B. LE RECOURS À LA MISSION COMME « RÉSERVE DE BUDGÉTISATION » PLURIANNUELLE

Cette utilisation particulière des plafonds de crédits de la mission « Provisions » en 2009-2011 répondait à une doctrine de recours de la mission comme « réserve centrale de budgétisation ». Cette doctrine devrait être de nouveau être suivie pour la période 2018-2020.

1. Une réserve créée pour la première fois dans le contexte de la crise financière de 2008

Le rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 justifiait la progression du plafond de crédits de la mission « Provisions », afin de favoriser la mise en place d'une « réserve de budgétisation » pluriannuelle , distincte de la « réserve de précaution » qui correspond au gel des crédits et dont le recours est infra-annuel. Ainsi, les crédits inscrits dans cette réserve visent à abonder les missions du budget général pour financer des dépenses non prévues par la loi de programmation au moment de son vote .

Si cette réserve semblait « indispensable dans le cadre d'un budget pluriannuel pour faire face aux aléas de la prévision sur les dépenses inéluctables », dans le contexte macro-économique de la crise financière , elle a disparu dans les lois de programmation suivantes.

D'après le rapport annexé à la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 , la disparition de la réserve de budgétisation s'expliquait par l'application de la règle de progression « zéro valeur hors dette et pensions ». Ce choix d'une « contrainte plus élevée que par le passé » en termes de maîtrise de la dépense devait alors « conduire à donner au principe d'auto-assurance sa pleine portée ».

2. Le retour de la réserve de budgétisation pour la période 2018-2022

La forte hausse du plafond de la mission « Crédits non répartis » pour la nouvelle programmation pluriannuelle correspond donc à la volonté du Gouvernement de revenir à la doctrine d'emploi de la mission comme « réserve de budgétisation ».

Le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 justifie ce retour de la réserve en raison de « l'incapacité de prévoir la totalité des événements susceptibles d'intervenir et la nécessité de pouvoir initier des actions nouvelles en cours de programmation ».

Cependant, s'il prévoit toujours une application prioritaire du principe d'auto-assurance et du recours à la « réserve de précaution », ce même rapport s'avère moins précis que celui qui était annexé à la loi de programmation pour 2009-2012 , lequel précisait notamment que la réserve de budgétisation soit utilisée prioritairement et si nécessaire « pour ajuster les dotations prévues sur des postes de dépense » définis 55 ( * ) , et encadrait son recours sous plusieurs conditions.

Les conditions de recours à la réserve de budgétisation créée en 2009

« a) L'utilisation de la réserve de budgétisation, d'un montant faible (moins de 0,3 % des crédits en 2010) est limitée aux cas de force majeure, qui s'entendent comme les événements :

- qui présentent un caractère irrésistible, extérieur et imprévisible ;

- qui engendrent des besoins budgétaires conduisant à un dépassement significatif du plafond de crédits de la mission.

b) Un abondement des crédits à partir de la réserve de budgétisation ne peut être accordé que lorsque l'impossibilité de financer les dépenses à l'intérieur du plafond de la mission est avérée. Les demandes d'accès à la réserve doivent donc être précisément justifiées, tant en ce qui concerne le caractère imprévisible des dérapages constatés que l'impossibilité d'y faire face par d'autres moyens ; à ce titre, il sera demandé systématiquement à l'appui de chaque demande un plan d'économies ou des gages sur d'autres dépenses.

c) Les éléments de justification devront être adressés directement par le ministre demandeur au ministre chargé du budget, qui les instruira. Le calendrier de prise en compte de ces demandes est déterminé par le ministre chargé du budget.

d) Les abondements de crédits liés à l'utilisation de la réserve de budgétisation demeurent strictement ponctuels et n'emportent pas de conséquence sur les autres années de la programmation.

La part de la réserve de budgétisation qui ne serait pas utilisée pour abonder les missions en PLF sera :

- soit utilisée pour faire face aux aléas de gestion, en complément de la réserve de précaution ;

- soit annulée pour contribuer à la maîtrise des dépenses. »

Source : rapport annexé à la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012

De plus, le fait d'avoir fixé le montant des plafonds de crédits pour 2018-2020 sur la seule considération de la proximité avec les montants de la programmation 2009-2011 semble assez arbitraire . Le budget triennal de 2009-2011 de la mission « Provisions » avaient en effet été déterminé dans le but de tenir compte des aléas en dépense susceptibles d'intervenir dans le contexte de la crise économique et financière de 2008.

Dès lors, la nécessité d'une augmentation aussi marquée de la réserve de budgétisation pour la période 2018-2020 paraît incertaine : si la prudence du Gouvernement doit être saluée, l'emploi qu'il fera de cette réserve appelle la plus grande vigilance du Parlement.


* 55 Il s'agissait des postes suivant : charges d'intérêt de la dette, des contributions de l'État au compte d'affectation spéciale pensions, prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne, la part de la réserve restante pouvant toutefois abonder les plafonds annuels des autres missions.

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