B. LE MAINTIEN D'UNE GESTION EXTRABUDGÉTAIRE ET DE L'EXCLUSION DE LA NORME DE DÉPENSES

La normalisation budgétaire mise en avant par le Gouvernement est, dans le meilleur des cas, extrêmement limitée .

Il semble que les décaissements des opérateurs continueront de ne pas être intégrés à la norme de dépenses , contrairement aux recommandations de la Cour des comptes formulées dans son rapport précité. En effet, la question de la prise en compte des décaissements des opérateurs dans la norme de dépenses n'est évoquée ni dans le rapport spécial de la mission, ni dans le projet de loi de finances pour 2017, ni dans les documents qui lui sont annexés. Il n'est pas illogique qu'aucune réponse n'ait été apportée dans la mesure où le Gouvernement n'a budgété en 2017 aucun des crédits de paiement sur lesquels une telle norme pourrait s'appliquer.

En outre, la gestion des crédits demeurera extrabudgétaire , les modalités de gouvernance des précédents programmes étant, pour l'essentiel, reconduites : les fonds seront mis à disposition d'organismes gestionnaires du programme d'investissements d'avenir qui auront la charge d'effectuer les décaissements au fur et à mesure de l'avancement des projets. Il faut donc distinguer le décaissement prévisionnel, par l'État, de 2 milliards d'euros chaque année, des dépenses versées par les opérateurs aux projets sélectionnés. En d'autres termes, les mouvements retracés par le budget général ne correspondront aucunement à la réalité des dépenses effectuées par les organismes gestionnaires .

Enfin, la mise en réserve ne s'appliquera pas aux crédits du troisième programme d'investissements d'avenir .

Au total, aucune des règles budgétaires de droit commun ne s'appliquera à la mission : la « normalisation » mise en avant par le Gouvernement comme une réponse aux critiques formulées par le Parlement et par la Cour des comptes est inexistante.

C. UNE NOUVELLE MISSION QUI N'INDIQUE PAS CLAIREMENT À QUELLES POLITIQUES PUBLIQUES CONCOURENT LES PROJETS MIS EN oeUVRE

En outre, la question du respect de la loi organique relative aux lois de finances doit être posée . Celle-ci prévoit en effet à son article 7 qu'une mission « comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie ». La seule exception à ce principe, définie dans le même article, est celle des crédits des pouvoirs publics : bien qu'ils ne forment pas à proprement parler une politique publique définie, la loi organique relative aux lois de finances prévoit leur regroupement dans une mission budgétaire.

Or il est clair que les crédits du troisième programme d'investissements d'avenir ne constituent pas une « politique publique définie » , à moins de considérer que l'investissement en faveur de projets innovants suffit à définir une politique publique - une conception iconoclaste qui entraînerait, à n'en pas douter, d'importantes réorganisations de la maquette budgétaire de l'État.

Au contraire, ces crédits concourent à un ensemble divers de politiques publiques , en particulier celles portées par les missions « Recherche et enseignement supérieur » et « Économie » - comme en témoigne d'ailleurs la convergence des dispositifs de performance entre les programmes et les missions précitées. À titre d'exemple, l'objectif 2 « Intégrer et soutenir l'excellence de la recherche et de l'enseignement supérieur » du programme 421 « Soutien des progrès de l'enseignement et de la recherche » est extrêmement proche de l'objectif 3 « Produire des connaissances scientifiques au meilleur niveau international » du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

La reprise d'indicateurs identiques n'est pas forcément choquante si elle traduit la similitude des buts poursuivis par les deux programmes. C'est d'ailleurs cette convergence - qui n'est pas, en elle-même, contraire au principe d'additionnalité - qui explique le choix fait en 2010, lors du lancement du premier programme d'investissements d'avenir, de constituer des programmes PIA à l'intérieur des missions auxquelles concouraient les crédits.

En revanche, le caractère identique des mesures de performance entre les programmes de la mission PIA et d'autres programmes budgétaires est plus surprenant au regard du choix fait de présenter les crédits dans une mission autonome qui est censée regrouper les moyens en faveur d'une « politique publique définie ».

Le choix de réunir les crédits au sein d'une nouvelle mission, sous couvert d'une réponse aux critiques formulées par la Cour des comptes, présente en réalité un avantage plus subtil : celui de ne pas avoir à indiquer clairement les politiques publiques auxquelles se rattachent les projets prévus . Cette indétermination permet au Gouvernement d'afficher un montant de 60 % des crédits en faveur du développement durable, alors qu'une présentation plus claire aurait fait apparaître que les montants réellement consacrés aux enjeux écologiques sont nettement plus faibles (cf. infra) .

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