B. LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT

Cette section transfrontalière, en favorisant un fort report modal, permettra la réduction des émissions de polluants nocifs et des nuisances sonores liées à la forte fréquentation des poids lourds dans les vallées alpines - 2,5 millions de poids lourds traversent chaque année les Alpes entre la France et l'Italie, soit 7 000 par jour en moyenne -, la section transfrontalière étant réalisée à environ 90 % de sa longueur en tunnel. On rappelle, à cet égard, que le train est quatre à cinq fois moins polluant qu'un transport routier.

Les flux routiers entre la France et l'Italie sont en effet concentrés sur deux vallées alpines et sur un axe côtier très urbanisé, ce qui conduit à d'importantes nuisances pour les populations concernées et pose des questions de santé publique. C'est particulièrement le cas dans les Alpes, où la fréquence et la durée des pics de pollution sont en augmentation, comme récemment dans la vallée de Chamonix. Ce projet oeuvrera ainsi en faveur du développement durable dans une zone vulnérable au plan environnemental et sur des écosystèmes alpins reconnus fragiles.

À cet égard, on rappellera que la convention Alpine du 7 novembre 1991 et son protocole des transports du 31 octobre  2000 , que la France a signés, ont fixé les orientations suivantes en matière de transports : « (...) réduire les nuisances et les risques dans le secteur du transport inter alpin et transalpin, de telle sorte qu'ils soient supportables pour les hommes, la faune et la flore ainsi que pour leur cadre de vie et leurs habitats, notamment par un transfert sur la voie ferrée d'une partie croissante du trafic, en particulier du trafic de marchandises, notamment par la création des infrastructures appropriées (...) ».

De ce fait, le projet ferroviaire Lyon-Turin permettra à la France de respecter ses engagements internationaux sur la protection des Alpes et le climat plus généralement, en réduisant les impacts sur les territoires traversés.

C. UN RÉÉQUILIBRAGE DES TRANSPORTS DANS L'ESPACE EUROPÉEN PROFITABLE À LA FRANCE

La liaison ferroviaire Lyon-Turin ne constitue pas un simple axe de communication entre la France et l'Italie mais est reconnue comme un projet ferroviaire prioritaire de l'Union européenne.

La section transfrontalière de cette nouvelle ligne apparaît comme un maillon essentiel du corridor transeuropéen méditerranéen, au sein du réseau central du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) . Ce corridor, autour duquel gravitent 18 % de la population européenne, 200 milliards d'euros d'échanges commerciaux et 17 % du PIB européen, assurera la liaison entre la péninsule ibérique, l'arc méditerranéen, le Nord de l'Italie, la Slovénie et la Hongrie . Il est complété par deux autres corridors desservant l'Italie : le corridor Scandinavie-Méditerranée avec le nouveau tunnel du Brenner et le corridor Rhin-Alpes avec les tunnels du Gothard et du Lötschberg-Simplon. Ce corridor qui, à terme, reliera les principales villes du continent européen, prend toute son importance au regard des travaux actuels de la Chine et de la Russie pour construire la « route de la soie » ferroviaire, même si pour l'instant cette route de la soie ne va pas au-delà de Turin. Votre rapporteur estime que la liaison ferroviaire Lyon-Turin pourrait, une fois réalisée, servir d'entrée ouest au trafic ferroviaire Europe-Asie 13 ( * ) .

On rappelle que le développement des réseaux transeuropéens constitue l'une des actions stratégiques prioritaires de l'Union européenne pour favoriser la compétitivité et la cohésion de ses États membres. Le règlement n° 1315/2013 sur les orientations de l'Union pour le développement du RTE-T définit le réseau concerné, les objectifs et priorités de développement, la notion de projet d'intérêt commun ainsi que les exigences applicables aux infrastructures qui composent le RTE-T. Le règlement établit un réseau « global », au sein duquel il identifie un réseau « central » présentant la plus haute importance stratégique. La mise en oeuvre de ce réseau central s'appuie en particulier sur les « corridors » qui couvrent les principaux flux à grande distance et visent notamment à améliorer les tronçons transfrontaliers. La section Lyon-Turin se situe ainsi au coeur du corridor « Méditerranée ». Le MIE apporte un concours financier pour majeure partie sous forme de subventions, par l'intermédiaire d'appels à propositions, et, de manière plus ciblée, grâce à des instruments financiers innovants, aux actions contribuant à la mise en oeuvre du RTE-T dans les domaines ferroviaire, fluvial, portuaire, maritime, routier, aéroportuaire, des autoroutes de la mer et des plateformes multimodales.

Cette section transfrontalière, qui constituera le seul tunnel ferroviaire transalpin orienté Est-Ouest, devrait permettre à terme un rééquilibrage géostratégique des flux économiques et éviter une « marginalisation » de la France, en favorisant les échanges entre la France et l'Italie - la France est le deuxième client et le deuxième fournisseur de l'Italie derrière l'Allemagne - et plus particulièrement entre le Grand Paris et le Grand Milan. On rappelle que les échanges économiques concernés par les traversées Nord-Sud du massif alpin représentent annuellement 105 milliards d'euros tandis que ceux relatifs aux traversées Est-Ouest s'élèvent seulement à 70 milliards d'euros.

Les aménagements réalisés en Suisse - tunnels ferroviaires du Lötschberg et du Saint-Gothard 14 ( * ) - favorisent les échanges économiques entre l'Allemagne et l'Italie et l'on observe que l'amélioration des traversées du massif alpin en Suisse et en Autriche (tunnel du Brenner en construction) a fait basculer, hors de France, le trafic provenant du Benelux et du Royaume-Uni et à destination de l'Italie.

Votre rapporteur estime que la liaison Lyon-Turin permettra d'éviter que les flux économiques s'écartent de la France et ancrent ainsi davantage l'Italie en Europe centrale, tout en repositionnant la France sur un axe ferroviaire nord-sud Londres-Paris-Lyon-Milan.


* 13 Auditions.

* 14 Ce tunnel est entré en service le 12 décembre 2016.

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