II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une carte des radars à rééquilibrer, un bilan financier des opérations de remplacement à affiner

L'analyse de leur implantation permet de constater une surreprésentation des radars sur les autoroutes, au détriment, notamment des autres réseaux, et notamment des routes départementales. Les autoroutes notamment, qui représentent environ 2,9 % du réseau routier français (routes communales incluses), concentrent 15 % des radars fixes mais 6,65 % des accidents de la période 2010-2014. Le réseau départemental, qui totalise plus du tiers du réseau routier, rassemble 55 % des radars, mais plus de 66 % des accidents.

Par ailleurs, certains départements s'avèrent sensiblement plus équipés que des départements limitrophes dont les caractéristiques (densité, mortalité, trafic routier...) sont comparables.

Votre rapporteur prône une meilleure répartition des radars ainsi qu'une étude financière plus approfondie, tenant mieux compte de leur amortissement et de leur rentabilité, à l'occasion de leur remplacement, compte tenu du coût unitaire moyen de ces appareils (165 000 euros pour un radar « vitesse moyenne » et 90 000 euros pour un radar fixe « classique »).

2. L'ANTAI, une agence bénéficiant d'un fonds de roulement confortable

D'après la note d'analyse de l'exécution budgétaire 2015 de la Cour des comptes, le fonds de roulement de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI), dont la dotation est portée par les programmes 751 - Radars et 753 - PVé, est estimé, fin 2015, à 30,04 millions d'euros. La Cour des comptes évoque la « situation confortable du fonds de roulement de l'agence », dont le montant représente « le double de son niveau prudentiel » estimé à 14,5 millions d'euros.

En outre, elle souligne que « les montants des subventions reposent manifestement depuis 2011 sur des hypothèses excessives de verbalisation et donc d'activité ».

Dans son rapport de 2013 225 ( * ) , votre rapporteur spécial indiquait déjà que l'ANTAI disposait alors de 16,7 millions euros de fonds de roulement, alors que son niveau optimal était estimé à 14,5 millions, soit « 40 - 45 jours de dépenses de fonctionnement ».

Il concluait que le « confort » budgétaire de l'ANTAI « doit donc amener à une vigilance accrue en matière de gestion des deniers publics afin de minimiser le ratio dépenses de l'Agence/ produit des amendes. »

3. Un pilotage faible des dépenses, notamment pour le permis de conduire

Comme l'a déjà fait plusieurs fois remarquer votre rapporteur spécial, la plupart des dépenses du compte spécial obéissent à des facteurs sur lesquels les responsables de programme ne peuvent influer . C'est le cas notamment des programmes 754 « Collectivités territoriales » et 755 « Désendettement de l'État » dont les crédits sont calculés sur la base d'une formule établie par une loi de finances. Seule la baisse des recettes inscrites sur le compte peut conduire à une diminution de ces crédits.

Concernant le programme 754, la règle de détermination et de répartition de la part du produit des amendes 226 ( * ) imputée en février aux communes et aux groupements de communes a pour effet de décaler la consommation de crédits (en AE et en CP) à l'exercice suivant celui où ils étaient disponibles, ce qui engendre un report de plus de 500 millions d'euros chaque année.

S'agissant du programme 755 227 ( * ) , un décalage entre la programmation en loi de finances initiale et la consommation en 2015, est également constaté. Il provient du fait que le montant consommé en 2015 correspond :

- au versement au budget général du produit des amendes au titre des 10 premiers mois de 2015,

- au versement des recettes des deux derniers mois de 2014.

Compte tenu de ce décalage, le solde des deux derniers mois de 2015, supérieur à 70 millions d'euros, est versé en 2016.

Quant au programme 752 « Fichier national du permis de conduire », l'écart constaté entre la consommation des crédits et le montant voté en loi de finances s'élève en 2015 à 3,71 millions d'euros. Contrairement à 2014, les dépenses constatées, de 25,59 millions d'euros en AE et 26,59 millions d'euros en CP, sont en effet plus élevées que celles inscrites en loi de finances initiale (21,88 millions d'euros en AE=CP).

Deux facteurs contribuent à ce taux élevé :

- le retard accusé par la mise en place de FAETON . Les dysfonctionnements de ce logiciel servant à la gestion du système de points et dont la mise en service a plusieurs fois été reportée, a nécessité une adaptation du système national du permis de conduire (SNPC). En outre, des achats de matériels informatiques, nécessaires à la constitution d'une plateforme de secours, ont dû être réalisés ;

- l'augmentation des frais liés à l'envoi de lettres de retrait ou de restitution de points, dont le nombre a été sous-estimé dans la loi de finances initiale.

4. L'augmentation du nombre de lettres de retrait ou de restitution de points en 2015

Votre rapporteur spécial déplore à nouveau que le programme 752 « Fichier national du permis de conduire » supporte une dépense d'environ 14,88 millions d'euros pour adresser aux conducteurs plus de 16 millions de lettres de retrait ou de restitution de points du permis de conduire. Surtout que, s'agissant en particulier du retrait des points, cet envoi fait double emploi avec l'envoi de l'avis de contravention qui mentionne déjà le nombre de points retirés.

Il déplore également l'augmentation des dépenses liées à ces envois de 3,01 millions d'euros, soit une hausse de plus de 25 %, par rapport à 2014 (11,87 millions d'euros), en raison d'une augmentation du nombre de de lettres adressées en 2015 (16,24 millions, contre 15,3 millions en 2014, soit une hausse de 6,3 %).

5. Un dispositif de suivi de la performance de qualité mais qui doit davantage cibler l'efficacité des moyens mis en oeuvre pour lutter contre la mortalité

Votre rapporteur spécial avait souligné l'an dernier la qualité du dispositif de suivi de la performance du compte spécial. Les indicateurs retenus contribuent tous, en effet, à l'information du citoyen sur la politique de contrôle et de sanction des infractions au code la route . En 2015, la Cour des comptes, dans son analyse d'exécution budgétaire, relève que « le nombre et le contenu des indicateurs ont évolué au cours des dernières années pour plus de clarté et ont gagné en précision » et que « les objectifs de performance attachés aux programmes qui en disposent semblent pertinents ».

Malheureusement, les résultats de ces indicateurs ne sont pas aussi satisfaisants que ne l'est le dispositif relatif à leur mesure.

Par ailleurs, votre rapporteur spécial, compte tenu de la dégradation des statistiques de la sécurité routière, insiste sur la nécessité :

- de renforcer le travail d'évaluation de l'efficacité des instruments mis en oeuvre pour réduire la mortalité, concernant notamment les moyens déployés pour lutter contre les différentes causes d'accident ;

- d'améliorer la qualité des informations liées à l'implantation des radars et à l'accidentalité des zones où ils sont situés, compte tenu des critiques récurrentes dont ils font l'objet.

6. Des résultats qui restent intermédiaires

La vitesse moyenne a augmenté entre 2014 (79,8 km/h) et 2015 (80,1 km/h), soit un niveau supérieur de cible fixée dans le projet annuel de performances 2015 (79,3 km/heure).

Alors que la disponibilité des radars automatiques s'améliore en 2015, tout en restant inférieure aux objectifs fixés, comme cela a été vu, le pourcentage d' avis de contravention émis par rapport au nombre de « flashs » concernant des immatriculations françaises s'améliore quant à lui pour s'établir à 77,1 % (contre 75,6 % en 2014), soit un niveau supérieur à la cible fixée (75 %). Le pourcentage relatif aux immatriculations étrangères relevant d'un pays « partenaire », c'est-à-dire ayant conclu un échange de données d'immatriculation avec la France au titre des infractions routières, enregistre une augmentation encore plus significative, progressant de 76,5 % à 80,9 %.

Déployé sous la responsabilité de l'ANTAI auprès des organismes verbalisateurs (gendarmerie, police, préfecture de police, polices municipales), le procès-verbal électronique (PVé) n'atteint toujours pas ses objectifs bien que les forces de l'ordre soient entièrement équipées depuis 2012 au niveau national. 83,3 % des contraventions émises par les services de l'État l'ont été par le biais du PVé en 2015 alors que la cible avait été fixée à 90 % pour 2015). La diffusion du PVé est toutefois réelle puisqu'en 2013, 62 % des contraventions émises par les services de l'État l'ont été par le biais du PVé, et ce taux n'était que de 30 % en 2012. Il serait intéressant de disposer de chiffres pour les polices municipales, afin de constater la diffusion de l'outil sur l'ensemble du territoire.

En février 2016, 2 715 communes avaient intégré le dispositif dont les 41 communes de plus de 100 000 habitants. Ces communes équipées de PVé ont délivré 15 millions d'avis de contravention contre 13,3 millions en 2014 (soit une hausse de 11 %). En revanche, le nombre de PVé émis par les forces de l'ordre a diminué de 5,4 % par rapport à 2014, cette baisse étant justifiée par la mobilisation des forces de l'ordre sur d'autres priorités.

Il est à noter que l'indicateur relatif à l'évolution des excès de vitesse de plus de 30 km/h et de plus de 40 km/h a été supprimé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015 car les excès de vitesse dont il est question sont désormais très marginaux et ne permettent plus de mesurer les progrès de comportements.


* 225 Rapport d'information n°82 du 16 octobre 2013 (2013-2014)

* 226 Pour mémoire, le programme 754 bénéficie :

- de 170 millions d'euros provenant des amendes forfaitaires « radars » (montant plafonné par la loi de finances initiale),

- de 53 % des amendes forfaitaires hors « radars » et des amendes majorées « radars » ou « hors radars » (hors versement au Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) et au programme 753, au profit de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI)).

Sont imputés sur ce programme en 2015 :

- en février, le paiement des sommes dues aux communes et à leur groupement, au titre des amendes encaissées en 2014, réparties selon les statistiques de verbalisation de 2013, pour un montant de 569,5 millions d'euros,

- en novembre, le montant de 64 millions d'euros (fixé par la loi de finances initiale pour 2015), dû aux départements, au titre des amendes forfaitaires radars, encaissées en 2014.

* 227 Le programme 755 bénéficie de 47 % des amendes forfaitaires (hors « radars ») et des amendes majorées « radars » ou  « hors radars » (hors versement au FIPD et au programme 753, au profit de l'ANTAI).

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