fait l'objet d'une enquête préliminaire ? Comment, une fois informée, peut-elle savoir que l'enquête en question a commencé depuis plus d'un an et qu'elle est autorisée à solliciter la communication du dossier ?

- Le droit d'accès au dossier peut-il réellement prospérer dès lors que le procureur de la République est seul juge du caractère communicable de l'enquête, que sa décision est discrétionnaire et qu'elle ne peut faire l'objet d'aucun recours ? Ne sera-t-il pas tentant, pour des magistrats par ailleurs confrontés à des tâches extrêmement nombreuses et prenantes, de garder le silence et de ne jamais considérer l'enquête en état d'être communiquée ?

- Surtout, dans les enquêtes complexes sur des sujets tels que le terrorisme ou les délits financiers, il est fréquent que de nombreuses personnes fassent l'objet d'investigations sans pour autant être renvoyées devant la juridiction de jugement. Est-il cohérent de donner accès au dossier, voire d'offrir la possibilité de solliciter des actes et de formuler un avis sur l'enquête, à des personnes qui ne seront même pas parties au procès et qui, contrairement à l'instruction, ne bénéficient d'aucun statut comparable à celui de témoin assisté (238) ou de mis en examen ?

Source : Rapport n° 3515 de Mme Colette Capdevielle et M. Pascal Popelin, fait au nom de la commission des lois, sur le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale

La commission des lois, s'inspirant de la rédaction de l'article 175 du code de procédure pénale relatif à la mise en état de l'instruction avant règlement, avait tout d'abord prévu que son dispositif de contradictoire n'interviendrait qu'une fois que le procureur estime l'enquête terminée, jugeant que cette condition, qui relève certes de l'appréciation discrétionnaire du procureur, était objectivement observable en ce qu'elle précède la clôture de la phase d'enquête pour donner une suite aux investigations accomplies.

Elle a ensuite supprimé toute référence à un délai afin de simplifier les démarches et créer « les conditions d'une égalité entre les enquêtes longues et les dossiers traités plus brièvement - ces derniers échappant à tout contradictoire dans la version proposée par le Gouvernement » et prévu que la consultation ne serait pas non plus « conditionnée à une quelconque mesure d'enquête privative ou restrictive de liberté, la Commission ayant estimé fortement improbable que des poursuites puissent être engagées à l'encontre d'une personne n'ayant jamais fait l'objet de la moindre audition par les enquêteurs ».

Enfin, la commission des lois a limité la communication « à la victime, au plaignant et à la seule personne que le procureur de la République envisage de poursuivre, donc aux seules parties au procès - sauf à ce qu'il recoure à la procédure du défèrement contradictoire » et, outre la communication, maintenu la liberté pour le procureur de la République de communiquer, à tout moment, tout ou partie de la procédure.


Le rétablissement en séance de l'article 20 dans une version proche du texte initial

Le Gouvernement a considéré que les dispositions adoptées par la commission des lois constituaient « un bouleversement majeur, totalement inapplicable et sur le fond profondément injustifié, de la procédure pénale » 238 ( * ) .

Il a d'abord souligné que ce dispositif était de nature à obliger le procureur, avant toute décision de poursuite à l'issue d'une enquête préliminaire, notamment avant une convocation par officier de police judiciaire, une citation directe, une ordonnance pénale, une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, ou d'ouverture d'information, de communiquer le dossier à la personne suspecte et la victime, et d'attendre un mois leur éventuelles observations avant de prendre sa décision.

Cette communication du dossier et ce délai d'attente d'un mois seraient ainsi applicables, au vu de l'évaluation réalisée par le ministère de la justice, dans environ 375 000 procédures chaque année, et l'impact de cette réforme en ETP de magistrats du parquet et fonctionnaires du greffe serait donc extrêmement important.

Le Gouvernement a ensuite fait valoir qu'une telle réforme « mettrait par ailleurs totalement fin, hors le cas limité de la flagrance, à la pratique du traitement en temps réel, en interdisant au procureur de décider du mode de poursuites, à l'issue de l'audition de la personne au cours de l'enquête, notamment le recours à la COPJ [convocation par officier de police judiciaire] qui intervient dans 150 000 procédures chaque année ».

Puis, il a ensuite souligné que si, après la communication de l'entier dossier - qui ne pourra pas intervenir immédiatement, sauf à créer une nouvelle charge inacceptable pour les services enquêteurs, et après le délai d'observations d'un mois, le procureur décide cependant d'une COPJ, il appartiendra aux forces de l'ordre de convoquer à nouveau la personne pour lui signifier ces poursuites, ce qui aggravera encore le poids de leur tâche. L'impact de la réforme sur les forces de police et de gendarmerie serait donc également extrêmement important. Si le procureur renonce à une COPJ et décide d'une citation directe par un huissier, l'impact sur les frais de justice sera alors considérable, puisque 150 000 citations devraient s'ajouter aux 30 000 citations annuelles.

Enfin, sur le fond, dans la très grande majorité des procédures, dans lesquelles les faits sont soit simples soit non contestés, cette phrase contradictoire obligatoire et systématique ne sera d'aucune utilité pour l'exercice des droits de la défense.

Le Gouvernement a en conséquence estimé « indispensable de revenir à un dispositif plus proche de celui du projet initial », tout en prenant en compte certaines « des interrogations et critiques pertinentes de la commission des lois ».

Les modifications apportées par cet amendement, adopté par les députés, sont les suivantes :

En premier lieu, le critère de l'enquête préliminaire de plus d'un an, condition du reste difficile à connaître par la personne, n'est pas retenu. En revanche est maintenue la condition essentielle consistant en une demande formée par une personne mise en cause six mois auparavant au cours de l'enquête. Cette condition est doublement indispensable, d'une part pour s'assurer que ce dispositif ne s'appliquera que si la personne suspectée estime nécessaire de faire des observations, d'autre part pour tenir compte des contraintes matérielles des enquêteurs et des parquets qui exigent de leur donner un délai d'au moins six mois pour clôturer et enquête et prendre une décision sur l'action publique sans imposer une possible phase contradictoire. Ce délai de six mois sera du reste une incitation pour clôturer rapidement les enquêtes simples, et son non-respect constituera un indice d'une possible complexité du dossier, justifiant donc l'ouverture, à la demande, d'une phase contradictoire.

En deuxième lieu, en cas de demande, la communication du dossier ne devra intervenir, comme le proposait le texte de la commission, que lorsque l'enquête sera terminée, critère clair et objectif, similaire à celui de l'avis de fin d'information prévu par l'article 175, et non lorsque le procureur estimera la procédure communicable.

En troisième lieu, la communication ne devra être faite qu'aux personnes que le parquet envisage de poursuivre, ainsi que le précisait le texte de la commission. Plus précisément, ce ne sera que si le parquet envisage des poursuites par COPJ ou citation directe que la communication sera nécessaire. En effet, dans tous les autres cas, elle n'est pas justifiée : en cas de défèrement, l'article 392 prévoit déjà une procédure contradictoire ; en cas d'ouverture d'information, la procédure devient alors par nature totalement contradictoire ; en cas de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), la procédure est non seulement contradictoire, mais exige l'accord de la personne ; enfin, en cas d'ordonnance pénale, outre que cette procédure s'applique dans des affaires simples, l'ordonnance est susceptible d'opposition par la personne.

En quatrième lieu, ce dispositif ne s'appliquera que pour les infractions punies d'une peine privative de liberté, car il serait excessif de le prévoir non seulement pour des contraventions, mais également pour des délits non punis d'une peine d'emprisonnement, délits qui ne permettent ni le placement en garde à vue, ni l'assistance d'un avocat au cours de l'audition libre.

En cinquième lieu, il est précisé que le dispositif s'applique à la victime ayant déposé plainte, ce qui est plus exact et cohérent que le projet, qui parlait de façon générale de la victime, même en l'absence de plainte, ou que le texte de la commission, qui parlait à la fois de la victime et du plaignant. En effet, au cours de l'instruction, le contradictoire ne s'applique qu'à la victime qui s'est constituée partie civile, et il est donc logique qu'il s'applique au cours de l'enquête à la victime qui a déposé plainte.

En sixième lieu, le droit à l'accès au dossier en cas de poursuite de l'enquête et de nouvelle audition est mieux précisé, dans un IV de l'article 77-2 : ce droit ne s'appliquera que si la personne qui a fait la demande a déjà été entendue, en audition libre ou garde à vue, et pas si elle a simplement fait l'objet d'une perquisition ou d'une saisie, qui peut en effet concerner une personne en fuite et qui n'est interpellée que six mois plus tard et qui aurait alors communication du dossier dès sa première audition ; il est précisé qu'à défaut d'information sur la mise à disposition du dossier cinq jours ouvrables avant l'audition, la personne pourra demander le report de celle-ci, ce qui, à défaut d'une telle demande, évitera une annulation de la procédure ; ces règles s'appliqueront en cas de nouvelle audition libre, mais pas en en cas de garde à vue sans convocation préalable, donc faisant suite à une interpellation, car la personne ne peut évidemment être informée cinq jours auparavant, et dans ce cas sera uniquement prévu l'accès au dossier.

Il est par ailleurs précisé que la demande est en principe adressée au procureur saisi des faits, et uniquement à défaut, si cette information n'est pas connue de la personne, au procureur de la République dans le ressort duquel l'enquête a été menée.

Enfin, les modalités d'application dans le temps des nouvelles dispositions sont précisées. La demande de règlement contradictoire de l'enquête ne pourra être formée que par les personnes ayant fait l'objet d'un acte de procédure après l'entrée en vigueur de la loi, et non pas par toutes les personnes déjà entendues six mois auparavant. Le procureur pourra toutefois, dès cette entrée en vigueur, communiquer le dossier en application du II de l'article 77-2. Cela permettra une montée en puissance progressive de la réforme sans désorganiser le fonctionnement des parquets.

Source : objet de l'amendement n° 553 rectifié du Gouvernement


La position de votre commission

Votre rapporteur se déclare convaincu par les arguments mis en avant par le Gouvernement et estime également que l'amendement de la commission des lois de l'Assemblée nationale aurait été inapplicable et source d'alourdissements substantiels des procédures pénales conduites par les parquets.

Pour autant, tout en saluant le rétablissement d'une version de l'article 24 plus proche du texte initial, votre rapporteur a constaté, au cours des auditions qu'il a conduites pour la préparation de son rapport, que le dispositif du Gouvernement continuait à susciter des interrogations substantielles de la part des magistrats en matière d'applicabilité, alors même que l'un des objectifs du texte est de simplifier les procédures pénales. Il relève en outre qu'aucune obligation de nature constitutionnelle ou conventionnelle n'oblige à procéder à une telle évolution de notre droit .

En effet, comme le relève le rapport de Jacques Beaume 239 ( * ) , l'exigence du contradictoire doit s'apprécier sur l'ensemble d'une procédure pénale : les droits de la personne mise en cause peuvent ne pas être les mêmes au cours de l'enquête, phase de recueil d'éléments permettant la manifestation de la vérité, et de l'instruction ou du procès si l'action publique est engagée, pendant lequel le contradictoire doit être pleinement respecté.

Par conséquent, sur proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté l' amendement COM-110 dont le but principal est de permettre l'ouverture d'une fenêtre de contradictoire pour les enquêtes préliminaires les plus longues sans remettre en cause leur efficacité. Outre des améliorations rédactionnelles, cet amendement prévoit de :

- porter de six mois à un an le point de départ à partir duquel une personne mise en cause dans une enquête préliminaire peut demander à consulter le dossier de la procédure ;

- limiter les actes susceptibles d'ouvrir le contradictoire aux seules mesures de garde à vue et d'audition libre ;

- permettre au procureur de la République de décider de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (qui impose l'accord de la personne mise en cause) prévue aux articles 495-7 à 495-13 du code de procédure pénale pendant le mois pendant lequel la personne peut formuler des observations ;

- supprimer les dispositions en vertu desquelles la personne ayant déjà fait l'objet d'une garde à vue ou d'une audition libre peut consulter le dossier avant de faire l'objet d'une nouvelle audition ou d'une garde à vue.

Votre commission a adopté l'article 24 ainsi modifié.

Article 25 (supprimé) (art. 100-1, 100-2 et 100-7 du code de procédure pénale) -Encadrement des interceptions de correspondances émises par la voie de télécommunications

L'article 25 vise à préciser les modalités d'interceptions des correspondances émises par la voie des télécommunications, placées sous l'autorité du juge judiciaire, qui recouvrent les écoutes téléphoniques mais également l'interception judiciaire de toute correspondance émise par un système de télécommunication (SMS, email, etc.)


Le régime actuel des interceptions judiciaires de correspondances

À la suite de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) du 24 avril 1990 240 ( * ) , le législateur a adopté la loi du 10 juillet 1991 241 ( * ) qui affirme, dans son article premier, le principe du secret des correspondances auquel il ne peut être porté atteinte que dans les limites fixées par la loi. Deux principales exceptions sont prévues : les interceptions de sécurité (dites administratives) et les interceptions judiciaires.

Le régime des interceptions judiciaires défini par la loi de 1991, aux articles 100 à 100-7 du code de procédure pénale, a confié au seul juge d'instruction la possibilité de prescrire des interceptions « lorsque les nécessités de l'instruction l'exigent », en matière criminelle et correctionnelle, si la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement. La décision est prise pour une durée maximale de quatre mois renouvelable, sans limitation quant au nombre de renouvellements. Cette décision écrite n'est ni motivée ni susceptible d'un recours juridictionnel.

Depuis la loi du 9 mars 2004 242 ( * ) , le juge des libertés et de la détention peut également autoriser des interceptions de correspondances pendant une enquête de flagrance ou préliminaire relative à l'une des infractions dans le cadre des enquêtes de flagrance ou préliminaires relatives à la criminalité organisée. Ces interceptions sont ordonnées pour une durée maximale d'un mois, renouvelable une seule fois.

Si le législateur n'a pas entendu limité la mesure aux seuls suspects, il a néanmoins prévu un régime spécifique pour certaines personnes, à raison de leur mandat ou de leur profession. Ainsi, avant toute interception sur une ligne appartenant à un parlementaire, à un avocat ou à un magistrat, le président de l'assemblée du parlementaire, le bâtonnier et le premier président ou le procureur général de la juridiction du magistrats doivent être respectivement informés.


Le renforcement des garanties encadrant l'interception de correspondances

L'article 25 du présent projet de loi entend renforcer les garanties relatives aux interceptions judiciaires afin de prévenir tout risque d'inconstitutionnalité ou d'inconventionnalité.

À cette fin, il prévoit la motivation de toutes les ordonnances du juge d'instructions, aux fins d'interceptions de correspondances, et encadre la durée totale d'une opération d'interception. Celle-ci ne pourrait excéder un an, ou deux ans dans les affaires de délinquance et de criminalité organisées.

En outre, le présent article entend renforcer la protection des professions protégées en soumettant l'interception de correspondances sur la ligne d'un parlementaire, d'un avocat ou d'un magistrat à l'appréciation du juge des libertés et de la détention, y compris lors d'une instruction.

Votre rapporteur remarque que le Conseil constitutionnel ne s'est jamais prononcé sur la constitutionnalité du régime de droit commun des écoutes et qu'à l'occasion du contrôle a priori de la loi du 9 mars 2004, il a validé le dispositif applicable en matière de criminalité et délinquance organisées. Comme le relève également l'étude d'impact du présent projet de loi 243 ( * ) , aucune décision judiciaire n'a déclaré les dispositions contraires aux exigences conventionnelles. De même, il semble qu'aucun pays de la CEDH n'ait limité la durée totale de l'utilisation d'une technique d'enquête.

De plus, ces dispositions semblent n'offrir aucune garantie supplémentaire par rapport au droit existant, puisqu'en pratique, aucune interception de correspondances ne s'effectue sur la même ligne pendant plus de deux ans, eu égard aux changements de numéros fréquents des délinquants et criminels.

Alors que l'obligation de motivation des ordonnances ne découle d'aucune norme supra-nationale, elle poserait néanmoins d'importantes difficultés dans certaines affaires où il est parfois nécessaire de mettre en place de nombreuses interceptions dans des délais très courts.

Enfin, votre rapporteur s'interroge sur les dispositions soumettant la décision d'une interception de communication concernant une profession protégée à l'examen du juge des libertés et de la détention, plutôt qu'au juge d'instruction. Cette disposition remet en question le positionnement de ce juge, créé par le législateur afin que le « juge de l'enquête », à savoir le juge d'instruction ne soit pas également celui qui statue sur la détention. Or ce dispositif concentrerait à nouveau dans les mains d'un même juge à la fois les autorisations liées à l'enquête et les décisions de détention provisoire. Ce dispositif symbolise, selon les magistrats entendus par votre rapporteur, un acte de défiance à l'égard du juge d'instruction alors même que celui-ci bénéficie de garanties statutaires supérieures 244 ( * ) .

Au regard de ces observations, votre rapporteur a considéré que l'article 25 n'apportait que des garanties superficielles. Dès lors, votre commission a adopté l' amendement COM-111 de son rapporteur supprimant l'article 25.

Votre commission a supprimé l'article 25.

Article 25 bis A (supprimé) (art. 230-44-1 [nouveau] du code de procédure pénale) - Interdiction d'utilisation de la géolocalisation à l'encontre des parlementaires et des membres des professions protégées

L'article 25 bis A a été introduit par les députés à l'initiative du Gouvernement. Dans le prolongement de l'article 2 bis qui prohibe l'usage des techniques spéciales d'enquête en matière de criminalité organisée à l'encontre des parlementaires ou des membres des « professions protégées » (magistrats, avocats et journalistes) à raison de l'exercice du mandat ou de la profession, cet article prévoit qu'aucune mesure de géolocalisation judiciaire régie par les articles 230-32 à 230-44 du code de procédure pénale ne pourrait être ordonnée à l'encontre de ces mêmes personnes à raison de leur mandat ou de leur fonction.

Comme votre rapporteur l'a exposé dans son commentaire de l'article 2 bis , une telle disposition est en partie redondante avec la lettre de l'article 230-34 qui prévoit déjà des protections particulières pour les parlementaires et membres des « professions protégées » en indiquant qu'un dispositif de géolocalisation ne peut être mis en oeuvre si son installation suppose l'introduction dans un bureau ou un domicile d'une personne ayant une telle qualité.

Par conséquent, sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-112 de suppression de cet article.

Votre commission a supprimé l'article 25 bis A .

Article 25 bis (art. 56, 56-5 [nouveau], 57, 57-1, 60-1, 77-1-1, 96, 99-3, 230-34, 695-41, 706-96, 706-96-1 et 706-102-5 du code de procédure pénale) - Perquisitions et saisies dans les locaux d'une juridiction

Issu d'un amendement de la rapporteure de la commission des lois de l'Assemblée nationale, le présent article vise à tirer les conséquences de la décision n° 2015-506 QPC du 4 décembre 2015 par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution certaines dispositions relatives aux modalités de perquisition et de saisie en matière pénale. Ces dispositions faisaient initialement l'objet d'une habilitation à légiférer par ordonnance ( 5° du II de l'article 33 ).

Les régimes de la perquisition

Le régime de la perquisition diffère selon qu'elle est réalisée en enquête de flagrance, lors d'une enquête préliminaire ou dans le cadre de l'instruction.

En enquête de flagrance, aux termes des articles 56 et 57 du code de procédure pénale, les perquisitions peuvent être réalisées d'initiative par les officiers de police judiciaire et sans le consentement de l'occupant.

Lors d'une enquête préliminaire, le régime défini à l'article 76 du code de procédure pénale impose l'assentiment de la personne concernée aux mesures de perquisitions et saisies, sauf autorisation du juge des libertés et de la détention et à l'exception du dispositif dérogatoire propre à la délinquance et à la criminalité organisées.

Enfin, sur le fondement des articles 81, 92 et 94 du même code, le juge d'instruction peut procéder à des perquisitions et des saisies, en présence de la personne concernée, ou à défaut, de ses représentants ou de deux témoins.

Le code de procédure pénale distingue les perquisitions de droit commun de celles effectuées chez une profession protégée.

L'article 56 et 96 du code, qui fondent notamment le cadre général des perquisitions, disposent que les personnes procédant à une perquisition ou à une saisie doivent prendre toutes mesures afin d'assurer « le respect du secret professionnel et des droits de la défense ».

De plus, le code de procédure pénale organise des modalités d'application spécifique des perquisitions pour les parlementaires et membres des professions protégées.

Selon l'article 56-1, les perquisitions réalisées dans un cabinet d'avocat ou à son domicile ne peuvent être effectuées que par « un magistrat et en présence du bâtonnier ou de son délégué, à la suite d'une décision écrite et motivée prise par ce magistrat, qui indique la nature de l'infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, les raisons justifiant la perquisition et l'objet de celle-ci ». En outre, seuls le magistrat et le bâtonnier, ou son délégué, ont le droit de « consulter ou de prendre connaissance des documents ou des objets se trouvant sur les lieux préalablement à leur éventuelle saisie. Aucune saisie ne peut concerner des documents ou des objets relatifs à d'autres infractions que celles mentionnées dans la décision de perquisition ».

Les perquisitions réalisées les locaux d'une entreprise de presse , obéissent également à un régime spécifique prévu à l'article 56-2. Ces opérations ne peuvent être effectuées que « sur décision écrite et motivée du magistrat qui indique la nature de l'infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, ainsi que les raisons justifiant la perquisition et l'objet de celle-ci ». A l'instar du dispositif propre aux avocats, seuls le magistrat et la personne concernée ont « le droit de prendre connaissance des documents ou des objets découverts lors de la perquisition préalablement à leur éventuelle saisie ». Aucune saisie ne peut concerner des documents ou des objets relatifs à d'autres infractions que celles mentionnées dans la décision de perquisition.

En outre, selon l'article 56-3 du code de procédure pénale, les perquisitions réalisées dans le cabinet d'un médecin, d'un notaire ou d'un huissier doivent également être effectuées par un magistrat et en présence de la personne responsable de l'ordre à laquelle la personne appartient. Enfin, un magistrat de la Commission consultative du secret de la défense nationale doit nécessairement être présent lors de perquisitions dans un lieu identifié comme abritant des éléments couverts « par le secret de la défense nationale », selon l'article 56-4 du code.

Si le code de procédure pénale ne détermine pas de règles particulières concernant les perquisitions réalisées dans les locaux des assemblées parlementaires, celles-ci sont soumises à une autorisation préalable du président de l'assemblée concernée.

Il est dès lors surprenant de constater, qu'en dehors de la mention relative aux mesures utiles « afin d'assurer le respect du secret professionnel et les droits de la défense », aucune disposition particulière ne concerne les magistrats.

Cette absence de dispositions spécifiques a conduit le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2015-506 QPC245 ( * ), a déclaré contraires à la Constitution certaines dispositions de l'article 56 et 57 du code de procédure pénale. Le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur avait méconnu sa compétence pour encadrer les atteintes au principe d'indépendance des juridictions, dont découle le respect du secret du délibéré. En raison du caractère général des dispositions censurées, les effets de cette déclaration ont été reportés au 1er octobre 2016.

Le présent article vise à répondre à cette décision du Conseil constitutionnel en créant un nouvel article 56-5 du code de procédure pénale, relatif aux « perquisitions dans les locaux d'une juridiction ou au domicile d'une personne exerçant des fonctions juridictionnelles et qui tendent à la saisie de documents susceptibles d'être couverts par le secret du délibéré », s'inspirant des dispositions existantes relatives aux professions protégées.

A l'instar des dispositifs actuellement prévus pour les professions protégées, les perquisitions dans les locaux d'une juridiction ou au domicile d'une personne exerçant des fonctions jurisprudentielles ne pourront avoir lieu que « sur décision écrite et motivée » d'un magistrat « et en présence du premier président de la cour d'appel ou du premier président de la Cour de cassation ou de son délégué ». Seuls le magistrat, le premier président ou son délégué pourraient consulter ou prendre connaissance des documents ou des objets se trouvant sur les lieux préalablement à leur éventuelle saisie.

Le présent article propose explicitement d'inscrire dans le code de procédure pénale que le magistrat présent veille à ce que « les investigations conduites ne portent pas atteinte à l'indépendance de la justice ».

En outre, à l'instar du dispositif prévu pour les avocats et selon les mêmes modalités, le premier président ou son délégué pourront s'opposer à la saisie d'un document, qui serait alors placé sous scellé fermé et transmis à un juge des libertés et de la détention, compétent pour décider de la saisie éventuelle du document.

Enfin, le II du présent article reporte l'entrée en vigueur du présent article au 1er octobre 2016, compte tenu de l'effet différé de la décision du Conseil constitutionnel.

Votre commission a approuvé l'économie générale de ce dispositif. Elle a toutefois adopté un amendement COM-114 de coordination et un amendement COM-113 de son rapporteur visant à permettre l'intervention du procureur général près la cour d'appel lorsque le magistrat concerné appartiendrait au parquet.

Votre commission a adopté l'article 25 bis ainsi modifié .

Article 26 (art. 179, 186-2, art. 186-4, 186-5 et 194-1 [nouveaux], art. 199, 574-1 et 728-69 du code de procédure pénale) - Sécurisation du contentieux de la détention provisoire

L'article 26 améliore certains aspects procéduraux du contentieux de la détention provisoire dans le prolongement de recommandations émises par la Cour de cassation dans plusieurs de ses rapports annuels et d'une décision du Conseil constitutionnel sur une décision prioritaire de constitutionnalité 246 ( * ) . Ses dispositions figuraient au sein de l'article 23 de la loi « DADUE », déclaré contraire à la Constitution pour absence de lien avec ce texte 247 ( * ) . Cet article n'a fait l'objet que de modifications rédactionnelles de la part de l'Assemblée nationale, introduites en commission des lois à l'initiative de sa rapporteure.


Le maintien en détention provisoire après renvoi devant la juridiction

Selon les termes de l'article 179 du code de procédure pénale, l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel prise par le juge d'instruction, quand il estime que les faits dont il est saisi sont constitutifs d'un délit, met fin à la détention provisoire 248 ( * ) . Toutefois, il peut, dans une ordonnance distincte spécialement motivée 249 ( * ) , maintenir le prévenu en détention provisoire dans l'attente de la comparution du prévenu devant la juridiction.

Le prévenu en détention est immédiatement remis en liberté si le tribunal correctionnel n'a pas commencé à examiner au fond à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date de l'ordonnance de renvoi.

Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut se tenir avant l'expiration de ce délai, le tribunal peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de deux mois. La comparution personnelle du prévenu est de droit si lui-même ou son avocat en fait la demande. Cette décision peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes. Si le prévenu n'a toujours pas été jugé à l'issue de cette nouvelle prolongation, il est remis immédiatement en liberté.

D'après les indications fournies dans l'étude d'impact du projet de loi, la Cour de cassation appelle de ses voeux, de manière régulière dans ses derniers rapports annuels, une clarification législative des délais sanctionnés par la mise en liberté, « notamment en cas de décision de renvoi devant le tribunal correctionnel prise en application de l'article 179 du code de procédure pénale ». La difficulté créée par l'actuelle rédaction de l'article 179 est l'absence de mention des délais applicables dans le cas où l'ordonnance de renvoi est frappée d'appel ou fait l'objet d'un pourvoi en cassation . La Cour de cassation préconise à cet égard la transcription dans les textes de solutions jurisprudentielles qu'elle a dégagées dans ses arrêts du 5 février 2014 250 ( * ) :

- la chambre de l'instruction qui statue sur appel d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel n'est pas soumise aux règles gouvernant la durée de la détention provisoire pendant l'instruction ;

- le délai de comparution devant la juridiction de deux mois ne court pas tant que l'ordonnance n'est pas définitive du fait d'un appel ;

- le tribunal correctionnel n'est pas compétent pour prolonger la détention provisoire de deux mois tant que l'ordonnance n'est pas définitive du fait d'un appel.

Afin que les délais applicables soient fixés avec précision 251 ( * ) , le I de l'article 26 dispose que le délai de deux mois dans lequel le tribunal correctionnel doit commencer à examiner au fond l'affaire, à défaut de quoi le prévenu maintenu en détention provisoire est remis immédiatement en liberté, s'applique à compter de la date de l'ordonnance de renvoi, ce qui constitue le droit actuellement en vigueur, mais également :

- en cas d'appel 252 ( * ) , de l'arrêt de renvoi non frappé de pourvoi, de l'arrêt déclarant l'appel irrecevable, de l'ordonnance de non-admission rendue en application du dernier alinéa de l'article 186 253 ( * ) ou de l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation rejetant le pourvoi ;

- de la date à laquelle le prévenu a été ultérieurement placé en détention provisoire 254 ( * ) .

Par coordination, le II insère deux articles dans le code de procédure pénale ayant respectivement pour but :

- de préciser qu'en cas d'appel sur une ordonnance de renvoi, la chambre de l'instruction statue dans les deux mois de l'ordonnance 255 ( * ) , faute de quoi la personne détenue est remise d'office en liberté (article 186-4) ;

- d'indiquer que les délais relatifs à la durée de détention provisoire résultant des articles 145-1 à 145-3 pendant le temps de l'information judiciaire ne sont plus applicables dès lors que le juge d'instruction a rendu son ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement, y compris en cas d'appel formé contre cette ordonnance (article 186-5).

Enfin, le V de l'article 26 vise à combler une lacune du droit en vigueur dans la mesure où l'article 574-1 du code de procédure pénale prévoit certes que la chambre criminelle de la Cour de cassation saisie d'un pourvoi contre un arrêt portant mise en accusation devant la cour d'assises doit statuer dans les trois mois de la réception du dossier à la Cour mais n'enserre pas l'examen d'un pourvoi formé sur une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel 256 ( * ) dans des délais similaires. Si la jurisprudence de la Cour de cassation a certes admis le principe d'une extension de ce délai aux ordonnances de renvoi 257 ( * ) , il est néanmoins proposé de combler ce silence en précisant explicitement que ce délai de trois mois leur est applicable.


Les délais d'examen de l'ordonnance de renvoi après cassation

L'étude d'impact du projet de loi relève que le rapport annuel pour l'année 2014 de la Cour de cassation mentionne le fait que la chambre criminelle a connu des situations dans lesquelles « des demandes de mise en liberté avaient fait l'objet d'un examen par la juridiction de renvoi, alors qu'un délai important s'était écoulé depuis des arrêts de cassation ».

Dans sa rédaction actuelle, l'article 194 du code de procédure pénale prévoit qu'en matière de détention provisoire, par dérogation au délai de droit commun de deux mois, la chambre de l'instruction doit se prononcer « dans les plus brefs délais et au plus tard dans les dix jours de l'appel lorsqu'il s'agit d'une ordonnance de placement en détention et dans les quinze jours dans les autres cas, faute de quoi la personne concernée est mise d'office en liberté, sauf si des vérifications concernant sa demande ont été ordonnées ou si des circonstances imprévisibles et insurmontables mettent obstacle au jugement de l'affaire dans le délai prévu au présent article ».

L'article 194 ne précise cependant pas les délais qui sont applicables quand la chambre de l'instruction est saisie d'un appel sur renvoi après cassation. La constitutionnalité de cette absence de délai légal a été contestée dans une instance et renvoyée sous la forme d'une question prioritaire par la Cour de cassation.

Dans sa décision 258 ( * ) , le Conseil constitutionnel a considéré que cette absence de délai ne portait pas atteinte à des exigences constitutionnelles mais que « le droit à un recours juridictionnel effectif » imposait que « le juge judiciaire soit tenu de statuer dans les plus brefs délais » et qu'il appartenait « aux autorités judiciaires, sous le contrôle de la Cour de cassation, de veiller au respect de cette exigence, y compris lorsque la chambre de l'instruction statue sur renvoi de la Cour de cassation ». Le Conseil a par conséquent, tout en déclarant l'article 194 conforme à la Constitution, invité le législateur à modifier les dispositions législatives contestées pour préciser ces délais 259 ( * ) .

Le III de l'article 26 répond précisément à cette invitation par l'insertion dans le code de procédure pénale d'un nouvel article 194-1 consacré à cette question. Il dispose qu'en cas de saisine sur renvoi après cassation de la chambre de l'instruction, cette dernière doit statuer dans les délais fixés prévus aux articles 148-2 (dix ou vingt jours), 186-2 (quatre mois), 186-4 (deux mois) et 194 (dix ou quinze jours). Par parallélisme avec le point de départ retenu à l'article 567-2 quand la chambre criminelle est saisie d'un pourvoi en cassation en matière de détention provisoire, ces délais courraient à compter de la réception par le procureur général près la cour d'appel de l'arrêt et du dossier transmis par le procureur général près la Cour de cassation.


La comparution personnelle du prévenu devant la chambre de l'instruction

Dans sa version en vigueur, l'article 199 dispose qu'en matière de détention provisoire, la comparution personnelle de la personne concernée devant la chambre de l'instruction est de droit si celle-ci ou son avocat en fait la demande. Cette requête doit alors, à peine d'irrecevabilité, être présentée en même temps que la déclaration d'appel ou que la demande de mise en liberté adressée à la chambre de l'instruction. Toutefois, le président de cette juridiction peut, en cas d'appel d'une ordonnance rejetant une demande de mise en liberté et si la personne a déjà comparu devant la chambre de l'instruction moins de quatre mois auparavant, refuser la comparution personnelle de l'intéressé par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours. Dans le cas où le prévenu comparaît personnellement, le délai maximum prévu au dernier alinéa de l'article 194 (dix ou quinze jours) est prolongé de cinq jours.

L'étude d'impact du projet de loi souligne que la Cour de cassation a fait valoir dans ses rapports annuels pour 2013 et 2014 que ces dispositions ne prévoient pas la comparution personnelle de droit du prévenu quand le ministère public fait appel d'une décision de refus de placement en détention provisoire ou de remise en liberté. Elle estime en conséquence qu'une telle précision serait de nature à accroître les droits de la défense et le respect du principe du procès équitable.

Le IV remédie à cette lacune en prévoyant une telle faculté de comparaître personnellement devant la chambre de l'instruction qui serait alors reconnue de droit à un prévenu libre en cas d'appel formé par le ministère public.

Il permet également de porter de cinq à dix jours le délai supplémentaire accordé à la chambre de l'instruction pour statuer dans le cas où elle est saisie sur renvoi après cassation 260 ( * ) et si le prévenu en détention demande à comparaître personnellement. L'étude d'impact précise que cet allongement se justifie par « le fait que la chambre de l'instruction de renvoi peut être plus éloignée du lieu de détention que la chambre initialement saisie, et qu'il doit donc être tenu compte des délais nécessaires pour organiser le transfèrement de la personne ».

Sur cet article, votre commission a tout d'abord adopté un amendement COM-115 de son rapporteur visant à préciser que le délai dans lequel la chambre de l'instruction doit statuer sur une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel (deux mois) ou une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises (quatre mois) s'apprécie à compter de la date de déclaration d'appel et non de la date de l'ordonnance elle-même. Puis, elle a adopté un autre amendement COM-116 de son rapporteur afin de clarifier l'organisation des dispositions relatives à la comparution personnelle du prévenu devant la chambre de l'instruction en cas d'appel du parquet. Enfin, elle a adopté l' amendement COM-142 du Gouvernement afin de reporter de deux mois l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 26, afin de permettre aux juridictions de prendre en compte ces nouvelles règles et d'éviter que leur non-respect ne provoque des annulations de procédures et des remises en liberté.

Votre commission a adopté l'article 26 ainsi modifié.

Article 27 (supprimé) (art. L. 1521-18 du code de la défense) - Délai de présentation à l'autorité judiciaire en cas d'arrestation en mer

Le présent article complète l'article L. 1521-18 du code de la défense afin de prévoir la présentation à un juge, dans les plus brefs délais, des personnes faisant l'objet d'une garde à vue à la suite d'une arrestation en mer.

À la suite de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme, le 10 juillet 2008, dans une décision Medvedyev contre France 261 ( * ) , la loi n° 2011-13 du 5 janvier 2011 relative à la lutte contre la piraterie et à l'exercice des pouvoirs de police de l'État en mer a déterminé, dans le code de la défense , un régime sui generis de détention à bord fixant le cadre des mesures de restriction ou de privation de liberté pouvant être prises par l'État français à l'égard de personnes arrêtées en mer. Lorsque des mesures de privation de liberté sont mises à l'oeuvre, à l'instar d'une arrestation de personnes sur des navires arraisonnés et de leur retenue en vue de leur acheminement vers la France, le préfet maritime en est informé ainsi que le procureur de la République compétent. Le juge des libertés et de la détention se prononce sur la prolongation éventuelle de la mesure dans un délai maximal de quarante-huit heures après le début de la mesure de coercition. Si l'article L. 1521-17 du code de la défense prévoit que les mesures de coercition peuvent être poursuivies sur le navire ou au sol, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, l'article L. 1521-18 dispose que « dès leur arrivée sur le sol français, les personnes faisant l'objet de mesures de coercition sont mises à la disposition de l'autorité judiciaire. »

Cet état du droit semble néanmoins en violation avec l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme , dont les paragraphes 1 c) et 3 disposent respectivement que nul ne peut être privé de sa liberté « sauf s'il a été arrêté ou détenu en vue d'être conduit devant l'autorité judiciaire compétente » et que « toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c) du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires » .

Si la CEDH admet que des circonstances exceptionnelles empêchent de présenter « aussitôt » les suspects à un juge, notamment en raison de la distance les séparant du juge et eu égard aux conditions de navigation 262 ( * ) , elle a condamné par deux fois la France 263 ( * ) pour avoir soumis les personnes privées de liberté à une coercition supplémentaire à leur arrivée en France, en violation avec l'exigence de promptitude posé par l'article 5 de la convention : en l'espèce, elle condamne le placement en garde à vue, dès leur arrivée sur le sol français, des personnes suspectées et privées de liberté depuis plusieurs jours, afin de procéder à des mesures d'investigation alors que les individus aurait dû être traduits « sans délai » devant un juge.

Cette jurisprudence désormais affirmée de la CEDH concernant le droit à la sûreté implique, en premier lieu, une traduction rapide « dans un court délai » devant un juge de toute personne privée de liberté 264 ( * ) . Lorsque cette présentation a été différée en raison de « circonstances exceptionnelles », la CEDH est particulièrement vigilante sur l'exigence de présentation immédiate à un juge. En second lieu, elle nécessite une présentation devant un « juge ou autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires ». Or la CEDH ne reconnaît aux magistrats du parquet français ni le caractère d'indépendance, en raison de leurs conditions de nomination, ni le caractère d'impartialité, puisque qu'il est autorité de poursuite 265 ( * ) .

Afin de mettre en cohérence le droit français avec cette jurisprudence de la CEDH, le présent article propose de préciser que les personnes faisant l'objet d'une mesure de garde à vue à leur arrivée sur le sol français sont présentées « dans les plus brefs délais » à un juge d'instruction ou à un juge des libertés et de la détention et qu'elles peuvent demander à être assistées par un avocat. Outre deux amendements rédactionnels de précision adoptés en commission des lois à l'initiative de notre collègue rapporteure Mme Colette Capdevielle, l'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

Votre commission ne partage ni l'analyse du Gouvernement et de l'Assemblée nationale, ni l'analyse de la CEDH quant à l'absence de caractère impartial et indépendant du parquet français.

Dans une décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a d'ailleurs rappelé que « l'autorité judiciaire comprend à la fois les magistrats du siège et du parquet » et qu'est régulière toute privation de liberté placée sous le contrôle de ce magistrat, membre de l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle.

En conséquence, votre commission a adopté un amendement COM-31 de notre collègue André Reichardt afin de supprimer cet article.

Votre commission a supprimé l'article 27 .

Article 27 bis A (art. 706-15 du code de procédure pénale) - Information des victimes en cas de condamnation

L'article 27 bis A a été introduit dans le texte par les députés à la suite de l'adoption de trois amendements identiques respectivement déposés par MM. Coronado, Tourret et Cavard. Ses dispositions constituaient l'article 8 de la loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne (texte dit « DADUE »), dans sa version résultant de la lecture définitive de l'Assemblée nationale le 23 juillet 2015, lequel avait été déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 13 août dernier 266 ( * ) pour absence de lien avec ce texte.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 706-15 du code de procédure pénale dispose que lorsqu'une juridiction condamne l'auteur d'une infraction pénale mentionnée aux articles 706-3 et 706-14 du même code à verser des dommages-intérêts à la partie civile, elle informe cette dernière de la possibilité de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction (CIVI) 267 ( * ) .

L'article 27 bis A complète cet article 706-15 afin que la juridiction de jugement informe également la partie civile, dans les mêmes circonstances, de la possibilité de saisir le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) d'une demande d'aide au recouvrement.

Institué par la loi du 1 er juillet 2008 268 ( * ) , le service d'aide au recouvrement des victimes (SARVI) permet aux victimes qui n'ont pas été réglées volontairement par le condamné des sommes accordées par le tribunal, d'en obtenir rapidement le paiement total ou partiel. Dans ce cas, le SARVI se chargera de récupérer auprès du condamné le complément des sommes dues. Opérationnel depuis le 1 er octobre 2008, le SARVI est géré par le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI).

Les indemnisations versées par le SARVI s'étendent aux victimes qui ont subi de faibles préjudices corporels ou des préjudices matériels qui ne peuvent pas être indemnisées par la CIVI. La victime qui n'a pas été indemnisée par le condamné peut saisir le SARVI sur simple justification de la décision pénale définitive lui accordant des dommages et intérêts. Se substituant au responsable, le SARVI verse à la victime l'intégralité des dommages et intérêts jusqu'à hauteur de 1 000 euros. Au-delà, il règle une avance de 30 % de la somme, dans la limite d'un plafond de 3 000 euros. Si la victime n'a reçu qu'une avance de la part du condamné, le SARVI paie le complément de la somme qui lui reste due, et se charge d'obtenir le recouvrement auprès du condamné.

Le recours au SARVI doit être impérativement formé entre deux mois et un an à compter du jour où la décision statuant sur les dommages et intérêts devient définitive.

Votre commission a adopté l'article 27 bis A sans modification.

Article 27 bis

Cet article, adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale, a été supprimé par les députés lors de son examen en séance publique.

Article 27 ter (art. 41-7 [nouveau], 99, 99-2-1 [nouveau], 802-1 [nouveau] du code de procédure pénale) - Instauration d'un délai pour statuer sur une demande, formulée en cours d'instruction, de restitution d'objets placés sous main de justice et création d'une procédure de « référé-restitution » des objets placés sous main de justice

Cet article, inséré par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur, a pour objet de prévoir un délai au terme duquel le juge d'instruction doit se prononcer sur la demande, faite au cours de l'instruction, de restitution d'objets placés sous main de justice . En second lieu, cet article vise à créer une procédure nouvelle, dénommée « référé-restitution », permettant à une personne de demander la restitution des objets qui ont été saisis dans le cadre d'une enquête ou d'une instruction, selon une procédure d'urgence, lorsque les biens saisis sont susceptibles de lui causer un préjudice économique « irrémédiable ».

- L'instauration d'un délai pour statuer sur la demande de restitution d'objet saisi présentée en cours d'instruction par le propriétaire de l'objet saisi

Le juge d'instruction, au cours de l'instruction, peut décider de la restitution d'objets saisis, en application de l'article 99 du code de procédure pénale.

Il peut le décider d'office, avec l'accord du procureur, être saisi de réquisitions du procureur de la République en ce sens ou être saisi par « toute (...) personne qui prétend avoir un droit sur l'objet ». Dans ce cas, le juge d'instruction rend également sa décision après avis du procureur de la République.

L'ordonnance du juge d'instruction peut être contestée dans les dix jours de sa notification devant la chambre de l'instruction.

Toutefois, l'article 99 ne fixe aucun délai au juge d'instruction pour statuer .

Ainsi, dans le cas où il ne statue pas, toute contestation de ce refus par le demandeur est de fait impossible.

En conséquence, dans sa décision n° 2015-494 QPC 269 ( * ) , le Conseil constitutionnel a estimé que l'absence de délai imposé au juge d'instruction sur la requête des personnes demandant la restitution était contraire à l'article 16 de la DDHC, relatif au droit de propriété : « Considérant que (...) l'impossibilité d'exercer une voie de recours devant la chambre de l'instruction ou toute autre juridiction en l'absence de tout délai déterminé imparti au juge d'instruction pour statuer conduit à ce que la procédure applicable méconnaisse les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 et prive de garanties légales la protection constitutionnelle du droit de propriété (...) » 270 ( * ) .

L'effet de cette censure a été différé au 1 er janvier 2017 .

En conséquence, le présent article instaure un délai d'un mois pour que le juge d'instruction statue, en prévoyant qu'en cas de non-respect de ce délai, le requérant peut saisir directement la chambre de l'instruction de la demande.

Devant la chambre d'instruction, le président de la chambre de l'instruction statuerait par ordonnance dans les huit jours suivant la réception de la demande pour saisir ou non la chambre de l'instruction (art. 186-1 du code de procédure pénale), qui statuerait alors le cas échéant sur la demande dans les deux mois suivant la transmission par le président (art. 194 du code de procédure pénale).

Pour prendre en compte la décision d'annulation différée, cette disposition entrerait en vigueur à compter du 1 er janvier 2017 .

Pour prévenir d'éventuels recours fondés sur le même grief que celui ayant abouti à la décision 2015-494 QPC précitée, le présent article crée un article 802-1 au sein du code de procédure pénale pour prévoir de manière générale qu'en cas d'absence de délai pour statuer pour un magistrat sur une demande présentée, l'absence de réponse du ministère public ou de la juridiction pourrait être contestée dans un délai de deux mois devant l'autorité supérieure. Cette procédure ne serait en tout état de cause applicable que pour les demandes devant faire l'objet de décisions motivées et étant susceptibles de recours .

Cette disposition, qui permettrait donc de prendre en compte de manière générale la décision du Conseil constitutionnel, cèderait devant les dispositions législatives spéciales prévoyant une procédure spécifique pour contester une décision motivée.

Cette disposition générale, certes utile, ne s'appliquerait en l'état de sa rédaction qu'au code de procédure pénale. Or, dans de nombreux codes, ou même dans des dispositions législatives non codifiées, des dispositions relatives aux saisies ou immobilisations existent, sans qu'un délai ne soit fixé au magistrat pour se prononcer. Afin de sécuriser l'ensemble de ces procédures, votre commission a adopté un amendement COM-118 étendant cette disposition à l'ensemble des textes applicables .

- La création d'une procédure de « référé-restitution » pour les seuls biens nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle

Le présent article a également pour objet de créer une procédure permettant d'obtenir en urgence une décision sur une demande de restitution d'objet saisi, lorsque cette saisie causerait au propriétaire de l'objet saisi un préjudice professionnel ou économique « irrémédiable ».

Cette procédure de « référé-restitution » pourrait être mise en oeuvre aussi bien dans le cadre de l'instruction (art. 99-2-1 nouveau) que dans le cadre de l'enquête (art. 41-7 nouveau).

En cas de préjudice professionnel ou économique « irrémédiable », le demandeur pourrait demander la mise en oeuvre de cette procédure, qui imposerait au procureur de la République ou au juge d'instruction de statuer dans un délai de cinq jours suivant la demande.

En cas de refus, le demandeur pourrait saisir le président de la chambre d'instruction, dans un délai de 24 heures suivant la notification du refus, le président disposant alors de huit jours pour statuer sur la demande. Cette demande ne serait pas susceptible de recours.

En cas de non-respect des délais par le magistrat, le demandeur pourrait saisir directement le président de la chambre d'instruction.

En premier lieu, il peut être observé que le Conseil constitutionnel, dans sa décision précitée, n'impose pas de mettre en oeuvre une telle procédure d'urgence, dans la mesure où il n'impose que l'existence d'un recours effectif contre la décision de refus de restitution d'un bien.

En second lieu, la mise en oeuvre de cette procédure, même très encadrée, risque d'encombrer fortement les juridictions, dans la mesure où le nombre d'objets saisis est particulièrement important : à Marseille, près de 30 000 objets sont ainsi saisis annuellement.

La procédure apparaît ainsi contradictoire avec l'objectif de plusieurs articles du texte visant justement à simplifier et à améliorer le régime procédural des saisies, dans un objectif de bonne gestion des scellés.

Il ne semble donc pas opportun d'instaurer un tel instrument.

En conséquence, votre commission a adopté un amendement COM-117 de son rapporteur supprimant ces dispositions.

Votre commission a adopté l'article 27 ter ainsi modifié .

Article 27 quater (art. 61-3 [nouveau], 63-1, 63-2, 63-3-1, 63-4-2, 76-1, 117, 133-1, 135-2, 145-4, 154, 695-17-1[nouveau], 695-27 et 706-88 du code de procédure pénale, art. 323-5 du code des douanes, art. 4 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, art. 64 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et art. 23-1-1 de l'ordonnance n° 92-1147 du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle en matière pénale en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna) - Transposition de la directive dite « C » sur l'accès à l'avocat et la communication avec un tiers

L'article 27 quater résulte de de l'adoption par la commission des lois de l'Assemblée nationale d'un amendement de sa rapporteure, visant à transposer certaines dispositions de la directive 2013/48/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 relative au droit d'accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et des procédures relatives au mandat d'arrêt européen, au droit d'informer un tiers dès la privation de liberté et au droit des personnes privées de liberté de communiquer avec des tiers et avec les autorités consulaires, dite « directive C ». Cet article se substitue à l'habilitation inscrite au 1° du II de l'article 33.


Le droit à l'assistance d'un avocat

Les et du I du présent article visent à permettre aux personnes suspectes mais également aux victimes d'être assistés par un avocat lors des opérations de reconstitution ou d'identification des suspects. Ce droit s'appliquerait au cours des enquêtes de flagrance ainsi qu'au cours des enquêtes préliminaires et permettrait à l'avocat de présenter des observations écrites à l'issue de ces opérations, mais également lors de l'exécution des commissions rogatoires, en application du 10° du I.

Ces dispositions transposent l'article 3 de la directive 2013/48/UE, devant être transposée au plus tard le 27 novembre 2016, qui prévoit « l'exercice effectif du droit à l'assistance d'un avocat ».

Les 7° et 8° du I visent à reconnaître à la personne retenue par les services enquêteurs avant sa présentation devant un magistrat, au cours d'une information judiciaire, ainsi qu'à celle faisant l'objet d'un mandat d'arrêt et arrêtée après le règlement de l'information judiciaire le droit d'être examiné par un médecin et d'être assisté d'un avocat.

Enfin, les 11° et 12° complètent le chapitre IV du titre X du livre quatrième du code de procédure pénale relatif à l'exécution d'un mandat d'arrêt européen afin de faciliter la désignation d'un avocat par une personne arrêtée en exécution d'un mandat d'arrêt et afin de permettre à la personne appréhendée de son droit à « demander à être assistée dans l'État d'émission par un avocat de son choix ou par un avocat commis d'office »


Le droit par le gardé à vue d'informer un tiers

Depuis la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 et en application de l'article 63-2 du code de procédure pénale, la personne gardée à vue a le droit de faire prévenir un proche et son employeur. Lorsque la personne gardée à vue est de nationalité étrangère, elle peut faire contacter les autorités consulaires de son pays. Le 2° du I du présent article mentionne ce droit à l'article 63-1 qui énumère les droits dont bénéficie la personne gardée à vue.

Le II du présent article étend à la procédure de retenue douanière prévue par l'article 323-5 du code des douanes cette possibilité pour la personne étrangère placée en garde à vue de « faire contacter les autorités consulaires de son pays » et « de communiquer le cas échéant avec ces personnes ».

Enfin, par coordination, le III modifie l'article 4 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante afin de prévoir que le report du droit du mineur placé en garde à vue d'informer un tiers de cette mesure ne peut être décidé par le magistrat que « pour permettre le recueil ou la conservation des preuves ou pour prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne, sur décision du procureur de la République ou du juge chargé de l'information prise au regard des circonstances de l'espèce ».


Les conditions permettant de différer le droit d'informer un tiers

Le 3° du I complète par ailleurs l'article 63-2 afin de préciser les conditions dans lesquelles le droit de la personne placée en garde à vue peut être différé.

Actuellement, un officier de police judiciaire peut demander au procureur de la République de ne pas faire droit à cette demande en raison des « nécessités de l'enquête » et il appartenait au procureur de la République de statuer.

Le présent article vise à préciser le critère fondant la décision du procureur. Le droit d'informer un tiers pourrait désormais être refusé ou différé « si cette décision est, au regard des circonstances de l'espèce, indispensable afin de permettre le recueil ou la conservation des preuves ou de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne ». En cas de report de la garde à vue au-delà de 48 heures, seul le juge des libertés et de la détention pourra maintenir le report de cet avis, pour les mêmes motifs, « sauf lorsque l'avis concerne les autorités consulaires ».

L'officier de police judiciaire pourrait autoriser la personne à communiquer seulement « s'il lui apparaît que cette communication n'est pas incompatible » avec les objectifs de la garde à vue et « qu'elle ne risque pas de permettre une infraction pénale ». Les modalités et la durée de la conversation, qui ne pourrait pas excéder trente minutes, seraient décidées par l'officier de police judiciaire.

Le présent article prévoit également que l'avis aux autorités consulaires pour une personne étrangère ne peut pas être refusé au-delà de la quarante-huitième heure de garde à vue.

Le du I encadre également le droit de communication à des tiers des personnes placées en détention provisoire. Désormais, le juge d'instruction ne pourrait refuser l'usage du téléphone à un détenu que par décision écrite et spécialement motivée au regard des nécessités de l'instruction. Après la clôture de l'instruction, le procureur de la République exercerait les attributions du juge d'instruction en matière de communication au tiers.


Le report de la présence de l'avocat lors de la garde à vue

Le du I vise à encadrer les possibilités de reporter la présence de l'avocat lors d'une garde à vue.

Actuellement, l'article 63-4-2 du code de procédure pénale prévoit que la présence de l'avocat peut être reportée « pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête, soit pour permettre le bon déroulement d'investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes ».

Désormais, cette dérogation au droit à l'avocat devrait exiger non pas la prévention « d'une atteinte imminente aux personnes » mais la prévention d'une « atteinte grave et imminente à la vie, à la liberté ou à l'intégrité physique d'une personne ». Cette précision rédactionnelle serait également applicable au régime de la garde à vue en matière de criminalité et de délinquance organisés.


Encadrement des interrogatoires immédiats

Le du I supprime la possibilité pour le juge d'instruction de procéder à des interrogatoires immédiats et à des confrontations en cas de crimes flagrants et non en cas d'urgence résultant « soit de l'état d'un témoin en danger de mort, soit de l'existence d'indices sur le point de disparaître ».

À l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté l'article 27 quater sans modification.

Article 27 quinquies A (nouveau) (art. 63-4-3-1 [nouveau] du code de procédure pénale) - Information de l'avocat en cas de transport du gardé à vue

L'insertion de l'article 27 quinquies A résulte de l'adoption par votre commission de l' amendement COM-58 présenté par notre collègue Esther Benbassa.

Cet article, qui insère un nouvel article 63-4-3-1 dans le code de procédure pénale, vise à prévoir que l'avocat est informé du fait que la personne gardée à vue est transporté sur un autre lieu.

En effet, comme l'indique le rapport de la mission confiée à Jacques Beaume 271 ( * ) , « il n'est pas rare que, lors d'une audition, le mis en cause donne une information sur le lieu d'un butin, d'un cadavre, d'un instrument du crime, d'une cachette de complices, ou sur une circonstance matérielle ayant pu échapper aux diligences des enquêteurs....Cette audition ayant eu lieu en principe avec l'assistance de l'avocat, la découverte en présence du mis en cause d'éléments fournis par lui et péremptoires à son encontre, rend nécessaire, aux yeux de la mission, que ce transport ait lieu avec l'assistance de l'avocat (ou, au moins, celui-ci dûment appelé ) ».

Votre commission a adopté l'article 27 quinquies A ainsi rédigé .

Article 27 quinquies (art. 213 et 215 du code de procédure pénale) - Obligations procédurales applicables à la chambre de l'instruction

L'article 27 quinquies a été inséré par la commission des lois sur proposition de sa rapporteure. Il reprend les dispositions de l'article 24 de la loi « DADUE », censuré par le Conseil constitutionnel pour absence de lien avec ce texte 272 ( * ) .

L'article 213 du code de procédure pénale détermine les conditions dans lesquelles la chambre de l'instruction, saisie en appel d'une ordonnance d'un juge d'instruction, peut prononcer le renvoi de l'affaire devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police si elle estime que les faits constituent un délit ou une contravention. L'article 215 offre la même faculté pour ordonner la mise en accusation en cas de crime.

Les dispositions de l'article 27 quinquies tendent à compléter ces deux articles afin d'obliger la chambre de l'instruction, quand elle renvoie devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police ou met en accusation devant la cour d'assises, de mentionner les éléments à charge et à décharge . Une telle obligation avait été instaurée pour les ordonnances prises par le juge d'instruction avec la loi du 5 mars 2007 273 ( * ) mais n'avait pas été prévue pour les ordonnances de la chambre de l'instruction. Ces dispositions réparent de manière très opportune cette omission.

Votre commission a adopté l'article 27 quinquies sans modification.

Article 27 sexies

Cet article, adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale, a été supprimé par les députés lors de son examen en séance publique.

Article 27 septies (art. 723-15-2 du code de procédure pénale) - Délais d'examen d'un aménagement de peine par le juge de l'application des peines

Inséré par un amendement de la commission des lois présenté par sa rapporteure, l'article 27 septies constitue la reprise des dispositions de l'article 28 de la loi DADUE, censuré par le Conseil pour absence de lien avec ce texte 274 ( * ) .

Les articles 723-15 et 723-15-1 du code de procédure pénale précisent les conditions dans lesquelles le juge de l'application des peines peut, pour certains condamnés libres, prévoir un aménagement ou une conversion de peine « dans la mesure du possible et si leur personnalité et leur situation le permettent ». Avant toute décision, le condamné est convoqué devant le juge de l'application des peines, puis devant le service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) « afin de déterminer les modalités d'exécution de sa peine les mieux adaptées à sa personnalité et à sa situation matérielle, familiale et sociale ».

Toutefois, en application de l'article 723-15-2, si le condamné ne souhaite pas bénéficier d'un aménagement ou d'une conversion de sa peine ou si, au vu du rapport motivé du SPIP, un tel aménagement ou une telle conversion ne lui paraît pas possible, le juge de l'application des peines peut fixer la date d'incarcération.

À défaut de décision du juge de l'application des peines dans les quatre mois suivant la communication de la copie de la décision 275 ( * ) , ainsi que dans les cas prévus par l'article 723-16, le ministère public peut ramener la peine à exécution 276 ( * ) .

L'article 27 septies a pour effet de porter de quatre à six mois le délai au-delà duquel, à défaut de décision du juge de l'application des peines, le parquet peut ramener la peine à exécution. Un tel dispositif vise par conséquent à laisser un délai de réflexion plus long au juge de l'application des peines pour favoriser les alternatives à l'incarcération.

Votre commission a adopté l'article 27 septies sans modification.

Article 27 octies (art. 762 du code de procédure pénale) - Modalités d'incarcération en cas de non-paiement des jours-amende

L'article 27 octies a été introduit par la commission des lois sur proposition de sa rapporteure. Il reprend les dispositions de l'article 29 de la loi « DADUE », censuré par le Conseil constitutionnel pour absence de lien avec ce texte 277 ( * ) .

Ces dispositions complètent l'article 762 du code de procédure pénale afin de permettre à une personne condamnée à une peine de jours-amende 278 ( * ) , et contre qui la mise à exécution de l'emprisonnement a été prononcée pour non-paiement, de prévenir cette mise à exécution ou d'en faire cesser les effets, si l'incarcération a été ordonnée mais n'a pas encore été mise à exécution, en payant l'intégralité de l'amende.

Votre commission a adopté l'article 27 octies sans modification.

Article 27 nonies (nouveau) (art. 230-8, 230-9 et 230-11 du code de procédure pénale) - Effacement des informations inscrites dans le fichier « Traitement d'antécédents judiciaires »

L'insertion de l'article 27 nonies dans le projet de loi résulte de l'adoption par votre commission de l' amendement COM-144 présenté par le Gouvernement.

Dans un arrêt du 18 septembre 2014 279 ( * ) , la Cour européenne des droits de l'homme a constaté la violation par la France de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à raison des règles applicables au fichier STIC 280 ( * ) , remplacé par le fichier TAJ 281 ( * ) , qui ne permettent pas l'effacement des données du fichier en cas de classement sans suite pour un motif autre que l'insuffisance de charges.

Le présent article vise donc à mettre le droit interne en conformité avec la jurisprudence de la CEDH en prévoyant que l'ensemble des décisions de classement sans suite, quel qu'en soit le motif, peut donner lieu à l'effacement des données du fichier par le procureur de la République.

Il précise également, ainsi que le recommande la CEDH, que les décisions du procureur de la République tendant au maintien ou à l'effacement des données sont prises en fonction des finalités du fichier appréciées au regard de la nature et des circonstances de commission de l'infraction et de la personnalité de leur auteur.

Enfin, il institue un recours contre les décisions du procureur de la République et du magistrat-référent, à l'instar de celui prévu pour le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG).

Votre commission a adopté l'article 27 nonies ainsi rédigé.


* 231 Au sein de la section 3 (consacrée aux attributions du procureur de la République) du chapitre II du titre I er du livre I er du code.

* 232 L'article 13 confie pour sa part une mission de surveillance de la police judiciaire au procureur général et une mission de contrôle à la chambre de l'instruction.

* 233 Alors que, par exemple, l'article 39-2 détaille la nature de ses missions en matière de prévention des infractions à la loi pénale.

* 234 Pour mémoire, votre rapporteur rappelle que l'article 31 du code de procédure pénale précise déjà que le ministère public est astreint au respect du principe d'impartialité.

* 235 CEDH, 5 e section, Moulin c. France, 23 novembre 2010, req. n° 37104/06.

* 236 Qui fait l'objet d'un projet de loi constitutionnelle adopté en première lecture par le Sénat le 4 juillet 2013.

* 237 Ces procédures sont également applicables aux décisions de refus d'habilitation de la qualité d'officier de police judiciaire.

* 238 Objet de l'amendement n° 553 rectifié déposé par le Gouvernement en séance publique.

* 239 Rapport sur la procédure pénale, juillet 2014, Jacques Beaume.

* 240 Dans sa décision du 24 avril 1990, Kruslin et Huvig , la CEDH sanctionne la France pour violation de l'article 8 de la CEDH relatif au droit à la vie privée et familiale, non pas en raison de l'absence de texte législatif autorisant les écoutes mais à raison du défaut de précision du droit français, la jurisprudence relative aux écoutes téléphoniques n'ayant pas identifié les personnes susceptibles d'écoutes, les infractions justifiant le recours à ce procédé ou le sort des enregistrements.

* 241 Loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques .

* 242 Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

* 243 Étude d'impact du présent projet de loi, page 109.

* 244 Contrairement au juge des libertés et de la détention, le juge d'instruction est nommé par décret et ne peut être relevé de ses fonctions par les chefs de cour.

* 245 Conseil constitutionnel, décision n° 2015-506 QPC du 4 décembre 2015, M. Gilbert A.

* 246 Conseil constitutionnel, décision n° 2014-446 QPC du 29 janvier 2015, M. Maxime T.

* 247 Conseil constitutionnel, décision n° 2015-719 DC du 13 août 2015, loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne.

* 248 Ou, le cas échéant, au contrôle judiciaire ou à l'assignation à résidence avec surveillance électronique.

* 249 Qui ne peut être fondée que sur une partie des motifs légaux, fixés à l'article 144, autorisant le recours à la détention provisoire.

* 250 Cass. crim., 5 février 2014, n° 13-87.372, Bull. crim n° 36 et 13-87.897, Bull. crim. n° 37.

* 251 À défaut d'une telle précision, seul s'appliquerait le délai raisonnable de l'article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

* 252 Il est à noter que la personne mise en examen ne peut faire appel de l'ordonnance de renvoi, à l'exception des cas prévus à l'article 186-3.

* 253 Si le président de la chambre de l'instruction constate qu'il a été fait appel d'une ordonnance non visée aux alinéas 1 à 3 de l'article 186, il rend d'office une ordonnance de non-admission de l'appel qui n'est pas susceptible de voies de recours. Il en est de même lorsque l'appel a été formé après l'expiration du délai prévu au quatrième alinéa de l'article 186 ou lorsque l'appel est devenu sans objet. Le président de la chambre de l'instruction est également compétent pour constater le désistement de l'appel formé par l'appelant.

* 254 Cas d'une personne en fuite, avec mandat d'arrêt (article 179, alinéa 2), qui est arrêtée et placée en détention provisoire après l'ordonnance de renvoi, soit d'une personne placée sous contrôle judiciaire qui ne respecte pas les obligations de son contrôle et est alors placée en conséquence en détention provisoire.

* 255 Pour les ordonnances de mise en accusation, ce délai est de quatre mois en application de l'article 186-2.

* 256 Les cas de pourvoi en cassation sur les ordonnances de renvoi devant le tribunal correctionnel sont au demeurant limités par les dispositions de l'article 574.

* 257 Cass. crim., 18 août 2010, n° 10-83656, Bull. Crim. n° 125.

* 258 Décision n° 2014-446 QPC précitée.

* 259 Voir le considérant n° 14.

* 260 Situation faisant l'objet de la clarification proposée par le III ci-dessus.

* 261 Par les décisions du 10 juillet 2008, Medvedyev et a. c/ France, puis l'arrêt de grande chambre du 28 mars 2010, Medvedyev c/ France, requête n° 3394/03, la CEDH condamne la France en raison de l'absence de cadre légal régissant les modalités de privation de liberté à bord des navires.

* 262 CEDH, 28 mars 2010, Medvedyev c/ France et CEDH, Rigolopoulois c/ Espagne.

* 263 CEDH, 27 juin 2013, Vassis c/ France, requête n° 62736 et CEDH, 4 décembre 2014, Ali Samatar et Hassan et autres c/ France, requête n° 46695/10.

* 264 CEDH, 29 novembre 1988, Brogan et autres c. Royaume-Uno, requête n° 11209/84.

* 265 Cette condamnation du parquet français, esquissée dans la décision du 10 juillet 2008, Medvedyev et a. c/ France, a été confirmée par la décision du 23 novembre 2010, Moulin c. France, requête n° 37104/06.

* 266 Conseil constitutionnel, décision n° 2015-719 DC du 13 août 2015, loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne.

* 267 Au sein de chaque tribunal de grande instance, la CIVI statue sur les demandes d'indemnisation présentées par les victimes d'infractions ou leurs ayants droit.

* 268 Loi n° 2008-644 du 1 er juillet 2008 créant de nouveaux droits pour les victimes et améliorant l'exécution des peines.

* 269 Décision n° 2015-494 QPC du 16 octobre 2015, Consorts R. [Procédure de restitution, au cours de l'information judiciaire, des objets placés sous main de justice].

* 270 Décision n° 2015-494 QPC du 16 octobre 2015, Consorts R. [Procédure de restitution, au cours de l'information judiciaire, des objets placés sous main de justice].

* 271 Rapport sur la procédure pénale, juillet 2014, Jacques Beaume.

* 272 Décision n° 2015-719 DC précitée.

* 273 Loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale.

* 274 Décision n° 2015-719 DC précitée.

* 275 Il s'agit de la décision de condamnation à une peine de prison, transmise au juge de l'application des peines pour aménagement.

* 276 En cas d'urgence motivée soit par un risque de danger pour les personnes ou les biens établi par la survenance d'un fait nouveau, soit par l'incarcération de la personne dans le cadre d'une autre procédure, soit d'un risque avéré de fuite du condamné, le ministère public peut mettre la peine à exécution en établissement pénitentiaire.

* 277 Décision n° 2015-719 DC précitée.

* 278 Peine définie à l'article 131-5 du code pénal.

* 279 Cour européenne des droits de l'homme, Brunet c/ France, 18 septembre 2014.

* 280 Système de traitement des infractions constatées.

* 281 Traitement d'antécédents judiciaires régi par les articles 230-6 à 230-11 du CPP. Le TAJ résulte de la fusion du STIC et du fichier JUDEX (système judiciaire de documentation et d'exploitation).

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